Sort by *
C
OUR DES
C
OMPTES
Synthèses
Tome I
Les observations
Les finances publiques
Les politiques publiques
La gestion publique
C
es synthèses sont destinées à faciliter la lecture et l’uti-
lisation du rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations et autres organismes
intéressés sont insérées dans le rapport.
Avertissement
Le rapport public annuel
2013
Introduction
Le rapport public annuel 2013
de la Cour des comptes comprend
trois tomes, dont seuls les deux premiers font l’objet de synthèses :
-
le tome I
, constitué de deux volumes (I-1 et I-2), expose les obser-
vations et recommandations tirées d’une sélection de contrôles, d’en-
quêtes et d’évaluations réalisés en 2011 par la Cour, les chambres régio-
nales ou territoriales des comptes, ou conjointement par Cour et les
chambres régionales ou territoriales ;
-
le tome II
est consacré aux suites données par les collectivités, admi-
nistrations et autres organismes contrôlés aux observations et recomman-
dations formulées les années précédentes ;
-
le tome III
présente, de façon synthétique, les activités de la Cour et
des chambres régionales et territoriales des comptes durant l’année
2012.
Le rapport annuel de la Cour de discipline budgétaire et financière est
annexé à ces trois tomes.
Le présent fascicule rassemble les synthèses des 27 textes qui
composent le tome I « Les observations ».
Ces 27 textes sont regroupés en trois parties :
-
première partie : les finances publiques (2)
:
.
la situation d’ensemble des finances publiques à fin janvier 2013
. la situation et les perspectives financières des départements
-
deuxième partie : les politiques publiques (12)
:
. chapitre I
: la santé et la cohésion sociale (4)
.
chapitre II
: la recherche et l’enseignement supérieur (2)
.
chapitre III
: les transports et l’aménagement du territoire (4)
.
chapitre IV
: deux plans d’aide sectoriels (2)
-
troisième partie : la gestion publique (13) :
.
chapitre I
: les administrations de l’Etat (3) ;
.
chapitre II
: les collectivités territoriales (4) ;
.
chapitre III
: les opérateurs de l’Etat (1) ;
.
chapitre IV
: les entreprises publiques (4) ;
.
chapitre V
: une fondation parapublique (1).
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
3
I - Les finances publiques
1
La situation d’ensemble des finances publiques . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
2
La situation et les perspectives financières des départements . . . . . .10
II - Les politiques publiques
3
La lutte contre la maladie d’Alzheimer : une politique de santé
publique à consolider . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .13
4
Les restructurations hospitalières : trois illustrations des difficultés
rencontrées
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .16
5
Le médecin traitant et le parcours de soins coordonné :
une réforme inaboutie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18
6
Le RSA “activité” : une prestation peu sollicitée, un impact
restreint
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .21
7
L’Inserm et les sciences du vivant : de nouveaux enjeux dans un
secteur stratégique
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24
8
Les écoles supérieures de commerce et de gestion :
un développement à réguler
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26
9
Le syndicat mixte des transports de l’agglomération toulousaine :
une nécessaire adaptation de la croissance du réseau
. . . . . . . . . . .28
10
Le tramway d’Artois-Gohelle (Pas-de-Calais) : un
projet insuffisam-
ment réfléchi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .30
11
La participation des collectivités territoriales au financement de la
ligne à grande vitesse Est (LGV Est) : des contreparties coûteuses,
une gare de trop . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .33
12
Les ports de pêche en Bretagne : un pilotage régional à renforcer
35
Synthèses du tome I
Les observations
5
Sommaire
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
13
Le soutien de l’Etat aux débitants de tabac : des aides injustifiées .37
14
Le plan d’aide à la presse écrite 2009-2011 : une occasion
de réforme manquée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .40
III - La gestion publique
15
Les achats de maintenance du ministère de la défense : un fort
potentiel d’économies
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .43
16
La délivrance des visas et des titres de séjour : une modernisation à
accélérer et des simplifications à poursuivre
. . . . . . . . . . . . . . . . . .46
17
La direction générale de l’aviation civile : une action sociale
généreuse et coûteuse
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .49
18
Les concessions de distribution d’électricité :
une organisation à simplifier, des investissements à financer . . . . .51
19
Le traitement des eaux usées de la région de Corbeil-Essonnes et
d’Evry : l’oubli de l’intérêt général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .54
20
Le rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel :
un projet mal conduit
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .56
21
L’immobilier des collectivités territoriales : vers une gestion plus
dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .59
22
L’office national de l’eau et des milieux aquatiques :
une transformation mal préparée, une gestion défaillante
. . . . . . .62
23
Les rémunérations à EDF SA : une progression rapide, une accumu-
lation d’avantages, peu de liens avec les performances . . . . . . . . . .65
24
Les dépenses de communication de la SNCF : des opérations
dispendieuses, des marchés irréguliers
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .68
25
De la SONACOTRA à Adoma : des dérives corrigées tardivement71
26
La Monnaie de Paris : une mutation bien engagée, des défis à
relever . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .74
27
Fondation du patrimoine : un modèle singulier . . . . . . . . . . . . . . . .77
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Sommaire
6
1
La situation d’ensemble des
finances publiques
(à fin janvier 2013)
La situation en 2012
Le déficit public, après avoir atteint
un niveau exceptionnellement élevé en
2009 et en 2010 (respectivement 7,5 %
et 7,1 % du PIB), a été ramené à 5,2 %
du PIB en 2011 et le Gouvernement
prévoit une nouvelle diminution en
2012, jusqu’à 4,5 % du PIB.
Le rapport de la Cour de juillet 2012
sur la situation et les perspectives des
finances publiques avait mis en avant
des risques de dérive par rapport à cet
objectif, mais des mesures de redresse-
ment ont été prises au cours de l’été.
En incluant les mesures inscrites
dans les lois de finances antérieures, l’ef-
fort structurel de réduction du déficit en
2012 a été très significatif (1,4 point de
PIB). Il a surtout reposé sur une hausse
des prélèvements obligatoires (1,1 point
de PIB), nettement moins sur la maîtrise
des dépenses (0,3 point de PIB).
Les informations disponibles en jan-
vier 2013 ne conduisent pas à remettre
en cause l’objectif de déficit de 4,5 % du
PIB pour 2012, mais le risque d’un défi-
cit plus élevé n’est pas négligeable,
notamment parce que la dégradation de
la conjoncture pourrait avoir entraîné
une croissance des recettes plus faible
que prévu. La dette publique pourrait
avoir dépassé 90 % du PIB à la fin de
décembre 2012.
Les autres pays européens ont fait
des efforts semblables et la situation
relative de la France en 2012 serait res-
tée moins bonne que celle de la
moyenne de l’Union européenne ou de
la zone euro. L’Allemagne, en particu-
lier, aurait été proche de l’équilibre de
ses comptes publics.
Les perspectives pour 2013
Les prévisions de recettes du
Gouvernement pour 2013 sont proba-
blement trop favorables, notamment
parce qu’elles sont fondées sur un scé-
nario macroéconomique fragile et sur
une croissance des prélèvements obliga-
toires, à législation constante, qui est
trop forte par rapport à celle de l’activité
économique. De plus, le coût des
contentieux fiscaux communautaires est
encore incertain et les difficultés de chif-
frage des très nombreuses mesures fis-
cales nouvelles introduisent un aléa
important.
Le Gouvernement a comme objectif
pour 2013 une stabilité des dépenses de
l’État, hors intérêts et pensions (champ
de la norme en valeur), par rapport à la
loi de finances initiale (LFI) pour 2012.
Son respect suppose de dégager des
économies pour compenser les mesures
nouvelles (1 Md€) et la croissance ten-
dancielle des dépenses. En raison d’esti-
mations différentes de celle-ci, dont la
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
7
mesure est en partie conventionnelle, les
économies nécessaires sont estimées à
10 Md€ par le Gouvernement et à
7 Md€ par la Cour. Une part non négli-
geable de ces économies résultera de
l’effet décalé des mesures prises sous la
législature précédente, notamment de
l’impact des réductions d’effectifs ins-
crites dans la loi de finances initiale pour
2012 sur la masse salariale de 2013. Les
mesures nouvelles identifiables dans la
LFI pour 2013 sont assez limitées et le
respect de la norme de dépenses, s’il est
possible, sera difficile.
Même si l’objectif du Gouverne-
ment pour 2013 est respecté, étant
donné que les lois de finances rectifica-
tives pour 2012 ont réduit les crédits de
1,2 Md€ par rapport à la LFI 2012, les
dépenses de l’État sur le champ de la
norme en valeur augmenteraient de 1,2
Md€ en 2013 en exécution, alors qu’elles
ont baissé en 2012. Les dépenses d’assu-
rance maladie et de retraite croîtraient,
elles aussi, plus vite en 2013 qu’en 2012.
La croissance du total des dépenses
publiques primaires serait néanmoins
quasiment égale en 2012 et en 2013,
selon le Gouvernement. Cette poursuite
du freinage des dépenses engagé en
2011 résulte des hypothèses qui ont été
retenues par le ministère des finances
pour ce qui concerne l’évolution des
dépenses les moins directement sous le
contrôle de l’Etat (assurance chômage,
collectivités locales, organismes divers
d’administration
centrale,
etc.).
Certaines de ces hypothèses, notam-
ment celles relatives aux indemnités de
chômage, sont fragiles.
Sous ces réserves, l’effort structurel
programmé en 2013 est considérable,
presque 2 points de PIB, et la réduction
du déficit structurel, qui est au cœur des
obligations du nouveau traité européen,
sera conforme aux engagements de la
France.
En revanche, la réalisation de l’ob-
jectif de déficit effectif (3 % du PIB)
pourrait être compromise, en France
comme dans d’autres pays européens, si
la situation économique ne s’améliore
pas suffisamment vite. Cette perspec-
tive, si elle se confirme, est susceptible
d’appeler au niveau européen un réexa-
men des poids respectifs accordés aux
critères de déficit effectif, très difficile à
respecter dans une conjoncture dégra-
dée, et de déficit et d’effort structurels,
plus facilement maîtrisables par un gou-
vernement.
La nécessaire maîtrise des
dépenses
La priorité absolue est désormais
d’intensifier l’effort de maîtrise de la
dépense dans l’ensemble des administra-
tions publiques. En effet, l’effort struc-
turel prévu pour 2013 est déséquilibré :
il repose pour moins de 25 % sur la maî-
trise des dépenses et pour plus de 75 %
sur des hausses des prélèvements obliga-
toires. En outre, les économies prévues
tiennent pour partie à la faiblesse des
taux d’intérêt, qui ne peut pas être consi-
dérée comme durable, et à l’impact de
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La situation d’ensemble des finances publiques
(à fin janvier 2013)
8
mesures prises sous la législature précé-
dente.
Un rééquilibrage est prévu dans la
loi de programmation des finances
publiques, au-delà de 2013, entre les
efforts en dépenses et en recettes, du fait
notamment du financement du crédit
d’impôt pour la compétitivité et l’emploi
par des économies supplémentaires.
Les mesures nécessaires, dans l’en-
semble des administrations publiques,
pour se rapprocher d’une stabilisation
en volume des dépenses à partir de
2014, comme il est prévu dans la loi de
programmation, devront être rapide-
ment prises. La modernisation de l’ac-
tion
publique
annoncée
par
le
Gouvernement doit viser explicitement
autant le freinage des dépenses que
l’amélioration de la qualité des services
publics.
Synthèse
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La situation d’ensemble des finances publiques
(à fin janvier 2013)
9
Cour des comptes
10
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
2
La situation et les perspectives
financières des départements
Au cours de la dernière décennie, la
structure financière des départements a
été profondément modifiée. Parallèle-
ment,
l’ajustement des recettes à la
croissance tendancielle des dépenses est
devenu plus difficile.
L’accroissement du poids des
dépenses sociales et des
dépenses de personnel
Depuis les années 2000, les départe-
ments assurent notamment le versement
du RMI/RSA, de l’allocation personna-
lisée d’autonomie (APA) et de la presta-
tion de compensation du handicap
(PCH). La part des dépenses sociales
dans les budgets des départements a for-
tement progressé entre 2003 et 2011.
Les dépenses d’intervention, constituées
pour une large part de prestations
sociales, sont ainsi passées de 58,7 % à
65 % des dépenses de fonctionnement.
Sur la même période, la masse sala-
riale a augmenté de 115 %. Cette crois-
sance s’explique en grande partie par le
transfert de personnels de l’État (envi-
ron 80 000 emplois), en lien avec la
décentralisation des compétences suite à
l’Acte II de la décentralisation (2004).
Ces transferts n’expliquent pas à eux
seuls l’augmentation des effectifs. Hors
effet de la décentralisation, les effectifs
ont augmenté de 12 % sur la période.
Une modification de la structure
des recettes
La structure des recettes des dépar-
tements a fortement évolué. Les trans-
ferts de compétences aux départements
ont, pour l’essentiel, été financés par le
biais de transferts de fiscalité indirecte.
La réforme de la fiscalité locale a inversé
le rapport entre la fiscalité directe et
indirecte dans leurs ressources et réduit
la capacité des départements à moduler
les taux d’imposition.
Un équilibre entre les recettes
et les dépenses plus difficile à
atteindre
Au regard de la jurisprudence du
Conseil constitutionnel, la compensa-
tion des transferts et de l’extension de
compétence, qui s’apprécie au moment
où intervient le transfert ou l’extension,
n’a pas été opérée en contradiction avec
les dispositions de l’article 72-2 de la
Constitution. Toutefois, sur le plan
financier, un décalage s’observe entre les
recettes affectées et les charges crois-
santes supportées par les départements,
particulièrement s’agissant de l’APA, du
RMI/RSA et de la PCH. Pour ces trois
allocations, l’écart entre la charge sup-
portée et le financement reçu de l’État
s’élevait à 5 Md€ en 2011.
11
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
L’effet de ciseaux constaté en 2009
en raison de la croissance des dépenses
et de la chute des droits de mutation à
titre onéreux (DMTO) a mis en évi-
dence la fragilité de l’équilibre financier
des départements. En 2011, les départe-
ments ont pu
reconstituer des
marges
de manœuvre, en grande partie grâce au
niveau élevé des DMTO. Ils ont néan-
moins fortement limité leurs investisse-
ments ainsi que le recours à l’emprunt.
Cette amélioration est cependant
conjoncturelle alors que la progression
des dépenses sociales se poursuit dans
un contexte économique et social moins
favorable. Les dépenses sociales des
départements ont fortement progressé
ces dernières années. Elles ont aug-
menté en moyenne annuelle de 7,1 %
sur la période 2005/2011.
Prendre en compte la
diversité des situations
Si la situation structurelle des dépar-
tements s’est dégradée, la réponse à
apporter ne peut être globale et uni-
forme. Le transfert d’une nouvelle res-
source bénéficierait indifféremment à la
collectivité en difficulté financière
comme à celle disposant d’une relative
aisance. De même, toute augmentation
indifférenciée du taux de ressources
existantes ne ferait qu’amplifier les iné-
galités.
En outre, de profondes disparités
existent entre collectivités. Si l’on com-
pare les départements qui cumulent à la
fois les dépenses sociales les plus élevées
et les droits de mutation les plus faibles,
il est possible d’identifier 11 collectivités
présentant une structure budgétaire
potentiellement fragile. Parmi ceux-ci,
cinq se caractérisent, en plus, par un
ratio d’endettement élevé.
Eviter des solutions mal
adaptées
Le recours à un fonds d’urgence ne
saurait constituer une solution durable
pour résorber des déséquilibres d’ori-
gine structurelle. Une intervention stric-
tement conjoncturelle devrait être ciblée
dans sa finalité et obéir à des critères
précis et objectifs.
Le transfert du RMI/RSA, de l’APA
et de la PCH aux départements avait du
sens compte tenu de leurs autres com-
pétences. Un transfert à une autre admi-
nistration publique ne paraît guère envi-
sageable. Il ne résoudrait en outre pas la
question de l’équilibre entre les res-
sources affectées et les charges.
Dans le contexte actuel de crise des
finances publiques, toute réallocation de
ressources aux départements entraîne-
rait de facto un effet d’éviction sur les
ressources disponibles pour les autres
administrations publiques. Dans ces
conditions, le transfert par l’État de
nouvelles ressources fiscales aux collec-
tivités locales ne saurait être privilégié.
Dégager des marges de manoeu-
vre financières et fiscales
Des marges de manœuvre pour-
raient être dégagées au moyen d’efforts
de gestion. Le renforcement de la res-
La situation et les perspectives financières
des départements
Pour une meilleure maîtrise des
dépenses :
envisager le renforcement des
responsabilités des départements dans
la gestion des différents dispositifs
d’intervention sociale ;
éviter les cofinancements d’in-
vestissements département-région et
introduire un plafond de subvention-
nement pour les projets d’investisse-
ment conduits par d’autres collectivi-
tés ;
limiter la possibilité pour les
départements d’intervenir en complé-
ment de l’Etat dans le financement des
investissements publics ;
Pour une sécurisation et une meil-
leure répartition des ressources :
mettre en place une péréquation
plus ambitieuse dans son volume
(DMTO et CVAE) et dont les critères
devraient être redéfinis (notamment
par la prise en compte du poids des
dépenses sociales) avec l’objectif de
réduire progressivement les écarts de
30 % par rapport à la situation
actuelle ;
pour les DMTO, mettre en
place un mécanisme pérenne de « lis-
sage » des fluctuations, dont les cri-
tères pourraient s’inspirer du méca-
nisme de « mise en réserve » décidé en
2012. Un lissage sur la moyenne des
cinq dernières années devrait permet-
tre d’éviter les aléas de la conjoncture ;
envisager une réallocation de la
fiscalité, neutre pour l’État, entre les
départements et le bloc communal,
afin de donner aux départements une
plus grande marge de manœuvre ; à cet
effet, réaffecter une part de la taxe sur
le foncier bâti aux départements et une
part des DMTO au bloc communal,
ceci permettant notamment d’aug-
menter la part modulable de la fiscalité
des départements et stabilisant une
plus grande part de leurs ressources.
Recommandations
ponsabilité des départements dans la
gestion des différents dispositifs de soli-
darité qui leur ont été confiés pourrait
favoriser la recherche d’économies de
gestion.
Indépendamment
de
ces
efforts, des mesures incitant au recen-
trage des dépenses d’investissement sur
les actions prioritaires des départements
pourraient être adoptées.
Une plus grande capacité d’ajuster
les recettes aux dépenses pourrait être
donnée aux départements en transférant
du bloc communal aux
départements
une part de taxe sur le foncier bâti en
contrepartie d’une part de DMTO. Ce
réaménagement devrait être complété
par le renforcement de la péréquation et
la mise en place d’un mécanisme
pérenne de « lissage » sur cinq ans du
produit des DMTO.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La situation et les perspectives financières
des départements
12
Cour des comptes
3
La lutte contre la maladie
d'Alzheimer :
une politique de santé
publique à consolider
L'INSERM estime que 860 000 per-
sonnes sont actuellement atteintes de la
maladie d’Alzheimer ou d’une maladie
apparentée. Cette affection qui évolue
sur plusieurs années et pour laquelle il
n’existe pas de traitement curatif touche
au-delà de 75 ans 13 % des hommes et
20,5 % des femmes. Il s’agit d’un enjeu
majeur de santé publique qui a fait l’ob-
jet de trois plans successifs élaborés et
mis en œuvre entre 2001 et 2012. La
Cour en a examiné les apports en termes
de prise en charge médicale de cette
pathologie.
