La sécurité des
navires et de leurs
équipages :
des résultats inégaux, un
contrôle inadapté
Rapport public thématique
Cour des comptes
La sécurité des navires et de leurs équipages – novembre 2012
13 rue Cambon 75100 PARIS CEDEX 01 - tel : 01 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr
SOMMAIRE
DELIBERE
............................................................................................
7
INTRODUCTION
................................................................................
9
CHAPITRE I DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE
DES CONTROLES
............................................................................
23
I
- Les contrôles au titre du pavillon national : des résultats contrastés
......
24
A - Deux grandes catégories de flotte : des problématiques de sécurité
différentes
...................................................................................................
24
1 - La flotte de commerce française
.......................................................
24
2 - La flotte de pêche française
..............................................................
34
B - Des résultats contrastés
.........................................................................
40
1 - La qualité du pavillon de commerce français
....................................
40
2 - La dangerosité de la pêche
................................................................
43
II
- Les contrôles des navires étrangers au titre de l’Etat du port : des
résultats insuffisants
...................................................................................
46
A - Le renforcement des obligations de contrôle
........................................
46
1 - Le « paquet Erika I »
..........................................................................
47
2 - Le «
paquet Erika II »
........................................................................
47
3 - Le « paquet Erika III »
........................................................................
50
B - Le non-respect des obligations et le durcissement des sanctions
.........
54
1 - Des obligations respectées en partie seulement jusqu’en 2010
.......
54
2 - Le nouveau régime et les premiers résultats
....................................
56
CHAPITRE II UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX
ENJEUX ET PRIORITES
.................................................................
61
I
- L’évolution du dispositif
.........................................................................
62
A - L’absence de stratégie et de pilotage
....................................................
62
1 - Des recrutements sans anticipation
..................................................
63
2 - La faiblesse et les lacunes du pilotage
...............................................
79
B - Une logique de contrôle affaiblie au niveau local
..................................
93
1 - Le contrôle du navire
.........................................................................
95
2 - Le contrôle des équipages
...............................................................
100
3 - Les inconvénients de la réforme territoriale
...................................
102
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4
COUR DES COMPTES
II
- Un dispositif de contrôle inadapté
......................................................
104
A - La permanence du régime d’inspection n’est pas assurée
..................
104
B - L’inadéquate distribution des moyens
................................................
107
C - Une réforme en cours insuffisante
......................................................
111
D - Une indispensable réorganisation du dispositif
..................................
113
CONCLUSION GENERALE
..........................................................
119
RECAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
......................
121
ANNEXES
........................................................................................
123
REPONSES DES ADMINISTRATIONS CONCERNEES
..........
153
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Les rapports publics de la Cour des comptes
consacrés à une évaluation de politique publique
La Cour publie un rapport public annuel et des rapports publics
thématiques.
Le présent rapport est un rapport public thématique. Il est consacré à
l’évaluation d’un dispositif administratif, réalisée selon les méthodes utilisées
par la Cour pour ses évaluations de politique publique.
L’évaluation des politiques publiques est une des activités de la Cour.
Selon l’article 47-2 de la Constitution, « elle assiste le Parlement et le
Gouvernement » notamment « dans l’évaluation des politiques publiques ».
Sa contribution à l’évaluation des politiques publiques figure parmi les
missions qui lui sont assignées dans le code des juridictions financières
(article L. 111-3-1). Celui-ci définit également les modalités selon lesquelles
les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat peuvent saisir la Cour de
demande d’évaluation (article L. 135-2).
Dans ses évaluations, la Cour s’attache principalement à apprécier les
résultats de la politique publique examinée au regard à la fois des objectifs
poursuivis (efficacité) et des moyens mis en oeuvre (efficience).
Comme pour les contrôles et les enquêtes, les évaluations peuvent être
réalisées conjointement par la Cour et les chambres régionales des comptes.
En tant que de besoin, il est fait appel au concours d’experts extérieurs. Les
principales parties prenantes à la politique évaluée sont associées aux travaux
d’évaluation. Des consultations et des auditions sont organisées pour
bénéficier d’éclairages larges et variés.
Au sein de la Cour, ces travaux et leurs suites, notamment la
préparation des projets de texte destinés à un rapport public, sont réalisés par
l’une des sept chambres que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour des comptes, ainsi que des chambres régionales des comptes, et
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles, enquêtes et évaluations que
l’élaboration des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la
collégialité.
L
’
indépendance
institutionnelle
des
juridictions
financières
et
statutaire de leurs membres garantit que les travaux effectués et les
conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
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La
contradiction
implique que toutes les constatations et appréciations
ressortant d’un contrôle, d’une enquête ou d’une évaluation, de même que
toutes les observations et recommandations formulées ensuite, sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La publication d’un rapport public est nécessairement précédée par la
communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la Cour.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes de la
préparation et de la réalisation des travaux, ainsi que de leur publication.
Tout contrôle, enquête ou évaluation est confié à un ou plusieurs
rapporteurs. Leur rapport d’instruction, comme leurs projets ultérieurs
d’observations et de recommandations, provisoires et définitives, sont
examinés et délibérés de façon collégiale, par une chambre ou une autre
formation comprenant au moins trois magistrats, dont l’un assure le rôle de
contre-rapporteur, chargé notamment de veiller à la qualité des contrôles. Il
en va de même ensuite pour la préparation des projets de rapport public.
Le contenu des projets de rapport public est défini, et leur élaboration
est suivie, par le comité du rapport public et des programmes, constitué du
premier président, du procureur général et des présidents de chambre de la
Cour, dont l’un exerce la fonction de rapporteur général.
In fine
, les projets
de rapport public sont soumis, pour adoption, à la chambre du conseil où
siègent, sous la présidence du premier président et en présence du procureur
général, les présidents de chambre de la Cour, les conseillers maîtres et les
conseillers maîtres en service extraordinaire.
Ne prennent pas part aux délibérations des formations collégiales,
quelles qu’elles soient, les magistrats tenus de s’abstenir en raison des
fonctions qu’ils exercent ou ont exercées, ou pour tout autre motif
déontologique.
*
Les rapports publics de la Cour des comptes, et ses autres travaux
publiés, sont accessibles en ligne sur le site Internet de la Cour des comptes
et des chambres régionales et territoriales des comptes :
www.ccomptes.fr
. Ils
sont diffusés par
La documentation
f
rançaise.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil réunie en
formation ordinaire, a adopté le présent rapport sur « La sécurité des
navires et de leurs équipages : des résultats inégaux, un contrôle inadapté ».
Le rapport a été arrêté au vu du projet communiqué au préalable aux
administrations concernées et des réponses adressées en retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent la
seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont
participé
au
délibéré :
M. Migaud,
Premier
président,
MM. Descheemaeker,
Bayle,
Bertrand,
Mme
Froment-Meurice,
MM. Durrleman, Lévy, Lefas, Briet, présidents de chambre, MM. Picq,
Babusiaux, présidents de chambre maintenus en activité, MM. Richard,
Rémond, Thérond, Mme Levy-Rosenwald, MM. Duchadeuil, Paul, Lebuy,
Frangialli, Andréani, Mmes Fradin, Dayries, Ratte, MM. Gautier (Jean),
Vermeulen, Diricq,
Mme Malégat Mély, MM.
de Gaulle, Guédon,
Bourlanges, Baccou, Chouvet, Le Mer, Guillot, Jamet, Ortiz, Cotis,
conseillers maîtres.
Ont été entendus :
-
en sa présentation, M. Descheemaeker, président de la chambre
chargée des travaux sur lesquels le rapport est fondé et de la
préparation du projet de rapport ;
-
en son rapport, M. Bertrand, rapporteur du projet devant la
chambre du conseil, assisté de MM. Beaud de Brive, Le Méné,
conseillers maîtres, et M. Dedryver, rapporteur, rapporteurs du projet
devant la chambre chargée de le préparer, et de M. Guédon,
conseiller maître, contre-rapporteur devant cette même chambre ;
-
en ses conclusions, sans avoir pris part au délibéré, M. Johanet,
Procureur général.
***
M. Gérard Terrien, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 27 novembre 2012.
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COUR DES COMPTES
Le projet de rapport soumis à la chambre du conseil a été préparé,
puis délibéré le 19 avril 2012, par la septième chambre de la Cour des
comptes, présidée par M. Descheemaeker, président de chambre, et
composée de MM. Cazala, Ravier, Mme Darragon, conseillers maîtres,
ainsi que, en tant que rapporteurs, MM. Beaud de Brive, Le Méné,
conseillers maîtres, et M. Dedryver, rapporteur, et, en tant que contre-
rapporteur, M. Guédon, conseiller maître.
Le
projet
de
rapport
a
été
examiné
et
approuvé,
le
25 septembre 2012, par le comité du rapport public et des programmes de
la Cour des comptes, composé de MM. Migaud, Premier président,
Johanet, Procureur général,
Descheemaeker, Bayle, Bertrand rapporteur
général du comité, Mme Froment-Meurice, MM. Durrleman, Levy, Lefas
et Briet, présidents de chambre.
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Introduction
Objet de l’évaluation
Le thème de la sécurité des navires n’est souvent évoqué dans les
discours officiels que comme l’un des aspects de la politique de la mer et
en particulier de la sécurité maritime. A la différence de la sécurité routière,
qui fait partie du quotidien des Français dans leurs déplacements, la
sécurité maritime ne retient l’attention du public qu’à l’occasion de
sinistres ou d’accidents de mer occasionnant d’importantes pertes en vies
humaines ou de graves atteintes à l’environnement.
Les erreurs de navigation ou des circonstances météorologiques
particulièrement défavorables peuvent être à l’origine de ces événements.
Pour n’en citer que deux, le cas emblématique du
Titanic
ou celui plus
récent de l’échouement du
Costa Concordia
sur la côte sud de la Toscane
en sont des exemples frappants. Il n’est toutefois pas rare que, dans certains
cas, soient mises en cause des déficiences dans la qualité et la fiabilité du
navire et de ses équipements, ou dans la capacité de l’équipage à le
conduire ou à faire face à certaines situations.
Le naufrage du ferry
Estonia
, le 28 septembre 1994, en mer
Baltique, au cours duquel 852 personnes périrent de noyade ou
d’hypothermie, en fournit un exemple particulièrement révélateur.
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10
COUR DES COMPTES
Le naufrage du ferry « Estonia »
L’enquête a abouti aux conclusions suivantes : la cause directe de
l’accident réside dans la faiblesse des attaches de l’étrave mobile, qui
cédèrent sous la force des vagues. Celle-ci finit par se séparer du navire,
entrainant dans sa chute la rampe de proue, qui fermait l’accès au pont à
voitures, et provoquant une voie d’eau fatale. Le ferry fut déstabilisé, la
gîte atteignant rapidement 30 à 40°. De là une réaction en chaîne mena
rapidement à la perte du navire.
Le schéma ci-dessus représente la porte avant avec ses attaches, à la proue du navire.
Fermée, cette porte sert d’étrave au navire. L’étrave se soulève pour permettre aux
véhicules d’entrer dans le garage.
Crédits photos : Onnettomuustutkinta - Accident Investigation Board Finland
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INTRODUCTION
11
L’analyse des événements révéla de graves lacunes dans la gestion
du naufrage. Une communication claire aux passagers aurait permis de
sauver de nombreuses vies. La majorité des victimes n’a jamais réussi à
sortir du bateau. Un grand nombre de passagers ne savait pas comment
gonfler les gilets de sauvetage qu’ils avaient reçus. En raison de la gîte,
de nombreux canots de sauvetage ne purent être mis à la mer.
La principale conséquence de ce naufrage fut d'imposer un critère
de stabilité résiduelle tenant compte d'un certain volume d'eau réparti sur
le pont garage (accord de Stockholm)
1
. Depuis lors, aucun autre naufrage
de ce type ne s'est produit.
La sécurité des navires est une réalité qui fait partie d’un ensemble
de notions voisines et étroitement liées :
-
la sécurité de la navigation maritime (en anglais
« safety »
)
repose sur des actions de prévention et des actions curatives
telles que des opérations de sauvetage et de lutte contre la
pollution maritime ;
-
la sûreté maritime (en anglais
« security »
) renvoie à la
prévention et la lutte contre tous les actes illicites comme le
terrorisme ou la malveillance ;
-
la sécurité du navire proprement dite, objet du présent rapport,
concerne à la fois le « flotteur
2
»
et ses équipements, ainsi que
les questions liées à la formation et aux conditions de vie et de
travail de l’équipage.
La flotte concernée par l’évaluation de la Cour se compose des
navires appartenant aux catégories définies par le décret n° 84-810 du 30
août 1984 relatif à la sauvegarde de la vie humaine, à l’habitabilité à bord
des navires et la prévention de la pollution à savoir :
-
le navire de charge : tout navire autre qu’un navire à passagers,
un navire de pêche ou un navire de plaisance tel que porte-
conteneurs, pétrolier, vraquier, etc. La catégorie recouvre ici
1
Accord conclu à Stockholm le 28 février 1996.
2
Dans le monde maritime, le navire est communément désigné sous le terme de flotteur.
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COUR DES COMPTES
aussi, dans le présent rapport, les navires spéciaux (recherche,
exploration, câblier, etc.) ;
-
le navire à passagers : tout navire qui transporte plus de douze
passagers (sont exclus les navires à voile ne transportant pas plus
de 30 personnes)
3
;
-
le navire de pêche : tout navire utilisé à des fins commerciales
pour la capture et le traitement des poissons et des autres
animaux marins.
La politique de sécurité des navires, dans sa partie normative, est
désormais largement négociée et déterminée au niveau international et
européen. En revanche, les décisions politiques et administratives relatives
aux systèmes et dispositifs de contrôle restent du ressort des États.
L’évaluation de la Cour a donc porté sur les performances et la
pertinence du dispositif français de contrôle de la sécurité des navires.
L’action de la France dans ce domaine s’exerce dans le cadre de
trois types de missions :
-
celles conduites au titre de l'État du pavillon à l’égard des navires
battant pavillon national et soumis au droit français ; cette
compétence repose sur la convention des Nations Unies sur la
haute mer du 29 avril 1959 ; les contrôles s’exercent sur une
flotte d’environ 18 200 navires se répartissant entre 5 400 se
livrant à des activités commerciales et 12 800 à des activités de
pêche et de conchyliculture, en métropole et outre-mer ;
-
celles accomplies au titre de l'État du port à l’égard des navires
étrangers faisant escale en France : environ 6 000 par an au cours
des dernières années correspondant à 15 000 à 16 000 escales
4
;
ce type de contrôle créé par le Mémorandum d’entente de Paris
(MOU pour « Memorandum of understanding » de Paris), signé
le 26 janvier 1982, est aussi désormais encadré par des directives
européennes ;
-
celles assurées au titre de l’État côtier à l’égard des navires en
circulation dans les eaux placées sous la juridiction de l’État, en
vertu de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du
10 décembre 1982 (Montego Bay) ; 300 000 navires franchissent
3
La flotte de plaisance, à l’exception des navires à utilisation collective (NUC) est régie
par des dispositions spécifiques en matière de contrôle de la sécurité et ne rentre pas
dans le champ de l’évaluation.
4
Un navire peut faire plusieurs escales au cours d’une année dans différents ports
français.
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INTRODUCTION
13
chaque année la Manche et fréquentent ainsi notre espace côtier
dans cette zone.
5
Le «
paquet Erika III »
Le Parlement européen et le Conseil ont adopté, le 23 avril 2009, sous
l’impulsion de la présidence française de l’Union européenne, le
troisième « paquet » sur la sécurité maritime (dit « paquet Erika III »). Il
se compose de deux règlements et de six directives qui renforcent
significativement la réglementation européenne relative à la sécurité
maritime.
Ce troisième « paquet » vise à renforcer la législation relative à
l’inspection des navires, aux systèmes de surveillance du trafic maritime,
aux accidents de mer, aux dédommagements, aux sociétés de
classification, à l’action des États du pavillon, aux enquêtes accidents
ainsi qu’aux conditions de travail des marins.
À ce titre, depuis le 1
er
janvier 2011, un nouveau régime d’inspection des
navires par l’État du port est en vigueur : il tend à renforcer la sécurité
maritime, tout en évitant les distorsions de concurrence entre ports. Il
s’agit de l’une des mesures phares du « paquet Erika III ».
Peu abordé au niveau politique, en dehors des contextes émotionnels
crées par la disparition de marins en mer ou l’échouement d’un navire sur
nos côtes, le thème de la sécurité des navires au sens strict ne donne pas
lieu à l’affichage d’objectifs autres que généraux et non quantifiés sur la
nécessité de renforcer la qualité du pavillon national ou de lutter contre les
menaces susceptibles d’affecter notre environnement côtier et portuaire.
Toutefois, à la différence d’autres nations maritimes, qui ont délégué
la plus grande partie de leurs compétences et de leurs pouvoirs dans le
domaine du contrôle à des sociétés privés (sociétés de classification), la
France, forte d’une longue tradition administrative d’encadrement de sa
flotte et de ses marins, a conservé une organisation structurée et
hiérarchisée du niveau central aux échelons déconcentrés et opérationnels
5
Ces missions, principalement de surveillance du trafic maritime, des pêches maritimes
et des pollutions, ainsi que de recherche et sauvetage en mer reposent sur un dispositif et
des moyens : ceux des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage
(CROSS), des administrations civiles et militaires participant à l’action de l’État en mer
et de la société nationale de sauvetage en mer, association reconnue d’utilité publique,
qui ne rentrent pas dans le périmètre de la présente évaluation.
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COUR DES COMPTES
locaux. Les moyens humains et budgétaires de ce dispositif sont
aujourd’hui pilotés et suivis dans le cadre de la loi organique relative aux
lois de finance (LOLF).
L’organisation administrative concernée
À l’échelon administratif, la définition d’objectifs et d’indicateurs
relève prioritairement de la direction des affaires maritimes (DAM), au sein
de la direction générale des infrastructures, du transport et de la mer
(DGITM) du ministère de l’écologie, du développement durable et de
l’énergie.
Structures administratives concernées et correspondances
avec le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes »
du budget de l’Etat
Champ : le trait jaune indique le périmètre de l’évaluation menée par la Cour des comptes.
Le périmètre du programme 205 correspond à celui défini pour la loi de finances pour 2012
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INTRODUCTION
15
Les seuls objectifs et indicateurs sectoriels déclinés par cette
direction en matière de sécurité des navires figurent dans le programme 205
« sécurité et affaires maritimes » du budget de l’Etat et se limitent à :
-
l’objectif n° 1 : renforcer la sécurité maritime et la protection de
l’environnement, appuyé notamment d’un indicateur portant sur
le taux de contrôle des navires étrangers faisant escale dans nos
ports ;
-
l’objectif n° 2 : promouvoir la flotte de commerce et l’emploi
maritime, suivi notamment par l’indicateur du nombre total de
navires de commerce sous pavillon français.
S’agissant du secteur de la pêche il n’est pas défini, dans le
programme 205, d’autres objectifs et indicateurs que ceux afférents aux
contrôles et infractions constatées dans le domaine de la préservation des
ressources halieutiques.
Le dispositif de contrôle de la sécurité des navires est entièrement
sous la responsabilité de la direction des affaires maritimes, dépendant de
la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer placée
aujourd’hui sous l’autorité du ministre délégué chargé des transports, de la
mer et de la pêche.
La DAM exerce trois grandes missions :
-
la sécurité et la sûreté maritime ;
-
le suivi social des gens de mer ;
-
le pilotage des services déconcentrés agissant sur le littoral.
En son sein, la sous-direction de la sécurité maritime regroupe les
bureaux du sauvetage et de la circulation maritimes, de la réglementation et
du contrôle de la sécurité des navires, du contrôle des navires au titre de
l’État du port et des phares et balises. La direction comporte aussi une
mission de la flotte de commerce et une mission de la navigation de
plaisance et des sports nautiques
6
.
6
La problématique du contrôle des navires de plaisance en dehors des navires à
utilisation collective (NUC), soumis aux inspections des centres de sécurité des navires
(CSN), ne rentre pas dans le champ de l’évaluation.
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COUR DES COMPTES
Organigramme de la direction des affaires maritimes (DAM)
Sources : Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE)
Au niveau central, deux autres services concourent à l’exécution et
au suivi de la politique de sécurité des navires.
Le premier est l’inspection générale des affaires maritimes, service
d’inspection générale du ministère dans le domaine maritime. Elle remplit
aussi la fonction de « direction de corps » prévue par l’article 2 des décrets
statutaires des trois corps d’officiers des affaires maritimes : les
administrateurs des affaires maritimes (AAM), les officiers du corps
technique et administratif des affaires maritimes (OCTAAM) et les
professeurs de l’enseignement maritime (PEM). Dans sa mission
d’inspection, elle a naturellement vocation à effectuer, à la demande du
ministre, des audits, inspections et études sur tous les services déconcentrés
des affaires maritimes, notamment les centres de sécurité des navires
(CSN).
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INTRODUCTION
17
Le second est le bureau enquêtes accident/mer (BEAmer), devenu
bureau d’enquêtes sur les événements de mer et service à compétence
nationale depuis 2004, indépendant de la direction des affaires maritimes.
Ce bureau :
-
a pour mission de réaliser les enquêtes techniques sur les
événements de mer ;
-
a également vocation à recueillir, exploiter et diffuser les
informations relatives aux pratiques et aux enseignements de
retour d’expérience sur les événements de mer ;
-
exécute des études et recherches en matière de retour
d’expérience et d’accidentologie.
Méthodologie et périmètre de l’évaluation
La Cour a procédé à l’évaluation du dispositif de contrôle de la
sécurité des navires dans le cadre de sa mission d’évaluation des politiques
publiques, fixée par l’article 47-2 de la Constitution et l’article L. 111-3-
1 du code des juridictions financières.
L’évaluation avait pour but de mesurer les performances et
d’apprécier l’efficacité et la pertinence du dispositif public de contrôle de la
sécurité des navires au regard des deux missions (État du pavillon et État
du port) et des objectifs, explicites et implicites, qui lui sont assignés, ainsi
que des avantages et services qu’il rend à la collectivité nationale
7
.
