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Chambre territoriale des comptes
de la Polynésie française
______
Le Président
______
Par porteur avec A.R.
N° 2008-0724
Papeete, le 24 novembre 2008
Réf :
ma lettre n° 2008-0580 du 3 octobre 2008.
P.J. :
1
Monsieur le Président,
Par lettre citée en référence, je vous ai communiqué le rapport
d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes concernant la gestion
de l’Office des postes et télécommunications (OPT) pour les exercices 1996 à 2007.
Celui-ci a également été communiqué, pour ce qui les concerne, à vos prédécesseurs et
aux directeurs généraux successifs.
A l’issue du délai d’un mois fixé par l’article L.272-48 du code des
juridictions financières, je vous transmets à nouveau ce rapport, accompagné de
l’unique réponse écrite qu’a fait parvenir à la chambre, dans ce délai, un de vos
prédécesseurs.
A l’occasion de cette transmission, je tiens à vous rappeler que le rapport
d’observations définitives se rapporte à une instruction menée, parallèlement à celle
concernant trois autres organismes, du 18 août 2006, date d’ouverture du contrôle, au
22 août 2007, date de dépôt du rapport d'instruction au greffe de la Chambre, qui a
permis que celle-ci en délibère le 19 septembre 2007. Les éléments postérieurs à cette
dernière date mentionnés dans le rapport ne portent que sur des faits objectifs aux fins
d’actualisation et ne relèvent pas de l’instruction mais de la phase de contradiction.
Cette dernière phase s’est déroulée sur une période allongée, d’une part, du fait de la
consultation électorale du début de l'année 2008, qui faisait obstacle à la transmission
d'observations de la Chambre dans la période préélectorale, et d’autre part, en raison de
l’octroi de délais de réponse supplémentaires sollicités par plusieurs destinataires de
rapports ou d’extraits de rapports.
Les observations que la chambre territoriale des comptes a adoptées et qui
sont mentionnées dans son rapport définitif ont été décidées collégialement sur la base
d’un rapport d’instruction dont la formation délibérante pouvait, partiellement ou
totalement, suivre ou ne pas suivre les propositions. Les pièces probantes sur lesquelles
elles s’appuient sont rassemblées en un dossier consultable, dans le cadre de la phase de
contradiction, par toutes les personnes mises en cause. Les observations ne sauraient
donc en aucune manière être imputées au magistrat chargé de la seule instruction.
En conséquence, toutes approximations mentionnées dans la réponse jointe
au rapport d’observations définitives ou suspicion à l’encontre du rapporteur ne peuvent
qu’être écartées, dès lors que les observations sont le fruit d’une décision collégiale de
la Chambre.
En revanche, les propos tenus dans la réponse jointe engagent la
responsabilité de leur auteur.
En application de l’article L.272-48 du code des juridictions financières,
vous avez l’obligation de communiquer le rapport d’observations de la chambre, auquel
doit être jointe la réponse écrite, au conseil d’administration de l’établissement. Il doit
faire l’objet d’une inscription à l’ordre du jour de sa plus proche réunion, être joint à la
convocation adressée à chacun de ses membres et donner lieu à un débat.
Ce rapport devenant communicable, à toute personne qui en ferait la
demande, dès la première réunion de l’assemblée délibérante postérieure à la
notification du présent courrier, je vous serais obligé de bien vouloir m’indiquer à
quelle date ladite réunion aura eu lieu.
Je vous précise enfin qu'une copie du rapport d'observations est
communiquée au haut-commissaire de la République et au trésorier-payeur général en
application de l'article 16-11 du décret n°83-224 du 22 mars 1983 modifié.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma
considération la plus distinguée.
Le président
Jacques BASSET
Conseiller référendaire
à la Cour des comptes
Monsieur Moana TATARATA
Président du conseil d’administration
de l’Office des Postes et des télécommunications (OPT)
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Séance du 1
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CHAMBRE TERRITORIALE DES COMPTES
DE LA POLYNESIE FRANCAISE
RAPPORT D’OBSERVATIONS
DEFINITIVES
OFFICE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
Exercices 1996 à 2007
RAPPEL DE LA PROCEDURE
Dans le cadre de son programme de travail 2006 et 2007, la chambre territoriale des
comptes de la Polynésie française a procédé au contrôle des comptes 1991 à 2004 de
l’établissement public Office des Postes et Télécommunications (OPT) et à l’examen de la
gestion dudit établissement public pour les exercices 1996 à 2007. La décision d’inscrire
l’OPT au programme de la chambre avait été prise par son président dès 2004 et reconduite en
2005 puis 2006, la charge de travail de la juridiction n’ayant pas permis d’engager ce contrôle
au cours des années précédentes.
Le
président
du
conseil
d’administration
alors
en
exercice,
M. Jean-Alain
FREBAULT, et la directrice générale, Mme Lydia NOUVEAU, ont été informés de ce
contrôle par un courrier en date du 18 août 2006. Les précédents ordonnateurs dont la gestion
a été examinée ont été avisés de l’ouverture du contrôle par une lettre également datée du
18 août 2006.
L’entretien préalable prévu par l’article L.272-45 du code des juridictions financières a
eu lieu le 14 septembre 2007 avec le président du conseil d’administration alors en exercice,
M. Jean-Alain FREBAULT, ainsi que le 5 septembre 2007 avec la directrice générale,
Mme Lydia NOUVEAU. L’entretien préalable avec les anciens présidents du conseil
d’administration concernés a eu lieu : le 7 septembre 2007 avec M. Edouard FRITCH, en
fonctions du 9 novembre 1993 au 24 novembre 2003 ; le 12 septembre 2007 avec M. Geffry
SALMON, en fonctions du 25 novembre 2003 au 22 juin 2004 ; le 11 septembre 2007 avec
M. Alphonse TERIIEROOITERAI, en fonctions du 23 juin 2004 au 2 novembre 2004 puis du
9 mars 2005 au 23 mai 2006 ; le 14 septembre avec M. Temauri FOSTER, en fonctions du
3 novembre 2004 au 8 mars 2005. L’entretien préalable avec les anciens directeurs généraux a
eu lieu
:
le 12 septembre 2007 avec M. Geffry SALMON, en fonctions du 3 janvier 1994 au
25 novembre 2003 ; le 28 août 2007 avec M. Matahi BROTHERS, en fonctions du
26 novembre
2003 au
15
mars
2006 ;
le
11
septembre
2007
avec
M. Alphonse
TERIIEROOITERAI, en fonctions du 24 mars 2006 au 26 avril 2006.
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Séance du 1
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Lors de sa séance du 19 septembre 2007, la chambre avait formulé des observations
provisoires qui ont été adressées en totalité aux ordonnateurs en fonctions le 22 février 2008.
Des extraits ont été adressés aux anciens ordonnateurs et tiers mis en cause, pour les périodes
qui les concernent. Les réponses des différents destinataires sont parvenues à la Chambre dans
le délai imparti.
Après avoir examiné ces réponses écrites et procédé à diverses auditions le 25 août
2008, la chambre, lors de sa séance du 1
er
septembre 2008, a arrêté les observations
définitives reproduites ci-après.
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Séance du 1
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SYNTHESE DES OBSERVATIONS
Succédant à un établissement public de l’Etat, créé en 1956, l’Office des postes et
télécommunications (OPT) a été institué par délibération de l’assemblée territoriale de la
Polynésie française, le 8 mars 1985, pour prendre en compte le transfert au Territoire de la
compétence en matière de postes et télécommunications prévu par la loi statutaire de 1984.
L’OPT, établissement public industriel et commercial, a pour
mission principale
d’assurer
l’exploitation
des
«
domaines
du
courrier,
des
services
financiers,
des
télécommunications et des technologies de l’information et de la communication »
. Il est la
personne publique chargée d’exécuter le service public du courrier et celui des
télécommunications.
1. Une situation financière, jusqu’à présent florissante, qui commence à montrer
les signes avant-coureurs d’un avenir très incertain
La situation patrimoniale de l’OPT apparaît plus que confortable : l’accroissement du
fonds de roulement ne trouve pas son origine dans l’endettement à long terme, les
investissements courants sont financés et aucun projet exceptionnel propre à l’établissement
public n’est annoncé, si ce n’est la décision récente d’installation d’un câble sous-marin dont
le financement ferait largement appel à d’autres contributeurs. Les réserves amassées au fil du
temps, alimentées par un résultat constamment positif, procurent une trésorerie disponible
pour le groupe OPT correspondant peu ou prou à 3 ans de chiffre d’affaires de téléphonie fixe.
L’OPT dispose aussi d’un patrimoine qui, hormis les stocks et créances, se répartit à parts
presque égales en immobilisations nettes (19,5 milliards de F CFP), destinées à son activité
industrielle et commerciale, et en trésorerie disponible (18,5 milliards de F CFP) réservée aux
placements financiers. L’OPT a clairement fait le choix de pallier les défaillances futures de
son activité industrielle et commerciale par l’obtention de produits financiers.
Le résultat de l’OPT, en particulier le résultat d’exploitation, montre les premiers signes
d’un fléchissement, après avoir contribué, depuis de nombreuses années, à l’enrichissement
de l’Office. A l’avenir, l’établissement ne pourra plus compter sur le dynamisme des
contributions des entités contrôlées (Tikiphone, Mana,…) qui s’approchent de la saturation de
leurs marchés et qui devront faire face à la concurrence. Il ne pourra pas non plus s’appuyer
sur le maintien de ses tarifs à un niveau élevé, en dépit des baisses tarifaires déjà intervenues,
puisque les prix dans ce secteur d’activité, suivant la tendance mondiale, devraient continuer
de décroître.
Par ailleurs, le maintien ou le développement de son chiffre d’affaires par la promotion
de nouveaux produits et prestations répondant aux attentes des clients sont à encourager mais
n’en restent pas moins une voie incertaine.
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Séance du 1
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Le degré de vieillissement élevé de ses immobilisations offre certes à l’Office
l’opportunité de réorienter son appareil de production en investissant massivement dans les
technologies qui ouvrent des perspectives économiques d’avenir. Mais en même temps,
l’OPT devra limiter drastiquement ses charges.
2. Une gestion défaillante
Convaincu de sa pérennité, l’Office, dont la gestion manquait de rigueur, a joui d’un
train de vie élevé et a laissé libre cours à des dépenses incontrôlées, parfois totalement
irrégulières.
Ne doutant aucunement de la permanence de ses ressources, dans un secteur qui connaît
un bouleversement sans précédent, l’OPT ne s’est jamais montré sensible à l’évolution de ses
charges, en particulier celles de personnel.
La gestion des ressources humaines nécessite un redressement urgent. L’augmentation
continue et injustifiée des effectifs dont le recrutement, largement basé sur la cooptation, est
contrôlé par le président du conseil d’administration, n’est pas en adéquation avec les besoins
de l’Office. L’établissement n’a pas su, en raison du bilan très mitigé de sa politique de
formation et d’une promotion non liée à la performance, détecter en son sein, ou, eu égard aux
modalités de recrutement, attirer de l’extérieur, les compétences nécessaires à son évolution
dans un contexte plus exigeant. La ressource humaine de l’Office n’a donc pas été remodelée
en adéquation avec les besoins futurs. L’absence de maîtrise des effectifs, combinée à une
politique de rémunération généreuse, a sensiblement impacté l’évolution de la masse salariale.
La part de la richesse créée par l’établissement public servant à rémunérer le travail des
salariés augmente très fortement de 2003 à 2005, passant de 51% à 57%.
La réduction des frais de personnel nécessitera à l’avenir des décisions d’autant plus
difficiles qu’elles seront prises tardivement, après une longue période de facilité.
La faiblesse, l’inadaptation et la sous-utilisation des outils et des procédures, l’absence
de contrôle interne et l’organisation de l’Office, éclatée entre les pôles, la direction générale et
la présidence du conseil d’administration, expliquent en partie la gestion défaillante du
personnel. L’OPT a une connaissance imparfaite voire lacunaire de ses ressources humaines.
Ce n’est que depuis 2007 qu’il est en mesure de commencer à développer une gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), indispensable dans le contexte de
mutation qu’il connaît. La défaillance de la gestion des ressources humaines résulte aussi du
laxisme des dirigeants qui ont largement cédé aux revendications des organisations
syndicales, notamment en cumulant, pour établir la rémunération des employés, les avantages
des agents contractuels et ceux des fonctionnaires.
L’exemple de la rigueur n’est certes pas venu des dirigeants de l’organisme. Leurs
rémunérations, y compris les avantages en nature et l’indemnité irrégulière et opaque de
représentation de l’Office dans les entités contrôlées, sans rapport avec l’importance de leurs
responsabilités, s’est établie dans une fourchette de 3,36 à 4,34 MF CFP (28 157 € à 36 369 €)
par mois.
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La gestion de l’OPT a laissé libre cours à une gabegie fort dispendieuse pour les
finances de l’établissement public.
L’OPT s’est montré très laxiste dans la perception des recettes. Le stock de factures
impayées des clients privés, constitué année après année, n’est passé en dessous du milliard
de F CFP qu’à la faveur d’admissions en non valeur en 2005 pour un montant supérieur à
200 MF CFP. Les créances sur les organismes publics, supérieures à 547 MF CFP en août
2005, n’ont diminué, à la fin de l’année 2006 et à nouveau en septembre 2007, que sous
l’effet de la menace de mise en service restreint des mauvais payeurs. L’Office devra utiliser à
l’avenir tous les moyens de droit à sa disposition pour régler notamment la situation de la
commune de MAHINA qui concentrait, à elle seule en août 2007, plus des 2/3 de la dette des
organismes publics envers l’OPT.
Le mandataire chargé de la régie publicitaire de l’annuaire officiel de la Polynésie
française n’a pas respecté, depuis 2002, les engagements contractuels de reversement du
chiffre d’affaires collecté. L’Office, qui n’a réagi que tardivement en faisant preuve d’une
passivité suspecte dans la défense de ses intérêts, a curieusement signé un nouveau contrat
pour une année qui a été, au mépris des règles d’égalité des candidats et de transparence,
prorogé pour trois années supplémentaires. Ce n’est qu’au cours de l’année 2007 que l’OPT a
cessé de confier la régie publicitaire de l’annuaire à ce groupe.
Le placement des fonds libres en valeurs d’Etat ou garanties par l’Etat à l’Union des
banques suisses, a été opéré par l’OPT pour une valeur globale de plus de
10 milliards de F CFP (83 800 000 €), selon une procédure assouplie dans le cadre de la loi
organique de 2004 qui autorise une gestion dynamique de la trésorerie. L’arrêté 1731 CM a en
effet été modifié dans le sens d’une interprétation large des dispositions statutaires de la
Polynésie française. En se limitant à autoriser les seules modalités de placement, le conseil
des ministres s’est privé du contrôle lié au régime d’autorisation de chaque placement prévu
par la loi statutaire et partant, a laissé la voie libre à une gestion opaque du placement des
fonds libres par le président du conseil d’administration de l’Office. La Chambre a constaté
que les présidents successifs qui ont procédé aux placements n’ont pas été habilités
expressément par le conseil d’administration, lequel a d’ailleurs été tenu à l’écart. Leur
gestion, avec l’aide de leurs conseillers, a été caractérisée par une information insuffisante sur
les caractéristiques et les résultats des placements. Le conseil d’administration, qui comprend
une majorité de ministres, n’a même pas été informé des montants à placer.
L’absence de contrôle sur les dépenses du président du conseil d’administration a causé
un préjudice grave à l’Office notamment en 2005 et 2006. Des dépenses, sans lien avec les
missions ou les intérêts de l’Office, réalisées à la demande ou avec l’accord de M. Emile
VERNAUDON, pour son propre profit et pour celui de quelques proches, évaluées à
114 776 414 F CFP (961 826 €), ont fortement grevé les postes
carburants,
locations de
moyen de transport, honoraires divers, publicité et sponsoring, transports et missions, frais
de réception et de représentation et frais de téléphone GSM
. Déjà constaté, lorsqu’il était
ministre des postes et des télécommunications, à l’occasion d’un précédent contrôle de la
Cour des comptes, qui avait abouti à la mise en cause de la responsabilité personnelle et
pécuniaire du comptable public, le caractère illicite de telles dépenses ne pouvait être ignoré
par les dirigeants de l’OPT. Des conventions ou certificats administratifs de complaisance ont
d’ailleurs été sollicités du président du conseil d’administration pour couvrir ces dépenses
irrégulières.
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L’examen des investissements, qui concernent tant la production de l’Office que son
patrimoine immobilier, fait apparaître des erreurs de gestion, des projets parfois mal définis,
mal maîtrisés ou hasardeux qui se traduisent par de coûteuses dépenses.
Le choix de nouveaux autocommutateurs pour remplacer ceux précédemment installés
dans les archipels éloignés, opéré à l’issue de trois appels d’offres successifs, s’est porté sur
des appareils qui ne peuvent techniquement pas être intégrés au réseau POLYSAT reliant
Tahiti aux îles éloignées. L’Office a commis des erreurs dans le suivi de l’exécution du
contrat qui l’ont engagé financièrement à hauteur de 153 MF CFP en pure perte. Une nouvelle
solution de remplacement des autocommutateurs est tardivement apparue possible.
L’achat du nouveau système d’information (projet Te Vaipuna) a donné lieu à un
gaspillage d’au moins 500 millions de F CFP (4 190 000 €), qui trouve son origine dans le
choix contestable opéré par l’Office, sur le fond comme dans la forme. A la fin de l’année
2007, le système d’information, pourtant déjà entièrement payé depuis fin 2006, n’est
toujours pas opérationnel.
Les tergiversations dans le portage du dossier de défiscalisation des investissements du
nouveau système d’information Te Vaipuna ont rendu ce projet peu transparent pour les
instances décisionnaires. L’agrément de défiscalisation a été obtenu alors que des éléments
semblent n’avoir pas été remis à la direction générale des impôts (DGI). Les investissements
du système d’information de la société TIKIPHONE ont été intégrés à l’investissement global
alors que le nom de la société n’apparaît à aucun moment dans le dossier d’agrément transmis
à la DGI. La condition, sous forme de rétrocession aux consommateurs, posée pour
l’obtention de l’agrément pourrait apparaître réalisée grâce aux baisses tarifaires validées en
2008. Toutefois, le lien de ces mesures tarifaires avec l’investissement défiscalisé est
inexistant puisque le nouveau système d’information n’est toujours pas en service à ce jour.
Le débouclage de la défiscalisation a été réalisé alors que l’OPT paraissait ne pas avoir
informé la DGI que les systèmes n’étaient pas opérationnels
Sans avoir la compétence en matière de communication, l’OPT a acquis le catalogue
OCEANE PRODUCTION aux fins de diffusion de musique et d’images sur internet. Cet
investissement hasardeux, mené pour des motifs, pour partie étrangers à l’intérêt de l’Office, a
été réalisé sans une juste appréciation des risques économiques et financiers. L’opération
présente aujourd’hui un coût de plus de 276 MF CFP (2 312 880 €), alors que l’Office, qui n’a
pas réglé la question des droits de la propriété intellectuelle et artistique, n’est pas en mesure
de tirer le moindre produit d’une exploitation commerciale.
L’OPT, à travers la SCI FARE HINOI, a décidé en 2000 d’acheter un terrain non libre
de droits de plus d’un hectare, dans le but déclaré d’y réaliser un ensemble immobilier pour
ses propres besoins. La conduite erratique de ce dossier tient pour beaucoup à la définition
incertaine du projet initial. Le terrain toujours occupé pour 50% de sa superficie, malgré
plusieurs projets architecturaux, est, sept ans plus tard, dépourvu de toute construction.
L’octroi, en contrepartie de cet achat, de l’avantage de la défiscalisation locale, a été géré de
manière risquée par l’Office.
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3. Une gouvernance déficiente et opaque, sacrifiant le service rendu aux usagers
La gouvernance déficiente de l’OPT résulte d’abord de choix d’organisation et de
fonctionnement malheureux.
Née d’une prise de conscience en 1995, la stratégie d’adaptation de l’Office à
l’évolution mondiale des secteurs postal et des télécommunications a échoué. Elle a cependant
engendré la restructuration de l’organisme, modifié la répartition des pouvoirs en son sein et
assoupli ses règles de fonctionnement, toutes évolutions qui se sont avérées néfastes à une
bonne gouvernance de l’Office.
La rupture avec le modèle de l’administration monolithique n’a pas fondé les
structures d’un organisme dynamique et performant mais a atomisé son organisation, rendant
l’établissement public peu efficace. La perspective de l’ouverture à la concurrence et de
l’externalisation de certaines activités a motivé la concentration des pouvoirs au niveau du
président du conseil d’administration et progressivement placé l’Office hors du contrôle de la
collectivité de la Polynésie française. Le non respect des règles de fonctionnement, dont
certaines ont été allégées pour permettre à l’EPIC d’affronter la concurrence, a fragilisé sa
sécurité juridique. L’OPT a ainsi créé, alors qu’il n’en avait pas la capacité juridique, de
nombreuses « filiales » (TIKIPHONE, MANA, TNT, TNS, ISS…) pour gérer certains de ses
secteurs d’activité. Des carences comptables aggravées par la modification des règles de
gestion budgétaire, financière et comptable de l’OPT à compter de 2005 font apparaître des
constats alarmants quant à la fiabilité des recettes encaissées. Enfin, l’assouplissement de la
réglementation en matière de commande publique applicable à l’OPT a permis des achats
dans des conditions litigieuses.
Cette gouvernance déficiente n’a pas permis de rendre un service au niveau de qualité
attendu par les usagers et à un
prix justifiable.
La situation de monopole de droit dont jouit l’OPT dans le secteur postal et dans le
secteur de la téléphonie fixe et d’absence de concurrence comme fournisseur d’accès internet,
ne l’incite pas à améliorer la qualité de ses services et à abaisser le tarif de ses prestations
pour le ramener à un prix économiquement raisonnable, ayant un lien étroit et vérifié avec les
coûts de production.
Le retard dans la mise en oeuvre d’un câble sous-marin à fibres optiques, largement
imputable à l’OPT en raison de ses réticences à se tourner vers les technologies de l’avenir
pour sauvegarder sa rente de situation monopolistique, a contribué à pénaliser le
développement de la Polynésie française et a empêché l’optimisation des services rendus aux
usagers à un prix compétitif. Cet investissement stratégique pour la Polynésie française
devrait désormais être piloté par cette collectivité en associant toutes les parties prenantes
intéressées, parmi lesquelles l’OPT.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION : PRESENTATION DE L'OFFICE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
..........
10
1 -
UNE SITUATION FINANCIERE, JUSQU’A PRESENT FLORISSANTE, QUI COMMENCE
A MONTRER LES SIGNES AVANT-COUREURS D’UN AVENIR TRES INCERTAIN
...........................
11
1.1.
L
A SITUATION PATRIMONIALE DE L
’OPT
EST PLUS QUE CONFORTABLE
..................................................
12
1.1.1.
Examen du bilan de l’établissement public
........................................................................................
12
1.1.1.1. :
Un actif comportant une trésorerie abondante
.........................................................................................
12
1.1.1.2. :
Un passif composé presque exclusivement de capitaux permanents et de ressources stables
..................
13
1.1.1.3. :
Un fonds de roulement en forte expansion et un besoin en fonds de roulement qui s’accroît
..................
13
1.1.2.
L’examen du bilan consolidé de l’ensemble constitué de l’OPT et des entités contrôlées (ou dans
lesquelles l’OPT a des participations) confirme l’aisance de la situation patrimoniale
...................
13
1.2.
L’
EVOLUTION
DU
RESULTAT
DE
L
’OPT
COMPORTE
LES
SIGNES
AVANT
-
COUREURS
D
UN
DESEQUILIBRE D
EXPLOITATION
.................................................................................................................
14
1.2.1.
Le résultat de l’Office stricto sensu demeure positif mais à un niveau sensiblement réduit depuis
2004
...................................................................................................................................................
14
1.2.2.
Le résultat comptable masque une dégradation de la performance de l’exploitation globale de
l’OPT dans les secteurs d’activités traditionnels
...............................................................................
15
1.2.3.
Le compte de résultat consolidé du « groupe » OPT confirme la dégradation annoncée
..................
17
1.3.
C
ONCLUSIONS SUR LA SITUATION FINANCIERE
..........................................................................................
18
2 -
UNE GESTION DEFAILLANTE
........................................................................................................................
19
2.1.
D
ES DEPENSES DE PERSONNEL MAL MAITRISEES
........................................................................................
19
2.1.1.
La gestion des ressources humaines nécessite un redressement urgent
............................................
19
2.1.1.1. :
L’évolution des effectifs et de la masse salariale ne sont pas maîtrisés
...................................................
19
2.1.1.2. :
Les insuffisances de la gestion qualitative des ressources humaines
.......................................................
21
2.1.1.3. :
La faiblesse des outils de pilotage et le laxisme des dirigeants
................................................................
23
2.1.2.
Les rémunérations et indemnités de toute nature versées aux présidents du conseil
d’administration de l’OPT
.................................................................................................................
26
2.1.2.1. :
Les rémunérations et indemnités des dirigeants successifs de l’OPT
......................................................
27
2.1.2.2. :
La rémunération des représentants de l’OPT dans les sociétés filiales
....................................................
33
2.1.2.3. : Conclusion sur les indemnités et rémunérations des dirigeants de l'OPT
. ................................................
38
2.2
U
NE GESTION DEFAILLANTE LAISSANT LIBRE COURS A LA GABEGIE
.........................................................
40
2.2.1.
La gestion très critiquable des recettes et des fonds disponibles
.......................................................
40
2.2.1.1. :
La gestion des factures impayées
.............................................................................................................
40
2.2.1.2. :
La gestion défaillante des contrats de régie publicitaire de l’annuaire officiel de la Polynésie
française
...................................................................................................................................................
42
2.2.1.3. :
La gestion des placements financiers
.......................................................................................................
47
2.2.2.
Des dépenses incontrôlées sans lien avec les missions de l’OPT
......................................................
53
2.2.2.1. :
Les dépenses de carburant liées à l’usage irrégulier de véhicules de l’OPT
............................................
55
2.2.2.2. :
Les transports et missions
........................................................................................................................
55
2.2.2.3. :
Les locations de véhicules divers
.............................................................................................................
57
2.2.2.4. :
Frais de téléphone portable GSM et autres téléphones
............................................................................
58
2.2.2.5. :
Les frais de représentation du président du conseil d'administration
.......................................................
58
2.2.2.6. :
Frais de publicité presse et « sponsoring »
...............................................................................................
59
2.2.2.7. :
Divers honoraires
.....................................................................................................................................
61
2.2.2.8. :
Divers matériels informatiques et mobiliers de bureaux
..........................................................................
62
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 9 sur 105
2.2.3.
Des investissements hasardeux, mal maîtrisés ou sans projets bien définis
......................................
63
2.2.3.1. :
L’opération de remplacement des autocommutateurs a cumulé plusieurs erreurs, financièrement
lourdes de conséquences pour l’Office
....................................................................................................
63
2.2.3.2. :
Les fautes de gestion qui ont accompagné l’achat du nouveau système d’informations (projet Te
Vaipunaa) ont donné lieu à un gaspillage des fonds de l’OPT
.................................................................
65
2.2.3.3. :
L’investissement hasardeux lié au rachat du catalogue Océane Productions
...........................................
73
2.2.3.4. :
Les tergiversations dans la conduite du dossier FARE HINOI masquent mal l’incertaine définition
du projet initial
.........................................................................................................................................
77
2.2.3.5. :
Le projet de vente à perte en 2007 de biens immobiliers achetés en 2003 à Punaauia
.............................
79
3 -
UNE GOUVERNANCE DEFICIENTE ET OPAQUE SACRIFIANT LE SERVICE RENDU AUX
USAGERS
..............................................................................................................................................................
80
3.1.
U
NE GOUVERNANCE DEFICIENTE
................................................................................................................
80
3.1.1.
La stratégie d’adaptation de l’Office à l’évolution mondiale du secteur postal et du secteur des
télécommunications a échoué
............................................................................................................
80
3.1.1.1. :
Une prise de conscience restée sans effet
................................................................................................
80
3.1.1.2. :
La réorganisation inachevée des structures, n’a pas permis d’améliorer le chiffre d’affaires mais a
complexifié la gestion de l’OPT
..............................................................................................................
81
3.1.1.3. :
L’instabilité des dirigeants n’a pas permis de maintenir une ligne claire quant à la stratégie de
l’OPT
.......................................................................................................................................................
82
3.1.2.
La restructuration de l’OPT et ses effets sur la gestion de l’Office
...................................................
83
3.1.2.1. :
Une nouvelle organisation, en l’état, peu performante
.............................................................................
83
3.1.2.2. :
La concentration des pouvoirs entre les mains du président du conseil d’administration n’était pas
sans risques pour la bonne gouvernance de l’Office
................................................................................
87
3.1.2.3. :
Les risques avérés de l’allègement progressif des contraintes budgétaires et financières
........................
90
3.2.
L
E SERVICE RENDU NE CORRESPOND PAS AU NIVEAU DE QUALITE ATTENDU PAR LES USAGERS
..............
98
3.2.1.
Le prix des prestations en général trop élevé est sans rapport avec la qualité du service rendu
......
98
3.2.1.1 :
La qualité du service postal est largement perfectible
..............................................................................
98
3.2.1.2 :
Le service de la téléphonie fixe est d'un prix élevé
..................................................................................
99
3.2.1.3 :
Le service internet dispose de grandes marges de progrès
.....................................................................
100
3.2.1.4 :
Le service dans les agences de l’OPT est largement perfectible
............................................................
101
3.2.2.
Le retard dans la mise en oeuvre d’un câble sous-marin à fibres optiques pénalise le
développement de la Polynésie et empêche l’optimisation des services rendus aux usagers
..........
101
CONCLUSION
...........................................................................................................................................................
104
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 10 sur 105
Introduction : Présentation de l'office des postes et télécommunications.
Par décret du 3 décembre 1956, un office local des postes et télécommunications
a vu le
jour
en Polynésie française sous la forme d’un établissement public, à caractère industriel et
commercial, doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière. Cet établissement
était chargé de
« l’exploitation du service public des postes et télécommunications» et de
«l’exercice des monopoles postal, télégraphique et téléphonique».
La compétence en matière de postes et télécommunications, qui a relevé de l’Etat
jusqu’en 1984, a progressivement été transférée à la Polynésie française dans le cadre de
l’extension de l’autonomie, à l’exception des liaisons et communications gouvernementales
ou de sécurité. C’est l’assemblée de la Polynésie française
1
qui dispose depuis lors de la
compétence pour fixer le régime local des postes et télécommunications.
La première étape du partage de compétences institué par la loi statutaire de 1984 en
matière de postes et télécommunications a engendré une réforme organique de
l’établissement.
Par délibération n° 85-1023 AT du 8 mars 1985, l’assemblée de la Polynésie
française a créé un établissement public territorial, à caractère industriel et commercial, doté
de la personnalité morale et de l’autonomie financière, dénommé «Office des postes et
télécommunications» (OPT).
L’OPT est la personne publique chargée d’exécuter le service
public du courrier et celui des télécommunications.
Sa mission initiale était d’assurer
l’exploitation des domaines «
du courrier, des services financiers, des télécommunications et
des technologies de l’information et de la communication ».
L’article D.311-1 du code des
postes et télécommunications a été complété en 2003 pour que l’établissement public puisse,
en outre, offrir et développer des activités complémentaires ou connexes à la
mission principale.
Aujourd’hui, l’OPT (hors les entités qui lui sont rattachées) intervient directement dans
les domaines des télécommunications, des services postaux, des services financiers. Il réalise
l’essentiel de son chiffre d’affaires (plus de 85 %) dans le secteur des télécommunications.
Les contraintes d’exploitation, notamment géographiques, commandent pour partie les
moyens à mettre en oeuvre. L’Office dispose d’un réseau de 78 agences
2
réparties sur les
5 archipels, d'espaces conseils, dont certains dédiés aux professionnels, et de centres
techniques. En matière de télécommunications, le réseau polynésien présente des
caractéristiques très spécifiques. Sur une étendue comparable à l’Europe, l’OPT dessert
51 îles hautes et de nombreux atolls peuplés pour certains de quelques dizaines d’habitants
seulement. L’archipel de la Société est desservi par liaison hertzienne, les autres par un réseau
satellite POLYSAT, complété le cas échéant par un réseau hertzien. La liaison avec le reste du
monde est opérée par voie satellitaire.
L’OPT compte plus de 1000 employés dont plus de 90 % sont permanents.
Pour assurer certaines de ses missions, l’établissement public contrôle à 100 % des
sociétés commerciales dans les domaines de la téléphonie mobile (TIKIPHONE
3
), de
l’internet (MANA), des communications extérieures (TNT
4
), des matériels et services
1
Dénommée « Assemblée territoriale » jusqu’en 2004.
2
A la date du 1
er
septembre 2008.
3
Contrôle repris à 100 % en 2008.
4
Contrôlé à 66 % jusqu’en 2007, année durant laquelle l’OPT a pris le contrôle à 100 %.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 11 sur 105
informatiques (ISS), de l’audiovisuel (TNS
5
), ainsi que des sociétés civiles immobilières
(Fare Fenua, Fare Hinoi, Fare Hotu). L’Office détient aussi des participations minoritaires
dans diverses filiales de la banque SOCREDO, les sociétés ODI (édition de chèques), OFINA
(financements) et OSB (monétique et télématique), laquelle contrôle OCA (océanienne des
centres d’appel) à 100%.
L’activité de l’Office est régie pour le secteur postal et les télécommunications par le
code des postes et des télécommunications adopté par l’assemblée délibérante de la Polynésie
française et modifié à plusieurs reprises. Son livre I
er
édicte la réglementation relative aux
activités postales
6
; ses livres II et III sont consacrés respectivement aux
télécommunications
et aux
organismes publics chargés des postes et télécommunications
7
.
Le code définit le monopole postal
8
: le cumul des opérations de relevage, de tri,
d'acheminement et de distribution pour les objets de correspondance, papiers et objets de
publipostage adressés d’un poids inférieur à 2 kilogrammes est exclusivement réservé à
l'exploitant public pour le trafic du régime intérieur mais également pour le trafic des régimes
préférentiel et international, entrant ou sortant. Le monopole porte aussi sur les colis postaux
pour le service inter-îles, préférentiel et international.
Le code définit également le monopole en matière de télécommunication
9
. L’OPT est
seul habilité à établir et à exploiter les réseaux permettant d’offrir au public des services de
télécommunication
.
Le périmètre comprend un service de base, accessible à toute personne
indépendamment de sa catégorie sociale et de sa localisation géographique, comprenant
l’acheminement des communications téléphoniques entre deux points d’abonnement,
l’acheminement gratuit des appels d’urgence, la fourniture de service de renseignements, la
fourniture d’un annuaire imprimé ou électronique, l’installation de cabines téléphoniques en
Polynésie française. Il comporte des services obligatoires comprenant une offre d’accès à des
liaisons louées, de télégraphie, de télex, de service de radiocommunication par bande latérale
unique
relié
aux
réseaux
publics
de
télécommunication.
Il
est
complété
des
télécommunications extérieures de la Polynésie française. Son exécution, confiée à
l’opérateur public, peut en tout ou partie être confiée à des tiers.
Historiquement, l’organisme chargé des postes et des télécommunications exerce une
troisième activité en offrant des services financiers dans les bureaux de poste. Cette dernière
activité obéit aux dispositions du code monétaire et financier.
1 -
Une situation financière, jusqu’à présent florissante, qui commence
à montrer les signes avant-coureurs d’un avenir très incertain
Une remarque liminaire doit être formulée avant d’exposer la situation financière de
l’Office. Corollairement à son choix d’adopter la comptabilité des sociétés commerciales à
compter du 1
er
janvier 2005, l’OPT s’est soumis à la certification de ses comptes.
5
Depuis le 1
er
janvier 2006. Ses activités étaient gérées en interne antérieurement.
6
Délibération initiale du 27 mai 1999 (n°99-90 AT).
7
Délibération initiale du 12 juin 2003 (n° 2003-85 AT).
8
Articles D112-1 et suivants.
9
Articles D212-9 et suivants.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 12 sur 105
Or, pour des raisons exposées infra
10
, la délibération nommant les deux commissaires
aux comptes n’a été prise que le 4 décembre 2006. Leur mission n’a pu commencer qu’en
septembre 2007 sur les comptes 2006. Il en résulte que les comptes des années 2005 et 2006
sur lesquels porte l’analyse qui suit, ne sont pas certifiés (2005) ou ne le sont que sur la base
d’une mission allégée (2006). L’analyse n’est donc pas exempte du risque de reposer sur des
données comptables manquant de fiabilité pour les années 2005 et 2006.
1.1. La situation patrimoniale de l’OPT est plus que confortable
1.1.1.
Examen du bilan de l’établissement public
1.1.1.1. : Un actif comportant une trésorerie abondante
La structure de l’actif du bilan de l’OPT est à peu près stable sur la période 2000-2006.
Les immobilisations représentent un peu moins de 60 % de l’actif, tandis que l’actif
d’exploitation s’établit à environ 10 %. La trésorerie est donc particulièrement abondante
(26,794 milliards de F CFP en 2005), et représente environ 30 % de l’actif.
L’actif immobilisé est constitué à 80% d’immobilisations corporelles (installations
techniques, constructions). Malgré un rythme d’investissement annuel moyen de l’ordre de
2,8 milliards et des durées d’amortissement stables, les immobilisations corporelles
connaissent un vieillissement tendanciel continu. Le degré de vieillissement atteint 68 % en
2006.
TAUX D'AMORTISSEMENT DES IMMOBILISATIONS
En milliers
de F CFP
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
Amortissements
13 915 616
15 485 391
15 617 145
17 268 554
18 672 971
20 502 930
22 641 260
24 264 462
26 556 935
28 174 573
Immobilisations
brutes (1)
25 747 056
27 169 015
26 984 804
29 041 430
31 203 425
34 818 807
37 243 774
39 139 988
40 553 901
41 331 872
54,05%
57,00%
57,87%
59,46%
59,84%
58,88%
60,79%
61,99%
65,49%
68,16%
(1) Hors immobilisations financières
Les immobilisations financières ont progressé de 2000 à 2002 puis sont restées stables.
Elles représentent environ 14 % de l’actif immobilisé. Les participations financières de l’OPT
s’établissent, en 2006, à 5,773 milliards de F CFP et les créances rattachées à ces
participations, sous forme d’avances en compte courant, s’établissent à 790,37 millions
de F CFP et concernent essentiellement les sociétés civiles immobilières (SCI) et Tahiti Nui
Télécommunications (TNT).
L’actif d’exploitation (actif circulant-trésorerie) reste, à l’exception de l’année 2003,
inférieur à 10 milliards de F CFP. Il est essentiellement constitué de créances d’exploitation
dont le cinquième voire le quart sont des créances douteuses (entre 1,1 et 1,450 milliards
de F CFP selon l’année). Les autres créances comprennent notamment une créance sur la
société Yellow on line (groupe 2H) pour environ 500 MF CFP depuis 2004. Ce mandataire de
10
Voir point 3.1.2.3.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 13 sur 105
l’OPT, en sa qualité de régisseur de la publicité sur l’annuaire officiel, n’a pas reversé à
l'office les sommes collectées dans le cadre de son mandat.
La trésorerie de l’OPT, qui s’est accrue de près de 36 % sur la période 2000-2006,
représente
en
2006,
plus
de
29,7 milliards de F CFP,
dont
près
de
11,4 milliards
correspondent à l’encours des titulaires de comptes CCP. Elle est principalement placée, à
hauteur de 10,7 milliards de F CFP, à l’Union des Banques Suisses, sur un produit
personnalisé, Euro Medium Term Notes (EMTN), pour près de 8,4 milliards en bons du
Trésor négociables et pour 5,9 milliards à la SOCREDO sur un compte à terme.
1.1.1.2. : Un passif composé presque exclusivement de capitaux
permanents et de ressources stables
Les capitaux permanents de l’OPT représentent sur la période 2001 à 2006 près de 78 %
du passif. Les capitaux propres représentent plus de 58 % des capitaux permanents.
Cependant le résultat de l’exercice faiblissant au cours de la période, l’accroissement des
réserves se ralentit. Les provisions pour risques et charges, élevées en 2000 et 2001, ont
diminué de 2002 à 2004 et connaissent un regain en 2005. Essentiellement constituées pour
couvrir les risques de retraite ou de change chaque année sur cette période, elles concernent
aussi en 2001 et 2002 puis en 2005, le risque fiscal, lié au projet Fare Hinoi (remise en cause
du crédit d’impôt augmenté des pénalités de retard et des intérêts de retard dans le paiement
de l’impôt).
Les avoirs en dépôt sur les comptes CCP représentent 10 à 12 % du total du passif du
bilan.
Les dettes d’exploitation représentent, selon les années, de 11 à 15 % du passif du bilan.
Force est de constater que l’accroissement régulier des capitaux permanents de l’OPT
permet de financer largement l’actif stable de l’établissement.
1.1.1.3. : Un fonds de roulement en forte expansion et un besoin en
fonds de roulement qui s’accroît
Le fonds de roulement net global est en expansion : + 50% entre 2001 et 2006 et
s’établit à plus de 23,4 milliards de F CFP en 2006. Sur la période, le besoin en fonds de
roulement, quasi nul en 2001, a crû sensiblement et atteint près de 5 milliards en 2006. Sur la
période, les créances douteuses sur les clients et sur le mandataire de l’annuaire de l’OPT
pèsent au total pour un montant allant de 1,6 à 2 milliards de F CFP.
1.1.2.
L’examen du bilan consolidé de l’ensemble constitué de l’OPT et
des
entités
contrôlées
(ou
dans
lesquelles
l’OPT
a
des
participations) confirme l’aisance de la situation patrimoniale
A l’image des constats faits à l’OPT, le fonds de roulement de l’ensemble consolidé est
très important. Le passif du bilan fait apparaître des ressources stables constituées pour
l’essentiel des réserves accumulées au fil du temps.
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septembre 2008 - page 14 sur 105
Le groupe est très faiblement endetté. Sa capacité d’autofinancement (CAF) lui a en
effet permis jusqu’à présent de financer l’investissement sans recours à l’emprunt.
En 2006, des capitaux permanents de près de 50 milliards de F CFP couvrent un actif
immobilisé net d’environ 25 milliards de F CFP qui est composé essentiellement
d’immobilisations corporelles (79%). L’actif d’exploitation (actif circulant hors trésorerie) est
inférieur à 10 milliards de F CFP. Le besoin en fonds de roulement est très faiblement positif
voir même négatif.