Une continuité
dans la politique
mise en oeuvre et un pilotage
progressivement affermi
Dès 2001, le premier plan Alzheimer
a défini les principaux objectifs de lutte
contre la maladie qui ont ensuite été
repris et approfondis, de manière cohé-
rente, dans les plans suivants. Le
deuxième plan (2004-2007) a notam-
ment permis une prise en charge des
soins à 100 % par l’assurance maladie.
Le troisième (plan 2008-2012) a mis, en
particulier, l’accent sur la recherche et
sur l’organisation de la continuité de la
prise en charge médicale à travers des
dispositifs innovants destinés à renfor-
cer l’implication des médecins de ville et
à renforcer les possibilités de soins spé-
cialisés en établissements.
Les deux premiers plans ont été très
faiblement structurés en termes de pilo-
tage et de suivi. En revanche, pour le
troisième,
la mission de pilotage direc-
tement placée auprès du Président de la
République, a permis de mobiliser l’en-
semble des acteurs et d’éviter tout déli-
tement au cours de la mise en œuvre du
plan.
Un effort financier
difficile à
mesurer
C'est particulièrement vrai pour les
deux premiers plans, faute de chiffrage
prévisionnel et de bilan précis. Le chif-
frage prévisionnel du troisième plan
(1,6 Md€ sur cinq ans dont 226 M€ pour
le volet sanitaire), présenté comme
financé par les franchises médicales
alors créées, s’est révélé approximatif et
un suivi fin des dépenses réellement
décaissées
n’a
pas
été
possible.
L'estimation faite montre néanmoins
une sous-exécution de l’enveloppe
financière prévisionnelle, le taux de réa-
lisation globale n’étant, fin 2011, que de
31,54 %. Ce résultat s’explique par le
lent déploiement des nouveaux disposi-
tifs, leurs délais de conception et de mise
en place ayant été sous-estimés : en sep-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
13
14
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
tembre 2012, les différentes mesures du
plan étaient en moyenne mises en œuvre
à 83 % de l’objectif final.
L’organisation progressive d’un
parcours de soins qui reste
cependant encore inabouti
Une offre de diagnostic est désor-
mais accessible sur l'ensemble du terri-
toire. Elle repose sur 469 consultations
mémoire de proximité articulées avec 28
centres mémoire de ressources et de
recherche, aux pratiques toutefois très
hétérogènes. Une Banque nationale
Alzheimer a été créée en 2009 pour per-
mettre un suivi épidémiologique de la
maladie, mais toutes les consultations
mémoire ne l’alimentent pas.
Le suivi médical à domicile est
encore en voie de structuration. Les
consultations spécifiques par le médecin
généraliste pour le malade et l’aidant, les
expérimentations de nouveaux modes
de rémunération des professionnels de
santé ou encore la création d’équipes
spécialisées Alzheimer regroupant plu-
sieurs professions de santé ont cepen-
dant commencé cependant à reposition-
ner le médecin traitant au cœur de la
prise en charge sanitaire du malade.
Toutefois seulement 273 Alzheimer sur
les 500 prévues étaient opérationnelles
en juin 2012.
Le déploiement des structures hos-
pitalières dédiées créées par le troisième
plan,
a connu des retards : seulement 55
unités d’hébergement renforcées (sur
190 prévues) et 77 unités cognitivo-
comportementales (sur 120 prévues)
étaient
effectivement
ouvertes
en
décembre 2012.
Une évaluation indispensable de
la prise en charge médicamen-
teuse et de la stratégie de
recherche
Des initiatives ont été engagées afin
de mieux surveiller les effets indésira-
bles des médicaments utilisés par les
malades Alzheimer et pour réduire
l’usage inapproprié des neuroleptiques.
Cependant, la réévaluation à la baisse,
par la Haute Autorité de santé en octo-
bre 2011, du service médical rendu par
quatre des médicaments utilisés appelle
la réalisation rapide d’une évaluation
médico-économique rigoureuse de l’ap-
port de ces produits au regard de leur
coût pour la collectivité (environ
380 M€ en 2012).
Le troisième plan a impulsé une
véritable dynamique en faveur de la
recherche en y consacrant 192 M€ et en
s’appuyant sur un opérateur spécialisé :
la Fondation de coopération scientifique
Plan Alzheimer. Les résultats, notam-
ment en termes de développement de
nouveaux outils de diagnostic ainsi que
de traitements préventifs et curatifs,
devront être attentivement évalués selon
un calendrier à préciser.
La lutte contre la maladie d'Alzheimer
procéder à l’évaluation métho-
dique des nouveaux dispositifs de prise
en charge avant d’envisager leur recon-
duction et leur pérennisation ;
réaliser une évaluation médico-
économique rigoureuse des médica-
ments
pour
traiter
la
maladie
d’Alzheimer ;
faire strictement respecter par la
totalité des consultations mémoire
l’obligation de documenter la Banque
nationale Alzheimer ;
en cas de lancement d’un nou-
veau plan Alzheimer, en organiser un
suivi financier précis selon une métho-
dologie commune aux diverses admi-
nistrations concernées.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La lutte contre la maladie d'Alzheimer
15
Cour des comptes
16
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
4
Les restructurations
hospitalières :
trois illustrations des
difficultés rencontrées
La recomposition du paysage hospi-
talier engagée depuis une quinzaine
d’années reste
aujourd’hui inachevée,
elle ne répond qu’imparfaitement aux
besoins de la population comme l’avait
déjà constaté la Cour dans son
rapport
annuel sur l’application des lois de
financement de la sécurité sociale pour
2008 .
La Cour et les chambres régionales
ont examiné, en 2012, trois exemples de
restructurationssont évoqués : les hôpi-
taux de Perpignan dans les Pyrénées-
Orientales, (1 151 lits), du Nord-Deux-
Sèvres dans les Deux-Sèvres (316 lits) et
d’Albertville-Moutiers en Savoie (544
lits).
Une longue gestation des
projets
Malgré des enjeux financiers iné-
gaux, les trois projets ont eu chacun
beaucoup de mal à voir le jour : il a fallu
entre dix et vingt ans pour rendre les
arbitrages nécessaires.
A Perpignan, la reconstruction de
l’ancien hôpital, dont la décision a été
prise en 1993, a été effectuée en 2012,
mais avec la réalisation de deux tranches
seulement
sur les quatre initialement
prévues.
Le centre hospitalier du Nord-
Deux-Sèvres n’a pas encore connu de
réalisation concrète, malgré trois projets
successifs.
Dans la vallée de la Tarentaise,
après le difficile accord sur la fusion de
deux entités seulement (Albertville et
Moutiers) sur les trois envisagées initia-
lement (avec Bourg-Saint-Maurice), et
après cinq projets successifs, le nouvel
établissement
n’est
toujours
pas
construit.
Les rôles ambigus des tutelles
A Perpignan, plusieurs projets de
reconstruction de l’ancien hôpital ont
été rejetés successivement par l’agence
régionale de l’hospitalisation puis par
l’agence régionale de santé sans pour
autant qu’une réflexion globale soit
menée sur l’activité du nouvel hôpital.
Le centre hospitalier Nord-Deux-
Sèvres, issu de la fusion de trois hôpi-
taux, connait une situation dégradée,
notamment en raison de l’absence de
décision de la tutelle sur le choix du type
d’organisation à mettre en place et sur le
niveau de financement à prévoir.
En Tarentaise, le ministère chargé de
la santé et l’agence régionale de santé
ont longtemps insisté sur l’urgence
d’une fusion, mais les différents acteurs,
établissement, communauté médicale,
élus et ministère, n’ont pas réussi à s’ac-
17
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les restructurations hospitalières
corder sur un regroupement efficient et
économique.
Des atermoiements
préjudiciables financièrement
Les projets successifs de reconstruc-
tion de l’hôpital de Perpignan ont occa-
sionné, depuis 1993, de nombreuses
dépenses inutiles et l’enveloppe finan-
cière du projet a progressé de 63 % en
euros constants, avec pour conséquence
d’hypothéquer pour longtemps la situa-
tion financière de l’hôpital.
De même, pour le centre hospitalier
Nord-Deux-Sèvres, la soutenabilité du
nouveau projet, évalué à 106 M€,
demeure incertaine.
Le plan de financement de l’hôpital
d’Albertville-Moutiers (CHAM) appa-
raît également peu réaliste, au regard de
son activité et de la capacité à assurer
l’équilibre d’exploitation qui en découle.
Une offre de soins encore
inadaptée
A Perpignan, le nouvel hôpital a été
construit sur son ancien site qui ne per-
met pas d’extension. Le parti architectu-
ral retenu est peu satisfaisant et la réali-
sation de deux tranches supplémentaires
prévues semble très hypothétique.
Quant aux deux autres projets étu-
diés, mais non encore définitivement
arbitrés ni financés, ils ne répondent que
très imparfaitement aux besoins de la
population.
En conséquence, la Cour estime
qu’il est encore temps de les reconsidé-
rer et de définir de manière crédible l’ac-
tivité future des établissements dans le
cadre d’une approche cohérente et glo-
bale de l’offre de soins locale.
La Cour persiste dans ses recom-
mandations de 2008 visant à relancer
et à rationaliser les plans de restructu-
ration. Elle insiste, sur la nécessité
pour les services de l’Etat de définir de
objectifs nationaux de restructuration
hospitalière, de renforcer les moyens
d’action des agences régionales de
santé et de soutenir leurs arbitrages,
dans un contexte de plus en plus diffi-
cile de lutte contre les déficits sociaux.
En ce qui concerne les projets qui
n’apparaissent pas aujourd’hui satisfai-
sants du point de vue de l’organisation
médicale sur les territoires concernés,
la Cour et les chambres régionales des
comptes formulent les recommanda-
tions suivantes :
redéfinir les projets en les inté-
grant dans une démarche rigoureuse et
cohérente prenant en compte la globa-
lité de l’offre et de la demande locale
de soins ;
veiller à ce que les projets de
restructurations hospitalières dégagent
effectivement toutes les économies de
fonctionnement dont elles offrent
l’opportunité.
Recommandations
Cour des comptes
18
Synthèses
du Rapport public
annuel de la
Cour des comptes
5
Le médecin traitant et le
parcours de soins coordonnés :
une réforme inaboutie
Depuis la loi du 13 août 2004 rela-
tive à l’assurance maladie, tout assuré
social de plus de 16 ans est incité à dési-
gner un médecin traitant. La Cour a
cherché à apprécier l’apport effectif de
cette innovation, présentée comme une
réforme structurelle majeure de l’organi-
sation des soins.
Un dispositif ambitieux, réduit
pour les assurés à un parcours
tarifaire complexe
La réforme de 2004 systématise la
pratique du médecin de famille en dis-
posant que tout patient déclare un
médecin de son choix, dit traitant, et ne
consulte ensuite, sauf exceptions (psy-
chiatre, gynécologue, ophtalmologue),
les autres médecins, dits correspon-
dants, que sur prescription du médecin
traitant. Pour préserver le libre choix du
patient, la désignation d’un médecin
traitant, qui peut être un généraliste ou
un spécialiste, n’est pas obligatoire. Si
l’assuré s'en abstient ou s’il consulte
directement un autre praticien sans pres-
cription de son médecin traitant et ainsi
ne respecte pas le parcours de soins
coordonnés, il est pénalisé par une aug-
mentation très sensible de la part laissée
à sa charge par l’assurance maladie
(70 % au lieu de 30 %), sans possibilité
pour les assurances complémentaires de
couvrir la majoration.
De ce fait, et malgré divers obstacles
administratifs, la part des assurés ayant
déclaré un médecin traitant (à 95 % un
généraliste), déjà de 80 % en mai 2006, a
atteint 90 % en décembre 2011, date à
laquelle les consultations médicales
effectuées dans le respect du parcours
de soins représentaient 91 % du total
(hors urgences et autres actes exclus).
La réforme a ainsi institué un
gatekee-
per
à la française, librement inspiré du
schéma britannique où le médecin géné-
raliste
est
un
passage
obligé.
Contrairement au système britanique où
toute personne est tenue de s’inscrire
chez un généraliste, payé en fonction du
nombre de ses patients, qui la soigne
gratuitement et l'oriente si nécessaire
vers un spécialiste ou un hôpital, le sys-
tème français préserve les fondements
de la médecine libérale que sont notam-
ment le libre choix du médecin par le
patient et le paiement à l’acte.
La mise en place du médecin traitant
s’est avant tout traduite pour l’assuré par
un parcours tarifaire d’une considérable
complexité ayant pour principal objet de
limiter la charge des remboursements
pour l’assurance maladie. De fait, les
préoccupations de celle-ci et des syndi-
cats de médecins libéraux, auxquels a été
déléguée la mise en œuvre opération-
19
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Le médecin traitant et le parcours de soins
coordonnés
nelle du dispositif, ont largement pris le
pas sur son contenu médical.
Un facteur déterminant de
diversification de la
rémunération des médecins
Dans un contexte marqué par la per-
sistance de déficits élevés et une volonté
de redressement financier, l’assurance
maladie s’est appuyée sur la mise en
place du médecin traitant pour privilé-
gier des revalorisations ciblées, selon des
modalités différentes entre généralistes
et
spécialistes.
L’effort
financier
consenti (600 M€ par an) a été para-
doxalement plus favorable aux spécia-
listes qu’aux généralistes, pourtant cen-
sés être la clef de voûte du dispositif.
Conséquence de la relation juridique
instaurée entre médecin traitant et
assuré par un accord de désignation
réciproque et formalisé, tout médecin
généraliste se voit désormais rattacher
une population clairement identifiée de
patients. L’assurance maladie a ainsi
trouvé l’outil nécessaire à la mise en
place progressive d’incitations positives
à la maîtrise médicalisée des dépenses de
santé, en complétant la rémunération à
l’acte, qui demeure principale, d’une
rémunération à la performance modulée
en fonction de l’atteinte d’objectifs
quantifiés et de forfaits destinés à recon-
naître certaines missions particulières.
En regard de ces surcoûts avérés, les
économies attendues de l’optimisation
des soins médicaux n’ont jamais donné
lieu à évaluation.
Une réforme toujours inaboutie
Huit ans après la création du méde-
cin traitant, le vieillissement de la popu-
lation, le développement des patholo-
gies chroniques et l’évolution de la
démographie médicale rendent encore
plus aiguë la nécessité de généraliser une
« médecine de parcours ». Les expéri-
mentations visant à une prise en charge
des patients chaînée et coordonnée
entre les divers acteurs du système de
soins se sont certes multipliées, mais
dans le plus grand désordre et en ne fai-
sant que peu appel au médecin traitant.
Le manque de relations formalisées
entre médecins traitant et correspon-
dant, joint aux retards du dossier médi-
cal personnel, a contribué à vider de
tout contenu médical la notion de par-
cours de soins coordonnés, chaque
acteur tendant à vouloir que la coordina-
tion s’exerce à partir de sa propre sphère
de responsabilité. Il en résulte un pay-
sage brouillé au détriment d’une prise en
charge efficiente des patients.
réaffirmer clairement le méde-
cin traitant comme le coordonnateur
des soins de ses patients vis-à-vis de
l’ensemble des autres acteurs du sys-
tème de santé ;
mettre sans délai à sa disposi-
tion les outils indispensables à sa mis-
sion et à sa relation avec les autres
intervenants du système de soins,
notamment :
- une messagerie sécurisée ;
- un dossier médical personnel
pour chaque patient, intégrant pleine-
ment ses préoccupations opération-
nelles et reprenant le volet annuel de
synthèse prévu par la convention du
26 juillet 2011 ;
mettre en place un dispositif
d’évaluation rigoureux des supplé-
ments de rémunération accordés aux
médecins et subordonner toute nou-
velle évolution au constat documenté
de gains d’efficience du système de
soins et d’économies pour l’assurance
maladie ;
faciliter le parcours administra-
tivo-tarifaire de l’assuré, notamment :
- en supprimant l’obligation de
déclarer une nouvelle fois son médecin
traitant en cas de changement de
régime ;
- en étudiant la suppression du
mécanisme des « dépassements autori-
sés » facturables par un spécialiste à
honoraires conventionnels (secteur 1)
à un patient hors parcours de soins
coordonnés ;
- en faisant en sorte que puisse être
proposé à tout patient un parcours de
soins coordonnés en tarifs opposables.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Le médecin traitant et le parcours de soins
coordonnés
20
Cour des comptes
6
Le RSA « activité » :
une prestation peu sollicitée,
un impact restreint
Le RSA « activité » fait partie inté-
grante d’une prestation unique, à portée
plus large, le revenu de solidarité active
(RSA) dont la principale originalité est à
la fois d’assurer un revenu minimum
garanti aux personnes sans emploi et
d’offrir un complément de revenu à
ceux qui travaillent.
La composante « activité » du RSA
porte un projet ambitieux et innovant :
celui de rendre, quelle que soit la durée
du travail, l’emploi toujours plus rému-
nérateur que l’inactivité et de contribuer
ainsi à la lutte contre la pauvreté au tra-
vail.
Mise en place alors même que la
crise économique bouleversait le marché
de l’emploi, cette prestation peine à
remplir les objectifs que la loi lui a fixés.
Les deux tiers des foyers éligi-
bles ne demandent pas le RSA
« activité »
Le non-recours au RSA « activité »,
jugé trop complexe et stigmatisant par le
public susceptible d’en bénéficier, est
deux fois plus important que pour d’au-
tres prestations sociales : alors que la
population éligible était estimée à envi-
ron 1,7 million de foyers, le nombre des
bénéficiaires stagne depuis deux ans en
dessous de 500 000.
Cette situation est à l’origine d’un
surfinancement de la mesure et de l’uti-
lisation à d’autres fins des ressources
extrabudgétaires affectées au fonds
national des solidarités actives (FNSA).
Le RSA « activité » souffre de
plusieurs défauts structurels
importants
Le RSA « activité » poursuit plu-
sieurs objectifs difficilement
compati-
bles entre eux, ce qui aboutit à un com-
promis peu satisfaisant entre une
mesure d’incitation à l’emploi, qui
devrait être plus individuelle, et une
mesure fortement familialisée visant à
compléter le revenu d’activité du
ménage.
L’uniformité de traitement réservée
à des populations différentes au regard
de leur niveau d’insertion dans l’emploi
constitue un facteur important du non
recours à la prestation.
Enfin, les modalités de calcul de la
prestation limitent son incidence sur le
revenu des travailleurs pauvres :
- le barème et le mode de calcul ne
permettent pas toujours aux foyers
bénéficiaires de sortir de la pauvreté ;
- les règles de prise en compte des
prestations familiales pour le calcul de
l’allocation conduisent à exclure les cou-
ples avec plusieurs enfants, pour les-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
21
quels la prime pour l’emploi (PPE)
s’avère plus intéressante et plus simple à
percevoir.