En effet, si le coût pour les finances publiques du système de
contrôle, essentiellement composé de la masse salariale des inspecteurs,
facile à chiffrer, peut apparaître relativement limité, en revanche, la valeur
des services rendus, plus délicate à appréhender a priori, n’en est pas moins
considérable.
Les avantages que doit retirer la collectivité nationale de cette
politique publique sont de deux ordres et ils doivent s’apprécier en termes
de coûts humains et financiers, de risques matériels et environnementaux
que peuvent faire courir les déficiences et les lacunes des contrôles de
sécurité.
7
L’évaluation ne portait donc pas sur la sécurité de la navigation maritime et les
problématiques de surveillance du trafic, de sauvetage et de lutte contre les pollutions en
mer qui lui sont notamment associées.
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18
COUR DES COMPTES
Dans un premier domaine, le montant du risque évité est le coût que
devrait prendre en charge la collectivité dans l’hypothèse d’accidents et de
sinistres maritimes
8
imputables à un défaut ou à une insuffisance de
mesures relatives à la sécurité du navire. Parmi celles-ci peuvent figurer les
actions de contrôle de la puissance publique, que ces actions soient
exercées directement par des agents publics ou déléguées.
Dans un second domaine, plus facile à chiffrer, le montant est celui
de la sanction financière évitée par le respect des obligations de contrôle de
l’État du port fixées au niveau européen et de plus en plus contraignantes.
La démarche adoptée par la Cour a été, pour l’essentiel, construite :
-
d’une part, à l’aide de ses techniques traditionnelles de contrôle
et d’analyse dans les examens de la gestion d’une structure
publique (questionnaires, analyses de textes et de données, tests
sur des systèmes, examens d’outils de pilotage, visites dans les
services, comparaisons internationales, etc.) ;
-
d’autre part, par la recherche, la plus objective et méthodique
possible, de l’avis et de la perception des principaux acteurs et
parties prenantes du système (contrôleurs, contrôlés et tiers
intéressés) sur l’utilité, la qualité et l’efficacité des contrôles.
8
Le gigantisme, tant en matière de navires à passagers, que de navires de charges
(porte-conteneurs), peut rendre les coûts humains et financiers de plus en plus
considérables.
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INTRODUCTION
19
Schéma des parties prenantes questionnées et entendues
pendant l’enquête
Source : Cour des comptes
Les outils utilisés dans la démarche évaluative visant à recueillir
l’opinion des parties prenantes (répétition d’entretiens structurés ou semis
structurés, questionnaires informatiques en ligne, réunions de groupes
témoins) ont été :
-
des questionnaires principalement à l’administration centrale des
affaires maritimes pour obtenir des informations générales puis
plus précises sur les différents aspects de la sécurité des navires
et des systèmes de contrôle ;
-
des entretiens avec divers responsables administratifs au sein de
la direction des affaires maritimes, l’inspection générale des
affaires maritimes, le bureau enquêtes accidents/mer (BEAmer),
la sous-direction des ports ; ces entretiens ont été précédés ou
suivis de questionnaires à ces administrations ;
-
des
entretiens
semi-structurés
avec
les
quatre
directeurs
interrégionaux de la mer, cinq chefs de centre de la sécurité des
navires, une cinquantaine d’inspecteurs de la sécurité des
navires ;
ces
entretiens
ont
été
précédés
de
demandes
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20
COUR DES COMPTES
d’information et de données afin de préparer les visites effectuées
auprès de ces administrations en province ;
-
des ouvrages, articles et documents divers portant sur la sécurité
des navires ;
-
une analyse des sources et systèmes d’information (statistiques,
bases de données, données règlementaires et documentaires)
détenus par les parties prenantes intervenant dans le suivi de la
sécurité des navires ;
-
la mise en oeuvre de trois questionnaires électroniques en ligne,
sur des sites dédiés destinés à recueillir, par la voie de
sondages, les avis de trois groupes d’acteurs : les seize chefs des
centres de sécurité des navires, l’ensemble des inspecteurs de la
sécurité des navires des cinq centres de sécurité des navires
formant
l’échantillon
choisi,
une
population
de
200
commandants de navires adhérents de l’association française des
capitaines de navire (AFCAN) ;
-
la réunion de deux groupes témoins sur la sécurité des navires
composés, l’un des directeurs techniques des principaux
armements français, l’autre de représentants régionaux du comité
national des pêches ;
-
une trentaine d’entretiens individuels avec diverses parties
prenantes
publiques
et
privées
du
secteur
maritime :
constructeurs, armateurs, sociétés de classification, assureurs,
organisations professionnelles et syndicales ;
-
des déplacements pour rencontrer les parties prenantes publiques
internationales : commission européenne, représentation de la
France auprès de l’Union européenne (Bruxelles), agence
européenne de sécurité maritime (Lisbonne), organisation
maritime internationale et représentation de la France auprès de
cette organisation (Londres).
Enfin un groupe référent, composé de quatre experts, a été consulté
sur les problématiques envisagées, puis sur les principales conclusions et
recommandations élaborées au cours de l’enquête
9
.
Au terme de celle-ci, la Cour constate que le dispositif public, mis en
place à l’origine pour les seuls contrôles de l’État du pavillon, produit des
résultats de qualité inégale, pour ce type de contrôle, suivant les secteurs et
9
L’annexe 1 présente dans le détail les outils méthodologiques utilisés et indique la liste
des experts du groupe référent.
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INTRODUCTION
21
les flottes concernés. En matière de contrôles d’État du port, il ne parvient
pas, depuis plusieurs années, à atteindre les objectifs qui lui sont fixés
(chapitre I).
Ce dispositif
s’est développé depuis dix ans à la suite du sinistre du
pétrolier Erika, le 12 décembre 1999, au large des côtes bretonnes, sans
anticipation et stratégie clairement affichée et sans réel pilotage du réseau
de centres de sécurité des navires par les pouvoirs publics. Il est de surcroît
affaibli par la récente réorganisation territoriale de l’administration de
l’État qui lui fait perdre son unité d’action. Ainsi, il ne parvient plus,
aujourd’hui, à faire face efficacement aux nouveaux enjeux des contrôles,
notamment européens, et à concilier les deux missions principales qui lui
sont assignées. La Cour en tire la conclusion, qu’au-delà de la réforme en
cours, il doit donc être profondément réorganisé et redéployé (chapitre II).
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Chapitre I
Des résultats inégaux selon la nature des
contrôles
Le dispositif de contrôle d’un État a pour première mission de veiller
à la qualité de sa flotte et à la sécurité des navires et des équipages qui la
composent. Historiquement le système administratif français a répondu à
cette mission en suivant une double démarche fondée sur :
-
des visites périodiques du navire (le flotteur) et de ses
équipements, de sa construction à sa fin de vie, comprenant,
outre les inspections et la délivrance de titres de navigation par
des services étatiques, les interventions, sous forme de
classifications et certifications, de sociétés spécialisées dites de
classification, portant sur les multiples aspects de la sécurité
(coque, flottabilité, fiabilité des matériels et équipements, etc.) ;
-
la vérification des compétences des marins et des équipages,
examinées notamment à travers la détention des brevets adéquats,
l’aptitude médicale à naviguer et l’existence des effectifs
nécessaires à la conduite des navires dans des conditions de
navigation données.
En termes d’efficacité, mesurée notamment par les taux d’accidents,
il produit des résultats contrastés selon les catégories de flotte.
Sa seconde mission, portant sur le contrôle des navires étrangers en
escale dans les ports français, qui prend une importance accrue au regard
des impératifs de protection de l’espace côtier européen, lui impose de
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COUR DES COMPTES
remplir un certain nombre d’objectifs qu’il ne parvient pas à atteindre
depuis plusieurs années.
I
-
Les contrôles au titre du pavillon national : des
résultats contrastés
A - Deux grandes catégories de flotte : des
problématiques de sécurité différentes
La flotte de commerce française, notamment celle naviguant à
l’international, se distingue de la flotte de pêche par de nombreux aspects
qui emportent de lourdes conséquences en matière de sécurité.
1 -
La flotte de commerce française
Selon les données collectées par la mission de la flotte de commerce
(MFC) placée au sein de la direction des affaires maritimes, la flotte de
commerce française rassemble, au 1
er
juillet 2012, toutes activités et
tonnages confondus, plus de 5 400 navires comprenant, outre ceux à
passagers et de charge, des avitailleurs, plateformes, navires de recherche et
d’exploration,
câbliers,
remorqueurs,
yachts
utilisés
à
des
fins
commerciales, vedettes diverses, dont 3 000 petits navires destinés aux
services publics.
Il est à noter que ce chiffre de 5 400 navires, indiqué par la mission
de la flotte de commerce dans ses publications semestrielles depuis 2010,
ne correspond pas aux données fournies par la sous-direction de la sécurité
maritime, relevant pourtant de la même direction, à partir d’un tableau
recensant la flotte administrée par les centres de sécurité des navires qui fait
ressortir une flotte de commerce composée globalement de 5 273 navires
début 2011
10
.
10
La direction des affaires maritimes (DAM) ne donne aucune information statistique et
qualitative sur la flotte de commerce française en dehors de celle relative à la flotte à
navigation au long cours et au cabotage des navires de plus de 100 unités de jauge brute
affectés au transport de passagers ou de marchandise.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
25
Tableau n° 1 :
Flotte (hors pêche) par centre de sécurité
des navires (CSN).
Champ : flotte hors pêche et conchyliculture par centre de sécurité des navires
Sources : Direction des affaires maritimes (DAM) (début 2011)
En outre, le chiffre de 5 400 inclut, selon la mission de la flotte de
commerce, 206 navires de plus de 100 UMS
11
de jauge brute affectés aux
transports de passagers ou de marchandises, totalisant plus de 6,2 M
d’unités de jauge brut avec une capacité d’emport de près de 7,8 M de
tonnes de port en lourd.
11
Universal Measurement System : unité de mesure du tonnage pour les navires de
longueur supérieure à 24 mètres effectuant des voyages internationaux.
Type de navire
Navires à
passagers
> 500
UMS
Navires >
200
passagers
Autres
navires à
passagers
Navires
spéciaux
internation
al > 500
Autres
navires de
charge >
500
Charge >
500
national
Autres
navires de
charge
national
Total
flotte de
commerce
Bordeaux
4
0
46
0
8
4
65
127
Boulogne
4
0
0
0
0
0
43
47
Brest
2
8
17
7
22
0
168
224
Caen
5
15
16
0
5
0
210
251
Concarneau
0
11
27
2
9
1
23
73
Dunkerque
3
0
1
7
9
2
0
22
La Rochelle
0
41
39
0
3
2
129
214
Le Havre
1
2
2
0
25
3
103
136
Lorient
7
19
30
0
0
0
40
96
Marseille
21
15
500
5
34
5
1200
1780
Rouen
2
13
0
0
0
3
88
106
Saint Malo
2
27
16
0
0
2
115
162
Saint Nazaire
3
27
9
1
16
9
191
256
Sete
0
0
43
0
0
1
238
282
Antilles Guyane
5
69
173
0
11
0
136
394
Nouvelle Calédonie
8
2
132
2
0
3
139
286
Sud Océan Indien
0
4
7
1
1
1
71
85
Polynésie
9
12
510
0
2
10
189
732
TOTAL
76
265
1568
25
145
46
3148
5273
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26
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Tableau n° 2 : Statistiques sur la flotte de commerce
française au 1
er
juillet 2012 (navires de plus de 100 UMS)
Champ : navires de plus de 100 UMS en nombre de navires et en millions de tonnes
de port en lourd – données au 1
er
juillet 2012
Sources : Direction des affaires maritimes (DAM) – Mission de la flotte de commerce
35
9
16
2
1
25
25
15
76
2
Pétrolier
Transporteur gaz liquéfié
Navire citerne produits
chimiques
Vraquier
Autres navires vracs secs
Porte conteneurs intégral
Rouliers
Cargos
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
195
200
205
210
215
220
225
230
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Nombre
millons de TPL
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
27
Répartie selon les registres d’immatriculation
12
, la flotte française de
transport de plus de 100 unités de jauge brute comprend, au 1
er
juillet 2012,
91 navires inscrits au registre international français (RIF), 75 navires au
registre métropolitain et 40 aux registres d’outre-mer dont 27 en Polynésie
française
13
.
Les registres d’immatriculation
La France compte six registres d’immatriculation : le registre
applicable en métropole et dans les départements d’outre-mer, le registre
international français (RIF) créé par la loi du 3 mai 2005, le registre des
Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), le registre de
Nouvelle-Calédonie, le registre de Wallis et Futuna, le registre de
Polynésie française.
Le registre international français (RIF)
Le
registre
international
français
(RIF)
est
un
registre
communautaire offrant des procédures administratives simplifiées
d’immatriculation et de francisation dans le cadre d’un guichet unique,
qui assure aussi un appui aux armements dans leurs autres relations avec
l’administration française. Il s’accompagne de différentes mesures
fiscales ou d’exonérations. Il assure un socle social pour les navigants
non-résidents en France. Il fixe des exigences de nationalité pour la
composition de l’équipage.
Les navires immatriculés au registre international français (RIF)
sont soumis à l’ensemble des règles de sécurité et de sûreté maritimes, de
formation des navigants, de santé et de sécurité au travail et de protection
de l’environnement applicables en vertu de la loi française, de la
réglementation communautaire et des engagements internationaux de la
France.
12
L’immatriculation du navire recouvre son inscription et lui confère la possibilité de
naviguer par la délivrance indispensable des titres de navigation et de sécurité. Un
même pavillon peut comporter plusieurs registres pour lesquels les règles juridiques
applicables aux marins ou aux navires peuvent être différentes.
13
Statistiques juillet 2011 Mission flotte de commerce, direction des affaires maritimes
(DAM).
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28
COUR DES COMPTES
En ajoutant aux 91 navires de transport les navires de la flotte de
travaux et services auxiliaires, ce sont 300 navires qui sont immatriculés au
registre international français en 2012.
Cette flotte se caractérise par plusieurs facteurs favorables à sa
qualité et à la sécurité de sa navigation.
Le gigantisme : une nouvelle donne
Crédits photos : CMA CGM
a)
Une flotte jeune
Avec une moyenne d’âge de 8 ans au 1
er
juillet 2012, la flotte de
commerce international française se situe parmi les plus jeunes, tant au sein
de la flotte mondiale (16,4 ans) que parmi celles des pays de l’Union
européenne (12 ans).
En revanche, comme le montrent les tableaux suivants, sa taille,
exprimée en capacité d’emport, est limitée comparée à celles d’autres
nations maritimes.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
29
Tableau n° 3 :
Classement par pavillons d'immatriculation,
2011
Champ : Flotte marchande par pavillons d'immatriculation et par types de navires, 1980-2012
Sources : Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED)
Les armateurs ont le libre choix des Etats et donc des pavillons pour faire immatriculer leurs
navires.
306032
166246
98757
91733
71420
67465
67287
61294
52741
38774
32321
22201
20155
20081
19440
17566
15278
14739
13892
12662
12105
10860
10725
8745
8336
0
100000
200000
300000
Panama
Libéria
Îles Marshall
Chine (RAS de Hong Kong)
Grèce
Bahamas
Singapour
Malte
Chine
Royaume-Uni
Chypre
Japon
Corée, République de
Norvège
Italie
Allemagne
Inde
Danemark
Antigua-et-Barbuda
États-Unis
Indonésie
Bermudes
Malaisie
Turquie
France
1
2
3
4
5
6
7
8
9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
Milliers de tonnes de port en lourd
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30
COUR DES COMPTES
Tableau n° 4 :
Les flottes marchandes de quelques pays
européens et du Japon
Milliers de tonnes de port en lourd
14
2000
2005
2011
France
7293
6311
8336
Allemagne
7788
9381
17566
Italie
9769
11316
19440
Japon
22723
16013
22201
Pays-Bas
6607
7940
7036
Espagne
2053
2655
2750
Royaume-Uni
11913
23161
38774
Danemark
7421
9033
14739
Champ : Flotte marchande par pavillons d'immatriculation et par types de navires,
annuel, 1980-2012
Sources :
Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (
CNUCED)
b)
Une flotte bien encadrée et suivie
La
flotte
de
commerce
française
pratiquant
la
navigation
internationale opère dans un contexte normatif de plus en plus contraignant
et dans un environnement professionnel soucieux de sécurité.
Le poids des normes
Les objectifs et les normes de sécurité des navires de commerce
pratiquant la navigation internationale sont aujourd’hui de plus en plus
fixés au niveau international et systématiquement transposés dans les
réglementations nationales.
À partir de la fin du XIXème siècle, le développement du transport
maritime et les disparitions en mer, comme celle du
Titanic
en 1912, ont
conduit à l’apparition des premières réglementations. Le mouvement s’est
14
(le port en lourd d’un navire représente le chargement maximum qu’il peut emporter ;
il est égal au déplacement en charge (poids total du navire chargé au maximum – tirant
d’eau milieu au marques de franc-bord) moins son déplacement lège (poids total navire
lège, c’est-à-dire sans cargaison ni approvisionnements).
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
31
accéléré avec la création en 1948 d’une agence spécialisée des
Nations Unies devenue l’Organisation maritime internationale (OMI) en
1982.
Sous son égide, une quarantaine de conventions couvrant l’ensemble
des problématiques de sécurité maritime ont été adoptées puis ratifiées par
les États membres. Elles peuvent être regroupées en trois grandes
catégories :
-
celles traitant de la prévention des accidents ou de la pollution
marine ;
-
celles concernant la sécurité de la navigation ;
-
celles, enfin, afférentes à l’indemnisation et aux régimes de
responsabilité en cas d’accidents ou de sinistres.
S’agissant de la sécurité proprement dite et de la prévention des
accidents et des pollutions, deux conventions et un code régissent
l’essentiel du domaine et fixent la plupart des obligations relatives aux
visites et inspections des navires et à la délivrance des certificats de
conformité.
La convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine
en mer, dite convention SOLAS (
« Safety of life at sea »
), de 1974, entrée
en vigueur en 1980, est la plus importante. Elle régule le contrôle des
différents types de navires et des documents de sécurité devant se trouver à
bord. Elle ne s’applique, sauf exception, qu’aux voyages internationaux des
navires de charge de jauge brute supérieure à 500 et aux navires à
passagers.
La convention internationale pour la prévention de la pollution, dite
convention MARPOL (
« Marine Pollution »
), entrée en vigueur en 1983,
constitue le traité majeur pour la protection de l’environnement marin.
Ces deux conventions sont complétées par le code international de
gestion de la sécurité (dit code ISM, pour
International Safety
Management
) rendu applicable depuis 1993 par son intégration au chapitre
IX de la convention SOLAS. Selon ce code, l’armateur doit mettre en place
des pratiques d’exploitation et un environnement de travail sûr. Il doit
évaluer tous les risques prévisibles pour ses navires, son personnel et
l’environnement, et prévoir des mesures de sécurité appropriées.
L’élément humain de la sécurité est pris en compte dans la
convention sur les normes de formation des gens de mer et de délivrance
des brevets et de veille, dite convention STCW
(« Standards of Training
Certification and Watchkeeping »
). Les obligations et contrôles au titre de
la protection des gens de mer viennent d’être renforcés par l’entrée en
vigueur, d’ici août 2013, de la convention de l’Organisation internationale
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32
COUR DES COMPTES
du travail sur le travail maritime, dite MLC (Maritime Labour Convention),
adoptée en février 2006
15
.
La réglementation nationale, dans laquelle sont transposées les
dispositions de ces conventions mais aussi celles résultant des différentes
directives européennes traitant des contrôles de l’Etat du port et de ceux
exercés sur les sociétés de classification, se compose de trois textes : la loi
n° 83-581 du 5 juillet 1983 modifiée sur la sauvegarde de la vie humaine en
mer, son décret d’application, déjà cité, du 30 août 1984 modifié et l’arrêté
du 23 novembre 1987 modifié relatif à la sécurité des navires qui fixe les
prescriptions techniques auxquelles doivent satisfaire les navires et leurs
équipements.
Les sociétés de classification
La création des sociétés de classification date de la première moitié du
19
ème
siècle à l’initiative des assureurs maritimes. Leur origine repose sur
les besoins de renseignements, plus précisément de critères de fiabilité
que réclamaient les assureurs pour fixer le montant des primes
d’assurance de tel ou tel navire.
Elles fournissent, en premier lieu, des prestations privées se fondant sur
leur règlement qui établit les normes techniques relatives à la conception,
la construction et au contrôle des navires et des équipements maritimes
durant leur exploitation. Elles octroient, sur la base de ces règles qui leur
sont propres, une cote au navire (la classe) formalisée par un certificat. Le
maintien de la validité de ce certificat repose sur des visites de classe
(périodiques, spéciales, catégorielles, occasionnelles, etc.).
A ces prestations contractuelles privées avec les exploitants des navires
sont venues s’ajouter des prestations statutaires reposant entre autres sur
les dispositions des conventions internationales sur la sécurité et la
pollution par les hydrocarbures. A ce titre, ce sont les Etats du pavillon
qui délèguent, de façon statutaire ou conventionnelle, des contrôles
techniques aux sociétés de classification et les encadrent.
15
La convention a maintenant été ratifiée par un nombre d’Etats suffisant pour
permettre son entrée en vigueur. S’agissant de la France, cette procédure n’a pas encore
été accomplie : le projet de loi de ratification se trouve toujours sur le bureau du Sénat
où il a été déposé en février 2012.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
33
Cinq sociétés de classification sont reconnues et agréées par l’Etat
français et peuvent se voir ainsi déléguer des contrôles.
Ces délégations portaient, jusqu’à la réforme en cours proposée et mise
en oeuvre par l’administration des affaires maritimes, sur la délivrance et
le renouvellement des certificats de franc bord. En outre, des visites
périodiques leur étaient ponctuellement déléguées par les centres de
sécurité des navires.