Après avoir retranché les avoirs des titulaires de comptes CCP, la trésorerie du groupe
s’établit à plus de 25 milliards de F CFP (au 31 décembre 2006), soit plus de la moitié de
l’actif net de l’ensemble consolidé.
1.2. L’évolution du résultat de l’OPT comporte les signes avant-
coureurs d’un déséquilibre d’exploitation
1.2.1.
Le résultat de l’Office stricto sensu demeure positif mais à un
niveau sensiblement réduit depuis 2004
La production progresse de près de 30 % sur la période 2000-2005. Elle croît de manière
dynamique de 2000 à 2003, ralentit en 2004 et régresse même pour la première fois en 2005.
Elle s’établit à 18,2 milliards de F CFP. L’OPT bénéficie du dynamisme du développement de
l’internet (+ 700 MF CFP) et de l’activité de TNS (+ 950 MF CFP). En 2006, la production de
l’exercice chute de 1,75 milliard de F CFP en raison de l’externalisation de l’activité de TNS
qui a été filialisée à compter du 1
er
janvier 2006. Même en réintégrant l’activité de TNS
11
sortie des comptes de l’OPT (chiffres d’affaires de 1,6 milliard de F CFP
12
), la production de
l’exercice 2006 de l’OPT s’éroderait légèrement.
La contribution des divers secteurs d’activité est inégale. En 2006, l’augmentation du
chiffre d’affaires des activités postales et bancaires n’a que peu d’effet sur l’évolution du
chiffre d’affaires global. Le chiffre d’affaires des activités de téléphonie mobile
(+ 178 MF CFP) et internet (+ 80 MF CFP) progresse mais sans toutefois compenser la chute
de ceux de la téléphonie fixe (- 397 M F CFP) et des liaisons louées (- 131 M F CFP).
La valeur ajoutée progresse plus vite que le chiffre d’affaires sur la période 2000-2005 :
+ 42 % contre + 30 %. En 2006, elle régresse de 1,157 milliard de F CFP principalement en
raison de l’externalisation des activités de TNS.
L’excédent brut d’exploitation (EBE) progresse de 59 % de 2000 à 2005, bien que les
impôts, taxes et versements assimilés se soient alourdis sur la période (+ 565 MF CFP). C’est
en particulier le versement à la collectivité de la Polynésie française de la taxe sur opérateurs
de réseaux (500 MF CFP par an pendant 3 ans) en 2004 et 2005 qui explique la hausse de la
pression fiscale.
11
L’OPT conserve un chiffre d’affaires de 420 millions de F CFP au titre des activités de Tahiti Nui Satellite (TNS) en raison de conventions
de prestation de service.
12
Sur la base du CA 2005 (activité TNS au sein de l’OPT).
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Le résultat d’exploitation progresse de 43,5 % sur la période, de 1,508 à 2,163 milliards
de F CFP, malgré un accroissement des dotations aux amortissements. La croissance des
autres charges, notamment les redevances audiovisuelles versées par l’OPT, droits d’auteurs
et redevances sur logiciels (+ 855 MF CFP) expliquent la déconnection de la croissance du
résultat d’exploitation par rapport à celle de l’EBE. Toutefois, en 2006, du fait de
l’externalisation de TNS, activité globalement excédentaire, le résultat d’exploitation tombe
presque au niveau de l’année 2000 à 1,5 milliard de F CFP.
Le résultat courant avant impôts est tributaire de l’évolution erratique du résultat
financier sur la période dans une fourchette allant de 0,5 à 2,500 milliards de F CFP (sauf en
2003 : 300 MF CFP). Les charges financières varient essentiellement en raison des évolutions
des taux de change qui affectent l’OPT dans ses relations avec les opérateurs de
télécommunications étrangers. Les produits financiers, élevés de 2000 à 2002 avec
l’augmentation du versement de dividendes de Tikiphone, ont régressé en 2003 et 2004 et
retrouvé un nouveau dynamisme depuis 2005 (dividendes de TNT pour 190 millions
de F CFP, placements financiers). Le résultat courant avant impôts a néanmoins reculé en
2006 à 2,4 milliards de F CFP, soit le plus faible résultat depuis 2001, en raison de
l’externalisation de TNS.
Le résultat exceptionnel peut connaître par nature une forte variation d’une année à
l’autre. Sur la période 2000-2006, le résultat exceptionnel a varié de + 2,259 milliards
de F CFP en 2002 à -513 millions de F CFP en 2005. Les charges exceptionnelles pour les
années 2000 et 2005 ont pour cause, notamment, la dotation aux provisions à caractère
exceptionnel relative à l’opération Fare Hinoi.
Les produits exceptionnels correspondent
essentiellement p
our l’exercice
2000 au remboursement de l’impôt 1999 (mise en oeuvre du
projet METU@), pour l’exercice 2002, à l’apport partiel d’actif au capital de la société TNT,
pour l’exercice 2005, à la cession d’immobilisations financières.
Le résultat net constaté sur la période est légèrement supérieur à 2 milliards de 2000 à
2003
13
et connaît un fléchissement en 2004, accentué en 2005, soit une baisse de 39 % sur la
période. En 2006, le regain de 402 MF CFP du résultat net, qui s’établit à 1,636 milliards
de F CFP, est imputable notamment à un produit de 260 MF CFP correspondant à la
restitution de contribution supplémentaire 2002.
Sur la période examinée, l’OPT dispose d’une capacité d’autofinancement stable, autour
de 4 milliards de F CFP. L’année 2002, fait toutefois exception en raison du caractère
exceptionnel du résultat financier.
1.2.2.
Le résultat comptable masque une dégradation de la performance
de l’exploitation globale de l’OPT dans les secteurs d’activités
traditionnels
Le résultat comptable de l’OPT (stricto sensu) est constamment positif sur la période
2000-2006 bien qu’il connaisse une érosion depuis 2004. L’Office enregistre directement
dans ses comptes, jusqu’en 2005 compris, le dynamisme des activités internet et TNS.
Depuis le 1
er
janvier 2006, les activités TNS ont été externalisées. Le secteur « liaisons
louées », qui a connu une croissance dynamique jusqu’en 2005, connaît une régression
13
L’exercice 2002 se caractérise toutefois par une très forte croissance du résultat net, imputable aux opérations financières et
exceptionnelles.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 16 sur 105
sensible en 2006. Ces secteurs d’activité ne permettent pas de compenser la décroissance
continue du secteur téléphonie fixe depuis 2003.
Le dynamisme de l’activité de téléphonie mobile permet en revanche de masquer les
difficultés d’exploitation rencontrées par l’Office. Par conventions réglant leurs relations
financières, l’OPT et la SAS Tikiphone, contrôlée à 100 % par l’Office, ont permis à l’activité
téléphonie mobile de contribuer au chiffre d’affaires de l’établissement public à hauteur de
1,385 milliards de F CFP en 2006.
Mais la contribution de la téléphonie mobile ne s’arrête pas là. L’analyse de la valeur
ajoutée dégagée par l’OPT a montré que les consommations en provenance de Tikiphone ont
baissé, à la suite de la modification, favorable à l’OPT, des conventions réglant les relations
entre les deux entités. Autrement dit, l’OPT a diminué les reversements qu’il effectuait au
profit de Tikiphone. La formation du résultat de l’Office a donc été substantiellement
favorisée par l’allègement, à deux reprises en 2002 et 2005, de ces reversements.
Les mécanismes ainsi mis en place ont occulté la moindre performance de gestion de
l’établissement public. Afin de mieux mesurer la dégradation de l’exploitation de l’Office à
travers l’analyse des soldes intermédiaires de gestion, la chambre a retraité les chiffres du
compte de résultat en neutralisant les relations OPT/Tikiphone au niveau où elles étaient au
début de la période. Sur la période la plus récente, la valeur ajoutée ne progresserait plus que
de 26 % contre 42 %, soit moins vite que la production. Compte tenu de ces retraitements,
l’accroissement de l’EBE n’aurait été que 17 % au lieu de 59 %. Le résultat d’exploitation
enregistrerait une baisse de 46 % et passerait ainsi de 1,5 milliard de F CFP en 2000 à
815 millions de F CFP fin 2005.
Le résultat financier de l’OPT, qui a cru jusqu’en 2002 (2,4 milliards de F CFP), a en
outre bénéficié du versement de dividendes de Tikiphone. Le résultat courant avant impôts a
atteint son summum cette même année. Le versement de ce dividende a été neutralisé par la
chambre, pour mieux apprécier l’évolution du résultat intrinsèque de l’établissement public.
Le retraitement ainsi opéré permet de faire apparaître l’érosion du résultat net généré par
les activités propres à l’Office stricto sensu. En neutralisant les modifications favorables à
l’OPT dans ses relations avec Tikiphone, le résultat courant de l’OPT aurait été déficitaire en
2005.
ANALYSE RETROSPECTIVE DU COMPTE DE RESULTAT (après retraitement)
TABLEAU DES SOLDES INTERMEDIAIRES DE GESTION
en milliers de F CFP
S.I.G.
2000
2001
2002
2003
2004
2005
marge commerciale
-336 836
-132 229
-127 888
-78 800
-165 362
-19 729
production de l'exercice
14 067 355
15 287 335
16 200 529
17 976 607
18 297 708
18 224 848
valeur ajoutée
8 510 159
9 164 522
9 642 055
11 131 990
10 963 175
10 786 726
excédent brut d'exploitation
3 420 269
3 951 845
3 839 019
5 210 603
4 406 644
4 007 934
résultat d'exploitation
1 508 303
1 774 842
1 766 505
2 481 130
1 541 941
815 749
résultat financier
751 602
691 654
480 745
300 760
497 691
814 038
résultat courant avant impôts
2 259 905
2 466 496
2 247 250
2 781 890
2 039 632
1 629 787
résultat exceptionnel
712 220
356 662
2 259 395
593 268
103 006
-512 947
résultat de l'exercice
2 053 858
1 480 564
2 943 093
1 666 219
1 075 073
-113 843
Le résultat de l'année 2002 comptabilise la valorisation dans les comptes de l'OPT de la licence apportée au capital de TNT.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 17 sur 105
1.2.3.
Le compte de résultat consolidé du « groupe » OPT confirme la
dégradation annoncée
L’analyse du résultat consolidé de l’ensemble « OPT et entités rattachées » fait
apparaître une inflexion, à partir de 2003, des soldes intermédiaires de gestion, même si ceux-
ci demeurent encore positifs.
Le chiffre d’affaires net de l’ensemble consolidé en 2005 (24, 167 milliards de F CFP)
affiche ainsi une progression de 37% par rapport à 2000 mais seulement de 9 % depuis 2002.
Le taux de croissance annuel de l’ensemble s’est donc fortement ralenti (5 et 4 % en 2004 et
2005 contre 11 et 14 % en 2001 et 2002).
Le résultat d’exploitation, qui connaissait une croissance à deux chiffres, a atteint un
sommet en 2003, à 5,5 milliards de F CFP. Toujours positif en 2004 et 2005, il a désormais
régressé d’un milliard, à hauteur de 4,6
milliards de F CFP. Depuis 2003, les produits
d’exploitation progressent, en effet, moins vite (+ 10 %) que les charges d’exploitation
(+ 19 %).
Le résultat net consolidé du « groupe OPT », qui avait atteint 5,420 milliards de F CFP
en 2002, décroît fortement depuis, pour s’établir à 1,5 milliards de F CFP en 2005.
Monsieur Geffry SALMON, directeur général puis président du conseil d'administration
de 1994 à 2004, indique partager l’opinion de la Chambre résumée dans le titre de la première
partie mais souhaite préciser que l’origine des difficultés de l’OPT remonte au début des
années 1990. Il indique que le fléchissement du résultat est lié à l’érosion inexorable des
produits de la téléphonie traditionnelle notamment sous l’effet de la concurrence et à la
saturation prochaine des nouveaux marchés explorés, conjuguée aux déficits récurrents des
activités postales et des services financiers. Il estime que sans la décision de diversifier
l’activité de l’OPT, qu’il a prise au bon moment, l’établissement public serait dans une
situation d’exploitation
difficile. La situation patrimoniale florissante de l’OPT résulte du
monopole mais aussi de cette diversification. Il regrette de ne pas avoir pu mener son projet à
terme de séparer les métiers (poste et télécommunications) et constituer deux opérateurs,
comme en métropole, pour faire financer par la collectivité les activités de service public
(poste) et laisser celles des télécommunications, réunies au sein d’une seule entité, relever du
marché et de sa régulation.
Pour son successeur, M. Alphonse TERIIEROOITERAI, la dégradation du résultat de
l'OPT est liée aux mutations technologiques qui génèrent un changement dans le
comportement du client et aux multiples baisses adoptées dans plusieurs domaines. Selon lui,
les décisions qu’il a prises ont contribué à ne pas faire supporter au secteur des
télécommunications, l’intégralité du coût du service public déployé, notamment dans les
archipels, et
à préparer l’OPT à l’arrivée de la concurrence.
Sur ce dernier point, M. Geffry SALMON affirme, au contraire, que l’OPT n’a jamais
été en position de pouvoir affronter les turbulences et exigences des marchés et ne peut
toujours pas, à son sens, l’être en l’état.
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septembre 2008 - page 18 sur 105
1.3. Conclusions sur la situation financière
Fin 2006, la situation patrimoniale de l’OPT apparaissait plus que confortable.
L’accroissement du fonds de roulement ne trouvait pas son origine dans l’endettement à long
terme. Les investissements décidés par l’OPT, y compris ceux du projet Metu@, étaient
financés et aucun projet exceptionnel propre à l’OPT n'était annoncé, la décision d’installation
du câble sous-marin étant postérieure (2008). Au demeurant, le financement de ce projet fera
largement appel à d’autres contributeurs.
Les réserves amassées au fil du temps, alimentées par un résultat constamment positif,
procurent une trésorerie disponible pour le « groupe » OPT correspondant peu ou prou à 3 ans
de chiffre d’affaires de téléphonie fixe ou encore une année et demie de chiffre d’affaires de
téléphonie fixe et mobile réunies et permettent de faire face très aisément aux risques et aux
projets, mais qui ne se sont ni les uns ni les autres réalisés, mis en avant par un ancien
ordonnateur pour justifier leur niveau
.
L’OPT dispose donc désormais d’un patrimoine qui,
hormis les stocks et créances, se répartit à parts presque égales en immobilisations nettes
(19,5 milliards de F CFP), destinées à son activité industrielle et commerciale, et en trésorerie
disponible (18,5 milliards de F CFP) réservée à son activité de placements financiers. L’OPT
a clairement fait le choix, à la fin de l’année 2004, de pallier les défaillances futures de son
activité industrielle et commerciale par l’obtention accrue de produits financiers.
La réorientation de l’appareil industriel et commercial, en adéquation avec les nouveaux
modèles économiques qui se dessinent dans les secteurs des télécommunications et de la
poste, apparaît pourtant nécessaire. Cela est confirmé par le fléchissement du résultat de
l’OPT, en particulier du résultat d’exploitation, annonçant des lendemains difficiles si une
inversion de la tendance n’intervient pas rapidement. Les contributions, par différents
moyens, des entités contrôlées par l’OPT (principalement Tikiphone) au résultat de l’Office
atteignent leurs limites.
Le fléchissement continu du résultat net de l’ensemble du « groupe » OPT ne laisse plus
d’autres solutions à l’établissement public, compte tenu du niveau élevé de ses tarifs, en dépit
des baisses tarifaires déjà intervenues, que de limiter drastiquement ses charges et développer
de nouvelles prestations, sources potentielles de revenus nouveaux.
La réduction des charges nécessitera, à l’avenir, des décisions d’autant plus difficiles
qu’elles seront prises tardivement. La mise en place d’une comptabilité analytique précise,
reposant sur des clés de répartition des prestations internes réalistes, permettrait d’identifier
clairement le coût de chaque secteur d’activité et d’en tirer les conséquences à divers titres.
Le maintien ou l’accroissement des revenus, malgré une baisse des tarifs inéluctable
suivant la tendance mondiale, auront d’autant plus de chances de se réaliser que le lancement
de nouvelles prestations répondra aux attentes des clients. Le degré de vieillissement élevé
des immobilisations de l’OPT va contraindre l’Office à investir massivement mais,
simultanément, offre l’opportunité de réorienter son appareil de production vers les
technologies ouvrant des perspectives économiques d’avenir. Un plan d’investissement propre
à l’OPT, cohérent avec les orientations économiques de la Polynésie française, devrait être
élaboré en complément d’investissements structurants décidés par la collectivité d’outre-mer.
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er
septembre 2008 - page 19 sur 105
En réponse aux observations provisoires de la Chambre, la directrice générale,
Mme NOUVEAU et le président du conseil d’administration, M. BARRAL, alors en
fonctions, s'étaient engagés à procéder à la redéfinition d’une stratégie de groupe, à la
commercialisation de nouveaux produits et services
afin d’accroître les revenus et la
rentabilité, mais aussi à réduire les charges et à rechercher des synergies entre les différentes
entités du groupe. La finalisation et la fiabilisation du chantier « comptabilité analytique »
étaient aussi annoncées. La chambre ne peut qu'encourager les dirigeants de l'OPT à
poursuivre la réflexion engagée et mettre en oeuvre les actions nécessaires pour faire face aux
défis annoncés.
2 -
Une gestion défaillante
Convaincu de sa pérennité, l’Office, dont la gestion manquait de rigueur, a joui d’un train
de vie élevé et a laissé libre cours à des dépenses incontrôlées, parfois totalement irrégulières.
2.1. Des dépenses de personnel mal maîtrisées
L’OPT ne s’est jamais montré sensible à l’évolution de ses charges, en particulier celle
de personnel. L’examen mené par la chambre montre que le pilotage des ressources humaines
est assez largement défaillant, que la gestion des effectifs tant quantitative que qualitative est
mal maîtrisée, ce qui se traduit par une évolution défavorable de la masse salariale.
L’exemple de la rigueur n’est pas venu des dirigeants de l’organisme : l’augmentation
de leur rémunération, qui a atteint un niveau incomparable dans les organismes publics de la
Polynésie française, ne les a pas mis en situation de résister aux demandes d’embauches et
d’avantages salariaux.
2.1.1.
La gestion des ressources humaines nécessite un redressement
urgent
2.1.1.1. : L’évolution des effectifs et de la masse salariale ne sont pas
maîtrisés
2.1.1.1.1. L’augmentation continue et injustifiée des effectifs
Déjà doté d’un effectif nombreux que ni les contraintes géographiques spécifiques à la
Polynésie française, ni l’activité déployée et ni même la qualité du service rendu, très inégale,
ne peuvent totalement justifier, l’OPT a vu le nombre de ses agents augmenter de 132 sur la
période 2000-2006, soit une progression de près de 16%. Cette augmentation a été
particulièrement forte en 2003 et 2005. L’effectif permanent de l’Office atteignait 968 agents
fin 2006.
La gestion quantitative des effectifs est mal maîtrisée. De manière générale, les
recrutements, pour nombre d’entre eux sans qualification particulière, ne correspondent pas à
la mise en place d’une politique identifiée de l’organisme public. L’importance numérique des
recrutements décidés au fil de l’eau en 2005 n’a été constatée qu’a posteriori. La moindre
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septembre 2008 - page 20 sur 105
vacance donnait lieu au recrutement en CDD sans que des redéploiements soient envisagés
afin de mieux s’adapter aux réels besoins de l’Office. Si une politique visant à réduire
l’important absentéisme a pu être mise en oeuvre, force est de constater qu’elle n’a pas eu
d’effets tangibles. Les surnombres fréquents finissent par être régularisés par une
augmentation des postes budgétaires sans que l’adéquation entre la charge de travail et les
effectifs réels soit vérifiée. Dans quelques cas, les recrutements ont correspondu au
renforcement des agences et du centre de tri du courrier.
La restructuration de l’Office en pôles, en 2002-2003, a généré de nombreux
recrutements et a entraîné des reclassements internes qui ont abouti à une forte progression
des effectifs de l’équipe dirigeante (+ 71 %). Cette situation résulte directement de la création
d’un nouvel échelon administration autour du président du conseil d’administration ainsi que
de l’organisation des pôles en structure de gestion faisant parfois double emploi avec les
services préexistants de la direction générale, la pratique s'étant substantiellement écartée du
schéma de gestion des ressources humaines.
Le dispositif de départ anticipé mis en oeuvre à cette époque n’a pas permis de réduire
les effectifs et de réorienter les embauches nécessaires dans les secteurs d’avenir. Les départs,
qui auraient dû générer des économies, ont systématiquement donné lieu à des remplacements
et ont de ce fait rendu cette politique fort coûteuse pour l’établissement public. Pour ces
raisons, le conseil d'administration a renoncé en 2007 à pérenniser ce dispositif.
2.1.1.1.2. La masse salariale subit le double effet de l’accroissement des
effectifs et d’une politique de rémunération généreuse
Sur la période examinée, les charges de personnel sont passées de 5,043 milliards
de F CFP (2001) à près de 6,5 milliards de F CFP (2006) soit 30 % d’augmentation. Le
budget initial de 2007 prévoit même que ces dépenses pourraient atteindre 6,9 milliards
de F CFP. Depuis 2003, la progression de 8,5% de la masse salariale brute contraste avec
l’orientation défavorable des soldes intermédiaires de gestion redressés
14
. Ainsi, le ratio
« charges de personnel sur valeur ajoutée » augmente très fortement de 2003 à 2005, passant
de 51% à 57%.
Le poids des primes et indemnités diverses dans les dépenses consacrées à la
rémunération des personnels permanents a crû durant la période examinée de 12 % à 18 %.
De 2003 à 2006, le régime indemnitaire des agents de l'Office a été quasiment doublé pour
atteindre 878 millions de F CFP. Ce sont les primes de fin d'année, avec la mise en place du
treizième mois, et les « primes diverses », globalement multipliées par 3 sur la période, qui
affichent les plus fortes revalorisations.
Les rémunérations
15
versées à l’OPT sont globalement confortables et surpassent de
manière globale celles versées dans les autres établissements publics ou dans l’administration
territoriale. Ainsi, une analyse des rémunérations versées en 2005 fait apparaître que
seulement 52 agents percevaient moins de 200 000 F CFP par mois, 719 entre 200 000 et
500 000 F CFP et 131 plus de 500 000 F CFP par mois. Les 100 premières rémunérations, soit
un peu plus de 11% de l’effectif, perçoivent 20 % de la masse salariale totale, tandis que les
100 dernières rémunérations (11% de l’effectif) en perçoivent environ 5 %.
14
Voir situation financière. Ces redressements concernent essentiellement des décisions modifiant les relations avec Tikiphone et
ponctuellement avec TNT (2002).
15
Annexe 1.
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septembre 2008 - page 21 sur 105
En 2005, la dispersion des rémunérations est considérable puisqu’elle varie de 1 à 15
entre la plus basse (135 788 F CFP) et la plus haute (2,2 MF CFP/mois). Le salaire médian se
situe à 380 000 F CFP/mois contre 300 000 F CFP au Port Autonome
16
et le salaire moyen à
près de 400 000 F CFP/mois contre 354 000 F CFP au Port Autonome et seulement
279 000 F CFP dans l’administration publique selon l’ISPF. Dans la catégorie cadre
(113 salariés), le salaire médian à l’OPT est de 554 000 F CFP et le salaire moyen de
627 000 F CFP. Chez les agents (769 salariés), le salaire médian est de 356 000 F CFP et le
salaire moyen de 369 000 F CFP.
2.1.1.2. : Les insuffisances de la gestion qualitative des ressources
humaines
2.1.1.2.1 – Les carences de la gestion prévisionnelle des ressources
humaines
La gestion qualitative des ressources humaines de l’OPT souffre d’un manque
d’anticipation. Aucun outil n’est disponible pour anticiper les besoins futurs de l’Office. La
gestion prévisionnelle des compétences, demeurée à l’état de chantier sur la période, ne se
serait structurée, selon les ordonnateurs, qu’à compter de 2007. L’Office ne pouvait donc
identifier en son sein les personnels adaptés aux emplois de demain. Il ne dispose pas plus de
plan de recrutement pour combler les emplois nécessaires au développement des nouvelles
missions. La reconversion des salariés frappés par la disparition de certains métiers n’est pas
non plus organisée. Les emplois de service de clientèle, pourtant essentiels dans la relation
avec les usagers, souffrent d’une désaffection des personnels et sont souvent pourvus par des
agents nouveaux et peu qualifiés.
2.1.1.2.2 Un effort de formation qui n'a pas permis suffisamment d'adapter
le personnel à l'évolution des métiers
Un rapport d’août 2005, interne à l'OPT, tire un bilan mitigé de la politique de formation
malgré l’important investissement financier consenti que soulignent plusieurs anciens
ordonnateurs. Cette fonction stratégique dans un établissement confronté à des changements
importants a été déconcentrée dans les pôles en 1999. En dépit de quelques points positifs dus
à la plus grande proximité, comme l’intensification de la formation axée sur les fonctions
transversales notamment en management, ou la réduction de l’absentéisme aux actions de
formations, ce choix a présenté de nombreux inconvénients. L’expression des besoins a tout
d’abord parfois été floue. Des carences ont été relevées, notamment, dans le parcours de
formation après promotion. Mais le problème majeur réside dans l’absence de référentiel de
compétences actuelles ou futures qui ne permet pas l’adéquation entre les plans de formation
et les besoins de demain. La restauration d’un service centralisé rattaché à la direction
générale a été décidée par délibération du 9 février 2007. Dans cette nouvelle organisation, la
fonction formation, stratégique pour l’OPT, devra permettre de faire face à une mutation
brutale et imposée par l’évolution de ses domaines d’activité.
16
EPIC territorial.
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septembre 2008 - page 22 sur 105
2.1.1.2.3. Les modalités de recrutement ne permettent pas de sélectionner,
à tous les niveaux de l’Office, les compétences nécessaires à son
évolution
L’OPT dispose de procédures de recrutement définies par la convention d’établissement.
Selon celle-ci et le protocole d’accord sur la mobilité signé en 2001, les recrutements se font,
d’abord par appel à la mobilité interne, puis à défaut et après avis de la commission paritaire
consultative, soit par concours ou examen professionnel soit sur titre. La décision finale
appartient toutefois au président du conseil d’administration.
Dans la pratique, et jusqu’au début de l’année 2007 au moins, les cadres et agents de
maîtrise ont été recrutés, à hauteur de 90 %, selon les procédures prévues par la convention
d'établissement. Le recrutement des autres agents (catégories AG2 à AQ1), sur Tahiti, s’est
fait sans l’organisation de concours, en contravention avec les dispositions de ladite
convention. Au demeurant, en dehors des concours, les procédures utilisées, même lorsqu'il
s'agit de recrutement sur titre, ne garantissent pas le respect des principes d’équité et
d’impartialité. Ainsi, de nombreuses titularisations ont eu lieu, jusqu'à une période récente,
par cooptation, en raison du lien familial du postulant avec des salariés de l’Office, du soutien
des partenaires sociaux ou d’interventions personnelles et politiques. Validé par le président
du conseil d’administration, ce processus de cooptation conduit de jeunes qualifiés à penser,
non sans raison, que l’accès à un emploi à l’OPT leur est inaccessible. Nombreux sont ceux
qui sollicitent alors le ministre des postes et télécommunications dans l’espoir d’obtenir, avec
son appui, leur intégration à l’Office.
D'anciens président du conseil d'administration estiment que le recrutement en CDI, au
contraire des CDD, ne laisse que peu de marge de manoeuvre au président du conseil
d’administration. En outre, ils estiment que le concours est onéreux et inadapté. La Chambre
constate que nombre d’employés en CDD finissent par être embauchés en CDI.
En continuant de s’accommoder de cette pratique du recrutement, l’établissement public
se prive d’un outil essentiel de restructuration de la ressource humaine que l’adaptation
urgente aux évolutions de ses domaines de compétence requiert.
2.1.1.2.4. L’avancement non lié à la performance ne contribue à pas la
restructuration de l’Office
Une fois titularisés à l’OPT, nombreux sont les agents qui n’accèdent pas à une
promotion de grade, soit parce qu’ils ne sont pas admis, en raison d’un niveau de compétence
insuffisant lors du recrutement initial que la formation continue n’a pas permis de compenser,
soit parce qu’ils s’en désintéressent, bénéficiant d’une politique de rémunération très
favorable ou craignant, en cas de promotion, d’une affectation géographique lointaine.
La prépondérance de l’avancement lié à l’ancienneté sur la progression de carrière par
sélection professionnelle ou concours ne sert pas le besoin de restructuration de l’OPT.
Si, comme le signalent d'anciens président du conseil d'administration, le système peut
apporter une certaine paix sociale,
« il ne valorise pas la performance mais la présence. Ce
processus entraîne une dévalorisation des plus méritants puisque les efforts consentis ne
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génèrent pas de différenciation au niveau salarial ou autre. La prime d'efficience qui devait
permettre, une fois par an, de suppléer les lacunes de ce système est également détournée de
son objectif puisque l'intégralité du montant a été versée pour les années 2004 et 2005
17
».
2.1.1.3. : La faiblesse des outils de pilotage et le laxisme des
dirigeants
L’absence de maîtrise des dépenses de personnel et des effectifs s’explique en grande
partie par la faiblesse, l’inadaptation et la sous utilisation des outils de pilotage et par le
laxisme de dirigeants qui se sont succédé à la tête de l’OPT.
2.1.1.3.1. Des outils de pilotage inadaptés et sous utilisés
La gestion des ressources humaines dans un organisme de l’importance de l’OPT
devrait pouvoir s’appuyer sur des outils de pilotage et de prospective. Force est de constater
que si certains existent, leur inadaptation dans certains cas et le défaut de maintenance
permettant leur bon fonctionnement rendent le pilotage largement défaillant.
Pourtant, Monsieur Geffry SALMON rappelle qu’avec ses collaborateurs, il a
développé, dès 1996, des outils de pilotage dans le domaine des ressources humaines.
Monsieur TERIIEROOITERAI ajoute qu’en 2002, lors de la déconcentration des ressources
humaines, les paramétrages de l’application mise en oeuvre ainsi qu’un guide juridique avaient
été communiqués aux pôles. Pourtant, le schéma directeur des ressources humaines de
septembre 2006, élaboré par l’Office, fait état d’un pilotage défaillant :
« Un suivi délaissé et trop tardif.
Les supports existent et répondent aux obligations réglementaires
mais sont suivis avec un temps de réaction trop lent et ne permettent pas une utilisation rationnelle
dans le pilotage de la gestion administrative des ressources humaines. L'entreprise a mis en oeuvre,
depuis plusieurs années, des outils (suivi mensuel des effectifs, tableaux de bord, constat social) afin
de piloter ses ressources humaines et corriger, mensuellement, les dérapages budgétaires constatés.
Or, ces outils ont été progressivement délaissés (suivi mensuel des effectifs, tableaux de bords) ou
établis avec beaucoup de retard. Le constat social en est un exemple, Cette situation risque de se
dégrader encore puisque le chargé d'études qui alimentait ces données n'a pas été remplacé depuis sa
mobilité en interne. De fait, les informations transmises tardivement servent uniquement de constat
sans possibilité de pouvoir apporter les corrections requises
.
Un système contraignant et source d'erreurs
:
Cette situation est liée à la priorité accordée aux
tableaux de bord dans notre gestion des ressources humaines mais également à la complexité des
systèmes utilisés. De nombreuses données sont obtenues via des applications individuelles (suivi
mensuel des effectifs, heures de délégations des syndicats, …) et nécessitent des re-saisies
quotidiennes sur des fichiers externes donc source d'erreurs. Il a également été constaté que de
nombreuses extractions réalisées via Business Object sur l'application ressources humaines (SEDIT
MARIANNE) comportaient des erreurs et devaient être corrigées dans un second temps. De plus, le
classement de ces requêtes n'est pas organisé et ne permet pas à une tierce personne de s'y retrouver.
Le système a été agencé pour répondre aux besoins du gestionnaire central et ne permet pas aux
relais ressources humaines de l'utiliser pour un pilotage plus ciblé de leurs entités respectives
(exemple: le suivi des taux d'absentéisme). Enfin, seules les fonctionnalités de base, liées à
17
Document OPT, Schéma directeur des ressources humaines, 2006, p.8 et 9.
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Séance du 1
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l'élaboration de la paie, sont complétées dans l'application SEDIT. D'autres informations devraient
être complétées (exemple : 1e métier de l'agent) afin de faciliter l'extraction pour analyses des
données et les éventuelles simulations budgétaires. »
Ces constats sont confirmés par l’audit externe réalisé par la société DELOITTE qui les
résument ainsi :
« Le défaut d’outils de pilotage et de prospective est symptomatique d’une
gestion « au fil de l’eau »
des effectifs et des compétences ».
Au moment du contrôle, la chambre a constaté que la direction des ressources humaines
n’était pas en mesure de suivre avec fiabilité la situation réelle des personnels, pas plus que
les parcours individuels de formation des agents ou d’assurer un suivi par métier. Elle ne
dispose pas d’outils analytiques en état de lui permettre le suivi du coût des recrutements, des
délais moyens de comblement des postes, d’échéanciers des départs à la retraite, de gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Faute de pouvoir disposer d’un
système d’information performant, délivrant à la demande des informations consolidées issues
de requête «types», les responsables des ressources humaines doivent solliciter le pôle
informatique pour obtenir les données souhaitées.
Le partage des responsabilités entre le président du conseil d’administration, la direction
générale et les pôles pose des problèmes de frontière (doublons entre ces entités) et de
circulation de l’information. Cette organisation présente un risque pour le bon fonctionnement
du pilotage des ressources humaines qui se caractérise par
l’absence de ligne directrice
pluriannuelle.
La gestion des effectifs relève en effet d’une approche budgétaire annuelle
basée sur le cadre d’emplois et non d’une réflexion pluriannuelle d’ensemble sur l’évolution
des métiers, et donc des besoins de l’Office.
Le suivi administratif des personnels s’appuyant sur un référentiel de procédures
incomplet et non régulièrement tenu à jour, la déconcentration de la gestion au niveau des
pôles entraîne une perte d’économies d’échelle et un risque d’absence de procédures
homogènes entre les différents pôles. La répartition des tâches en matière de saisie
d’information est également source de doublons, d’erreurs ou de perte d’informations pouvant
impacter la paie. Les risques sont accrus par l’absence de formalisation du contrôle interne
habituellement mis en place pour détecter toute défaillance des procédures. L’inadaptation et
les lacunes du logiciel de suivi du personnel ainsi que l’absence des paramétrages nécessaires
entraînent une surreprésentation des personnels se consacrant au suivi administratif.
2.1.1.3.2. La politique laxiste des dirigeants dans la gestion des effectifs et
en matière de rémunération
L’évolution des effectifs sur la période témoigne d’un certain laxisme des dirigeants de
l’organisme en matière de recrutement.
Si certains recrutements ont pu correspondre à une restructuration de l’OPT en 2002-
2003, d’autres, comme en 2005, sont directement liés au contexte d’instabilité politique qu’a
connu la Polynésie française ces dernières années et à l’attribution d’avantages que ce
contexte a pu favoriser.
L’avancement de certains agents a été accéléré de façon anormale. Un certain nombre
d’agents, qui comptent aujourd’hui parmi les catégories cadres et cadres dirigeants de
l’Office, n’ont ni diplôme d’enseignement supérieur, ni réussi de concours ou de sélection
professionnelle interne pour prétendre à ces grades, ni même une expérience suffisante et
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er
septembre 2008 - page 25 sur 105
progressivement acquise aux échelons intermédiaires permettant de justifier la nomination à
des fonctions correspondant à ces grades. Parmi ceux-ci, on trouve notamment des proches de
dirigeants et d’anciens dirigeants de l’Office ou de la Polynésie française.
En matière de politique salariale, le même laxisme est constaté. Outre le niveau de
rémunération globalement très avantageux par rapport à celui pratiqué ailleurs à un même
niveau de responsabilité, force est de constater que la rémunération n’est pas corrélée à la
performance des agents.
L’augmentation des rémunérations est en partie liée à la présence, au sein de l’OPT, de
contractuels et de fonctionnaires qui, comparant en permanence l’évolution de leurs
émoluments, ont réclamé un alignement sur l’autre catégorie. Or, obéissant à des règles
d’évolution différentes, les rémunérations de ces deux groupes d’agents publics connaissent
constamment des écarts. Les dirigeants de l’OPT ont régulièrement cédé aux demandes
salariales visant à transposer les avantages de chaque population à l’autre "
dans le cadre de
rapports de force que la direction n'a pas pu juguler
"
18
.
Ainsi, à compter de 2002, une nouvelle convention a calé le système d’avancement à
l’ancienneté des agents contractuels sur celui existant pour les agents fonctionnaires, en le
cumulant avec le taux d’ancienneté prévu dans le code du travail. Cette mesure d’importance
n’a pourtant pas limité les revendications sociales et négociations incessantes entre 2004 et
2006. Les dirigeants ont ainsi accordé une augmentation des coefficients de base pour les
catégories AG2 à AM1, la transformation de la prime individuelle modulable en treizième
mois et la création d’une prime d’efficience modulable équivalente à un demi
mois de salaire.
En sens inverse, la convention relative à la gestion des fonctionnaires des corps de l’Etat
pour l’administration de la Polynésie française (CEAPF), qui sont payés par l’Office et non
par l’Etat, autorise le conseil d’administration de l’établissement public à octroyer des primes
supplémentaires. Ce dispositif a permis de consentir une prime équivalente à un demi mois de
traitement indexé, une prime variable équivalente à la prime de rendement des agents
contractuels et la création d’une prime pour une retraite complémentaire.
Le système de rémunération des cadres dirigeants obéit à des règles particulières.
Instauré pour le "top management" en 1997, il a été modifié avec la création d’une indemnité
de sujétion spéciale (ISS) en 2002. Ce mode de rémunération devait permettre à l’Office de
promouvoir à des postes de responsabilité des agents en fonction de leurs compétences, tout
en leur offrant une rémunération attrayante. Ce système, qui devait permettre de moduler la
rémunération en fonction de la performance, n’a pas atteint cet objectif. De très nombreuses
personnes (67 en 2006) ont bénéficié du statut de cadre donnant droit à cette prime qui
représente de 20 à 50 % de la rémunération mensuelle globale et qui progresse
automatiquement tous les deux ans. Seuls deux agents ont ensuite perdu le bénéfice de cette
prime, en raison de leur faible performance
19
. En outre, il est envisagé, pour répondre
favorablement à la revendication des cadres, d’intégrer ces emplois à la convention, en
incluant cette prime, qui serait alors cristallisée, dans la rémunération globale individuelle.
Aux rémunérations, s’ajoutent des avantages en nature. Des unités téléphoniques sont
traditionnellement accordées aux agents, proportionnellement à leur grade, ce qui représente
un avantage de 76 800 à 384 000 F CFP par an. Plus d’un quart des agents disposent par
ailleurs d’un téléphone mobile auquel sont associées des consommations de 1 h à 4 h, dont
18
Réponse de M. Geffry SALMON.
19
Hormis le cas spécifique des deux présidents du conseil d’administration démis de leurs fonctions.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 26 sur 105
l’attribution semble plus liée au grade qu’aux nécessités de service. L’attribution de
logements de fonction aux receveurs ou chefs de centre fait de moins en moins apparaître la
nécessité de service. Ceux qui n’occupent pas le logement de fonction, parce qu’ils ont, pour
la plupart, leur propre maison, bénéficient d’une indemnité de logement d’environ
120 000 F CFP par mois. Les agents de l’OPT bénéficient aussi de la prise en charge de
voyages lors de congés cumulés (correspondant aux congés administratifs). Cet avantage,
normalement réservé aux fonctionnaires du CEAPF, a été étendu aux contractuels et même
élargi dans son périmètre puisque les voyages peuvent être à destination des Etats-Unis, de la
Nouvelle-Zélande ou de l’Australie et même de Tahiti pour les personnels domiciliés dans les
autres archipels. L’OPT n’a été en mesure de communiquer que partiellement le coût de cet
avantage. Enfin, les chefs de pôle et les conseillers A, pour la plupart affectés à la présidence
du conseil d’administration, se voient attribuer un véhicule de fonction.
Au total, le coût des avantages en nature alloués par l’OPT peut être évalué à un
minimum de 175 MF CFP. Rapporté au nombre d’agents employés en CDI, ces avantages en
nature représentent un surplus de rémunération moyen de près de 200 000 F CFP par an et par
agent.
Pour
l’avenir,
l’ancienne
directrice
générale,
avec
l’approbation
du
conseil
d'administration alors présidé par Monsieur BARRAL a présenté, dans sa réponse aux
observations provisoires de la Chambre, un document préconisant pour l’avenir de mettre en
place des outils, compétences et structures permettant de gérer efficacement les ressources
humaines. Ce document propose de :
-
finaliser en 2008 la mise en place des outils nécessaires à la gestion prévisionnelle des
emplois et des compétences initiée en 2007 ;
-
faire évoluer la convention d’établissement ;
-
centraliser la gestion des ressources humaines au sein d’une direction ;
-
assurer la montée en puissance du service formation.
Le document prévoit aussi d’ajuster le dimensionnement des équipes aux besoins
qualitatifs et quantitatifs en initiant une démarche dont l’objet serait de redéployer une partie
du personnel vers le réseau d’agences et vers de nouveaux métiers.
2.1.2.
Les rémunérations et indemnités de toute nature versées aux
présidents du conseil d’administration de l’OPT
Le président du conseil d’administration de l’OPT perçoit des indemnités et dans
certains cas des rémunérations pour la fonction qu’il occupe à la tête de l’Office.
L’établissement public ayant créé des « filiales », le président du conseil d’administration
20
,
qui représente l’organisme à la présidence de ces « filiales », est rémunéré aussi à ce titre
selon un dispositif pour le moins opaque.
L'ensemble des sommes versées aux présidents
21
successifs, auxquelles s’ajoutent de
substantiels avantages en nature, attestent de la situation très privilégiée des dirigeants de
l’OPT.
20
M. Geffry SALMON, directeur général, a représenté l’OPT dans les filiales avant de devenir président du conseil d’administration de
l’Office.
21
La situation de M. Salmon inclut la période durant
laquelle il était directeur général.
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septembre 2008 - page 27 sur 105
2.1.2.1. : Les rémunérations et indemnités des dirigeants successifs
de l’OPT
L’arrêté n° 1057 CM du 21 octobre 1994 disposait que les fonctions de président et de
membre du conseil d’administration étaient gratuites. Ce texte a été remplacé par l’arrêté
n° 1731 CM du 19 novembre 2003. A compter de cette date, les fonctions de membres du
conseil d’administration sont gratuites, hormis celles du président, dont la rémunération et les
avantages en nature sont fixés par une délibération du conseil d’administration. Modifié le
17 mars 2005
22
, l’arrêté n° 1731 CM borne, depuis lors, la rétribution du président du conseil
d’administration à une indemnité de fonctions et à des frais de représentation et des avantages
en nature.