Le défaut d’articulation avec
d’autres aides nuit à son
efficacité
L’articulation est encore insuffisante
avec
certaines
prestations
sociales
(notamment les aides au logement) et
avec les dispositifs d’aides sociales mis
en place par les collectivités locales, ce
qui peut conduire à diminuer significati-
vement les gains à la reprise d’emploi.
Par ailleurs, le maintien d’une
mesure
d’intéressement
permettant
dans un premier temps, de cumuler pen-
dant trois mois le revenu d’activité avec
l’intégralité du RSA « socle », entraîne
lors du versement du RSA « activité »,
une baisse de revenu pour son bénéfi-
ciaire.
Enfin, la coexistence avec d’autres
mesures incitatives et plus particulière-
ment avec la prime pour l’emploi (PPE)
dont l’obtention automatique est beau-
coup plus aisée, joue en défaveur du
RSA « activité ».
Compte tenu de ces défauts, il sem-
ble qu’une embellie du marché de l’em-
ploi et une meilleure information du
public éligible ne sauraient suffire à
améliorer significativement la perfor-
mance de la prestation, si elle ne s’ac-
compagne pas d’une réforme du sys-
tème d’incitation à l’emploi et de son
organisation autour du RSA « activité »
et de la PPE.
Le RSA « activité »
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
22
engager sans délai une étude sur
l’articulation entre le RSA « activité »
et la PPE, avec pour objectif d’organi-
ser la complémentarité entre une pres-
tation sociale (le RSA) incitant les
inactifs à prendre ou à reprendre une
activité et une mesure fiscale (la PPE)
bénéficiant aux actifs
aux revenus
modestes pour encourager leur main-
tien dans l’emploi ;
supprimer la période de cumul
intégral entre RSA « socle » et revenus
d’activité ;
veiller à éviter les effets de seuil
et les situations de perte de revenu lors
de la reprise d’activité en articulant
davantage prestations sociales et dis-
positifs incitatifs et en poursuivant la
réforme des droits connexes ;
replacer
l’accompagnement
social et professionnel au centre du
dispositif et entreprendre à cet effet
une réforme de l’aide personnalisée de
retour à l’emploi (APRE) sur la base
de l’évaluation qui doit être conduite
dès 2013 ;
finaliser l’étude demandée par la
loi du 1er décembre 2008 sur l’éven-
tuel remplacement de l’allocation de
solidarité spécifique (ASS) par le RSA ;
revenir à une gestion plus rigou-
reuse du fonds national des solidarités
actives (FNSA).
Recommandations
Le RSA « activité »
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
23
Cour des comptes
7
L’Inserm et les sciences du
vivant : de nouveaux enjeux
dans un secteur stratégique
La recherche en sciences du vivant,
premier secteur de la recherche en
France, est la première priorité inscrite
dans la stratégie nationale de recherche
et d’innovation (SNRI) pour la période
2009-2012.
A la suite de la loi de programme du
18 avril 2006 pour la recherche, le rôle
des acteurs historiques a évolué et de
nouvelles structures dédiées à la straté-
gie, à la programmation, au financement
ou à l’évaluation ont été créées.
L’affirmation de la place de
l’Inserm
Grâce à la réussite de ses équipes,
l’Inserm a su bénéficier de la croissance
de financement de la recherche par
appels à projets : ses recettes ont aug-
menté de 35 % depuis 2006 et la part
des ressources externes représente près
de 32 % en 2011, contre 22 % en 2006.
Parallèlement, le nombre des publi-
cations de l’Inserm et leur part dans les
publications françaises ont augmenté.
La fonction de valorisation, confiée à la
filiale Inserm Transfert, affiche des
résultats encourageants.
Face à la complexification de l’orga-
nisation de la recherche en sciences du
vivant (création de nouveaux instru-
ments de coopération scientifique et
d’agences de financement autonomes),
un rôle de pilotage et de coordination a
été confié à l’Inserm en 2007. L’institut
a ainsi joué un rôle majeur dans la créa-
tion de l’Alliance pour les Sciences de la
vie et la Santé (AVIESAN) en 2009.
Celle-ci constitue un cadre de coordina-
tion des principaux acteurs publics.
Des difficultés liées aux
réformes récentes
Le dynamisme de l’Inserm pour
obtenir des crédits sur projets a entraîné
une augmentation importante des per-
sonnels recrutés sous contrats de
recherche. Ces contrats à durée détermi-
née (CDD) créent un risque social,
contentieux et financier, puisque 515 de
ces contractuels seraient éligibles à la
titularisation.
La valorisation portée par Inserm
Transfert risque d’être affectée par la
mise en place de sociétés d’accélération
de transfert de technologie (SATT),
financées par le programme des investis-
sements d’avenir.
La répartition des rôles entre
l’AVIESAN et les autres acteurs (État,
opérateurs de recherche, Agence natio-
nale de la recherche (ANR)) n’est pas
assez claire concernant la définition des
priorités stratégiques, la cohérence des
financements accordés avec ces priori-
tés, la programmation des appels à pro-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
24
jets ou encore la coordination opéra-
tionnelle des différents acteurs.
Des problèmes structurels per-
sistent malgré les réformes
Le pilotage des unités mixtes de
recherche, associant plusieurs établisse-
ments, n’a pas significativement pro-
gressé.
La diversité des sources de finance-
ment public et l’absence de vision
consolidée des crédits obèrent toujours
les capacités de pilotage stratégique et
budgétaire du secteur.
Enfin, l’augmentation du budget
consacré aux sciences du vivant reste
relative en comparaison avec les États-
Unis, le Royaume-Uni ou l’Allemagne.
L’Inserm et les sciences du vivant
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
25
clarifier les procédures impli-
quant les différents acteurs de la
recherche en sciences de la vie et de la
santé (ministères, alliance, agence
nationale de la recherche, opérateurs
de recherche) afin d’assurer :
- la définition des priorités straté-
giques de recherche ;
- la programmation des appels à
projets et la cohérence des finance-
ments accordés avec les priorités stra-
tégiques ;
- la coordination opérationnelle
des différents acteurs de recherche ;
préserver la dynamique positive
de valorisation de la recherche biomé-
dicale portée par Inserm Transfert ;
doter l’État d’une vision globale
des moyens publics dédiés à la
recherche dans le secteur des sciences
du vivant ;
définir et mettre en œuvre les
processus et les outils de gestion admi-
nistrative communs pour les unités
mixtes et créer les indicateurs permet-
tant de suivre l’ensemble des moyens
humains et financiers des unités ;
réexaminer les règles attachées
au recrutement et à la gestion des per-
sonnels financés par les contrats de
recherche.
Recommandations
Cour des comptes
26
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
8
Les écoles supérieures de
commerce et de gestion :
un développement à réguler
Les écoles supérieures de commerce
et de gestion
(ESCG), examinées dans
l’enquête de la Cour et des chambres
régionales des comptes, sont des établis-
sements de formation dépendant d’une
chambre de commerce et d’industrie,
reconnues par l’État et habilitées à déli-
vrer un diplôme de master visé par le
ministère de l’enseignement supérieur et
de la recherche.
Ces écoles jouent un rôle important
aux côtés des universités dans le paysage
français de l'enseignement supérieur de
la gestion : au nombre de 29, elles for-
maient, en 2011, plus de 135 000 étu-
diants
et représentaient un tiers des
effectifs des étudiants en gestion de
niveau bac +4 et +5.
Une évolution rendue
nécessaire par la mondialisation
Pour faire face à la concurrence
internationale, le recrutement par ces
écoles de professeurs de haut niveau et
la construction de réseaux à l’étranger se
sont révélés nécessaires. Toutefois, cette
politique accroît les charges des écoles
alors même que les ressources finan-
cières publiques se raréfient. L’effet de
ciseaux qui en résulte a amené les ESCG
à augmenter leurs effectifs étudiants et
les frais de scolarité pour diminuer le
coût de leurs investissements.
Une position internationale
enviable
Dans un marché de la formation en
gestion dominé par les institutions
anglo-saxonnes, les écoles françaises ont
réussi à occuper une position internatio-
nale enviable, qui s'est affirmée au cours
des 20 dernières années. La perfor-
mance à l'international du modèle fran-
çais des grandes écoles de commerce est
confirmée par le classement 2012 du
Financial Times
des meilleurs
masters en
management
dans le monde : sur les cent
premières formations, les ESCG placent
dix-neuf écoles dans les premières, dont
trois dans les cinq premières.
Certaines écoles à la croisée des
chemins
La taille critique des écoles et l’adap-
tation de leurs structures restent un
sérieux défi pour l’avenir de
chaque
école
et,
au-delà,
de
l’enseignement
supérieur
consulaire
français, puis-
qu’elles déterminent l’accès au marché
des formations internationales. Les
ESCG doivent faire des choix straté-
giques de rapprochement avec d’autres
écoles, si elles souhaitent concourir dans
l’élite ou se recentrer sur leur marché
régional et national.
27
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Une nécessaire régulation
Contrairement aux universités pla-
cées sous l’unique tutelle du ministère
de l'enseignement supérieur et de la
recherche (MESR), les ESCG sont sous
la double tutelle du ministère chargé de
l'industrie, pour les aspects financiers à
travers les chambres de commerce et
d’industrie, et celle du MESR pour l’at-
tribution des diplômes.
La Cour regrette que les chambres
de commerce et d’industrie n’aient pas
cherché
à
analyser
et à davantage
contrôler
la
pertinence
du maillage de
leurs écoles, laissant apparemment au
marché le soin d’arbitrer, en l’absence de
mécanismes de régulation.
En 2012, pour parfaire et consolider
la place des ESCG dans l’enseignement
supérieur de la gestion, certains choix
qui relèvent
de la responsabilité de
l’État doivent être faits.
Les écoles supérieurs de commerce et de gestion
engager une réflexion sur le sta-
tut des ESCG et la place des chambres
de commerce et d’industrie et de l’État
dans le dispositif, pour avoir les
moyens financiers de mener des straté-
gies adaptées, tout en donnant plus
d’autonomie aux écoles dans leur gou-
vernance ;
s’assurer que la forte augmenta-
tion des droits de scolarité est compen-
sée par des systèmes de bourses, de
prêts ou d’apprentissage, qui permet-
tent à chaque élève de suivre ces for-
mations en fonction de ses mérites
personnels, quels que soient ses reve-
nus ou ceux de sa famille ;
mieux contrôler les coûts et la
cohérence des choix effectués en
matière d’académisation des études et
d’internationalisation des cursus avec
la taille et le positionnement des écoles
dans l’offre des formations de gestion ;
renforcer l’action de contrôle de
la commission d’évaluation des forma-
tions et diplômes de gestion sur la qua-
lité des diplômes des ESCG, qu’ils
soient délivrés en France ou à l’étran-
ger et sur les obligations des écoles
quant à l’information des étudiants sur
l’appellation des diplômes.
Recommandations
Cour des comptes
28
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
9
Le syndicat mixte des
transports de l’agglomération
toulousaine :
une nécessaire adaptation à la
croissance du réseau
L’agglomération toulousaine con-
naît une croissance démographique de
plus de 20 000 habitants par an en
moyenne et compte aujourd’hui plus de
1,2 millions d’habitants. La saturation du
réseau routier et la hausse constante de
la fréquentation des transports en com-
mun font de la question des déplace-
ments urbains, un enjeu majeur.
L’acteur central de la politique des
transports urbains est le syndicat mixte
des transports en commun (SMTC) de
l’agglomération toulousaine, contrôlé
par la chambre régionale des comptes de
Midi-Pyrénées.
Une organisation
institutionnelle inadaptée
Les règles institutionnelles, notam-
ment celle de l’unanimité, qui régissent
le syndicat mixte entraînent parfois des
blocages du processus décisionnel.
L’adoption du plan de déplacements
urbains a ainsi nécessité près de dix
années de négociations. Enfin, certains
projets structurants prennent du retard
et la coordination des politiques d’urba-
nisation et de transports reste très
imparfaite.
Une exploitation davantage
financée par les contribuables
que par les usagers
Le mode de financement de l’exploi-
tation des transports montre désormais
ses limites. Si, jusqu’à présent, le dyna-
misme du versement transport assurait
une progression régulière des recettes,
cette source de financement tend depuis
2009 à se stabiliser. Or, le financement
du réseau toulousain est caractérisé par
une offre tarifaire qui laisse une large
place à la gratuité puisque plus d’un
voyageur sur trois ne s’acquitte pas de
son titre de transport. En 2010, la gra-
tuité et le nouveau tarif « jeunes » ont
ainsi entraîné un coût de près de 22 M€
annuel pour l’exploitant.
Le financement de l’exploitation
repose donc essentiellement sur les
contribuables, par le biais du versement
de transport et des participations des
collectivités membres du syndicat mixte,
notamment de la communauté urbaine
du Grand Toulouse.
Pourtant, malgré la hausse de la
contribution du Grand Toulouse, qui a
doublé sa participation pour la porter à
80 M€, l’équilibre financier reste pré-
29
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
caire. Le syndicat mixte a même dû user
d’un artifice comptable, en neutralisant
ses amortissements, pour assurer l’équi-
libre de sa section de fonctionnement.
Cette pratique budgétaire constitue
une solution à la fois précaire et hétéro-
doxe. Elle révèle le défaut de stratégie
financière globale du syndicat mixte et
des collectivités membres.
La question du financement de
l’investissement
Déjà fortement endetté par ses
investissements antérieurs, le syndicat
mixte a aujourd’hui une capacité de
financement limitée. Or, pour répondre
à une demande croissante, il s’est fixé
des objectifs d’investissements particu-
lièrement ambitieux mais qui, au regard
des contraintes financières qui pèsent
sur lui, paraissent surdimensionnés à
hauteur de 30 M€ par an.
Il est donc impératif pour le syndi-
cat mixte de redéfinir son pacte finan-
cier, mais aussi de revoir la règle de
l’unanimité, pour envisager une poli-
tique des transports urbains qui puisse
se construire sur le long terme.
Pour le syndicat mixte et toutes les
collectivités territoriales concernées :
formaliser les partenariats entre
les acteurs locaux de l’aménagement
urbain en tenant compte de l’évolution
de la demande potentielle de trans-
port, notamment lors de l’éclosion de
projet d’urbanisation d’ampleur ;
réexaminer
les conditions de
gratuité d’accès au service qui, à
l’heure actuelle, obèrent les possibilités
de croissance des recettes commer-
ciales et ne permettent pas de dégager
un autofinancement suffisant ;
financer les investissements, en
privilégiant l’autofinancement dégagé,
les participations des collectivités-
membres et les subventions de tiers,
compte tenu du niveau d’endettement
actuel, qui a atteint un seuil critique ;
reconsidérer la règle de l’unani-
mité pour améliorer l’efficacité du pro-
cessus de décision interne au syndicat ;
définir un nouveau pacte finan-
cier entre toutes les communes
concernées et, le cas échéant, avec le
département de la Haute-Garonne, en
vue d’assurer au syndicat des perspec-
tives financières durables.
Recommandations
Le syndicat mixte des transports de
l’agglomération toulousaine
Cour des comptes
10
Le projet de tramway d’Artois
Gohelle (Pas-de-Calais) :
un projet insuffisamment réfléchi
Le syndicat mixte des transports
d’Artois Gohelle a décidé, en 2008, la
création d’un transport en commun en
site propre, pour un coût estimé en 2009
à 657 M€ H.T. Ce projet prévoit la réali-
sation simultanée de deux lignes non
connectées entre elles
sur 37 kilomètres,
selon deux axes : Liévin - Lens- Hénin-
Beaumont d’une part, et Beuvry -
Béthune- Bruay-la-Buissière - Houdain,
d’autre part.
Un projet ambigu
Le projet de transport en commun
comporte également un volet de rénova-
tion et de requalification urbaine.
Cette double ambition nourrit une
ambiguïté entretenue par l’insuffisance
de la réflexion préalable et l’absence de
consensus sur la consistance du projet.
Le plan de déplacements urbains adopté
en 2006 ne couvre que le territoire des
communautés fondatrices, à savoir celles
de Lens-Liévin et Hénin-Carvin. Il n’in-
tègre pas les territoires de la commu-
nauté d’agglomération de l’Artois et de
la communauté de communes de Noeux
et Environs, devenues adhérentes du
syndicat mixte en 2006.
Quant à la dimension aménagement
urbain, elle échappe totalement à la
compétence du syndicat, limitée aux
transports.
La définition du projet est labo-
rieuse. La nécessité d’un choix entre
l’option technique, voie unique et voie
double, apparait tardivement. Le
tracé
de la ligne n° 1 n’est arrêté qu’en avril
2011 ; mais il est, dans le même temps,
remis en cause par l’hypothèse d’un
abandon du projet, conséquence de l’ab-
sence de consensus.
Un financement incertain
Fondée sur des premières études
sommaires, l’évaluation des dépenses
apparaît sous-estimée.
L’accumulation des retards a
com-
promis la subvention de l’État de
57,6 M€ obtenue dans le cadre du
« Grenelle de l’environnement ». Le
financement du projet repose également
sur une augmentation du versement de
transport, dont le taux a été porté
en
juillet 2010 à 1,80 %. Si les travaux ne
commencent pas avant le 1
er
juillet
2013, ce taux sera réduit à 1,05 %. Cette
taxe sur les entreprises est strictement
réservée aux transports urbains de voya-
geurs. Elle ne peut
financer, même par-
tiellement, les aménagements urbains.
Or le plan de financement du projet ne
distingue pas le financement de ces amé-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
30
Le projet de tramway d’Artois Gohelle
(Pas-de-Calais)
nagements et ne prévoit aucune partici-
pation des collectivités concernées à ce
titre.
Une maîtrise d’ouvrage
incompétente
Insuffisamment doté en personnels
qualifiés en matière de transports
urbains, le syndicat a délégué la maîtrise
d’ouvrage en confiant la réalisation du
projet à un mandataire, dans les condi-
tions prévues la loi du 12 juillet 1985
relative à la maîtrise d’ouvrage publique.
A l’issue d’une procédure de sélec-
tion, dont les modalités apparaissent cri-
tiquables au regard des principes de
transparence et d’égalité qui régissent la
commande publique, le choix s’est porté
sur une société d’économie mixte
(SEM) régionale, spécialiste des opéra-
tions d’aménagement et de construction
mais incompétente en matière de trans-
ports publics.
Aussi
cette
dernière
s’est-elle
adjointe un sous-traitant spécialisé dans
ce domaine, dans des conditions irrégu-
lières au regard de la loi relative à la maî-
trise d’ouvrage publique. La définition
imprécise des prestations sous-traitées a
pour effet la mise en place d’un pilotage
bicéphale de l’opération, source de
confusion.