Les cinq sociétés concernées sont : le bureau Veritas, Lloyd Register of
Shipping, Det Nort Veritas, Germanischer Lloyd et American Bureau of
Shipping. Le bureau Veritas effectue 80 à 90 % des contrôles délégués en
France.
Un rapport de l’inspection générale des services des affaires
maritimes de 2006 montrait que les normes de sécurité des navires s’étaient
fortement développées depuis une dizaine d’années et mettait en évidence
les retards, imprécisions et difficultés rencontrés dans leur transposition
dans la réglementation nationale. Les moyens mis en oeuvre au sein de la
direction pour effectuer les transpositions se limitaient à une personne en
2011.
La direction des affaires maritimes estime également insuffisante,
pour défendre efficacement les intérêts nationaux, la présence française
dans les instances d’élaboration des normes au niveau européen et de
l’Organisation maritime international.
Pour les représentants des principaux armateurs, entendus lors de
l’évaluation, le poids des fabricants dans l’évolution de la réglementation
conduit trop souvent à des surcoûts. Selon la Fédération française des
pilotes maritimes, également consultée, cette évolution est parfois inutile et
même néfaste. Ainsi l’ECDIS (Electronic Charts Display), système de
visualisation des cartes électroniques capable de positionner le navire sur la
représentation de cartes à l’écran, est devenu une norme de l’Organisation
maritime internationale sous la pression des fabricants. Or, il existe plus
d’une trentaine de modèles différents, très coûteux, qui ne dispensent pas
de la veille optique.
Le souci de la sécurité
Dans le secteur du commerce, comme d’ailleurs dans celui de la
pêche, les objectifs formalisés en termes de sécurité sont à rechercher
plutôt du côté des professionnels que de celui de l’administration.
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34
COUR DES COMPTES
Déjà, après le naufrage du pétrolier
Prestige
le 13 novembre 2002,
l’organisation professionnelle « Armateurs de France » avait communiqué
sur ses souhaits : d’une adoption accélérée des « paquets Erika »
16
, du
maintien du calendrier d’élimination des navires pétroliers à simple coque,
de la responsabilisation et du contrôle des États du pavillon, du payement
du transport maritime à son juste prix et non à celui de l’intervenant le
moins scrupuleux.
Depuis cette date, les entreprises de transport et de services
maritimes françaises se sont engagées avec la « Charte Bleue d’Armateurs
de France » dans une démarche active qui a le mérite de promouvoir, de
manière explicite, une vision et des actions en faveur de la sécurité
maritime et du respect de l’environnement. On peut trouver dans ce
document une trace de l’effort poursuivi pour garantir de bonnes pratiques
en matière de sécurité.
Cette charte, signée en 2003, formule une série d’engagements et le
premier d’entre eux porte sur la sécurité et la sûreté des navires. La création
d’un comité de la Charte chargé de sa bonne application, de la formulation
de recommandations, de la proposition de sanctions et de la communication
de résultats, témoigne aussi du volontarisme des instances professionnelles.
S’ajoutent à ces objectifs de sécurité stricto sensu des engagements portant
notamment sur les conditions de vie et de travail des équipages, ainsi que
sur la transparence et la qualité du management.
Ces engagements d’ « Armateurs de France » s’agissant de la flotte
de commerce peuvent donc être regardés comme des objectifs de la part
d’une catégorie d’acteurs privés particulièrement concernés par la sécurité.
2 -
La flotte de pêche française
A la différence de la flotte de commerce, notamment celle de
navigation
internationale, la flotte de pêche est mal suivie et
insuffisamment connue au niveau central. Elle est vieillissante et
globalement
inadaptée
aux
nouveaux
enjeux
économiques,
environnementaux et de sécurité maritime.
16
Ensemble de dispositions relatives à la sécurité maritime négociées et adoptées au
niveau de l’Union européenne en trois blocs ou « paquets » successifs entre 2000 et
2009, examinées au point A du II du présent chapitre.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
35
a)
Une flotte mal suivie
Selon les données de l’INSEE, reprenant celles de la direction des
pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) et de l’OFIMER, la flotte de
pêche française (métropolitaine hors conchyliculture) a évolué ainsi qu’il
suit entre 2007 et 2011.
Tableau n° 5 :
flotte de pêche française métropolitaine par
catégories de taille de navires
2007
2008
2009
2010
2011
Moins de 12
mètres
3939
3862
3815
3769
3747
De
12
à
moins de 24
mètres
991
876
817
773
721
24 mètres ou
plus
257
241
225
209
207
Total
5187
4979
4857
4751
4675
Champ : flotte en France métropolitaine, hors conchyliculture et petite pêche en
nombre de navires actifs.
Sources :
direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA)/OFIMER et
INSEE
Crédits photo :
© Laurent Mignaux - METL/MEDDE
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36
COUR DES COMPTES
La direction des affaires maritimes
a fourni lors de l’évaluation, fin
2011, des statistiques à partir des chiffres collectés, manuellement et
difficilement, auprès de ses seize centres de sécurité des navires et des deux
services des affaires maritimes d’outre-mer.
Tableau n° 6 : flotte de pêche par centre de sécurité des navires
Champ : flotte conchyliculture et
petite pêche (CPP) par centre de sécurité des
navires – dossiers gérés par centre
Sources : direction des affaires maritimes (début 2011)
Type de navire
Plus de
24m
de 12 à
24 m
moins
de 12m
CPP
Total
Bordeaux
40
56
155
0
251
Boulogne
7
60
120
0
187
Brest
4
45
353
92
494
Concarneau
17
176
249
3
445
Dunkerque
82
0
14
19
115
La Rochelle
4
89
191
1069
1353
Le Havre
0
10
49
0
59
Lorient
12
53
514
785
1364
Manche Calvados
0
130
664
0
794
Marseille
13
31
490
50
584
Rouen
1
33
40
1
75
Saint Malo
2
70
430
0
502
Saint Nazaire
0
90
545
417
1052
Sete
20
112
721
675
1528
0
Antilles Guyane
0
29
2433
0
2462
Nouvelle Calédonie
7
15
223
0
245
Sud Océan Indien
25
28
519
0
572
Polynésie
0
105
682
0
787
TOTAL
234
1132
8392
3111
12869
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37
La flotte de pêche totale (métropole et outre-mer), calculée à partir
des chiffres du tableau ci-dessus, comprendrait 9 758 navires se répartissant
en 234 de plus de 24 mètres, 1 132 de 12 à 24 mètres et 8 392 de moins de
12 mètres. La flotte enregistrée par les 14 centres métropolitains se
composerait de 202 navires de plus de 24 mètres, 955 entre 12 et 24 mètres
et 4 535 de moins de 12 mètres soit un total de 5 692 navires.
Tableau n° 7 :
Comparaison des statistiques de flotte de
pêche
Données INSEE
2011
Données DAM
2011
Moins de 12 mètres
3 747
4 535
De 12 à moins de 24 mètres
721
955
24 mètres ou plus
207
202
Total
4 675
5 692
Champ : Flotte de pêche métropolitaine, 2011
Sources : INSEE / direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (DPMA) et
OFIMER ; DAM à partir des données extraites du tableau n° 6 ci-dessus pour les 14
centres de sécurité des navires métropolitains (hors conchyliculture et petite pêche)
Faute
de
mise
à
jour
régulière
de
la
base
de
données
d’immatriculation des navires, l’administration centrale des affaires
maritimes est dans l’impossibilité de réconcilier les chiffres recensés auprès
de ses services locaux et ceux de l’INSEE et d’expliquer les écarts.
Outre cette incertitude pesant sur le nombre de navires réellement
en activité, la flotte de pêche française souffre de plusieurs handicaps
défavorables à la sécurité des navires et des équipages. Elle apparaît
comme une flotte vieillissante et de plus en plus inadaptée.
b)
Une flotte vieillissante et de plus en plus inadaptée
La moyenne d’âge des navires de métropole est de 25 ans en 2010 et
seuls 30 % des navires ont moins de 20 ans. Le député Daniel Fasquelle,
missionné par le Premier ministre en décembre 2010, a remis un rapport en
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COUR DES COMPTES
juin 2011 intitulé
« De l’urgence de renouveler les navires pour sauver la
pêche française »,
qui dresse ce constat, note également la très nette baisse
des constructions de navires entre 2000 et 2010. Seuls 191 navires de plus
de 12 mètres ont été construits durant cette période.
Tableau n° 8 :
Évolution du nombre de navires de pêche et
des effectifs de marins
Champ : - flotte en France métropolitaine hors conchyliculture et petite pêche, en
nombre de navires actifs.
- marins pêcheurs embarqués sur les navires français - France métropolitaine
Sources : direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (DPMA) ; département des
systèmes d'information des affaires maritimes (DSI).
Ce vieillissement, couplé avec l’accroissement des coûts de
fonctionnement (énergie et maintenance), rend la flotte de plus en plus
inadaptée aux nouvelles exigences des marchés et de la réglementation
européenne. Cette situation a aussi des conséquences en matière de
sécurité.
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000
20 000
22 000
4 000
4 500
5 000
5 500
6 000
6 500
7 000
1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011
M
a
r
i
n
s
N
a
v
i
r
e
s
nombre de navires actifs
Marins pêcheurs embarqués
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39
c)
Des navires moins sûrs et des conditions de travail dégradées
Le diagnostic dans ce domaine a été notamment établi par l’Institut
maritime de prévention (IMP), organisme national à but non lucratif, qui
assure une mission de prévention des risques professionnels maritimes et
d’amélioration des conditions de vie et de travail au profit des gens de mer.
Formulé en 2008 par un groupe de travail, animé par cet institut, il a été
repris dans le rapport du parlementaire en mission susmentionné.
Les principales conclusions étaient :
-
à défaut de construire des navires neufs, on transforme les
navires existants au risque de mettre en cause les données
initiales d’habitabilité, de stabilité et de franc-bord et d’accroître
la consommation d’énergie ;
-
les rares navires neufs souffrent de contraintes visant à limiter la
capacité de pêche de la flotte, et tout particulièrement de la
limitation de la jauge brute et de la longueur des navires. Cette
limitation incite à comprimer indistinctement les volumes de tous
les espaces, les cales à poissons comme les autres espaces qui
contribuent à la performance nautique et à la sécurité ;
-
à jauge inchangée, la capacité de pêche d’un navire neuf est très
supérieure à celles des navires anciens (meilleures détection et
localisation du poisson, autonomie, conservation, etc.). La
limitation de la jauge apparaît donc sans effet sur la maîtrise de
l’effort de pêche mais pèse en revanche sur la sécurité du navire ;
-
il est possible de construire des navires de pêche de capacités
halieutiques équivalentes à celles des navires neufs (navires dits
iso-pêche), mais plus sûrs dans le domaine de la sécurité. Cela
nécessiterait d’abandonner la jauge et la longueur comme
principaux critères d’encadrement de la pêche professionnelle.
Ces recommandations à l’égard de la jauge et de la longueur des
navires de pêche, étudiées et développées par l’Institut maritime de
prévention, peuvent être considérées comme autant d’éléments d’affichage
d’une politique de sécurité. Elles rejoignent d’ailleurs les souhaits tant du
comité national des pêches que ceux des marins-pêcheurs interrogés au
cours de l’enquête.
Quelles que soient leurs caractéristiques propres et les spécificités de
leurs problématiques de sécurité, les flottes de commerce et de pêche sont
soumises à un dispositif administratif de contrôle unique composé à la base
d’un réseau de 16 centres de sécurité des navires et des deux services des
affaires maritimes de Polynésie et de Nouvelle-Calédonie.
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COUR DES COMPTES
B - Des résultats contrastés
La qualité de la flotte de commerce française reconnue au niveau
international s’oppose à la forte « sinistralité » constatée dans le domaine
de la pêche. Parallèlement, la nature des contrôles des centres de sécurité
des navires
est jugée parfois trop administrative et pas assez concrète et
efficace par les usagers contrôlés par eux.
1 -
La qualité du pavillon de commerce français
Pour la direction des affaires maritimes, les indicateurs les plus
pertinents et les plus réalistes permettant de suivre les performances de
l’État du pavillon et du dispositif public de contrôle de la sécurité des
navires sous registres français, sont le nombre d’immobilisations, de pertes
totales de navires, ainsi que le classement du pavillon par le Mémorandum
d’entente de Paris
17
.
À cet égard, le degré d’application des instruments internationaux
auxquels est partie chaque État membre de l’Organisation maritime
internationales
est
mesuré
chaque
année
par
un
formulaire
d’autoévaluation. Ainsi au cours de l’été 2011, comme chaque année à la
même période depuis 2008, la France a transmis à l’OMI plusieurs
tableaux, fournissant des séries de données concernant le pavillon français,
arrêtées à la date du 31 décembre 2010 et indiquant le nombre de :
-
navires impliqués dans des accidents, des pertes totales, des
pollutions ;
-
navires ne satisfaisant pas aux prescriptions internationales en
matière de sécurité maritime et de prévention de la pollution et
ayant fait l’objet de « mesures » ;
-
« détentions » (c’est-à-dire immobilisations) par des États du port
ayant fait l’objet d’une enquête ;
-
vies humaines perdues au cours d’accidents survenus à bord ;
-
détentions par des États du port et les taux de retenue pour 1000
inspections de navires.
L’établissement de ces séries de données, qui font état de la bonne
qualité de la flotte de commerce française, exige chaque année un travail de
collectes ponctuelles et manuelles auprès des services pour remplir les
engagements pris à l’égard de l’Organisation maritime internationales
17
Accord inter-administratif régional signé en 1982 et établissant un contrôle coordonné
des navires faisant escale dans les ports européens.
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41
(OMI). Elles gagneraient à être recueillies de façon automatisée et affichées
dans un appareil statistique national et un système d’information dont
l’enquête a montré qu’il faisait sérieusement défaut.
Tableau n° 9 : Classement pavillon 2009-2011 par le
mémorandum de Paris
Classement
Nombre
d'inspections
2009-2011
Nombre de
détentions
2009-2011
Allemagne
1
1 335
10
Suède
2
810
5
Danemark
3
1 376
15
Pays-Bas
4
3 691
49
Royaume-Uni
5
1 905
25
France
6
337
2
Hong Kong
7
1 489
20
Singapour
8
1 370
19
Italie
9
1 471
21
Grèce
10
1 334
19
Sources : Mémorandum de Paris – Rapport annuel 2011
De son côté, le secrétariat du Mémorandum de Paris établit un
classement annuel, figurant dans le tableau ci-dessus, des pavillons sur le
fondement des résultats des inspections exécutées par les États dans sa zone
de compétence. Il en résulte que le pavillon français se situe toujours dans
les premières places de la liste blanche qui regroupe les meilleures flottes.
18
Depuis 1999, quinze navires sous pavillon français ont fait l’objet
d’immobilisations
dans
différentes
zones
(Mémorandum
de
Paris,
Mémorandum de Tokyo et US Coast Guard). Toutefois, depuis 2007,
seules trois immobilisations sont intervenues : une en 2008 (US Coast
Guard) et deux en 2009 (Paris
« Memorandum of Understanding »
MOU),
18
Le « Memorandum of Understanding » (MOU) de Paris distingue trois listes pour
classer les pavillons allant du meilleur au moins bon : blanche, grise et noire.
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COUR DES COMPTES
ces deux dernières se reflétant dans le tableau statistique comparatif n° 10
ci-après.
Tableau n° 10 : Résultats des contrôles sur le pavillon
français comparés à la moyenne au sein du
Mémorandum de Paris (2008 à 2010)
Nombre
d’inspections
% avec
déficiences
% avec
détention
2008
Navires sous pavillon français
inspectés par les autres États dans
le Mémorandum de Paris
121
47,11 %
0 %
Total et moyenne des résultats des
pavillons au sein du Mémorandum
de Paris
24 647
58,11 %
4,95 %
2009
Navires sous pavillon français
inspectés par les autres États dans
le Mémorandum de Paris
124
49,19 %
1,61 %
Total et moyenne des résultats des
pavillons au sein du Mémorandum
de Paris
24 186
57,25 %
4,38 %
2010
Navires sous pavillon français
inspectés par les autres États dans
le Mémorandum de Paris
110
60,91 %
0 %
Total et moyenne des résultats des
pavillons au sein du Mémorandum
de Paris
24 058
55,21 %
3,28 %
Sources : Direction des affaires maritimes (DAM) -
Mémorandum de Paris
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43
En définitive les chiffres et les reconnaissances officielles
19
consacrent la qualité de la flotte de commerce française naviguant à
l’international. Sa petite taille, son rajeunissement au cours des dernières
années et la qualité de ses armateurs, commandants et équipages ne sont
sans doute pas étrangers à ces performances. Notre système de contrôle y
joue aussi certainement son rôle mais avec des effets et dans des
proportions qu’il est difficile de chiffrer.
L’avenir, avec l’augmentation des délégations de contrôle aux
sociétés de classification, notamment pour tous les navires de charge de
plus de 500
Universal Measurement
System
, telle qu’elle est prévue par la
réforme
20
, permettra aussi d’en juger.
2 -
La dangerosité de la pêche
La pêche est le secteur d'activité le plus accidentogène en France
devant celui du bâtiment et des travaux publics.
L’analyse des chiffres de 1999 à 2010, produits par le ministère
chargé de la mer, confirme la dangerosité du métier de marin à la pêche, au
regard notamment des décès occasionnés, mais également par rapport aux
autres secteurs d’activité
21
. En douze ans, le nombre total de décès relevés
chez l’ensemble des marins s’est élevé à 226, soit près d’une vingtaine par
an, dont 191 dans la pêche et la conchyliculture. Les dix décès de marins en
2010 ne concernaient que les pêcheurs et correspondaient à deux
pathologies médico-chirurgicales, quatre chutes à la mer et quatre
naufrages. En pratique, depuis 2003, seuls les pêcheurs ont enregistré des
pertes dues aux naufrages (souvent plus de dix par an) et cette cause de
décès constitue le double voire le triple des autres.
19
A cet égard mérite d’être citée la lettre de félicitations adressée le 17 août 2010 par le
responsable de la division de contrôle des navires étrangers des US Coast Guard
américains au chef du bureau SM3 de la direction des affaires maritimes accompagnant
la reconnaissance du niveau élevé de qualité pavillon français au titre du programme
« Qualship 21 ». Reconnaissance décernée à moins de 10 % des pavillons étrangers
opérant dans les eaux américaines.
20
L’évaluation de la Cour s’est déroulée alors que, parallèlement, l’administration
préparait, dans le cadre de la transposition des textes européens issus du « paquet
Erika III », une réforme du dispositif de contrôle des navires sous pavillon français,
visant à alléger les charges des centres de sécurité des navires, notamment par un
accroissement des délégations de contrôle aux sociétés de classification pour les plus
gros navires de charge.
21
Rapport sur les accidents du travail maritime pour l’année 2009-2010 - direction
générale des infrastructures, des transports et de la mer - direction des affaires
maritimes - bureau de la santé et de la sécurité au travail maritime.
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COUR DES COMPTES
Il apparaît que le nombre de décès à la pêche et à la conchyliculture
par chute à la mer ou par naufrage reste préoccupant : entre 1999 et 2010,
le taux s’élève à 0,88 pour 1 000 marins alors qu’il est de 0,71 pour 1 000
marins toutes catégories confondues (avec le commerce) et que le taux de
décès par accident du travail est de 0,033 pour 1 000 travailleurs dans
l’ensemble des secteurs professionnels. Le rapport sur les accidents du
travail maritime précise que le taux de décès du domaine maritime est
supérieur d’un facteur 20 à celui de la moyenne du monde professionnel.
De 1999 à 2010, le service de santé des gens de mer de la direction
des affaires maritimes
a relevé une diminution constante des accidents du
travail maritime au commerce et à la pêche. Il en attribue cependant la
cause à la diminution de la population concernée plus qu’à la diminution de
la sinistralité.
En 2010, sur 12 080 pêcheurs, 1 343 ont été victimes d’un accident
du travail, soit un taux de 111,17 pour 1 000, nettement supérieur à celui du
régime général
22
. En 2009 et 2010, le nombre des accidents survenus à la
mer lorsque le navire était en route ou en pêche, a été deux fois plus élevé
que celui des accidents survenus à quai.
Si la petite pêche concentre la population la plus nombreuse, la
pêche côtière et la pêche au large sont les plus accidentogènes.
Globalement, les accidents du domaine maritime sont plus graves que ceux
des autres secteurs professionnels du régime général.
Le monde de la pêche maritime, ainsi marqué par un nombre élevé
de décès et d’accidents du travail comparé aux autres secteurs, pose un défi
particulier. L’analyse de la dangerosité du métier doit donc dépasser le
strict cadre de l’examen des performances du système de contrôle de la
sécurité des navires. Le contexte économique et financier du secteur, les
conditions de navigation, les comportements et mauvaises pratiques et les
risques encourus dans l’exploitation sont autant de facteurs qui ont un fort
impact sur les sinistres, ceux-ci touchant parfois les membres d’une même
famille. La sensibilisation et les campagnes de prévention jouent donc un
rôle fondamental bien au-delà de la seule vérification de la fiabilité et de la
sécurité du navire.
22
La comparaison doit être prudente car les accidents du travail son décomptés
différemment. La caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés
(CNAMTS) enregistre les accidents avec arrêt de travail et l’établissement national des
invalides de la marine (ENIM) les accidents déclarés. Cependant, même en considérant
les accidents du travail maritime avec arrêts, l’indice de fréquence d’accidents du
secteur maritime en 2010 était plus élevé que celui du bâtiment.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
45
Il n’en demeure pas moins que, pour les raisons déjà exposées,
tenant à la nature actuelle de la flotte de pêche, vieillissante et de plus en
plus inadaptée, la question de la sécurité des navires de pêche ne peut être
absente tant de l’affichage politique d’objectifs de réduction du nombre
d’accidents que de la mise en oeuvre de mesures spécifiques au sein des
dispositifs de contrôle. Des objectifs de prévention et de réduction des
accidents devraient être clairement énoncés dans le programme 205
« sécurité et affaires maritimes » du budget de l’Etat, au même titre que
ceux relatifs aux atteintes à l’environnement.