La chambre a fait le point des rémunérations et avantages en nature perçus par les
dirigeants successifs de l'office des postes et télécommunications. Les situations de
MM. Geffry SALMON, Alphonse TERIIEROOITERAI et Jean-Alain FREBAULT, qui
couvrent la période du 3 janvier 1994 au 26 septembre 2007, ont été examinées. Il est à noter
que les autres présidents du conseil d’administration, MM. Temauri FOSTER et Etienne
CHIMIN
23
n’ont pas perçu de rémunération durant leurs brèves périodes de responsabilité,
soit respectivement du 3 novembre 2004 au 8 mars 2005 et du 13 au 27 décembre 2006.
2.1.2.1.1. Situation de M. Geffry SALMON
2.1.2.1.1.1. En sa qualité de dirigeant de l’Office
M. SALMON a été nommé Directeur Général de l'OPT à compter du 3 janvier 1994.
Sa rémunération initiale a été basée sur celle d’un fonctionnaire détaché du grade de
chef de service régional de la poste et des télécommunications, soit 837 000 F CFP,
augmentée de la prise en compte de 9 années d'ancienneté, acquise au titre du service national
et des services antérieurs exercés dans la même spécialité.
Le contrat accordait en outre des avantages en nature (véhicule de fonction, logement
de fonction ainsi que les consommations et services y afférents, frais de représentation) et une
compensation de sujétions spéciales matérialisée par un aller-retour vers Paris en classe
affaires pour lui et les membres de sa famille. Par avenant du 9 décembre 1994, il a été
accordé à M. SALMON une indemnité égale à 2 ans de salaire, majorée des avantages en
nature, en cas de rupture de contrat, et une indemnité, aux héritiers, égale à une année de
salaire en cas de décès.
Ce contrat initial a évolué très favorablement pour l’intéressé jusqu’à la fin de ses
fonctions de président du conseil d’administration en juin 2004.
22
Par l’arrêté n°22 CM du 17 mars 2005.
23
M. Edouard FRITCH a également été président du conseil d’administration, sans rémunération, dans le cadre d’une réglementation qui ne
conférait pas de pouvoirs opérationnels à cette fonction (arrêté n° 1057 CM du 21/10/1994).
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septembre 2008 - page 28 sur 105
En l’espace de dix ans, M. SALMON, qui a rempli les mêmes fonctions, aura triplé sa
rémunération mensuelle, hors les primes ponctuelles d’un montant d’environ 6,4 millions
de F CFP sur la période. En 2004, M. SALMON percevait, en sa qualité de président du
conseil d’administration, une rémunération mensuelle de près de 2,6 MF CFP.
Les avantages en nature se sont aussi élargis à la gratuité des abonnements et
communications téléphoniques et électroniques illimitées. Le chiffrage partiel a permis
d’établir qu’ils ont presque doublé sur la période pour atteindre 558 333 F CFP par mois.
PERIODE
SALAIRE BASE +
IND. ANCIENNETE
AUTRES
INDEMNITES
REMUNERATION
HORS
AVANTAGES EN
NATURE
AVANTAGES
EN NATURE
REMUNERATION
TOTALE
DEBUT
janvier-94
855 832
-
855 832
250 000
FIN
mai-97
992 743
-
992 743
345 000
CUMUL
01/01/94 au 31/05/97
39 713 158
3 145 720
42 858 878
16 305 000
MOYENNE
41 mois
968 614
76 725
1 045 338
397 683
1 443 021
DEBUT
juin-97
992 743
220 000
1 212 743
345 000
FIN
décembre-02
1 682 986
200 468
1 883 454
1 660 000
CUMUL
01/06/97 au 31/12/02
94 727 305
11 663 307
106 390 612
32 205 000
MOYENNE
67 mois
1 413 840
174 079
1 587 920
480 672
2 068 591
PM
Nouvelle convention d'établissement
DEBUT
janvier-03
1 116 987
1 246 865
2 363 852
470 000
FIN
juin-04
1 136 850
1 255 356
2 392 206
485 000
CUMUL
01/01/03 au 30/06/04
20 235 197
26 542 530
46 777 727
10 050 000
MOYENNE
18 mois
1 124 178
1 474 585
2 598 763
558 333
3 157 096
Aux avantages en nature figurant dans le tableau ci-dessus, il conviendrait d’ajouter
les consommations et les charges de personnel liées au logement et prises en charge
directement par l’Office. Au cours des années 2003-2004, elles peuvent être évaluées au
minimum à 250 000 F CFP par an
24
. Au total les avantages en nature ne pouvaient donc pas
être inférieurs à 800 000 F CFP.
Au total, les émoluments mensuels perçus par M. SALMON, y compris les avantages
en nature lorsqu’il était directeur général puis président du conseil d’administration au cours
de la période 2003-2004, s’établissaient à plus de 3,4 MF CFP.
Aux avantages accordés à M. SALMON, pourraient s’ajouter le coût, potentiellement
mis à la charge de l’OPT, d’une indemnité prévue en cas de cessation de ses fonctions. Un
avenant à son contrat de travail a prévu qu’au cas où il serait mis fin à ses fonctions de
directeur général, l’intéressé bénéficierait d’une indemnité égale à deux ans de salaire majorée
des avantages en nature, indépendamment du salaire qui continuerait à lui être servi pour une
autre fonction. Le principe de cette indemnité n’a pas été remis en cause lorsque
M. SALMON est devenu président du conseil d’administration. Cette seule indemnité
représente un montant potentiel de plus de 75 MF CFP. L’octroi d’une telle indemnité, qui ne
correspondrait pas à une situation de perte d’emploi, dans le cas de M. SALMON, puisque
l’intéressé a retrouvé son emploi de cadre supérieur de 1
er
niveau à l’OPT, ne serait pas
justifié.
24
En 2007, elles étaient évaluées par l’OPT à 300 000 F CFP par mois. Elles étaient probablement légèrement inférieures au cours des
années 2003-2004, mais peuvent être évaluées au minimum à 250 000 F CFP par an.
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septembre 2008 - page 29 sur 105
La Chambre observe que l’indemnité prévue n’a pas été versée à ce jour. Elle
recommande cependant de mettre fin à son principe.
2.1.2.1.1.2. Depuis la fin de ses fonctions de dirigeant de l’OPT
Depuis la fin de ses fonctions de président du conseil d'administration jusqu’au
30 novembre 2007, l’OPT a continué de rémunérer M. SALMON, à l’exception de la période
du 26 octobre 2004 au 31 mars 2005 au cours de laquelle il avait été nommé une première fois
PDG de la société d’économie mixte Air Tahiti Nui.
Cette rémunération, représentant une somme de 27,4 M F CFP sur la période, appelle
plusieurs observations.
A compter du 22 juin 2004, date à laquelle M. SALMON n’était plus président du
conseil d’administration de l’OPT, sa rémunération a été revue à la baisse. Redevenu
conseiller de niveau A, Monsieur SALMON a été tenu de se mettre en congé du 22 juin au
26 octobre 2004. Après la période de suspension de contrat correspondant à son passage à Air
Tahiti Nui du 26 octobre 2004 au 31 mars 2005, M. SALMON a juridiquement réintégré
l’OPT. Cependant, d’avril à novembre 2005, comme précédemment, il a dû utiliser ses droits
à congé. A compter du 24 novembre 2005, son contrat de travail a été modifié, à la demande
de M. Emile VERNAUDON, ministre des postes et télécommunications, qui ne souhaitait
plus le voir dans l’enceinte de l’OPT. M. SALMON a alors dû exercer ses fonctions dans le
cadre du travail à domicile jusqu’au 31 mars 2006. A compter du début avril, la directrice
générale de l’OPT a demandé à Monsieur SALMON de réintégrer les murs de l’Office pour y
accomplir ses fonctions.
De janvier à fin novembre 2007, M. SALMON occupait simultanément un emploi
salarié à l’OPT et un mandat social en qualité de PDG d’Air Tahiti Nui. L’intéressé a sollicité,
en application des dispositions de l'article 60 de la convention d'établissement, l'autorisation
d'exercer ce mandat social tout en demeurant salarié de l'OPT. M. Jean-Alain FREBAULT,
président du conseil d’administration, a donné son accord et lui a confié des travaux d'études.
Cependant, cette autorisation peut difficilement se combiner avec les obligations de
l’employé telles qu’elles sont définies par l’article précité.
La rédaction même de cette
disposition implique que l’activité autre que celle de salarié de l’OPT, ne peut être que
marginale dans le volume horaire qu’elle exige, de telle sorte qu’elle ne nuise pas à la bonne
exécution du service à l’OPT et qu’elle n’entre pas en contradiction avec l’obligation de
consacrer l’essentiel de son temps de travail à son employeur principal. Le mandat social de
PDG d’ATN empêche à l’évidence de remplir cette obligation.
La chambre estime que l’emploi conservé à l’OPT par M. SALMON ne pouvait être,
dans le meilleur des cas, que marginal. On voit mal en effet comment l’intéressé pouvait
continuer à exercer sa mission de cadre de l’OPT et se consacrer à la gestion d’ATN qui
nécessite un PDG à temps plein. Dès lors,
le versement par l’Office d’une rémunération
élevée et d’avantages en nature substantiels à l’intéressé ne pouvait se justifier. L’OPT a
tardivement tiré les conséquences de cette situation anormale en suspendant le 1
er
décembre
2007, le contrat de travail de Monsieur SALMON à l’OPT pour lui permettre de se consacrer
à ses fonctions de PDG d’AIR TAHITI NUI.
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En outre, bien que M. SALMON ait été démis de
ses fonctions de président du conseil
d’administration de l’OPT, l’établissement a jugé bon de lui verser une indemnité de
logement de 350 000 F CFP à compter du 1
er
juillet 2004. L’octroi de cette indemnité de
logement n’est pas légitime. La circonstance que le contrat de travail prévoyait un logement
de fonction doit être appréciée au regard des fonctions auxquelles elle se rapportait. Dès lors
que les fonctions de directeur général puis de président du conseil d’administration avaient
pris fin, l’Office ne paraissait pas devoir continuer à payer cette indemnité. Il fallait au
contraire considérer que M. SALMON ne pouvait plus prétendre au logement de fonction et
encore moins à l’indemnité qui se substituait à cet avantage. L’OPT, qui a pourtant signé un
avenant au contrat de travail de M. SALMON portant sur un autre point, aurait dû veiller à le
modifier à ce sujet.
2.1.2.1.2. Situation de M. Alphonse TERIIEROOITERAI
M. Alphonse TERIIEROOITERAI a occupé les fonctions de président du conseil
d’administration de l’OPT du 23 juin au 2 novembre 2004 et du 9 mars 2005 au 23 mai 2006.
Au cours de la première période, le conseil d’administration nouvellement constitué a
fixé sa rémunération et ses avantages en nature par référence à celle de son prédécesseur, sans
qu’aucun montant ne soit mentionné dans le rapport de présentation, pas plus que dans la
délibération. Il est probable que peu de membres du conseil d’administration, de juin à
octobre 2004, n’aient eu une claire connaissance des montants alors en jeu. La délibération du
du 31 mars 2005 a été plus précise dans la fixation de la rémunération de l’intéressé.
Sur l’ensemble de la période, M. TERIIEROOITERAI a bénéficié d’une rémunération
conséquente, évoluant de 2,1 MF CFP par mois en moyenne pendant la première période à
2,5 MF CFP durant la deuxième période.
En outre, des avantages en nature lui ont été accordés. Il a ainsi disposé d’un véhicule
de fonction, d’abonnements et communications téléphoniques et électroniques illimitées et de
frais de représentation. Au surplus, une compensation de sujétions spéciales, matérialisée par
un aller-retour vers Paris (durant la première période) ou vers toute autre destination (seconde
période), en classe affaires pour lui et les membres de sa famille, lui a été consentie.
Enfin, M. TERIIEROOITERAI disposant de son propre logement, une indemnité
représentative de l’avantage logement de fonction lui a été octroyée. Cette indemnité lui a été
attribuée, pour la première période, sur la base de la délibération du conseil d’administration
qui fixait ses avantages en nature, par référence à ceux de son prédécesseur. Or, le
prédécesseur occupant un logement de fonction, le montant de l’indemnité de logement n’a
donc pas été défini par le conseil d’administration. Agissant par délégation de signature de
M. TERIIEROOITERAI, le conseiller chargé des ressources humaines, autorité non
compétente en la matière, a fixé le montant de l’indemnité à 350 000 F CFP par mois. Cette
décision prise en octobre 2004 est irrégulière car elle contrevient aux dispositions de l’arrêté
n° 1731 CM selon lesquelles, c’est le conseil d’administration qui fixe la rémunération et les
avantages en nature du président du conseil d’administration, notamment leur montant. Cette
indemnité, tout autant irrégulière que généreuse, sera en partie remise en cause par le conseil
d’administration qui la réduira, pour la deuxième période, à 250 000 F CFP.
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Lorsqu’il a dirigé l’OPT, M. TERIIEROOITERAI a perçu, en rémunérations et
avantages en nature, un montant mensuel moyen de 2,5 MF CFP au cours de la première
période et 2,7 MF CFP durant la seconde. Le tableau ci-dessous précise les composantes.
PERIODE
SALAIRE BASE +
IND. ANCIENNETE
AUTRES
INDEMNITES*
TOTAL
REMU.
AVANTAGE
NATURE **
CHIFFRES
CUMUL
DEBUT
juin-04
1 060 000
912 139
1 972 139
129 333
FIN
octobre-04
1 060 000
1 147 468
2 207 468
485 000
CUMUL
23/06/04 au
03/11/04
5 300 000
5 217 008
10 517 008
2 069 333
MOYENNE
5 mois
1 060 000
1 043 402
2 103 402
413 867
2 517 268
DEBUT
mars-05
605 283
1 225 563
1 830 846
140 000
FIN
mai-06
666 899
1 356 155
2 023 054
145 000
CUMUL
09/03/05 au
23/05/06
9 437 242
28 101 302
37 538 544
3 625 000
MOYENNE
15 mois
629 149
1 873 420
2 502 570
241 667
2 744 236
* dont indemnité de logement
** avantages nature chiffrés : Voiture, Voyage annuel famille, Téléphone, Vini, ADSL.
Aux avantages accordés à M. TERIIEROOITERAI s’ajoute le coût, potentiellement
mis à la charge de l’OPT, d’une indemnité prévue en cas de cessation de ses fonctions. Le
conseil d'administration, dans sa séance du 31 mars 2005, lui avait en effet attribué une
indemnité de départ qui lui serait versée automatiquement s’il se voyait retirer ses fonctions
de président du conseil d'administration. Cette indemnité, plafonnée à 12 mois, représente un
montant potentiel de près de 33 MF CFP.
Le principe de l’octroi d’une telle indemnité est irrégulier et contreviendrait aux
dispositions de l’arrêté n° 1731 CM modifié par l’arrêté 22/CM du 17 mars 2005. Celui-ci
prévoit que le conseil d’administration peut attribuer une indemnité de fonctions, des frais de
représentation et des avantages en nature. Il n’est nullement prévu d’indemnité de fin de
fonction.
Le
versement
d’une
telle
indemnité
serait
de
surcroît
illégitime,
M. TERIIEROOITERAI ayant retrouvé son emploi de cadre supérieur de 1
er
niveau à l’issue
de ses fonctions de président du conseil d’administration.
Comme pour M. SALMON, la Chambre observe que l’indemnité prévue au profit de
M. TERIIEROOITERAI n’a pas été versée à ce jour. La chambre, qui avait recommandé de
mettre fin au principe de cette indemnité, prend acte de sa suppression par délibération du
30 octobre 2007.
In fine, la chambre, qui a eu connaissance au cours de ses investigations, de la
situation de carrière de M. TERIIEROOITERAI, recommande à l’Office d’examiner avec la
plus grande prudence les prétentions de l’intéressé quant à sa reconstitution de carrière. Ayant
choisi le statut de contractuel pour pouvoir bénéficier d’une rémunération plus favorable,
avant de réintégrer, tardivement (en 2005) et à la faveur d’une décision peu habituelle, le
statut du CEAPF, avec la perspective de bénéficier de droits à la retraite plus favorables,
M. TERIIEROOITERAI doit assumer les justes conséquences financières de ses choix.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 32 sur 105
2.1.2.1.3. Situation de M. Jean-Alain FREBAULT
M. Jean-Alain FREBAULT a été nommé Président du Conseil d'administration de
l'Office des postes et télécommunications le 24 mai 2006. A cette date, il était représentant à
l'assemblée de la Polynésie française. Démis de ses fonctions à l’OPT, le 13 décembre 2006 et
remplacé par M. Etienne CHIMIN, il est redevenu président du conseil d’administration, le
28 décembre 2006.
Compte tenu des dispositions de l’article 111 de la loi organique du 27 février 2004,
selon lesquelles le mandat de représentant à l’assemblée de la Polynésie française est
incompatible avec les fonctions de président d’un établissement public, lorsqu’elles sont
rémunérées, M. FREBAULT n’a pas perçu de rémunération directe.
A l’instar de ses prédécesseurs, et sur la base de la délibération du 14 juin 2006,
M. FREBAULT
a
néanmoins
bénéficié
d’avantages
en
nature
(abonnements
et
communications téléphoniques et électroniques illimitées, véhicule de fonction et logement de
fonction).
Par arrêté du Haut Commissaire en date du 23 septembre 2006, M. FREBAULT a été
constaté démissionnaire d'Office de son mandat de représentant à l'assemblée de la Polynésie
française, au motif que les avantages en nature dont il bénéficiait, en particulier l'attribution
d'un logement, étaient assimilables à une rémunération. Le Conseil d’Etat a confirmé cette
décision.
N'étant plus représentant à l'assemblée, M. FREBAULT a pu prétendre à une
indemnité de fonctions en application des dispositions de l'arrêté n°1731/CM du 19 novembre
2003, modifié, relatif à l'organisation et aux règles de fonctionnement de l'OPT. Le conseil
d’administration de l’Office s’est réuni le 30 août 2007, selon des modalités susceptibles de
remettre en cause la validité des délibérations qu’il a prises. L’indemnité de fonction brute
octroyée à M. FREBAULT a été fixée à 1,562 MF CFP par mois (soit 1,484
MF CFP
nets/mois), avantages en nature non compris.
La valorisation des avantages en nature prend en compte le véhicule de fonction
(2 MF par an), les abonnements et communications illimitées (
a minima
800 000 F CFP par
an), le voyage annuel en classe affaires (2 MF CFP) ainsi que le logement de fonction.
Le montant locatif du logement est de 400 000 F CFP par mois. La prise en charge mensuelle
par l’OPT de l'entretien du logement, du jardin et de la piscine représente 300 000 F CFP.
Ainsi, tel que le résume le tableau suivant, M. FREBAULT a perçu 1,1 MF CFP par
mois au seul titre des avantages en nature pendant la période du 24 mai 2006 au 26 septembre
2007
25
où il était membre de l’assemblée de la Polynésie française et président du conseil
d’administration de l’OPT. Après sa démission de l’assemblée, le montant de ses émoluments
pour ses fonctions de président du conseil d’administration de l’OPT se serait établi
à plus de
2,5
MF CFP par mois, y compris les avantages en nature qu’il a continué à percevoir. Mais en
raison du versement d’une avance de 90 % de son indemnité de fonction (6 280 413 F CFP
nets) sur la période du 6 avril au 31 août 2007 et non de la totalité de l’indemnité décidée,
Monsieur FREBAULT a réellement perçu près de 2,4 MF CFP par mois durant la période du
6 avril à la fin août 2007 et ensuite 1,1 MF CFP jusqu’au 26 septembre 2007 date de sa fin de
fonction.
25
Sauf du 13 au 27 décembre 2006 où il a été remplacé par Monsieur CHIMIN.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 33 sur 105
I
NDEMNITES ET AVANTAGES EN NATURE ACCORDES A
M
ONSIEUR
J
EAN
-A
LAIN
FREBAULT
Montant en FCP
Période
Valeur
mensuelle
Indemnité de
fonction
Logement
occupation
entretien
Communication
Voiture de
fonction
Voyage
annuel
familial
Cumul
Mensuel
24-mai-06
05-avril-07 *
0
700 000
67 000
166 500
166 500
1 100 000
*(Rupture du 13 au 27-12-07)
Période
Valeur
mensuelle
Indemnité de
fonction
Logement
occupation
entretien
Communication
Voiture de
fonction
Voyage
annuel
familial
Cumul
Mensuel
06-avril-07
31-août-07
1 444 000 **
700 000
67 000
166 500
166 500
2 544 000
01-sept-07
26-sept-07
0
700 000
67 000
166 500
166 500
1 100 000***
(**Indice 1460 x Valeur du point d'indice 1070 –CST et CPS).
*** le montant réellement perçu correspond au prorata
sur 26 jours (soit 1,1 * 26/30
ème
= 953 333 F CFP)
Pour être complet, le logement de fonction, propriété de l'OPT, situé au lotissement
"
Taina
" à Punaauia, a fait l'objet de divers aménagement et frais d'entretien à la demande de
M. FREBAULT au moment de son emménagement. Les dépenses se sont élevées à
7 426 443 F CFP qu’il faudrait ajouter aux dépenses précitées.
Par délibération du 30 octobre 2007, le conseil d’administration de l’OPT a estimé
irrégulière la tenue de sa réunion du 30 août 2007 et par conséquent, les délibérations qui y
ont été adoptées. Il a décidé de demander à Monsieur FREBAULT le remboursement des
sommes versées au titre de son indemnité de président du conseil d'administration, soit
6 280 413 F CFP.
2.1.2.2. :
La rémunération des représentants de l’OPT dans les
sociétés filiales
2.1.2.2.1. Le versement d’une rémunération à l’OPT par les sociétés
TIKIPHONE, MANA, ISS et TNS
Les sociétés TIKIPHONE, MANA, ISS et TNS, « filiales » de l’OPT à 100 %
26
, sont
dirigées et administrées par un Président, l’Office des Postes et Télécommunications, en tant
que personne morale. La représentation de l’Office a été confiée dans un premier temps au
directeur général de l’établissement public et, à compter du 18 décembre 2003, au président
de son conseil d’administration.
Les dispositions de l’article 12 du statut des sociétés, selon lesquelles le président peut
être rémunéré au titre de ses fonctions, ont été mises en oeuvre. Le 21 décembre 2002, le
directeur général de l’OPT, M. Geffry SALMON, représentant l’OPT dans la société
Tikiphone, décide que
cette société versera à l’OPT, président de la société Tikiphone, une
rémunération mensuelle de 1,2 million F CFP à compter du 1
er
janvier 2003. La décision de
verser ces rémunérations ne sera prise que le 29 octobre 2004 pour l’année 2003 et les six
premiers mois de l’année 2004. En juillet 2004, Tikiphone, sous la présidence de
M. Alphonse TERIIEROOITERAI, portera le montant du versement mensuel à 1,5 million
de F CFP.
Les autres sociétés, ISS et MANA, commenceront leurs versements à compter de
juillet 2004 à hauteur de 50 000 F CFP pour ISS et 250 000 F CFP pour MANA.
26
Sauf TIKIPHONE dont le capital est détenu à hauteur de 16% par DEXIA jusqu’en 2008. Cependant, cette entreprise ne joue aucun rôle
dans la direction de TIKIPHONE.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 34 sur 105
TNS, créée le 1
er
janvier 2006, commencera ses versements, sous la présidence de
M. Jean-Alain FREBAULT, à compter de juin 2006 à hauteur de 1,2 million de F CFP par
mois.
Ces montants représentent les rémunérations brutes à la charge des sociétés filiales.
Mais le service des contributions de la Polynésie française, considérant que ces versements
constituent une rémunération de l’actionnaire, les soumettra à l’impôt sur le revenu des
capitaux mobiliers (IRCM) à hauteur de 10 % en 2003 et
2004 et 15 % à compter de 2005.
2.1.2.2.2
Le reversement de cette rémunération aux représentants de l’OPT
dans les « filiales »
2.1.2.2.2.1. Le dispositif mis en oeuvre
Avant même que la décision soit prise par les filiales de verser une rémunération à
l’OPT, un mécanisme de reversement de celle-ci aux représentants avait été décidé par
délibération du conseil d’administration de l’OPT du 26 août 2002. Le Conseil
d’administration autorisait que le directeur général représente l’OPT dans les filiales et qu’il
choisisse son suppléant. Il autorisait aussi que la rémunération susceptible d’être versée à
l’OPT puisse être reversée à ses représentants (le directeur général et son suppléant) par
décision du président du conseil d’administration.
Au moment du transfert de pouvoirs du directeur général vers le président du conseil
d’administration, le 18 décembre 2003, il a été prévu que la représentation de l’OPT soit
assurée par le président du conseil d’administration.
Le dispositif de reversement issu de la combinaison de ces deux délibérations,
distantes de 16 mois, n’a été activé qu’à compter d’octobre 2004.
Ce dispositif n’est pas régulier. La rémunération du président du conseil
d’administration au titre de la représentation de l’OPT dans les « filiales » n’est pas prévue
par l’arrêté CM n°1731 du 19 novembre 2003 qui donnait au conseil d'administration le
pouvoir de déterminer les conditions de rémunérations de son président. Le versement d’une
indemnité au titre de la représentation de l’OPT dans les « filiales » n’est mentionné dans
aucune délibération postérieure à cet arrêté. La délibération du 26 août 2002, qui prévoyait le
principe de reversement des rémunérations, au titre des filiales, au directeur général de l'OPT
et à son suppléant, ne pouvait par conséquent avoir pour effet d'autoriser le versement de ces
rémunérations au président du conseil d'administration. En l'absence de nouvelle délibération
du conseil d'administration l'y autorisant, le président du conseil d'administration, devenu
représentant de l'OPT dans les filiales, a été conduit à s'octroyer, à lui-même, cette
rémunération en dehors de tout contrôle.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 35 sur 105
Ce dispositif est aussi opaque. En confiant au conseil d’administration, par l’arrêté
n° 1731 CM du 19 novembre 2003, le soin de déterminer la rémunération de son président, le
conseil des ministres a entendu qu’elle soit fixée dans la transparence et en toute connaissance
de cause. Or, il est probable que fort peu de membres du conseil d’administration avaient
connaissance de la combinaison des délibérations antérieures permettant la rémunération du
président du conseil d’administration et de son suppléant, au titre des filiales, d’autant plus
que le dispositif ne devait être activé qu’un an plus tard. Ce dispositif a conduit ainsi le
président du conseil d’administration de l’OPT à décider d’abord, en sa qualité de président
de chacune des « filiales », du montant de la rémunération de l’OPT, et ensuite, en sa
première qualité de président du conseil d’administration de l’OPT, du reversement de cette
rémunération de l’office à lui-même et à son suppléant. Cette situation permet donc au
président du conseil d’administration de l’OPT de décider de se verser à lui-même, et sans
aucun contrôle, une rémunération substantielle en provenance de chacune des « filiales », dont
il fixe seul le montant.
Dès lors, les membres du conseil d’administration peuvent ne pas être informés de
cette rémunération supplémentaire, lorsqu’ils fixent le montant de l’indemnité du président du
conseil d’administration de l’OPT. On peut supposer que s’ils en avaient eu connaissance, ils
auraient fait masse de ces rémunérations pour définir l’indemnité du président du conseil
d’administration à un niveau raisonnable.
Le conseil d’administration n’a pas non plus été suffisamment informé de la
nomination irrégulière d’un représentant suppléant de l’office dans les filiales. En effet, à
compter du 18 décembre 2003, le conseil d’administration de l’OPT
n'a plus autorisé
expressément que son président désigne un suppléant. Ainsi, à partir du moment où ce
dispositif a été activé à la fin octobre 2004, aucun reversement de rémunération n’aurait donc
dû être autorisé au bénéfice du conseiller chargé des finances auprès du président du conseil
d’administration. Ce conseiller était en effet indûment chargé de la fonction de représentant
suppléant. Il est regrettable que ce bénéficiaire, parfaitement informé de l’ensemble du
dispositif depuis sa genèse le 26 août 2002, n’ait pas jugé bon de conseiller au président
sortant, Monsieur Alphonse TERIIEROOITERAI, d’apporter aux membres du conseil
d’administration, l’éclairage adéquat sur l’activation du dispositif à laquelle ils avaient
conjointement procédé, les 22 et 28 octobre 2004.
2.1.2.2.2.2. Les bénéficiaires du dispositif de 2003 jusqu’au 30 juin 2007
Au 30 juin 2007, les montants versés par les filiales au titre de la rémunération de leur
présidence représentent globalement 106 800 000 F CFP. Après prélèvement de l’impôt sur le
revenu des capitaux mobiliers, l’OPT a reçu 93 570 000 F CFP. Une partie de cette somme,
soit 64 341 000 F CFP, a été reversée aux présidents successifs du conseil d’administration de
l’OPT et à leur suppléant.
TIKIPHONE
MANA
ISS
TNS
TOTAL
Coût filiale
78 900 000
9 250 000
1 850 000
16 800 000
Reçu OPT
69 585 000
8 087 500
1 617 500
14 280 000
Reversé au PCA
48 462 000
Reversé au suppléant
15 879 000
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septembre 2008 - page 36 sur 105
Le reversement aux représentants de l’OPT dans les « filiales » s’est opéré selon un
partage qui a varié de 90% en début de période à 80 % en fin de période, en faveur du
président du conseil d’administration (PCA) et corrélativement de 10 % à 20 % en faveur du
suppléant, conseiller chargé des finances auprès du président du conseil d’administration.
Pendant la période de juillet à octobre 2004, la part du PCA a été réduite à 55 %. De
même, lorsque les PCA étaient simultanément conseillers à l’assemblée de la Polynésie
française, soit de novembre 2004 à février 2005 et de juin 2006 à mars 2007, les PCA n’ont
pas perçu de rémunération. De ce fait, le total des sommes perçues en provenance des filiales
par l’OPT sur la période n’a pas intégralement été redistribué.
Après paiement de la contribution de solidarité territoriale (CST) sur les sommes
reversées, le montant net des rémunérations perçues s’établit à 57 386 900 F CFP comme
dans le tableau ci-dessous.
(en F CFP)
Par mois
(moyenne)
Dernier mois
perçu
Total période
Cumulé 2003/2004
M. Geffry SALMON
923 388
923 388
16 621 200
Cumulé 2004/2005/2006
M. Alphonse
TERIIEROOITERAI
1 102 027
1 162 800
20 938 511
Cumulé 2007
(jusqu’au 30/06/2007)
M. Jean-Alain
FREBAULT
1 938 000
1 938 000
5 491 000*
Cumulé 2003/2007
(jusqu’au 30/06/2007)
M. Jean-François
MARTIN
265 484
484 500
14 336 189
* Ne prend pas en compte les indemnités mensuelles versées en juillet et août 2007.
Il est utile de signaler que M. SALMON n’a pas activé le dispositif pourtant
juridiquement en place depuis le 26 août 2002. En conséquence, il n’a rien perçu durant la
période pendant laquelle il dirigeait l’OPT. Ce n’est qu’en novembre 2004, après activation
du dispositif par Monsieur TERIIEROOITERAI, avec le concours intéressé du conseiller
chargé des finances, à partir d’octobre 2004, que M. SALMON a pu bénéficier de la
rémunération en provenance des « filiales ». Celui-ci indique «
qu’il a perçu des indemnités
rétroactivement en toute bonne foi, considérant légitimement qu’aucun écueil juridique n’y faisait
obstacle, après que leur versement ait fait l’objet d’une vérification de sa licéité par des conseillers de
la direction de l’établissement, ait été autorisé par le PCA et effectué par l’agent comptable de
l’Office ».
Compte tenu, selon Monsieur SALMON, d’une éventuelle remise en cause du
versement de ces indemnités, il
«
se propose, afin d’attester de sa bonne foi s’il en était besoin, de
consigner les sommes perçues sur [le] compte CARPAP [de son avocat] dans l’attente d’une décision
de l’OPT à cet égard ».
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Le tableau ci-dessous détaille la rémunération versée à chacun.
(en F CFP)
Période
Bénéficiaire
Titre
Montant
PM : CST
Cumul
du 01/01/2003 au 23/11/2003
G. SALMON
Directeur
Général
du 24/11/2003 au 30/06/2004
G. SALMON
Président du CA
16 621 200
874 800
17 496 000
dont au titre de 2003
11 664 000
dont au titre de 2004
5 832 000
du 01/01/2003 au 30/06/2004
JF MARTIN
Suppléant
1 846 800
97 200
1 944 000
dont au titre de 2003
1 296 000
dont au titre de 2004
648 000
du 01/07/2004 au 31/10/2004
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
3 385 800
178 200
3 564 000
du 01/07/2004 au 31/10/2004
JF MARTIN
Suppléant
923 400
48 600
972 000
du 01/11/2004 au 09/03/2005
JF MARTIN
Suppléant
825 350
43 440
868 790
du 09/03/2005 au 31/03/2005
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
913 471
48 077
961 548
du 10/03/2005 au 31/03/2005
JF MARTIN
Suppléant
218 439
11 496
229 935
2ème trimestre 2005
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
3 693 600
194 400
3 888 000
2ème trimestre 2005
JF MARTIN
Suppléant
923 400
48 600
972 000
3ème trimestre 2005
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
3 693 600
194 400
3 888 000
3ème trimestre 2005
JF MARTIN
Suppléant
923 400
48 600
972 000
4ème trimestre 2005
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
3 693 600
194 400
3 888 000
4ème trimestre 2005
JF MARTIN
Suppléant
923 400
48 600
972 000
1er trimestre 2006
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
3 488 400
183 600
3 672 000
1er trimestre 2006
JF MARTIN
Suppléant
872 100
45 900
918 000
01/04 au 24/05/2006
A. TERIIEROOITERAI
Président du CA
2 070 040
108 949
2 178 989
2ème trimestre 2006
JF MARTIN
Suppléant
872 100
45 900
918 000
3ème trimestre 2006 + Rappel
Juin TNS
JF MARTIN
Suppléant
1 647 300
86 700
1 734 000
4ème trimestre 2006
JF MARTIN
Suppléant
1 453 500
76 500
1 530 000
1er trimestre 2007
JF MARTIN
Suppléant
1 453 500
76 500
1 530 000
Avril et mai 2007
JF MARTIN
Suppléant
969 000
51 000
1 020 000
Avril (25/30) et mai 2007
JA FREBAULT
Président du CA
3 553 000
187 000
3 740 000
Juin 2007
JA
FREBAULT
Président du CA
1 938 000
102 000
2 040 000
Juin 2007
JF MARTIN
Suppléant
484 500
25 500
510 000
TOTAL
57 386 900
Compte tenu des larges délégations accordées aux directeurs généraux des « filiales »,
l’ensemble de ces rémunérations perçues ne correspond pas à une activité supplémentaire
significative de la part des bénéficiaires, en plus de celle qu’ils exerçaient au sein de l’OPT.
C’est d’ailleurs la nécessité de piloter et de coordonner l’ensemble des entités de l’OPT que
les promoteurs d’un niveau de gouvernance globale ont mis en avant pour créer la fonction
opérationnelle de président du conseil d’administration de l’OPT. Cette fonction, prise en
compte et rémunérée à l’OPT, ne pouvait l’être une deuxième fois dans les filiales. C’est
d’ailleurs la situation qui a prévalu longtemps à MANA et ISS, lesquelles n'ont versé aucune
rémunération pendant plus de deux années. C’est en application de cette analyse que le
conseil d'administration du 30 octobre 2007 a demandé à son représentant titulaire au cours de
la période précédente le remboursement des sommes perçues au titre du reversement par
l’OPT des rémunérations provenant de la présidence des « filiales ».
A la suite du contrôle de la chambre, l’OPT a décidé de consulter des cabinets de
juristes. Bien qu’en partie divergentes, leurs conclusions ont
conduit l’Office à supprimer,
comme l’avait recommandé la chambre, la rémunération des dirigeants au titre de la
représentation de l’établissement public dans les « filiales ». Par délibération n°44
E
du
30 octobre 2007, l’alinéa 2 de l’article 4 de la délibération n° 2002-43 du 26 août 2002,
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septembre 2008 - page 38 sur 105
concernant le reversement de la rémunération de l’OPT, président des SAS, à son ou ses
représentants physiques, a été abrogé.
2.1.2.3. : Conclusion sur les indemnités et rémunérations des
dirigeants de l'OPT.
Les rémunérations, indemnités et avantages en nature allouées aux dirigeants
successifs de l’Office au titre de leur fonction de président du conseil d’administration et, es
qualité, de représentant de l’office dans les « filiales », ont atteints des montants très élevés.
Monsieur SALMON percevait ainsi une rémunération et des avantages en nature d’un
montant de 3,4 MF CFP au titre de la présidence du conseil d’administration de l’OPT
auxquels il faut ajouter la rémunération mensuelle moyenne au titre de la représentation de
l’OPT dans la filiale TIKIPHONE
27
, soit 923 000 F CFP, perçue rétroactivement.
M. SALMON percevait donc plus de 4,3 MF CFP (36 034 €) par mois en moyenne lorsqu’il a
dirigé l’OPT en 2003 et 2004.
Lorsqu’il a dirigé l’OPT, M. TERIIEROOITERAI a perçu, en rémunérations et
avantages en nature, un montant mensuel moyen de plus de 2,5 MF CFP au cours de la
première période et de 2,7 MF CFP durant la seconde. A cette rémunération, doit être ajouté
le reversement de l’OPT à ses représentants dans les « filiales » de près de 850 000 F CFP et
de plus de 1,2 MF CFP par mois respectivement pour les première et deuxième périodes. Au
total, l’intéressé a bénéficié d’émoluments mensuels de près de 3,4 MF CFP (28 492 €) au
cours de la première période et de près de 4 MF CFP (33 520 €) durant la seconde.
Depuis le 6 avril 2007, date à laquelle il a été démis de ses fonctions à l’assemblée,
M. FREBAULT a perçu, en plus de sa rémunération et de ses avantages en nature d’un
montant de plus de 2,5 MF CFP en sa qualité de président du conseil d’administration, une
indemnité de 1 938 000 F CFP net par mois au titre du reversement à son représentant titulaire
de la rémunération perçue par l’OPT pour la présidence des « filiales ».
Ainsi, tel que le résume le tableau suivant, M. FREBAULT a perçu 1,1 MF CFP par
mois au seul titre des avantages en nature pendant la période où il était membre de
l’assemblée de la Polynésie française et président du conseil d’administration de l’OPT, puis
plus de 4,3 MF CFP (36 034 €) par mois du 6 avril au 31 août 2007 et postérieurement, les
seuls avantages en nature au prorata de la période accomplie.
Rémunérations, indemnités et avantages en nature des dirigeants de l'OPT
en F CFP
Dirigeants OPT
Période
Moyenne Mensuelle
au titre de l'Office
Moyenne Mensuelle
au titre des Filiales
Moyenne Mensuelle
cumulée
Geffry SALMON
DG puis PCA
du 01/01/03 au 22/06/04
3 400 000
923 000
4 323 000
1ère période
du 23/06/04 au 02/11/04
2 517 268
846 450
3 363 718
Alphonse TERIIEROOITERAI
2ème période
du 09/03/05 au 23/05/06
2 744 236
1 214 200
3 958 436
27
Monsieur SALMON a indiqué que les sommes perçues au titre de la représentation de l’OPT dans la société TIKIPHONE sont à la
disposition de l’EPIC si l’irrégularité est établie. Au demeurant, elles lui ont été versées et ont fait partie intégrante de la rémunération que
l’OPT entendait lui servir. Elles doivent donc être maintenues dans le calcul fait.
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1er période,
uniquement
avantages en
nature
du 24/05/06 au 06/04/07
1 100 000
-
1 100 000
rupture du 13 au 27/12/07
Jean-Alain FREBAULT
2ème période
du 07/04/07 au 26/09/07
2 400 000*
1 938 000*
4 338 000*
* sauf à partir du 1
er
septembre 2007, date à laquelle le PCA n’a pas perçu son indemnité, mais seulement les avantages en nature au prorata
de la période accomplie, soit un montant de 953 000 F CFP.
La chambre tient à souligner le caractère démesuré des rémunérations des dirigeants
de l’office des postes et télécommunications, qui ne se retrouvent dans aucun autre organisme
public local. Depuis 2000
28
, la collectivité de la Polynésie française limite, dans le cadre des
autorisations accordées à ses représentants pour exercer le mandat de Président du conseil
d'administration, la rémunération des dirigeants des sociétés d’économie mixte (SEM).
Depuis cette date, le plafond de rémunération des dirigeants de SEM, tous avantages compris,
n'a jamais été fixé à un niveau supérieur à 2 MF CFP. Le conseil d'administration de l’OPT,
établissement public, n'a pas su agir de manière analogue pour fixer avec mesure la
rémunération globale de ses dirigeants.
La Chambre prend bonne note que ses recommandations ont été en partie suivies par
l'OPT. Les décisions que l’Office a déjà prises en ce domaine vont dans le sens d'une gestion
plus économe :
-
modération de la rémunération du président du conseil d’administration,
notamment lorsqu’il est employé de l’OPT avant sa nomination, en la plafonnant
à 200 000 F CFP en sus de sa rémunération antérieure ;
-
abrogation du reversement de la rémunération de l’OPT dans les filiales à ses
représentants physiques à compter du 30 octobre 2007 ;
-
abrogation de l’attribution d’un logement de fonction ou d’une indemnité de
logement d’un montant de 250 000 F CFP, qui avait été instituée le 31 mars
2005 ;
-
suppression de la prise en charge d’un vol A/R Papeete-Paris en classe affaires
pour l’intéressé et sa famille (conjoint et enfants mineurs) ou toute autre
destination n’entraînant pas une dépense supérieure ;
-
abrogation de l’indemnité de départ équivalant à 1 mois de rémunération globale
augmentée des avantages en nature par mois de présence, plafonnée à 12 mois,
qui avait été instituée le 31 mars 2005.
Dans sa réponse, l’ancienne directrice générale de l’OPT, Madame NOUVEAU, avec
l’accord de l’ancien président du conseil d’administration, Monsieur BARRAL, indiquait
qu’une clarification des règles doit être faite par le gouvernement, en contrôlant l’application
de l’arrêté n° 1731 CM et en définissant les conditions de rémunération des dirigeants de
l’Office.