A ce jour, cette opération paraît être
dans une impasse et pourrait être totale-
ment ou partiellement remise en cause.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
31
Le projet de tramway d’Artois Gohelle
(Pas-de-Calais)
32
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
adapter les compétences tech-
niques administratives et financières du
syndicat
à la conception et au suivi
d’un projet aussi conséquent ;
élaborer dans les meilleurs délais
un plan de déplacements urbains cou-
vrant la totalité du périmètre des trans-
ports urbains relevant du syndicat.
insérer la définition du projet
de
transport en commun en site propre, et
notamment le tracé des lignes de tram-
way, dans une réflexion d’ensemble
intégrant celle des diverses autorités
organisatrices de transports environ-
nantes dont la région et le départe-
ment, de façon à assurer la cohérence
et la complémentarité des modes de
transports urbains et interurbains ;
veiller à une utilisation du pro-
duit du versement transport conforme
à sa destination légale ce qui induit
notamment la mobilisation des finan-
cements communaux ou intercommu-
naux pour les travaux excédant le strict
domaine des transports urbains.
Par ailleurs, il serait souhaitable
que soient précisées les conditions de
mise en œuvre
de la majoration du
taux du versement transport autorisée
par
les
dispositions
de
l’article
L. 2333-67 du CGCT
lorsque la popu-
lation de la commune ou de l'établisse-
ment public de coopération est supé-
rieure à 100 000 habitants et que l'auto-
rité
organisatrice
des
transports
urbains a décidé de réaliser une infra-
structure de transport collectif en
mode routier ou guidé.
En effet, il convient d’éviter que
l’insuffisante maturité du projet n’en-
traine une mobilisation trop prématu-
rée ou inutile de cette ressource fiscale
supplémentaire.
Recommandations
33
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
11
La participation des collectivités
territoriales au financement de la
ligne à grande vitesse Est (LGV
Est) : des contreparties coûteuses,
une gare de trop
La ligne à grande vitesse Est (LGV
Est) inaugurée en juin 2007, reliera Paris
à Strasbourg sur 406 km à l’achèvement
des travaux en mars 2016, continuera en
Allemagne. Des trains de la compagnie
allemande Deutsche Bahn y circulent
d’ores et déjà, comme ceux de la SNCF.
Si le trafic voyageurs est supérieur aux
prévisions - 13 millions en 2011 -, l’im-
pact économique pour les collectivités
territoriales reste encore à mesurer.
Un montage financier
complexe
Le financement des travaux de
construction de la LGV Est, scindés en
deux phases pour ne pas retarder l’ou-
verture de la ligne, présente un caractère
novateur : l’État, premier financeur, est
associé aux collectivités territoriales,
deuxième source de financement, et à
Réseau Ferré de France (RFF), ainsi que
l’Union européenne et le Grand Duché
de Luxembourg.
Le plan de financement a été long à
mettre en place en raison du nombre
important de collectivités concernées,
soit seize dans les régions Champagne-
Ardenne, Lorraine et Alsace, auxquelles
s’ajoutait la région Île-de-France.
La recherche des cofinancements et
la compétition entre les collectivités
pour l’accès au TGV ont fragilisé le pilo-
tage du projet.
Des choix d’investissements cri-
tiquables
Le choix de l’implantation de la gare
Lorraine TGV a fait l’objet de négocia-
tions difficiles. Dès l’origine, il était
prévu qu’elle soit implantée entre Nancy
et Metz. Le site de Cheminot-Louvigny
a ainsi été retenu. Or la gare qui y est
implantée ne dispose d’aucune intercon-
nexion avec la ligne TER Nancy-Metz.
Malgré ce choix, le projet d’implanter
une autre gare à Vandières, mieux des-
servie, n’a pas été abandonné ; le finan-
cement n’est toutefois pas encore défini.
Si le projet allait jusqu’à son terme, on
aboutirait ainsi à la construction de deux
gares TGV, situées à moins de 20 kilo-
mètres l’une de l’autre, pour un coût
total de 156 M€.
Des déficits d’exploitation à la
charge des collectivités
La demande de dessertes directes
régulières, par le TGV, de gares non
situées sur la ligne à grande vitesse a
La participation des collectivités territoriales au
financement de la ligne à grande vitesse Est
(LGV Est)
34
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Pour l’État et RFF :
veiller, en recherchant les cofi-
nancements de collectivités territo-
riales pour des grandes infrastructures
de transport, à préserver la logique du
projet, l’optimisation du tracé de la
ligne à grande vitesse et l’équilibre de
son exploitation future ;
suspendre l’exécution des tra-
vaux de la gare de Vandières jusqu’au
moment où l’évolution du trafic assu-
rera la rentabilité socio-économique
du projet ;
Pour les collectivités territoriales :
limiter, en cas de cofinance-
ment, le nombre des collectivités par-
ticipantes ; privilégier et confier le rôle
de chef de file à la région ;
éclairer la participation finan-
cière des collectivités par des évalua-
tions préalables portant sur les choix
des tracés de la ligne et sur les des-
sertes, complétant les évaluations glo-
bales effectuées par RFF.
Pour l’Etat, RFF et les collectivités
territoriales :
exclure l’implantation de gares
TGV en rase campagne sans intercon-
nexion avec le réseau de transport
régional ;
Pour la SNCF et RFF :
fournir une meilleure informa-
tion aux collectivités territoriales sur
les résultats du trafic, éventuellement
assortie d’une clause de confidentia-
lité.
Recommandations
également conduit les collectivités
concernées à financer les déficits d’ex-
ploitation correspondants, alors que la
pérennité de certaines d’entre elles, n’est
toujours pas assurée.
L’incertitude sur les
retombées économiques
Les retombées économiques pour
les collectivités territoriales concernées
apparaissent
encore
incertaines.
Certaines collectivités ont toutefois pro-
cédé, auprès des gares desservies par le
TGV, à d’importants aménagements
urbains, en constuisant notamment des
immeubles de bureau ou des com-
merces. Les projets qu’elles ont cofinan-
cés, qu’il s’agisse de la ligne à grande
vitesse ou des dessertes, n’ont, par ail-
leurs, pas fait l’objet d’évaluations a
priori ou de bilans a posteriori. Ces éva-
luations sont, en outre, handicapées par
la réticence de la SNCF à fournir des
données précises sur les trafics, pour des
raisons de secret commercial.
35
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
12
La gestion des ports de
pêche en Bretagne :
un pilotage régional à
renforcer
Bien qu’elle représente encore 46 %
de la valeur des produits de la mer com-
mercialisés sous les halles à marée en
France en 2011, la pêche bretonne
connaît un déclin important avec
notamment la disparition de la moitié
des navires et des marins-pêcheurs
depuis 20 ans.
Une exploitation des ports de
pêche adaptée à un contexte
de crise
Face à un contexte de crise aigu, les
exploitants ont développé de nouveaux
services comme la vente à distance par
Internet
qui
permet
d’élargir
la
demande, ou l’aide au transport pour
approvisionner certaines halles à marée
avec du poisson débarqué dans d’autres
ports. Des moyens humains ou tech-
niques ont aussi parfois été mutualisés.
Toutefois,
l’offre
portuaire
paraît
aujourd’hui surdimensionnée dans cer-
taines zones du littoral.
La redevance d’équipement des
ports de pêche (REPP) constitue la prin-
cipale recette d’exploitation des conces-
sionnaires. La réglementation qui la régit
est sujette à interprétation générant des
tensions entre les ports. Ainsi, la REPP
bénéficie prioritairement aux ports de
débarquement, et non à ceux disposant
de halles à marée où se concentre la
majeure partie des services à la charge
des exploitants.
Des investissements financés
largement par des aides
publiques
Certains ports, notamment sur la
côte nord de la Bretagne, ont réalisé des
travaux d’extension pour améliorer les
conditions de prise en charge des
navires et permettre l’accueil de bateaux
supplémentaires. D’autres ports ont
effectué des travaux de mise aux normes
sanitaires et environnementales impor-
tants pour pérenniser l’activité, notam-
ment dans le sud de la Bretagne.
Le financement de ces investisse-
ments n’est assuré que grâce à des sub-
ventions importantes, qui peuvent
représenter jusqu’à 80 % du coût de
l’équipement.
Des contrats de concession
inadaptés
Les contrats de concession, souvent
anciens, ne sont ni adaptés ni entière-
ment respectés. Les concessionnaires
sont ainsi responsables du choix et de la
maîtrise d’ouvrage des investissements
alors qu’ils ne les financent parfois que
La gestion des ports de pêche en Bretagne
36
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
très partiellement. Lors du renouvelle-
ment des contrats actuels, les concé-
dants pourraient conserver la responsa-
bilité de la maîtrise d’ouvrage des inves-
tissements structurants.
Des relations entre collectivités
territoriales à revoir
Les compétences des différents
niveaux de collectivités territoriales
mériteraient d’être précisées. Trois des
ports de pêche bretons disposant d’une
halle à marée appartiennent à la région
(Saint-Malo, Lorient et Brest), les autres
sont la propriété des départements. Ce
partage de compétences entre ces deux
niveaux de collectivités ne favorise pas
toujours la cohérence et la pertinence
des investissements portuaires à l’échelle
de la région.
Pour la gestion des ports de pêche
en Bretagne :
poursuivre les efforts de rationa-
lisation de l’offre portuaire, notam-
ment en Cornouaille ;
mutualiser les bonnes pratiques
à l’ensemble des ports ;
appliquer une politique uni-
forme en matière de redevances ;
mieux définir les modalités
comptables de clôture des concessions
afin de sécuriser la gestion actuelle des
concessionnaires ;
mieux définir les rôles respectifs
des délégants et des délégataires, dans
la réalisation des investissements, en
privilégiant l’affermage pour les pro-
chaines délégations de service public ;
renforcer le rôle de la région
Bretagne dans le choix des investisse-
ments portuaires en prévoyant l’établis-
sement d’un plan régional d’équipe-
ment des ports de pêche contractualisé
entre les départements et la région qui
fixerait la liste et la localisation des
investissements à réaliser ;
Pour l’État et la politique nationale
de gestion des ports de pêche :
revoir la réglementation de la
redevance d’équipement des ports de
pêche pour prendre en compte les nou-
velles pratiques des armateurs ;
harmoniser la fiscalité applicable
aux ports de pêche ;
examiner la possibilité de modi-
fier la répartition de la compétence
relative à la gestion des ports de pêche
entre collectivités territoriales, en ren-
forçant le rôle de pilotage de la région.
Recommandations
37
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
13
Le soutien de l’État aux
débitants de tabac :
des aides injustifiées
Le soutien financier de l’État aux
débitants de tabac est ancien. La mise en
place des contrats d’avenir à partir de
2004 l’a sensiblement renforcé. Ces
aides, conçues pour soutenir une profes-
sion que l’on estimait alors fragilisée par
la hausse des prix du tabac, se sont révé-
lées injustifiées et coûteuses. Sous une
apparence de rupture, le contrat d’avenir
en cours (2012-2016) perpétue cette
situation. Une remise en cause rapide et
complète de ce dispositif est donc impé-
rative.
Les aides à la profession : des
« contrats d’avenir » venus
s’ajouter aux aides tradition-
nelles
Le soutien de l’État aux débitants de
tabac est ancien. Celui-ci finance ainsi à
hauteur des deux-tiers leur régime de
retraite supplémentaire institué en 1963,
et subventionne notamment la sécurisa-
tion de leurs locaux depuis 1995.
Les contrats d’avenir signés entre
l’État et les débitants sont venus s’ajou-
ter à ces aides traditionnelles à compter
de 2004. Le premier contrat (2004-2007)
avait pour objet principal de compenser
les pertes de rémunération que l’on pré-
sumait devoir résulter de la baisse des
achats sur le marché réglementé, à la
suite de la hausse des prix décidée par
les pouvoirs publics à des fins de santé
publique.
Le montant total du soutien en
faveur de la profession s’est élevé à
2,6 Md€ entre le 1er janvier 2004 et fin
2011 (1,4 Md€ pour la période corres-
pondant au premier contrat et 1,2 Md€
pour celle correspondant au deuxième),
soit en moyenne un peu plus de 300 M€
par an.
Des aides injustifiées, à
l’origine d’effets d’aubaine
massifs
Contrairement aux anticipations
pessimistes initiales, la hausse du prix du
tabac entre 2002 et 2003 a contribué à
augmenter, pour les débitants, le chiffre
d’affaires moyen
lié au tabac. En effet,
si le volume des ventes a reculé de 30 %,
passant de 90 000 tonnes par an au
début des années 2000 à 65 000 tonnes
à partir de 2004, les ventes TTC ont
progressé en valeur de plus de 20 %
entre 2002 et 2011, de 14,7 Md€ à
17,8 Md€.
La rémunération moyenne des débi-
tants a ainsi connu une forte progres-
sion, amplifiée par la baisse, ancienne,
du nombre de débits de tabac. Hors
aides directes de l’État, la rémunération
38
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
a progressé de 53,9 % entre 2002 et
2011, passant de 29 070 € à 44 725 €.
Avec les aides, la progression a été de
67,1 % (29 070 € à 48 564 €).
Si l’on excepte certains débitants
situés dans certaines zones frontalières
qui sont confrontées à une concurrence
difficile, du fait des prix du tabac prati-
qués en France, généralement supérieurs
aux prix étrangers, la majorité des bura-
listes ont bénéficié d’aides alors même
que leur chiffre d’affaire lié au tabac ne
reculait pas.
Cette situation s’explique par l’ab-
sence de ciblage du dispositif mis en
place par l’administration qui a privilégié
des aides universelles, c’est-à-dire béné-
ficiant à l’ensemble des débitants quelle
que soit l’évolution de leur situation,
plutôt qu’une aide accordée temporaire-
ment aux seuls débitants subissant une
forte chute de leur activité suite au relè-
vement des prix du tabac.
Le contrat en cours : une
rupture plus apparente que
réelle
Le contrat en cours (2012-2016)
prévoit un meilleur ciblage du soutien et
une forte diminution des aides budgé-
taires, avec notamment l’extinction pro-
gressive de la remise additionnelle.
Toutefois, parallèlement à ces mesures,
la hausse du taux de la remise nette, qui
progressera de 6,5 % à 6,9 % et déga-
gera un gain cumulé pour les débitants
d’environ 260 M€, devrait permettre de
compenser intégralement le repli des
subventions budgétaires.
La rupture affichée est donc plus
apparente que réelle. En effet, si l’effort
consenti par la collectivité en faveur des
débitants de tabac passera moins à l’ave-
nir par le versement d’aides budgétaires,
il restera globalement du même ordre
que dans les contrats précédents. Il
affectera bien les finances publiques
puisqu’en consentant une hausse de la
remise nette, supportée par les fabri-
cants, l’État s’est privé, à marge inchan-
gée pour ces derniers, de la possibilité de
prélever des recettes fiscales supplémen-
taires. En outre, le dispositif est encore
moins ciblé qu’auparavant : compte tenu
du caractère proportionnel de la remise
nette par rapport au chiffre d’affaires,
cette mesure bénéficiera de façon accrue
aux débitants aisés.
Le soutien de l’Etat aux débitants de tabac
Le soutien de l’Etat aux débitants de tabac
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
39
Recommandations
procéder à une remise en cause
rapide et complète des mesures arrê-
tées début 2012 sous l’appellation de
« contrat d’avenir 2012-2016 » ;
ne laisser subsister que les aides
structurelles (indemnité de fin d’acti-
vité, subvention de sécurité, prime de
service public) destinées à moderniser
le réseau et à renforcer la sécurité des
débitants ;
maintenir,
pour
les
quatre
années à venir, le taux de la remise
nette au niveau atteint le 1
er
janvier
2012 ;
mettre en place, après concerta-
tion avec la profession, un mécanisme
dégressif appliqué à la remise nette, en
fonction des niveaux de chiffre d’af-
faires.
40
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
14
Le plan d’aide à la presse
écrite 2009-2011 :
une occasion de réforme
manquée
A la suite des états généraux de la
presse écrite de 2008, le Président de la
République a annoncé un plan d’aide
très important pour la période 2009-
2011 : 450 M€ de dépenses budgétaires
supplémentaires
pendant
les
trois
années, 5 Md€ en tenant compte du
coût cumulé des aides budgétaires
directes et des mesures fiscales sur la
même période.
Les pouvoirs publics ont toutefois
lancé ce plan sans disposer d’un diag-
nostic préalable qui aurait identifié les
soutiens les plus efficaces.
La prédominance des mesures
d’urgence au détriment des
mesures structurelles
L’adoption d’un moratoire sur les
tarifs du transport postal, dont le coût
budgétaire est évalué pour 2013 à
32 M€, a contribué à retarder le dévelop-
pement du portage de la presse quoti-
dienne, soutenu par l’État au titre des
mesures structurelles.
Par ailleurs, la forte hausse de l’aide
à la distribution de la presse quotidienne
nationale d’information politique et
générale (74 M€ d’aide de 2009 à 2011)
et les mesures exceptionnelles en faveur
des distributeurs de la presse (62,6 M€
sur la même période) n’ont pas amélioré
la situation économique des deux princi-
paux acteurs de la distribution de la
presse : la messagerie de presse
Presstalis et les points de vente.
Les aides à la modernisation se sont
portées sur les imprimeries alors que le
développement de l’Internet aurait dû
constituer un axe stratégique privilégié.
L’aide à la modernisation sociale de la
presse s’est avérée particulièrement coû-
teuse, avec notamment un coût moyen
de plus de 150 000 € par bénéficiaire du
plan « Imprime ».
Un renforcement trop tardif du
pilotage ministériel
Les procédures et les structures
dont s’est pourvu le ministère de la cul-
ture et de la communication pour
conduire plus efficacement sa politique
d’aide à la presse n’ont été mises en
place qu’après l’achèvement du plan
d’aide. Les mesures prévues par le
décret du 13 avril 2012 vont dans la
bonne direction mais leurs modalités de
mise en œuvre ne sont pas encore fixées.
La démarche de contractualisation
pluriannuelle engagée avec les entre-
prises de presse dépendra de la fixation
d’objectifs précis à l’appui du soutien
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
41
financier de l’État, ainsi que d’un suivi
effectif des conventions.
En matière d’information budgé-
taire, des avancées ont été réalisées. Mais
la transparence passe désormais par une
information plus complète sur le mon-
tant des aides consenties aux éditeurs et
titres de presse.
Il est enfin urgent de finaliser le
cadre méthodologique et opérationnel
des dispositifs de contrôle et d’évalua-
tion.
Une réduction trop timide du
coût des aides
Les crédits ouverts en 2012 au titre
des aides à la presse ont diminué de
10 % par rapport à 2011, mais des rigi-
dités retardent le retour au niveau des
dépenses publiques, constaté avant la
mise en œuvre du plan triennal 2009-
2011.
La programmation triennale 2013-
2015 prévoit une diminution de l’ordre
de 13 % des crédits budgétaires consa-
crés à la presse écrite, sans s’appuyer sur
une réforme des dispositifs, seule à
même de dégager de réelles marges de
manœuvre.
Une stratégie d’intervention de
l’État à refonder
Une approche plus sélective et une
plus forte concentration des moyens sur
les objectifs fondamentaux de la poli-
tique d’aide à la presse sont désormais
impératives.
Le développement de la diffusion
doit conduire à mettre en cohérence les
nombreux dispositifs existants et à éla-
borer des outils de pilotage global d’ici
2015, date à laquelle les accords relatifs
à l’aide au transport postal viendront à
échéance.