En outre, la direction des affaires maritimes devrait s’attacher à
renforcer son rôle dans la mise en cohérence des programmes
d’interventions en matière de sécurité des navires et des marins à la pêche.
En effet, dans l’enchaînement des décisions prises par les différents
acteurs administratifs et professionnels, la place de la direction des affaires
maritimes
est souvent marginale. Trois exemples montrent la faiblesse de
son pilotage : dans les domaines de la formation, des statistiques et du
retour d’expérience.
Ainsi fait-elle partie du comité de pilotage de la campagne de
formation des équipages de pêche à la sécurité mais sans en assumer la
direction.
De
même,
face
à
l’éparpillement
des
sources
statistiques
(notamment de l’accidentologie qui impose de rendre les statistiques
comparables avec celles du régime général), elle n’a pas amorcé le
mouvement de rassemblement et de mise en ordre des données qui aurait
été nécessaire.
Enfin, les retours d’expérience, les propositions et recommandations
de sécurité émises tant par le Bureau enquêtes accidents/mer que par
l’Institut maritime de prévention n’entraînent guère de processus
d’exploitation de sa part.
L’une des préoccupations majeures de la direction des affaires
maritimes porte sur la flotte de commerce mais la flotte de pêche semble
moins présente dans les travaux de la direction. En réalité, le « bloc
pêche », sans doute parce qu’il émarge à la politique commune de la pêche,
a tendance à dériver dans le champ de responsabilité de la direction des
pêches maritimes et de l’aquaculture, placée jusqu’à récemment sous
l’autorité du ministère en charge de l’agriculture.
Cette division de la responsabilité à l’égard de la sécurité des navires
de pêche, pour une part portée par la direction des affaires maritimes et
pour une autre par la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture,
donne l’impression que la DAM ne maîtrise pas tous les moyens relatifs à
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COUR DES COMPTES
la pêche comme elle les maîtrise pour le commerce. Cela tend aussi à
affaiblir la volonté globale de l’État en la matière.
II
-
Les contrôles des navires étrangers au titre de
l’Etat du port : des résultats insuffisants
La France a depuis longtemps joué un rôle moteur dans
l'amélioration de la sécurité maritime et de la prévention de la pollution des
mers. Elle est en effet directement concernée par sa situation géographique.
La Manche est l'une des zones maritimes les plus fréquentées du monde
(300 000 navires/an), et la France, en tant qu’État côtier, a subi plusieurs
accidents graves et des pollutions, notamment depuis 1999.
Les responsables politiques et administratifs français se sont, à
plusieurs reprises, placés en position pionnière pour proposer et élaborer tel
ou tel aspect de la politique communautaire en matière de sécurité des
transports maritimes.
C’est ainsi que la France a joué un rôle déterminant dans
l’élaboration et l’adoption du « paquet
Erika III » sous sa présidence de
l’Union européenne au second semestre 2008. Toutefois elle n’a pas su
parallèlement se préparer à la réforme de son dispositif de contrôle
qu’impliquait le renforcement du volet État du port.
Le renforcement successif des contraintes imposées aux États
européens depuis dix ans dans le contrôle de la sécurité maritime s’est
traduit notamment par un durcissement des obligations en matière de
contrôles de l’État du port.
La France, qui ne parvenait déjà pas à respecter les obligations
d’inspection de navires étrangers en vigueur jusqu’à la fin de l’année 2010,
se trouve dans une situation encore plus difficile depuis 2011 avec la mise
en place d’un nouveau régime d’inspection plus contraignant.
A - Le renforcement des obligations de contrôle
Premier
accord
inter-administratif
régional,
le
mémorandum
d’entente de Paris, signé en 1982, qui établit le premier contrôle coordonné
des navires étrangers faisant escale dans les ports européens, a représenté
une étape décisive. A la suite des naufrages de l’Erika en 1999 et du
Prestige
en 2002, le contrôle des navires à risques a été renforcé par la
systématisation des inspections et l’élargissement du champ d’application
du bannissement.
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47
Dans ses résolutions du 20 janvier et du 2 mars 2000, le Parlement
européen a invité la Commission à prendre des initiatives concrètes. En
mars et décembre 2000, cette dernière a présenté les « paquets » législatifs
dits
«Erika I»
et
«Erika II»
afin de mettre en oeuvre les améliorations
nécessaires.
1 -
Le « paquet Erika I »
La directive 2001/105/CE du 19 décembre 2001 vise à garantir une
application uniforme des règles, des exigences de qualité plus élevées aux
sociétés de classification et une transparence accrue des résultats de
contrôle. Elle prévoit un contrôle des sociétés de classification, à réaliser
par les autorités compétentes des États membres. En cas de manquement
professionnel avéré, une société de classification peut se voir retirer
temporairement ou définitivement l’agrément. La responsabilité de la
société de classification peut être engagée dans certaines circonstances à la
suite d’un accident, en cas de faute avérée.
2 -
Le «
paquet Erika II »
La directive 2002/59/CE du 27 juin 2002 prévoit la mise en place
d’un système communautaire de suivi du trafic des navires et d’information
(SafeSeaNet). Il incombe à l’exploitant d’un navire, préalablement à son
entrée dans un port de l’Union, de communiquer des informations aux
autorités portuaires compétentes, en particulier lorsqu’il transporte des
matières dangereuses ou polluantes. Il est prévu de rendre obligatoire
l’équipement des navires aux fins d’identification automatique (systèmes
d’identification automatique, AIS)
23
et d’enregistrement des données du
voyage (VDR ou « boîtes noires »)
24
. Par ailleurs, la directive impose aux
États membres d’établir des plans pour l’accueil des navires en détresse
dans des ports de refuge.
Le règlement n° 1406 du 27 juin 2002 instaure une Agence
européenne pour la sécurité maritime (AESM). Son rôle consiste à offrir à
23
Les navires de pêche de l’Union européenne doivent être équipés de transmetteurs
d’identification automatique ou « automatic identification system » (AIS) à partir du 31
mai 2012 pour les navires de plus de 24 m, du 31 mai 2013 pour les navires de plus de
18 m, du 31 mai 2014 pour les navires de plus de 15 m. Les autres navires le sont déjà
en principe.
24
La directive 2011/15/UE du 23 février 2011 prescrit que tous les navires à passagers
et les autres navires de plus de 3 000 tonneaux doivent être équipés de boîtes noires ou
« voyage date recorder » (VDR).
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COUR DES COMPTES
la Commission un appui scientifique et technique pour l'élaboration et
l'application de la législation européenne concernant la sécurité et la sûreté
maritimes, ainsi que la prévention de la pollution due aux navires. Ses
missions ont été élargies et comprennent aussi les opérations de
dépollution, ainsi que la surveillance, l'identification et le suivi à distance
des navires.
L’agence européenne de sécurité maritime (AESM)
Établie à Lisbonne, l’Agence apporte à l'Union européenne (UE) et aux
pays membres une assistance technique dans l'élaboration et l'application
de la législation européenne concernant la
sécurité et la sûreté
maritimes, ainsi que la pollution due aux navires
. L’Agence a pour
mission :
-
d’assister la Commission dans la mise à jour, l’élaboration et la
mise en oeuvre efficace de la législation de l’Union européenne
dans le domaine de la sécurité et de la sûreté maritimes, de la
prévention de la pollution et de la lutte contre la pollution
causée par les navires ;
-
de collaborer avec les pays de l’Union européenne pour
organiser, le cas échéant, des activités de formation pertinentes
et leur fournir une assistance technique relative à la mise en
oeuvre de la législation de l’Union européenne ;
-
de fournir, à la Commission et aux pays de l’Union européenne,
des informations objectives, fiables et comparables et des
données sur la sécurité maritime grâce à la collecte,
l'enregistrement et l'évaluation de données techniques dans les
domaines de la sécurité maritime, du trafic maritime, de la
pollution marine, grâce à l'exploitation systématique des bases
de données existantes, voire au développement de bases de
données supplémentaires ;
-
d’assister la Commission dans la publication semestrielle des
informations relatives aux navires dont l'accès a été refusé dans
les ports de l’Union européenne, et également les pays-membres
dans l'amélioration de l'identification et de la poursuite des
navires responsables de déversements illicites ;
-
d’effectuer des tâches liées à la surveillance de la navigation et
du trafic maritime relevant de la directive 2002/59/CE, afin de
faciliter
la
coopération
entre
les
pays-membres
et
la
Commission dans ce domaine ;
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49
-
de concevoir une méthodologie commune pour enquêter sur les
accidents maritimes en coopération avec la Commission et les
pays-membres ;
-
de fournir aux pays candidats à l'adhésion à l’Union européenne
un support technique pour la mise en oeuvre de la législation de
l’Union dans le domaine de la sécurité maritime, y compris
l'organisation
de
formations
appropriées,
la
fourniture
d'applications informatiques et de services de conseils axés sur
la sécurité maritime.
Elle utilise, pour remplir ses missions, des
systèmes d’information
:
-
SafeSeaNet
(SSN), qui permet de suivre le trafic des navires
dans les eaux européennes ;
-
Système européen
Long-range Identification
and Tracking
(LRIT), qui permet de localiser les navires battant pavillon de
l'Union européenne dans le monde entier ;
-
CleanSeaNet
(CSN), qui permet de détecter la pollution marine
au moyen d'images satellites ;
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COUR DES COMPTES
-
THETIS
, qui permet de centraliser les données concernant le
contrôle par l'État du port et de cibler les navires dont la sécurité
laisse à désirer.
Ecran du logiciel Trafic 2000 connecté à SafeSeaNet (SSN) pour repérer les entrées-
sorties de nos ports
Crédits photos : © Gilles Coutin/METL-MEDDE
Dans ce contexte, le contrôle des navires au titre de l’État du port
par un État partie au Mémorandum de Paris est passé sous la supervision de
la nouvelle agence européenne via le système SafeSeaNet (SSN).
3 -
Le « paquet Erika III »
Le Conseil et le Parlement se sont mis d’accord en décembre 2008
sur un troisième paquet législatif, composé de nombreuses directives, afin
d’améliorer encore la sécurité des navires et la procédure en cas d’accident.
Adopté sous présidence française, le nouveau texte sur les contrôles
de l’État du port (directive 2009/16/CE) fixe notamment l’objectif commun
d’inspecter tous les navires faisant escale en Europe et organise, à cette fin,
un régime d’inspections régulières pour chaque navire, selon une
périodicité déterminée par le niveau de risque présenté par celui-ci. La
nouvelle réglementation étend, en outre, l'interdiction de navigation dans
les eaux européennes aux navires inférieurs aux normes.
La mise en oeuvre et le suivi du nouveau régime de l’État du port
s’effectuent depuis le 1
er
janvier 2011 à partir du système d’information
THETIS (
«The Hybrid European Targeting and Inspection System »
).
Ce système indique les navires qui doivent être contrôlés
prioritairement et permet d’enregistrer les résultats des inspections. Les
rapports d’inspection sont disponibles pour toutes les autorités intervenant
dans le cadre du contrôle au titre de l’État du port de l’Union européenne et
du
« Memorandum of Understanding »
de Paris.
Il est aussi « interfacé » avec d’autres bases de données concernant
la sécurité des navires : celles des sociétés de classification reconnues par
l’Union européenne, des bases nationales et communautaires ou d’autres
provenant des organisations régionales menant des contrôles au titre de
l’État du port.
Les inspecteurs saisissent le compte-rendu des visites dans le
système et y portent notamment les déficiences relevées. Ils signalent aussi
si les précédentes déficiences relevées ont bien été corrigées.
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51
25
L’inspecteur doit s’assurer que toute anomalie confirmée ou révélée par les
inspections a été ou sera supprimée conformément aux conventions (article 150-1.09 1.
de l’arrêté du 23 novembre 1987)
26
Lorsque les anomalies présentent un risque manifeste pour la sécurité, la santé ou
l’environnement, l’inspecteur prend les mesures nécessaires pour immobiliser le navire
ou pour que l’exploitation au cours de laquelle des anomalies ont été révélées soient
arrêtée. L’interdiction d’appareillage ou l’arrêt d’exploitation ne sont levés que si tout
danger a disparu ou si l’inspecteur constate que le navire peut, sous réserve des
conditions qu’il estime nécessaire d’imposer, quitter le port ou que l’exploitation peut
reprendre sans risque pour la sécurité et la santé des passagers, ou de l’équipage, ou
sans
risque pour les autres navires, ou sans constituer une menace déraisonnable pour le
milieu marin. (article 150-1.09 2 de l’arrêté du 23 novembre 1987).
Régime des mesures que peuvent prendre les inspecteurs dans le
cadre des dispositions du Mémorandum de Paris
Elles sont au nombre de trois :
-
la constatation d’absence d’anomalies ou de non-conformités
mineures n’appelant pas de prescription ;
-
les prescriptions sous forme de demandes de suppression
d’anomalies et de mise en conformité avant le départ
25
(par
exemple, il manque une carte ou tel ou tel autre équipement
jugé
non
suffisamment
important
pour
justifier
une
immobilisation) : il est de la responsabilité de l’armateur de se
mettre en conformité avant le départ ou au plus tard lors de
l’escale suivante. En tout état de cause, l’observation est
signalée dans le logiciel « THETIS » et vérifiable lors de la
prochaine inspection ;
-
l’immobilisation souvent appelée « détention » (traduction
littérale du terme anglais).
L’immobilisation est l’interdiction formelle signifiée à l’encontre d’un
navire de prendre la mer en raison des anomalies constatées qui, isolément
ou globalement, entrainent l’impossibilité pour le navire de naviguer.
26
Elle est prononcée par l’inspecteur compétent, sur la base de son
expérience professionnelle en appliquant des critères mentionnés dans les
lignes directrices du Mémorandum de Paris et repris dans la division 150
de l’arrêté de 1987.
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COUR DES COMPTES
Cas d’immobilisation
Le chef du centre de sécurité des navires de Brest indique par exemple,
que les inspecteurs du centre ont procédé à douze immobilisations en trois
ans et que
« sans notre intervention certains navires ne seraient peut-être
jamais arrivés au prochain port ».
Les déficiences relevées dans ces cas :
séparateur à eaux mazouteuses hors service, trous dans la coque, navire
pourri, avarie de moteurs de barre, avarie de réducteur, pompes
d’assèchement hors service, etc.
Le chef du centre de sécurité des navires de Bordeaux fait état de 55
immobilisations depuis 2008 et précise que les motifs sont variables mais
sont, en général, la conséquence d’un manque de maintenance des navires
par l’équipage.
Le chef du centre de sécurité des navires de Saint-Nazaire précise que les
demandes d’immobilisation ont été fondées sur de nombreux motifs
différents : matériels de sauvetage non conformes, cartes marine
manquantes, feux de navigation hors service, non-conformité majeure au
code international de gestion de la sécurité (dit code ISM), pompe à
incendie hors service, problème sur la détection incendie.
Sources : Cour des comptes
Crédits photos :
© Laurent Mignaux/METL-MEDDE
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53
La marge de manoeuvre des administrations nationales est désormais
limitée. Le ciblage des navires pour le contrôle au titre de l’État du port ne
dépend plus d’elles, mais est imposé par l’Agence européenne pour la
sécurité maritime, via THETIS. En outre, le contrôle au titre de l’État du
port, qui portait en grande partie sur les aspects documentaires, est
susceptible d’évoluer de façon positive. L’expérience des inspecteurs,
combinée avec le ciblage imposé par THETIS, permet d’envisager des
vérifications plus techniques, ciblées sur des domaines clés de la sécurité.
On peut considérer que la législation et la réglementation,
notamment européennes, visant à renforcer la sécurité des navires et les
contrôles y afférents à la suite du sinistre Erika ont maintenant été mises en
place.
Globalement, les mesures importantes sont, aujourd’hui, imposées
soit par l’Organisation maritime internationale
soit par l’Union
européenne. Dès lors, les différences entre les règlementations nationales
s’estompent. L’intervention d’ensembles régionaux tend à se substituer aux
États nationaux en matière de fixation et de suivi de l’application des
règlementations.
Tableau n° 11 : Effort et résultats de la France en
matière d’inspection au sein du Mémorandum de
Paris
Navires
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Inspectés
1 831
1 799
1 702
1 780
1 587
1 520
1 253
Immobilisés
51
78
89
91
66
60
38
immobilisés/
inspectés
(France)
2,79
4,34
5,23
5,11
4,16
3,95
3,03
immobilisés/
inspectés
–
(MOU de Paris)
4,67
4,83
5,46
4,95
4,38
3,28
3,61
Sources :
Direction des affaires maritimes
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COUR DES COMPTES
B - Le non-respect des obligations et le durcissement des
sanctions
Le non-respect continu par la France de ses obligations d’État du
port depuis 2005 a été insuffisamment mis en évidence dans les objectifs et
indicateurs du programme budgétaire 205 « sécurité et affaires maritimes »,
masquant ainsi les faibles performances de notre dispositif de contrôle.
La
permanence de telles faiblesses dans le nouveau régime, au-delà des risques
des accidents encourus, ouvre la voie à des sanctions communautaires
accrues.
En effet, dans un système où l’autonomie des administrations
nationales se réduit progressivement, le renforcement des obligations
s’accompagne aussi d’un durcissement des sanctions pour les États ne
respectant pas les objectifs qui leur sont assignés.
Cette évolution est d’autant plus importante que la principale
faiblesse affectant l’organisation du dispositif de contrôle de l’État du port
en France, l’absence de contrôle les fins de semaine et jours fériés, vient
tout juste d’être traitée à la suite des remarques de la Cour, après des
années d’atermoiements administratifs.
1 -
Des obligations respectées en partie seulement jusqu’en 2010
Le régime en vigueur jusqu’à la fin 2010 comportait une double
obligation à respecter (directive 95/21/CE) :
-
celle du nombre total d’inspections à réaliser, soit 25 % du
nombre de navires étrangers faisant escale dans nos ports (entre
5 500 navires et 6 000 navires étrangers différents faisaient escale
dans nos ports, entre 2005 et 2010). Des objectifs généralement
supérieurs étaient fixés à chaque centre de sécurité des navires
par la direction des affaires maritimes, de sorte que cet objectif a
toujours été atteint
27
;
-
celle du nombre d’inspections obligatoires renforcées à effectuer
sur les navires classés dans deux catégories particulières
considérées à risque : 95 % des navires de ces deux catégories
devaient être inspectés, autrement dit le taux d’inspections
« manquées » devait rester inférieur ou égal à 5 %. Cet objectif
27
Comme le mentionnait un chef de centre lors d’une visite de la Cour, pour atteindre
cet objectif il suffisait « de faire du chiffre » sur tout navire étranger se présentant quel
que soit son profil de risque.
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55
n’a jamais été atteint par l’administration française, le taux
d’inspections obligatoires non réalisées ayant varié entre 12 et
20 % au cours de la période 2005-2010 et augmentant
significativement entre 2006 et 2010.
Tableau n° 12 : Non-respect des obligations de la France
au titre du contrôle par l’État du port (Mémorandum
de Paris)
Nombre/taux
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Navires inspectés
1 831
1 799
1 702
1 780
1 589
1 515
Taux de réalisations (objectif
minimum de 25%)
31,95
30,74
29,35
30,23
26,54
25,76
Nombre d’inspections
obligatoires qui auraient dû être
réalisées
125
130
133
157
117
100
Inspections obligatoires non
réalisées
20
14
17
12
19
19
Taux d’inspections obligatoires
non effectuées : maximum
autorisé 5%
16,0
10,8
12,8
7,6
16,2
19,0
Sources : Direction des affaires maritimes
Ce tableau, comparé à celui qui suit, présenté au Parlement à l’appui
du programme 205 du budget de l’Etat, met aussi en évidence que,
contrairement à ce que pouvait laisser croire depuis 2006 le seul indicateur
du nombre total de navires à inspecter repris dans les projets et rapports
annuels de performances (PAP et RAP) de ce programme, la France ne
remplissait pas ses obligations au titre des règles fixées par le
Mémorandum de Paris.
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56
COUR DES COMPTES
Tableau n° 13 :
Taux de contrôle des navires étrangers
faisant escale dans les ports français
Champ : Projet annuel de performances - programme 205 « sécurité et affaires
maritimes » - indicateur 1.3
Sources : Ministère de l'économie et des finances - direction du budget
Même s’il avait baissé depuis 2008, le taux de navires contrôlés au
titre de l’État du port pouvait paraître encore satisfaisant en 2010 et restait
supérieur à l’objectif de 25 %. En réalité, cet indicateur était insuffisant
pour rendre pleinement compte de la performance du dispositif français de
contrôle. Le pourcentage de navires étrangers à contrôler n’était pas à lui
seul une garantie de la pertinence du contrôle. Surtout, aucune mention
n’était faite et aucun suivi de la règle imposant de ne pas dépasser le seuil
de 5 % de contrôles obligatoires non réalisés n’était effectué.
Le Parlement n’a donc pas été correctement informé de la réalité des
performances de l’administration dans ce domaine au cours de ces
dernières années de l’ancien régime.
Le non-respect de cette obligation avait d’ailleurs donné lieu à une
procédure d’infraction communautaire n° 2007/2378. L’entrée en vigueur
du nouveau régime a, fort opportunément, donné lieu au classement de
cette infraction.
2 -
Le nouveau régime et les premiers résultats
Le nouveau régime n’augmente pas significativement le nombre
global d’inspections annuelles : on passe à un objectif de 1 520 inspections
pour la France en 2011 dans la répartition faite par l’Agence européenne
pour la sécurité maritime entre les Etats.
2009
2010
2011
2011
2011
2013
Réalisation
Réalisation
Prévision
Prévision
Réalisation
Cible
PAP 2011
mi 2011
PAP 2011
Pourcentage de navires
étrangers
contrôlés
26,55
25,8
n.d
=100
100
83 % de
l'obligation
communautaire
n.d
=100
Nombre de contrôles de
navires distincts
au titre
de l'Etat du port
1 588
1520
1 592
1 520
1 266
sans objet
Nombre de navires
étrangers faisant escale
dans les ports français
5696
5891
sans objet
sans objet
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57
En revanche, la contrainte devient plus forte en termes d’inspection
obligatoire.