La chambre estime que ces orientations, qui vont dans le bon sens, restent à concrétiser
par des décisions. Elles seront de nature à faciliter l'adoption de mesures plus générales visant
à mieux maîtriser l'évolution de la masse salariale de l’établissement public.
28
Délibération n°2000-38 APF du 30 mars 2000, article 19, 4
ème
alinéa.
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er
septembre 2008 - page 40 sur 105
2.2 Une gestion défaillante laissant libre cours à la gabegie
La gestion défaillante de l’OPT est illustrée par de nombreux exemples tant en ce qui
concerne la perception des recettes, pour le moins laxiste, que l’absence de contrôle sur des
dépenses du président du conseil d’administration, sans lien, à certaines époques, avec les
missions de l’Office, et des investissements hasardeux, mal maîtrisés ou sans projets
clairement définis.
2.2.1.
La gestion très critiquable des recettes et des fonds disponibles
2.2.1.1. : La gestion des factures impayées
2.2.1.1.1. La régulation des créances privées par le recours à l’admission
en non valeur
Le solde des factures impayées de téléphone, de services audiovisuels et de services
internet s’établit à plus ou moins 1 milliard de F CFP depuis 2001. Ce stock d’impayés
comprend des factures très anciennes dont le recouvrement est fortement compromis.
Malgré une procédure de recouvrement d’une certaine efficacité, le stock d’impayés s’accroît
annuellement de quelques dizaines de millions de F CFP.
Presque chaque année, l’OPT procède à l’admission en non valeur des créances
irrécouvrables ou dont le recouvrement est fortement compromis malgré les mesures qui ont
été prises pour y parvenir, ce qui aboutit à réduire, à due concurrence, le montant de ses
recettes. De moins de 10 MF CFP par an de 1999 à 2002, le montant des admissions en non
valeur a atteint près de 60 MF CFP en 2003 et 210 MF CFP en 2005. Cette dernière année,
l’OPT a admis en non valeur des créances douteuses née entre 1991 et 1998.
Le dégonflement et le rajeunissement du stock d’impayés ayant été opéré au cours des
années 2003 et 2005, l’OPT doit aujourd’hui prendre les mesures de recouvrement
susceptibles de lui permettre de parvenir à une certaine résorption du stock d’impayés, sans
recourir une nouvelle fois à des admissions en non valeur massives.
2.2.1.1.2 La gestion des créances sur les organismes publics, longtemps
laxiste, s’est récemment améliorée
Contrairement aux impayés d’origine privée, les créances sur les organismes officiels,
qui s’établissaient en août 2005 à 547 MF CFP, ne sont pas transmises au comptable de
l’établissement public. Le suivi de leur recouvrement est assuré par le domaine commercial
du Pôle des services de téléphonie fixe (PSTF), conformément aux dispositions spécifiques
adoptées par le conseil d’administration.
Le dispositif en vigueur avant mars 2005, fondé sur des délibérations de 1987, 1988 et
1991, prévoyait qu’en cas de non paiement après un délai de 4 mois, étendu à 8 mois, l’OPT
procèderait à la mise en service restreint, lequel devait être entendu comme limitant l'accès à
la circonscription de taxe de Papeete pour les abonnés dépendant de cette circonscription, et à
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l'ensemble de la Polynésie française pour les abonnés des autres circonscriptions. Une
disposition autorisait cependant le directeur général de l'Office à négocier et à conclure avec
les communes des plans pluriannuels d'apurement de leurs dettes, sans que l'échelonnement
retenu ne puisse s'étendre sur plus de quatre exercices. Faute de volonté des dirigeants de
l’OPT, ce dispositif n’a pas pu faire la preuve de son efficacité. Depuis le 12 octobre 2007, le
délai avant mise en service restreint a été ramené à 6 mois.
Le 31 mars 2005, lors de sa première réunion depuis son renouvellement consécutif aux
élections territoriales de mars 2005, le conseil d’administration de l’Office, sous la présidence
de M. Alphonse TERIIEROOITERAI, décidait de modifier le dispositif, sans que cette
question ne soit inscrite à l’ordre du jour du conseil et donc sans qu’un rapport de présentation
ne soit présenté et examiné par ses membres. C’est à la demande du vice-président et ministre
des postes et télécommunications, M. Emile VERNAUDON, lequel est aussi maire de
MAHINA, qu’un dispositif plus favorable aux organismes mauvais payeurs a été décidé, sans
examen sérieusement préparé. La durée du plan d’apurement a été portée de quatre à dix
années, sans que la mise en service restreint ne puisse être opérée durant ce délai. Il est
indéniable que M. VERNAUDON a usé de son influence au sein du conseil d’administration
de l’OPT pour obtenir cet avantage qui bénéficiait surtout à la commune de MAHINA, dont
les arriérés de paiement étaient de loin les plus importants. En ne payant pas ses créances
téléphoniques et en faisant modifier favorablement pour sa commune les règles de
recouvrement mises en place par l’OPT, le maire de MAHINA a pu continuer à ne pas mettre
en place de contrôle sur l’usage des postes téléphoniques municipaux et ainsi s’attirer les
faveurs de certains de ses administrés.
La mesure de mise en service restreint des services officiels qui ont des impayés ou qui
n’honorent pas le plan d’apurement qu’elles ont signé, n’est entrée en vigueur qu’en juillet
2006, après changement du président du conseil d’administration de l’OPT et du ministre des
postes et télécommunications.
La chambre prend acte de l'efficacité de la mise en oeuvre des mesures particulières
appliquées depuis peu dans le cas de non paiement des créances de télécommunications par
un organisme « officiel » (Etat, Polynésie française, et communes). A la fin de l’année 2006,
le volume des impayés des organismes officiels ne s’établissait plus qu’à 201 MF CFP (contre
547 MF CFP en août 2005). Au 9 août 2007, à la fin des investigations de la Chambre,
il était
même ramené à 153 MF CFP. La plupart des organismes ont réduit considérablement leur
dette ou se sont engagés dans un plan d’apurement qu’elles respectent. Seule la commune de
MAHINA n’a pas tenu son engagement de résorption effective de sa dette, malgré la signature
d’un plan d’apurement.
La Chambre recommande à l’OPT de mettre en oeuvre les moyens de droit qui lui
permettrait d’obtenir le paiement des créances qu’il détient sur ses abonnés en général et en
particulier sur ses abonnés publics. Ainsi, en ce qui concerne les communes, l’OPT peut
intervenir auprès du haut-commissaire pour qu’il mette en application les dispositions de
l'article 9 VI VIII et IX de l’ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 relative aux
dépenses obligatoires. Pour la Polynésie française et ses établissements publics, l’OPT peut
agir auprès du haut-commissaire qui, à défaut d’inscription des crédits nécessaires par
l’assemblée délibérante, saisira la chambre territoriale des comptes, en application des
dispositions des articles 185-4 et 185-15 de la loi organique statutaire du 27 février 2004
modifiée.
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septembre 2008 - page 42 sur 105
2.2.1.1.3. L'OPT doit prendre les moyens adéquats pour régler la situation
de la commune de MAHINA
La commune de MAHINA avait une dette de 89 186 001 F CFP envers l’OPT, dont
88,3 MF CFP de créances téléphoniques au titre des impayés arrêtés au 31 décembre 2004, ce
qui
représentait 80,4% de la dette de l'ensemble des communes et 64% de la dette publique
constatée dans les comptes de l’OPT.
Malgré la signature d'une convention en 2005, suivie d'un avenant en 2006 par lesquels
la commune s’engageait à régler sa dette, cette collectivité ne s’était toujours pas, en juillet
2007, acquittée du premier franc de sa dette antérieure au 1
er
janvier 2005. Plus encore, le
pôle des services de téléphonie fixe précisait que la dette s'était aggravée des impayés 2005 et
2006 pour atteindre 110 943 234 F CFP. Ce n’est que sous la menace d’être mise en service
restreint que la commune s’est acquittée des premiers paiements prévus dans le cadre du plan
pluriannuel de résorption de sa dette. Celle-ci dépasse encore largement le montant de
70 MF CFP pour ce qui concerne la convention d’apurement de la dette. Il faut y ajouter de
nouveaux impayés contractés postérieurement pour un montant de 11,701 MF CFP.
Alors que le délai imparti pour le règlement de la première échéance (30 novembre
2006) était largement dépassé, l'Office des postes n'a pas tenté d’obtenir du représentant de
l’Etat la mise en oeuvre des dispositions relatives à l’inscription et au mandement d’office des
dépenses obligatoires des communes, alors même que la convention d’apurement a reçu le
visa du chef de la subdivision des Iles du Vent, le 15 mai 2006. En outre, compte tenu de
l’aggravation de la dette au cours des deux dernières années (2005 et 2006), la chambre
s’étonne que la restriction du service téléphonique de la commune n’ait pas été mise en oeuvre
en application des dispositions de l’article 3 la convention d’étalement de la dette et de la
délibération du 31 mars 2005, l’une et l’autre signée de la main de M. Emile VERNAUDON.
La Chambre recommande à l’OPT de suivre sans complaisance l’exécution du plan
d’apurement de la dette de la commune de MAHINA et de ne pas tolérer que les factures
nouvelles restent impayées.
2.2.1.2. : La gestion défaillante des contrats de régie publicitaire de
l’annuaire officiel de la Polynésie française
Le code des télécommunications prévoit qu’un annuaire officiel des abonnés de
l’ensemble des opérateurs de télécommunication doit être édité annuellement par l'Office des
postes et télécommunications dans le cadre de sa mission de service public. Sous son contrôle,
un régisseur commercialise des encarts de publicité insérés dans les listes d’abonnés.
2.2.1.2.1. La gestion des contrats de régie publicitaire sur la période 2002-
2005.
Jusqu’à l'édition de l'annuaire 2002, le régisseur des encarts publicitaires de l’annuaire
officiel de la Polynésie française était la société Publi-Pacific, gérée par M. Hubert Haddad
(groupe 2H). C’est à la société Yellow on Line, appartenant au même groupe, qu’a été confié,
dans le cadre d’un appel d’offre restreint, le contrat de régie publicitaire de l’annuaire officiel
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de l’OPT de Polynésie française et de l’annuaire touristique (Official Phone Book) pour les
années 2003 à 2007. Ce contrat a été résilié en 2005.
Le contrat ainsi dévolu s’inscrivait dans le cadre de la mission de service public de
l’OPT. Tous les éléments, pièces et documents, dont le fichier clientèle des annonceurs,
concourant à la réalisation de l’annuaire demeuraient la propriété de l’Office, à l’exception
des maquettes publicitaires, qui restaient la propriété des annonceurs. Le régisseur était le
mandataire de l’OPT de Polynésie française auprès des annonceurs. L’OPT (l’éditeur)
définissait les conditions générales de ventes et disposait d’un droit de regard sur les
commandes de publicité. Le régisseur devait soumettre à l’agrément préalable de l’éditeur ses
tarifs de publicité.
Le régisseur était habilité dans le cadre de ce contrat à participer à la perception des
deniers publics. Le régisseur encaissait l’intégralité des recettes provenant de la publicité, et
en assurait le reversement à l’OPT selon un échéancier précis. A cette fin, un titre de
perception payable à l’agent comptable de l’OPT, était adressé au régisseur 15 jours avant la
date d’échéance, d’un montant de 20 MF CFP, le 1
er
de chaque mois, de janvier à avril
de
chaque année et le solde deux mois après la date de parution de l’annuaire. Postérieurement à
ces versements, le régisseur était commissionné sur le montant net facturé aux annonceurs. Un
avenant, entrant en vigueur le 1
er
janvier 2005, apportera des modifications au contrat tenant
notamment à sa nature de marché public, sans en modifier l’économie générale.
En contrepartie du travail de régisseur, l’OPT devait reverser à Yellow on Line une
commission variant entre 25% et 28% (26 % à compter de 2005) selon le chiffre d’affaires
collecté et reversé à l’Office. Indépendamment du chiffre d’affaires réalisé, le régisseur
garantissait à l’OPT un reversement minimal, net de commission, de 180 millions de F CFP
(153 millions de F CFP à compter de 2005). Sur cette base, en 2005, l’OPT escomptait
parvenir, après paiement des charges relatives à la réalisation de l’annuaire, à un résultat
positif de 69 MF CFP.
A la fin de l’exercice 2005, l’OPT a pu constater que les sociétés Publi-Pacific et
Yellow on Line, appartenant toutes les deux au groupe Haddad, étaient redevables d’un
montant de 577 098 970 M F CFP alors que les modalités de reversements étaient pourtant
parfaitement encadrées par la convention de mandat. Les sommes dues par l'OPT au groupe
2H, selon les allégations de M. HADDAD, ne sauraient être prise en compte, dès lors que le
mandataire devait, selon les stipulations conventionnelles définissant le cadre du mandat,
reverser la totalité des sommes collectées. En outre, aux termes de la convention de mandat,
des pénalités de retard auraient dû être versées pour exécution hors des délais contractuels des
dispositions du contrat, sauf à démontrer que la responsabilité en incombait à l'établissement
public. Le non-respect du calendrier de parution de l’annuaire (retards de 1,5 mois en 2003, 4
mois en 2004, 2,5 mois en 2005) a engendré un fort mécontentement chez les annonceurs qui
utilisaient l'annuaire comme premier moyen de communication.
2.2.1.2.2. L’étonnante passivité de l’OPT dans la défense de ses intérêts
On peut s’étonner que bien que les modalités de reversement des recettes de publicité
aient été très précisément fixées dans la convention de mandat liant l’OPT, organisme soumis
aux règles de la comptabilité publique, et le groupe Haddad, aucune démarche autre qu’orale
n’ait été accomplie, de 2001 à mars 2004, pour recouvrer les sommes dues. L’engagement
écrit des parties, le 18 mars 2004, sur un échéancier de paiement de 9 traites mensuelles d'un
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montant de 16,666 millions de FCFP, après versement d’un premier chèque de 50 MF CFP,
n’a pas été honoré par le mandataire. Ce dernier n’a en effet versé, avec 2 mois de retard sur
la date prévue, qu’un chèque de 45 MF CFP. Le conseil d’administration de l’OPT n’a été
officiellement informé pour la première fois de la situation de ce dossier que le 18 août 2005.
A compter de cette date, l’OPT a intimé à la société Yellow On Line de verser le chiffre
d’affaires de l’annuaire 2005. A défaut d’avoir constaté le moindre versement, l’OPT a résilié
le marché, en application des dispositions contractuelles, le 7 septembre 2005.
La chambre constate que le mandataire a joui d’un ménagement remarquable dans le
traitement de ce contentieux qui peut s’expliquer par les nombreuses autres relations
commerciales que l’OPT entretenait avec lui. Ainsi, le 17 mars 2004, alors même que le
groupe Haddad accusait un retard de reversement pour une somme supérieure à 200 MF CFP
au titre des annuaires 2002 et 2003 qui ne peut, en raison de sa nature, en aucun cas être
compensée, l’OPT décidait de racheter sans hésiter, pour 335 MF CFP, l'immeuble Shangrila,
propriété de la SCI FSJHMC, gérée par M. Hubert Haddad. Le lendemain, l'OPT accordait un
échéancier de règlement de la dette qui ne sera d’ailleurs pas honoré. De la même manière,
l’Office continue d'acheter à différentes sociétés du groupe Haddad des emplacements
publicitaires pour plusieurs dizaines de millions de F CFP par an.
Mais il est encore plus curieux qu’une société conseil ait recommandé à l’Office, en
raison de la nature particulière des relations qu’il entretenait avec son débiteur, d’agir dans la
discrétion, en évitant que leur conflit se retrouve sur la place publique et en signant un accord
de confidentialité qui oblige les parties.
C’est dans ces conditions que l’Office a eu recours à la transaction pour assurer le
recouvrement des sommes collectées. Or, il n’apparaît pas, en l’état actuel de la
réglementation applicable en Polynésie française, que l’OPT, établissement public, soit
autorisé à transiger dans la matière qui l’intéresse. Mais surtout, aucune délibération
spécifique n’a autorisé le président du conseil d’administration à engager l’établissement
public dans cette voie. L’information, donnée incidemment au cours du conseil
d’administration du 7 décembre 2005, selon laquelle une transaction amiable serait en cours
de conclusion, ne peut valoir habilitation. Pourtant, dans ce cadre juridiquement fragile, le
président du conseil d’administration a décidé d’amoindrir les possibilités d’action de l’OPT.
Alors que le régisseur n’avait pas respecté, jusqu’à l’exercice 2004 inclus, les clauses strictes
qui s’imposaient à lui dans le cadre conventionnel, ce qui aurait dû lui valoir une résiliation
immédiate sans la moindre indemnité, le président du conseil d’administration a signé le
6 mars 2006, sans habilitation, un protocole d’accord de transaction prévoyant d'instituer un
collège d’arbitres destiné à évaluer une indemnité pour le groupe Haddad, indemnité qui
n’avait donc pas lieu d’être, et prévoyant d'interdire à l’Office tout recours judiciaire en cas
d’inexécution des dispositions contenues dans la transaction.
L’échec de la transaction a rapidement été constaté par défaut de paiement des
premières mensualités du plan de résorption de la dette. Ainsi un premier paiement d’un
montant de 84 270 042 F CFP n’a pas été honoré. Présenté à l’encaissement, le chèque a été
retourné portant la mention « signature non conforme ». Il a été représenté, puis retourné avec
la mention « défaut de provision ». Depuis, la situation contentieuse avec la société PUBLI
PACIFIC a été réglée par l’encaissement le 18 octobre 2007 d’un chèque de banque de
57 037 605 F CFP après prise en compte de nouveaux règlements dus par l’OPT au groupe
HADDAD. En revanche, aucun règlement n’a été effectué par la société YELLOW ON
LINE, qui reste redevable de 436 MF CFP. Les actions judiciaires à son encontre sont
poursuivies
.
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septembre 2008 - page 45 sur 105
Ainsi, en engageant tardivement une action judiciaire à la suite des défauts de
reversements anciens de son mandataire, l’OPT a pris le risque d'amoindrir ses chances de
voir régler la créance qu’il détient sur le groupe Haddad. Malgré ses déboires avec ledit
groupe, l'OPT lui a confié un nouveau mandat dans le cadre de la réalisation de l’annuaire
2006.
2.2.1.2.3. Le contrat de régie publicitaire pour l’année 2006
Après la rupture des relations avec la société Yellow on Line, le conseil
d’administration de l’OPT a décidé d’internaliser la gestion de l’annuaire 2006. Cependant, ne
disposant pas, à cette date, des compétences et du savoir faire nécessaires pour assurer en
interne l’ensemble de ces activités, l’Office a retenu un dispositif faisant appel, dans certains
domaines, à des prestataires, tout en conservant le pilotage global et le contrôle des
opérations.
Comme l'indique un document interne à l'établissement public, le président du conseil
d’administration de l’OPT, en accord avec M. Hubert HADDAD (Président du Groupe 2H),
ce qui ne manque pas de surprendre, a
établi le 25 novembre 2005 un projet de contrat avec la
société Club Editions Polynésie. Curieusement, M. HADDAD, dont le groupe n’a
apparemment aucun lien juridique avec cette société, ainsi que le gérant de Yellow on Line,
société détentrice du précédent mandat accordé par l’OPT, ont activement participé, comme le
révèlent les échanges de courriers recueillis au cours de l'instruction, à la mise au point du
contrat avec la société Club éditions Polynésie, en lieu et place de son gérant, par ailleurs
ancien commercial de la société Yellow on Line.
Par prudence, le directeur général de l’OPT a demandé que le conseil d’administration
autorise expressément son président à signer ce contrat avec une société, à l’évidence, proche
du groupe 2H. Le conseil d’administration, après de vifs débats, a décidé de procéder à une
consultation restreinte. Celle-ci, organisée en sollicitant des sociétés qui n’avaient aucune
chance d’être choisies, s’est révélée de pure forme, puisque c’est la société Club Editions
Polynésie, pressentie avant la consultation, qui a été retenue par la commission d’appel
d’offres, laquelle a néanmoins formulé de nombreuses réserves et des recommandations,
craignant notamment que les difficultés antérieures avec les sociétés du groupe 2H ne se
reproduisent. Un contrat a été signé le 28 février 2006.
Les modalités de sélection de l’attributaire, qui ne respectaient pas les règles d’achat
public applicables à l’OPT, ont manifestement porté atteinte à l’égalité des candidats, dans la
mesure où le prestataire a été retenu avant même la mise en oeuvre d’une consultation
formelle. C’est donc en toute connaissance de cause que le favoritisme s’est manifesté au
profit de la société Club Editions Polynésie.
Ce contrat, conclu au titre de l'annuaire 2006, intègre des modifications dans les
relations contractuelles avec le prestataire. L’OPT s’est théoriquement assuré une plus grande
maîtrise des relations avec son mandataire. Le prestataire déclare le montant du chiffre
d’affaires et remet, contre accusé de réception, les sommes recouvrées à l’OPT,
accompagnées d’un bordereau décrivant le détail des opérations. L’Office encaisse désormais
directement l’intégralité des recettes libellées à son nom, issues de la vente des espaces
publicitaires aux annonceurs et verse a posteriori la commission due au prestataire.
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Le prestataire s’engage à collecter et à reverser le montant minimum garanti de
155
MF CFP au titre des annuaires officiel et touristique, édition 2006. Or, malgré les
améliorations dans la rédaction du document contractuel, un nouveau litige est apparu. La
société Club Editions Polynésie est redevable à l'OPT d’une somme de 25 millions de F CFP.
Malgré une mise en demeure, notifiée le 12 février 2007 à la société Club Editions Polynésie,
de restituer les sommes dues et les dossiers clients, l'OPT, à la date du 6 août 2007, ne pouvait
que constater l’absence de réponse de son mandataire.
2.2.1.2.4. La gestion du contrat de régie publicitaire pour l’année 2007
Au début du mois de septembre 2006, les services de l'OPT semblent avoir découvert
l’existence d’un avenant au contrat signé le 27 mars 2006 entre l’OPT, représenté par le
président du conseil d’administration, M. Alphonse TERIIEROOITERAI et la société Club
Editions Polynésie. Cet avenant, qui confie les éditions 2007, 2008 et 2009 des annuaires à
cette même société, a été signé par M. Alphonse TERIIEROOITERAI durant la période où il
a cumulé les fonctions de président du conseil d’administration et de directeur général de
l’OPT.
La prorogation du contrat de trois années est contraire aux règles de passation des
contrats de l’OPT, dans la mesure où le montant total de la prestation étalée sur 3 années est
estimé à 150 millions de F CFP. Le président du conseil d’administration n’était donc pas
compétent pour signer de sa propre initiative ce contrat. Seul le conseil d’administration de
l’OPT y était autorisé. N’étant pas informée, cette instance n’a pu empêcher la signature de
l’avenant
.
Par ailleurs, la signature d’un tel avenant constitue à l’évidence un bouleversement
substantiel de l’économie du contrat signé en 2006. Une nouvelle mise en concurrence était
dès lors absolument indispensable. En attribuant ainsi ce marché à Club éditions Polynésie,
M. Alphonse TERIIEROOITERAI
a gravement porté atteinte à l’égalité des candidats à
l’obtention d’un contrat avec l’OPT et à la transparence des procédures, principe édicté à
l’article D.311-5 du code des postes et télécommunications de la Polynésie française.
L'intéressé évoque, pour se justifier, la nécessité pour l’OPT d'assurer l'édition de l’annuaire
et de trouver un prestataire, l'établissement public n’ayant pas, selon lui, initié suffisamment
tôt l’internalisation de cette activité
.
Par délibération du 4 décembre 2006, le conseil d'administration a autorisé le Président
du conseil d'administration à engager les procédures visant faire annuler le contrat conclu
entre l'OPT et la société Club éditions, et prorogé par avenant. L’action en nullité de l’avenant
devant le tribunal de commerce, l’assignation de la société devant ce même tribunal, ainsi que
la saisine du juge de la mise en état d’une demande tendant à faire cesser le trouble illicite
causé en continuant à démarcher les annonceurs,
sont actuellement toujours pendantes.
Il reste que la signature de cet avenant est préjudiciable à l'OPT qui n’a pu négocier et
obtenir des prestations de qualité au meilleur prix. Elle a également porté atteinte à la
rentabilité de l’activité « annuaire » et simultanément aux intérêts des clients qui n’ont pas pu
bénéficier de meilleures offres tarifaires.
L’OPT a désormais décidé de réaliser l'annuaire officiel en interne, à l’exception de la
régie publicitaire qui a été confiée par contrat à la société Régie Publicitaire Polynésie (RPP -
Groupe Hersant) pour l’année 2007.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 47 sur 105
A ce jour, la mise en oeuvre de cette dernière convention de mandat ne présente aucune
anomalie particulière et semble se dérouler dans le respect des termes du contrat. Cependant,
le contentieux avec les précédents régisseurs génère de graves dysfonctionnements dans la
commercialisation de l'annuaire 2007, avec des risques de contentieux entre l'OPT et des
annonceurs. Certains clients, qui ne sont pas passés par la nouvelle régie publicitaire (RPP),
ne figureront pas dans l’annuaire 2007.
En conclusion, la Chambre ne saurait trop insister sur le respect des règles d’attribution
des contrats telles qu’elles sont définies par la réglementation locale et des procédures
applicables au sein de l’OPT. Au-delà du respect des règles, la Chambre recommande à
l’Office de rationnaliser les relations commerciales qu’il entretient avec ses prestataires,
fournisseurs ou mandataires comme avec ses clients. La tolérance suspecte tant à l’égard des
organismes publics mauvais payeurs que des mandataires irrespectueux des engagements
contractuels, ne devrait plus avoir cours dans la gestion de l’établissement public.
2.2.1.3. : La gestion des placements financiers
L’OPT dispose, à ce jour, de 10,268 milliards de F CFP (86 millions d’euros) placés en
Euro Medium Term Notes (EMTN) auprès de l’Union des Banques Suisses et est engagé pour
encore 4 et 5 ans selon les placements. Ces placements sont intervenus selon des modalités
qui n'ont pas toujours été clairement présentées aux membres du conseil d'administration.
2.2.1.3.1. Le cadre législatif issu de la loi organique de 2004 autorise une
gestion dynamique de la trésorerie
La loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la
Polynésie française ouvre la faculté au conseil des ministres d’assurer
le placement des fonds
libres de la Polynésie française et d’autoriser le placement des fonds libres de ses
établissements publics, en valeurs d’Etat ou en valeurs garanties par l’Etat.
Par délibération du 21 décembre 2004, l’Office des postes et télécommunications a
décidé d’utiliser ce nouveau cadre législatif pour le placement d’une partie de sa trésorerie.
Les ordres de placement ont été signés à Paris le 21 janvier 2005. Dans la perspective
d’obtenir une rémunération supérieure à celle des bons du Trésor négociables, l’Office a
choisi de placer une partie de ses fonds libres dans des produits financiers personnalisés,
négociables, sous forme d’EMTN auprès de l’Union des Banques Suisses (UBS) en France.
Ces produits dénommés MARARA 1 et 2 ont une durée de 8 ans. Leur valorisation
repose sur l’évolution d’un panier de 15 actions représentant les 5 premières capitalisations de
chacune des zones Euro, Japon et Etats-Unis. Un mécanisme de sécurité assure un « effet
cliquet » qui cristallise, pour la durée restante du contrat, la rémunération annuelle au taux
maximal, lorsqu’une performance positive d’une action par rapport à la valeur de référence
est constatée. Ce mécanisme fonctionne, dans le cas du MARARA 1, à compter du troisième
anniversaire du contrat, puisque les deux premières années bénéficient d’un taux garanti de 4
et 4,25 % avec une rémunération maximale de 5,5 %. Il fonctionne dès le premier
anniversaire du contrat, dans le cas du MARARA 2, avec une rémunération maximale de 5 %.
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Le capital était initialement garanti à l’échéance de 8 ans par la Caisse d’amortissement de la
dette sociale contrôlée par l’Etat qui garantit sa solvabilité. Un troisième placement
MARARA 3, calqué sur le MARARA 1, sera effectué de manière occulte le 30 mars 2006.
2.2.1.3.2. Le placement des fonds libres de l’OPT a suivi une procédure
assouplie à partir de 2004
2.2.1.3.2.1. Le conseil des ministres s'est limité à approuver, a posteriori,
les modalités de placements.
L’article 91- 23° de la loi organique du 27 février 2004 confère au conseil des ministres
la compétence d’autoriser le placement des fonds libres des établissements publics de la
Polynésie française, en valeurs d’Etat ou en valeurs garanties par l’Etat. L’article D.311-4 du
code des postes et des télécommunications rappelle que
le placement des fonds libres de
l’Office des Postes et Télécommunications et des fonds correspondant aux dépôts aux
chèques postaux s’effectue dans le respect des règles en vigueur.
Pourtant, l’arrêté n° 1731 CM du 19 novembre 2003 relatif à l’organisation et aux règles
de fonctionnement de l’OPT, dans ses rédactions des 5 mai 2004 et 31 janvier 2005, fait une
interprétation large des dispositions statutaires de la Polynésie française, en ne décidant pas
d'autoriser chaque placement financier de l'établissement public. L’arrêté n°796 CM du 5 mai
2004 prévoit en effet, que
« Pour la mise en oeuvre des dispositions du 23° de l’article 91 de
la loi organique n°2004-192 du 27 février 2004 et à l’occasion de l’approbation du compte
d’exploitation prévisionnel, il
[le conseil d’administration]
propose au conseil des ministres
les modalités de placement des fonds libres de l’OPT ».
La rédaction du 31 janvier 2005 confirme ces dispositions mais en supprimant la
référence à la loi organique. Ainsi, «
Le conseil d’administration dispose des pouvoirs les plus
étendus pour agir en toute circonstance au nom de l’O.P.T. …sous réserve de celles
[des
compétences]
expressément
attribuées
au
conseil
des
ministres… A
l’occasion
de
l’approbation du compte d’exploitation prévisionnel, il propose au conseil des ministres les
modalités de placement des fonds libres de l’OPT ».
L’évolution de la rédaction
« le conseil des ministres autorise le placement des fonds
libres »
vers
« … A l’occasion de l’approbation du compte d’exploitation prévisionnel, il
[le
conseil d’administration]
propose au conseil des ministres les modalités de placement des
fonds libres de l’OPT »
, va bien au-delà d’un glissement sémantique. Dès lors que le conseil
des ministres a autorisé les modalités de placement,
il s’est privé du contrôle lié au régime
d’autorisation de chaque placement prévu par la loi statutaire. Une définition trop générale
des modalités de placement donne donc une très grande latitude d’action au conseil
d’administration. Dans le cas d’une habilitation, elle permet au président de l’OPT de décider
seul du placement des fonds. C’est d’ailleurs de façon absconse que le conseil
d’administration de l’OPT a décidé par délibération du 21 décembre 2004 :
« Les modalités de
placement des fonds libres de l’Office des postes et télécommunications sont celles proposées
en annexe 2, selon les conditions actuelles des marchés financiers »
.
Cette décision prise
à l’occasion de l’approbation du compte d’exploitation
prévisionnel 2005, n’a pas permis de faire apparaître assez clairement l’opération de
placement. Le commissaire du gouvernement de l’OPT s’était d’ailleurs interrogé, mais sans
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septembre 2008 - page 49 sur 105
suite, sur la nécessité de prendre deux délibérations distinctes, ce que l’état du droit rendait
parfaitement possible, l'une sur le compte d'exploitation, l'autre sur les placements financiers.
En conséquence, « l’autorisation » du conseil des ministres n’a pas été acquise par une
décision spécifique relative au placement des fonds mais par le seul arrêté n° 385/CM du
30 décembre 2004 approuvant et rendant exécutoire la délibération portant principalement sur
le budget prévisionnel 2005.
2.2.1.3.2.2. Le président du conseil d’administration de l’Office n’a pas été
habilité expressément par le conseil d’administration
L’arrêté n° 1731 CM, relatif à l’organisation et aux règles de fonctionnement de l’OPT,
dans ses rédactions des 5 mai 2004 comme du 31 janvier 2005, dispose que le conseil
d’administration
«
habilite son président à négocier et à signer toutes conventions
nécessaires … pour le placement des fonds libres tel qu’autorisé par le conseil des
ministres ».
Or, aucune délibération n’a expressément prévu l’habilitation intuitu personae du
président de l’OPT, M. Temauri FOSTER, à agir dans ce domaine.
Pourtant, le procès-verbal du conseil d’administration du 21 décembre 2004, point n° 2,
précise que
« …par délibération
2003- 35/OPT du 18 décembre 2003, le conseil
d’administration a habilité le président à négocier et signer les placements de fonds... ».
La chambre relève que
cette habilitation a d’abord été donnée dans un cadre législatif et
réglementaire différent. La loi statutaire du 12 avril 1996 ne prévoyait le placement en valeurs
d’Etat ou en valeurs garanties par l’Etat que pour les fonds libres du Territoire. Le conseil
d’administration de
l’OPT ne pouvait décider du placement des fonds disponibles de l’Office
que dans les établissements français de crédit de la place de Papeete.
Ensuite, l’habilitation à laquelle il a été fait référence a été donnée par un conseil
d’administration de composition différente : 3 membres sur 7 étaient différents. Le président
du conseil d’administration lui-même n'était pas M. FOSTER.
La délibération du 21 décembre 2004, postérieure à la nomination de M. FOSTER, le
3 novembre 2004, se borne à préciser, dans son article 3 : "
Le Président du conseil
d'administration et le directeur général, sont chargés, chacun en ce qui les concerne, de
l'application de la présente délibération qui sera rendue exécutoire après arrêté du conseil
des ministres de la Polynésie française".
Divers destinataires des observations provisoires
font valoir dans leur réponse, que cette délibération vaudrait habilitation de M. FOSTER par
son seul article d’exécution. La Chambre ne peut admettre cette argumentation. En effet,
l’habilitation doit mentionner de manière expresse la modification de l’ordre juridique relative
au fonctionnement des pouvoirs au sein de l’OPT. L’article d’exécution n'a pour seule
vocation que d’organiser la responsabilité de la mise en vigueur des décisions prises.
En conséquence, le président Temauri FOSTER n’était pas expressément habilité par le
conseil d’administration à négocier et signer les contrats de placement.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 50 sur 105
2.2.1.3.3. La gestion opaque du placement des fonds libres de l’Office
2.2.1.3.3.1. Une information insuffisante sur les caractéristiques et les
résultats des placements
Le montant des placements n’a été porté à la connaissance ni du conseil
d’administration, ni du conseil des ministres au moment de la prise de décision. L’annexe
jointe à la délibération du 21 décembre 2004 indique que la trésorerie sera placée en trois
tiers : un tiers des montants en bons du Trésor négociables ; un tiers des montants en
placement MARARA 1; un tiers des montants en placement MARARA 2. Mais elle ne fait
état d’aucun montant.
Selon les conseillers des présidents successifs du conseil d'administration, l’OPT ne
voulait pas faire connaître le montant de sa trésorerie au gouvernement, craignant une
ponction de celui-ci au profit de la collectivité. Selon M. Jean-François MARTIN, "
les
consignes données par les dirigeants successifs de l'OPT concernant le montant de la
trésorerie disponible occultaient les montants des placements en fonds libres. La raison
invoquée était le risque que le territoire, informé des montants, décide par tout moyen de
récupérer tout ou partie de la trésorerie disponible de l'OPT.
Selon M. Jean-Paul PISTOLET,
"
les montants n'ont pas été portés dans les rapports sur décision des différents présidents afin
d'éviter […] que le Pays prélève cette trésorerie disponible
".
Les données, contenues dans
des comptes financiers volumineux ou pouvant se déduire après calcul des rapports de
présentation, étaient censées constituer l’information des décideurs. Force est de constater que
délibérément aucune information transparente n’a été donnée.
Plusieurs participants au conseil d’administration, dont le ministre des postes et
télécommunications de l'époque, affirment que lors des discussions, le montant évoqué
oralement pour les placements était de 700 millions de F CFP. Ce n’est que le 31 mars 2005,
sous la présidence de Monsieur TERIIEROOITERAI, que les montants précis ont été portés à
la
connaissance
du
conseil
d’administration.
Le
montant
des
placements
de
7 875 895 000 F CFP (soit 66 millions d’euros), soit de 5,489 milliards de F CFP
(46 millions d’€) pour MARARA 1 et de 2,387 milliards de F CFP (20 millions d’€) pour
MARARA 2 est dix fois supérieur à celui évoqué au conseil d’administration du 21 décembre
2004. En privant le gouvernement de l’information quant à l’importance des placements à
opérer, l’OPT a délibérément voulu éviter qu'il dispose de la connaissance du montant de la
trésorerie disponible de l’office.
Le changement des modalités de placement, notamment de société émettrice, et des
rémunérations des placements n’ont pas été portés à la connaissance du conseil des ministres
et ne l’ont été qu’a posteriori au conseil d’administration. La caisse d’amortissement de la
dette sociale (CADES), émetteur initial des EMTN, a, pour des raisons de changement de
réglementation, été remplacée par Ixis corporate and Investment Bank “IXIS”, organisme
relevant pour partie de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Par ailleurs, la baisse des marchés financiers mondiaux enregistrée en fin d'année 2004
s'est traduite par une révision des conditions de rémunération des placements. Les
rémunérations du MARARA 1, garanties les deux premières années par la CADES à hauteur
de 4,5 %, n’ont pas été honorées et ont été ramenées à 4% la première année et 4,25 % la 2
ème
année ainsi qu’à 5,5 % les six années suivantes au lieu 6 %. Compte tenu de ces conditions
nouvelles, l’OPT a modifié la répartition entre les produits en affectant 70 % au MARARA 1
et 30 % au MARARA 2 au lieu de la répartition à parts égales annoncée.
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La Chambre n’entend pas mettre en cause le choix des instruments financiers servant de
support au placement de la trésorerie mais regrette qu’un éclairage sur les risques n’ait pas
suffisamment été donné dans l’annexe jointe à la délibération du 21 décembre 2004, présentée
tant au conseil d’administration qu’au conseil des ministres.
Les MARARA ont été présentés comme des placements d’un bien meilleur rapport
29
que les bons du Trésor. La note de présentation n’a pas suffisamment mis l’accent sur les
risques inhérents à ce type de produits. Pourtant, la plaquette d’informations transmise au
président du conseil d’administration de l’OPT par l’UBS, mentionnant que ces produits
s’adressent à des investisseurs avertis, anticipant, au cours des huit prochaines années, une
hausse des actions, n’a jamais été exposée clairement, ni au conseil d’administration, ni au
conseil des ministres. La délibération du conseil d’administration et l’approbation donnée par
le conseil des ministres n’ont donc pas été prises en toute connaissance de cause.
Ces placements
30
ont généré 390 MF CFP de produits financiers en 2006, soit une
rémunération de 3,76 %. En 2007, ils n’ont généré que 276,9 MF CFP, soit 2,67 %.
Au titre de l’année 2007, sur fond de crise financière, près de 3 ans après sa
souscription, le MARARA 2, bénéficiant de l’effet cliquet dès le premier anniversaire de sa
souscription, affiche une performance annuelle de 3,6 à 3,9 % et pourrait assurer
définitivement un rendement de 5 % si la dernière valeur était cristallisée le 14 décembre
2008. En revanche, le MARARA 1, qui représente 52,87 % des placements en EMTN, ne
bénéficie plus de la rémunération garantie des deux premières années et affiche à la fin 2007
une performance de 1,61 %. La rémunération pour l’année 2008 ne devrait pas être meilleure
si la performance de la valeur CITIGROUP devait rester en l’état. Le MARARA 3 bénéficie,
pour la dernière fois en 2008, d’une rémunération garantie de 3,75 %, mais affiche une
performance négative en avril 2008 (– 6,28 %) qui s’est aggravée au 30 juin 2008 (-24,17 %).
Il ne procurerait aucune rémunération en 2009, en l’absence d’un rebond significatif des
marchés financiers.
Par comparaison, le placement en bons du Trésor à taux fixe à un an, a procuré une
performance légèrement supérieure à 2% en 2004, de 2,5% en 2005 et de 3,5 à 5% sur la
période 2007 et 2008.
L’annexe sur les comptes clos au 31 décembre 2006, lesquels ont été votés par le
conseil d’administration le 10 juin 2008, mais ne sont toujours pas approuvés par l’assemblée
de Polynésie française, mentionne complémentairement qu’en cas de cession avant leur
échéance, les placements font apparaître, à cette date, une moins-value latente globale de
228 MF CFP, le capital n’étant garanti qu’à l’échéance.
2.2.1.3.3.2. La gestion des placements par le président du conseil
d’administration et ses conseillers
Le président du conseil d’administration de l’OPT, M. Temauri FOSTER, et ses
conseillers ont justifié la manière suivie pour procéder aux placements des fonds libres par la
29
Avec des rémunérations annuelles fixées, pour MARARA 1, de 0 à 6 %, avec deux années garanties à 4 et 4,25 % et, pour MARARA 2, de
1 à 5 %.
30
Le MARARA 3 n’a compté que pour environ ¾ d’année.
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nécessité de bénéficier de souplesse pour agir vite en réponse à des offres dont la durée est
limitée dans le temps.
Cet argument n'est pas totalement convaincant. D’abord, parce qu’envisageant un
investissement initial de près de 7 875 895 000 F CFP (soit 66 millions d’euros), sous forme
de produits personnalisés qui lui sont dédiés, l’OPT disposait d’un argument de poids dans la
discussion avec l’Union des Banques Suisses, susceptible d’obtenir des accommodements
avec les délais quand bien même ces produits nécessiteraient de la réactivité. Ensuite, l’OPT,
même dans un court délai, peut procéder à la réunion de son conseil d’administration ou d’une
commission permanente. Rien ne s’oppose donc à ce que le conseil d’administration autorise
chaque placement et non pas seulement les modalités de placement. En l’espèce, les contrats
n’ont été signés que le 21 janvier 2005, le conseil d’administration ayant été tenu le
21 décembre 2004. Enfin, n’ayant procédé qu’à deux opérations de placement
31
de ce type, au
cours des trois dernières années, l’Office aurait disposé de suffisamment de temps pour
préparer la procédure de placement ainsi décrite.
Le conseil d’administration n’a été informé que le 3 février 2005, après la signature des
ordres de placement, intervenue le 21 janvier 2005, du placement des fonds libres de l’OPT,
sous forme d’EMTN, auprès de l’Union des Banques Suisses.
Depuis cette date, un nouveau placement dénommé MARARA 3 a été réalisé le 30 mars
2006, par le président du conseil d’administration, Alphonse TERIIEROITERAI, pas plus
habilité que son prédécesseur, pour un montant de 2,392 milliards de F CFP (soit 20 millions
d’euros) et selon des caractéristiques comparables à celles du MARARA 1 (durée de 8
années, coupon fixe de 3,75 % pour chacune des deux premières années, coupon annuel
pendant les 6 années suivantes allant de 0 à 6,25 %).