La
préservation
du
pluralisme
implique une réflexion sur le périmètre
d’application des tarifs postaux préfé-
rentiels et le taux de TVA « super
réduit » à 2,1 %, afin de mieux prendre
en compte la situation propre à chaque
famille de presse au regard de cet objec-
tif.
Enfin, pour la modernisation du
secteur de la presse écrite, les interven-
tions du fonds stratégique créé en 2012
doivent être orientées sur les projets
innovants et la presse d’information
politique et générale.
Le plan d’aide à la presse écrite 2009-2011
Le plan d’aide à la presse écrite 2009-2011
Recommandations
Concernant la gouvernance et le
pilotage des aides :
mettre en œuvre de façon effec-
tive la contractualisation avec les entre-
prises bénéficiant de subventions ;
publier le montant annuel des
aides accordées à chaque titre de
presse ;
systématiser
les
procédures
d’évaluation et de contrôle et améliorer
la cohérence du dispositif.
Concernant la stratégie d’interven-
tion de l’État :
accompagner la baisse program-
mée des aides publiques d’une réflexion
globale visant à :
- mettre en cohérence les diffé-
rentes aides à la diffusion d’ici 2015 ;
- accentuer leur ciblage en faveur
des familles de presse présentant des
enjeux en termes de pluralisme ;
- recentrer les aides à la modernisa-
tion sur les projets innovants.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
42
43
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
15
Les achats de maintenance
du ministère de la défense :
un fort potentiel
d’économies
Le ministère de la défense est le pre-
mier acheteur de l’État. Il apporte tous
les ans
environ 13 Md€ aux entreprises
du secteur marchand, pour acheter des
biens et services courants, et surtout,
des équipements militaires et des presta-
tions de maintenance de ses équipe-
ments militaires.
Les achats relatifs à la maintenance
des équipements, en augmentation
constante,
représentent environ 3 Md€
de crédits de paiement chaque année. La
performance des services chargés de ces
achats est donc essentielle pour que les
armées disposent d’un bon niveau d’en-
tretien de leurs équipements au meilleur
coût possible.
Un acheteur sous contraintes
Trois services à vocation interar-
mées achètent, pour le compte des
armées, les prestations de maintenance
de matériels : le service de maintenance
aéronautique (SIMMAD), le service du
soutien de la Flotte (SSF), et le service
de maintenance des matériels terrestres
(SIMMT). En 2011, ils ont respective-
ment consommé 1,95 Md€, 630 M€ et
460 M€ de crédit.
Dans ces services,
les marchés aux
enjeux financiers et techniques les plus
forts sont passés auprès d’un nombre
limité d’entreprises sans mise en concur-
rence, celles-ci étant fournisseurs exclu-
sifs ou en situation de monopole. En
outre, le positionnement de l’État est
parfois ambigu : souvent présent au
capital de ces sociétés comme action-
naire minoritaire ou majoritaire, il ne
peut
se désintéresser de l’impact en
termes d’industries ou d’emplois de ses
décisions d’achats.
Des acheteurs professionnels
trop peu nombreux
Bien que le ministère de la défense
affirme sa volonté d’obtenir des écono-
mies significatives dans ce domaine où
les coûts dérivent alors que la contrainte
budgétaire est de plus en plus forte, il
n’en tire pas les conséquences en termes
d’organisation et de procédures qui lui
permettraient d’améliorer sa perfor-
mance.
Les effectifs et la qualification des
acheteurs professionnels sont ainsi
insuffisants, en particulier au service de
maintenance aéronautique, la SIMMAD,
où le très faible nombre d’acheteurs pro-
fessionnels est inadapté aux enjeux
financiers et opérationnels des achats.
Le ministère de la défense ne consacre
pas plus d’effectifs d’acheteurs pour ces
achats cruciaux en termes de consom-
mation de ressources budgétaires (plus
Cour des comptes
de 2 Md€ par an),
et de conséquences
opérationnelles, que pour les achats cou-
rants (gardiennage, entretien, fluides)
d’une base de défense, qui ne représen-
tent que quelques millions d’euros.
Une mise en oeuvre limitée des
prérogatives d’enquête
L’État utilise insuffisamment les dis-
positions du code des marchés publics
qui lui permettent, lorsque la concur-
rence est faible ou nulle, d’enquêter sur
les coûts et les marges de ses fournis-
seurs.
Cette compétence est confiée à une
division des enquêtes de coûts placée
auprès de la direction centrale des achats
de la direction générale à l’armement du
ministère de la défense. Le rôle qu’elle
devrait jouer pour améliorer les condi-
tions de négociation entre le ministère
de la défense et ses fournisseurs en
situation de monopole est altéré par le
fait qu’elle ne décide pas de son pro-
gramme d’enquêtes, et que les services
de maintenance, qui dépendent des
états-majors, ne peuvent pas y recourir
directement.
Par comparaison avec le Royaume-
Uni et l’Allemagne, ce service d’enquête
a peu d’effectifs. Ses pouvoirs d’investi-
gation sont limités à des phases de mar-
ché achevés, et il n’est pas toujours en
mesure de faire respecter leurs obliga-
tions de transparence aux entreprises
fournisseurs. Enfin, les résultats d’en-
quête sont utilisés à la discrétion des ser-
vices acheteurs. Dès lors, les négocia-
tions ne sont pas menées dans de
bonnes conditions.
Une négociation tardive de la
maintenance des nouveaux
programmes
Lorsque le ministère de la défense
acquiert un matériel militaire nouveau,
il en estime le coût de possession sur
toute sa durée de vie
y compris la main-
tenance. Cette estimation est, depuis
2010, systématique, ce qui constitue un
progrès notable par rapport aux pra-
tiques antérieures. Toutefois, les mar-
chés de maintenance restent partagés
entre ceux relevant de la phase initiale de
mise en service négociés par la DGA, et
les marchés d’entretien négociés par les
services
de
maintenance.
Cette
deuxième négociation intervient alors
que toutes les composantes du marché
d’équipement ont été déjà définies, fré-
quemment sans mise en concurrence.
Les industriels-fournisseurs assurant la
maintenance sont alors en situation de
force pour obtenir les prix les plus éle-
vés possibles.
Le ministère de la défense devrait
associer très en amont les services de
maintenance à la définition des équipe-
ments et aux négociations avec les
industriels, et chercher à obtenir des
engagements de l’industriel sur le coût
futur de la maintenance tout en veillant
à une certaine flexibilité, pour tenir
compte de l’évolution de ces coûts et de
l’emploi
effectif des matériels.
Les achats de maintenance du ministère de la
défense
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
44
45
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
renforcer et professionnaliser
les effectifs d’acheteurs des services
des armées chargés de la maintenance
en priorité au sein de la maintenance
des matériels aéronautiques (SIM-
MAD) ;
renforcer les pouvoirs des
enquêteurs de la division des enquêtes
de coûts de la DGA, en modifiant les
dispositions réglementaires qui limi-
tent leurs pouvoirs d’enquêtes a priori,
afin que les acheteurs étatiques puis-
sent apprécier le caractère raisonnable
des marges des contrats conclus avec
des fournisseurs en situation de mono-
pole ;
rattacher
la
division
des
enquêtes de coûts directement au délé-
gué général à l’armement ;
accroître, au sein du ministère,
les mécanismes de contrôle ou de
contre-expertise sur les pratiques des
services acheteurs afin d’éviter une
concentration excessive des fonctions ;
donner toute leur place aux ser-
vices de maintenance dans la défini-
tion des coûts prévisionnels de posses-
sion à tous les stades de développe-
ment d’un programme d’armement ;
anticiper, dès l’acquisition des
équipements militaires, une partie de la
négociation sur les coûts de mainte-
nance prévisionnels futurs, avec les
industriels fournisseurs.
Sur la base d’un examen d’un
échantillon d’enquêtes de coût, la Cour
estime que des économies de l’ordre
de 10 % du total des achats de presta-
tions de maintenance annuel, soit
300 M€,
devraient
pouvoir
être
atteintes pour les contrats de mainte-
nance futurs du ministère de la défense
si ces mesures sont mises en œuvre.
Les achats de maintenance du ministère de la
défense
16
La délivrance des visas et
des titres de séjour :
une modernisation à
accélérer et des
simplifications à poursuivre
Un cadre juridique complexe
Depuis 1945, les lois relatives à l’en-
trée et au séjour des étrangers ont
été
amendées trente-six fois. Le droit com-
munautaire a évolué : la plupart des visas
de court séjour sont désormais de type
« Schengen ». Les titres sont variés :
cartes de séjour d’un an, cartes de rési-
dent de dix ans, cartes « compétences et
talents », etc. En 2009, une simplifica-
tion notable a été introduite par la créa-
tion du visa de long séjour.
Des moyens accrus pour une
activité globalement stable
La délivrance de ces titres mobilise
des moyens du ministère de l’intérieur,
de celui des affaires étrangères et de l’of-
fice français de l’immigration et de l’in-
tégration (OFII).
Les consulats recourent, aujourd’hui
pour 60 % des visas accordés, à des
prestataires rémunérés par les deman-
deurs, qui emploient quelques 700 per-
sonnes. Malgré cette externalisation, les
moyens humains des consulats ont été
pratiquement maintenus. Ceux des pré-
fectures ont augmenté, alors que les
volumes traités ont peu varié : les
demandes de visas sont passées de
2 411 000 en 2005 à 2 431 000 en 2011
(+1 %), les visas délivrés de 2 053 000 à
2 153 000 (+ 5 %) ; les titres de séjour
définitifs délivrés par les préfectures
sont, eux, restés à peu près constants :
de 846 000 en 2006 à 849 000 en 2010,
avec un ressaut conjoncturel en 2011
(935 000).
Le coût total de la délivrance des
visas a été, en 2011, d’environ 54,3 M€
(dont 42 M€ de personnel), soit 22 € par
visa délivré. Les recettes encaissées par
l’État se sont élevées à 116 M€, soit 54 €
par visa délivré.
Le coût total de la délivrance des
titres de séjour, provisoires et définitifs,
a été, en 2011, d’environ 121,5 M€ (dont
82 M€ de personnel), soit 120 € par titre
définitif délivré. Il a été couvert par les
droits acquittés par les demandeurs.
Les résultats encore peu tangi-
bles de l’unification du
pilotage
Le secrétariat général à l’immigra-
tion et à l’intégration (SGII) créé en
2007 et aujourd’hui placé sous l’autorité
du ministre de l’intérieur est à la fois un
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
46
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
47
La délivrance des visas et des titres de séjour
donneur d’ordres, un animateur et un
coordinateur des préfectures et des
consulats afin notamment d’accroître les
échanges d’expérience. Mais tous les
effets bénéfiques escomptés n’ont pas
encore été retirés de cette réorganisa-
tion.
Ainsi, les applications informatiques
des ministères de l’intérieur et des
affaires étrangères, anciennes, ne per-
mettent toujours pas le partage de don-
nées. Les services de prise de rendez-
vous existants ne sont pas performants.
Le recueil des statistiques manque de
fiabilité. Le projet du ministère de l’inté-
rieur accuse un retard de plus de deux
ans et celui du ministère des affaires
étrangères n’est pas inscrit au budget
triennal 2013-2015.
La lutte contre la fraude documen-
taire est encore insuffisamment coor-
donnée et les services sont inégalement
actifs. La clarification des compétences
opérée en 2012 au niveau de l’adminis-
tration centrale reste partielle.
Deux dispositifs de prévention de la
fraude - le « contrôle au retour » dans le
pays d’origine et l’obligation faite aux
employeurs de vérifier la validité de cer-
taines autorisations de travail - devraient
particulièrement être évalués.
Le difficile parcours du deman-
deur de titre de séjour
Dans les préfectures les plus sollici-
tées, de longues files d’attente condui-
sent à des tensions, quelquefois à des
systèmes parallèles d’échange de places à
titre onéreux. Les préfectures délivrent
en moyenne 1,4 million de documents
provisoires par an. Ce nombre impor-
tant contribue à engorger les guichets et
témoigne de défauts d’organisation, qui
mettent en cause l’égalité de traitement
entre usagers.
L’instruction et la délivrance sont,
dans certains cas, dispersées, en particu-
lier entre préfecture et sous-préfectures.
Plusieurs mairies et commissariats
recueillent encore les demandes ou
remettent les titres.
Pour réduire les risques d’inégalité
de traitement, l’administration centrale a
diffusé en 2011 un guide de l’agent d’ac-
cueil qui rassemble les textes antérieure-
ment épars et incite à la modernisation
et à la simplification des services et de
l’accueil du public.
Les « bonnes pratiques » ne sont pas
systématiquement diffusées. Certains
sites Internet sont incomplets ; plusieurs
préfectures ne vendent pas les timbres
fiscaux nécessaires, sans en aviser les
demandeurs.
Les simplifications doivent se pour-
suivre. Par exemple, les demandes de
regroupement familial sont désormais à
adresser au seul OFII mais le nombre
excessif des acteurs de l’instruction, qui
allonge les délais, n’a pas été réduit.
En conclusion, sur la période 2006-
2011, les moyens se sont globalement
accrus alors que le nombre de demandes
a peu évolué. De nouvelles pistes de
simplification des procédures devraient
être explorées.
La coordination et les échanges d’in-
formation entre les préfectures, les
postes consulaires, l’OFII et les services
de police et de gendarmerie ont pro-
gressé mais le SGII n’assure pas pleine-
ment son rôle de pilotage, notamment
pour la modernisation des systèmes
d’information et la lutte contre la fraude
documentaire.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La délivrance des visas et des titres de séjour
48
garantir le respect du droit :
- remédier à certaines différences
d’interprétation de la loi fiscale ;
- rappeler les préfectures au res-
pect de l’obligation de comparution
physique quand elle est prévue par le
code de l’entrée et du séjour des étran-
gers et du droit d’asile ;
- supprimer les attestations de
dépôt non prévues par ce code ;
faciliter le travail de l’adminis-
tration et le parcours de l’usager :
- limiter le nombre de services ins-
tructeurs d’une même demande ;
- développer la dématérialisation,
les téléprocédures et la mise à jour
électronique des titres ;
- évaluer l’efficacité du « contrôle
au retour » et de l’obligation faite aux
employeurs de vérifier la situation des
salariés étrangers ;
mieux coordonner les réseaux :
- moderniser les systèmes d’infor-
mation en facilitant les échanges de
données et le recueil des statistiques ;
- désigner un correspondant inter-
ministériel unique chargé de la lutte
contre la fraude documentaire ;
- développer l’échange de bonnes
pratiques au sein des réseaux et entre
ceux-ci.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
49
Cour des comptes
17
La direction générale de
l’aviation civile :
une action sociale
généreuse et coûteuse
L’action sociale dans la fonction
publique, consacrée par la loi du
13 juillet 1983 portant droits et obliga-
tions des fonctionnaires, est constituée
par l’ensemble des prestations spéci-
fiques que l’État accorde à ses agents
actifs et retraités, dans les domaines de
la restauration, du logement, de l’en-
fance ou des loisirs.
Au sein du ministère de l’écologie,
du développement durable et de l’éner-
gie, elle s’applique, selon des modalités
particulières, aux personnels de la direc-
tion
générale
de
l’aviation
civile
(DGAC) et, pour des raisons histo-
riques, à ceux de Météo-France.
Le dispositif a progressivement
perdu de vue sa mission de solidarité et
ne cherche désormais qu’à fournir des
prestations au plus grand nombre possi-
ble d’agents.
Des structures foisonnantes
pour des actions
redondantes
L’action sociale est mise en œuvre
par l’intermédiaire d’un enchevêtrement
de plus de 120 associations nationales,
régionales et locales. La politique de
mutualisation menée n’est pas à la hau-
teur de l’enjeu. En général, l’administra-
tion n’exerce pas les missions de pilo-
tage et de direction qui lui incombent.
La gestion de ce dispositif coûteux
(1 300 € par agent et par an) manque de
vision claire. Son efficacité et la rigueur
de sa gestion ont beaucoup pâti de la
dilution des compétences entre ses dif-
férentes
instances
(administration,
comités d’action sociale).
Un dispositif généreux
Le coût d’une politique très géné-
reuse (plus de 15 M€ annuels) se révèle
supérieur aux crédits votés et affectés
par le Parlement (9,2 M€ en 2010).
En matière d’investissement, la tech-
nique du « remploi », sans base règle-
mentaire, a induit le retour à l’action
sociale du produit des cessions immobi-
lières qui devrait être consacré au désen-
dettement du budget annexe Contrôle et
exploitation aériens.
Par ailleurs, une « règle » sans autre
fondement juridique que le protocole
(2007-2009) négocié avec les partenaires
sociaux
prévoit
que
dans
toute
construction, 2 % au moins du montant
de l’investissement doivent être consa-
crés à un équipement socio-culturel.
La faiblesse du pilogage par
l’administration
Le contrôle que l’administration se
doit d’exercer sur les associations qu’elle
subventionne est, en pratique, très insuf-
fisant. Il sera d’autant plus facilité qu’elle
recueillera et exploitera l’information
disponible et qu’elle améliorera ses
outils de contrôle et d’évaluation. De
véritables contrats d’objectifs devront
être passés avec les associations concer-
nées.
Deux exemples viennent illustrer les
constats de la Cour : la Maison familiale
de vacances du « Bataillet » (Hautes-
Pyrénées), objet de travaux réalisés dans
des conditions critiquables et conservée
bien qu’elle ait perdu aujourd’hui de son
attractivité ; la Maison des associations
du Raizet (Guadeloupe), dont le bâti-
ment réceptionné en 2010 n’est toujours
pas utilisé fin 2012.
Enfin, le personnel mis à disposition
des associations ne l’a pas toujours été
dans des conditions conformes à la
règlementation. Les autorisations d’ab-
sence accordées ne sont pas systémati-
quement valorisées dans les comptabili-
tés.
Recommandations
recentrer l’action sociale sur la
solidarité, en accompagnant la moder-
nisation de l’administration ;
réduire nettement le nombre
des associations aidées, en privilégiant
le rattachement à un
comité local
d’action sociale selon une logique de
service ;
faire en sorte que l’administra-
tion exerce son rôle, pour définir et
mettre en œuvre l’action sociale ;
financer l’action sociale par les
crédits inscrits à cet effet au budget
annexe ;
se doter de tableaux de bord en
vue d’un pilotage efficace de l’action
sociale ;
conclure des contrats d’objec-
tifs avec les associations recevant une
subvention de plus de 23 000 € et éva-
luer périodiquement leur action ;
définir et planifier l’ensemble
des mesures relatives à la fermeture du
centre de vacances du Bataillet.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La direction générale de l’aviation civile
50
18
Les concessions de
distribution d’électricité :
une organisation à
simplifier, des
investissements à financer
La distribution d’électricité com-
prend son acheminement depuis la sor-
tie du réseau à haute tension jusqu’aux
compteurs des usagers.