Il fallait dans l’ancien régime effectuer 100 inspections obligatoires
en 2010 soit 8 % des navires éligibles (comme indiqué dans le tableau
n° 13 ci-dessus ; la France n’atteignait pas cet objectif en ne réalisant
pas 19 inspections soit environ 20 % de ces inspections obligatoires).
L’estimation faite en début d’année 2011, lors de l’entrée en vigueur
du nouveau régime, indiquait que 80 % des inspections à effectuer sur la
base des critères de risque fixés par la nouvelle directive (2009/16/CE)
devenaient obligatoires.
Concrètement, comme une note du 20 mai 2011 de la direction des
affaires maritimes aux directions interrégionales de la mer le rappelait,
deux obligations devaient être satisfaites :
-
un objectif quantitatif d’inspections de 1 520 navires fixé par la
Commission pour 2011 au titre du partage équitable entre États ;
-
des inspections obligatoires à ne pas manquer de plus de 5 %
pour les navires de priorité 1 présentant un profil de risque élevé
et de 10 % pour les navires autres que ceux présentant un profil
de risque élevé, dits de priorité 2.
Les résultats obtenus en 2011 sont très loin de ces objectifs puisque
plus de la moitié des cibles fixées par la Commission tant pour les navires à
risque élevé (PI) que pour les autres (PII) n’ont pas été atteintes.
Le tableau qui suit rend compte de cette situation et fournit
également les objectifs et résultats constatés pour le 1
er
semestre 2012.
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COUR DES COMPTES
Tableau n° 14 :
Inspections réalisées sous le nouveau
régime et taux de manque
2011
1
er
sem. 2012
Objectif fixé par la Commission
PI+PII
1 525
600 (pour un
semestre)
Nombre de navires inspectés
1 253
701
Nombre de navires comptabilisés
PI+PII
1 225
634
Pourcentage de manque de
navires PI à risque élevé (objectif
< 5 %)
54,3 %
7,1 % (un seul
navire)
Pourcentage de manque de navire
PI autres qu’à risque élevé
(objectif < 10 %)
55,3 %
11,3 %
Sources : Direction des affaires maritimes
Si différents facteurs inhérents aux difficultés de la mise en place du
nouveau régime peuvent en partie expliquer les mauvais résultats de
l’année 2011, il n’en demeure pas moins que fondamentalement le
dispositif dans son ensemble n’est plus adapté aux nouvelles exigences de
permanence, de souplesse et de rapidité dans les réactions que vont lui
imposer les nouvelles règles et objectifs européens
28
.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que, s’agissant des
sanctions possibles, le contexte juridique a également évolué et que le
régime des pénalités s’est durci en cas de manquements répétés à des
obligations. À la suite du traité de Lisbonne, les règles concernant les
procédures précontentieuses et contentieuses en cas de manquement d’un
État membre à ses obligations ont été modifiées afin d’accélérer les
procédures dans ces situations.
Aux termes d’une note de la direction des affaires juridiques du
ministère de l’écologie de décembre 2010, la somme forfaitaire minimale
28
Pour l’année 2012 l’objectif fixé à la France par l’Union européenne est de 1199
inspections obligatoires, significativement en retrait par rapport à celui de 2011 ; mais il
devrait remonter à 1300 inspections obligatoires en 2013.
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DES RESULTATS INEGAUX SELON LA NATURE DES CONTROLES
59
que la Commission peut demander à la Cour de justice des communautés
européennes d’infliger à la France s’élève à 10 008 000 € et la fourchette
du montant d’éventuelles astreintes s’échelonne de 12 134 € à 728 064 €
par jour de retard.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Les résultats obtenus en matière de sécurité des navires sous
pavillon français sont contrastés. Si la flotte de commerce, et
notamment
celle des navires importants naviguant à l’international, est reconnue tant
dans les classements du « Memorandum of Understanding » de Paris que
dans le « satisfecit » décerné par l’administration des garde-côtes
américains, elle le doit à sa moyenne d’âge récente et à l’implication des
armateurs et de leur représentation professionnelle nationale dans les
problématiques de sécurité.
En revanche, la flotte de pêche, notamment celle des navires de
moyenne et petite taille, est une source de préoccupation constante en
termes de sécurité des navires et des marins. Au-delà des risques pris par
les équipages pour des raisons économiques et financières et sous la
contrainte d’une réglementation de plus en plus sévère pour la
préservation des ressources halieutiques, le vieillissement de la flotte et
l’évolution de la configuration physique des navires constituent des
facteurs de dangerosité accrue qui ne peuvent laisser indifférents les
pouvoirs publics.
Il leur appartient
donc de se fixer des objectifs d’amélioration de
la fiabilité et de la qualité des navires en matière de sécurité accompagnés
d’objectifs et d’indicateurs de réduction des accidents au même titre que
sont fixés des objectifs et indicateurs visant à mieux contrôler les activités
maritimes.
En outre, alors que les autorités françaises ont
fortement encouragé
et soutenu au niveau des instances européennes, notamment lors de la
présidence de l’Union européenne, au deuxième semestre 2008, le
« durcissement » des dispositions relatives aux contrôles de l’État du port,
à travers le paquet Erika III, notre dispositif de contrôle s’est révélé depuis
de nombreuses années dans l’incapacité de remplir complétement et
durablement les objectifs fixés dans le cadre du « Memorandum of
Understanding » de Paris.
Cette lacune a été masquée au Parlement durant toutes ces années
du fait d’un objectif et d’un indicateur ne rendant que partiellement compte
des résultats des contrôles dans le programme 205 « sécurité et affaires
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COUR DES COMPTES
maritimes ». Au moment où la nouvelle réglementation et son application
entrent « en régime de croisière » après deux ans de mise en oeuvre (2011
et 2012), il est indispensable que soient fixés dans le prochain projet de loi
de finances des objectifs et indicateurs qui reflètent exactement les
performances de notre dispositif de contrôle.
Cette exigence de clarté et de résultat est d’autant plus grande que
s’accroissent les risques de déclenchement d’une procédure de
sanction
financière de la part de l’Union européenne pour des manquements répétés
aux obligations en matière de contrôles de l’État du port.
En conséquence la Cour recommande de :
1.
améliorer le pilotage stratégique de la politique de sécurité des
navires sous pavillon français en :
-
mettant à jour la base de données d’immatriculation des navires
(NAVPRO) pour disposer d’une source statistique unique et
fiable rendant compte avec précision de la réalité des flottes de
commerce et de pêche ;
-
rassemblant dans un document unique les données concernant la
sécurité et les accidents dans le secteur de la pêche ;
-
fixant quelques objectifs et indicateurs à afficher dans le
programme 205 de la loi de finances et dans un plan stratégique
pluriannuel et des rapports d’activité de la direction des affaires
maritimes permettant de définir et suivre une politique
d’amélioration de la performance dans ce secteur (baisse des
accidents dans le secteur de la pêche ;
2.
Fixer, dans le programme de la loi de finances traitant de
la
sécurité et la sûreté maritime, un (ou des) objectif(s) et
indicateur(s)
pertinent(s)
permettant de rendre compte des
résultats et performances de notre système de contrôles des
navires étrangers dans le cadre de nos obligations européennes
au titre de l’État du port.
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Chapitre II
Un dispositif inadapté aux nouveaux
enjeux et priorités
Les sinistres de l’
Erika
(1999) et du
Prestige
(2002) ont constitué
des facteurs d’accélération dans la recomposition du dispositif public de
contrôle amorcée dès une réforme intervenue en 1983 et 1984.
En effet, dans la période antérieure à 1984, les opérations de
contrôle reposaient sur un corps d’inspecteurs de la navigation et du travail
maritime, fonctionnaires recrutés à des niveaux relativement élevés et
disposant d’une expérience d’au moins dix ans de navigation.
La réforme de 1983-1984, tout en ouvrant la voie au recrutement
d’inspecteurs fonctionnaires civils en début de carrière, avait parallèlement
organisé le recours à des experts contractuels destinés à venir compléter le
nouveau corps en voie de création, mais cette source de recrutement ne
permettait pas de faire face aux besoins, soudain revus fortement à la
hausse après les sinistres de l’
Erika
et du
Prestige
.
Il a donc fallu, rapidement, beaucoup recruter alors que le vivier
offert par la marine marchande était devenu plus faible. Une autre voie a
été choisie dans l’urgence sans que soient vraiment analysés et appréciés
les effets à moyen et long terme de cette nouvelle politique.
Parallèlement à cette absence de ligne directrice en matière de
recrutement et de gestion des ressources humaines, le réseau des centres de
sécurité des navires a peu évolué et s’est même figé faute d’un pilotage
effectif par l’administration centrale des affaires maritimes. De surcroît
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COUR DES COMPTES
affaibli par la récente réorganisation territoriale de l’État, il n’est pas en
mesure de faire face efficacement tant à l’impératif d’amélioration de la
sécurité dans le domaine de la pêche qu’aux objectifs et obligations
imposés par le nouveau
régime d’inspection d’État du port. Plus qu’un
allégement des contrôles de l’État du pavillon prévu par l’actuelle réforme
mise en oeuvre par l’administration des affaires maritimes, son inadaptation
exige une profonde réorganisation de tout le dispositif pour le rendre plus
pertinent et efficace au regard des priorités et enjeux réels.
I
-
L’évolution du dispositif
A - L’absence de stratégie et de pilotage
Le dispositif composé des 16 centres
de sécurité des navires (CSN)
s’est développé, depuis plus de dix ans, « au fil de l’eau », en l’absence de
toute stratégie reposant sur une bonne anticipation des évolutions à venir
dans le domaine de la sécurité maritime et surtout sans que l’administration
centrale cherche à imposer une doctrine et des bonnes pratiques porteuses
d’unité et d’égalité
des contrôles à l’égard de tous les contrôlés sur
l’ensemble du territoire national.
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 63
1 -
Des recrutements sans anticipation
L’un des objectifs fixés par le comité interministériel de la mer tenu
en 2000 après le naufrage de l’
Erika
était le doublement de l’effectif des
centres de sécurité des navires (CSN).
Les suites des naufrages de l’
Erika
et du
Prestige
Extraits de deux rapports parlementaires publiés à la suite des
deux sinistres de l
’Erika
et du
Prestige
Le rapport « Après
l’Erika
, l’urgence »,
au
nom de la commission
d’enquête sur la sécurité du transport maritime des produits dangereux ou
polluants, du 5 juillet 2000 (rapporteur M. Jean-Yves Le Drian, député),
indique que le nombre d’inspecteurs travaillant dans les centres de sécurité
est passé de 75 environ au début des années 80 à 59 en 1999. Il évoque les
difficultés de recrutement, d’ordre budgétaire, mais aussi liées au manque
d’attractivité des fonctions d’inspecteurs dans le contexte statutaire de la
fonction publique d’État. Il soulève aussi la question de la formation de ces
personnels et des profils les plus adaptés à l’exercice de ces fonctions de
contrôle.
Le rapport
« De l’
Erika
au
Prestige
: la politique européenne de la
sécurité maritime contrariée », rapport d’information de la délégation de
l’Assemblée nationale pour l’Union européenne sur la sécurité maritime en
Europe, de mars 2003 (rapporteurs : MM. Guy Lengagne et Didier Quentin,
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64
COUR DES COMPTES
députés), évoque deux mesures destinées à renforcer les effectifs
d’inspecteurs : redéployer les inspecteurs affectés à l’approbation des
navires de plaisance construits à l’unité vers les autres missions de contrôle
des centres de sécurité des navires, faire appel à des inspecteurs vacataires
recrutés sur titre parmi les anciens officiers de la marine marchande et ayant
exercé les fonctions de commandant ou de chef mécanicien à bord des
navires de commerce. En conséquence, selon le rapport, l’objectif affiché
par le gouvernement est de doubler les effectifs d’inspecteurs qui pourraient
passer de 57 en 1999 à 114 en 2003.
Sources : Extraits des rapports
Crédits photos : © Marine nationale / Stéphane Marc
Si le corps des inspecteurs travaillant dans les centres de sécurité des
navires a bien doublé en dix ans, c’est au prix d’une gestion tâtonnante et
incertaine des effectifs conduite sans anticipation et ne répondant
notamment pas aux objectifs qualitatifs de renforcement des centres par des
inspecteurs possédant une réelle expérience de navigant.
a)
Des objectifs quantitatifs atteints
Les inspecteurs de la sécurité des navires et de la
prévention des risques professionnels maritimes
(ISNPRPM)
Sous l’autorité du chef de centre de sécurité des navires, les
inspecteurs sont chargés notamment de la surveillance générale :
-
de la construction ;
-
des conditions de sécurité des navires ;
-
de la sécurité du travail maritime ;
-
de la prévention de la pollution par les navires.
Conjointement avec les médecins des gens de mer, ils assurent le
contrôle de l’habitabilité à bord des navires et peuvent se faire assister par
toute personne ou organisme qu’ils jugent utiles, particulièrement en matière
de radiocommunication et d’appareils de navigation relevant de la technique
des télécommunications.
Les inspecteurs de la sécurité des navires et de la prévention des
risques professionnels maritimes sont les interlocuteurs privilégiés des
équipages, armateurs, représentants de chantiers de construction navale et de
tous professionnels du secteur maritime qui interviennent à bord des navires.
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Ils assurent leurs nombreuses missions notamment par la réalisation de
visites de navires en vérifiant leur conformité aux normes techniques et
autres règlements nationaux voire internationaux.
Les inspecteurs interviennent non seulement sur des navires français
mais également à bord de navires étrangers.
Les inspecteurs de la sécurité des navires et les inspecteurs du travail
sont compétents en matière de prévention des risques maritimes ainsi que
pour la constatation des infractions aux dispositions du code du travail
applicables aux gens de mer.
Un système de qualifications a été mis en place par l’administration
française à partir de 2001 (lettre circulaire du 17 juillet 2001 du directeur des
affaires maritimes et des gens de mer relative à la qualification des
inspecteurs de la sécurité des navires et au suivi de leurs compétences)
fixant un cursus professionnel et les stages de formation continue dont le
suivi constitue l’une des conditions d’accès aux niveaux de qualification.
La circulaire de 2001 reprend les 3 premiers niveaux de qualification
pour les personnels de catégorie B et C et établit 2 niveaux de qualification
(inspecteurs ISN 4 et ISN 5) pour les personnels de catégorie A.
Un peu moins de la moitié de l’effectif des inspecteurs disposent du
niveau 5 de qualification, celui qui permet notamment d’être délégataire du
chef de centres de sécurité des navires pour :
-
présider une commission de visite périodique sur tous types de
navires, sauf navires à passagers effectuant une navigation
internationale ;
-
faire une visite de mise en service de navires à passagers de moins
de 12 mètres et des autres navires de moins de 500 UMS ;
-
faire toute visite de mise en service en cas de nécessité.
C’est ce niveau 5 qui permet ensuite, avec une formation spécifique
comprenant notamment un module d’une semaine au sein de l’Agence
européenne pour la sécurité maritime à Lisbonne, d’accéder à la
qualification d’inspecteur d’État du port à partir aussi de l’exercice d’un
nombre de contrôles au côté d’un inspecteur qualifié.
Sources : Direction des affaires maritimes
Il résulte de l’analyse des données transmises à la Cour que, en s’en
tenant aux inspecteurs de la catégorie A, l’objectif de doublement des
effectifs, fixé par le comité interministériel de la mer de 2000, a bien été
atteint au cours de la période 2000-2010 grâce à un fort taux de recrutement
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COUR DES COMPTES
d’inspecteurs des affaires maritimes, option technique, entre 2001 et 2003
(35 recrutements et affectations en centres de sécurité navires).
En revanche, faute d’historiques et de systèmes d’enregistrement de
données
fiables,
l’administration
des
affaires
maritimes
est
dans
l’incapacité de rendre compte précisément de l’évolution réelle des effectifs
d’inspecteurs dans les centres de sécurité des navires durant la période.
Effectifs estimés des inspecteurs en centre de sécurité des
navires (CSN) entre 1999 et 2011
Sources : Direction des affaires maritimes et rapports du Sénat avant 2005 : séries
concaténées par la Cour des comptes.
Ceci peut s’expliquer, selon la direction des affaires maritimes, par :
« la difficulté de maintenir des séries cohérentes au regard de la relative
multiplicité des règles de comptage : effectifs physiques en début de
période, ETP à partir de 2004 ; mélange des concepts de statut (catégorie
A) et de qualification (niveau de qualification des inspecteurs de la sécurité
des navires défini par la lettre circulaire du 17 juillet 2001 du directeur des
affaires maritimes et des gens de mer) ; placements d’agents qualifiés à des
postes non directement dédiés à l’accomplissement de la mission dans les
centres de sécurité des navires (affectation en centrale, ingénieurs
d’armement des unités de contrôle, etc.) ».
Plus fondamental est le constat que la politique de recrutement, de
suivi et de management des différents corps d’inspecteurs a été conduite
0
20
40
60
80
100
120
140
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 67
sans véritable ligne directrice au regard des nouveaux enjeux posés par les
contrôles et inspections et qu’elle aboutit aujourd’hui à un ensemble
hétérogène et manquant d’unité de gestion.
b)
L’absence de ligne directrice
L’absence de vision stratégique concernant le plan d’armement des
centres de sécurité des navires depuis dix ans se découvre dans
l’hétérogénéité du dispositif actuel qui fonctionne dans un climat
d’interrogations, et parfois de frustrations, peu favorable à une évolution
sereine, dynamique et efficace du réseau.
Le dispositif actuel se caractérise par la grande diversité des statuts
des agents remplissant les fonctions d’inspecteurs et l’existence de forces
d’appoint incertaines sur lesquelles les centres ne disposent d’aucune
maitrise.
Un système mixte sur le plan statutaire
Aux termes du décret n° 84-810 du 30 août 1984 (article 1), les
fonctions d’inspecteur de la sécurité des navires et de la prévention des
risques professionnels maritimes sont exercées par :
-
les administrateurs des affaires maritimes (AAM) ;
-
les inspecteurs des affaires maritimes (IAM) ;
-
les officiers du corps technique et administratif des affaires
maritimes (OCTAAM) ;
-
les techniciens experts du service de la sécurité de la navigation
maritime ;
-
et, pour les petits navires, en dessous de limites arrêtées par le
ministre, les contrôleurs des affaires maritimes, les syndics des
gens de mer et les personnels embarqués d’assistance et de
surveillance des affaires maritimes, placés à cet effet sous
l’autorité du chef de centre de sécurité des navires
par le
directeur régional des affaires maritimes.
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68
COUR DES COMPTES
Tableau n° 15 : Effectifs par centre de sécurité des navires
et par catégorie (au 25/11/2011)
Sources : direction des affaires maritimes.
Le tableau présenté ci-dessus répartit les inspecteurs par centres de
sécurité des navires et par catégorie au début de l’année 2011. Les
militaires représentent 17 % de l’effectif de la catégorie A (7
administrateurs des affaires maritimes et 22 OCTAM).
À la différence de la quasi-totalité des systèmes étrangers
comparables, l’organisation française peut apparaître comme originale avec
une administration civile constituée de fonctionnaires civils et militaires.
Dans la réalité cette situation résulte davantage de l’histoire puis d’une
politique de recrutement imposée par la pression des événements et les
revendications syndicales internes à la fonction publique que de choix
prenant en compte les véritables enjeux et défis auxquels le dispositif allait
devoir faire face.
Il est significatif à cet égard que la direction des affaires maritimes
n’ait pu fournir, comme le lui demandait la Cour, des documents précisant
CSN
Cat. A
Cat. B
Cat. C
Sous Total
ULAM
Total
Bordeaux
8,0
3,4
0,0
11,4
7,0
18,4
Boulogne
2,0
2,0
0,0
4,0
0,0
4,0
Brest
6,0
2,5
0,0
8,5
0,0
8,5
Caen
6,0
6,0
0,0
12,0
6,0
18,0
Concarneau
6,0
3,0
0,0
9,0
0,0
9,0
Dunkerque
6,0
1,0
0,0
7,0
0,0
7,0
La Rochelle
4,0
2,5
0,5
7,0
7,0
14,0
Le Havre
9,0
1,0
0,0
10,0
0,0
10,0
Lorient
7,0
3,0
1,0
11,0
0,0
11,0
Marseille
18,0
3,0
3,0
24,0
10,0
34,0
Rouen
6,0
1,0
0,0
7,0
0,0
7,0
Saint-Malo
6,0
3,0
1,0
10,0
0,0
10,0
Saint-Nazaire
10,0
4,5
0,0
14,5
0,0
14,5
Sète
6,0
2,0
1,0
9,0
13,0
22,0
La Réunion
4,0
1,0
0,0
5,0
0,0
5,0
Fort de France
5,0
3,0
2,0
10,0
0,0
10,0
Total
109,0
41,9
8,5
159,4
43,0
202,4
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ses objectifs, souhaits ou orientations en matière de recrutement et
d’affectation des inspecteurs de sécurité des navires depuis le début des
années 2000.
Dans les faits, la démarche suivie et les résultats obtenus au cours de
cette période se caractérisent par :
-
la perte progressive de la ressource et de l’expertise qu’offraient
les anciens navigants (notamment ceux dénommés « contractuels
Erika
»
29
) ;
-
l’augmentation des effectifs du corps des inspecteurs des affaires
maritimes (IAM) option technique (11 en 2001, 15 en 2002, 9 en
2003, 2 en 2005, 2 en 2006, 5 en 2007, 4 en 2008, 4 en 2009 et 2
en 2010 soit 54 recrutements en 10 ans) par des recrutements de
diplômés de l’université ;
-
le maintien d’un mélange de recrutements multiples en termes de
statuts (20 recrutements d’OCTAAM et 6 administrateurs des
affaires maritimes (AAM) anciens navigants en 10 ans)
conduisant à la situation statutaire mixte susmentionnée.