Compte tenu des règles mises en place, seuls le président du conseil d’administration,
ses proches conseillers et le comptable de l’Office ont, à l'époque, eu connaissance de ce
placement. Le conseil d’administration, en raison d’une habilitation dont on a vu qu’elle
n'était pas expresse, n’a pas été informé de ce placement et n’a pu exercer son contrôle. Ainsi,
la règle des trois tiers qui régit la répartition des placements de la trésorerie
32
, validée par le
conseil des ministres, n’a pu être contrôlée. La répartition initialement validée n’est d’ailleurs
plus respectée. Selon le conseiller pour les finances, la répartition des placements est
devenue : 42 % en bons du Trésor (au lieu d’un tiers), 27 % en MARARA 1 (au lieu d’un
tiers), 12,5 % pour les MARARA 2 (au lieu d’un tiers), 12,5 % pour les MARARA 3 (non
prévus) et 6 % pour d’autres placements de trésorerie (non prévus).
Par ailleurs, le réinvestissement des coupons versés en rémunération des placements, en
supports monétaires UBS(F) EURO MONETAIRE, de type SICAV de trésorerie, n’a pas
satisfait aux dispositions de la loi organique de 2004. Ces fonds disponibles n’étaient investis,
ni en valeurs d’Etat, ni en valeurs garanties par l’Etat. Les membres du conseil
d’administration et ceux du conseil des ministres n’ont pas été informés de ces
réinvestissements. Ce n’est que postérieurement aux remarques faites à l’issue des
investigations de la chambre que la décision du 21 novembre 2007 de réintégrer les intérêts
des placements sur le compte de l’OPT au Trésor public a été prise. Le transfert effectif des
fonds n’a été constaté qu’en avril 2008.
31
Pour
3 produits EMTN.
32
Règle fixée par l’annexe de la délibération
n° 54.2004/OPT du 21 décembre 2004 selon laquelle la trésorerie doit être placée à raison d’un
tiers en bons du Trésor, un tiers en MARARA 1 et un tiers en MARARA 2.
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Enfin, la gestion des placements, réservée aux détenteurs de la signature du compte
espèces de l’UBS, exposait l’organisme à un risque évident.
Le président du conseil d’administration, ainsi que son mandataire, M. Jean-François
MARTIN, ont disposé simultanément de la signature pour les mouvements sur ce compte.
Consécutivement aux changements de président du conseil d'administration de l’OPT, le
conseiller chargé des finances a accompli, parfois avec retard, les démarches pour déclarer les
nouveaux titulaires du compte, afin de satisfaire aux conditions générales de cet organisme
33
.
A la fin 2007, dans un document adressé aux commissaires aux comptes de l’OPT, l’UBS ne
reconnaissait pourtant toujours que MM. FOSTER (parti en mars 2005), comme titulaire, et
MARTIN, comme mandataire.
D’autres documents montrent, au contraire, que l’UBS connaissait bien MM. Alphonse
TERIIEROOITERAI et Jean-Alain FREBAULT, successivement présidents du conseil
d’administration. M. FREBAULT n’a été déclaré à l’UBS que 6 mois après sa nomination à
la tête de l’OPT, laissant M. MARTIN rester seul titulaire de la signature du compte, sans
habilitation valide. L’UBS reconnaît que la communication n’a probablement pas bien
fonctionné en raison des multiples changements. Ces approximations attestent du risque
potentiel couru par l’Office, en raison de la capacité d’un détenteur de signature à agir seul.
Les formulaires de l’UBS suggèrent que l’engagement de l’Office ne puisse intervenir
que par la signature collective de co-titulaires du compte ou par la signature conjointe de
plusieurs mandataires autorisés. Jusqu’à la fin 2007, au terme des investigations de la
chambre, les présidents du conseil d’administration n’ont pas retenu ces modalités et ont
persisté à autoriser qu’un seul signataire puisse opérer des mouvements sur le compte espèces.
L’UBS décline expressément toute responsabilité quant aux agissements des mandataires sur
le compte.
La Chambre ne peut que s’étonner qu’il ait fallu attendre février 2008 pour que le
principe de la double signature pour le fonctionnement de ce compte soit adopté,
conformément à ses préconisations.
Plus substantiellement, la Chambre recommande qu’une information plus détaillée soit
produite à l’appui des comptes, aux fins d’une meilleure information des instances
décisionnaires de l’OPT, comme de celles de la collectivité de la Polynésie française. A
l’occasion de l’examen du budget primitif de l’OPT pour 2008, cette recommandation a
partiellement été satisfaite pour le conseil d'administration.
La chambre recommande enfin que des procédures sécurisées soient renforcées au-delà
des premières mesures prises pour éviter d’exposer l’Office aux risques divers qui ont été
identifiés.
2.2.2.
Des dépenses incontrôlées sans lien avec les missions de l’OPT
Lors du précédent jugement des comptes de l’OPT, la Cour des comptes, qui exerçait
alors sa compétence sur cet établissement, avait engagé la responsabilité de l’ancien
comptable de l’organisme pour un montant supérieur à 6,5 millions de F CFP, pour avoir
33
Selon l’article 18 :
« si le client est une personne morale, il devra remettre à la banque, la copie certifiée des délibérations … des organes
de direction désignant le représentant légal et déléguant les pouvoirs »
.
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payé, sur ordre de M. Emile VERNAUDON, alors ministre des postes et des
télécommunications et président du conseil d’administration, des dépenses de représentation
dont le lien avec les missions de l’établissement n’avait pas pu être établi.
A l’occasion du présent examen de la gestion de l’OPT, la chambre territoriale des
comptes a souhaité vérifier que de telles pratiques n’avaient plus cours. La chambre a donc
examiné l’ensemble des mouvements comptables des classes 2 et 6, pour les années 2002 à
2006. La présidence du conseil d’administration constitue depuis novembre 2003 une entité
comptable facilement identifiable dans les comptes. Une sélection des dépenses s’y rapportant
a donc été réalisée pour la période 2004 à 2006. Une analyse comparative des dépenses sur
ces années a permis de mettre en évidence un accroissement substantiel des dépenses
imputées à certains articles du compte financier au cours des années 2005 et 2006.
La période
de mars 2005 à mai 2006, qui enregistre les volumes de dépenses les plus importants,
correspond précisément à la période au cours de laquelle M. Emile VERNAUDON occupait
les fonctions de ministre des postes et télécommunications et, es qualité, de vice président de
l’OPT, la présidence du conseil d’administration incombant alors à M. Alphonse
TERIIEROOITERAI. Dès lors, l’analyse détaillée de ces dépenses a été concentrée sur cette
période.
La Chambre a constaté que les dépenses des postes
«
carburants,
locations de moyen de
transport, honoraires divers, publicité et sponsoring, transports et missions, frais de
réception et de représentation, frais de GSM »
ont très fortement augmenté. Parmi les
dépenses analysées, un grand nombre, représentant un montant substantiel, ont été effectuées
à la demande ou avec l’accord de M. Emile VERNAUDON, pour son profit personnel ou
celui de tiers qui lui sont proches. Au cours de l’instruction, il a été vérifié, que de
nombreuses dépenses, ciblées par extraction informatique pour les années 2005 et les cinq
premiers mois de l’année 2006, n’avaient pas de lien avec les missions de l’OPT ou ne
présentaient aucun intérêt pour l’établissement public. Le montant des dépenses litigieuses
analysées s’établit à 114 776 414 F CFP (961 826 €).
En sa qualité de vice-président de l’OPT (et non en sa qualité de ministre), M. Emile
VERNAUDON bénéficiait d’avantages en nature
.
L’arrêté n° 22 CM du 17 mars 2005
prévoyait que par délibération, et dans le respect des dispositions législatives et
réglementaires, le conseil d’administration pouvait attribuer des avantages en nature au
suppléant du président qui n’était
autre que le vice-président.
Postérieurement à cet arrêté,
aucune délibération n’est venue préciser ce qu’étaient les avantages en nature consentis.
C’était donc la délibération n° 57-2004/OPT du 21 décembre 2004 qui demeurait en vigueur.
Elle accordait au vice-président du conseil d'administration de l’OPT,
la gratuité de deux
abonnements (un téléphone mobile et un fixe) et d’un contingent de communications
téléphoniques et électroniques et la prise en charge d'un véhicule de fonction. C’est donc dans
les strictes limites de cet arrêté et de cette délibération que M. Emile VERNAUDON pouvait
jouir d’avantages pris en charge par l’OPT. La qualité de vice-président ne donnait pas droit à
des frais de représentation puisqu’aucun texte ou délibération ne le prévoit.
Force est de constater que l’OPT a supporté des charges indues à ce titre, au bénéfice de
M. VERNAUDON et de ses proches
.
A supposer même que ces dépenses aient été justifiées
par la fonction ministérielle de l’intéressé, sa qualité de ministre des postes et
télécommunications ne pouvait lui permettre de les faire supporter à l’OPT. Le ministre
dispose en effet d’une fraction du budget de la collectivité pour couvrir les besoins de son
administration.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 55 sur 105
Les dépenses prises en charge par l’OPT ne pouvaient l’être parce qu’elles n’ont pas de
lien avec ses missions ou ne présentent aucun intérêt pour son activité. L’examen des
différents articles comptables montre que la plupart des dépenses ont été faites dans l’intérêt
personnel de M. Emile VERNAUDON ou à sa demande, pour le profit de personnes qui lui
sont proches, à un titre ou à un autre.
2.2.2.1. : Les dépenses de carburant liées à l’usage irrégulier de
véhicules de l’OPT
Les dépenses de carburant ont pratiquement doublé en 2005 par rapport à l’année 2004
et ont suivi la même croissance au cours des cinq premiers mois de 2006.
La consommation
de carburant imputable à M. VERNAUDON et à ceux qui ont profité de ses largesses, dont le
directeur de son cabinet au ministère, est estimée à 1 315 016 F CFP en 2005 et
884 246 F CFP en 2006. De fait, pas moins de 8 automobiles et 2 scooters étaient mis à sa
disposition alors que la réglementation n’autorise le vice-président qu’à bénéficier d’un seul
véhicule. Les cartes de carburant associées à cet usage illicite de véhicules ont aussi été prises
en charge par l’OPT, mais ont manifestement servi à alimenter d’autres besoins que celui
propre des véhicules en cause. Les factures détaillant les consommations de carburant révèlent
pour l'usage de la carte "93" utilisée par le directeur de cabinet du ministre, des
consommations excessives notamment pour le mois de décembre 2005 : 358 litres dont
117 litres le 1
er
décembre et 109 litres le 5 décembre
.
Cette sorte de « guichet ouvert », cautionné par M. VERNAUDON et son homme-lige
en la personne du président du conseil d’administration, a profité à des proches du ministre
comme à lui-même, au-delà des avantages accordés par les textes le concernant. L’usage des
véhicules appartenant à l’OPT et les dépenses de carburant prises en charge soit n’ont pas de
lien avec les missions de l’Office et son objet social, soit sont sans intérêt pour l'activité de
l'établissement, et sont donc parfaitement irréguliers.
2.2.2.2. : Les transports et missions
Dans un ensemble de dépenses globales qui a évolué comme l’indique le tableau ci-
dessous, trois sous-ensembles méritent une attention particulière : le poste
« transports et
déplacements »
qui a augmenté entre 2004 et 2005 de 10,8 à 24,6 MF CFP soit + 127%, le
poste
« Missions et tournées »
qui a cru de 3,6 à 14,27 MF CFP soit + 297% et le poste
« autres frais de réceptions »,
associé à ces déplacements, qui est passé sur la même période
de 1,64 à 4,54 MF CFP, soit
+
176%.
Dépenses en F CFP
2004
2005
2006
TRANSPORTS - MISSIONS
27 694 911
58 171 460
22 165 701
L’examen de ces déplacements a permis de constater qu’ils concernent quasi
exclusivement M. Emile VERNAUDON lui-même ou des proches qu’il avait invités à
l’accompagner. Ces déplacements ne semblent pas être réalisés dans l’intérêt de l’OPT mais
au profit personnel de M. VERNAUDON.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 56 sur 105
Des déplacements ont ainsi été faits pour des motifs fallacieux. C’est le cas de plusieurs
voyages d’une journée à Raiatea, trois semaines de suite, durant le mois d’août 2005, puis
d’une seule soirée les 14 septembre et 19 octobre 2005. C’est également le cas pour six
déplacements, d’une soirée à plusieurs jours, à nouveau à Raiatea, dans la période de janvier à
mars 2006 à la veille des élections municipales de Tumaraa.
Les ordres de mission comportaient des motifs professionnels assez peu crédibles.
Ainsi, lorsque M. VERNAUDON s’est rendu trois semaines de suite à Raiatea, ses
déplacements étaient couverts par des ordres de missions dont l’intitulé était :
« Prospection
des lieux d'implantations des infrastructures de l'OPT dans le cadre de ses orientations
stratégiques pour les années 2006 à 2011»
ou un 15 août, jour férié,
« Rencontre avec les élus
de Uturoa et une partie de ses conseillers, afin de les tenir informés de l’engouement des
PME à l’égard du projet ADSL et de connaître les besoins propres en terme de capacités »
ou
encore
« Visite de chantiers de l'OPT
et rencontre avec le personnel ».
M. VERNAUDON
s’est aussi rendu dans les atolls d’Arutua et de Takapoto
« pour apporter une réponse aux
habitants sur leurs besoins en téléphonie mobile et pour étudier sur place la possibilité de
l’élargissement des horaires d’ouverture des bureaux de 2h à 4h ».
D’autres déplacements ont été faits pour des motifs qui paraissent purement personnels,
sous couvert d’une mission officielle. Ainsi, une mission à Moorea "
en vue de faire part
personnellement aux responsables des agences postales des doléances des citoyens de l'île en
matière de télécommunications
" a nécessité pas moins de 5 jours de présence soit du jeudi 1
er
au lundi 5 septembre 2005, occasionnant une dépense (nuitées, restauration, bar, boutique) de
175 180 F CFP". De même, un déplacement de moins de 24 h à Bora Bora (du mardi 14h30
au mercredi 6h00), pour lequel M. VERNAUDON était accompagné de Mme Natacha
TAURUA, et couvert par un ordre de mission intitulé
« Rencontre avec le maire et les
responsables municipaux en vue de l'ouverture des chantiers dans le cadre de la mise en
place du câblage de l'ADSL »
, a occasionné une dépense d’un montant global de
653 600 F CFP (location d'un avion 418 000 F CFP + factures de l’hôtel Bora pour
235 600 F CFP). Mme TAURUA ne se souvient pas y avoir participé.
Des déplacements, pour lesquels M. Emile VERNAUDON était accompagné de
personnalités politiques, ont aussi eu lieu hors de la Polynésie : en juin 2005, à Paris, avec une
dépense
de
transport
de
1 538 670 F CFP,
à
Sydney,
en
septembre
2005
pour
1 846 926 F CFP, à Paris, en octobre 2005, pour 3 471 465 F CFP puis en novembre 2005,
pour 2 261 244 F CFP.
Ces dépenses ont été couvertes par des ordres de mission dont la plupart ont été délivrés
postérieurement
au
déplacement,
à
titre
de
régularisation.
Mais
il
est
arrivé
malencontreusement que des ordres de missions de complaisance, correspondant à des
déplacements aux îles Sous le Vent ou encore à Sydney, aient été établis alors que le nom de
M. VERNAUDON, aux mêmes dates, était mentionné sur des certificats administratifs relatifs
à des déjeuners de travail à Tahiti.
La Chambre note que des ordres de mission de complaisance, notamment hors de
Polynésie, mentionnent la signature de contrats ou conventions. Or, M. Emile VERNAUDON
n’avait pas compétence pour signer le moindre accord au nom de l’OPT. La seule autorité
compétente, le président du conseil d’administration, n’avait pas pris part aux déplacements.
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er
septembre 2008 - page 57 sur 105
En conclusion, la chambre observe que les certificats administratifs de complaisance
que M. TERIIEROOITERAI, président du conseil d’administration, a reconnu avoir établis,
couvrent des déplacements privés de M. VERNAUDON, à son propre profit mais aussi à
celui de personnes totalement étrangères à l’OPT. Aucun programme ni compte rendu de
mission n'a jamais pu être fourni.
2.2.2.3. : Les locations de véhicules divers
Les dépenses de location de véhicules (voitures, avions, hélicoptères et bateaux) ont
connu une augmentation substantielle en 2005 et au cours des cinq premiers mois 2006. Les
locations d’avion litigieuses ont coûté à l’OPT 5 408 303 F CFP en 2005 et 1 863 208 F CFP
en 2006, alors qu’aucune location similaire n’avait eu lieu en 2004. Les locations de voitures
ont coûté 538 561 F CFP en 2005
contre 91 337 F CFP en 2004. La location d’un bateau,
pour suivre la course Hawaïki Nui, a pesé sur les budgets de l’OPT, tant en 2004 qu’en 2005
(676 500 F CFP pour cette dernière année), alors qu’aucun dirigeant ou personnel de l’OPT
n’y était convié.
en F CFP
2004
2005
2006 (6 mois)
61351100
LOCATION VEHICULES
91 337
538 561
57 000
dont
61351280
LOC AVIONS & HELICOP Non
VENTILE
-
5 408 303
1 863 208
61351480
LOC BATEAUX Non VENTILEES
585 000
765 000
163 600
L'examen des pièces correspondant à ces dépenses montre qu’elles étaient faites dans la
quasi-totalité pour le compte de M. Emile VERNAUDON. Elles ne peuvent être justifiées par
sa fonction de vice-président du conseil d’administration qui n’a aucun rôle opérationnel à
l’OPT.
Des amis de M. VERNAUDON, pour la plupart étrangers à l’OPT, y participaient
souvent. Cela explique le recours à la location d’avions, alors qu’aucun motif d’urgence ne
pouvait la justifier, pour se rendre dans des îles régulièrement desservies plusieurs fois par
jour par Air Tahiti. La location, à la différence de l’usage des lignes régulières où chaque
passager doit décliner son identité au transporteur, permet en effet de transporter des
passagers sans avoir à les déclarer nominativement au comptable de l’Office
.
Ainsi, le
manifeste d’Air Archipels, relatif à la location d'un avion pour se rendre de Faa’a à Raiatea,
fait état de 5 passagers, non identifiés individuellement, mais intitulé "équipe du ministre de
OPT".
Ces déplacements ont aussi entraîné la location d’automobiles. Le grand nombre de
véhicules loués au cours d'un même déplacement pour des personnes qui ne sont ni membres
du conseil d’administration, ni personnels de l'OPT, confirme que ces dépenses n’avaient
aucun lien avec l’objet social de l’OPT, même si elles s’appuyaient sur des ordres de mission
comportant des motifs divers, le plus souvent établis a posteriori.
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er
septembre 2008 - page 58 sur 105
2.2.2.4. : Frais de téléphone portable GSM et autres téléphones
Les dépenses enregistrées à ce compte ont augmenté de moins d’un million de F CFP en
2004 à 1,8 MF CFP en 2005.
En sa qualité de vice-président du conseil d’administration, M. VERNAUDON
bénéficiait de la prise en charge par l’Office du matériel et d’un abonnement mensuel de
téléphonie mobile avec communications illimitées.
Or, quatre numéros de téléphones mobiles sont enregistrés à son nom. Il y a donc
manifestement une extension irrégulière de l’avantage consenti, sans que l’on puisse exclure
que cet avantage bénéficie en réalité à des tiers.
En outre, M. VERNAUDON s’est fait attribuer un terminal Iridium qui permet une
liaison directe via satellite de n’importe quel endroit du monde. Cet appareil très coûteux n’est
pas prévu dans les avantages en nature et n’est d’aucune utilité pour les fonctions de vice-
président de l’OPT. Il s’agit là d’une dépense d’intérêt purement personnel.
2.2.2.5. : Les frais de représentation du président du conseil
d'administration
Le compte "
Frais de représentation du président du conseil d’administration
" de
l’OPT a enregistré une augmentation exceptionnelle en 2005, soit +166 %.
en F CFP
2004
2005
2006
Compte 62580000
4 590 844
12 225 029
4 243 297
Il ressort de l’arrêté n° 1731/CM, dans sa rédaction au 16 mars 2005, que seul le
président du conseil d’administration peut se voir attribuer des frais de représentation. Le
vice-président ne peut se voir attribuer que des avantages en nature, fixés par une délibération
du 21 décembre 2004, laquelle ne mentionne pas les frais de représentation. Or, les dépenses
prises en charge par l’OPT à ce titre, à la demande ou pour le compte de M. VERNAUDON,
sont de 10 343 900 F CFP en 2005 et de 3 780 081 F CFP en 2006 (jusqu’au 23 mai).
Les frais de représentation du président du conseil d'administration bénéficiaient donc
essentiellement au vice-président, lorsque cette fonction était assurée par M. Emile
VERNAUDON.
Les frais de restauration sont concentrés dans deux établissements : l’hôtel Radisson et
le restaurant le Kikiriri. Des comptes y ont d’ailleurs été ouverts. Les factures, adressées
mensuellement par ces établissements ont été honorées par l’OPT après qu’elles aient été
couvertes par des certificats administratifs de complaisance, établis a posteriori et dans leur
quasi-totalité rédigés de la main de M. Alphonse TERIIEROOITERAI, président du conseil
d’administration.
Certaines des dépenses faites à l’hôtel Radisson correspondent en réalité à des frais
d'hôtellerie, engagés par le vice-président ou son directeur de cabinet, qui ont été présentés
comme des frais de restauration. Seules des factures comportant des listings « prestations
repas » mentionnant des sommes globales avaient été adressées par l’hôtel Radisson. Depuis,
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 59 sur 105
l’OPT
34
a reçu de ce prestataire, des factures détaillées correspondant à des nuitées, déjeuners
et dîners.
Au restaurant Kikiriri, c’est une sorte de « table ouverte » qui était mise en place,
profitant à M. Emile VERNAUDON mais aussi à certains de ses proches, dont son directeur
de cabinet au ministère. L’OPT a décidé en janvier 2008 de demander à ce dernier le
remboursement de la dépense correspondante.
Hormis ceux pris dans ces deux restaurants, d’autres repas ont été servis à l’étranger ou
en métropole et quelques autres dans d’autres restaurants en Polynésie. Ils sont à ajouter à
ceux pris en charge dans le cadre des
« missions », dont il a été démontré qu’elles couvraient
les déplacements personnels du ministre.
La chambre a relevé une fréquence quasi quotidienne des déjeuners ou dîners de travail.
Elle a noté aussi la constance et l'assiduité des mêmes convives, le caractère peu réaliste de
déjeuners de travail servis à une seule personne (le vice-président lui-même), ainsi que sa
capacité à prendre deux déjeuners de travail le même jour en des lieux parfois distants de
plusieurs milliers de kilomètres.
Il ressort que le système mis au point, l’a été sciemment pour contourner la
réglementation. Il repose sur l’établissement de certificats administratifs de complaisance,
établis a posteriori par le président du conseil d’administration de l’OPT, ne correspondant
pas à une dépense en lien avec les missions de l’établissement public. Selon l’OPT
35
, près de
200 repas n’auraient pas été confirmés par les participants mentionnés sur les certificats
administratifs. Monsieur TERIIEROOITERAI nie avoir mis au point un tel système mais
concède que
« la procédure était inadaptée car les factures parvenaient plusieurs mois sans
les noms des convives et sans signature du vice-président. Il n'était pas possible de remettre
en cause la véracité de la prestation réalisée par le restaurateur et difficile de rédiger les
certificats appropriés dans de telles circonstances. De surcroît, ces transmissions tardives de
factures regroupées n'ont pas permis à mes collaborateurs de suivre les dérapages constatés
et ainsi de stopper ces dérives ».
Les frais de représentation comprennent aussi l’achat de vins et spiritueux. Les
extractions comptables ont fait apparaître l'importance, en valeur et
en quantité, d'achats de
boissons (notamment vin et champagne) intitulés "Reconstitution du stock de la présidence du
conseil d'administration". Or, il apparaît que la présidence du conseil d'administration n’a ni
stock, ni cave. Ces achats, représentant en 2005 un montant de 2 265 207 F CFP, ont été faits
au profit de M. Emile VERNAUDON et de quelques proches. Selon Monsieur
TERIIEROOITERAI, des achats ont bien été faits pour que Monsieur VERNAUDON puisse
recevoir ses convives mais
« la forte consommation quotidienne de celui-ci n'a pas permis de
procéder à la reconstitution du stock de la présidence ».
2.2.2.6. : Frais de publicité presse et « sponsoring »
L'examen des dépenses imputées à ce compte a fait apparaître une augmentation de plus
de 65% des dépenses de publicité et divers en 2005 et près de 100% en 2006 (pour 6 mois).
34
Procès-verbal du CA du 8 janvier 2008.
35
Procès-verbal du CA du 13 novembre 2007.
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er
septembre 2008 - page 60 sur 105
en F CFP
période
Publicité presse
Publicité Divers (sponsoring)
du 1
er
janvier au 31 décembre 2004
13 402 637
35 189 495
du 1
er
janvier au 31 décembre 2005
18 650 257
58 554 532
du 1
er
janvier au 30 juin 2006
6 801 747
34 023 392
Ces dépenses n’ont eu qu’un lien distant voire inexistant avec les intérêts de
l’établissement public. Aucun contrôle de service fait portant notamment sur la réalité de la
contrepartie en publicité n’a été opéré. Le sponsoring des associations et la publicité presse
sont décidés par le président du conseil d'administration, puis fractionnés par pôle de telle
sorte que les masses financières en cause ne sont pas appréhendables dans leur globalité.
Certains sponsorings ont même été "décidés" postérieurement à la date de l'événement.
Monsieur TERIIEROOITERAI se justifie en indiquant que
« les pressions politiques dans ce
domaine du sponsoring étaient multiples et constantes…Le ministre de tutelle suivait avec
attention l'attribution des subventions de sponsoring et des publicités. Il insistait aussi pour
montrer que les sommes attribuées étaient obtenues grâce à ses directives ».
La concentration des dépenses de subventions vers des associations proches de
M. Emile VERNAUDON est notable. C’est ainsi que l'association "Les Dauphins Bleus"
regroupant les jeunes du parti AI’A API (parti présidé par M. VERNAUDON), dont la
présidente Mme Natacha TAURUA, à compter de la fin 2004, était aussi membre du conseil
d’administration de l’OPT, a bénéficié d’un fort soutien à hauteur de 6 873 560 F CFP en
2005 (1,2 MF CFP ont aussi été versés en 2006 à cette association par la société Tikiphone
qui dépend de l’OPT). Les liens sont établis entre l’association "Les Dauphins Bleus" et le
AI’A API, parti de M. VERNAUDON. En effet, en 2006, les cadres des Dauphins Bleus se
réunissaient déjà en séminaire au siège du parti de M. VERNAUDON. Plus encore, le site
même du AI’A API dans un « portrait du mois » du 1
er
octobre 2007 consacré à Natacha
TAURUA indiquait «
…Elle sera élue au conseil municipal de la commune de Mahina en
août 2003, puis sera dans la foulée responsable politique du AI’A API en tant que présidente
de la fédération des dauphins bleus.
Le premier Taui en mai 2004 la verra chargée de
mission auprès du ministre de la jeunesse et des sports, des postes et télécommunications et
des nouvelles technologies ».
En définitive, la présence de Monsieur VERNAUDON au ministère des postes et en
qualité de vice-président du conseil d'administration à l’OPT, et de Mme TAURUA, comme
membre du conseil d'administration de l’OPT, coïncident avec le subventionnement de
l’association « les Dauphins Bleus » en 2005 et 2006, qui oeuvre principalement à Mahina. La
circonstance que cette association soit liée au parti politique de M. VERNAUDON et de Mme
TAURUA
36
ne fait que renforcer le lien de causalité.
L'association pour la promotion de l'identité polynésienne (APIP), gestionnaire de
"Radio Bleue", très largement subventionnée par la mairie de MAHINA, a bénéficié d’un
soutien de l’OPT d’un montant de 3 MF CFP en 2005 (2 MF CFP lui ont aussi été versés par
Tikiphone).
Un fort soutien est également apporté par l’OPT à l'association sportive VENUS dont
M. Emile VERNAUDON est le président. L’OPT lui a versé 9,5 MF CFP en 2005 et
3,5 MF CFP en 2006.
36
Mme TAURUA a démissionné de ce parti par lettre du 26 juin 2008.
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er
septembre 2008 - page 61 sur 105
D’autres associations sportives et culturelles, étroitement liées à la commune de
MAHINA dont M. Emile VERNAUDON est le maire, ont bénéficié d’un soutien particulier
de l’OPT à l’initiative du vice-président.
La Chambre a observé aussi l’accroissement substantiel des encarts publicitaires achetés
au bulletin municipal de MAHINA. Le bulletin municipal
Aretai,
a reçu en septembre 2004,
puis de juillet à décembre 2005 et enfin de janvier à août 2006 un total de 11 209 050 F CFP
de la part de l’OPT.
Par comparaison, portant sur les années 2004 à 2006,
Tefana,
bulletin municipal de la
commune de Faa’a, n’a bénéficié que de 878 700 F CFP
37
, de septembre à décembre 2006.
Tiama,
hebdomadaire édité uniquement sur la période préélectorale en 2004 et 2005, a reçu
d’avril à juin puis de novembre à décembre 2005, 4 783 275 F CFP.
2.2.2.7. : Divers honoraires
L'examen des dépenses engagées à ce titre sur la période du 1
er
janvier 2004 au 30 juin
2006, a conduit à constater une augmentation substantielle des montants versés.
en F CFP
Période
montants
du 1
er
janvier au 31 décembre 2004
36 104 246
du 1
er
janvier au 31 décembre 2005
56 233 745
du 1
er
janvier au 30 juin 2006
27 019 934
La Chambre a examiné la motivation de l’OPT l’ayant conduit à commander ces
travaux. Elle a porté son attention sur les critères de sélection et les références des prestataires
dans le domaine. Elle s’est aussi fait produire, par l’OPT, la copie des conventions ainsi que
des études et travaux correspondants aux dépenses engagées. Elle a enfin demandé à connaître
les réalisations qui ont pu être engagées au vu des conclusions des études commandées.
Il ressort de cet examen que le lien entre la dépense engagée pour ces travaux et
l'intérêt pour l'activité de l'établissement n'est pas toujours démontré.
Une convention a ainsi été signée le 31 décembre 2002 et renouvelée le 31 décembre
2003 avec un prestataire pour une mission générale d'études, d'assistance, de conseil et
d'animation générale au sein de l'Office dans le domaine du foncier et dans le domaine
spécifique à la gestion des pôles. Il ressort de l'instruction que les
prestations étaient
aléatoires, que lorsque des rapports étaient remis, ils étaient sans intérêt pour l'OPT et que,
dans certains cas, le paiement ne correspondait pas à un service réel. L’OPT a cependant payé
13,32 MF CFP à son prestataire en 2003 et 2004.
Une autre convention, signée le 30 juillet 2004 pour une durée de 6 mois, a confié à un
consultant la réalisation de prestations s'inscrivant dans des missions d'assistance, de conseil,
de suivi et d'animation dans les domaines des nouvelles technologies, de l'audiovisuel, du
multimédia et de l'analyse économique et financière de dossiers et de projets spécifiques. Ce
contrat, établi sur ordre de M. Emile VERNAUDON, a permis le versement d’honoraires d’un
37
Deux paiements supplémentaires correspondant aux numéros 16 et 17 de
Tefana
ont eu lieu en 2007, portant le montant global
effectivement payé à 1 757 835 F CFP.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 62 sur 105
montant de 5,1 MF CFP sur présentation de documents matériels mais sans contenu réel qu’il
est difficile de qualifier de rapports.
Un contrat de prestation a été signé le 3 mai 2005, par M. Alphonse
TERIIEROOITERAI à la demande de M. Emile VERNAUDON, avec un consultant qui
n’était autre qu’un ancien salarié de l’OPT. La prestation consistait en des missions
d'assistance, de conseil, de suivi et d'animation dans les domaines suivants : les nouvelles
technologies (a), les télécommunications (b), l'analyse économique et financière de dossiers et
de projets spécifiques (c). Il ressort de l’examen de l’exécution de cette prestation que les
documents annexés aux factures consistent notamment en des compilations de copies de
textes juridiques et de tableaux statistiques ou financiers, pour la plupart élaborés par les
services de l'OPT, selon l'intéressé à sa demande, ou encore de schémas propres à
l'établissement public.
La partie des rapports rédigés par le prestataire est succincte. Pour plusieurs
échéances, aucun document n'a été remis, contrairement à ce que prévoyait la convention. La
prestation ainsi fournie est bien éloignée des résultats attendus. Ils devaient prendre la forme,
selon la convention, d’analyses utiles aux décideurs, de recommandations réalistes servant les
besoins et les priorités de l'OPT et de transferts de connaissances utiles au développement des
compétences des agents de l’OPT et de leurs responsabilités.
Devant ce constat, le président du conseil d’administration, M. Jean-Alain
FREBAULT a demandé le 10 octobre 2006 « le remboursement des sommes perçues pour
prestations non réalisées ». La prestation
a coûté à l’OPT, à ce jour, 18,4 MF CFP versés en
2005 et 2006, auxquels s’ajoute l’usage irrégulier par le prestataire d’un véhicule de l’OPT.
Une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée (MOD) a été passée en juillet 2005,
avec un ancien directeur de cabinet de M. Emile VERNAUDON, à la demande de ce dernier,
pour l'élaboration, la mise en oeuvre et le suivi jusqu'à son terme, des projets immobiliers que
lui confierait l'OPT. Chargé de « suivre les constructions », l’intéressé était rémunéré sur une
base forfaitaire mensuelle de 700 000 F CFP qu'il y ait activité ou non. Alors qu'il est admis à
l’OPT que cette prestation n'est pas nécessaire, M. Jean-Alain FREBAULT, président du
conseil d’administration de l’OPT, n'a pas souhaité mettre fin à ce contrat qui a donc été
renouvelé par tacite reconduction jusqu'en août 2007. Ainsi, fin juillet 2007, l’OPT avait versé
au titre de cette convention un montant cumulé de 16,8 M F CFP.
Enfin, une étude dans le domaine du multimédia d’un montant de 7,2 MF CFP,
réalisée de février 2006 à février 2007, a été confiée à la demande de M. Emile
VERNAUDON à un membre de sa famille.
2.2.2.8. : Divers matériels informatiques et mobiliers de bureaux
L’instruction a permis de montrer que divers matériels informatiques et mobiliers de
bureaux achetés par l’OPT pour un montant de 2 707 753 F CFP ne sont plus présents au sein
de l’établissement. L’OPT a confirmé que les matériels en cause avaient été transférés chez
M. Emile VERNAUDON.
La liste des biens recense des mobiliers (bureau, fauteuil), du matériel informatique
(portable, imprimante), des appareils photo, un téléphone fax, du matériel de sonorisation, un
écran plasma et un chapiteau 6X6m.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 63 sur 105
2.2.3.
Des investissements hasardeux, mal maîtrisés ou sans projets bien
définis
L’examen de la gestion des investissements, qui concerne tant la production de l’Office
que son patrimoine immobilier, fait apparaître des erreurs de gestion qui se traduisent par de
coûteuses dépenses.
2.2.3.1. : L’opération de remplacement des autocommutateurs a
cumulé
plusieurs
erreurs,
financièrement
lourdes
de
conséquences pour l’Office
A compter de 1987, l’Office des Postes et Télécommunications de la Polynésie française
a équipé en téléphonie automatique les îles habitées des Australes et des Tuamotu-Gambier,
en installant des commutateurs dénommés JISCOS. Ils sont une composante du réseau
communément appelé POLYSAT. A partir de 1996, de nouvelles solutions techniques et
technologiques de transmission et de commutation ont été recherchées pour améliorer la
qualité des services et apporter l’ensemble des services de télécommunications aux
populations éloignées de Polynésie française. La gestion du remplacement urgent des
autocommutateurs JISCOS, dont la fabrication et la commercialisation est arrêtée depuis la fin
de l’année 1999, a cumulé les erreurs, à partir de la fin de l'année 2004.
2.2.3.1.1. La difficile attribution du marché
L’OPT a lancé plusieurs appels d’offres afin de pourvoir au remplacement des
autocommutateurs JISCOS. En mars 2000, un premier appel d’offres a permis le
remplacement des appareils des îles et atolls ayant le plus grand nombre d’abonnés. La mise
en oeuvre conduite à partir de 2001 avec des aménagements convenus avec le fournisseur n’a
pas posé de problème. En revanche, le remplacement des autres commutateurs a requis, à ce
jour, trois appels d’offres successifs, de novembre 2001 à janvier 2003, pour le même objet et
le même périmètre. Le premier appel d’offres a été déclaré infructueux et le second, sans
suite. Le dernier
appel d’offres lancé en janvier 2003 a été remporté par une entreprise
différente de celle retenue en mars 2000.
L’offre de cette société, d’un coût total de 355 MF CFP, bien que supérieure de
116 MF CFP à celle d'une offre concurrente, a été retenue lors du conseil d’administration du
21 décembre 2004, sous la présidence de M. Temauri FOSTER. Ce choix aurait été guidé,
selon l’OPT, par la maturité du produit et les économies substantielles attendues
comparativement à d’autres technologies, sur le coût de location satellitaire. Ces économies
étaient évaluées à 400 MF CFP sur 10 ans.
2.2.3.1.2. Le suivi défaillant par l’Office de l’exécution du marché
Le contrat prévoyait une phase de tests renforcés sur la maquette préalable au
déploiement dans les quatre premières îles à équiper, avec une obligation de résultats. Le non-
respect des engagements de résultats et de délais impliquait la résiliation pure et simple du
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marché aux dépens du fournisseur.
Or, la phase de tests, réalisée avec le concours d’experts, a conduit en août 2005 à ne pas
réceptionner la maquette en raison d’un nombre important de réserves majeures. La
procédure, qui imposait au titulaire du marché de représenter la maquette en recette, un mois
après le premier procès-verbal, n’a pas été appliquée par l’OPT. Cette erreur de gestion,
commise sous la présidence de M. Alphonse TERIIEROOITERAI, a permis à la société
cocontractante de bénéficier de la levée des réserves, le 25 septembre 2005.
Cette faute de gestion explique les difficultés rencontrées ultérieurement pour exiger de
l'entreprise titulaire du marché une réponse aux demandes de l’OPT et pour clôturer ce dossier
sans mettre à mal les intérêts de l’Office. La résiliation, définitivement notifiée le 21 avril
2006 par le président du conseil d’administration,
a été contestée par l'entreprise, bien que
cette société reconnaisse que des anomalies persistent.
Deux ans après la date théorique d’entrée du nouveau système en exploitation, l’OPT
n’est toujours pas en mesure de remplacer les autocommutateurs JISCOS, qui menacent de
tomber définitivement en panne. Au surplus, malgré l’intervention d’experts missionnés par le
titulaire du marché, les dysfonctionnements essentiels perdurent. Ils paraissent même
rédhibitoires aux techniciens de l’OPT parce que ces autocommutateurs sont inadaptés à
l’intégration au réseau POLYSAT.
La Chambre s’interroge alors sur les véritables motifs qui avaient prévalu lors de
l’attribution du marché à cette entreprise, sous la présidence de M. Temauri FOSTER, compte
tenu de l’inadaptation de ces appareils qui était déjà connue des techniciens de l’OPT.
2.2.3.1.3. L’impact financier de cette gestion défaillante
Faute d’avoir appliqué les dispositions contractuelles au moment de la réception de la
maquette, l’OPT se serait exposé à honorer le coût total du marché de 355 MF, dont 116 MF
38
ont été payés à la notification du contrat, si la menace de procédure contentieuse à l’initiative
de l'entreprise titulaire du marché avait été mise à exécution.
Fort heureusement, les négociations avec cette société ont abouti à la signature d’un
protocole transactionnel de règlement du différend commercial pour un montant global
supplémentaire à verser par l'OPT de 67 millions de F CFP dont 37 sont imputables au
remplacement des autocommutateurs JISCOS. Ce montant s’ajoute aux 116 MF CFP déjà
engagés dans le projet.
Une solution de remplacement des autocommutateurs à partir de matériels composant le
réseau existant de l’OPT est tardivement apparue possible pour un coût évalué, à ce jour, à
environ 120 MF CFP
39
.
Sous réserve de la justesse de l’évaluation du coût de la solution technique finalement
mise en oeuvre, ce dossier aura coûté au total environ 273 MF CFP à l’OPT, dont
153 MF CFP en pure perte correspondant au coût de la solution avortée.
38
105 MF CFP plus les frais de douanes.
39
PV CA du 14 décembre 2007.
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L’OPT aurait pu n’avoir à financer que la solution finalement mise en oeuvre pour un
coût estimé, à ce jour, à 120 MF CFP.
2.2.3.2. : Les fautes de gestion qui ont accompagné l’achat du
nouveau système d’informations (projet Te Vaipunaa) ont
donné lieu à un gaspillage des fonds de l’OPT
2.2.3.2.1. L’origine et le choix du projet
Constatant que certaines applications informatiques devenues obsolètes nécessitaient
une maintenance difficile et n’étaient pas dotées des fonctionnalités nécessaires à l’évolution
de son offre de produits, l’OPT a décidé de se doter d’un nouveau système d’information.
En septembre 2003, un projet d’informatisation plus modeste que celui initialement
envisagé a donné lieu à une consultation pour la fourniture, l’installation et la mise en
production d'un ensemble logiciel destiné au remplacement du système d’information
commercial et de facturation de l’OPT. L’ensemble devait comprendre les modules
fonctionnels
gestion de la relation client
, f
acturation
,
administration du réseau technique
et
collecte des données
. Le fournisseur devait aussi prendre en compte l'ensemble des étapes
allant du développement et paramétrage jusqu'au service après vente en passant par la
migration, l'intégration, les tests et la validation ainsi que la mise en service, la formation et la
documentation.
La consultation, ouverte par appel d’offres le 5 avril 2004, a permis d’obtenir 3 dossiers
de candidature. La phase d’analyse, puis de notation des offres sur la base de critères définis
au sein d'une grille d'évaluation, a conduit, le 2 décembre 2004, la commission de
dépouillement des offres à proposer de retenir un des soumissionnaires, en raison notamment
d’un coût global largement inférieur à ses concurrents et du respect du cahier des charges
établi par l’OPT. Cette proposition a été confirmée par un courrier du 9 décembre 2004
adressé à M. Temauri FOSTER, président du conseil d’administration.