Une organisation atypique et
potentiellement conflictuelle
La distribution d’électricité est gérée
sous la forme de concessions de service
public très spécifiques, sur la quasi-tota-
lité du territoire national. Les com-
munes et leurs groupements sont tenus
de confier la gestion de la distribution
d’électricité à ERDF, filiale à 100 % du
groupe EDF, en application de la loi.
Cette organisation par rapport aux
autres concessions de service public, se
révèle atypique et potentiellement
conflictuelle.
Le caractère atypique se traduit
d’abord par un tarif de
distribution
fixé
nationalement grâce à une péréquation
tarifaire permettant à tous les consom-
mateurs de payer le même prix pour
l’électricité, à la différence de l’eau par
exemple.
Il se traduit également par l’absence
de choix des autorités concédantes pour
désigner leur concessionnaire, ERDF
ayant un monopole légal sur la quasi-
totalité du territoire.
Par contre, les autorités concédantes
ont une compétence qu’elles n’ont pas
pour les autres concessions de service
public : celle d’assurer la maitrise d’ou-
vrage de certains travaux en zone rurale
et bénéficient pour cela de financements
versés par le concessionnaire.
L’incertitude qui pèse sur le main-
tien à terme du monopole légal d’ERDF
complique les relations entre le conces-
sionnaire et une partie des autorités
concédantes et pourrait remettre en
cause cet équilibre issu de l’après-guerre.
Des besoins d’investissements
en hausse
Or, dans ce contexte déjà tendu, le
besoin d’investissements sur le réseau de
distribution est en augmentation :
ERDF investit aujourd’hui 3 Md€ par an
sur le réseau mais ce montant pourrait
s’élever à 5 Md€ d’ici 2020. Les autorités
concédantes investissent pour leur part
environ 1 Md€ par an sur le réseau.
L’augmentation en cours des inves-
tissements (de 1,5 Md€ au début des
années 2000 à environ 3 Md€ en 2011
pour ERDF) s’explique d’abord par la
nécessaire rénovation du réseau vieillis-
sant et plus sensible aux aléas clima-
tiques. Le temps de coupure moyen de
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
51
l’électricité a eu tendance à augmenter
en France depuis le début des années
2000, même si cette dégradation reste
limitée (50 minutes de coupure en 2000,
85 minutes en 2010, soit un niveau infé-
rieur à celui de nombreux pays euro-
péens
comparables
;
toutefois,
l’Allemagne a un temps de coupure
moyen plus faible).
Par ailleurs, la montée en puissance
des énergies nouvelles décentralisées et
intermittentes, comme l’éolien ou le
photovoltaïque implique de bâtir des
réseaux intelligents, dont le futur comp-
teur communicant Linky sera un pre-
mier élément. Le coût du déploiement
de ce compteur est à lui seul estimé à
4 Md€.
Une nécessaire rationalisation
des dépenses
La
distribution
d’électricité
en
France pourrait évoluer vers deux
modèles différents : une optimisation de
la dépense par un pilotage national des
investissements, d’autant plus nécessaire
que les réseaux électriques sont inter-
connectés et interdépendants, ou au
contraire l’accroissement de l’autonomie
des collectivités territoriales, dans un
contexte de production de l’électricité
moins centralisée et de limitation des
monopoles.
En l’absence de choix entre ces deux
modèles opposés, la Cour recommande
une meilleure régulation des investisse-
ments dans le cadre du système actuel
de la distribution d’électricité, et une
rationalisation des dépenses avant d’aug-
menter les tarifs, ce qui suppose que :
- le distributeur ERDF maîtrise ses
charges comme les dépenses de person-
nel ou les achats ;
- l’actionnaire d’ERDF, à savoir
EDF et, indirectement, l’État, limite les
remontées de dividendes face au besoin
d’investissements sur le réseau ;
- les autorités concédantes, qui sont
encore trop nombreuses (736) accélé-
rent le regroupement. Par ailleurs, les
financements qui leur sont attribués
devraient être simplifiés et réorientés
vers les travaux améliorant la qualité de
l’électricité ;
- enfin, pour faire face à ces besoins
d’investissements, l’organisation actuelle
de la distribution d’électricité devra être
améliorée : il faut renforcer la coordina-
tion des investissements d’ERDF et des
autorités concédantes sous la forme
d’une programmation locale qui pourra
être consolidée à terme au niveau natio-
nal, afin de diriger les efforts vers les
enjeux prioritaires, comme le réseau
moyenne tension qui est aujourd’hui à
l’origine de la majorité des coupures.
Ce n’est qu’après avoir opéré ces
rationalisations, qu’une augmentation
des tarifs pourrait éventuellement être
envisagée s’il reste des besoins d’inves-
tissement à couvrir.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les concessions de distribution d’électricité
52
accélérer le regroupement des
autorités concédantes pour achever la
départementalisation ;
conclure un contrat de service
public entre l’État et ERDF ;
établir
une
programmation
locale
des
investissements
entre
ERDF et les autorités concédantes,
visant à les orienter vers les enjeux
prioritaires en termes de qualité de
l’électricité, notamment le réseau
moyenne tension. A terme, ces pro-
grammations locales devraient être
consolidées au niveau national ;
simplifier le système de finan-
cement des investissements des autori-
tés concédantes en le recentrant sur les
investissements prioritaires pour la
qualité de l’électricité ;
revoir la position d’EDF et de
l’État vis-à-vis des remontées de divi-
dendes d’ERDF, à la lumière des
investissements futurs à consentir sur
le réseau ;
accroître les efforts de produc-
tivité d’ERDF pour développer sa
capacité d’autofinancement des inves-
tissements dans le prochain cadre tari-
faire ;
s’interroger à plus long terme
sur l’évolution du modèle de la distri-
bution d’électricité.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les concessions de distribution d’électricité
53
54
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
19
Le traitement des eaux
usées de la région de
Corbeil-Essonnes-Evry :
l’oubli de l’intérêt général
Le traitement des eaux usées de la
région de Corbeil-Essonnes-Evry, dans
le
centre-est
du
département
de
l’Essonne, présente la particularité d’être
assuré par deux stations contiguës,
situées en bordure de la Seine, sur le ter-
ritoire de la commune d’Evry. Cette
situation trouve son origine dans la riva-
lité qui a opposé les villes de Corbeil-
Essonnes et d’Evry, depuis la création
de la ville nouvelle d’Evry, depuis la fin
des années 60, jusqu’à aujourd’hui.
L’échec de la rénovation
concertée des stations
La rénovation des stations s’impo-
sait, tant pour accroître les capacités de
traitement que pour se conformer aux
normes de rejet édictées par la directive
européenne du 21 mai 1991 sur les eaux
résiduaires.
Une politique globale et cohérente
du traitement des eaux usées a tout
d’abord été recherchée. Un syndicat
mixte d’études et de traitement intersyn-
dical des eaux (SYMETRIE), compre-
nant les deux intercommunalités maîtres
d’ouvrage, a été créé et a proposé, en
2004, plusieurs scenarii.
Dans le scénario reposant sur la col-
laboration des maîtres d’ouvrage et
recherchant l’utilisation optimale des
deux équipements, le coût prévisionnel
global des travaux et les coûts d’exploi-
tation étaient nettement inférieurs à
ceux du scénario optant pour la rénova-
tion des deux usines indépendamment
l’une de l’autre.
C’est pourtant ce dernier, globale-
ment le moins efficace et le plus oné-
reux, qui a prévalu.
Les surcoûts résultant de la
mésentente
Le coût des travaux de rénovation
de la station du SIARCE, syndicat inter-
communal dont la commune principale
est à Corbeil-Essonnes, a augmenté de
54 %
en
quatre
ans,
passant
de
20,08 M€, en août 2006, à 30,89 M€, en
avril 2010, au terme de six avenants.
L’avenant relatif à la création d’une
unité de compostage des boues, qui a
entraîné une hausse du montant du mar-
ché initial d’environ 40 %, fait notam-
ment écho à l’échec de la solution d’un
traitement conjoint des boues sur une
seule station.
De son côté, la communauté d’ag-
glomération d’Evry a engagé la rénova-
tion de son usine, dont les travaux ne
sont pas encore achevés et dont le coût
s’élèverait à environ 43,5 M€.
Les travaux d’extension et de mise
aux normes des deux stations peuvent
ainsi être estimés globalement, à la fin de
l’année 2012, à environ 80 M€. Le coût
actualisé, à la même date, de la rénova-
tion coordonnée s’élèverait à environ
70 M€.
Le surcoût dû à l’absence de concer-
tation peut donc être évalué
à une
dizaine de millions d’euros sans compter
le surcoût global des charges d’exploita-
tion évalué à 1,11 M€ par an.
L’oubli de l’intérêt général
Aucun des nombreux intervenants
n’a été en mesure de faire prévaloir l’in-
térêt général.
Les maîtres d’ouvrage ne sont pas
parvenus à surmonter leurs anciennes
oppositions et à agir de manière concer-
tée.
Les financeurs publics, l’agence de
l’eau Seine-Normandie et le départe-
ment de l’Essonne notamment, ont
certes privilégié une action conjointe de
modernisation des équipements, mais ils
n’ont pas été en mesure de s’opposer au
choix des maîtres d’ouvrage.
Il appartenait au représentant de
l’État de faire prévaloir l’intérêt général.
Cependant, les services de l’État étaient
d’abord désireux de voir se réaliser, le
plus rapidement possible, les travaux de
mise aux normes des stations de traite-
ment des eaux usées à la suite de la
condamnation de la France, en 2004,
pour manquement aux obligations pres-
crites par la directive européenne de
1991. L’urgence
l’a donc emporté, au
détriment de la solution la plus économe
pour les fonds publics.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Le traitement des eaux usées de la région
de Corbeil-Essonnes-Evry
55
Recommandations
Pour les deux collectivités concer-
nées :
agir désormais de manière
concertée et de privilégier l’approche
la plus rationnelle
pour la gestion de
leurs équipements, en termes d’inves-
tissement et de coûts d’exploitation.
Pour les services de l’État :
veiller à faire prévaloir l’intérêt
général dans l’exercice de leurs respon-
sabilités.
20
Le rétablissement du
caractère maritime du
Mont-Saint-Michel :
un projet mal conduit
Le rétablissement du caractère mari-
time du Mont-Saint-Michel est un vaste
projet dont les modalités de pilotage
actuel, n’ont pas favorisé une prise en
compte exhaustive de tous les aspects
du dossier.
Un projet dont l’efficacité ne
pourra être mesurée que sur le
long terme
Le projet actuel, initié dès 1969 et
estimé en mars 2011 à 185 M€, consiste,
principalement, en l’édification d’un
nouveau barrage qui a pour objet de
redonner au Couesnon la puissance
hydraulique nécessaire. Celle-ci, conju-
guée à la force de la mer et aux nouvelles
installations laissant le libre passage de
l’eau autour du Mont, devrait permettre
de chasser les sédiments au large.
L’efficacité réelle de ces procédés ne
pourra toutefois être vérifiée avant plu-
sieurs années (horizon 2025) et permet-
tra de rétablir le caractère insulaire du
Mont durant quelques heures par an lors
des coefficients de marée exceptionnels.
Un double pilotage ambigu qui
n’a pas facilité la réflexion
d’ensemble sur ce dossier
Initié par l’État en 1990, le projet
actuel est piloté par les collectivités ter-
ritoriales regroupées dans un syndicat
mixte.
Néanmoins et conscient de la diffi-
culté de se désengager d’un tel projet
qui, à l’évidence, va largement au-delà
du simple cadre régional, ne serait-ce
qu’en
raison
de
l’inscription
par
l’Unesco du site au Patrimoine mondial,
l’État a mis en place, avec le syndicat
mixte, un comité de pilotage, qui consti-
tue en principe l’organe de décisions
communes.
Il en résulte un double pilotage
ambigu, ce comité n’ayant juridiquement
pas de véritable rôle décisionnel ou opé-
rationnel, pénalisant la réflexion d’en-
semble sur le devenir de ce site remar-
quable.
De plus, les modalités actuelles de
financement de ce syndicat font interve-
nir certaines communes membres, mais
pas toutes, et une collectivité associée
qui, juridiquement, ne peut prendre part
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
56
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
57
aux décisions, autant de sources de
conflits potentiels en cas de divergences.
Une réalisation opérationnelle
défaillante
La conduite, la gestion et la réalisa-
tion opérationnelle de ce dossier par le
syndicat mixte Baie du Mont-Saint-
Michel, font apparaître des insuffi-
sances, notamment dans le pilotage glo-
bal et la gestion de ce dossier.
Ainsi, la construction et l'exploita-
tion des ouvrages et services d'accueil au
public, confiées par le syndicat mixte à la
société Veolia Transport par une
convention de délégation de service
public conclue pour une durée de 13
ans, font apparaître un manque de
contrôle et de vigilance.
Le syndicat a dû acter que ce déléga-
taire ne serait pas en mesure de fournir
le matériel roulant à la date de mise en
service prévue (avril 2012). De surcroît,
les matériels de transports
initialement
conçus devront être largement revus.
Cette situation pourrait conduire à
remettre en cause les termes de la délé-
gation.
Des conditions d’exploitation
futures en suspens
Selon le calendrier du projet, la tota-
lité des aménagements et constructions
prévus pour rétablir le caractère mari-
time du Mont-Saint-Michel seront ter-
minés d'ici fin 2015.
Or, les contributions financières des
membres du syndicat ont été définies en
2006, en grande partie afin de financer
les investissements nécessaires à la réali-
sation opérationnelle du projet. Rien à
ce jour n'a été anticipé pour les futures
contributions de fonctionnement, une
fois les travaux terminés.
De même, le protocole signé avec
l’État n’a déterminé que les contribu-
tions au coût des travaux au sens large,
sans que ne soient abordées les condi-
tions de financement des charges de
fonctionnement dans une perspective
pérenne qui intègre les dimensions cul-
turelle, touristique et environnementale
de ce site mondialement connu et fré-
quenté par de nombreux visiteurs étran-
gers.
Le rétablissement du caractère maritime
du Mont-Saint-Michel
58
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
Pour l'État :
engager une nouvelle réflexion
sur la gouvernance et la conduite opé-
rationnelle du projet, en intégrant les
dimensions culturelle, touristique et
environnementale du site, notamment
de façon à faire participer au syndicat
les collectivités qui financent le pro-
jet
;
exercer
effectivement
le
contrôle financier du syndicat mixte,
en tant qu’il est concessionnaire du
domaine public maritime relevant de
l’État ;
inciter les collectivités territo-
riales concernées à définir précisément
la répartition des financements pour
l’exploitation du site, à compter de
2015, année prévue pour la fin des tra-
vaux ;
Pour le syndicat mixte Baie du
Mont-Saint-Michel :
élaborer
un
véritable
plan
d'amortissement à partir d'un inven-
taire de l'actif régulièrement mis à jour
et évaluer précisément les futures
charges de fonctionnement ;
mettre en place le contrôle du
délégataire, notamment en matière de
gestion des
ouvrages d'accueil ;
fiabiliser le
suivi financier du
projet.
Le rétablissement du caractère maritime
du Mont-Saint-Michel
59
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
21
L’immobilier des
collectivités territoriales :
vers une gestion plus
dynamique
Le patrimoine immobilier des col-
lectivités territoriales et de leurs groupe-
ments s’accroît et se diversifie avec l’ex-
tension de leurs domaines d’interven-
tion et les nouveaux besoins des habi-
tants. Il représente un actif très impor-
tant qui génère aussi des frais pour son
fonctionnement.
Aujourd’hui, alors que les adminis-
trations publiques locales sont appelées
à contribuer à l’effort de redressement
des finances publiques et, au regard des
tensions qui s’exercent sur les budgets
locaux, l’exercice d’une gestion plus per-
formante des biens s’impose.
Elaborer une politique de valori-
sation du patrimoine public
immobilier des collectivités
territoriales
La situation immobilière actuelle
résulte souvent d’une succession de
décisions ponctuelles prises en fonction
des besoins, des opportunités et des
contraintes, au fil des opérations immo-
bilières. En revanche, la définition d’une
stratégie immobilière permet de dispo-
ser d’une vision d’ensemble claire, à
moyen et long terme, faisant le lien entre
les différentes politiques qui affectent le
patrimoine immobilier.
Les opérations immobilières qui tra-
duisent cette vision d’ensemble résultent
cependant rarement de décisions prises
après examen par les assemblées délibé-
rantes des différents scenarii possibles,
et les démarches engagées pour que ces
dernières puissent vraiment choisir, sont
peu abouties.
Connaître les biens
L’inventaire physique, qui permet le
recensement complet des biens et leur
suivi, est parfois encore inexistant. Il est
très souvent partiel, succinct, présenté
sous la forme d’une simple liste, et
insuffisamment renseigné.
La gestion du patrimoine suppose
aussi
d’identifier
précisément
les
régimes juridiques qui conditionnent les
conditions d’occupation et les obliga-
tions attachées aux biens détenus et/ou
occupés. Dans ce domaine, il existe des
lacunes, en particulier lors des transferts
liés à la décentralisation ou au dévelop-
pement de l’intercommunalité, mais
aussi par rapport au patrimoine privé.
Enfin, la gestion comptable du
patrimoine permet la traçabilité des opé-
rations et la vérification de leurs justifi-
cations. L’amélioration de la qualité des
informations produites est donc impor-
tante pour les gestionnaires. Dans la plu-
L’immobilier des collectivités territoriales
60
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
part des cas, les états et les écritures se
rapportant à des opérations immobi-
lières ne répondent qu’imparfaitement
aux règles de la qualité des comptes.
Optimiser les charges
d’investissement et de fonction-
nement
Pour le seul immobilier de bureaux,
il apparaît des insuffisances dont la cor-
rection apporterait des améliorations
notables.
Les opérations de gestion immobi-
lières mobilisent les compétences juri-
diques, techniques, comptables et bud-
gétaires de divers services mais ne sont
pas intégrées dans une unité dédiée.
Cette segmentation ne favorise pas la
mobilisation des compétences et la mai-
trise des coûts et des risques. Pour
répondre à leurs besoins, les collectivités
peuvent choisir leurs outils de gestion
patrimoniale
mais
les
possibilités
offertes ne sont pas toujours exploitées,
voire mal ou sous-utilisées, et les infor-
mations produites sont lacunaires ou
mal partagées, ce qui nuit à un manage-
ment plus global de l’immobilier.
En conclusion, les constats faits par
les chambres régionales indiquent que la
gestion du patrimoine immobilier ne fait
pas encore partie des préoccupations
majeures de la plupart des collectivités
territoriales. Les pratiques des collectivi-
tés territoriales qui ont mis en œuvre
une gestion plus dynamique montrent,
en revanche, que, si les coûts des actions
entreprises restent modestes, les béné-
fices en termes d’économie, d’efficience
et d’efficacité sont importants.