Au-delà de cette carence, une autre particularité du dispositif réside
dans les renforts de personnel que sont susceptibles d’apporter les unités
littorales des affaires maritimes (ULAM), chiffrés, selon le tableau ci-
dessus, à quarante-trois postes d’agents en équivalents temps plein (ETP)
pour l’ensemble du dispositif. Toutefois, comme l’évaluation de la Cour le
montre, ces renforts sont sujets à caution tant en nombre qu’en activité
effective.
L’appoint incertain des ULAM
30
Depuis la réforme territoriale des services déconcentrés de l’État, les
unités littorales des affaires maritimes, au nombre de dix-neuf en métropole
et de trois outre-mer, sont placées sous l’autorité hiérarchique et
fonctionnelle des délégations à la mer et au littoral, héritières des directions
départementales
des
affaires
maritimes
au
sein
des
directions
départementales des territoires et de la mer (DDTM) et, en remontant
encore dans le temps, des quartiers et stations des affaires maritimes.
Elles font partie du dispositif de contrôle et de surveillance des
affaires maritimes, qui comprend également les patrouilleurs des affaires
29
Cette solution n’a concerné qu’une quinzaine de cas et se révèle, selon la direction
des affaires maritimes, impossible à pérenniser vis-à-vis des syndicats qui y voient une
sorte de privatisation du service public.
30
Unités littorales des affaires maritimes.
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70
COUR DES COMPTES
maritimes et les vedettes régionales de surveillance, ces deux composantes
à vocation hauturière placées, elles, sous l’autorité fonctionnelle des
directeurs interrégionaux de la mer (DIRM).
Historique des unités littorales des affaires maritimes
Les u
nités littorales des affaires maritimes ont été créées en 1993 à
raison d’une ULAM par direction départementale des affaires maritimes,
donc par département littoral (instruction pr
ovisoire du 20 juillet 1993 de
la direction des affaires maritimes et gens de mer) avec 4 missions :
- assurer la police de la navigation en zone maritime côtière ;
-
exercer le contrôle de la filière « pêche et cultures marines » en
mer et à terre ;
- participer à l’inspection de sécu
rité des navires de moins de
24 mètres ;
- assurer les permanences des stations maritimes en complément.
En matière de contrôle de la sécurité des navires, un rapport
d’audit de mars 2004 soulignait :
« L’état d’esprit même de l’activité de contrôle des
unités littorales
des affaires maritimes (ULAM)
de type répressif, est opposé à celui
d’inspection des centres de sécurité des navires (CSN)
, de type préventif
et de conseil. Il est un fait que les actes des inspecteurs des centres
se
traduisent par la délivrance (ou la non-
délivrance) d’un titre de sécurité
mais rarement (jamais) par la rédaction d’un procès-
verbal d’infraction
bien qu’ils soient habilités à le faire. »
Sur la mission de contrôle de sécurité des navires l’audit
concluait :
« …le maintien des unités littorales des affaires maritimes
(ULAM)
dans le dispositif de contrôle de la sécurité des navires est au
minimum
nécessaire
en
termes
de
maintien
des
qualifications
des
inspecteurs de la sécurité des navires (ISN) qu
i y sont affectés ; à
condition qu’ils effectuent ces missions dans un contexte fonctionnel
approprié, c'est-à-dire sous le contrôle des
centres de sécurité des
navires (CSN), tel qu’il est prévu par l’instruction sur les
unités littorales
des affaires maritimes (ULAM) mais insuffisamment appliqué ».
Une nouvelle instruction provisoire de 2007, signé du directeur des
affaires maritimes, régit actuellement les
unités littorales des affaires
maritimes (ULAM). Elle décrit et fixe, d’une part l’organisation, le
s
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 71
missions et l’emploi de ces unités, d’autre part, leur régime de travail.
Deux missions prioritaires leur sont assignées :
-
le contrôle et la surveillance des activités maritimes (pêches
maritimes, navigation maritime, plaisance et loisirs nautiques, po
lice de la
sécurité des navires, réglementation sociale des marins, police de
l’environnement marin) ;
- l’inspection de la sécurité des navires.
Pour cette dernière mission l’instruction précise
: « La responsabilité de
l’organisation de l’inspection de l
a sécurité des navires et la définition
des méthodes d’inspection incombent aux chefs de
centre de sécurité des
navires (CSN). La participation des
unités littorales des affaires
maritimes (ULAM) est fixée par une convention entre le chef de Centre
compétent et le directeur départem
ental, autorité hiérarchique de
l’ULAM »
. Elle ajoute que la liste des navires dont le dossier est suivi par
l’unité littorale des affaires maritimes (ULAM)
fait l’objet d’une
concertation annuelle entre le chef de centre et le chef de service «
action
interministérielle mer et littoral ».
Sources : Rapport d’audit sur les unités littorales des affaires maritimes (ULAM) de
mars 2004 du conseil général des ponts et chaussées et de l’inspection générale des
services des affaires maritimes
Le tableau d’effectifs, présenté plus avant, est loin de refléter la
réalité opérationnelle concernant ces renforts. Si l’on se fie à lui, cinq
centres de sécurité des navires
sur les seize, bénéficieraient de renforts de
personnel venant des unités littorales des affaires maritimes (Bordeaux,
Brest, La Rochelle, Marseille et Sète) représentant un effectif total de 43
ETP (agents de catégorie B ou C).
En fait, le nombre, le niveau et la qualité des renforts de personnel
apportés par les unités littorales des affaires maritimes dépendent des
conventionnements établis entre les directeurs interrégionaux de la mer et
les directions départementales des territoires et de la mer, mais aussi
désormais de la plus ou moins bonne volonté des nouvelles directions
départementales de « jouer le jeu » de la coopération. Or, la situation est
loin d’être homogène et transparente sur l’ensemble du littoral. Durant
l’évaluation de la Cour, la direction des affaires maritimes a reconnu sa
méconnaissance de la situation réelle sur le terrain en indiquant qu’elle
lançait un recensement.
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COUR DES COMPTES
De son côté l’inspecteur général des affaires maritimes a admis qu’il
faudrait revoir les missions des unités littorales des affaires maritimes pour
n’en faire que des unités de contrôle et d’inspection mais pas de délivrance
de titres, tâche qui devrait être réservée aux seuls centres de sécurité des
navires, solution que partage pleinement la Cour au terme de la présente
enquête.
Opération de contrôle par les unités littorales des affaires
maritimes
Crédits photos : © Laurent Mignaux/METL-MEDDE
En outre les visites sur le terrain et les entretiens conduits au cours
de l’enquête, que ce soit dans les centres ou les délégations à la mer et au
littoral, ont montré qu’il était de plus en plus difficile de maintenir une
ressource experte dans les unités littorales des affaires maritimes
pour les
visites de sécurité des navires du fait :
-
du
vieillissement
des
contrôleurs
habilités
et
du-non
renouvellement de cette expertise chez des agents plus jeunes ;
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 73
-
des arbitrages imposés au délégué à la mer et au littoral devant
une ressource limitée et des missions variées qui conduisent à
donner la priorité à la police des pêches et de la navigation ;
-
enfin des réticences de chefs de centres à confier des délégations à
des agents qui ne sont pas sous leur autorité directe alors que ces
mêmes chefs de centre assument la responsabilité personnelle des
contrôles.
En conséquence, la situation actuelle est tout à fait insatisfaisante,
tant sur le plan de l’efficience des moyens mis en oeuvre que de l’efficacité
du dispositif et elle ne saurait perdurer plus longtemps pour les raisons
suivantes :
-
le système, assis sur des bases juridiques incertaines (seule une
circulaire régit le statut et le rôle des unités littorales des affaires
maritimes ; le système conventionnel entre administrations
dépendant désormais de chaînes hiérarchiques séparées est
faible), est devenu extrêmement disparate au fil du temps ;
-
il existe un besoin pressant de clarification de la situation et des
relations en matière de répartition des tâches de contrôle (pas de
liste à jour au niveau national des conventions et des délégations
consenties et effectivement exercées) ;
-
l’allocation des ressources est mauvaise car, pour toutes les
raisons mentionnées ci-dessus, les centres de sécurité des navires
ont surtout regroupé les inspecteurs et agents de catégorie A,
alors que les unités littorales des affaires maritimes ont conservé
les agents de catégories B et C, spécialisés dans les contrôles des
petits navires, mais en remplissant de moins en moins ces
missions compte tenu de la priorité donnée au contrôle des
pêches ; dès lors les répartitions ne correspondent pas dans
certains centres aux besoins réels (inspecteurs de catégorie A
effectuant des contrôles de navires de pêche ressortissant
davantage à la compétence d’agents B ou C) .
En outre, les agents des unités littorales des affaires maritimes
perçoivent une prime d’embarquement même quand ils sont affectés dans
la fonction contrôle et ne naviguent pas alors que les agents des Centres
exerçant les mêmes tâches n’en bénéficient pas, ce qui, de surcroît, ne
favorise pas le maintien des agents de catégorie B et C dans ces Centres.
Enfin la réorganisation territoriale, analysée plus loin, qui supprime
tout lien organique et hiérarchique entre le directeur interrégional de la mer,
responsable général de la mission de contrôle de la sécurité des navires
dans sa zone de compétence, et certains services et agents chargés d’en
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exécuter une partie porte un coup supplémentaire à la pertinence de ce
système.
c)
Des modalités de gestion peu cohérentes
La gestion des ressources humaines du réseau des centres de sécurité
des navires (CSN), tel qu’il est désormais constitué, soulève des difficultés
que l’administration des affaires maritimes n’a pas su résoudre. Elle crée,
notamment au sein du corps des inspecteurs civils, des interrogations et
oblige à relever rapidement un double défi pour l’avenir de ce corps.
Les difficultés de gestion
La gestion des inspecteurs de la sécurité des navires, ressortissant à
des statuts civils et militaires différents, pose une série de problèmes liés
aux déroulements de carrière, aux rémunérations et à la formation des
divers agents concernés.
S’agissant des procédures d’évaluation, de mutation, d’avancement
et des conditions de rémunération, la coexistence de plusieurs statuts et de
règles différentes au sein d’un même centre où les agents exercent les
mêmes missions, créent, sinon des frustrations, du moins certaines
irritations ou incompréhensions, ainsi que les entretiens avec les
inspecteurs dans les cinq centres visités l’ont manifesté à des degrés divers
suivant les lieux.
Plusieurs chefs de centre ont également souligné ce problème et les
difficultés qui en résultent dans leurs réponses au questionnaire en ligne qui
leur a été adressé. Une réponse résume ce point de vue :
« Le maintien de
trois corps d’encadrement différents au niveau des cadres (dont un civil et
deux militaires) induit des difficultés de management (par exemple :
application de la PFR (
prime de fonctions et de résultats
) aux cadres civils
uniquement, différences de rémunération de cadres occupant des postes
similaires ».
Il ressort ainsi des réponses recueillies et des avis exprimés par les
parties prenantes tout au long des entretiens de l’évaluation que la direction
des affaires maritimes n’a pas su accompagner ces évolutions et
« manager » de façon cohérente le nouveau dispositif se mettant
progressivement en place au fil des ans.
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 75
En revanche, on doit porter à son crédit la mise en oeuvre d’un
système de qualification qui comporte cinq niveaux
31
et des modalités de
formation continue qui, globalement, donnent satisfaction aux intéressés.
Tableau n° 16 : Armement (en ETP) des centres de sécurité
des navires constaté par qualification - 2010
Sources :
direction des affaires maritimes (DAM) – 2 février 2011
En effet, la majorité des inspecteurs entendus se déclarent satisfaits
des formations proposées et de la possibilité d’en bénéficier. Les
insatisfactions s’expriment surtout chez les contrôleurs qui trouvent la
durée de leur formation, notamment initiale, trop limitée. Le besoin d’une
meilleure offre de formation en anglais est assez généralement ressenti.
31
Les trois premiers niveaux de qualification en tant qu’inspecteurs sont décernés à des
agents de catégorie C (syndic des gens de mer) et B (contrôleurs). Les niveaux 4 et 5
correspondent à des agents de catégorie A.
CSN
Niveau 1
Niveau 2
Niveau 3
Niveau 4
Niveau 5
Bordeaux
0,0
0,4
3,0
1,0
7,0
11,4
Boulogne
0,0
0,0
2,0
0,0
2,0
4,0
Brest
0,0
0,0
2,5
0,0
6,0
8,5
Caen
1,0
1,0
4,0
3,0
3,0
12,0
Concarneau
0,0
0,0
3,0
0,0
6,0
9,0
Dunkerque
0,0
0,0
1,0
4,0
2,0
7,0
La Rochelle
0,0
0,0
3,0
0,0
4,0
1 ISN3
8,0
Le Havre
0,0
0,0
0,0
5,0
4,0
9,0
Lorient
0,0
0,0
4,0
2,0
5,0
11,0
Marseille
0,0
0,0
6,0
4,0
14,0
24,0
Rouen
0,0
0,0
1,0
3,0
2,0
1 ISN4
7,0
Saint-Malo
1,0
0,0
3,0
2,0
3,0
1 ISN5
10,0
Saint-Nazaire
0,0
0,0
3,5
3,0
7,0
1 ISN3
14,5
Sète
0,0
2,0
1,0
1,0
4,0
1 ISN5
9,0
La Réunion
0,0
0,0
1,0
1,0
3,0
5,0
Fort de France
0,0
2,0
3,0
1,0
4,0
10,0
Total
2,0
5,4
41,0
30,0
76,0
5,0
159,4
Vacance
Total
Qualification inspecteur de la sécurité des navires (ISN)
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COUR DES COMPTES
Cette remarque est aussi formulée par les chefs de centres de sécurité des
navires visités.
La coopération avec l’Agence européenne de la sécurité maritime et
les échanges avec d’autres collègues européens sont vus comme très
positifs en matière de formation et leur développement est souhaité.
Le système des qualifications introduit par l’administration française
à partir de 2001 fixant un cursus professionnel et les stages de formation
continue, dont le suivi constitue l’une des conditions d’accès aux niveaux
de qualification, joue incontestablement un rôle d’harmonisation et
d’unification des compétences. En outre, ce système et ces modalités se
développent et se renforcent sous l’influence de l’action de l’Organisation
maritime internationale et de la politique d’harmonisation des formations et
des compétences mises en oeuvre par la commission européenne dans le
cadre des contrôles de l’État du port.
Un dispositif qui se fige
L’évaluation de la Cour révèle deux constats inquiétants pour
l’avenir.
En premier lieu, en dehors des mutations imposées aux inspecteurs
militaires, il y a peu de mouvements au sein du réseau. La seule exception
au manque de mobilité se trouve dans les centres du nord de la France qui,
compte tenu de leur faible attractivité, servent de
« pépinière »
pour les
nouveaux inspecteurs, imposant ainsi un effort d’accompagnement non
négligeable pour ces centres.
Révélatrice de ce défi est la réponse apportée par un chef de centre
de sécurité des navires qui indique qu’il faut
« améliorer la gestion des
ressources humaines (tous les centres de la façade Nord sont en déficit
chronique d'inspecteurs, en nombre et en qualification), en redistribuant
les postes vers les zones d'activité élevée, en consultant également les chefs
de service lors de la mutation des inspecteurs à statut militaire, en
anticipant les départs potentiels ».
De plus, il est souligné que les effectifs sont insuffisants et
l’organisation du travail inadéquate pour satisfaire aux exigences du
nouveau régime d'inspection PSC (
Port State Control
ou contrôle de l’État
du port).
En second lieu, les perspectives d’évolution et surtout de progression
des inspecteurs civils dans leur carrière au sein du réseau des centres vont
se réduire progressivement compte tenu de la démographie de leur corps
marquée par les forts recrutements du début des années 2000 et de la
position de l’administration visant à établir la parité entre civils et militaires
dans les postes de chefs de centres.
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Tableau n° 17 : Armement (en ETP) des centres de sécurité
des navires constaté par tranche d’âge (en 2011)
Tranche d'âge
[20-39]
[40-54]
>55
Total
Administrateur des affaires
maritimes (AAM)
6
0
1
7
Officier du corps technique et
administratif des affaires
maritimes (OCTAAM)
11
10
0
21
Inspecteur des affaires
maritimes (IAM)
40
30
5
75
Ingénieur des études et
techniques de l’armement
(IETA)
32
1
0
0
1
Postes de non-titulaires de
catégorie A (
PNTA)
0
2
1
3
Total
58
42
7
107
Sources : direction des affaires maritimes –
2 février 2011
32
Ingénieur des études et techniques de l’armement (IETA), en poste à St-Nazaire.
Trois postes de non-titulaires de catégorie A (PNTA) : il s’agit de trois postes, dont
deux au centre de sécurité des navires de Saint-Nazaire et un à celui de Brest.
0
10
20
30
40
50
60
[20-39]
[40-54]
[55 et plus]
Tranche d'âge
PNTA
IETA
IAM
OCTAAM
AAM
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78
COUR DES COMPTES
En conclusion, ayant procédé à des recrutements d’inspecteurs dans
l’urgence, sans anticipation ni ligne directrice après les événements de
l’Erika et du Prestige, l’administration des affaires maritimes, de surcroît
dépourvue d’instruments performants de connaissance et de suivi de ses
personnels de contrôle, a conduit depuis cette date, une gestion de ses
ressources humaines à courte vue, surtout soucieuse d’éviter les conflits. Il
s’en suit, aujourd’hui, une situation :
-
peu satisfaisante du fait de la disparition progressive de la variété
des profils d’inspecteurs dans les centres (principalement de ceux
des
navigants
expérimentés),
reconnue
pourtant
assez
unanimement comme une importante source de richesse et
d’expertise ;
-
peu motivante en raison des faibles perspectives de mobilité,
d’avancement et d’évolution de carrière ouvertes pour toute une
génération d’inspecteurs de la filière universitaire ;
-
complexe et difficile à gérer harmonieusement du fait de la
cohabitation d’agents à statuts différents occupant les mêmes
fonctions et en compétition pour les rares postes de responsabilité
qui peuvent leur être offerts ;
-
figée sur le terrain et de plus en plus inadaptée aux nouveaux
enjeux.
Un double défi à relever
L’administration des affaires maritimes se trouve donc aujourd’hui
confrontée à un double défi concernant l’organisation et la gestion de ses
ressources humaines et professionnelles consacrées au contrôle de la
sécurité des navires :
-
à court terme, adapter rapidement son organisation et ses moyens
quantitatifs et qualitatifs sur le littoral pour faire face de façon
efficiente et efficace aux priorités et besoins résultant de la mise
en oeuvre du nouveau système d’inspection d’État du port ;
-
à moyen terme, rechercher un meilleur équilibre pour le corps
des ISN civils entre une indispensable spécialisation par métier et
de meilleures possibilités de mobilité et d’évolution en termes de
carrière au sein d’un plus grand ensemble professionnel, que
celui-ci soit au niveau des affaires maritimes ou plus largement
du ministère.
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 79
2 -
La faiblesse et les lacunes du pilotage
Pour piloter un réseau de centres hétérogènes et autonomes et leur
apporter un soutien efficace, la direction des affaires maritimes ne dispose
à l’heure actuelle ni d’un système d’information national fiable et
performant, ni d’outils lui permettant d’exercer un contrôle de gestion
efficace sur l’activité des centres.
a)
Un réseau de centres divers et très autonomes
Le dispositif consiste en un réseau de 16 centres (14 en métropole,
2 outre-mer, ceux de Fort-de-France et de Saint-Denis de la Réunion)
auxquels s’ajoutent les services des affaires maritimes de Nouvelle-
Calédonie et de Polynésie. Il s’appuie sur 160 inspecteurs, dont 109 sont
des agents de catégorie A, appartenant à la fonction publique, de statut civil
ou militaire.
Réseau des centres de sécurité des navires
Sources : Direction des affaires maritimes
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COUR DES COMPTES
La diversité des centres se lit dans les chiffres. Leur autonomie se
découvre lors des visites sur place.
Des centres très divers
Les centres sont très divers en termes de taille, d’effectifs,
d’organisation, de charge et de nature de travail.
Les tableaux n° 1, 6 et 15, présentés plus avant, permettent de
mesurer cette diversité à travers la taille des flottes « administrées » par
chacun d’eux (commerce et pêche) et les effectifs d’inspecteurs dont ils
disposent pour remplir leurs différentes missions. Cette diversité peut se
lire aussi dans le tableau n° 21 infra rendant compte de l’évolution de leur
activité en matière de contrôles de l’État du port au cours des dernières
années.
Si l’on se fie au tableau qui suit, la charge globale de travail en
matière de sécurité au titre de l’État du pavillon, répartie entre seize centres
de sécurité des navires et deux services des affaires maritimes d’outre-mer,
porte sur le contrôle et le suivi d’environ 1 900 navires à passagers dont 76
de plus de 500 UMS, de 3 164 navires de charge dont 170 de plus de 500
UMS effectuant une navigation internationale et de plus de 9 700 navires
de pêche dont 234 de plus de 24 mètres auxquelles il convient d’ajouter
plus de 3 000 navires de conchyliculture et de petite pêche.