Réuni le 21 décembre 2004, le conseil d’administration, ignorant l’avis différent et
unanime de la commission d’appel d’offres, a décidé de retenir un autre soumissionnaire, la
société SOFRECOM, alors que l’offre de cette société était supérieure de 150 MF CFP, soit
plus de 30%, à celle de son concurrent immédiat. De surcroît, elle ne répondrait
qu’imparfaitement au cahier des charges. Ce choix du conseil d’administration était contraire
aux dispositions de l'article D.311-5 du code des postes et télécommunications qui dispose
que
« l
'efficacité de la commande et la bonne utilisation des budgets alloués en ce domaine
sont assurées … par le choix de l'offre économique la plus avantageuse compte tenu de la
qualité des prestations proposées
". Les arguments pris en considération par les membres du
conseil d’administration pour justifier ce choix sont principalement de nature stratégique.
Selon le rapport de présentation au conseil d’administration, rédigé à la demande du
président du conseil d'administration par M. Jean-Paul PISTOLET, conseiller spécial, et
présenté par M. Temauri FOSTER, l’association avec SOFRECOM, bénéficiant du soutien de
la division "recherche et développement" de France Télécom dans ce projet, devrait être
considérée comme la première étape d’un partenariat. Près de quatre ans après ce choix,
aucune trace concrète de partenariat ne peut être rapportée. SOFRECOM confirme que le
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septembre 2008 - page 66 sur 105
contrat ne mentionne aucunement un partenariat entre l’OPT et la division « recherche et
développements » de FRANCE TELECOM.
Les conditions dans lesquelles a été faite la présentation de ce dossier aux
administrateurs n’ont pas permis au conseil d’administration de jouer pleinement son rôle. Le
dossier, engageant l'établissement dans un achat de plus de 600 MF CFP, n’a été remis qu’en
séance, ce qui ne permettait aux administrateurs ni de l’examiner sérieusement, ni de le faire
expertiser, avant de prendre leur décision. Des membres se sont émus de ces méthodes
cavalières et un administrateur a même demandé le report du dossier, ce qui lui a été refusé.
De surcroît, ce dossier d’importance n’a été discuté qu’en fin de séance, à l’issue d’une
réunion particulièrement dense : seuls 5 membres avec voix délibérative sur 7 étaient encore
présents.
La présentation du rapport aux membres du conseil d'administration ignorait totalement
l'avis unanime de la commission de dépouillement des offres, dont le procès verbal n’avait
pas été joint, ce qui contrevenait à l'article 16 de l'arrêté n°1731CM du 19 novembre 2003
ainsi formulé :
« … dès remise de l’avis des membres de la commission d’appel d’offres, la
personne responsable
[le conseil d'administration compte tenu du montant de l'opération]
du
contrat choisit le titulaire et l’informe par écrit… »
.
Cet avis aurait pourtant permis aux administrateurs de constater que le périmètre
financier du projet SOFRECOM avait été modifié postérieurement au dépouillement des
offres. Le conseil d’administration a ainsi fondé sa délibération sur une proposition de base
évaluée à 5 090 000 € (607 389 700 F CFP), avec une partie optionnelle à 476 500 €
(56 860 745 F CFP) établie le 10 décembre 2004, alors que le procès-verbal de la commission
de dépouillement des offres démontre que la proposition présentée dans les délais de la
consultation par la société SOFRECOM s’élevait à 5 490 000 € (655 121 700 F CFP), avec
une partie optionnelle estimée à 285 000 € (34 009 050 F CFP).
Or, la partie dite
optionnelle était artificielle puisque les prestations concernées
figuraient dans le cahier des charges au titre des besoins fonctionnels. Au surplus, le montant
de l’offre de l'entreprise non retenue
a été augmenté à tort de 143 783 € (soit 17 157 913 F
CFP) dans le rapport de présentation aux administrateurs de l’OPT, pour mieux positionner
l’offre de SOFRECOM qui devait être choisie.
Ces modifications, altérant la consistance des offres ajoutées aux conditions de
présentation de ce dossier, ont gravement nui au choix opéré par l’organe de décision de
l’Office.
2.2.3.2.2. La mauvaise réponse du projet aux besoins et les délais de mise
en oeuvre
Le périmètre financier du projet de base retenu ne correspond pas aux besoins de
l’Office. La solution de base, ramenée à 607 389 700 F CFP (5 090 000 €) pour faire
apparaître un prix plus compétitif, a été amputée de prestations qui figurent au cahier des
charges au titre des besoins fonctionnels. Ces options ont d’ailleurs été levées dès le
démarrage du projet puisque jugées indispensables par le maître d’oeuvre à la bonne tenue du
projet.
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septembre 2008 - page 67 sur 105
L’inadéquation de l’offre SOFRECOM avec le cahier des charges était connue, selon
l'OPT, avant même le choix de cette société. L’entreprise indique que des demandes de
fonctionnalités non prévues initialement au cahier des charges ont été ajoutées. Cependant à la
lecture de la matrice de conformité, pièce fournie dans le dossier de candidature, la
commission d’appel d’offres avait relevé un certain nombre de « trous fonctionnels » qu’elle
qualifiait de rédhibitoires, ce que conteste la société, indiquant qu’elle répondait largement
aux besoins de l’OPT.
Ainsi donc, le contrat avec cette société ne couvre que partiellement les besoins
exprimés par l’OPT dans le cadre de son cahier des charges. Les fonctionnalités de l’offre
SOFRECOM s’avèrent même défaillantes sur les besoins qu’elle prétend satisfaire,
notamment pour certaines fonctionnalités présentes dans le logiciel GIRAFE (installé depuis
1996 par cette même société). Cette société indique avoir proposé à l’OPT de faire migrer son
système vers une version supérieure, dite GAIA, dans laquelle l’ensemble des applications
sont développées par elle-même. L’Office a décliné cette solution, préférant bâtir un système
avec plusieurs « briques logicielles » de différents fournisseurs, seul moyen d’assurer son
indépendance et d’harmoniser les systèmes d’information de ses différentes entités.
Le choix d’une société chargée de l’intégration de plusieurs progiciels aurait dû
s’appuyer sur des références en la matière. Or, à la différence de ses concurrents,
SOFRECOM, n’ayant jamais mené de mission de ce type, n’a pu fournir que des références
de clients ayant choisi la solution GAIA. Cette difficulté avait été perçue par la commission
de dépouillement des offres. Il en a découlé que les différentes séries de tests correspondant à
des étapes du développement du projet se sont conclues par des taux d’échec très élevés. Dans
ces conditions, le planning d’exécution du marché prévoyant un démarrage le 14 mars 2005 et
une mise en production le 8 mars 2006 n’a pas été respecté. A l’été 2008, le différend non
résolu entre l’OPT, qui considère que les travaux sont toujours en cours du fait de
l’inexécution de certaines prestations prévues au contrat, et SOFRECOM, qui conteste cette
appréciation et considère que le contrat est exécuté, les demandes de l’OPT constituant une
version 2 complémentaire, fait courir le retard de mise en oeuvre du système d’information au-
delà de 30 mois par rapport aux prévisions contractuelles. Bien qu’envisagée sous la
présidence de Monsieur BARRAL, la saisine d’un expert agréé près les tribunaux afin
d’établir les responsabilités dans l’exécution du contrat n’a en définitive pas été actée par le
nouveau conseil d'administration de l’Office constitué en mai 2008.
2.2.3.2.3. Le système d’information, à ce jour inexploité, a pourtant déjà été
payé par l’OPT
Bien qu’inscrit pour un montant de 595 MF CFP à l’état prévisionnel des recettes et des
dépenses 2004, le projet SOFRECOM a été retenu pour un montant de 607 389 700 F CFP
(5 090 000 €). Du fait des avenants n°1 à 3, conclus très peu de temps après la signature du
contrat pour les deux premiers et qui sont la conséquence des manoeuvres opérées pour que
SOFRECOM soit l’attributaire du marché, et de l’achat direct par l’OPT des licences
Highdeal et Aristophane, sorties du contrat, le coût global du projet a alors été porté à
689 548 030 F CFP (5 778 400 €), soit une évolution de +13,5 %.
Toujours pas réceptionné à la fin de l’année 2006, le contrat a pourtant entièrement été
payé par l’OPT. Certes, l’intégration du projet TE VAIPUNA dans un programme de
défiscalisation nationale pour les années 2005 et 2006 supposait que l’intégralité
du contrat
soit facturée au plus tard le 31 décembre 2006. Mais une mesure de prolongation du délai
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aurait pu être demandée à la Direction générale des impôts (DGI). Tel ne fût pas le choix du
président de l’OPT, M. Jean-Alain FREBAULT.
Le président du conseil d’administration de l’OPT a donc signé un avenant n°4
modifiant « les conditions de facturation et de paiement du contrat ». En rendant plus
favorable à SOFRECOM la date de paiement du solde des prestations, soit 50 % du prix, le
président du conseil d’administration a accepté de payer l’intégralité de la fourniture de
progiciels et de prestations, alors même que le produit n’avait pas été réceptionné de manière
définitive. Le système ne fonctionnait pas au 31 décembre 2006 et n’est toujours pas mis en
exploitation près de deux ans plus tard.
Les quatre premières factures d’un montant de 239 605 962 F CFP ont été payées le
14 février 2007 sur la base de la
recette usine
d’octobre 2006
en lieu et place de la
recette
provisoire
qui lui est postérieure et alors même que le taux d’échec des tests de conformité
était de 60 %. La
dernière facture d’un montant de 49 560 501 F CFP a été payée le 30 avril
2007 sur la base de la
recette site
40
en lieu et place de la
recette définitive
qui, comme son
nom l’indique, est la réception d’un système prêt à l’emploi. A l’été 2008, l’OPT considère
que cette dernière n’a toujours pas eu lieu au regard des prestations contractuelles dues par
SOFRECOM, ce que conteste cette société en s’appuyant sur le certificat de recette site du
16 février 2007.
2.2.3.2.4. Le surcoût excessif pour parvenir à un système opérationnel
L’OPT, qui s’est privé de tout moyen de pression en soldant le premier contrat, est
aujourd’hui confronté à la proposition de la société SOFRECOM de signer un contrat pour
une version 2, permettant de rendre le projet TE VAIPUNA conforme aux besoins qu'il avait
exprimés, en y reportant d’ailleurs des opérations prévues dans le contrat aujourd’hui soldé.
Cette phase occasionnerait un coût supplémentaire de 401 067 541 F CFP soit 3 360 946 €.
Selon SOFRECOM, cette proposition, représentant un montant maximal, correspond à des
fonctionnalités
41
non prévues au cahier des charges, à des formations non prévues au marché
et comporte des options qui pourraient éventuellement être retenues par l’OPT.
Si l’OPT ne se résout pas à ce nouveau contrat, il ne dispose que de l’alternative
suivante : soit l’abandon du projet et la conservation de l’actuel système d’information, ce qui
stopperait certes la gabegie mais conduirait au constat de la perte sèche de 5,5 millions
d’euros et à l’impossibilité de développer de nouvelle offres commerciales ; soit trouver une
solution alternative pour se greffer sur la base développée par SOFRECOM, cette société
ayant accepté le principe de la cession de ses codes sources
42
. Les premières études préalables
concluent à un investissement complémentaire de l’ordre de 280 M F CFP. Le conseil
d'administration de l’OPT n’avait cependant pas décidé, en juillet 2008, du lancement d’un
nouvel appel d’offres.
Au-delà du surcoût inhérent à une phase 2, l’accompagnement de l’équipe projet de
l’OPT (heures de travail, frais de mission, formation propre) à la mise en oeuvre du nouveau
système d’information piloté par SOFRECOM, est valorisé à 174,8 MF CFP. En outre, pour
pallier les manquements fonctionnels constatés, le pôle informatique
et traitement de
40
L’OPT a accepté de réaliser la recette site en mars 2007.
41
Evaluées par le conseiller financier du président du conseil d’administration à 275 MF CFP.
42
La cession des codes sources à l’OPT permettrait la continuation du projet par une autre société.
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l’information (PITI) de l’OPT a produit en interne une interface GIRAFE / HIGHDEAL pour
permettre de lancer certaines offres groupées qui
sont valorisées à 20 M F CFP.
Au total, les mesures complémentaires prises ou à prendre pour parvenir à un système
opérationnel feront croître, dans des proportions excessives, le coût global de ce projet pour le
porter à hauteur de 1,164 ou 1,285 milliards de F CFP selon les hypothèses.
En francs CFP
SOFRECOM
(phases 1 et 2)
SOFRECOM +
autre prestataire
SOFRECOM +
abandon
coût projet initial
689 546 526
689 546 526
689 546 526
complément 2ème phase
401 067 541
280 000 000
0
coût de l’équipe projet
Prestations immobilisées
174 800 000
174 800 000
174 800 000
développements faits en interne
par la DG OPT
Interface GIRAFE/HIGHDEAL
20 000 000
20 000 000
20 000 000
1 285 414 067
1 164 346 526
884 346 526
En conclusion, la Chambre observe que le choix de l’attributaire du marché de
réalisation du nouveau système d’information de l’OPT, opéré dans des conditions
contestables tant du point de vue de la forme que du fond, a conduit à un gaspillage des
ressources de l’Office.
2.2.3.2.5. La défiscalisation des investissements du nouveau système
d’information projet Te Vaipuna
2.2.3.2.5.1. Les
tergiversations
dans
le
portage
du
dossier
de
défiscalisation ont rendu ce projet peu transparent pour les
instances décisionnaires
Le rapport de présentation qui a conduit le conseil d’administration, le 21 décembre
2004, à décider de l’acquisition d’un système d’information auprès de la société
SOFRECOM, mentionnait qu’une étude sur « l’éligibilité » de cet investissement de
610 M F CFP à la défiscalisation « Girardin » serait menée.
Ayant
appris
que
les
investissements
informatiques
seraient
éligibles
à
la
défiscalisation, et avant même que le conseil d’administration se soit prononcé, le président de
l’OPT, M. FOSTER, a signé,
le 21 janvier 2005, deux conventions d’assistance à l’opération
de défiscalisation avec la société FIPROMER.
Ces contrats prennent fin au 31 décembre 2006 (fin de la période d’investissement) mais
prévoient un report jusqu’à fin 2008 si nécessaire. Après réajustement à la baisse de la base
agréée par la direction générale des impôts (DGI), la rétrocession a été ramenée à
647 108 652 F pour l'ensemble des programmes 2005 et 2006, alors que le conseil
d’administration de l’Office s’était prononcé, le 3 février 2005, sur la base d’un rapport
prévoyant une rétrocession de 828 millions de F CFP. Rapportée au montant de
l’investissement global, la rétrocession en représente 19,25 %.
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Un dossier unique de demande d’agrément de défiscalisation a été constitué, in fine, par
l’intermédiaire de la société FIPROMER, pour un montant d’investissements éligibles de
3 172 101 236 F CFP pour les programmes des années 2005 et 2006. Le montant du
plafonnement de l'aide (base défiscalisable) est de 1 903 260 742 F (soit 60% du montant des
investissements éligibles). La rétrocession de 647 108 652 F accordée à l'OPT doit être
rétrocédée aux usagers sous forme de baisse tarifaire à hauteur de 60 %, soit
388 265 191 M F CFP.
Le portage de l’ensemble des investissements de télécommunications a été confié à
l’OPT. Celui du système d’information des télécommunications lié à la modernisation des
équipements, initialement porté par l’OPT, suivant la délibération du 21 décembre 2004, a été
transféré, au début de l’année 2005, à la société ISS, « filiale » de l’OPT. Selon la raison
développée par le président du conseil d’administration, M. FOSTER, et ses conseillers, cette
société apparaissait la mieux adaptée pour la création d’une plate-forme de développement et
de maintenance des outils de gestion commerciale et de facturation pour l’ensemble du
« groupe OPT ». En réalité, ce transfert permettait d’intégrer les investissements du système
d’information de la SAS TIKIPHONE qui pourtant n’étaient pas fourni par la société
SOFRECOM
43
, alors même que cette « filiale » de l’OPT avait déjà bénéficié de la
défiscalisation pour d'autres investissements en 2002 et 2003.
Ainsi, en élargissant la base des investissements, l’OPT pouvait faire défiscaliser à
100 % son propre système d’information
44
. Le conseil d’administration, sans nécessairement
en percevoir les enjeux, a autorisé, sur le rapport d’un des conseillers du président du conseil
d’administration, une avance en compte courant de 1,3 milliard de F CFP à la « filiale » ISS,
soit plus du double de l’investissement prévu pour le système Te Vaipunaa. Le directeur
général de la société ISS a alors été pressé par M. FOSTER et son conseiller de signer le
contrat avec la société SOFRECOM, dès lors qu’elle portait le dossier de défiscalisation pour
cette partie. Le président de l’OPT, M. FOSTER, a, en personne, tenu à vérifier, en réclamant
les pièces probantes, que le versement de l’acompte avait bien été réalisé.
Contrairement à ce qui avait été anticipé par l’Office, la DGI a estimé, en cours
d’instruction, que le système d’information ne serait pas éligible, en raison du caractère
immatériel de l’investissement qui n’offrait pas suffisamment de garantie en cas d’échec de
l’opération de défiscalisation. Le conseiller du président du conseil d’administration de
l’OPT, lors d’une réunion avec le chef de bureau concerné, est intervenu auprès de la DGI
pour accréditer l’idée et finalement parvenir à faire admettre que le système d’information
était indissociable des équipements de télécommunication. Cette intervention a conduit la
DGI à bien vouloir considérer, le 21 novembre 2005, que la demande ne pouvait relever que
d’une seule entité juridique, du fait que les programmes concernaient un même objet, et à
accorder l’agrément unique à l’OPT et non à sa filiale ISS.
Le portage a alors été de nouveau confié à l’OPT. La DGI, informée que la société ISS
avait déjà acquis des équipements et des prestations associés au programme du système
d’information au cours de l’année 2005, a autorisé, en novembre 2005, que l’OPT rachète à
cette société, sans majoration de prix, l’ensemble de ces équipements et prestations figurant
dans le dossier de demande d’agrément. Cette cession fut effective le 31 décembre 2005.
43
Comme le mentionnait la délibération n°02-2005 du 3 février 2005.
44
Pourtant éligible initialement qu’à 50 % puis à 60 % dans le cadre de la globalisation des investissements informatiques et de
télécommunication (lesquels ont été réduits de 75 % à 60 % pour contrebalancer).
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 71 sur 105
2.2.3.2.5.2. L’agrément de défiscalisation a été obtenu alors que des
éléments semblent ne pas avoir été communiqués à la DGI
2.2.3.2.5.2.1.
L’intégration des investissements du système d’information de
la société TIKIPHONE n’apparaît à aucun moment dans le dossier
d’agrément de défiscalisation transmis à la DGI
Afin de pouvoir bénéficier d’une défiscalisation maximale sur l’ensemble des
investissements du groupe (OPT + TIKIPHONE), l’Office a présenté à la DGI un dossier
portant sur un montant intégrant le projet sur du système d’information de TIKIPHONE, sans
que le nom de cette société n’y soit jamais mentionné.
Ce manque de transparence a également été observé lors de la présentation du dossier
au conseil d’administration.
Le dossier a été présenté au conseil d’administration en deux temps. D’abord le
21 décembre 2004, pour que les administrateurs entérinent la proposition de mener une étude
sur l’éligibilité des investissements du système d’information de l’OPT, dont ils venaient
d’autoriser la réalisation pour un maximum de 610 millions de F CFP.
Puis le 3 février 2005, pour que les administrateurs annulent leur précédente
délibération, puisque ce n’était plus l’OPT, mais sa filiale ISS, qui porterait le dossier. A cette
occasion, il a été indiqué au conseil d’administration que l’OPT ferait des avances en compte
courant à ISS, pour un montant de 1,3 milliard de F CFP. Les membres du conseil
d’administration de l’OPT n’ont donc pas été expressément informés de l’intégration des
investissements de TIKIPHONE dans le dossier de défiscalisation.
Il n’apparaît dans aucun document communiqué au cours de l'instruction que les
investissements liés au système d’information de la société TIKIPHONE auraient été intégrés
dans le dossier de défiscalisation de l’OPT remis à la DGI. Les investissements concernant
TIKIPHONE représentaient une partie du matériel des deux systèmes d’information, évalué
globalement à 260 351 000 F, et des prestations d’un montant de 528 731 504 F CFP. En
outre, les vérifications menées par la DGI dans le cadre de l’instruction de ce dossier ont
concerné exclusivement l’OPT. Elles ont ainsi donné lieu à la production d’attestations par
l’OPT, relatives aux emplois existants et à la création d’emplois, aux investissements réalisés
depuis les cinq dernières années, aux commandes de biens, au respect des obligations fiscales
et sociales et au contrôle local. Aucune de ces demandes n’a concerné la société
TIKIPHONE, ce qui tendrait à confirmer que la DGI n’était pas informée de l’intégration de
cette société au dossier. D’autres vérifications, portant sur les missions de l’organisme
bénéficiaire, le prélèvement sur fonds propres, le flux d’investissement, la rétrocession de
l’avantage au consommateur, ont pu être opérées. L’article 12 de la décision d’agrément
rappelle pourtant que quiconque aura fourni à l’administration de fausses informations en vue
de l’obtention de l’agrément pourra être sanctionné.
2.2.3.2.5.2.2.
Les conditions associées à l’avantage fiscal
Alors que les critères d’éligibilité n’allaient pas de soi, la DGI a accepté d’accorder
son agrément de défiscalisation en le conditionnant à des engagements pris par l’Office.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 72 sur 105
L’OPT a ainsi justifié l’intérêt économique de ces investissements qui, selon elle, lui
permettraient de s’inscrire dans la société mondiale de l’information, favoriseraient, en
modernisant le réseau, les citoyens, les entreprises et les administrations, et permettraient de
répondre aux menaces qui pèsent sur la téléphonie fixe. En matière d’aménagement du
territoire, ces investissements permettraient, selon l’Office, de développer des services de type
internet et des lieux de consultation citoyens. Enfin, en ce qui concerne l’emploi, ces
investissements seraient générateurs d’emplois indirects, maintiendraient les emplois actuels
de l’OPT et créeraient quelques emplois directs au sein de l’établissement public. L’OPT s’est
ainsi engagé initialement à créer 35 emplois dont 7 emplois à ISS.
Enfin et surtout, la DGI a dû insister fortement pour que l’OPT s’engage sur des
mesures concrètes de rétrocession de l’avantage fiscal au consommateur. Après avoir tenté de
montrer que la rétrocession s’exprimerait sous la forme d’une meilleure qualité de service et
que quelques offres ciblées attractives seraient faites une fois les investissements réalisés, ce
qui les rendait difficile à déterminer, l’Office a dû se soumettre à une plus grande précision.
L’OPT, après avoir rappelé, que compte tenu de son statut d’EPIC, c’était le conseil des
ministres qui approuvait les montants des taxes et redevances, s’est engagé sur des mesures
tarifaires ayant pour objectif d’alléger la charge des ménages et des entreprises, pour satisfaire
à la condition de rétrocession à l’usager à hauteur de 60 %. L’OPT s’est aussi engagé à
communiquer à la DGI toute information chiffrée permettant de vérifier l’impact d’une
mesure tarifaire vis à vis des citoyens et des entreprises. Ce contrôle serait rempli par les
commissaires aux comptes qui semblent d’ailleurs n’en avoir pas été informé par l'OPT.
Or, les premières mesures tarifaires décidées le 9 février 2007, consistant en une
remise sur consommation téléphonique pour les personnes bénéficiant du régime de solidarité
de la Polynésie française (RSPF), un forfait de communications grands comptes, un forfait
"weekend" sur téléphone fixe et un service "mes numéros préférés" sur téléphone fixe, ne
permettent de remplir que partiellement les engagements pris. L’ensemble de ces mesures, à
supposer que les estimations soient vérifiées, permettraient une rétrocession de l’avantage
fiscal à hauteur de 267 MF CFP. Or, la condition liée à l’avantage fiscal apporté par l’Etat
devrait profiter à l’usager à hauteur de 60 %, soit 388 MF CFP. L’OPT s’est même engagé à
proposer des mesures tarifaires représentant une rétrocession se situant entre 436 à
586 MF CFP. Force est de constater qu’à la fin de l’année 2007, le retard dans la mise en
oeuvre du nouveau système d’information n'a pas permis d’accroître la rétrocession au
consommateur de l’avantage fiscal. La condition posée pour l’obtention de l’agrément
pourrait apparaître réalisée grâce aux baisses tarifaires validées en 2008. Toutefois, le lien de
ces mesures tarifaires avec l’investissement défiscalisé est inexistant puisque le nouveau
système d’information n’est toujours pas en service à ce jour.
Par ailleurs, les 35 créations d’emploi promises, dont 7 chez ISS qui ont pu être
transférées à l’OPT compte tenu du changement de porteur du dossier,
ne sont pas réalisées.
Il est certain qu’un seul emploi a été créé chez ISS mais sans garantie de pérennité, dans la
mesure où cette société n’est pas devenue le centre de ressources des systèmes d’information
du « groupe » OPT. En outre, dans l’ensemble des emplois créés à l’OPT, aucun ne l’a été en
lien avec les engagements attachés au dossier de défiscalisation.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 73 sur 105
2.2.3.2.5.2.3.
Le débouclage de la défiscalisation a été réalisé alors que
l’OPT ne semble pas avoir informé la DGI que les systèmes n’étaient
pas opérationnels
Au 31 décembre 2006, rien n’indiquait que la DGI avait été informée de l'absence de
caractère opérationnel, du système d’information. Certes, le contrat avait été modifié par
avenant pour donner les apparences de régularité au paiement par l’OPT du solde à la société
SOFRECOM. Mais il est établi que le système d’information Te Vaipuna n’était pas en
production à la fin 2006 et ne l'était d’ailleurs toujours pas en juillet 2008. Pourtant, la société
SOFRECOM avait remis à l’OPT un procès verbal de livraison, accompagné d’une facture
relative à l’ensemble des prestations réalisées par la société. On y lit par exemple qu’ont eu
lieu la migration des données des logiciels ARCHIPEL et GIRAFE, la mise en production et
les tests et validation.
Or, la note du 9 juillet 2007, signée du président du conseil d’administration de
l’OPT, demande précisément la préparation de la réception définitive qui comprend ces
3 opérations. Le procès-verbal de SOFRECOM indique aussi la prise en compte des nouveaux
autocommutateurs (or leur installation n’a pas été réalisée) et la formation (qui n’est prévue
que lorsque le système sera prêt à être mis en production ce qui n’est pas le cas). Ce procès-
verbal et la facture du solde du contrat, attestant de la réalisation de la tranche
d’investissement 2006, ne correspondent pas à la réalité. Ils ont pourtant été transmis à la DGI
pour clôturer l’opération de défiscalisation.
De la même façon, bien le système n’ait pas été livré avant la fin de l’année 2007, les
factures concernant le système d’information de TIKIPHONE, sans jamais mentionner le nom
de la société, ont été datées d’avant le 31 décembre 2006 pour pouvoir être transmises à la
DGI.
La production de ces documents pourrait avoir contribué à dissimuler à la DGI, l’état
d’avancement réel d’investissements qui ont reçu l’agrément de défiscalisation. En agissant
ainsi, l’OPT s’est exposé à la remise en cause de l’avantage fiscal obtenu. La directrice
générale de L'OPT indique, en avril 2008, que la DGI avait décidé, à cette même date, de
repousser la date butoir du bénéfice de la défiscalisation au 31 décembre 2008.
2.2.3.3. : L’investissement hasardeux lié au rachat du catalogue
Océane Productions
2.2.3.3.1. L’OPT a voulu se doter d’un fonds d’enregistrement à diffuser sur
internet, sans avoir la compétence en matière de communication
S’inscrivant dans la stratégie visant à maîtriser tous les terminaux présents sur le
marché, l'OPT a souhaité nourrir leur contenu en créant un portail polynésien consistant
notamment en la vente en ligne d’extraits musicaux ainsi que la vente sur le marché local et
international de produits audiovisuels. C’est dans cette perspective que l’OPT a acheté
l’exclusivité de l’exploitation sur Internet du catalogue multimédia de la société OCEANE
PRODUCTION, composé, dans le domaine musical, de 1 753 titres de musique polynésienne
et dans le domaine audiovisuel, de 920 minutes d’images.
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Conclu pour 7 ans, le contrat de licence prévoit la rémunération de la société sous forme
de redevance sur le chiffre d’affaires des téléchargements et des ventes de produits finis
réalisés par l’OPT. En contrepartie, la société s’engage à fournir en exclusivité de nouveaux
produits. Sur la base d’une estimation réalisée par un cabinet d’expertise, qui prévoyait la
multiplication par 4,5 du chiffre d’affaires et par 6 du résultat d’exploitation,
prévisions qui
se sont révélées par la suite totalement erronées, les droits d’exploitation exclusifs du
catalogue d’OCEANE PRODUCTION ont été acquis, à la fin de l’année 2000, pour
53.975.710 F CFP TTC.
En décembre 2001, OCEANE PRODUCTION proposait à l'OPT de se rendre acquéreur,
de manière définitive, des droits de la propriété industrielle et des droits intellectuels attachés,
y compris les droits d'édition détenus en propriété, de la totalité du catalogue multimédia.
S’écartant d’une expertise indépendante fixant la valeur de ces droits à 215,5 MF CFP,
et après négociation, le conseil d’administration de l’OPT a autorisé, le 26 août 2002, le
directeur général à acquérir en pleine propriété le catalogue de la société OCEANE
PRODUCTION pour un montant maximal de 130 MF CFP. Simultanément, le directeur
général a été autorisé à signer un contrat de mandat avec la société venderesse, pour l'édition,
la production et la commercialisation des produits audiovisuels du catalogue.
Ces acquisitions ont cependant été faites alors que l’OPT n’avait pas la compétence pour
intervenir dans le secteur de la communication. Au moment de l’achat des droits
d’exploitation, M. PEAUCELLIER, administrateur et ministre des finances de la Polynésie
française, s’interrogeait, le 18 septembre 2000, sur «
le rapport entre cette acquisition de
droits et d'oeuvre (exploitation du catalogue Océane production) et l'objet social de l'Office
».
Lors du rachat du catalogue en 2002, l’objet statutaire de l’OPT ne permettait pas la
commercialisation du catalogue ainsi racheté. C’est d’ailleurs à cette date que le conseil
d’administration de l’OPT a formulé le voeu d'élargir les
missions de l'Office. Il n’a été exaucé
que le 12 juin 2003, date à laquelle le code des postes et télécommunications en Polynésie
française a été modifié. L’article D.311-1 dispose désormais que
« L’Office des postes et
télécommunications … a pour mission d’assurer l’exploitation des domaines …de la
communication. En outre, il peut offrir et il développe des activités complémentaires ou
connexes à la mission définie à l’alinéa précédent »
.
Force est donc de constater qu’au 27 septembre 2000, date d’acquisition des droits
d’exploitation du catalogue et au 9 septembre 2002, date d’achat du catalogue, l’OPT n’avait
pas dans son objet statutaire, la compétence requise.
2.2.3.3.2. Une opération menée pour des motifs étrangers à l’objet de
l’OPT, sans une juste appréciation des risques économiques et
financiers
L’Office des postes et des télécommunications n’a pas su bien apprécier le risque
économique et financier de l’opération.
Tout d’abord, au moment de l’acquisition des droits d’exploitation du catalogue
d’OCEANE PRODUCTION, l’OPT s’en est remis aux prévisions établies par le cabinet
d’expertise, qui laissaient apparaître une exploitation prévisionnelle bénéficiaire dès la
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première année. Ensuite, au moment de l’acquisition du catalogue en pleine propriété, l’OPT
a pris pour argent comptant les perspectives financières mirobolantes présentées en décembre
2001 dans le rapport d’un second expert indépendant, qui laissaient entrevoir un résultat
encore plus favorable que les prévisions du premier cabinet d’expertise.
Or, dès l’année 2002, la société OCEANE PRODUCTION connaissait des difficultés
qui la conduiront rapidement à la liquidation judiciaire. Le mandataire n'était déjà plus en
mesure, au premier semestre 2003, de verser les recettes dues à l'OPT (soit 9 MF CFP). Après
plus d'une année d'exploitation, le résultat 2003 est loin de celui escompté, sans que puissent
être invoquées la crise du marché musical polynésien ou l'absence de ventes sur l'Internet.
Données issues du premier cabinet d’expertise (prévisions)
CA Prévisionnel :
en MF CFP
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
21
46
52,5
60
67
75
82
90
Charges estimées :
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
14
32
37
40
43
48
5
49
Résultats d'exploitation prévisionnels :
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
7
13
15
19,5
24
27
29
45
Seconde expertise indépendante (prévisions)
En millions de F CFP
Année 1
Année 2
Année 3
Chiffre d’affaires
96,30
114,13
123,12
Charges
35 ,87
40,00
47,30
Charges de structure
34,00
34,00
34,00
résultat
26,43
40,13
41,82
L’année 1 correspond soit à 2002 soit à 2003 mais est tout aussi erronée dans l’un comme dans l’autre cas.
Compte de résultat 2003 (en MF CFP)
Produits 2003
Montants
Produits des ventes
25,0
Droits
0
Total produits
25,0
Charges 2003
Montants
Commission Océane Production
17,5
Droits
0
Total charges
17,5
RESULTAT BRUT 2003
7,5
En n’exerçant pas un regard critique sur ces expertises, auxquelles le président du
conseil d’administration dit avoir recouru par précaution, qui apportaient une caution
technique à la décision d’investissement qu’il avait déjà arrêtée, l’OPT n’a pas fait preuve de
prudence. L’investissement, d’un montant de près de 54 MF CFP pour l’acquisition des droits
d’exploitation du catalogue d’OCEANE PRODUCTION, puis de 130 MF CFP pour l’achat
du catalogue en pleine propriété, était très nettement surévalué compte tenu des conditions du
marché de la diffusion de produits musicaux et vidéo par internet. Il ne pouvait qu’être voué à
l’échec, même si M. Geffry SALMON, à l’époque directeur général de l’Office, maintient que
« ce projet … mené à son terme … aurait été source non négligeable de recettes pour
l'OPT »
. Dès 2000, un administrateur s’était interrogé sur les raisons qui conduisaient la
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
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société OCEANE PRODUCTION à ne pas développer elle-même la création d’un site
internet pour exploiter son catalogue.
D’autres raisons ont pu motiver le rachat des droits de la société OCEANE
PRODUCTION. Dès 2002, un administrateur avait craint la critique consistant à dire que
l’achat par l’OPT du catalogue de la société OCEANE PRODUCTION n’était qu’un
habillage pour sauver cette société de ses déboires financiers. Les arguments, en réponse à sa
question, apportés par le directeur général de l’OPT, lui avaient cependant paru satisfaisants.
Les faits attestent que M. Robert WAN était encore propriétaire de plus de la moitié des parts
de cette société au moment de l’acquisition des droits d’exploitation du catalogue, le
27 septembre 2000. M. WAN est sorti du capital de la société OCEANE PRODUCTION, le
8 novembre 2000, exactement dans la période où l’OPT a manifesté son intérêt pour le
catalogue. L’autre actionnaire de la société, qui a servi d’intermédiaire pour le règlement de
cette affaire, sera désigné mandataire de l’OPT dans un premier temps pour la production de
nouveaux titres à exploiter. Après l’échec de cette mission, il bénéficiera le 29 mars 2004, en
qualité de prestataire de service, d’un contrat de 19,2 MF CFP d’une durée de deux années,
pour
« l’assistance dans la mise en place et le fonctionnement d'une structure chargée de
produire des contenus audiovisuels, d'en assurer l'édition et la promotion en vue de leurs
exploitations et communications ».
L’intérêt de la prestation n’a pas été démontré par l’OPT.
La convention a d’ailleurs été résiliée le 1er juillet 2004 avec effet au 1
er
décembre de la
même année, ramenant les sommes servies à hauteur d'environ 6 millions de F CFP.
2.2.3.3.3. L’opération présente déjà un coût élevé alors que l’Office n’a pas
réglé la question des droits de la propriété intellectuelle et
artistique
Le rachat par l’OPT du catalogue d’OCEANE PRODUCTION ne s’est pas opéré avec
toutes les garanties juridiques nécessaires quant à la nature et à la portée des droits acquis en
vue de l’utilisation de ces oeuvres à des fins commerciales. Sont en cause, les droits de
propriété industrielle, les droits d’auteur (moral et patrimonial), et les droits d’éditeur.
Les artistes n’ont ainsi pas été informés de la cession des droits d’édition au profit de
l’OPT. Or, les auteurs, dans la mesure où ils ne sont pas intervenus dans la cession, peuvent
contester la qualité de producteur et d’éditeur de l’OPT et résilier le contrat. L'audit juridique
précis des droits acquis par l'OPT et la détermination des démarches devant être accomplies
pour permettre à l'OPT une reprise de l'activité du site, n'est pas finalisé à ce jour et aucune
ressource potentielle tirée de l’exploitation du catalogue n'est envisageable à court terme.
L'achat de la licence d’exploitation exclusive, puis le rachat du catalogue OCEANE
PRODUCTION, se soldent, à ce jour, par un coût exorbitant pour l’OPT, et ce d’autant plus
que l’investissement n’est pas exploitable à ce jour. Le coût des acquisitions s’établit à
181 595 249 MF CFP,
se
répartissant
en
acquisition
des
droits
d'exploitation
(49 905 249 F CFP) et en acquisition en pleine propriété (131 690 000 F CFP).
Le coût de gestion de cette opération, portant sur
la période septembre 2000 à juin
2007, est estimé à près de 95 MF CFP. La dépense globale de cette opération, susceptible de
s’accroître encore, est arrêtée en juin 2007 à plus de 276 MF CFP.
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Dépenses liées au catalogue OCEANE PRODUCTION (hors investissement) en F CFP
Publicité en Polynésie française en 2003 et 1
er
semestre 2004
8 727 851
Publicité en métropole et à l'étranger (2003 et 2004)
10 661 402
Charges de personnel (liées à la gestion du catalogue Océane) en 2003 et 2004
25 912 901
Honoraires cabinet juridique PQBBL de 2003 à 2006
750 000
Honoraires cabinet Soulier (Métropole) en 2006
1 300 000
Coûts du développement informatique site Tahitijukebox
5 568 400
Coût de la numérisation du catalogue vidéo
12 589 508
Créances de l'OPT lors de la liquidation d'Océane en septembre 2004
29 361 694
2.2.3.4. : Les tergiversations dans la conduite du dossier FARE HINOI
masquent mal l’incertaine définition du projet initial
2.2.3.4.1. L’achat précipité d’un terrain, non libre de droits, toujours
dépourvu de toute construction sept ans plus tard
La SCI FARE HINOI, créée spécialement par l’OPT et TIKIPHONE, a acheté le
20 décembre 2000 à la société civile TEPIHAA, dont le gérant est M. Louis WANE, un
ensemble foncier de 4 lots d’une superficie globale de 10 915 m², situé sur les avenues Prince
HINOI et Georges BAMBRIDGE à PAPEETE, pour un montant de 656 762 069 F CFP (dont
71 762 069 F CFP de droits et honoraires).
Le ministre des finances de la Polynésie française, administrateur de l’Office, avait fait
part de ses réticences, en raison d’une surface foncière ne correspondant pas aux besoins et
d’un prix jugé trop élevé. Il apparaît en effet qu’en dépit de l’avis d'un expert agréé près des
tribunaux, le prix
d’acquisition du terrain (53 595 F CFP/m²) restait largement supérieur au
prix moyen des ventes réalisées dans le secteur (46 476 F CFP/m²) pour des superficies
moyennes et, a fortiori, du prix au m² des terrains de grandes superficies. Les évaluations, au
demeurant très disparates, transmises en réponse par les destinataires des observations
provisoires ne font référence qu’à de petites ou moyennes surfaces et ne considèrent jamais
l’ensemble de plus d’un hectare acquis par l’OPT, seule emprise à évaluer.
De surcroît, ce terrain présentait la particularité de n’être pas libre de droits, en raison
de contentieux qui opposaient les occupants de trois lots sur quatre. Le conseil, chargé pour le
compte de l’Office des Postes et des Télécommunications d’apprécier les risques encourus par
l’Etablissement public acquéreur, indiquait :
« cette situation présente l’inconvénient de
rendre indisponibles lesdites parcelles, dans l’attente d’obtenir des décisions définitives
permettant la libération des lieux »
. En septembre 2007, malgré le recrutement d’un
« généalogiste et agent foncier
» chargé de régler le litige, qui a déjà perçu 2 millions de
F CFP d’honoraires, deux lots de 5000 m² et 1500 m² étaient toujours occupés. Aujourd’hui,
selon le conseiller chargé de ce dossier et un ancien président du conseil d’administration, la
libération d’un lot après de longues années de procédure permettrait d’envisager la
construction de l’ensemble immobilier et du parc de stationnement, après avoir réglé
préalablement quelques questions annexes.
Compte tenu de son occupation, ce terrain, acheté dans la précipitation, n’a pas permis
de réaliser, comme prévu, la construction d’un ensemble immobilier qui aurait dû regrouper
des bureaux administratifs, une salle de conférence, un centre de tri, une galerie marchande
pour la vente des produits et services du "groupe OPT" et des boîtes postales.
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Plusieurs demandes de permis de construire ont été déposées depuis décembre 2001. Les
modifications successives en 2003 et en 2004, notamment parce que les projets de l’architecte
n’auraient pas correspondu aux souhaits de l’OPT, ainsi que l’absence de réponse aux
demandes d’éléments complémentaires n’ont pas permis aux services de la mairie de Papeete
de délivrer le permis de construire. En 2006, à la faveur de changements à la tête de l’OPT,
l’abandon du projet a même été décidé, en faveur d’une autre localisation, avant qu’un
nouveau conseil d’administration n’en revienne à l’implantation initiale. Récemment, un
concours d'architecte a été organisé. L'architecte retenu prévoit de démarrer les travaux début
2008. En décembre 2007, le permis de construire n'avait toujours pas été obtenu.
La chambre observe qu’à la précipitation qui avait présidé lors de l’achat à M. Louis
WANE de son terrain, non libre de droits, ont succédé de longues années de tergiversation qui
font douter de la réelle volonté de l’OPT de réaliser la construction d’un ensemble
immobilier. Monsieur SALMON fait valoir que la définition du projet était très claire. Les
retards sont dus pour partie aux contentieux qui n’ont qu’en partie été réglés et surtout, en
accord avec le conseiller chargé du suivi de ce projet, à l’instabilité des dirigeants et des
administrateurs à la tête de l’OPT. Ce dernier argument ne peut toutefois valoir qu'à compter
de 2004.