Recommandations
Pour l’État :
bien distinguer, dans les inven-
taires des collectivités territoriales,
entre les biens immobiliers relevant de
leur domaine public et de leur
domaine privé et mentionner les prin-
cipales informations juridiques liées à
l’origine et aux caractéristiques de leur
propriété ;
généraliser dans les grandes col-
lectivités territoriales l’établissement
d’un schéma directeur du patrimoine
foncier et immobilier, articulé avec
leur plan pluriannuel d’investisse-
ment ;
renforcer l’obligation d’infor-
mation des assemblées délibérantes
d’une part, sur les éléments et critères
de décision relatifs aux opérations
immobilières, d’autre part, sur leur
bilan à leur dénouement ;
requérir pour les opérations
immobilières importantes la produc-
61
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
tion aux assemblées délibérantes des
coûts globaux d’investissement et de
fonctionnement avec une évaluation
des solutions alternatives envisagea-
bles.
Pour l’État et les collectivités terri-
toriales :
mener à leur terme dans les
meilleurs délais, au fur et à mesure de
la rationalisation de la carte des établis-
sements publics de coopération inter-
communale, les démarches de décroi-
sement de propriété, tant pour les
biens transférés par l’État dans le cadre
des lois de décentralisation que pour
ceux affectés aux intercommunalités
ou revenus vers les communes ;
veiller, par une collaboration
renforcée des ordonnateurs et des
comptables, à garantir la conformité
du haut de bilan des comptes des col-
lectivités territoriales avec la réalité de
leur actif immobilier.
Pour les collectivités territoriales :
établir, s’il y a lieu, l’inventaire
physique unique, et complet prévu par
la réglementation et veiller, lors de l’en-
trée à l’inventaire d’un bien, à ce qu’il
ne reçoive qu’un seul numéro d’inven-
taire, commun à tous les services de la
collectivité et communiqué sans délai
au comptable public ;
renforcer la mutualisation des
services des collectivités dans le cadre
des intercommunalités pour la mise en
œuvre et la coordination de leurs poli-
tiques immobilières respectives ;
identifier une fonction « immo-
bilier » dans l’organisation des collecti-
vités et mettre en place des outils de
pilotage exploitant les données immo-
bilières disponibles dans les systèmes
d’information ;
répertorier l’immobilier mis à
disposition de tiers et regrouper l’en-
semble des conventions et informa-
tions concernant chaque immeuble
concerné dans un dossier unique ;
définir une politique de couver-
ture des risques liés à l’immobilier et
faire régulièrement un audit des
contrats d’assurance pour avoir tou-
jours une couverture au meilleur coût
des biens assurés.
L’immobilier des collectivités territoriales
Cour des comptes
22
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
62
L’office national de l’eau et
des milieux aquatiques
(ONEMA) : une transforma-
tion mal préparée, une
gestion défaillante
L’Office national de l’eau et des
milieux aquatiques (ONEMA) est un
établissement public administratif créé
en 2007. Placé sous la tutelle du minis-
tère chargé de l’environnement, il
emploie quelque 900 personnes et dis-
pose d’un budget annuel de l’ordre de
110 M€, financé pour l’essentiel par un
prélèvement sur la redevance sur l’eau
acquittée par les usagers et perçue par
les agences de l’eau.
L’ampleur et l’accroissement des
missions confiées à l’ONEMA, dans un
contexte mouvant, complexe et soumis
à la pression d’échéances communau-
taires, n’ont pas été accompagnés par la
mise en place de moyens à la hauteur
des enjeux. Il en est résulté de nom-
breuses défaillances et irrégularités dans
la gestion administrative et financière
qui ont nui à l’efficacité de l’action du
nouvel établissement public.
Une accumulation de missions
mal assurées
L’ONEMA n’a pas mis l’accent dans
les premières années de son existence
sur la qualité de la gestion alors qu’elle
était essentielle pour conduire de
manière économe et efficace les mis-
sions de l’établissement qui engagent la
France en matière de politique de l’eau.
Des recommandations avaient pourtant
été formulées par la Cour à ce sujet dans
la perspective de la création de l’établis-
sement à partir du Conseil supérieur de
la pêche.
Les projets relatifs au système d’in-
formation sur l’eau (SIE), nécessaires
pour atteindre l’objectif prioritaire de
connaissance de l’eau et rendre compte
à la Commission européenne des résul-
tats obtenus en matière de qualité de
l’eau, ont pris du retard.
La mission de police a été améliorée
suite aux
recommandations formulées
précédemment par la Cour. Des outils et
référentiels ont été déployés. En
revanche, la coordination des services
compétents de l’Etat reste largement
imparfaite faute d’un outil partagé du
suivi des actions de police. L’efficacité
de ces actions est encore difficile à
apprécier en l’absence d’indicateurs
adaptés. La pression des contrôles
demandée pour lutter contre la pollution
de l’eau par les nitrates est trop faible au
vu des enjeux.
L’ONEMA apporte un appui finan-
cier aux politiques d’assainissement de
l’eau, notamment des eaux résiduaires
pour que la France puisse respecter ses
obligations communautaires. Pour la
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
63
L’office nationale de l’eau et des milieux
aquatiques (ONEMA)
Corse, le dispositif financier lui-même
est contestable. Pour les DOM-TOM, le
suivi financier est insatisfaisant.
Les déficiences dans
l’organisation et la gestion
Les moyens n’ont pas été adaptés
aux objectifs et de ce fait les missions
ont
été
imparfaitement
assurées.
L’établissement public a tardé à prendre
des mesures correctrices. A cet égard, la
confusion des rôles de présidence du
conseil d’administration et de tutelle n’a
pas permis d’accélérer le processus.
La gestion comptable et financière a
présenté de graves lacunes. Les comptes
se sont avérés peu fiables et la procédure
d’engagement de la dépense déficiente
jusqu’en 2010. Les pratiques contrac-
tuelles de l’ONEMA n’ont pas permis
au contrôle financier d’être exercé plei-
nement. Le contrôle de gestion est
demeuré lacunaire faute de tableaux de
bord.
Jusqu’en 2011, de la passation des
marchés à leur exécution de multiples et
coûteuses erreurs de gestion ont été
commises, l’ONEMA s’affranchissant
bien souvent des règles du code des
marchés publics. Elles sont à l’origine de
retards dans la réalisation de projets
pourtant essentiels à l’exercice des mis-
sions de l’établissement public et au res-
pect des engagements de la France.
La faiblesse des structures de ges-
tion du personnel, l’inadéquation des
statuts et les insuffisances constatées sur
le
plan
juridique
ont
confronté
l’ONEMA à des problématiques de
recrutement qui l’exposent encore
aujourd’hui au risque de perte de com-
pétences. Sur le plan financier, si le ren-
forcement de l’encadrement explique en
grande partie la hausse de la masse sala-
riale (+ 27 % sur 4 ans), plusieurs
mesures indemnitaires ou liées aux
vacations, contestables voire irrégu-
lières, ont accentué la progression des
dépenses. Enfin, l’organisation des ser-
vices territoriaux et le rythme de travail
de certains agents (4 jours par semaine),
ne sont pas en adéquation avec les mis-
sions de l’établissement. Alors que se
rapproche l’échéance de 2015 fixée par
la directive cadre sur l’eau de 2000 pour
atteindre « un bon état » des eaux, et, à
l’heure où la loi de finances pour 2012 a
porté le plafond annuel de la redevance
sur l’eau versée à l’ONEMA de 108 M€
à 150 M€ à compter de 2013, il est impé-
ratif d’assurer une gestion rigoureuse de
l’établissement
en
poursuivant
les
actions entreprises récemment.
64
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
L’office nationale de l’eau et des milieux
aquatiques (ONEMA)
Recommandations
séparer les fonctions de tutelle et
de présidence du conseil d’administra-
tion ;
fiabiliser les comptes et mettre
en place dans les plus brefs délais les
procédures de contrôle interne forma-
lisé ;
mettre en place un pilotage et
un suivi rigoureux des projets informa-
tiques, dont ceux liés au système d’in-
formation de l’eau ;
réorganiser le dispositif territo-
rial ;
revoir les pratiques de gestion
des ressources humaines notamment
les conditions d’attribution de l’indem-
nité de mobilité, le suivi du temps de
travail et l’adéquation de la semaine de
quatre
jours
aux
missions
de
l’ONEMA ;
poursuivre les actions menées
en matière de police de l’eau
en redé-
finissant les indicateurs de suivi et en
augmentant significativement la pres-
sion de contrôle sur des thématiques
ou dans des zones à enjeux.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
65
Cour des comptes
23
Les rémunérations à
EDF SA : une progression
rapide, une accumulation
d’avantages, peu de liens
avec les performances
La période de contrôle coïncide avec
de profonds changements de l’entre-
prise : entrée en bourse d’une partie du
capital, filialisation des réseaux de trans-
port et de distribution, fin du monopole,
internationalisation
des
activités.
Parallèlement, les 65 931 salariés d’EDF
SA fin 2011 restent à 94 %
régis par le
statut des industries électriques et
gazières, dont les bases ont été posées
par la loi du 8 avril 1946. Dérogeant au
droit commun du travail, ce statut fixe
des règles de rémunération, et renvoie à
des accords de branche, puis à des
accords d’entreprise pour l’application
et l’amélioration des conditions faites
aux salariés.
Une politique
salariale généreuse
Contrairement aux salariés du sec-
teur privé, au sein du groupe EDF,
l’évolution du salaire net moyen par tête
a représenté plus de 3 % par an. En
outre, les salaires sont, à EDF, plus éle-
vés à l’embauche (16 % de plus que le
SMIC pour un jeune sans diplôme, 26 %
pour un titulaire d’un BEP), et connais-
sent une progression automatique
garantie. En fin de carrière, la rémunéra-
tion à l’ancienneté peut constituer
jusqu’à 22 % de la rémunération fixe.
Les rémunérations complémentaires
pouvent représenter plus de 50 % de la
rémunération totale de certains salariés,
cinq années après l’embauche.
Décidées au niveau de l’entreprise,
et se rajoutant aux augmentations préci-
tées, les mesures individuelles sont éga-
lement plus favorables que dans le sec-
teur privé, et plus répandues : ainsi 67 %
des agents en avaient bénéficié en 2010.
Le groupe EDF a mis en place dans
le courant des années 2008-2009, un
début de rémunération au mérite avec
des mécanismes de rémunération varia-
ble, comme de nombreuses entreprises
publiques et privées. Sa singularité est
toutefois de l’attribuer à une fraction
plus importante de salariés pour des
montants encore faibles (moins de 4 %
des rémunérations principales).
Une rémunération des
dirigeants en forte
augmentation jusque
récemment
De 2005 à 2010, la rémunération
globale du président-directeur général
66
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les rémunérations à EDF SA
d’EDF SA a été multipliée, en euros
courants, par 2,35, sous l’effet de deux
mouvements cumulatifs : augmentation
régulière et importante de la part fixe
annuelle (1 M€ en 2010), et
fixation
d’une part variable dont les critères ont
été atteints, sur la période, dans la partie
supérieure de la fourchette (entre 75 et
100 %). Cette rémunération, approuvée
expressément par le ministre de l’écono-
mie, a atteint environ 1,5 M€ en 2011.
Depuis le décret du 26 juillet 2012, elle
est plafonnée à 450 000 €. La rémunéra-
tion des autres mandataires sociaux a
suivi une pente comparable, et leurs taux
de bonus ont atteint des montants éle-
vés, supérieurs à 75 %.
L’État actionnaire n’a connaissance
de la politique de rémunération des
cadres dirigeants d’EDF SA qu’à travers
les éléments communiqués, peu fré-
quemment, au comité des rémunéra-
tions, émanation du conseil d’adminis-
tration dont il fait partie. Il est regretta-
ble qu’il ait cessé à partir de 2004 de réa-
liser l’enquête annuelle sur les rémunéra-
tions.
Pendant la période contrôlée, l’ef-
fectif des cadres dirigeants a progressé
de 32,5 %, et leurs rémunérations fixes
de près de 4 % par an comme l’ensem-
ble des salariés. S’y ajoute, toutefois, une
part variable plus élevée (avec un maxi-
mum de 26 à 37 % du salaire fixe).
Aucun dirigeant n’a atteint moins de 90
% des objectifs fixés en 2010. Le bonus
apparaît donc plus comme une rémuné-
ration complémentaire que comme une
variable incitative.
De nombreux
avantages liés à l’emploi
La fourniture d’électricité à un tarif
préférentiel
Comme tous les salariés des indus-
tries électriques et gazières, ceux d’EDF
SA bénéficient du « tarif agent », ce qui
représente un manque à gagner pour
l’entreprise estimé à 222 M€ en 2010.
Cet avantage est exorbitant à plu-
sieurs titres : l’abonnement est gratuit, et
la fourniture d’énergie au tarif préféren-
tiel est ouverte sans limite de consom-
mation, sans considération de la compo-
sition du foyer, aux agents en fonction
et en retraite, pour la résidence princi-
pale et secondaire, et même pour les
résidences de vacances occasionnelles.
Il est en outre fiscalisé dans des
conditions et selon un barème favora-
bles, et de plus sous-évalué au titre des
cotisations sociales.
Un large éventail d’avantages com-
plémentaires
Les salariés d’EDF SA peuvent
bénéficier, dans certaines conditions, de
logements de fonction, ou d’une indem-
nité mensuelle destinée à participer aux
frais du logement (coût pour EDF SA
en 2011 : 263,7 M€). Ils perçoivent ou
ont perçu l’intéressement, des actions
gratuites, et bénéficient de plans
d’épargne collective abondés par l’entre-
prise dans des conditions favorables,
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
67
Les rémunérations à EDF SA
comparativement au secteur privé. EDF
SA peut également leur accorder des
prêts à la consommation.
En mai 2011, la Cour a émis des
observations sur l’organisation du
régime d’assurance maladie des indus-
tries électriques et gazières qui garantit
des prestations d’un niveau plus élevé
que le droit commun, encore améliorées
par une couverture complémentaire et
supplémentaire.
Le niveau des avantages famille et
retraite garantis aux salariés d’EDF est
également sensiblement plus élevé que
dans la moyenne des branches de l’éco-
nomie : nombreux avantages familiaux
sous forme de congés rémunérés et d’in-
demnités spécifiques, voire cumul de ces
deux avantages pour un même motif,
comme le mariage par exemple ; retraite
calculée sur la base des six derniers
mois, cumulée avec des dispositifs d’ac-
compagnement.
Recommandations
Pour l’entreprise et les pouvoirs
publics
:
poursuivre la différenciation des
rémunérations en rémunérant la per-
formance plutôt que la position statu-
taire ;
fixer des objectifs de part varia-
ble suffisamment ambitieux pour justi-
fier la notion même de part variable ;
rétablir l’enquête annuelle sur
les rémunérations des dirigeants des
entreprises publiques en y incluant le
groupe EDF ;
étudier l’impact sur la hiérarchie
des rémunérations des dirigeants de la
mesure de plafonnement qui vient
d’être récemment introduite ;
mettre fin aux dispositions
dérogatoires au droit commun en
matière fiscale et sociale qui sont
actuellement attachées au tarif agent ;
instaurer un plafonnement de la
consommation d’énergie assujettie à ce
tarif et l’indexer sur le prix réel de
l’électricité ;
redéfinir la politique du loge-
ment afin que le bénéfice d’un loge-
ment et/ou de l’avantage logement soit
accordé aux agents qui en ont besoin
en raison des contraintes de leurs fonc-
tions ;
réexaminer la politique familiale
au regard de son coût et des évolutions
de la structure familiale.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
68
Cour des comptes
24
Les dépenses de
communication de la SNCF :
des opérations
dispendieuses, des marchés
irréguliers
La Cour a contrôlé la régularité, l’ef-
ficience et l’efficacité des dépenses de
communication externe et interne de
l’établissement public entre 2000 et
2011.
La lente formulation de la stra-
tégie de marque unique
« SNCF »
La SNCF a engagé, au cours de la
dernière décennie, une politique active
de communication du « groupe » qui
couvre le périmètre de l’établissement
public industriel et commercial (l’EPIC
SNCF) et de ses filiales. Au terme d’une
lente élaboration, la SNCF a opté, en
juillet 2010, pour la stratégie de marque
unique « SNCF » applicable à l’ensemble
du groupe.
La difficile évaluation du coût de
la communication
La SNCF n’effectue pas de suivi
analytique de ses dépenses de communi-
cation (communication commerciale,
institutionnelle ou interne) et le coût
global de l’activité est
difficile à chiffrer.
Pour l’EPIC seul, il est estimé à 153 M€
de dépenses annuelles moyennes entre
2007 et 2011, auxquelles il convient
d’ajouter en moyenne 55 M€ de masse
salariale par an, soit un total de près de
210 M€ par an. Ce montant équivaut à
environ 13 % des investissements de
l’EPIC qui s’élèvent à 1,6 Md€ en 2010.
Un pilotage et un suivi
insuffisants des dépenses
Le pilotage et le suivi des dépenses
souffrent de la faiblesse de la program-
mation budgétaire, de lacunes dans le
suivi comptable, de l’insuffisance d’anti-
cipation des opérations et de l’inexis-
tence de bilans annuels. Il s’ensuit de
nombreux et importants dépassements
du budget. Engagée en 2009 dans une
politique de réduction de ses frais de
structures de 2 % à 4 % par an, la SNCF
prévoyait, sur la base d’un audit externe,
une réduction des dépenses de commu-
nication de 1,5 M€ dès 2010, 6,5 M€ en
2011 et 8,3 M€ en 2012 ; elle ne s’est pas
produite.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les dépenses de communication de la SNCF
69
Des pratiques d’achat peu
respectueuses des règles en
vigueur
Le recours excessif aux marchés
négociés, sans mise en concurrence,
constitue le point le plus préoccupant.
Ces pratiques concernent 71 % des
41 marchés les plus importants conclus
depuis 2007 et contrôlés par la Cour.
Elles révèlent un non-respect des grands
principes de l’achat public définis par
l’ordonnance du 6 juin 2005 et son
décret d’application, à laquelle sont sou-
mises les dépenses de communication
de la SNCF, et montrent que l’établisse-
ment s’affranchit également du respect
de ses procédures internes dans ce
domaine.
L’invocation de l’urgence impé-
rieuse ou de la spécificité technique,
pour échapper à l’obligation de mise en
concurrence, ne fait pas l’objet d’une
justification conforme à la réglementa-
tion en vigueur ou aux règles internes de
la SNCF. La mention d’une
« demande
du président » qui figure au renfort de la
justification de ces procédures excep-
tionnelles d’achat ne saurait justifier leur
mise en œuvre et ne figure pas parmi les
cas prévus par la règlementation en
vigueur.
L’enquête globale périodique mon-
tre que la SNCF souffre d’un déficit
d’image auprès du public, néanmoins,
l’efficacité des actions de communica-
tion de la SNCF reste mal évaluée. Des
tests sont réalisés ponctuellement pour
mesurer l’efficacité des campagnes de
publicité et d’autres actions de marke-
ting. En revanche, la réalisation des
objectifs de la SNCF en matière de com-
munication n’a été évaluée pour aucune
des opérations étudiées. Des sommes
importantes sont ainsi dépensées en
l’absence de toute évaluation ou retour
d’expérience. La SNCF s’est engagée à
mettre en œuvre, selon un calendrier
précis et à brève échéance, les mesures
nécessaires pour faire cesser ces pra-
tiques. Elle a présenté à son conseil
d’administration du 20 décembre 2012
les grands axes de sa stratégie de com-
munication et les mesures décidées à la
suite du contrôle de la Cour.