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Tableau n° 18 :
Flotte par centre de sécurité des navires (commerce et pêche)
Sources : direction des affaires maritimes (DAM)
Type de navire
Navires à
passagers
> 500
UMS
Navires >
200
passagers
Autres
navires à
passagers
Navires
spéciaux
internation
al > 500
Autres
navires de
charge >
500
Charge >
500
national
Autres
navires de
charge
national
Navires de
pêche >
24m
Navires de
pêche 12 à
24 m
Navires de
pêche <
12m
navires
CPP
Total
Bordeaux
4
0
46
0
8
4
65
40
56
155
0
378
Boulogne
4
0
0
0
0
0
43
7
60
120
0
234
Brest
2
8
17
7
22
0
168
4
45
353
92
718
Concarneau
0
11
27
2
9
1
23
17
176
249
3
518
Dunkerque
3
0
1
7
9
2
0
82
0
14
19
137
La Rochelle
0
41
39
0
3
2
129
4
89
191
1069
1567
Le Havre
1
2
2
0
25
3
103
0
10
49
0
195
Lorient
7
19
30
0
0
0
40
12
53
514
785
1460
Manche Calvados
5
15
16
0
5
0
210
0
130
664
0
1045
Marseille
21
15
500
5
34
5
1200
13
31
490
50
2364
Rouen
2
13
0
0
0
3
88
1
33
40
1
181
Saint Malo
2
27
16
0
0
2
115
2
70
430
0
664
Saint Nazaire
3
27
9
1
16
9
191
0
90
545
417
1308
Sete
0
0
43
0
0
1
238
20
112
721
675
1810
0
Antilles Guyane
5
69
173
0
11
0
136
0
29
2433
0
2856
Nouvelle Calédonie
8
2
132
2
0
3
139
7
15
223
0
531
Sud Océan Indien
0
4
7
1
1
1
71
25
28
519
0
657
Polynésie
9
12
510
0
2
10
189
0
105
682
0
1519
TOTAL
76
265
1568
25
145
46
3148
234
1132
8392
3111
18142
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82
COUR DES COMPTES
Au-delà des chiffres rapprochant effectifs et nombres de navires par
centre, on relève des organisations très contrastées d’une implantation à
l’autre par :
-
le nombre d’antennes : aucune (Dunkerque, Boulogne) à six
(Marseille) ;
-
les relations avec les délégations à la mer et au littoral et les
unités littorales des affaires maritimes de leur ressort (5 centres :
Marseille, Bordeaux, Caen, La Rochelle et Sète bénéficient du
concours des unités littorales des affaires maritimes de leur
ressort si l’on se fie au tableau d’effectifs fourni par la direction
des affaires maritimes en janvier 2011) ;
-
les délégations aux sociétés de classification : neuf centres de
sécurité des navires n’ont effectué aucune délégation ces
dernières
années,
trois
centres
délèguent
beaucoup
et
régulièrement chaque année Caen (24 à 30), Le Havre (23 à 29)
et Marseille (51 à 94) ;
-
la répartition entre agents civils et militaires (des centres sont
entièrement composés de civils comme Lorient) ;
-
la nature des missions exécutées.
La diversité des missions a été relevée dans l’échantillon des centres
visités.
Le chef du centre de Boulogne estime que 60 % du temps est
consacré aux visites de navires de pêche, 30 % au suivi des dossiers de
construction navale et 10 % au contrôle de l’État du port et aux visites de
gestion de la sécurité (ISM).
À Lorient, l’activité est essentiellement tournée vers les visites sur
les navires de pêche et de passagers. À Marseille, la répartition est de 60 %
du temps occupé par les contrôles au titre de l’État du pavillon et 40 % par
ceux au titre de l’État du port. Enfin, à Saint-Nazaire, 70 % de l’activité
porte sur des navires de pêche de moins de 12 mètres.
Ces informations fournies par les chefs de centres interrogés par la
Cour viennent, très partiellement et de façon disparate, suppléer
l’incapacité de l’appareil statistique et de contrôle de gestion de
l’administration centrale à fournir des données fiables et facilement
exploitables sur ce sujet pourtant essentiel pour le pilotage d’ensemble du
dispositif.
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Des centres très autonomes
L’autonomie
et
la
diversité
des
centres
se
manifestent
principalement dans les modalités d’organisation et de répartition du travail
en leur sein.
Deux aspects de l’autonomie des centres et de la diversité de
management et de fonctionnement qui en résulte sur l’ensemble du réseau
sont particulièrement frappants.
Dans tel grand centre, le chef de centre laisse les inspecteurs décider
entre eux des choix des contrôles périodiques sur le pavillon et de la
composition des équipes selon un système qu’on peut pratiquement
qualifier d’autogestion. Dans un autre, la ventilation des visites se fait
clairement sous l’autorité du chef de centre qui l’affirme notamment par
une réunion hebdomadaire en fin de semaine de tous les inspecteurs. Dans
ce centre et dans un autre (soit deux sur les cinq de l’échantillon de la
Cour), ont été mis en place des agendas électroniques partagés sur
l’intranet du centre offrant une bonne visibilité sur la répartition et
l’exécution des missions. Dans les trois autres, aucune application ou outil
électronique n’existe permettant de programmer et de suivre les missions
des inspecteurs.
S’agissant des relations avec les armateurs, deux approches
différentes ont été relevées. Certains chefs de centre laissent s’établir une
spécialisation et une relation dans la durée entre inspecteurs et armateurs au
motif de la nécessité d’une continuité au service d’une meilleure
connaissance des navires et d’une amélioration de la sécurité ; d’autres en
revanche, préfèrent une rotation annuelle des inspecteurs chargés du
contrôle d’une flotte donnée, faisant jouer à ce mécanisme un rôle de
contrôle qualité interne au centre.
Au-delà de la critique qu’appelle l’absence de doctrine de
l’administration centrale sur la question importante
de l’organisation dans
la durée
des relations entre inspecteurs et armements et navigants qui sont
contrôlés annuellement, la Cour estime que la bonne pratique d’une
rotation régulière des inspecteurs constitue un facteur important de qualité
et d’efficacité des contrôles dans ce domaine comme dans tous les
domaines où l’établissement de relations durables entre contrôleurs et
contrôlés peut se révéler porteur de risques.
En outre, le degré et les modalités d’utilisation du logiciel de
« Gestion informatisée des navires par l’administration » (GINA), très
variables selon les sites, fournissent une autre illustration, révélatrice de
pratiques de management différentes suivant les centres, mais aussi et
surtout des faiblesses et lacunes du pilotage central du réseau par la
direction des affaires maritimes.
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COUR DES COMPTES
Des centres insuffisamment soutenus
Les réglementations relatives à la sécurité des navires sont multiples,
éparses et de plus en plus difficiles à maîtriser pour les inspecteurs.
L’administration centrale a de plus en plus de mal à faire face à
toutes ses tâches, ce qui la conduit à négliger le soutien aux contrôles faute
de moyens.
La transposition et le suivi réglementaire, la gestion et le suivi des
relations internationales – Organisation maritime internationales, Agence
européenne pour la sécurité maritime, Mémorandum
–, la gestion de la
commission centrale de sécurité et les relations avec les partenaires
nationaux, les relations avec les structures régionales et locales et, depuis
plus d’un an, la préparation de la réforme constituent autant de tâches qui
mobilisent les ressources de la direction des affaires maritimes au détriment
d’un soutien et de conseils plus actifs aux contrôles.
Dès lors, il n’est guère étonnant que dans les réponses aux
questionnaires de la Cour, tous les inspecteurs, sans exception, déplorent,
d’une façon ou d’une autre, le manque de soutien de l’administration
centrale.
Certaines réactions recueillies auprès des inspecteurs des centres
visités en donnent un témoignage :
« De nombreuses instructions sont envoyées aux centres de sécurité
des navires (CSN) et aux directeurs interrégionaux de la mer (DIRM) par
courriel. Certaines sont consolidées et mises sur le serveur national des
affaires maritimes en ligne. D’autres, parfois importantes, demeurent à
l’état de mail non maîtrisé. La veille réglementaire reste aléatoire et non
centralisée au niveau national ».
« Si l’administration centrale devait apporter un soutien, en
premier, ce serait le soutien juridique en cas de problème…Il faudrait un
système
de
questions-réponses
rapides….avoir
des
données
sur
l’interprétation de la règle, etc. ».
A cet égard, il est intéressant de rappeler la bonne pratique de
l’administration britannique, consistant à mettre rapidement en ligne sur
internet des fiches d’interprétation de la réglementation disponibles à la
fois pour les inspecteurs et les inspectés.
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 85
b)
Un système d’information nationale insuffisamment fiable et
performant
Dans ce domaine, la qualité et la performance d’un système
d’information national relatif à la sécurité reposent sur quatre éléments
fondamentaux :
-
la robustesse de l'appareil statistique permettant d’afficher et de
suivre des objectifs stratégiques ;
-
la fiabilité et l’exhaustivité des données enregistrées dans le
système à l’issue des contrôles et délivrances de titres ;
-
la solidité de l’instrument de pilotage du réseau et des moyens
prenant appui sur des données d'activités pertinentes et exactes ;
-
la facilité d’accès aux données d'accidentologie et relatives aux
évènements de mer pour en connaître les causes et les
conséquences.
Au terme d’une succession d’échecs, la direction des affaires
maritimes est parvenue à mettre en place le système GINA dans tous les
centres.
Toutefois
l’enquête
a
révélé
que
l’application
restait
insuffisamment
acceptée
ou
utilisée
et
encore
trop
faiblement
opérationnelle de ce fait et que des voies d’amélioration étaient nécessaires
pour la rendre pleinement fiable et performant.
Une succession d’échecs avant GINA
Plusieurs systèmes d’information et base de données ont été
développés et se sont succédés pour suivre la vie et l’exploitation des
navires sous pavillon national. On en compte trois depuis 2000 : SECUFIC
(2000), NAVISUR (2004 – jamais déployé) et GINA (2007).
GINA est un système d'information ayant pour objet de mémoriser
l'ensemble des données relatives aux visites de sécurité des navires. Les
navires connus du système d'information sont les navires sous pavillon
français (tous registres), qui sont immatriculés pour un usage professionnel
dans les domaines de la pêche, du transport de marchandises ou du
transport de passagers. Les navires à utilisation collective (NUC) sont
immatriculés pour un usage professionnel et sont donc présents dans
GINA.
L’accès de GINA est limité aux agents de l'administration des
affaires maritimes. Les utilisateurs se trouvent principalement à la direction
des affaires maritimes au niveau central mais aussi au niveau local –
directeurs interrégionaux de la mer, et délégations à la mer et au littoral
–
et bien sûr dans les centres de sécurité des navires qui sont les principaux
pourvoyeurs d’informations.
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COUR DES COMPTES
L'application fonctionne sur le réseau intranet et internet. L'accès se
fait par l'intermédiaire d’un système sécurisé nommé « Cerbère ». La base
doit contenir les données sur tous les navires éligibles, enregistrés tant lors
de leur mise en service qu’ultérieurement durant leur suivi en service.
GINA : un taux d’utilisation insuffisant
L’application a été déployée dans les 16 centres et il était prévu que,
dès juin 2012, elle puisse renseigner sur l’intégralité de l’activité
« pavillon »
de chaque centre couvrant ainsi l’ensemble des flottes
administrées. C’est loin d’être le cas.
Comme l’illustre le tableau suivant, le ratio rapportant le nombre de
navires enregistrés dans GINA au nombre de navires immatriculés dans le
fichier des navires professionnels marchands et pêche (NAVPRO)
33
montre
de grandes disparités entre les centres.
Dans certains centres, coexiste encore avec GINA, l’ancien système
SECUFIC servant au suivi et au contrôle des navires notamment quand il
s’agit d’éditer le rapport de visite. Il en résulte dès lors un travail de double
saisie important et générateur de perte de temps et d’erreurs tout en nuisant
à l’homogénéité des pratiques. Dans presque tous les centres, subsistent des
dossiers papier. Enfin l’application, quand elle est utilisée, l’est souvent en
mode dit « dégradé », toutes les informations sur les navires n’étant pas
saisies. C’est notamment le cas pour la reprise des historiques.
33
Fichier servi par les délégations à la mer et au littoral (DML) permettant d’enregistrer
les navires lors de leur immatriculation.
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Tableau n° 19 : Taux d’utilisation du système d’information
GINA (2011)
Sources : Direction des affaires maritimes.
Le déploiement et l’utilisation de l’application soulèvent de réelles
difficultés malgré les actions de formation entreprises.
Les difficultés d’exploitation de GINA ne se limitent pas à son
acceptation par les inspecteurs utilisateurs et fournisseurs d’information.
Son caractère trop faiblement opérationnel résulte aussi d’autres facteurs.
L’interopérabilité avec d’autres systèmes d’information
La base GINA ne fournit qu’une partie des informations portant sur
la sécurité des navires. Les données découlant du contrôle du respect
d’autres séries de normes – code international de gestion de la sécurité
(ISM), code international sur la sûreté (ISPS),
Maritime Labour
Convention
(MLC) – ne sont pas reprises directement.
CSN
Nombre de
navires dans la
base NAVPRO
Nombre
dans la base
GINA
%
Bordeaux
1266
574
45,3
Boulogne
294
230
78,2
Caen
840
683
81,3
Brest
776
413
53,2
Concarneau
638
487
76,3
Dunkerque
76
66
86,8
La Rochelle
1847
692
37,5
Le Havre
220
119
54,1
Lorient
1666
178
10,7
Marseille
2804
1213
43,3
Rouen
285
163
57,2
Saint Malo
993
458
46,1
Saint Nazaire
1669
625
37,5
Sète
1786
1182
66,2
Centre de sécurité
des navires (CSN)
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COUR DES COMPTES
La qualité de l’information dans GINA dépend aussi de celle des
bases qui l’alimentent et de leur interopérabilité.
Il a été notamment constaté que des informations d’immatriculation
enregistrées dans la base NAVPRO étaient erronées ou lacunaires, pouvant
conduire à des erreurs et à des ressaisies. Le rapprochement avec le
référentiel NAVPRO est à l'étude. Il s’agit de disposer par ce
rapprochement d’une base « navires » commune à la direction générale des
infrastructures de transport et de la mer, conformément au schéma directeur
des systèmes d’information.
La base THETIS utilisée pour le contrôle au titre de l’État du port
n’est pas non plus interopérable avec GINA. Les déficiences relevées sur
des navires français lors de contrôles qu’ils subissent dans la zone du MOU
de Paris au titre de l’État du port ne se retrouvent pas systématiquement
dans le dossier du navire au titre du suivi
« pavillon ».
Par conséquent, les
recherches éventuelles se font pour l’instant manuellement.
Les voies d’amélioration
Les inspecteurs ont souligné les difficultés rencontrées dans
l’appropriation de GINA, tout en manifestant une crainte devant le risque
de bureaucratisation des tâches, voire, dans certains cas, de mise en cause
injustifiée de leur responsabilité.
Les chefs des centres de sécurité des navires, que ce soit à travers les
entretiens menés sur place ou leurs réponses au questionnaire, pensent que
la base GINA permet de suivre les navires sous pavillon français de leur
compétence et qu’elle constitue un progrès. Ils sont conscients des
difficultés et notamment de la période transitoire longue pour saisir
l’historique des données. La généralisation de GINA nécessitera un
changement d’habitude et le dépassement d’attitudes réfractaires.
Selon
eux,
des
développements
devraient
être
menés
afin
notamment :
-
d’améliorer la convivialité de l’outil et de rendre les rapports plus
clairs ;
-
de codifier les déficiences et/ou les prescriptions pour faciliter la
statistique ;
-
d’introduire la possibilité de requêtes et d’extraction de
statistiques pour cibler les visites ;
-
de mettre en place des avertisseurs sur les changements
règlementaires ou sur les permis venus à échéance ;
-
de mettre en place des référentiels de contrôle pour chaque type
de navire.
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Il est fondamental d’aboutir rapidement à une base de données
complète permettant de procéder à des analyses tant au niveau local que
national (déficiences, prescriptions). Cette base, bien renseignée, facilitera
l’homogénéisation des pratiques des centres et renforcera la qualité de
l’information utile aux contrôles. Elle offrira une bonne connaissance de la
nature des prescriptions émises. Enfin, correctement gérée, elle pourra
servir au développement des modules de suivi de l’activité des centres et du
système de contrôle de gestion de la direction des affaires maritimes qui
reste à créer.
c)
Un système de contrôle de gestion inexistant
Pour piloter son dispositif, la direction des affaires maritimes ne
dispose pas d’outils de gestion modernes et performants. La démarche
qualité entreprise, pour utile qu’elle soit, n’est pas suffisante pour pallier
les lacunes de son système de contrôle de gestion.
L’absence de connaissance de l’activité réelle des centres
Interrogée sur ses outils de gestion en lui demandant notamment si
elle disposait d’
« un tableau de bord et des indicateurs de gestion pour
suivre l’activité des centres de sécurité des navires (CSN) dans leurs
différentes missions et pour s’assurer de l’adéquation des moyens aux
niveaux d’activité ? »
, la direction des affaires maritimes a répondu qu’
«
un programme Excel (lui) permet d’évaluer le nombre théorique d’ISN
nécessaire dans un centre. »
Cet outil
« reste néanmoins très indicatif car
la gestion et la répartition des agents de l’État répond à d’autres
impératifs non maîtrisés par la direction des affaires maritimes (DAM) »
a-
t-il été indiqué.
On ne saurait mieux dire que la direction des affaires maritimes n’est
pas, et ne se sent pas, en mesure de gérer rationnellement les effectifs des
Centres.
En tout état de cause, cet outil
34
examiné par la Cour, de caractère
« confidentiel », présente de nombreuses lacunes du fait de son manque de
fiabilité et d’exhaustivité.
34
Le tableau n° 19 ci-dessus, rapprochant les différents types de navires administrés par
chaque Centre et ses effectifs, en fournit une image. Complété par le calcul de la charge
de travail théorique du centre à partir d’une estimation du temps devant être consacré à
chaque tache, il constitue le seul instrument dont dispose la direction des affaires
maritimes pour tenter de vérifier si les effectifs du centre sont bien en adéquation avec
sa charge de travail.
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COUR DES COMPTES
En effet, faute de fiabilité de la base NAVPRO déjà relevée, les
données sur les flottes administrées sont, en fait, recueillies par
interrogation de chaque chef de centre et saisies manuellement. Il en va de
même pour les données relatives aux contrôles de l’État du port qui ne
figurent pas dans la base GINA. La contribution des unités littorales des
affaires maritimes, mal connue, n’est pas prise en compte, de même qu’une
partie de l’activité des centres et services d’outre-mer.
Certes, des informations figurent, mais de façon partielle, dans les
bases de données, notamment GINA et THETIS. Outre le fait, déjà
souligné, que le logiciel GINA souffre encore de nombreuses lacunes pour
pouvoir être considéré comme pleinement fiable et opérationnel, ce ne sont
que des bases de données et non des instruments de pilotage.
Dans la plupart des centres de sécurité des navires, sont utilisés des
systèmes de pilotage locaux : le plus souvent une petite application
construite avec Excel permettant de suivre l’activité, de prévoir les visites
et d’envoyer des statistiques aux services centraux. À travers l’examen des
données collectées par la direction des affaires maritimes, il a toutefois été
constaté que tous les centres ne renseignaient pas avec la même qualité ces
indicateurs d’activité (contrôle au titre soit du pavillon, soit du port), ce qui,
là encore, interdit à la direction des affaires maritimes d’avoir une
connaissance exacte des ressources réelles mobilisées pour les différentes
activités.
De façon tout aussi regrettable, on doit constater, la plupart du
temps, l’inexistence au niveau local d’un tableau de bord mettant en regard
les objectifs assignés à un centre de sécurité des navires et les résultats
effectifs. Tout exercice de comparaison et de pilotage est quasiment
impossible à ce niveau-là aussi.
L’administration centrale est consciente de ces lacunes et des
difficultés rencontrées pour y remédier. Selon le schéma directeur des
systèmes d’information même, il n’y a pas de vrai pilotage à partir d’outils
communs. De manière palliative, des systèmes de « reporting » et de saisies
manuelles ont été développés comme cela a été mentionné.
La Cour ne peut donc qu’insister pour que la direction des affaires
maritimes :
-
se dote rapidement d’un outil fiable permettant de recueillir des
informations précises sur l’activité de chaque centre, d’assurer la
bonne adéquation des effectifs à la charge réelle de travail des
centres et de redéployer en tant que de besoin les effectifs ;
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-
mettre en place un système centralisé de « reporting » propre au
suivi de l’activité et au contrôle de gestion, et recruter à cette fin
un contrôleur de gestion et un statisticien.
Une démarche qualité utile mais insuffisante
Faute de pouvoir gérer l’évolution des effectifs des centres et des
profils des agents et manager un dispositif devenu de plus en plus disparate
au fil des ans, la direction des affaires maritimes a dû se lancer,
essentiellement sous la contrainte extérieure, dans une démarche qualité,
sans doute utile et nécessaire mais certainement insuffisante.
L’organisation maritime internationale a procédé en 2009 à un audit
du système français de sécurité maritime portant sur l’État du pavillon et
l’État du port. Cet audit répondait à une démarche volontaire de la France
fondée sur la résolution A. 974 de l’organisation internationale portant
document-cadre et procédures pour le programme facultatif d’audit des
États membres de l’Organisation maritime internationale. Ses effets
n’étaient pas contraignants. Toutefois, à la suite du rapport, le responsable
de la démarche qualité au sein de la direction des affaires maritimes a été
chargé du suivi des écarts constatés. La réponse à un bon nombre d’écarts
relevés a consisté à faire le constat de vacances et d’insuffisance d’effectifs
dans cette direction.
La directive 2009/21/CE sur le respect des obligations des États du
pavillon demande aux États européens de mettre en place un système de
qualité portant sur la délivrance des certificats des navires, et celle des
brevets des gens de mer. Dans le domaine de la sécurité de la navigation, la
direction des affaires maritimes avait anticipé la directive. Chaque centre
régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS)
35
a fait
l’objet d’une certification individuelle.
35
Les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), au
nombre de cinq en métropole et de deux outre-mer, exercent principalement des
missions de surveillance de la navigation maritime et de recherche et sauvetage en mer.
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COUR DES COMPTES
En revanche, la direction des affaires maritimes a estimé qu’une telle
démarche était impossible pour les centres de sécurité des navires. Il a été
décidé de lancer une procédure globale portant sur les 14 centres
métropolitains, la direction des affaires maritimes et les quatre directions
interrégionales. Le centre de Saint-Nazaire a servi de site pilote et a été
certifié en octobre 2010.
36
La démarche de certification porte sur des processus opérationnels.
Actuellement, trois processus opérationnels sont concernés : celui
des commissions d’études (commission centrale et commissions régionales
de sécurité), celui des suivis de navires en chantier et des mises en service
et enfin celui du suivi des navires en service. La direction des affaires
maritimes a aussi la charge de l’élaboration de la réglementation, du suivi
des sociétés de classification et du processus de gestion de la sécurité, soit
le contrôle des compagnies.