2.2.3.4.2. L’octroi, en contrepartie de cet achat, de l’avantage de la
défiscalisation locale, géré de manière risquée par l’Office
Les dispositions de 1996 relatives au crédit d’impôt concernant le financement des
projets de construction immobilière ont été reconduites par délibération de l’assemblée de la
Polynésie française du 7 décembre 2000, sous réserve que la demande de permis de construire
soit déposée avant le 31 décembre 2001 et que le financement intervienne avant le
31 décembre 2003 pour obtenir un crédit d’impôt de 30%. Ces dispositions, modifiées par
d'autres mesures en 2004, demeurent néanmoins toujours applicables au projet de la SCI
FARE HINOÏ, compte tenu de l'antériorité du dossier.
Pour permettre à l’Office de bénéficier de crédits d’impôts « loi FLOSSE », qui
s’analysent comme une dépense fiscale de la collectivité d’outre-mer en faveur d’un de ses
établissements publics, le conseil d'administration de l’OPT du 6 décembre 2000 avait décidé
d’acquérir le terrain et de réaliser les constructions par l’intermédiaire d’une société civile
immobilière FARE HINOI, dont l’OPT détiendrait une partie du capital.
Le coût prévisionnel du projet était estimé à près de 2,520 milliards de F CFP. La SCI a
financé l’acquisition du terrain par une avance en compte courant de l’OPT qui a été
ultérieurement incorporée, pour un montant de 657,16 MF CFP, au capital social de
1 657,2 MF CFP de la SCI. Les constructions devaient également être financées dans les
mêmes conditions (avance en compte courant et augmentation de capital). Compte tenu du
coût prévisionnel du projet, l’OPT a contribué pour 350 MF CFP à l’augmentation du capital
de 863,270 MF CFP.
Au vu du coût prévisionnel du projet et des bases retenues pour la défiscalisation, le
crédit d’impôt pour l’OPT, constaté sur les exercices 2000 et 2002, s'élève
à 197,1 millions
de francs pour l'immeuble et celui constaté sur l'exercice 2003, à 140 millions de francs pour
le parc de stationnement.
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La défiscalisation n’est cependant pas sans risque. Compte tenu des vicissitudes du
projet, une provision pour risques, liée à la remise en cause du crédit d’impôt a été votée, mais
seulement en 2005, à hauteur de 484 779 400 F CFP.
Elle couvre le montant du crédit d'impôt
imputé, majoré de pénalités de retards de 10% ainsi que des intérêts de retards de 0,75% par
mois à compter du premier jour du mois suivant celui pour lequel l'impôt aurait dû être
acquitté.
La gestion erratique de ce projet, qui devait procurer un avantage fiscal de 337 MF CFP
pourrait potentiellement conduire à une perte de près de 485 MF CFP, sauf si le redressement
fiscal ne porte que sur une partie du projet (le parc de stationnement) et si l’OPT obtient gain
de cause en tout ou partie, à la suite de sa contestation motivée, présentée aux services fiscaux
de la Polynésie française.
2.2.3.5. : Le projet de vente à perte en 2007 de biens immobiliers
achetés en 2003 à Punaauia.
Les locaux des deux agences de l'OPT
de la commune de Punaauia étant devenus trop
étroits pour accueillir les clients et permettre l’augmentation du nombre de boîtes postales,
l’OPT avait décidé en 2003 de créer une nouvelle agence multiservice comprenant un
logement de fonction et un centre technique relais aux activités de télécommunications sur la
zone Ouest.
Le vendeur avait proposé de céder les lots 458 (3103 m²) et 19 (2658 m²), ainsi que les
constructions y édifiées, à l’OPT. En présence d'expertises divergentes réalisées par des
indépendants et par la direction des affaires foncières (uniquement pour les terrains), l’OPT
avait accepté, le 25 juillet 2003, d’acheter l'ensemble pour 257 045 000 F CFP, dont
190 113 000 F CFP, soit 33 000 F CFP le m² pour les deux terrains et 66 932 000 F CFP pour
les constructions. Le lot 19 (terrain et construction) était lui-même vendu pour 126 MF CFP.
Le dossier du conseil d'administration du 30 août 2007 comprend un projet de
délibération d'aliénation d'un bien immobilier à Punaauia. Le rapport de présentation indique
qu’il est envisagé de céder l’ensemble immobilier de ce site secondaire, acquis en 2003,
compte tenu de la non-utilisation du terrain et de sa construction, qui, faute d’occupation, ne
cesse de se détériorer.
Les
deux
experts
chargés
de
valoriser
ce
bien
immobilier
concluent
presqu’identiquement sur un prix devant se situer entre 62 et 65,6 MF CFP. Quatre ans
après l’achat de ce lot, les expertises sont donc inférieures de moitié au coût d’acquisition.
La délibération proposée envisage de céder l’ensemble immobilier à une valeur n’étant pas
inférieure à 70 millions de francs CFP.
Bien que le conseil d'administration réuni le 30 août 2007 dans des conditions
exceptionnelles n'ait pas examiné ce projet, la Chambre observe que l’acheteur pressenti,
qui n’est autre que le fils du vendeur de 2003, pourrait racheter pour 70 MF CFP une
propriété vendue à l'OPT par sa famille quatre ans auparavant pour 126 MF CFP, dans un
secteur qui connaît une forte augmentation des prix du foncier.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 80 sur 105
3 -
Une gouvernance déficiente et opaque sacrifiant le service rendu aux
usagers
Ces défaillances de gestion, d’une ampleur et d’une gravité inhabituelle, sont
largement imputables au défaut de gouvernance de l’Office. Mal préparé aux nouveaux
enjeux du secteur des postes et télécommunications, mal organisé et mal piloté, l’OPT a
sombré dans une opacité de gestion peu propice à l’amélioration de la performance et à la
satisfaction des usagers du service public.
3.1. Une gouvernance déficiente
3.1.1.
La stratégie d’adaptation de l’Office à l’évolution mondiale du
secteur postal et du secteur des télécommunications a échoué
3.1.1.1. : Une prise de conscience restée sans effet
Fortement influencé par les liens administratifs, techniques et culturels qui se sont tissés
tout au long de son histoire entre la tutelle d’Etat, les opérateurs métropolitains et la Polynésie
française, l’OPT, établissement public devenu territorial, a continué, jusqu’au milieu des
années 1990, d’être l’ « administration des postes et télécommunications », dans un
environnement protégé, caractérisé par une absence de concurrence, où une clientèle captive
lui procurait une rente de situation grâce à des tarifs élevés.
En
1995,
constatant
la
libéralisation
au
niveau
mondial
du
secteur
des
télécommunications et l’affaiblissement des activités postales face aux autres modes de
communication,
qui entraîneraient inéluctablement le fléchissement de la croissance du
chiffre d’affaires de l’établissement public, les dirigeants de l’OPT ont pris conscience de
l’absolue nécessité du changement en définissant une stratégie dite « entrepreneuriale »
d’adaptation au monde concurrentiel. Il s’agissait de passer de l’état « d’administration des
postes et télécommunications » à celui « d’opérateur dans le secteur des postes et
télécommunications ». Pour ce faire, l’OPT devait substituer à son organisation verticale et
cloisonnée, une organisation en réseaux, dotée d’un état-major chargé de la stratégie, et
d’unités responsables de leurs résultats. Il devait également élaborer un schéma directeur de
développement de l’entreprise, intégrant les tendances imposées par le marché et mettre en
place
une gestion dynamique des ressources humaines.
Or, dès 2002, le bilan de cette nouvelle orientation stratégique était décevant. La
diversification des activités avait été commencée dans le cadre des « filiales », mais les
avancées technologiques menaçaient l’activité de base qu’était la téléphonie fixe.
L’organisation de l’OPT n’avait pas été foncièrement modifiée et la résistance des agents aux
changements ne permettait pas de répondre aux attentes du client qui devenait plus exigeant et
moins captif. Les activités postales et les services financiers cherchaient la voie de leur survie.
Les faiblesses restant à corriger étaient nombreuses : client ignoré, management incomplet,
culture de gestion insuffisante, système d’information défaillant, procédures et tâches mal
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septembre 2008 - page 81 sur 105
définies liées à des responsabilités diffuses, gestion des projets défaillante et déconcentration
inachevée.
Dans sa réponse aux observations provisoires, M. Geffry SALMON, qui était à l’époque
directeur général avant de devenir président du conseil d’administration, rappelle que ces
changements s’inscrivaient dans la durée. Il considère aujourd’hui que
« les résultats sont
honorables, … compte tenu des résistances et des obstacles à surmonter
».
3.1.1.2. : La réorganisation inachevée des structures, n’a pas permis
d’améliorer le chiffre d’affaires mais a complexifié la gestion
de l’OPT
Le bilan décevant dressé en 2002 a déclenché une deuxième tentative
de réorientation
stratégique.
Dans le prolongement des projets de la Polynésie française
« metu@ »,
visant au
développement de la société de l’information, et
« télécom 21 »,
visant à ouvrir
progressivement à la concurrence le secteur des télécommunications, le directeur général de
l’OPT a défini les orientations stratégiques qui devaient permettre à l’organisme d’avoir un
futur. L’Office devait avoir une vision de l’avenir, fondée sur la densification du maillage en
réseaux, l’accès, à bon marché, des moyens de télécommunication, l’une et l’autre au service
du développement. Il devait modifier son organisation et son fonctionnement, par la création
de pôles, où chaque pilote serait responsable des hommes, de l’activité et des résultats. L’OPT
devait enfin saisir les opportunités stratégiques pour créer de nouveaux marchés et de
nouvelles richesses, et mieux répondre aux attentes du client.
L’OPT s’est donc structuré en pôles, par métiers (poste, services financiers, réseaux) ou
par supports de communication (télévision, téléphonie fixe, téléphonie mobile, ordinateur) ou
fonctions transversales (informatique, traitement de l’information, contenus multimédia,
distribution et ventes, infrastructures physiques et logiques) au sein desquels oeuvrent une
équipe marketing, une équipe gestion, une équipe production et une équipe commerciale.
L’Office a voulu aussi rendre visible la gestion et les résultats d’exploitation de ces pôles par
la création de modèles économiques propres à chaque activité. Il devait disposer aussi d’un
véritable système de traitement de l’information, servant de base aux actions futures et
inventer de nouveaux marchés.
Le bilan de cette seconde phase est paradoxal. La réorganisation de l’Office a bien eu
lieu, mais ses effets sur le résultat d’exploitation ne sont pas au rendez-vous : le nouveau
dynamisme devant être insufflé
n’a pas fait émerger les nouveaux produits permettant de
substituer de nouveaux revenus
à un chiffre d’affaires de la téléphonie fixe en baisse, suivant
en cela une tendance mondiale, aux
activités postales et aux services financiers toujours
largement déficitaires, entravés, selon M. Geffry SALMON, par l’absence de revalorisation
du prix du timbre et un cadre réglementaire limitant. L’élargissement de l’encadrement
intermédiaire et les recrutements accompagnant la création d’agences a eu un impact négatif
sur la masse salariale sans que la mission de service public soit mieux remplie. Enfin et
surtout, la déconcentration de la gestion, qui n’est pas intrinsèquement critiquable, étape d’un
processus resté inachevé, a paradoxalement provoqué des lourdeurs de gestion en multipliant
les consultations entre les différents lieux de pouvoirs, sans pour autant apporter la cohérence
nécessaire à l’action de l’Office.
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3.1.1.3. : L’instabilité des dirigeants n’a pas permis de maintenir une
ligne claire quant à la stratégie de l’OPT
La période d’instabilité politique ouverte en 2004 n’a pas permis de prendre les
décisions stratégiques nécessaires à l’adaptation de l’OPT à la nouvelle donne dans les
secteurs où il est présent.
Les lettres de cadrage budgétaire rappellent de manière récurrente, depuis quelques
années, que l’OPT doit reconquérir des revenus perdus et en rechercher de nouveaux et
simultanément éliminer les charges trop élevées qui l’handicapent lourdement. Un séminaire,
tenu fin août 2006, évoquait l’urgence d’un plan de sauvetage et traduisait bien la nécessité de
faire prendre conscience aux dirigeants du groupe et, au-delà, aux personnels, des
perspectives difficiles qui s’annoncent pour l’OPT si des décisions stratégiques adéquates ne
sont pas prises.
Les analyses de la situation, les solutions proposées pour répondre aux questions
essentielles pour l’avenir de l’OPT, n’étaient en rien originales. Elles reprenaient largement ce
qui avait été proposé soit dans les documents stratégiques, soit dans les lettres de cadrage
préparatoires à l’établissement des budgets prévisionnels antérieurs. S’il n’est pas certain que
les orientations stratégiques proposées auraient apporté des solutions à la dégradation des
résultats de l’OPT, force est de constater que la période d’instabilité politique ouverte depuis
2004 n’a pas favorisé la prise de décisions autant urgentes qu’indispensables.
Le changement incessant des instances dirigeantes de l’OPT (président du conseil
d’administration et directeur général), associé au changement de ministre chargé des postes et
télécommunications, ainsi que des membres du conseil d’administration, a placé l’OPT dans
une situation d’attentisme néfaste à sa gestion. Dans ce contexte, des clarifications
nécessaires relatives aux contraintes de service public n’ont pas été effectuées et les décisions
y afférant n’ont pas été prises. La définition de l’intensité du service public attendu n’a pas été
précisée, ce qui implique que l’évaluation du coût des contraintes de service public qui
doivent peser sur l’opérateur public n’a pu être réalisée.
Cela supposerait aussi qu’il soit imposé à l’OPT de tenir et de communiquer les données
d’une comptabilité analytique développée et fiable pour évaluer sincèrement le poids de ces
contraintes et d’une manière générale connaître mieux le coût des services. Leur prise en
charge par le budget de la Polynésie française n’a pas non plus été discutée dans son principe.
Les modes de financement, faisant le cas échéant participer les futurs opérateurs concurrents,
n’ont pu être envisagés. D’autres contreparties, comme l’exonération de l’imposition sur les
bénéfices de l’établissement public, n’ont pu être discutées.
L’immobilisme de la structure n’a pas non plus permis de trancher la question de
l’évolution éventuelle du statut de l’organisme, qui alimente la réflexion depuis quelques
années. Selon la direction de l’OPT, le statut d’établissement public à caractère industriel et
commercial, l’organisation et les règles de fonctionnement qui lui sont inhérents, freineraient
la réactivité de l’organisme face à la concurrence. L’OPT ne disposerait ainsi pas des mêmes
armes que ses concurrents. Il manquerait de souplesse pour réagir notamment en matière de
politique tarifaire, toute modification nécessitant une délibération du conseil d’administration
et un arrêté du conseil des ministres. Par ailleurs, les offres groupées ne seraient pas permises
entre les différentes entités du groupe. C’est pourquoi l’OPT estime que l’évolution vers la
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septembre 2008 - page 83 sur 105
forme d’une entreprise publique serait absolument nécessaire pour assurer la viabilité du
« groupe ». Ces arguments, qui mériteraient d’être discutés, peuvent ne pas être déterminants
pour le choix du statut de l’OPT.
3.1.2.
La restructuration de l’OPT et ses effets sur la gestion de l’Office
La restructuration de l’OPT a d’ores et déjà modifié la répartition des pouvoirs en son
sein et assoupli ses règles de fonctionnement, toutes évolutions qui se sont avérées néfastes à
une bonne gouvernance de l’Office.
3.1.2.1. : Une nouvelle organisation, en l’état, peu performante
La rupture de l’OPT avec le modèle de l’administration monolithique n’a pas fondé les
bases d’un organisme dynamique et performant mais a au contraire atomisé son organisation,
rendant l’Office peu efficace.
3.1.2.1.1. Un processus de restructuration interrompu
L’évolution de l’organisation du « groupe OPT » en pôles et en filiales a connu
plusieurs étapes. De 1996 à 2002, l’Office a modifié à trois reprises son organigramme. En
2002, pour pallier le défaut de responsabilisation et de culture de gestion de l’encadrement en
particulier, l’OPT s’est structuré en pôles devant aboutir à une « société d’économie
territoriale ». Les 8 pôles, bénéficiant d’une forte déconcentration, ont été dotés d’une large
autonomie de gestion. Ils étaient censés préfigurer
autant de futures sociétés, filiales d’une
holding à créer. De ce fait, chacun d’eux regroupait quasiment toutes les fonctions d’une
entreprise : marketing, gestion, production, commercial.
Parallèlement, des métiers, pour certains nouveaux, ont été externalisés : la téléphonie
mobile,
avec la prise de contrôle à 100% de Tikiphone en 1997 ; l’internet avec la création de
Mana la même année ; le secteur informatique, avec la prise de contrôle en 1998 de trois
sociétés (SIGMA, ISIS et SPIN) restructurées en deux ensembles gérés par ISS, en 2000, puis
fusionnés dans ISS, en 2006 ; les télécommunications internationales
avec la prise de
participation majoritaire dans une société créée en 2002 avec France télécom et détenue à
100% par l’OPT depuis 2007 (TNT) ; les services de communication audiovisuelle, en 2006,
avec la société TNS, créée notamment pour des motifs liés au droit de l’audiovisuel.
Le lien entre ces entités dispersées devait être assuré par la présidence du conseil
d’administration de l’OPT, chargée de piloter l’ensemble des activités, qui a disposé
progressivement d’une véritable administration, se superposant aujourd’hui à la direction de
l’OPT « maison-mère » et à celles de chacune des « filiales ».
La 4
ème
étape qui devait parachever cette évolution, n’a jamais été initiée, notamment en
raison des changements fréquents de dirigeants au cours de ces dernières années.
L’établissement devait se transformer une véritable entreprise publique. Les pôles avaient
vocation à devenir des sociétés dans le cadre de cette holding. Le groupe aurait disposé d’une
filiale par grand domaine : les Postes, les Telecom, le Multimédia et la banque postale. Il
n’était pas prévu cependant que le monopole soit remis en cause.
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septembre 2008 - page 84 sur 105
3.1.2.1.2. La création des filiales est irrégulière
L’Office des postes et télécommunications, EPIC territorial, n’a pas la capacité juridique
de participer au capital de sociétés commerciales autres que les sociétés d’économie mixte
(SEM) créées par la Polynésie française.
La loi n° 94-1 du 3 janvier 1994 instituant la société par actions simplifiée (SAS),
applicable en Polynésie française
45
, a réservé aux seuls établissements publics de l’Etat
ayant
une activité industrielle ou commerciale et n’étant pas soumis aux règles de la comptabilité
publique, la possibilité d’être associés d’une société par action simplifiée.
Par ailleurs, la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la
Polynésie française a autorisé en son article 30, la participation de la collectivité d’outre-mer
au capital de sociétés commerciales, pour des motifs d’intérêt général. Aucun article n’ouvre
cette possibilité aux établissements publics de la Polynésie française.
Par conséquent, la prise de participation de l’OPT au sein des sociétés anonymes ou de
sociétés par actions simplifiées ne repose sur aucune base légale. La seule forme juridique que
la loi organique autorise depuis 1996 est la création par la Polynésie française de sociétés
d’économie mixte qui l’associent, elle-même ou ses établissements publics, à une ou plusieurs
personnes privées et éventuellement à d’autres personnes publiques.
Le système mis en place par l’OPT, associant l’établissement public à des « filiales »
spécialisées, ayant la forme de SAS, présente donc une fragilité juridique certaine.
3.1.2.1.3. Les dysfonctionnements
et les lacunes identifiés
Aujourd’hui, l’OPT, dont la mutation des structures reste inachevée, donne à voir une
organisation où les handicaps de la centralisation ne se sont pas réduits, mais au contraire
s’ajoutent à des dysfonctionnements inhérents à la création de
« nouvelles féodalités »
.
La dynamique initiale de la création des pôles avait créé un choc salutaire en
responsabilisant le management intermédiaire, susceptible de sortir l’OPT de sa torpeur dans
le cadre du monopole. Face à la difficulté de trouver de nouveaux services et prestations, cette
dynamique, aujourd’hui contre-productive, s’est muée en concurrence interne, entre les pôles
et entre pôles et filiales, se traduisant par un cloisonnement de la communication, des
stratégies commerciales et des investissements. Cette concurrence en circuit fermé n’a pas
généré l’élargissement du chiffre d’affaires attendu mais l’a déplacé d’une structure à une
autre.
Depuis 2002, l’organisation en pôles laisse apparaître des empiètements flagrants des
pôles de télécommunications entre eux et entre les pôles et les « filiales » MANA et ISS.
D’une manière générale, la coordination de l’action des pôles interdépendants est rendue
difficile et les résultats amoindris lorsque leurs priorités d’action ne sont pas harmonisées.
L’efficacité de l’action de l’OPT est mise en échec lorsque les politiques de mise sur le
marché de produits et services des différentes entités se télescopent et se concurrencent. La
45
Article 7 II de ladite loi et arrêté n° 150 DRCL du 23 février 1994.
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mauvaise coordination des politiques d’investissement ne permet pas de faire les économies
d’échelle auxquelles l’établissement public devrait parvenir. Elle aboutit parfois à faire
acheter en double des matériels identiques ou bien à acquérir des matériels qui ne
communiquent pas entre eux. La création, par délibération du 28 février 2007, d’un comité
des investissements à vocation financière et technique, devrait permettre, s’il fonctionne
efficacement, d’apporter une plus grande cohérence aux achats supérieurs à 20 millions de
F CFP réalisés par les pôles et les « filiales ».
La structuration de l’OPT par modes de communication n’est plus adaptée à la
convergence technologique en ce domaine. Le cloisonnement des pôles et des filiales par
secteur (téléphonie fixe, téléphonie mobile, internet, location de lignes spécialisées, courrier
par voie postale) ne peut aboutir qu’à des solutions peu novatrices et en décalage avec la
demande des usagers qui souhaitent une réponse globale à leurs besoins, lesquels d’ailleurs
sont différents selon la segmentation de la clientèle.
L’organigramme de l’OPT ne mentionne pas de direction juridique mais seulement une
cellule juridique au niveau de la direction générale. Dans un organisme de cette importance, la
fonction de directeur juridique, en particulier lorsqu’elle intervient sur des dossiers relevant de
la présidence, aurait dû être strictement séparée de celle de directeur spécial du président du
conseil d'administration, qui, par défaut, l’exerçait de fait. Cette dernière fonction, quel qu’en
soit le titulaire et quelles que soient ses qualités, ne peut avoir compétence pour régler les
questions juridiquement complexes dans des domaines aussi variés que ceux soumis à la
présidence du conseil d’administration de l’OPT. Une direction juridique aurait apporté une
plus grande sécurité et permis d’éviter certaines décisions irrégulières ou inadaptées qui ont
été prises.
L’Office ne dispose pas non plus en son sein d’une entité assurant le contrôle de
gestion. La mission d’audit et de contrôle, qui figure dans l’organigramme de la direction
générale, n’est chargée que de missions annuelles de contrôle des receveurs dans les agences
postales. Un tel manque dans un organisme de cette importance, au même titre que l’absence
de direction des ressources humaines, est totalement inexplicable.
3.1.2.1.4. La complexification du pilotage
L’organisation en pôles s’est accompagnée, dans l’esprit de responsabilisation des
dirigeants, de la délégation de gestion de plusieurs fonctions. Les fonctions marketing,
commercial, production mais aussi gestion (budget/finances, ressources humaines, logistique
et informatique) ont été déconcentrées pour apporter réactivité et souplesse.
Ces différentes fonctions sont aussi suivies au niveau de la direction générale. Mais pour
donner de la cohérence à l’ensemble « maison-mère - filiales » et couper court aux
inquiétudes sur une éventuelle concurrence entre les pôles et les filiales,
le promoteur de ce
nouveau mode d’organisation a créé un échelon d’administration auprès de la
présidence du
conseil d’administration. Cette fonction, censée avoir une vision globale de l’entreprise, est
dotée de pouvoirs décisionnaires importants.
Cette architecture nouvelle a
paradoxalement complexifié la gestion au sein de l’OPT.
De nombreuses fonctions de conseiller au niveau de la direction générale (ressources
humaines, budget, communication, …) trouvent leur équivalent au niveau de la présidence du
conseil d’administration. Dès lors, de nombreux chevauchements ont été recensés et une
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confusion des rôles des différents niveaux d’administration n’a pas manqué de se faire jour.
Pour pallier l’allongement des délais de prise de décision, des circuits parallèles au
cheminement hiérarchique se sont mis en place au gré des affinités. Les conseillers du
président du conseil d’administration, lequel a autorité sur les cadres de la direction générale
qu’il a nommés, n’hésitent pas à solliciter directement les chefs de pôles ou leurs adjoints.
Ces derniers doivent alors évoquer à nouveau le dossier avec la direction générale, ce qui
occasionne un surcroît de travail.
La création des filiales a aussi contribué à renforcer la lourdeur de gestion. En dépit de
l’autonomie laissée aux filiales pour la gestion opérationnelle, l’OPT a multiplié les
conventions de gestion portant sur de nombreux domaines (bâtiments, installations
techniques, réseaux, personnel, gestion administrative, …). Le suivi de ces conventions est
coûteux en temps, en personnel et financièrement. Ces conventions, systématiquement à
l’avantage de l’OPT, occasionnent souvent des différends.
La cohérence du « groupe OPT » n’est pas pour autant assurée par ce pilotage complexe.
Le système de facturation, qui devait enfin devenir compatible entre les différentes entités
début 2007, ne l’est toujours pas. Cela se traduit in fine par un coût supplémentaire pour
l’usager à qui on ne peut encore proposer de packages de communication. Contraintes alors de
proposer séparément des produits sur des domaines qui se recouvrent, les entités de l’OPT
n’éclairent pas l’usager dans son choix et se concurrencent directement.
3.1.2.1.5. Une organisation des échelons d’administration coûteuse et peu
performante
L’organisation retenue génère une inflation de conseillers, dont l’utilité est sujette à
caution, et qui alourdit les charges financières de l’établissement public.
Les deux niveaux d’administration que sont la direction générale et la présidence du
conseil d’administration sont relativement étoffés. Le cadre d’emploi de l’échelon de la
présidence du conseil d’administration est d’ailleurs généreusement dépassé : huit personnes
supplémentaires y sont affectées
dont 6 en surnombre et 2 sur des emplois gagés.
A la lecture de l’organigramme, des doublons apparaissent dans les libellés des
fonctions qui tendent à montrer que cette organisation est peu rationnelle. Elle permet
cependant des reclassements de personnalités politiques, parmi lesquelles des anciens
ministres, ou d’anciens dirigeants d’établissements publics ou de SEM, voire de recruter des
agents présentant une homonymie avec des responsables politiques qui ont été membres de
gouvernements sur la période examinée. Or, ces emplois supplémentaires ne correspondant
pas toujours à des activités indispensables à l'activité de l'OPT.
Certaines fonctions sont définies avec difficulté au niveau de la direction générale. La
directrice générale n’a d’ailleurs pas choisi ses conseillers. Ils avaient été placés à ces postes
préalablement à son arrivée. Cela explique pourquoi, lors de sa prise de fonctions, il y a plus
de deux ans, elle était dans l’impossibilité de définir avec précision le périmètre de la fonction
de plusieurs des conseillers : conseiller marketing, conseiller communication et juridique alors
qu’une prestation de service existait simultanément. Depuis, elle a cependant organisé une
cellule juridique à son niveau de responsabilité.
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3.1.2.2. : La concentration des pouvoirs entre les mains du président
du conseil d’administration n’était pas sans risques pour la
bonne gouvernance de l’Office
La perspective de l’ouverture à la concurrence et l’externalisation de certaines activités a
permis une concentration des pouvoirs au niveau du président du conseil d’administration qui
a placé progressivement l’Office hors du contrôle de la Polynésie française.
3.1.2.2.1. La perspective de l’ouverture à la concurrence et l’externalisation
de certaines activités ont motivé l’évolution du rôle du président
du conseil d’administration
L’ouverture à la concurrence, rendue possible par l’édiction des livres II et III du code
des postes et télécommunications, le 12 juin 2003, a eu pour conséquence de mettre fin à la
nomination de droit du ministre de tutelle à la présidence du conseil d’administration de
l’OPT. Le lien direct qui prévalait entre la collectivité de la Polynésie française et son
opérateur public a été distendu par la nomination, décidée par le président de la Polynésie
française, d’une personne qualifiée pour occuper la fonction de président du conseil
d’administration de l’Office.
En outre, à la suite de l’externalisation dans des filiales de certaines activités et de la
modification de leur mode de gouvernance issue du changement de statut, il a semblé
nécessaire que le président du conseil d’administration ait un rôle opérationnel dans
l’ensemble du « groupe » OPT. Incarnant déjà la présidence des sociétés « filiales », un
pouvoir équivalent au sein de l’OPT semblait devoir lui être confié. L’élargissement de ses
pouvoirs s’est fait au détriment de ceux de la direction générale et du conseil d’administration
ou de ses membres.
3.1.2.2.2. L’affaiblissement
de
la
direction
générale
et
du
conseil
d’administration ont permis la concentration du pouvoir entre les
mains du président du conseil d’administration et de ses
conseillers
3.1.2.2.2.1. L’affaiblissement de la direction générale au profit des chefs de
pôles mais surtout du président du conseil d’administration
La limitation des pouvoirs dévolus à la direction générale s’est faite au profit des chefs
de pôle et du président du conseil d’administration. Ces transferts ont ainsi réduit son rôle à la
coordination et à l’animation dans les domaines transférés.
Les chefs de pôle ont bénéficié de nombreuses délégations dans le cadre de la
restructuration de l’Office. Les pouvoirs leur sont délégués pour le fonctionnement général du
pôle et pour la gestion du personnel. Ils peuvent ainsi diriger toutes les entités du pôle,
représenter l’OPT dans leur secteur, assurer les relations clientèle et fournisseurs. En matière
de personnel, ils disposent de tous les moyens nécessaires pour assurer la gestion courante et
organiser le comblement des besoins en personnel par appel à mobilité. Les chefs de pôles
reçoivent aussi délégation de signature en matière de gestion du personnel, de budget,
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Séance du 1
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comptabilité ou de fonctionnement général du pôle. A ce titre, ils peuvent même ester en
justice.
La direction générale a surtout perdu de nombreux pouvoirs au profit du président du
conseil d’administration. L’arrêté n° 1057 CM du 21 octobre 1994, modifié, conférait au
président du conseil d’administration (PCA) les pouvoirs classiques de convoquer le conseil
d’administration, de garantir son fonctionnement régulier, d’authentifier ses procès-verbaux et
de contrôler l’exécution des décisions ainsi que de signer quelques actes ou de nommer à
quelques rares emplois supérieurs, lorsque le directeur général, par exception, n’en avait pas
reçu délégation. Aux termes de cet arrêté, le directeur général disposait d’une compétence
générale : régler l’organisation et les modalités de fonctionnement de l’organisme dont il avait
la charge et qui ne sont pas réservées au conseil d’administration.
L’arrêté n° 1731 CM du 19 novembre 2003, qui fixe les nouvelles règles de
fonctionnement de l’Office, a inversé l’importance des pouvoirs dévolus à l’une et à l’autre
des deux fonctions. Les pouvoirs propres du PCA ont été substantiellement étendus. Il
exécute ou fait exécuter, sous son contrôle, les décisions du conseil d’administration. Il
approuve les projets d’organisation de l’Office. Il a la haute main sur le personnel, notamment
les cadres dirigeants, y compris sur le directeur général, hormis sa nomination et sa
révocation. Il peut passer les marchés, hors décision du CA, dans le cadre d’une fourchette
dont la borne supérieure est fixée à 100 MF CFP. En matière de mécénat, de dons et d’offres
promotionnelles, il agit certes dans le cadre fixé par le CA, mais sans rendre compte, sauf en
matière de tarification et de services. Par ailleurs, le secrétariat du conseil d’administration,
assuré jusqu’alors par la direction générale, a été confié en 2003 à la présidence de l’O.P.T.
En matière budgétaire et comptable, le rôle du PCA est affirmé au détriment du
directeur général et du comptable. L’élaboration du budget de l’OPT relève du président du
conseil d’administration. L’exécution du budget est effectuée par le président du conseil
d’administration qui peut déléguer sa signature à ses collaborateurs directs, le directeur
général recevant seulement délégation de pouvoirs pour exécuter le budget relevant de son
autorité. Les paiements de toute nature sont de la responsabilité du président du conseil
d’administration.
En corollaire, la compétence générale du directeur général disparaît. L’énoncé de ses
attributions propres, dans l’arrêté n° 1731 CM, est précédé, de la formule
« hors les pouvoirs
du conseil d’administration et ceux propres de son président, …. ».
Ensuite, il n’exerce que
« … les attributions qui lui sont déléguées spécialement par le conseil d’administration ou
par son président ».
Son autorité qui portait sur tout le personnel, en application des textes
régissant les différentes catégories de personnel, est réduite, car lui est retiré le personnel
rattaché directement au président du conseil d’administration. En outre, alors qu’il nommait à
tous les emplois autres que ceux d’agent comptable, de secrétaire général et de directeur,
sa
compétence est limitée aux emplois autres que ceux de cadres dirigeants dont la définition est
étendue. La gestion budgétaire, financière et comptable, qui relevait de sa compétence, lui
échappe désormais, sauf la préparation du budget prévisionnel relatif aux entités placées sous
son autorité.
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septembre 2008 - page 89 sur 105
3.1.2.2.2.2. La marginalisation du conseil d’administration au profit de son
président
Le lien tutélaire entre l’OPT et le gouvernement apparaît assuré par la participation
majoritaire de ce dernier au conseil d’administration de l’OPT, composé de 7 membres (avant
2003) puis de 8 (2005) et enfin de 9 membres (2006). Le ministre chargé des postes et
télécommunications, antérieurement président, est devenu vice-président de droit depuis
2003. Malgré sa surreprésentation, qui ne paraît pourtant plus devoir s’imposer puisqu’il
dispose d’autres leviers pour faire connaître ses orientations stratégiques à l’Office, le
gouvernement n’a pas joué à travers le conseil d’administration, son rôle d’orientation et de
contrôle de l’opérateur public.
En effet, les règles de fonctionnement du conseil d’administration ne permettent pas aux
administrateurs d’exercer pleinement leur mission. Ne disposant pas d’avis d’une commission
technique consultative, pourtant prévue par l’arrêté fixant les règles de fonctionnement de
l’OPT, les administrateurs ne sont pas en mesure d’avoir un avis éclairé mettant en lumière
les enjeux des questions importantes soumises au conseil d’administration. Certes, selon deux
anciens présidents du conseil d’administration, des décisions ont pu être différées dans
l’attente d’informations complémentaires. Cependant, des dysfonctionnements multiples du
conseil d’administration ont été relevés : convocation tardive, remise des rapports hors délais
voire même en séance, présentation des rapports orientée voire incomplète, recours à la
procédure d’urgence avec consultation par correspondance sans réunir le conseil. Ces
anomalies ont parfois conduit à prendre des décisions litigieuses.
Mais au-delà des règles de fonctionnement, ce sont les pouvoirs du conseil
d’administration qui se sont considérablement réduits au profit de son président. En matière
financière ou de contrats, la compétence du conseil d’administration est relativisée. Si ce
dernier décide du cadre général de l’exercice de la compétence, le président, dès qu’il est
habilité ou autorisé, peut alors agir à sa guise sans même avoir à rendre compte. Tel fût le cas,
par exemple, pour le placement financier MARARA 3 où le président a pu agir sans aucun
contrôle du conseil d’administration de l’OPT. Il en est allé de même pour la fixation du
montant des reversements de la rémunération en provenance des filiales qu’il s’est accordée.
En définitive, le président du conseil d’administration jouit d’une grande latitude pour exercer
ses pouvoirs et la mission de contrôle que devrait assumer le conseil d'administration est de
plus en plus difficile à assurer
.
3.1.2.2.2.3. La concentration du pouvoir entre les mains du président du
conseil d’administration, sous l’influence déterminante de ses
conseillers, présente des risques pour l’organisme
La concentration des pouvoirs opérationnels entre les mains du président du conseil
d’administration, qui préside aussi l’instance décisionnaire de l’organisme, s’affranchit du
recul nécessaire que permet habituellement la séparation des pouvoirs d’une part du directeur
général qui propose et exécute dans le cadre des autorisations et sous le contrôle d’un conseil
d’administration dont il n’est pas membre, et d’autre part, du président du conseil
d’administration qui veille au bon fonctionnement de l’organe délibérant tout en disposant de
quelques pouvoirs propres assignés à sa fonction.
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C’est dans ce contexte que, depuis le transfert des principaux pouvoirs à la présidence
du conseil d’administration, l’instabilité chronique des dirigeants de l’OPT, a permis aux
conseillers de la présidence, d’acquérir insensiblement, grâce à leur permanence, une
influence déterminante dans la direction opérationnelle de l’Office. Quel qu’ait été le
fonctionnement des binômes constitués du président du conseil d’administration et du
ministre de tutelle, cette influence n’a jamais été démentie, mais au contraire s’est renforcée
au fil du temps.
Des investissements pour une « filiale » ont ainsi été « arbitrés » entre le président du
conseil d’administration et ses conseillers. Des rémunérations opaques ont été justifiées
techniquement et juridiquement par les conseillers. Ils ont aussi oeuvré en faveur de
l’allègement des règles de fonctionnement de l’Office, analysées comme des contraintes, au
risque de lever les sécurités permettant d’éviter la tentation de prendre des actes de gestion
irréguliers.
Cette évolution, résultant des choix de gouvernance faits à la fin de l’année 2003,
présente des risques substantiels pour l’organisme.
Ce mode de management, mis en oeuvre à la présidence du conseil d’administration, ne
laisse plus de place à la réflexion collégiale préalable à la décision, contribue au
cloisonnement de l’organisme, limite les synergies et freine la circulation de l’information.
En conclusion, la Chambre observe que l’évolution des pouvoirs en faveur du président
du conseil d’administration a progressivement fait perdre à la collectivité de la Polynésie
française le contrôle qu’elle devait exercer sur son opérateur public et a fortiori sur ses entités
dépendantes.
3.1.2.3. : Les
risques
avérés
de
l’allègement
progressif
des
contraintes budgétaires et financières
Le non respect des règles de fonctionnement, dont certaines ont été allégées dans
l’espoir de doter l’EPIC des armes nécessaires pour affronter la concurrence, a fragilisé sa
sécurité juridique.
3.1.2.3.1. Des carences comptables aggravées par la modification des
règles budgétaires et financières
La modification des règles de gestion budgétaire, financière et comptable, entrée en
vigueur le 1
er
janvier 2005, a fragilisé l’organisation comptable défaillante qui donne lieu à un
constat alarmant.
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3.1.2.3.1.1. La modification des règles de gestion budgétaire, financière et
comptable de l’OPT à compter de 2005.
Avant le 1er janvier 2005, l’OPT tenait sa comptabilité selon les règles de la
comptabilité publique, conformément à la délibération n° 95-205 AT du 25 novembre 1995
modifiée (dans sa rédaction antérieure au 19 février 2004) qui fixe la réglementation
budgétaire, comptable et financière de la Polynésie française et de ses établissements publics.
Aux termes de la réglementation alors en vigueur
46
, l’agent comptable de l’Office a été
nommé en 2000 par le conseil des ministres, sur proposition du conseil d’administration de
cet établissement et après avis du trésorier-payeur général (cette dernière formalité a disparu à
compter du 19 novembre 2003). Avant son installation, l’agent comptable avait prêté serment
devant la chambre territoriale des comptes de la Polynésie française qui devait juger ses
comptes
,
conformément à la loi organique.
Il est rappelé que le compte financier de l’agent comptable d'un établissement public
réunit le bilan, le compte de résultats, le détail des opérations de l’année, les états annexes et
tous autres documents justificatifs. Il est visé par le directeur ou le directeur général puis par
le président du conseil d’administration qui en certifie la conformité avec ses écritures. Il est
délibéré par le conseil d’administration, transmis au conseil des ministres et soumis à
l’approbation de l’assemblée de la Polynésie française avant d’être produit au juge des
comptes. Cette dernière formalité a été accomplie jusqu’à l’exercice 2004 compris pour
l'OPT.
La tenue de la comptabilité selon les règles de la comptabilité publique garantit le bon
usage des fonds publics à la condition, d’une part, que l’ordonnateur respecte les règles de
nomination des agents habilités à manier les deniers publics et qu’avec l’agrément du
comptable, il organise correctement la fonction comptable et, d’autre part, que le comptable
procède aux contrôles en matière de recettes et de dépenses, inhérents à sa fonction ainsi
qu’aux contrôles fréquents des agents placés sous son autorité dans le cadre de sa
responsabilité personnelle et pécuniaire. L’ensemble du dispositif est placé sous le contrôle de
la juridiction financière qui est tenue de juger les comptes, en mettant en jeu, le cas échéant, la
responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public.
Ces principes ont été perdus de vue à l'OPT, ou n’ont tout simplement pas été respectés,
en raison d’un laxisme généralisé au sein de l’Office. Mais plutôt que de reprendre en main
l’organisation de la fonction comptable, de rappeler les procédures et de nommer des
personnels compétents, l’Office, avec l’accord de la collectivité d'outre-mer, a choisi, sans
corriger les graves dysfonctionnements qu’il pouvait constater, d’assouplir, selon sa
propre
expression, ses règles de gestion budgétaire, financière et comptable.
Le nouveau cadre réglementaire, issu de la délibération n° 2004-39 APF du 19 février
2004, modifiant l’article D.311-3 du code des postes et télécommunications, dispose que
l’Office des postes et télécommunications est soumis à la réglementation comptable
applicable aux sociétés commerciales. La délibération du conseil d’administration de l’Office
des postes et télécommunications approuvant le compte d’exploitation prévisionnel et le
programme d’investissement est transmise, avec lesdits documents, au conseil des ministres
pour être rendue exécutoire. Une délibération du conseil d’administration de l’Office des
postes et télécommunications arrête les comptes annuels et le rapport de gestion. Ces
documents sont soumis à l’approbation de l’assemblée de la Polynésie française.
46
Arrêté n°1057/CM du 21 octobre 1994.
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Dans le prolongement de cette délibération, l’arrêté n° 183/CM du 31 janvier 2005,
modifiant l’arrêté n° 1731/CM du 19 novembre 2003, relatif à l'organisation et aux règles de
fonctionnement de l’Office, prévoit que les paiements de toute nature sont de la responsabilité
du président du conseil d'administration, même s’il peut déléguer ses pouvoirs.