Les dépenses de communication de la SNCF
70
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
formaliser la stratégie plurian-
nuelle de communication, la détailler
dans un plan d’action avec l’objectif
d’en encadrer les coûts et la présenter
au conseil d’administration ;
anticiper et évaluer les besoins
annuels afin d’améliorer la qualité des
prévisions ;
formaliser une démarche de
gestion de projet pour chaque opéra-
tion en incluant les aspects budgé-
taires ;
procéder à un bilan financier de
chaque grand projet et établir un bilan
de l’exécution budgétaire annuelle ;
assurer
une
information
annuelle sur les dépenses par grands
axes stratégiques en présentant des
informations financières fiables et
consolidées pour
l’EPIC et le groupe ;
veiller à la stricte application des
procédures imposées par l’ordonnance
2005-649 du 6 juin 2005 et renforcer
les dispositifs de contrôle interne afin
d’assurer la sécurité juridique des pro-
cédures exceptionnelles.
71
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
25
Cour des comptes
De la Sonacotra à Adoma :
des dérives corrigées
tardivement
La société anonyme d’économie
mixte
Adoma,
anciennement
SONACOTRA, gère plus de 500 foyers
de travailleurs migrants ou résidences
sociales, qui accueillent 70 000 per-
sonnes et représentent plus de 60 % des
places des foyers de travailleurs migrants
et résidences sociales.
Dans son rapport public particulier
sur « l’accueil et l’intégration des popu-
lations immigrées », la Cour avait évo-
qué en termes positifs l’action de la
SONACOTRA
tout en soulignant les
difficultés de la société, incitée à passer
du statut de « logeur des immigrés » à
celui de « logeur des plus démunis ».
Une stratégie fluctuante aux
dépens de la rénovation des
foyers
L’État est actionnaire à hauteur de
57 % d’Adoma. Dès la fin des années
1990, sa priorité a été de rénover les
foyers de travailleurs migrants. Adoma
a pris sa part de l’effort. Pourtant, en
2012, la moitié des chambres offertes
par la société à sa clientèle continue
d’avoir une superficie de 9 m² ou moins,
et seulement une sur cinq présente des
éléments de confort autonomes, inté-
grant sanitaires individuels et coin cui-
sine.
Ces résultats inégaux s’expliquent
largement par l’instabilité et la
disper-
sion des objectifs fixés à la société.
Ainsi, le contrat d’objectifs
2005-2010
invitait Adoma à diversifier son activité
vers le logement social des familles en
difficulté ainsi que vers le logement des
jeunes, notamment des étudiants.
La société s’est impliquée aussi dans
l’accueil des demandeurs d’asile et dans
l’hébergement d’urgence, pour lequel
des fonds propres, apportés par l’État,
ont été utilisés pour financer des
constructions sur des terrains concédés
à titre précaire, parfois pour une durée
de 5 ans seulement. L’amortissement
anticipé de telles opérations a
contribué
pour beaucoup à la perte comptable de
26 M€ constatée en 2010.
De graves défaillances de
gestion
Pour le logement des jeunes et des
familles, plutôt que d’accélérer la trans-
formation des foyers en résidences
sociales, il a été décidé de créer des capa-
cités complémentaires. Des opérations
conduites dans l’urgence ont donné lieu,
notamment dans le Sud-Est de la
France, à des acquisitions
à des prix
supérieurs à l’estimation des domaines,
ou sans étude technique préalable, ce qui
a conduit à
des surcoûts de travaux et à
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
De la sonacotra à Adoma
72
des difficultés d’usage de certains
immeubles.
Pour mener cette politique d’inves-
tissement, Adoma s’est endettée dans les
limites prévues au contrat d’objectifs.
Elle a toutefois souscrit, de façon hasar-
deuse, des contrats spéculatifs avec les
banques, qui ont déjà entraîné une perte
certaine de 7 M€ et créent une moins-
value latente estimée à 57 M€ sur l’en-
cours des dettes.
Dans la gestion courante, la poli-
tique d’achat de la société a connu des
dérives, enrayées seulement à partir de
2011. Un certain laxisme a longtemps
entaché la gestion des ressources
humaines, la gestion territoriale étant
trop dispersée et les avantages accordés
en matière de logement pas toujours jus-
tifiés par des contraintes de service.
Enfin, un
accord de participation aux
bénéfices a été mis en place alors que la
réglementation ne l’autorisait pas ;
dénoncé tardivement, cet accord conti-
nue de faire peser un risque juridique et
financier.
Un redressement tardif
Une nouvelle gouvernance a été
mise en place fin 2010, le contrôle opé-
rationnel de la société étant confié à un
actionnaire minoritaire, la SNI, filiale de
la Caisse des dépôts et consignations.
Celle-ci a accentué le recentrage straté-
gique amorcé en 2009 et arrêté des
orientations qui vont dans le sens d’un
redressement.
Adoma se désengage ainsi des sec-
teurs non prioritaires. Elle met en œuvre
un plan d’économie et de réduction d’ef-
fectifs qui a permis de dégager des béné-
fices en 2011. L’État doit désormais
fixer des objectifs clairs pour
in-fine
doter cet opérateur d’un actionnariat
stable, de fonds propres suffisants et
d’une gouvernance transparente.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
De la sonacotra à Adoma
73
Recommandations
La Cour recommande à l’État
actionnaire de :
préciser les missions de service
public qu’il assigne à la société
Adoma ;
encourager les synergies néces-
saires avec la société nationale immo-
bilière, pour doter Adoma d’un action-
nariat stable, de fonds propres suffi-
sants et d’une gouvernance transpa-
rente ;
renforcer la coordination inter-
ministérielle et s’assurer que les mis-
sions ponctuelles confiées à Adoma
bénéficient d’un financement équilibré
et permettent des réalisations dura-
bles ;
déterminer les priorités straté-
giques sur une période suffisamment
longue pour obtenir des résultats
solides, et rattraper les retards pris
dans la réhabilitation des foyers,
notamment dans la suppression des
petites chambres et l’achèvement de la
transformation des foyers en rési-
dences sociales.
La Cour recommande à la société
Adoma de :
poursuivre la rationalisation de
sa gestion et
la sécurisation de ses
emprunts.
Cour des comptes
26
La Monnaie de Paris :
une mutation bien
engagée, des défis à relever
La direction des monnaies et
médailles a été transformée en établisse-
ment public industriel et commercial
dénommé
"La Monnaie de Paris" par la
loi de finances pour 2007.
Comptant aujourd’hui moins de 500
agents, la Monnaie de Paris doit remplir
plusieurs missions prévues par la loi,
certaines en situation de monopole
(frappe de monnaies courantes et de
collection ayant cours légal, poinçons) et
d’autres en situation concurrentielle
(décorations, médailles, monnaies cou-
rantes étrangères).
L’entreprise est confrontée à deux
défis principaux : assurer son équilibre
économique en développant suffisam-
ment ses activités commerciales pour
compenser une activité régalienne peu
rentable, et réussir la nouvelle mission
qui lui a été confiée de valorisation de
son patrimoine immobilier parisien.
Un changement de statut à
l'origine d'une dynamique
positive
Avant le changement de statut, la
situation économique de l’entreprise
était fortement dégradée. Des handicaps
structurels, liés notamment à l’impor-
tance de la masse salariale ont été aggra-
vés par les difficultés liées au passage à
l’euro (commandes très importantes sui-
vies d’une forte baisse d’activité).
Le climat social était très tendu au
sein de l’entreprise, dans un contexte
d’incertitude sur la pérennité des activi-
tés. En 2006, en dépit d’une importante
baisse des effectifs amorcée en 2002, la
situation financière de la direction des
monnaies et médailles restait critique.
En 2007, une nouvelle gouvernance
s'est rapidement mise en place et un
plan stratégique a été défini et validé par
le conseil d'administration en moins
d’un an.
Un dispositif de départs volontaires
a permis d’accélérer la baisse des effec-
tifs, tout en engageant parallèlement un
renouvellement du personnel, sur des
fonctions ciblées.
Cinq ans après le changement de
statut, les résultats sont encourageants.
Les effectifs sont désormais mieux
adaptés aux transformations de l’entre-
prise, et le climat social s’est apaisé.
Le chiffre d’affaires a augmenté de
plus de 50 % en cinq ans. La masse sala-
riale s’est stabilisée et représente désor-
mais 20 % du chiffre d’affaires.
Ces résultats ont permis pour la pre-
mière fois en 2009, le versement d’un
dividende de 8,3 M€ à l’Etat. La dyna-
mique s’est confirmée en 2010, avec un
versement de 12,2 M€, et de 9 M€ en
2011.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
74
Le modèle économique de la
Monnaie de Paris demeure
fragile
Les coûts fixes de l’entreprise sont
encore trop importants. Les effets de la
réduction des effectifs ont en réalité été
compensés par des recrutements dont
certains portaient sur des niveaux élevés
de responsabilité, et donc de rémunéra-
tion. Le niveau des salaires et l’âge
moyen des personnels demeurent, par
conséquent, élevés (en moyenne 3 600 €
bruts mensuels
et 49,6 ans).
De même, les efforts de réorganisa-
tion n’ont pas été suffisamment poussés.
Les fonctions supports sont toujours
très importantes par rapport aux fonc-
tions opérationnelles.
Enfin, l’entreprise reste structurelle-
ment en surcapacité de production de
monnaie. Au moment du passage à
l’euro, les besoins en pièces de 1 euro et
50 centimes ont été largement suresti-
més, ce qui a conduit la direction du
Trésor à faire procéder à la destruction
de 310 millions de pièces. Pour l'État, le
coût global de la surproduction des
pièces d'euro peut être évalué à 41,5 M€,
soit un coût net de 20,5 M€ si l'on tient
compte de la vente du métal, qui devrait
rapporter près de 21 M€.
Les commandes de l’État (autour de
850 millions de pièces) sont désormais
durablement inférieures aux capacités de
production (de 1,5 milliard de pièces).
Pour augmenter la rentabilité des
outils de production, l’activité de frappe
de monnaies courantes étrangères doit
être développée. Ce marché est cepen-
dant très concurrentiel et cette activité
reste pour le moment déficitaire pour
l’entreprise.
En fin de compte, l’embellie actuelle
de la situation économique de la
Monnaie de Paris est principalement liée
au succès des monnaies de collection à
valeur faciale (« euros or et argent »).
Cependant, il repose sur un « effet nou-
veauté » et un « effet d’aubaine » qui
peuvent disparaître.
Quant aux autres activités commer-
ciales de l'établissement, elles sont à
repenser et la Monnaie de Paris doit
envisager d’en arrêter certaines.
Une mission nouvelle de
valorisation du patrimoine à
l'impact incertain
Lors de sa création, l'établissement
public s'est vu confier par la loi, une
mission de valorisation de L'Hôtel de la
Monnaie, qui a donné naissance au pro-
jet Métalmorphoses.
L’ensemble immobilier parisien a
toutefois été privé de la Parcelle de l’an
IV, deux ans après le changement de sta-
tut, alors que celle-ci, occupée par des
ateliers difficilement déplaçables, était
utile au fonctionnement de l'entreprise.
Son transfert à l'Institut de France pour
y construire un auditorium a été décidé
par l’État sans étude d’impact, et sans
tenir compte des conséquences pour la
Monnaie de Paris.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La Monnaie de Paris
75
La perte pour l’établissement est, sur
un plan comptable, de 3,6 M€, mais
celui-ci a également subi des coûts indi-
rects importants liés aux travaux consé-
cutifs au déménagement des machines.
De plus le transfert de la parcelle a
contraint l’établissement à modifier le
projet Métalmorphoses, alors qu’un
marché de maîtrise d’œuvre avait déjà
été conclu.
La direction de l’établissement s’est
appuyée sur le fait que la décision de
transfert de la Parcelle de l’an IV avait
été imposée, pour obtenir une grande
marge de manœuvre dans la mise en
œuvre du projet.
Les prévisions de retombées écono-
miques de ce dernier sont très opti-
mistes ; le projet doit donc faire l’objet
d’une attention constante de la tutelle
(Agence des participations de l'État) et
du conseil d'administration.
Enfin, s'agissant de la mission de
présentation de ses collections histo-
riques, la Monnaie de Paris doit s’effor-
cer, avec l’appui de sa tutelle, de nouer
des partenariats, pour mieux valoriser
son patrimoine.
S’agissant de l’activité de produc-
tion :
prévoir un scénario alternatif
destiné à faire face à l’éventualité d’un
ralentissement de l’activité « monnaies
de collection à valeur faciale » ;
mener, en lien avec la tutelle,
une étude précise et complète, pour
évaluer la pertinence de chacune des
activités commerciales et envisager les
conséquences économiques et organi-
sationnelles de leur arrêt éventuel.
S’agissant des charges de l’entre-
prise :
mieux maîtriser les évolutions
des rémunérations ;
poursuivre l’effort de rationali-
sation des fonctions support ;
limiter le recours aux presta-
taires externes en se réappropriant le
pilotage stratégique.
S’agissant de la mission de valori-
sation du patrimoine :
réexaminer et actualiser le plan
d’affaires du projet Métalmorphoses ;
développer des partenariats, en
particulier avec la Cité de l’économie et
de la monnaie, pour mieux assurer la
présentation des collections histo-
riques.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La Monnaie de Paris
76
Cour des comptes
27
La Fondation du
patrimoine :
un modèle singulier
Instituée par la loi du 2 uillet 1996
et reconnue d’utilité publique par décret
du 18 avril 1997, la Fondation du patri-
moine a reçu la mission de service
public de contribuer à la conservation et
à la valorisation du patrimoine national
non protégé. Ce patrimoine dont les élé-
ments ne bénéficient pas d’un régime de
classement ou d’inscription au titre des
monuments historiques est constitué de
plusieurs centaines de milliers de biens
meubles et immeubles présentant un
intérêt architectural, mémoriel ou paysa-
ger (habitat traditionnel, lavoir, halles,
four à pain, églises rurales, etc.).
Une fondation bénéficiaire
de concours publics
importants
Quinze grandes entreprises partici-
pèrent à l’origine à la constitution du
capital de la Fondation du patrimoine.
Elles sont encore toutes représentées au
sein de son conseil d’administration où
elles détiennent la majorité des voix. La
Fondation dispose aujourd’hui d’envi-
ron 32 M€ de ressources annuelles, dont
des concours publics qui représentent,
selon les années, entre 35 et 50 % de son
budget. Sur la période 2000-2011, la
Fondation du patrimoine a aidé plus de
18 000 projets d’ampleur variable
(14 000 d’entre eux relevant du patri-
moine privé et près de 4 000 du patri-
moine public).
Après un
démarrage lent et difficile,
la Fondation
connaît un essor à partir
de l’année 2000 quand elle est autorisée
par l’administration fiscale à octroyer le
label « Fondation du patrimoine ».
L’année 2004 marque une nouvelle
étape grâce à la décision de lui affecter
une part des recettes domaniales de
l’État issues du produit des successions
en déshérence. Durant la période 2006-
2010 sur laquelle a porté le contrôle de
la Cour, la Fondation est en forte expan-
sion. En à peine quatre ans, ses recettes
augmentent de 80 %.
La Fondation du patrimoine est un
organisme singulier, irréductible à toute
catégorie juridique connue : un orga-
nisme privé attribuant directement des
agréments fiscaux, une fondation béné-
ficiaire d’une recette domaniale de
l’État, une fondation dont les missions
et le fonctionnement n’ont pas été éta-
blis par ses fondateurs mais par la loi,
une fondation dotée d’un statut déroga-
toire au droit des fondations.
Pour le législateur, l’objectif initial
de la Fondation était de dynamiser ini-
tiatives et financements privés en faveur
du patrimoine non-protégé afin qu’ils
viennent compléter l’action et les crédits
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
77
publics plutôt faibles dans ce domaine.
A cette fin, la Fondation se voyait recon-
naître
certains droits inhabituels pour
une institution privée de ce type, comme
la capacité de déclencher, par l’attribu-
tion du label « Fondation du patri-
moine », des réductions fiscales ou
encore, de façon dérogatoire par rap-
port au statut des fondations reconnues
d’utilité publique, la possibilité offerte
aux personnes physiques ou morales
d’une adhésion directe.
En dépit d’une situation unique et
privilégiée, force est de constater que la
Fondation du patrimoine n’est pas par-
venue à lever d’importants concours en
provenance
des
entreprises.
En
revanche, pour réaliser sa mission en
faveur du patrimoine non protégé, elle a
su tirer parti de ses nombreuses préro-
gatives et combiner habilement finance-
ments publics, incitations fiscales et ini-
tiatives des particuliers.
Il découle cependant du régime juri-
dique dans lequel la Fondation évolue
que la dépense publique associée à ses
diverses actions, reste
mal cernée dans
son montant et peu lisible dans son flé-
chage. Ce qui est d’autant plus critiqua-
ble que cet effort budgétaire et fiscal est
beaucoup plus important que ne l’envi-
sageait le législateur au départ : recette
domaniale
affectée,
subventions
annuelles
de
collectivités
locales,
dépenses
fiscales
liées
au
label
« Fondation du patrimoine » et aux
dons.
Un large appui sur le
bénévolat
L’activité de la Fondation repose
aujourd’hui sur un apport de concours
publics significatifs, non prévu au
départ. En outre, l’essor de la Fondation
du patrimoine s’est effectué au prix
d’une réorientation de son action par
rapport aux perspectives tracées par le
législateur. Elle ne s’appuie pas sur un
vaste réseau d’adhérents individuels ni
sur de grands partenariats nationaux,
elle draine peu de mécénat d’entreprises,
elle ne gère, comme maître d’ouvrage,
aucun chantier de rénovation.
La Fondation a cependant su trou-
ver d’autres voies de développement de
ses actions, notamment grâce à une
communauté
de bénévoles très actifs et
au lancement de souscriptions publiques
au niveau local pour financer ses projets
les plus importants.
La Fondation du patrimoine a ainsi
répondu aux objectifs de sa mission,
dans la mesure de ses moyens, selon des
modalités d’action originales et dans des
conditions de gestion satisfaisantes.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La Fondation du patrimoine
78
Pour le ministère de la culture et le
ministère du budget :
informer
annuellement
le
Parlement du montant de la recette
affectée à la Fondation et de son
emploi ;
instituer un mécanisme de pla-
fonnement de cette recette ;
instaurer un dialogue avec la
Fondation du patrimoine sur ses
objectifs et ses actions afin de l’inté-
grer à la politique nationale du patri-
moine ;
renforcer la cohérence entre la
politique générale de protection du
patrimoine et l’outil que représente le
label.
Pour la Fondation du patrimoine :
renforcer le contrôle du siège
sur les délégations régionales en
matière financière ;
approfondir le développement
des ressources privées moins exploi-
tées à ce jour : mécénat d’entreprise,
relance du dispositif d’adhésion ;
appliquer l’ensemble des obliga-
tions relatives à l’appel à la générosité
publique, dans le cadre des souscrip-
tions de « mécénat populaire ».
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La Fondation du patrimoine
79