Dans ce cadre, le chef comptable, qui n’est plus considéré par l’Office comme
comptable public
47
, est nommé par le président de l’OPT, comme tous les autres cadres
dirigeants. Les paiements sont effectués par le président du conseil d’administration ou par
ses délégataires, sans contrôle du chef comptable.
L’adoption des règles comptables applicables aux sociétés commerciales devait
entraîner la certification des comptes de l’Office des postes et télécommunications par des
commissaires aux comptes.
La chambre relève que le comptable de l’établissement public a cessé de produire ses
comptes annuels à la juridiction financière à partir de l’exercice 2005. Pour autant, la
nomination de deux commissaires aux comptes n’est intervenue que le 4 décembre 2006.
Cette nomination tardive était la conséquence de l’ambigüité même des décisions prises par
l’OPT sur la modification de son régime comptable et le signe de leur inadaptation aux textes
régissant les établissements publics de la Polynésie française. En effet, la délibération du
conseil d’administration n°56-2004 du 21 décembre 2004, qui prévoyait de faire nommer ces
commissaires aux comptes par le conseil des ministres, a été rejetée par le commissaire du
gouvernement auprès de l’Office, celui-ci ayant invoqué l’incompétence juridique du conseil
des ministres à nommer des commissaires aux comptes dans un EPIC territorial, dès lors que
l’article 93 de la loi organique ne le prévoyait pas. Ce n’est que par délibération n°2006-39
APF du 7 juillet 2006, modifiant l’article D. 311-3 du code des postes et télécommunications,
que l’assemblée de la Polynésie française devait autoriser l’OPT à désigner lui-même ses
commissaires aux comptes. Alors que les EPIC nationaux voient leurs commissaires aux
comptes nommés par leur autorité de tutelle, l’OPT, établissement territorial, s’est donc fait
confier par l’assemblée de la Polynésie française le pouvoir de désigner lui-même ses
commissaires aux comptes.
Il résulte de ces tergiversations que, compte tenu de leur nomination tardive, les
commissaires aux comptes de l’OPT n’ont pas certifié légalement les comptes 2005. Par
ailleurs, n’ayant pas commencé leur mission avant le premier semestre 2007, il leur sera
difficile, compte tenu de l’état de la comptabilité de l’OPT, de certifier ceux de l’exercice
2006. Ainsi, ayant échappé à tout contrôle sur leur fiabilité et leur sincérité, les comptes de
l’OPT risquent donc de ne pas être certifiés pour l’exercice 2006. Enfin, la Chambre a pu
constater que les comptes 2005 n’ont été approuvés par l’assemblée de la Polynésie française
que le 14 mai 2008, en l’absence de certification, et que ceux de 2006 et de 2007 n’étaient
toujours pas approuvés au mois d’août 2008.
La motivation annoncée par l’Office, pour faire modifier par l’assemblée de la Polynésie
française les dispositions réglementaires selon lesquelles il devait tenir sa comptabilité en
application des règles des sociétés commerciales, reposait sur le souhait de disposer d’un
cadre moins contraignant, qui offrirait une certaine liberté d’action à ses dirigeants.
L’établissement jouirait ainsi de plus de souplesse et de transparence.
47
Délibération n° 55-2004 du CA de l’OPT du 21 décembre 2004 : «
création de la fonction de chef comptable, qui relève du statut de chef
de service et dont le titulaire est nommé par le Président
».
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Séance du 1
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L’Office affirmait aussi que le système de la comptabilité publique, basé sur la
séparation de l’ordonnateur et du comptable, qu’il souhaitait abandonner, était consommateur
en personnel puisqu’il doublait les fonctions et ne lui permettait pas la maîtrise des
comptabilités générale et analytique devant permettre de s’inscrire dans une optique de
contrôle de gestion. L’Office regrettait aussi que le comptable ne dépende pas de ses instances
hiérarchiques et qu’il ne produise ses comptes que tardivement, en fonction de ses propres
contraintes.
La chambre s’étonne de la teneur de l’argumentaire ainsi énoncé. Rien dans la gestion
de l’OPT depuis le 1
er
janvier 2005, date d’entrée en vigueur du nouveau système de tenue de
la comptabilité, ne vient concrétiser les apports bénéfiques attendus par l’Office. Aucune
économie en personnel n’a été réalisée, bien au contraire. Le contrôle de gestion est inexistant
et constitue un manque dénoncé par la chambre. La comptabilité analytique, possible dans les
deux systèmes comptables, est toujours dans un état embryonnaire. Les comptes de l’année
2006 n’ont toujours pas été approuvés par l’assemblée de la Polynésie française. Il n’aura en
outre échappé à personne que la transparence invoquée est encore aujourd’hui attendue.
Seuls deux résultats ont été atteints. Le comptable est aujourd’hui hiérarchiquement
dépendant. Il ne dispose donc plus des moyens de résister à l’ordre de procéder à certaines
dépenses litigieuses des dirigeants. La souplesse recherchée paraît ainsi atteinte.
Mais un argument supplémentaire avancé par l’Office en 2003 ne laisse pas d’interroger
quant aux réelles motivations de ses dirigeants. Un rapport de présentation
48
au conseil
d’administration du 17 juillet 2003, relatif au régime comptable de l'Office des postes et
télécommunications, mentionne on ne peut plus clairement la préoccupation de ses
dirigeants :
« …La transformation proposée aurait aussi pour conséquence notable la fin de
l'intervention de la Chambre territoriale des comptes en tant que juge des comptes de l'OPT
et en tant que vérificateur des comptes des sociétés filiales de l'OPT (Tikiphone, Mana, ISS,
TNT) ».
Si cette affirmation est erronée, puisque seul le jugement des comptes de l’Office est
concerné, l’examen de la gestion de l’OPT et de ses filiales n’étant en aucun cas affecté par
une modification des règles comptables de l’Office, elle n’en laisse pas moins transparaître la
volonté clairement affirmée de s’affranchir du contrôle de la Chambre territoriale des
comptes.
3.1.2.3.1.2. L’organisation comptable défaillante de l’OPT fait apparaître
des constats alarmants quant à la fiabilité des recettes
encaissées
La modification des règles de gestion budgétaire, financière et comptable n’a fait
qu’aggraver une situation qui était alarmante depuis de nombreuses années.
Conformément aux lois organiques en vigueur au cours de la période sous revue, la
réglementation budgétaire, comptable et financière de la Polynésie française et de ses
établissements publics était déterminée par la délibération n° 95-205 AT du 25 novembre
1995 modifiée. Cette délibération s’applique à tous les établissements publics territoriaux. A
48
N° 2003-26/OPT.
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er
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compter du 19 février 2004
49
, elle s’applique à tous les établissements publics de la Polynésie
française, sauf dispositions contraires prévues, pour les établissements publics à caractère
industriel et commercial, dans leur acte constitutif.
Dans le cadre de la délibération n°95-205 AT qui reprend les principes généraux de la
comptabilité publique, la comptabilisation des opérations s’effectue selon la nomenclature et
les règles de fonctionnement des comptes prévues par les instructions comptables
correspondant à l’objet et à la catégorie d’établissement public. Les comptes de l’OPT sont
présentés conformément aux dispositions du plan comptable 1982, promulgué en Polynésie
française par arrêté du 14 janvier 1985, appliqué sans dérogation significative et par référence
à l'instruction M9-5 de la direction de la comptabilité publique applicable aux EPIC.
Le principe de séparation de l'ordonnateur et de l'agent comptable qui confie à
l’ordonnateur, en matière de recettes, la constatation des droits et la liquidation de la recette,
et au comptable, la prise en charge, le recouvrement et l'encaissement effectif, ne peut être
remis en cause par l'utilisation d'outils informatique de gestion financière et comptable. De
même, la désignation de l’agent comptable comme chef des services financiers ne doit pas
porter une atteinte au principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable.
Aux termes de la délibération n°95-205 AT, l'agent comptable est le seul chargé de la
prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes émis par l'ordonnateur. La prise en
charge de la recette par l'agent comptable constitue le point de départ de sa responsabilité
personnelle et pécuniaire dans le recouvrement de la créance.
Des personnes, autres que l'agent comptable, qui a seul la qualité de comptable public,
auraient dû être habilitées à recouvrer les recettes de l'établissement. Son organisation interne
aurait pu conduire à l'installation d'un agent comptable secondaire, à utiliser le concours de
régisseurs, de caissiers, tous nommés avec l'agrément de l'agent comptable principal. Ce
dernier aurait pu, sous sa responsabilité, se faire suppléer par un ou plusieurs mandataires
agréés par l’ordonnateur, soit à titre permanent, lorsque l’importance du service le justifiait,
soit à titre temporaire pour cause d’absence ou de congé. L’agent comptable de l’Office,
M. DELANNE, avait d’ailleurs réclamé en 2000 «
la reconnaissance formelle de la qualité de
régisseur de dépenses et de recettes aux receveurs… ».
Cette demande n’a pas été suivie
d’effets.
Or, il apparaît qu’à l’OPT, en contravention avec la délibération n° 95-205 AT et les
dispositions de l'instruction codificatrice M.9.5 relatives aux établissements publics à
caractère industriel et commercial, les agents, receveurs, caissiers, qui manipulent les deniers
publics n’ont jamais obtenu l’agrément du comptable de l’établissement public. Si des
décisions de nomination ont pu être produites, elles ne mentionnent jamais l’agrément de
l’agent comptable. Celui-ci n’a jamais été requis préalablement à la nomination des différents
responsables d’agences ou des quatre responsables de centres comptables. En
outre, les
décisions de nomination de ces agents ne précisent pas les opérations, normalement réservées
à l'agent comptable, qui leur sont "autorisées" et pour lesquelles ils sont personnellement et
pécuniairement responsables.
Mais au-delà, les personnels concernés n’ont pas été recrutés au niveau de qualification
que nécessitent ces postes. L'éloignement et la dispersion des îles accueillant des bureaux de
postes, n’ont fait qu'accentuer cette insuffisance. Les embauches locales de receveurs et de
49
Art. 52 de la délibération n° 95-205 AT modifiée par la délibération n° 2004 – 38 APF du 19 février 2004.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 95 sur 105
guichetiers n’ont pas été accompagnées de la formation à l'application de gestion comptable
des agences, en particulier dans celles nouvellement informatisées. M. DELANNE reconnaît
cette large insuffisance mais indique que des modules de formation comptable sont en cours
de préparation. Seule, une assistance téléphonique ponctuelle est assurée par la cellule de
vérification des comptabilités des receveurs (VCR). A l’inverse, si l'agence est confrontée à
une panne, les personnels habitués à travailler sur informatique ignorent le fonctionnement
manuel de la tenue de leur comptabilité.
Les procédures sont également défaillantes. Le manuel d'enseignement professionnel
des receveurs, qui sert de guide de procédures dans les agences, date de 1982 et est
notoirement incomplet, même si M. DELANNE indique que des mises à jour ont été faites.
Chaque receveur met en place un système et des procédures "adaptées" à son agence, lorsque
que le guide de procédures est muet. Il en résulte que lors de la mise en place des mandats
IFS
50
et en l'absence de procédure de contrôle interne, 19,8 MF CFP ont été payé à tort en
2003. De même, la commercialisation des modems ADSL n'a pas été accompagnée d'une
diffusion des procédures d'enregistrement des ventes et sorties de stock. La gestion des stocks
est de manière générale peu fiable. Les opérations relatives à la philatélie et le traitement des
stocks défectueux des timbres fiscaux vendus par l’OPT n’est pas correctement assuré.
L'Office n'a cependant pas profité de l’évolution du système informatique pour redéfinir les
procédures dans les agences afin de prendre en compte des nouveaux produits et harmoniser
les pratiques.
Le comptable de l’OPT ne contrôle que faiblement les agents maniant les fonds publics
dans les 78 agences
51
ou centres de l’Office. En 2006, la cellule de vérification des
comptabilités des receveurs a effectué 13 missions. Le contrôle à partir des déclarations
mensuelles des receveurs, complétés de diverses pièces justificatives, ne permet en aucun cas
de vérifier l'encaisse réelle de chaque agence. L'arrêt quotidien des comptes des sous-caisses
et l'arrêt mensuel des comptes de l'agence, ne sont pas complétés d'un contrôle de l'encaisse
réelle, pas même au 31 décembre de chaque année. Il n'y a pas d'arrêt des comptes particuliers
au terme de l'exercice comptable. M. DELANNE confirme qu’il
« est effectivement
impossible au service comptable de vérifier les stocks et les encaisses réelles des agences ».
Les distributeurs automatiques de billets (DAB) ont souffert aussi d’une absence totale de
contrôle jusqu’à la mise en oeuvre d’une nouvelle procédure en 2006 dont le respect a été,
selon le comptable, rappelé au cours de l’année 2007 et aurait permis d’apurer la majeure
partie des dysfonctionnements constatés. Lorsque des erreurs de caisse ou des manquants en
caisse sont constatés, bon nombre de receveurs ne régularisent pas leur situation.
Etrangement, l’Office ne les y contraint pas. Le renforcement des personnels affectés au
contrôle interne est donc absolument indispensable pour fiabiliser le système comptable de
l’Office.
Les moyens mis en oeuvre pour assurer le fonctionnement comptable de l’OPT sont
insuffisants. Le système d’information est obsolète. Le développement de l’application
ARCHIPEL a atteint ses limites techniques alors que son remplacement par une application
plus adaptée à un suivi en réseau de la comptabilité des agences tarde à se mettre en place.
L'informatisation des bureaux est réalisée parfois sans précaution, occasionnant la perte des
données et une rupture dans l’enchaînement des comptes. Depuis les investigations de la
Chambre en 2007, le service comptable, selon M. DELANNE, se déplace systématiquement
lors de chaque informatisation d’une agence. Selon lui, les données perdues lors d’incidents
survenus dans le passé
auraient été reconstituées.
50
International Financial System, instauré en remplacement du mandat télégraphique, mandat hors Polynésie, vers France et DOM TOM.
51
Ce nombre augmente chaque année.
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er
septembre 2008 - page 96 sur 105
Il résulte de ces dysfonctionnements du système comptable des manquants en caisse
dont le montant global cumulé identifié s’élève, à la fin de l’exercice 2005, à
71 158 495 F CFP. Il est probable que le recouvrement des recettes à l’OPT accuse une
déperdition beaucoup plus importante.
3.1.2.3.2. L’assouplissement de la réglementation applicable en matière de
commande publique
Jusqu’au milieu de l’année 2003, l’arrêté n° 1057 CM du 21 octobre 1994 disposait en
son article
4-5 que les marchés passés par l’OPT seraient soumis aux clauses et conditions
générales des marchés publics passés au nom du Territoire, prévues dans le code des marchés
publics de la Polynésie française. Cette réglementation était consacrée par l’article D.311-3 du
code des postes et des télécommunications, lequel disposait que les dispositions du code des
marchés publics du Territoire lui étaient applicables
.
Une dérogation autorisait cependant le
conseil d’administration à apporter les modifications qu’il jugeait indispensable d’introduire
en fonction des contingences particulières à l’Office
52
.
Sur la base de motivations contestables, parmi lesquelles l’évolution de l’Office dans un
monde concurrentiel, le besoin de réactivité, l’obligation de mise en concurrence mondiale
qui défavoriserait
les entreprises de Polynésie française, l’OPT a obtenu de l’Assemblée que
le code des marchés publics ne lui soit plus applicable.
L’article D.311-5 du code des postes et télécommunications, créé par la délibération
n° 2004-39 du 19 février 2004
et se substituant à l’ancien article D. 311-3, dispose que les
marchés passés par l’Office des postes et télécommunications sont des contrats conclus à titre
onéreux pour répondre à ses besoins en matière de prestations (travaux, fournitures ou
services). Ces contrats doivent respecter les principes d’égalité de traitement des candidats et
de transparence des procédures. L’efficacité de la commande et la bonne utilisation des
budgets alloués en ce domaine seront assurées par la définition préalable des besoins, la mise
en concurrence, ainsi que par le choix de l’offre économiquement la plus avantageuse compte
tenu de la qualité des prestations proposées.
L’arrêté n° 1731 CM du 19 novembre 2003 relatif à l’organisation et aux règles de
fonctionnement de l’OPT, modifié par
l’arrêté n° 796 CM du 5 mai 2004 (art. 4) dispose que
les règles d’application de l’article D. 311-5 du code des postes et télécommunications en
matière de contrats de prestations de travaux, fournitures ou services passés par l’O.P.T. sont
celles définies dans une annexe qui n’est autre que le guide des procédures de passation des
marchés applicable à l'Office des postes et télécommunications.
Une ultime modification de ces dispositions, par arrêté n° 183 CM du 31 janvier 2005,
parachève l’assouplissement de la réglementation en autorisant le conseil d’administration à
fixer par délibération, dans le respect des principes généraux
de l’article D.311-5 du code des
postes et télécommunications, les règles d’application éventuellement nécessaires en matière
de passation de contrats.
52
2
ème
alinéa de l’article 4-5 de l’arrêté n° 1057 CM.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 97 sur 105
Le conseil d’administration de l’OPT peut donc à tout moment, voire même au cas par
cas, décider de la règle applicable à la passation des marchés de l’Office. Dès lors que
l’assujetti à une règle est aussi celui qui la définit, la tentation est grande, en l’absence de tout
contrôle, d’en faire une application variable, ce qui n’a pas manqué de se concrétiser,
notamment pour l’achat du nouveau système d’information (Te Vaipunaa) ou le
remplacement des autocommutateurs.
3.1.2.3.3. La transmission des délibérations au ministère, pour qu’elles
soient rendues exécutoires, n’a pas toujours été respectée
Les délibérations de l’Office des postes et télécommunications
sont exécutoires dans les
conditions définies par la réglementation générale en vigueur. Les délibérations en matière
budgétaire et financière, de tarification, d’emprunt ou de cession de biens immobiliers et de
rémunération sont soumises à l'approbation du conseil des ministres, sous réserve des
dispositions particulières applicables aux établissements publics à caractère industriel et
commercial. Or, l’OPT ne bénéficie pas de dispositions dérogatoires. Les autres délibérations
sont exécutoires de plein droit dès leur réception par le ministre de tutelle. Elles peuvent faire
l’objet d’un nouvel examen à la demande du commissaire du gouvernement ou du ministère.
Il apparaît que sur la période examinée, l’Office a eu tendance à oublier de transmettre
les délibérations prises dans des matières qui ne nécessitaient pas l’approbation par arrêté du
conseil des ministres. Il reste qu’à défaut de réception par le ministère, ces délibérations ne
sont pas devenues exécutoires.
La Chambre rappelle à l’Office l’insécurité juridique qui est née de cette négligence et
l’engage à y remédier.
3.1.2.3.4. L’usage de la procédure d’urgence
L’arrêté n° 1731 CM du 19 novembre 2003, relatif à l’organisation et aux règles de
fonctionnement de l’O.P.T., dispose qu’une décision du conseil d’administration
peut être
prise, en cas d’urgence, selon la procédure de consultation à domicile. Dans ce cas, aucun
débat ne peut alors avoir lieu.
Cette procédure a été utilisée, de manière abusive, pour la création de la société Tahiti
Nui Satellite (TNS). Si des dispositions légales pouvaient imposer le changement de statut de
cette activité, la création de cette société aurait pu être anticipée. En outre, une réunion du
conseil d’administration dans la forme ordinaire pouvait tout à fait être organisée tout en
respectant les délais resserrés.
Cette procédure d’urgence a même failli être mise en oeuvre en 2007 pour fixer la
rémunération du président du conseil d’administration d’alors après confirmation de sa
démission de l’assemblée de Polynésie française. Le ministre et vice-président de l’OPT et le
vice-président du Gouvernement, à cette période, administrateurs de l’OPT, auraient refusé
tant sur le fond que sur la forme de voter la délibération par consultation individuelle à
domicile.
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Observations définitives – Office des postes et télécommunications
Séance du 1
er
septembre 2008 - page 98 sur 105
La
Chambre
estime
que
la
procédure
d’urgence
ne
peut
être
utilisée
qu’exceptionnellement et pas pour des décisions majeures. La création d’une commission
permanente constituerait une autre solution pour prendre ce type de décision.
3.2. Le service rendu ne correspond pas au niveau de qualité attendu
par les usagers
3.2.1.
Le prix des prestations en général trop élevé est sans rapport avec
la qualité du service rendu
En situation de monopole dans le secteur postal et dans le secteur de la téléphonie fixe,
l’OPT n’assure ni la qualité de service ni le prix raisonnable des prestations que sont en droit
d’attendre les usagers-clients.
3.2.1.1 :
La qualité du service postal est largement perfectible
Aux termes du code des postes et télécommunications, l’exploitant public assure sa
mission en répondant aux exigences de garantie, d'inviolabilité et de secret des
correspondances, d’une offre de prestation identique mais tenant compte des données
géographiques et de fourniture de services, sans discrimination d’aucune sorte.
L'exploitant public veille à offrir un service postal de qualité, à des prix abordables pour
tous les utilisateurs, et répondant aux exigences essentielles définies précédemment. Il veille
aussi à tenir informés, de façon suffisamment claire, les utilisateurs sur les conditions
générales, techniques, juridiques et tarifaires d'accès à ses services et prestations. Enfin, il
définit librement ses produits et services sous réserve des dispositions législatives et
réglementaires en vigueur en Polynésie française.
Force est de constater que ces déclarations d’intention figurant dans le code des postes et
télécommunications ne sont pas vérifiées par les usagers au quotidien, alors même que les
tarifs viennent d’être augmentés après une stagnation depuis 2003.
Ainsi, alors que le code prévoit que la distribution postale est effectuée soit au bureau de
poste, soit à domicile, la défaillance de la distribution postale a contraint les usagers à payer
l’abonnement à une boîte postale, installée par l'exploitant public le plus souvent dans des
points postaux. Ce qui dans le code est présenté comme dérogatoire, est devenu la règle en
certains lieux comme à Tahiti. Ce faisant, l’OPT ne respecte pas le principe d’égalité des
usagers devant le service public. Deux anciens présidents du conseil d’administration mettent
en avant les difficultés diverses, d’accès, de dénomination de rues, d’absences de boîtes aux
lettres. Sans ignorer ces difficultés, la Chambre suggère à l'office d'engager une réflexion sur
les moyens qui permettrait de rendre la distribution du courrier plus proche des usagers.
Le courrier adressé en recommandé avec accusé de réception, bien qu’il fasse l’objet,
selon l'OPT, d’un suivi rigoureux de son cheminement, n’échappe pas à la survenance
d’incidents dont la fréquence ne peut être mesurée à la seule aune du nombre de réclamations
adressées à l’OPT. Il arrive que le courrier, qui ne touche pas que les destinations étrangères
ou métropolitaines, ne soit pas adressé à son destinataire et que l’avis de réception soit
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 99 sur 105
retourné à l’expéditeur, que le pli soit ou non réclamé par son destinataire. Ces manquements
dans le service sont lourdement pénalisants pour les administrations qui mettent en oeuvre des
procédures rigoureuses, pour les entreprises avec les conséquences sur leurs affaires, comme
pour les particuliers dans leurs diverses démarches.
Les délais d’acheminement du courrier sont en moyenne très longs même si des
enquêtes montreraient, les efforts accomplis en ce domaine. Cela ne concerne pas seulement
les destinations métropolitaines ou étrangères. Des marges de progression existent. Ils sont
surtout très irréguliers d’une période à une autre ce qui ne permet pas aux usagers d’anticiper.
La notion de courrier express est inconnue à l’OPT pour le trafic intra Polynésie. En ce qui
concerne les colis postaux inter-îles, nombreux sont les usagers qui préfèrent confier leurs
envois à un concurrent privé pour être assuré du délai d’acheminement, même s’il empiète
largement sur le monopole. L’OPT regrette que les nombreuses rencontres avec cette
compagnie locale n’ait pas permis de réduire ou arrêter les débarquements de courrier qui
entravent son action. Enfin, le fret maritime a été supprimé, alors que, moins onéreux et moins
rapide, il
pouvait correspondre aux besoins d’une certaine clientèle.
3.2.1.2 :
Le service de la téléphonie fixe est d'un prix élevé
Bénéficiant d’un monopole, l’opérateur public est seul habilité à établir et exploiter les
réseaux permettant d’offrir des services de téléphonie fixe. Il est chargé d’exécuter le service
public qui comprend le service de base et des services obligatoires.
Dans ce cadre, l’opérateur public est tenu de fournir à tous un service de qualité à un
prix abordable. Force est de constater que les tarifs pratiqués ne répondent pas à cette dernière
exigence. Les communications intra archipel, inter archipel et internationales sont d’un prix
élevé que ne peuvent justifier dans l’absolu ni la péréquation opérée pour éviter une
discrimination fondée sur la localisation géographique, ni la taille du marché, ni la
technologie offerte. Des économies substantielles de charges, notamment de personnel,
pourraient être réalisées, afin de réduire le coût du service par une gestion plus rigoureuse.
La comptabilité devant faire apparaître les coûts imputables au service public des
télécommunications n’a jamais été auditée par la puissance publique. Seule une étude de
KPMG Fidupac, dans le cadre du projet Telecom 21, a permis une approche de ce surcoût. Il
ressort à 6 ou 7 % selon les hypothèses retenues.
Même avec une marge de sécurité portant à 10 % ce surcoût, les charges d’accès au
service public de téléphonie pour les populations éloignées ne permettent pas de justifier le
prix des communications téléphoniques.
La tarification reste encore liée au temps de communication. Les forfaits attendus par les
usagers sont trop peu nombreux et peu attractifs. Le développement de nouveaux services
s’est cependant accru en 2008. Le prix des communications téléphoniques internationales est
toujours sans rapport avec ceux de la concurrence internationale malgré les baisses tarifaires
enregistrées au cours des dernières années et encore en 2008.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 100 sur 105
L’OPT pourrait mieux prendre en considération les suggestions de la société MANA
qui, constatant que les réseaux sont déjà installés, propose d’aligner l’offre Man@phone sur
les tarifs internationaux des opérateurs concurrents, même pour un moindre chiffre d’affaires,
plutôt que de laisser ces réseaux inutilisés parce que les communications ont lieu chez les
concurrents. A ces conditions, les consommateurs pourraient être sensibles à contribuer à
l’économie de la Polynésie française.
Le cahier des charges prévoit que l’opérateur doit permettre l’accès au service de base
de toutes les catégories sociales de la population et prendre en compte les difficultés d’accès
liées au faible revenu. Il a fallu attendre le courant de l’année 2007 pour que l’OPT propose
une réduction tarifaire pour les bénéficiaires du régime de solidarité de la Polynésie française.
Elle n’a été mise en oeuvre que pour satisfaire les engagements
demandés par la DGI, de
rétrocession aux consommateurs de l’avantage fiscal accordé à l’OPT dans le cadre de la
défiscalisation des investissements réalisés en 2005 et 2006. Des usagers privés ont ainsi vu
leur ligne mise en service restreint ou coupée quand les usagers publics ont pu bénéficier d’un
traitement préférentiel.
Le cahier des charges prévoit aussi les conditions dans lesquelles le tarif du service de
base et sa qualité sont contrôlés. Aucune disposition n’a jamais été mise en application alors
même que les exigences à l’égard de l’opérateur public sont très faibles. Le contrôle par les
usagers eux-mêmes de leurs consommations n’est même pas possible puisque l’Office ne peut
fournir de relevé détaillé des appels au sein d’une même circonscription. Par ailleurs, le relevé
détaillé est fourni à titre onéreux.
L’établissement de l’ « annuaire officiel de la Polynésie française » est une mission de
service public à la charge de l’opérateur public au titre ses services obligatoires. Force est de
constater que depuis quelques années, le retard dans l’édition de l’annuaire ne satisfait ni les
usagers de la téléphonie fixe, ni les annonceurs qui utilisent ce support pour leurs affaires.
3.2.1.3 :
Le service internet dispose de grandes marges de progrès
Quand bien même la fourniture d’accès internet n’entre pas dans le périmètre du
monopole, l’OPT demeure le seul fournisseur d’accès internet en Polynésie française.
La qualité du service rendu aux clients actuels est nettement améliorable, notamment en
ce qui concerne la vitesse d’accès des communications internet qui sans nécessairement égaler
celle des pays européens, de l’Australie ou de la Nouvelle-Zélande, par exemple, pourrait être
nettement accélérée, et en ce qui concerne la limitation des volumes de téléchargement.
L’OPT doit mettre en oeuvre des moyens techniques complémentaires pour atteindre une
meilleure qualité de service et permettre le développement de nouvelles activités dans les
domaines économique, sanitaire et de l’éducation, que lui suggère de manière récurrente son
mandataire, la société MANA et comme semblent le souhaiter les gouvernements successifs.
Des investissements de capacité en bande passante entre Tahiti et le reste du monde et vers les
archipels éloignés sont nécessaires pour améliorer la qualité de l’offre dans ces régions situées
à l’écart. Au rythme de développement actuel, la saturation des capacités techniques pourrait
être atteinte rapidement.
Le projet d’installation d’un câble sous marin, reliant Tahiti au reste
du monde, complété par un renforcement des connexions entre Tahiti et les archipels éloignés,
est susceptible de permettre ces améliorations.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 101 sur 105
Des progrès restent à faire en matière de prix d’accès au service internet. Les prix
demeurent nettement plus élevés que dans de nombreux pays dans le monde. En raison de clés
de répartition des charges, partiellement arbitraires, mises au point par l’office avec l’aide
d’une société métropolitaine, mais qui mériteraient d’être revues, les produits de l’internet
couvrent
aujourd’hui
des
charges
relevant
d’autres
sous-secteurs
de
l’activité
télécommunications de l’OPT. Le chiffre d’affaires de l’internet doit ainsi couvrir des charges
de réseaux au-delà de sa juste part : la quote-part de la licence « opérateur de réseau de
téléphonie fixe » payée par l’Office et des charges de personnels OPT sont imputées au
prorata des minutes d’utilisation des réseaux plutôt que sur la base du temps réel consacré par
ces agents à l’activité internet.
L’imputation partiellement mal fondée de telles charges, si elle permet d’atténuer
l’effondrement inéluctable du résultat de la téléphonie fixe, affecte le résultat de l’activité
internet et engendre la fixation du prix à un niveau anormal. La juste affectation des charges à
l’activité internet devrait conduire à la fixation d’un prix, compte tenu d’une marge
raisonnable, à un niveau bien moindre. Compte tenu de l’élasticité de la demande au prix et
sous réserve de la mise en oeuvre d’autres conditions, parmi lesquelles la baisse des prix des
micro-ordinateurs et la familiarisation par l’école, le développement de l’internet pourrait
fortement progresser et toucher des franges de la population qui en sont aujourd’hui écartées
et partant, réduire la fracture numérique.
3.2.1.4 : Le service dans les agences de l’OPT est largement
perfectible
Nombreux sont les usagers qui ont fait l’expérience d’une longue attente dans une
agence de l’OPT. Ce n’est pas faute de manquer de personnel, puisque des agents présents,
quelle que soit la longueur de la file d’attente, continuent de vaquer à d’autres occupations. Le
client mériterait une meilleure attention. Il s’agit sans doute de mettre la présence du
personnel mieux en adéquation avec les flux de clientèle qui sont bien connus. Une étude sur
la fréquentation des agences devrait prochainement permettre dans les prochains mois de
mieux répartir les ressources pour mieux répondre à l’attente des clients.
L’accès à un guichet ne garantit pas nécessairement que le service que le client attend va
pouvoir lui être rendu. Hormis les opérations courantes, les demandes de la clientèle
obtiennent trop souvent des réponses incomplètes, inexactes, voir pas de réponse du tout.
L’OPT devrait soigner sa relation avec la clientèle qui, pour être captive, ne devrait pas pour
autant être dédaignée. Il lui revient donc d’affecter des personnels compétents, disponibles à
ces tâches essentielles.
3.2.2.
Le retard dans la mise en oeuvre d’un câble sous-marin à fibres
optiques pénalise le développement de la Polynésie et empêche
l’optimisation des services rendus aux usagers
Des solutions ont été imaginées pour raccorder la Polynésie française au réseau mondial
de haut débit par câble trans-Pacifique à fibres optiques, dans le droit fil du projet Metu@, qui
envisageait que les Polynésiens puissent accéder aux réseaux planétaires de l’information.
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Séance du 1
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En août 2002, la société AXIOM a remis un rapport relatif à l'étude de faisabilité
technique et économique d'une connexion sous-marine de la Polynésie française au réseau
mondial optique. Deux solutions, consistant à s’abouter sur des câbles reliant l’Australie soit
au Japon, soit aux Etats-Unis, permettraient de disposer, à tout moment, et en adéquation avec
les besoins croissants, des capacités de transmissions nécessaires et de maîtriser davantage un
maillon essentiel du réseau de communication. En 2002 encore, la société ALCATEL
proposait à l’OPT de constituer un consortium entièrement français comprenant, en plus des
deux nommés, l’OPT de Nouvelle Calédonie et France Câbles et Radio, pour faire aboutir une
liaison sous-marine à haut débit par câble optique entre la Polynésie française, Wallis et
Futuna et la Nouvelle Calédonie et raccordée à Fidji au câble Southern Cross.
Alors que les études techniques et économiques, en fonction des hypothèses retenues,
énonçaient clairement les éléments de faisabilité de cet investissement, l’OPT a tergiversé
d’octobre 2002 jusqu’à la fin 2007.
Le conseil d’administration de l’OPT avait donné son accord de principe au directeur
général, en octobre 2002, pour mener toutes les négociations utiles à la mise en place du
projet de câble trans-Pacifique. Mais ni lui, ni ses successeurs à la présidence du conseil
d’administration, de juin 2004 à mars 2005 n’ont effectué de démarches pour faire aboutir ce
projet. M. Geffry SALMON a indiqué que les éléments dont il disposait à l’époque ne lui
permettaient pas de déclencher l’opération, notamment pour des raisons techniques.
L’absence de rentabilité immédiate pour l’OPT d’une telle opération aurait également
dissuadé M. Alphonse TERIIEROOITERAI de lancer ce projet. Une telle décision lui
paraissait
« un acte irresponsable et préjudiciable pour l’OPT ».
A compter de mars 2005, après exhumation de ce projet, la conduite du dossier va être
cahotante et émaillée de décisions irrégulières. Un rapport de présentation s’interrogeant à
nouveau sur l’opportunité d’installer un câble sous-marin, parviendra, de manière dilatoire, à
faire décider au conseil d’administration de faire actualiser l’étude de la société AXIOM et à
retarder la relance du projet. L’étude AXIOM a confirmé,
« toujours aussi catégoriquement,
que le câble sous-marin s'avérait la solution optimum au développement de l’internet larges
bande à Tahiti, très loin devant le satellite, qui fort onéreux, empêche une démocratisation de
l’internet large bande et donc de voir une croissance soutenue du développement du
trafic »
53
.
Mais, alors que la décision d’acquisition d’un câble n’était pas prise, la rédaction
d’un cahier des charges a été décidée, sous l’impulsion du ministre en charge des
télécommunications, simultanément au lancement d’un appel d’offres au début de l’année
2006. Pour appuyer le conseiller de la présidence chargé de piloter le dossier, d’anciens
salariés de la société ALCATEL ont même été choisis, sans mise en concurrence. Les quatre
conventions signées par le président du conseil d’administration, M. TERIIEROOITERAI,
ont eu un coût total de 33,3 MF CFP.
L’appel d’offres restreint du 28 février 2006 ne recevra qu’une seule offre de la société
ALCATEL avant la date limite fixée le 4 juin 2006. Les deux autres sociétés, NEC
corporation et TYCO, n’ont pas souhaité présenter d’offre. Cette dernière a mentionné que
l’assistance à l’OPT, de la part d’anciens salariés d’ALCATEL, ne lui laissait que peu de
chances d’être choisie. Dans ce contexte, l’OPT ne sera appelé à se prononcer sur cette offre
qu’en février 2007. Les irrégularités qui ont émaillé la conduite du projet ont donné les
meilleurs arguments aux opposants à la mise en place d’un câble sous-marin. En outre, il a été
53
PV du CA du 16/11/2005, rapport 53-2005/OPT citant les conclusions de l’étude de AXIOM.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 103 sur 105
avancé que les études économiques et financières sur l’impact qu’aurait ce projet sur les
comptes de l’OPT, n’auraient pas été suffisamment étayées pour se prononcer sans risque.
Dès lors, le conseil d’administration, sur la base d’un rapport aux visées dilatoires, a
décidé de ne prendre aucune décision avant le 4 avril 2007, date de la fin de validité de l’offre
d’ALCATEL. Pourtant, le président du conseil d’administration, M. Jean-Alain FREBAULT,
suivant l’avis de son conseiller chargé du câble, en contradiction avec la délibération de son
conseil d’administration, a pris l’initiative d’affirmer à ALCATEL que le projet se poursuivait
favorablement et qu’il sollicitait une prolongation de la validité de l’offre jusqu’au 4 octobre
2007. Depuis cette date, la proposition d’ALCATEL a, à nouveau, été prorogée jusqu’à la fin
de l’année 2007. Le contrat a été signé le 10 janvier 2008.
La conduite de ce dossier par l’OPT révèle la difficulté de cet organisme à se réformer.
Si les changements politiques et donc les changements de ministre et de dirigeants de
l’établissement public expliquent pour une part les atermoiements, une raison moins visible
perturbe la conduite du projet : il existe au sein de l’OPT une
opposition entre les partisans
du câble et ceux qui le rejettent pour des motifs de préservation de la situation dominante de
l’OPT. La mise en place du câble sous-marin à fibres optiques développerait fortement les
nouvelles technologies des communications électroniques, révolutionnerait la téléphonie en
amplifiant l’atteinte aux revenus de la téléphonie fixe par autocommutateur. Les arguments
économiques et financiers avancés pour refuser le câble n’ont d’autres buts que de masquer
ces raisons profondes de leur opposition. La modernisation des liaisons avec le reste du
monde ne pouvant être indéfiniment différée, l’OPT, logiquement déterminé par ses intérêts
propres, apparaît disqualifié pour conduire ce projet.
C’est à la collectivité de la Polynésie française qu’il reviendrait logiquement d’être le
chef de file de ce projet, en y associant les représentants des milieux économiques, le secteur
de la santé, l’éducation et l’administration qui doit évoluer vers l’e-administration. L’OPT
doit bien sûr y participer. Les études déjà réalisées montrent que des besoins nouveaux sont
apparus (le commerce électronique, la consultation de base de données, l’échange de fichiers
volumineux). Cette accélération des besoins et des usages a suscité une demande croissante de
hauts débits, tant de la part des entreprises, que de celle des administrations et des particuliers.
Elle ne pourrait qu’être amplifiée par le nécessaire développement économique de la
Polynésie française, notamment par l’installation sur son territoire d’activités faisant appel à
de grandes capacités de communications électroniques. Cette croissance exponentielle des
besoins en bande passante n’aurait pu se satisfaire à l’avenir de la simple augmentation des
capacités satellitaires, à la fois coûteuses et rigides dans leur commercialisation, et soumises
aux aléas des conditions du marché.
Compte tenu de ces enjeux pour la Polynésie française, si le coût de l’investissement et
l’équilibre futur d’exploitation du câble sous-marin ne devaient pas être négligés, ils n’ont pas
été les seuls déterminants au moment du choix. Les équipements structurants ne sont pas
nécessairement rentables. La même logique devrait pouvoir s’appliquer au câble. Ne pas
installer un câble sous-marin, aurait été pour la Polynésie française faire le choix de ne pas
maintenir à niveau ses installations techniques avec les standards mondiaux, rendre
progressivement sa connexion avec le reste du monde moins opérationnelle et, à terme,
entraver le droit de communication de l’ensemble des usagers, entreprises ou particuliers,
quels que soient leurs modes de communication.
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Séance du 1
er
septembre 2008 - page 104 sur 105
CONCLUSION
En conclusion, la chambre tient à rappeler les principales recommandations qu’elle
adresse à l’OPT dans le cadre du présent rapport.
Organisation
La restructuration de l’ensemble des entités (OPT, TIKIPHONE, MANA, TNS, TNT,
ISS) apparaît indispensable, dès lors que le statut de SAS, donné aux entités dépendant de
l’établissement public, n’est pas compatible avec les dispositions de la loi organique portant
statut d’autonomie de la Polynésie française (articles 29 et 30).
La mise en place d’un comité stratégique, d’une direction juridique, d’une direction des
ressources humaines et d’un véritable contrôle de gestion sont indispensables dans un
organisme de cette importance.
Les organes transversaux (comité des investissements, comité des tarifs, comité des
rémunérations) devraient voir leur composition redéfinie, dans le sens d’une plus grande
transparence.
Gouvernance
Indépendamment de la forme statutaire de l’Office, la répartition des pouvoirs entre le
Président du conseil d’administration, le conseil d’administration et le directeur général de
l’OPT mériterait d’être revue.
Les fonctions du conseil d’administration et de son président gagneraient à être
strictement séparées de celles du directeur général de l’Office. Les administrateurs devraient
disposer des moyens d’exercer réellement leurs pouvoirs de décision et de contrôle. Dans
l’attente
d’une
restructuration
de
l’OPT,
le
conseil
d’administration
devrait
être
significativement être représenté dans l’instance de pilotage des filiales.
Le directeur général de l’Office devrait être rétabli dans la plénitude de ses fonctions lui
donnant pouvoir sur l’ensemble des secteurs d’activité de l’OPT, quelle que soit son
organisation. Le directeur général doit être choisi pour ses compétences techniques,
administratives et financières, et disposer d’un mandat suffisamment long pour mettre en
oeuvre les actes de gestion dont les résultats pourront être évalués à moyen ou long terme.
Gestion
L’office doit procéder à une gestion plus dynamique et plus rigoureuse de ses recettes et
simultanément maîtriser le prix de ses prestations, en général trop élevé, tout en améliorant la
qualité du service rendu aux usagers.
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Séance du 1
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septembre 2008 - page 105 sur 105
La tenue d’une comptabilité analytique performante reposant sur des clés de répartition
équitables apparaît indispensable.
L’office doit prendre sans tarder les mesures nécessaires à la réduction de ses charges,
notamment les charges de personnel, en développant en particulier une gestion performante
des ressources humaines.
L’office doit renforcer la maîtrise de ses investissements et les orienter vers les secteurs
d’avenir susceptibles de développer ses revenus.
En matière de commande publique, l’office se doit de respecter les principes généraux
définis par l’article D. 311-5 du Code des postes et télécommunications (égalité de traitement
des candidats, transparence des procédures, efficacité de la commande et bonne utilisation des
budgets alloués) qui, pour l’essentiel, sont aussi ceux qui s’imposent à la collectivité d’outre-
mer, en application de l’article 28-1 de la loi organique portant statut de la Polynésie
française.