Trois processus sont pour le moment « mis entre parenthèses » :
celui induit par le code international de la sûreté des navires et des
installations portuaires (code ISPS
37
), du fait de l’absence d’un agent
servant de pilote au sein de la direction des affaires maritimes, celui de
l’État du port qui vient d’être profondément modifié et celui afférent à la
convention MLC 2006 (convention du travail maritime) qui s’effectuera à
travers celui des visites des centres de sécurité des navires et de la
délivrance du certificat prévu par ladite convention.
Il existe aussi un processus concernant le management interne de la
direction des affaires maritimes, des directions interrégionales de la mer et
des centres de sécurité des navires. A tout cela s’ajoute une série d’autres
processus fonctionnels, tels le traitement des dysfonctionnements, les
audits internes, l’écoute client, la maîtrise de la documentation, etc., et le
système de management qualité de la direction des affaires maritimes.
Pour les trois processus sélectionnés, les outils commencent à être
mis en oeuvre sans intervention de l’inspection générale des affaires
maritimes et sans recherche de comparaison avec les autres pays confrontés
aux mêmes problématiques de qualité.
36
Cette démarche globale vient d’aboutir à la certification NF en ISO 9001 :2008, le 3
septembre 2012 pour la direction des affaires maritimes (inspection de la sécurité des
navires, délivrance des titres de sécurité et de prévention de la pollution, délivrance des
titres de formation professionnelle maritime).
37
International Ship and Port Facility Security Code
. Né au lendemain des attentats du
11 septembre 2001, le code ISPS définit des mesures de sûreté. Chaque navire doit
établir une évaluation des risques encourus, en particulier en fonction de ses zones de
navigation.
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B - Une logique de contrôle affaiblie au niveau local
Dans son organisation traditionnelle, le système de contrôle de la
sécurité des navires, mis en oeuvre par l’administration des affaires
maritimes, avait été conçu de façon que puisse être porté un regard, sinon
unique, à tout le moins conjoint, par des acteurs administratifs proches sur
l’ensemble navire et équipage.
Certes, l’unité des contrôles a bien été conservée au niveau central,
au sein de la direction des affaires maritimes qui regroupe en son sein, on
l’a vu en introduction, l’ensemble des services contribuant, au sens large, à
la sécurité du navire et du marin, totalement indissociables dans la réalité
opérationnelle de la navigation. Localement, pour le littoral et les façades
maritimes, la situation est plus complexe et l’unité des contrôles a
désormais disparu.
En effet, la récente réorganisation territoriale de l’État et de ses
services déconcentrés est venue formellement entériner un processus de
dissociation progressive des deux branches de l’action administrative de
« l’État maritime » en matière de sécurité. Ce mouvement s’était amorcé à
partir de 1997 avec la disparition des quartiers des affaires maritimes et la
création des directions départementales des affaires maritimes et directions
régionales des affaires maritimes.
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94
COUR DES COMPTES
Organisation de l’administration maritime
Sources : Cour des comptes
Comme l’organigramme ci-dessus le montre, les services qui
assuraient traditionnellement les deux missions de contrôle des navires,
d’une part, celle portant sur les flotteurs, d’autre part, celle afférente aux
équipages,
sont
désormais
séparés
dans
la
nouvelle
organisation
administrative de l’État au niveau local. Celle-ci a placé dans deux chaînes
hiérarchiques administratives différentes :
-
ceux qui contrôlent la sécurité physique et technique du navire
et la prévention des risques professionnels maritimes, à savoir
les centres de sécurité des navires dépendant directement des
nouvelles directions interrégionales de la mer ;
-
ceux qui suivent les effectifs, les équipages et leurs conditions
de travail et de santé et agissent désormais au sein des directions
départementales des territoires et de la mer soumises à l’autorité
hiérarchique des préfets de département.
Cette séparation et surtout le fait que les directeurs interrégionaux de
la mer n’ont pas de pouvoir direct sur les services des délégations à la mer
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et au littoral intégrées au sein des directions départementales des territoires
et de la mer ne va pas sans poser des questions de fond sur la qualité,
l’efficacité opérationnelle et la pertinence de ce nouveau dispositif au
regard des enjeux de sécurité maritime.
1 -
Le contrôle du navire
À la différence de systèmes étrangers comparables, le dispositif
public français de contrôle du flotteur a été conçu pour que l’administration
et ses services soient présents dès l’étude et la conception des navires (ou
leurs modifications) puis durant leur construction et lors de leur mise en
service sous pavillon national et qu’ensuite ils effectuent l’ensemble des
visites périodiques durant leur exploitation, sous réserve de la délégation de
certaines opérations à des sociétés de classification.
L’administration centrale intervient dans l’approbation des plans des
plus gros navires à travers une procédure se déroulant devant une
commission centrale de sécurité et qui porte pour l’essentiel sur l’examen
des plans et documents de ces navires. Elle conduit également des audits
sur les compagnies sur la base des obligations qui s’imposent aux États du
pavillon en application des dispositions du code international de gestion de
la sécurité. Elle doit enfin effectuer des contrôles sur les sociétés de
classification en vertu de dispositions européennes.
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96
COUR DES COMPTES
Processus de mise en service des navires et de suivi
Note : A compter du 1
er
janvier 2013, l’activité de jaugeage sera assurée par les
affaires maritimes
Sources : Direction des affaires maritimes
En dehors de ces procédures et contrôles, pour l’exécution desquels
les moyens de l’administration centrale sont limités, l’essentiel de l’activité
de contrôle au titre de l’État du pavillon repose sur les centres de sécurité
des navires, déjà cités, et les inspecteurs de la sécurité des navires et de la
prévention des risques professionnels maritimes qui arment ces centres.
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UN DISPOSITIF INADAPTE AUX NOUVEAUX ENJEUX ET PRIORITES 97
Contrôle d’un navire avant sa mise en service
Crédits photos : © Laurent Mignaux/METL-MEDDE
La mise en place progressive des inspecteurs de la sécurité des
navires et de la prévention des risques professionnels maritimes et leur
regroupement dans des centres de sécurité des navires ont constitué autant
d’étapes vers le dispositif et le maillage territoriaux actuels.
Le décret n° 84-810 du 30 août 1984 définit les centres de sécurité
des navires, rendus autonomes en 1979
38
et relevant des directions
départementales des affaires maritimes, comme :
« les services des affaires
maritimes spécialisés en matière de sécurité des navires, d’habitabilité et
de sécurité du travail maritime et de prévention de la pollution par les
navires »
.
D’une façon générale, les missions des centres de sécurité des
navires consistent, après leur mise en service sous pavillon français, à
inspecter les navires professionnels, de commerce (navires à passagers et
38
Jusqu’à cette date ils étaient sous l’autorité des chefs de quartier.
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de charge), de pêche, et de plaisance à utilisation collective, dont ils
contrôlent la conformité à la réglementation en vigueur. Ils délivrent,
renouvellent et visent leurs titres de sécurité et de prévention de la pollution
ainsi que le permis de navigation. Ils effectuent les audits des navires
soumis au code international de gestion de la sécurité et au code
international sur la sûreté et délivrent à ces navires les certificats
correspondants.
Les centres de sécurité des navires et leurs inspecteurs sont placés
sous l'autorité du directeur interrégional de la mer mais gardent une
autonomie
opérationnelle
sur
le
fondement
de
l’article
31
du
décret
n° 84-810 du 30 août 1984. Le dernier alinéa de cet article
indique :
« Les inspecteurs de la sécurité des navires et de la prévention
des risques professionnels maritimes peuvent prescrire, en l’assortissant de
délais suffisants lorsqu’il n’apparaît pas nécessaire d’interdire ou
d’ajourner le départ d’un navire, l’exécution de toute mesure tendant à
faire respecter les dispositions du présent décret et celles des arrêtés pris
pour son application ».
En dehors des contrôles exercés dans les phases de construction et
de mises en service de nouveaux navires, l’essentiel du travail des centres
de sécurité des navires et des deux services des affaires maritimes d’outre-
mer sur cette flotte prend appui sur les visites dites de suivi des navires en
service destinées à renouveler annuellement le permis de navigation du
navire.
En matière de contrôle du pavillon, le permis de navigation est une
spécificité française. C’est une sorte de constat que le navire a obtenu tous
ses certificats de sécurité. Le décret de 1984 dans sa rédaction de 1996
mentionne que doivent être munis d’un permis de navigation tous les
navires à passagers, de charge, de pêche et à utilisation collective. Il
dispose encore que
« le permis de navigation n’est délivré et renouvelé que
si tous les autres certificats de sécurité et de prévention de la pollution sont
en cours de validité ».
Il précise enfin que
« la périodicité des
renouvellements est annuelle, mais elle peut, pour certaines catégories de
navires, être modifiée par le ministre chargé de la marine marchande ».
Les inspections sont obligatoires, sollicitées par l’armateur et
nécessitent préparation du dossier, fixation des dates de contrôle, inspection
puis rapport enregistrant notamment les prescriptions. Dans le domaine de
la pêche, la délivrance du permis peut nécessiter plusieurs inspections en
raison des prescriptions émises et de la nécessité de vérifier qu’il y a bien
été satisfait.
Selon l’inspecteur général des affaires maritimes, la réglementation
de sécurité pour les navires de commerce français est plus exigeante que la
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réglementation étrangère. La raison en serait, selon lui, l’objectif
d’inscription sur la liste blanche du Mémorandum de Paris, voulu par
l’administration pour des raisons d’images, et souhaité aussi par les
armateurs pour des raisons financières. Un régime de visites annuelles
exécutées par l’administration – ou déléguées – pour renouveler le permis
de navigation n’existe pas, par exemple, au Royaume Uni où les
inspecteurs de l’agence MCA (« Maritime and coastguard agency »)
effectuent, outre quelques contrôles non délégués, pour l’essentiel des
contrôles de second niveau souvent approfondis, qualifiés d’inspection, sur
les navires sous pavillon britannique. La délivrance des certificats et titres
de sécurité y est très largement déléguée aux sociétés de classification.
Ainsi, un navire construit à l’étranger et enregistré sous pavillon
français sera soumis à des visites annuelles qui vont au-delà de l’exigence
internationale. Lorsque les centres de sécurité des navires n’ont pas les
moyens d’effectuer ces inspections annuelles, le chef de centre peut donner
délégation ponctuelle à une société de classification pour assurer cette
inspection.
À cet égard, la Cour a constaté que la direction des affaires
maritimes ne connaissait pas le nombre exact de ces délégations, ni au
niveau global, ni au niveau de chaque centre.
Le contrôle de la sécurité des navires, lors de la visite annuelle,
comporte deux aspects différents et complémentaires :
-
les contrôles administratifs (vérification des certificats et autres
documents exigés par la réglementation) ;
-
l’examen de la sécurité en action (vérification in situ et concrètes
avec notamment le déclenchement d’exercices de sécurité durant
la visite).
La perception par les parties prenantes (navigants et armateurs au
commerce et à la pêche) de la nature et de la qualité des contrôles exercés
sur eux et leurs navires laisse clairement apparaître que c’est l’aspect
administratif qui, selon eux, est privilégié par les centres de sécurité des
navires et les inspecteurs de la sécurité des navires, au détriment des
vérifications plus concrètes sur la sécurité en action. Les éléments liés à la
qualité, à la fatigue des équipages sont insuffisamment pris en compte.
En outre, la disparition progressive d’anciens navigants dans le
corps des inspecteurs est généralement regrettée en raison de son impact
sur la nature des contrôles devenus trop administratifs, voire pointilleux
dans certains cas.
Enfin certaines parties prenantes interrogées, notamment celles ayant
eu affaire à plusieurs centres de sécurité pour un même dossier ou un même
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navire, ont souligné l’existence d’interprétations différentes de la
réglementation selon les centres.
Le développement d’un dispositif administratif de contrôle sans
véritable stratégie de recrutement au cours des dix dernières années, sans
pilotage effectif et sans doctrine clairement affichée et imposée par
l’administration centrale durant cette même période, explique, en grande
partie, les raisons de ces disparités.
2 -
Le contrôle des équipages
L’action administrative traditionnelle de garantie et protection de la
sécurité dans ce domaine s’exerce à travers la délivrance des brevets aux
marins, le contrôle des décisions d’effectifs soumises par les armateurs et
patrons et le suivi des rôles d’équipage.
a)
La formation et le brevet
Les parties prenantes rencontrées au cours de l’évaluation ont
fréquemment souligné que la qualité des commandants de navire et des
équipages et donc de leur formation et leur expérience constituaient des
facteurs fondamentaux de la sécurité de la navigation. Dans le système
français, le brevet, nécessaire pour naviguer, résulte de la détention, d’une
part, d’un diplôme sanctionnant la bonne acquisition de connaissances, de
compétence
et
de
savoir-faire,
d’autre
part,
d’une
expérience
professionnelle.
Les directions interrégionales de la mer, services déconcentrés de la
direction des affaires maritimes, qui assurent la tutelle des établissements
de formation (lycées professionnels maritimes et autres centres de
formation) sur l’ensemble de la façade maritime sur laquelle s’exerce leur
compétence, délivrent les diplômes. De leur côté, les délégations à la mer et
au littoral, services de contact des usagers au niveau local, enregistrent et
suivent les services et l’activité des marins. Cette organisation, qui a sa
logique, gagnerait toutefois en cohérence et efficacité si les services de
proximité étaient, là aussi, placés sous l’autorité directe des directions
interrégionales de la mer.
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b)
Les effectifs
Pour garantir la sécurité du navire, de l'équipage, de la cargaison et
des biens, ainsi que la protection du milieu marin, le nombre de marins
embarqués doit être suffisant en nombre et en qualité (article 56 du décret
n° 84-810 du 30 août 1984).
Aux termes du décret n° 67-432 du 26 mai 1967 relatif aux effectifs
de sécurité à bord des navires de commerce, de pêche et de plaisance :
« l’effectif de tout navire est fixé par l’armateur s’il n’a pas été déterminé
au préalable par voie d’accord entre les parties intéressées ou leurs
représentants. Il est soumis par l’armateur au visa de l’administrateur des
affaires maritimes
39
(…) qui apprécie sa conformité aux règles relatives à
la sécurité de la navigation et à la durée du travail »
. La direction
départementale des territoires et de la mer peut, afin d'obtenir un éclairage
technique, solliciter l'avis du centre de sécurité des navires ou de
l'inspection du travail, pour leurs domaines de compétences respectifs. Les
entretiens tenus au cours de l’enquête ont fait apparaître que parfois cette
procédure de consultation, organisée de façon systématique, pouvait
prendre un tour très formel et apportant peu de valeur ajoutée sur le plan de
la sécurité. Des saisines plus ciblées sur des cas justifiant réellement
l’expertise du chef de centre seraient plus utiles.
c)
Le rôle d’équipage
Le rôle d'équipage est le titre de navigation délivré par
l'administration des affaires maritimes
40
, dont doit être pourvu tout navire
pratiquant une navigation maritime et dont l'équipage comprend des marins
professionnels affiliés au régime de sécurité sociale des marins,
l’Etablissement national des invalides de la marine (ENIM).
La délivrance du rôle doit être précédée d’un contrôle a priori des
délégations à la mer et au littoral portant sur la vérification de la formation
de l’équipage et de l’effectif (en liaison avec, en amont, le visa sur la
décision d’effectifs de l’armateur). Il doit être aussi jumelé avec la visite
d’aptitude effectuée par le contrôle médical assuré par un médecin
dépendant de l’administration.
39
Aujourd’hui les délégations (DML) sont placées sous l’autorité des directions
départementales des territoires et de la mer (DDTM) et des préfets de département.
40
Là encore, les délégations (DML) et la même chaîne hiérarchique
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3 -
Les inconvénients de la réforme territoriale
Traditionnellement l’action des services intervenant dans les
vérifications préalables à la délivrance de ces deux titres (décision
d’effectifs et rôle d’équipage) s’effectuait en étroite coordination avec les
inspecteurs de la sécurité des navires au sein souvent des mêmes entités et
bâtiments administratifs où étaient également installés les services de santé
des gens de mer : ceux des quartiers des affaires maritimes. Ce système
avait subsisté, malgré la suppression des quartiers, jusque dans la période
récente où les divers services des affaires maritimes restaient regroupés
sous l’autorité des directions départementales des affaires maritimes.
Il n’en demeurait pas moins que, depuis la disparition des quartiers
des
affaires
maritimes,
les
procédures
de
contrôle
avaient
pris
progressivement un tour essentiellement administratif. Une logique de
« guichet », dans laquelle l’action de l’administration, qui se limite à la
réception des déclarations, a peu à peu remplacé la démarche de contact qui
s’établissait entre les agents des affaires maritimes et les équipages à
l’occasion de la délivrance des titres et documents concernant non
seulement l’armement du navire mais aussi les qualifications et expériences
professionnelles des marins et leur santé.
Paradoxalement, cette logique d’examen uniquement sur pièces,
reprise, à la suite des directions départementales des affaires maritimes, par
les délégations à la mer et au littoral et leurs services chargés des activités
maritimes, laisse aujourd’hui aux seuls inspecteurs des centres de sécurité
des navires, chargés de la sécurité du flotteur, l’occasion d’un contact
personnel et d’un possible échange de vive voix avec les équipages à
l’occasion de leurs visites annuelles en vue du renouvellement des permis
de navigation.
Les inconvénients de la séparation et de l’éloignement progressif
des services compétents pour chacune des décisions liées à la sécurité du
navire (permis de navigation d’un côté, décisions d’effectifs, rôle
d’équipage et titres de formation de l’autre) pourraient, toutefois, être
compensés notamment par un bon dispositif informatisé d’échange et de
partage d’informations. Or, le caractère insuffisamment opérationnel du
système de gestion informatisée des navires par l’administration (GINA) et,
d’une
façon
générale,
le
manque
d’interopérabilité
des
systèmes
d’information concernant les navires et les équipages, ne facilitent pas cette
communication. Ainsi, dans la logique purement administrative et
« cloisonnée », qui désormais prévaut de plus en plus dans les relations
avec les usagers/administrés, il n’est pas certain que toutes les autorisations
délivrées par la délégation à la mer et au littoral (rôles d’équipage,
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autorisations d’embarquer) le soient avec un permis de navigation à jour,
notamment pour les navires de pêche de moins de 12 mètres
41
.
En outre, à plusieurs reprises au cours de l’enquête, il a été constaté
que la séparation physique des services, traditionnellement associés dans la
délivrance des titres de sécurité du navire et des documents afférents à
l’équipage, aboutissait progressivement à une perte de mémoire et de
connaissance mutuelle des situations à risque. Cette évolution est
particulièrement préoccupante dans le domaine de la pêche caractérisé, on
l’a vu, par des navires vieillissants et soumis à des risques croissants en
termes de sécurité.
S’agissant du suivi de la santé des gens de mer, il apparaît également
que l’obligation de visite annuelle, à laquelle sont soumis officiers et
marins, ne peut plus être pleinement respectée. Faute de moyens suffisants
du service de santé des gens de mer lui permettant d’effectuer toutes les
vacations nécessaires, cette obligation est souvent suspendue. Il en résulte
notamment que la base de données pour le suivi des visites médicales des
gens de mer « Esculape » n’est pas à jour.
En s’appuyant non seulement sur les témoignages recueillis lors des
entretiens et visites dans les services mais aussi sur les réponses et
commentaires fournis par les parties prenantes (navigants, armateurs au
commerce et patrons de pêche), la Cour a relevé les effets critiquables de la
rupture de l’unité des services des affaires maritimes résultant de la
réorganisation territoriale. Elle note son impact négatif sur les enjeux de
sécurité des navires et des équipages.
En définitive, le risque est grand qu’entre des contrôles des centres
de sécurité des navires sur les flotteurs, parfois jugés trop administratifs et
tatillons par les parties prenantes interrogées – notamment les navigants –
et des vérifications sur les équipages exécutées purement sur pièces par les
délégations à la mer et au littoral, la dimension humaine de la sécurité,
pourtant fondamentale, soit peu à peu délaissée.
A situation organisationnelle inchangée par rapport à la réforme qui
vient d’avoir lieu, la Cour estime que ces effets et cet impact pourraient
déjà être fortement atténués à deux conditions :
-
que les indispensables services de proximité des navigants,
placés aujourd’hui dans les délégations à la mer et au littoral et
délivrant les titres de navigation des navires, aient accès à des
systèmes
d’information
opérationnels
leur
permettant
de
41
Cette situation et ces risques ont notamment été mentionnés pour la façade
méditerranéenne.
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connaître à tout moment la situation exacte du navire au regard
des règles de sécurité, ce qui est loin d’être le cas à l’heure
actuelle ;
-
que les éléments recueillis par les inspecteurs des centres de
sécurité des navires dans leurs
visites périodiques qui
constituent désormais la seule occasion d’un contact effectif
avec les navigants, fassent l’objet d’une exploitation régulière et
méthodique permettant de faire utilement remonter une
information de qualité vers les décideurs au niveau des
directions interrégionales de la mer.
II
-
Un dispositif de contrôle inadapté
Le dispositif actuel est non seulement incapable de répondre aux
nouveaux enjeux créés par le renforcement des obligations imposées par
l’Union européenne mais il souffre d’une mauvaise répartition des moyens
entre les centres de sécurité des navires au regard de leurs charges de
travail respectives.
La réforme, conçue et mise en oeuvre à l’occasion de la transposition
des dispositions du « paquet Erika III » dans la réglementation nationale
pour en alléger les conséquences sur la charge de travail des centres, ne
répond qu’imparfaitement aux besoins de modernisation et de renforcement
de l’efficacité du dispositif. Seule une profonde réorganisation peut lui
redonner sa pertinence et sa capacité à répondre aux vrais enjeux.
A - La permanence du régime d’inspection n’est pas
assurée
L’organisation du travail dans les centres a été conçue sur une
logique administrative de contrôles effectués les jours ouvrés et
correspondant globalement aux contrôles de l’État du pavillon qui,
généralement, peuvent donner lieu à une programmation des visites à
l’avance.
Tel n’est pas le cas pour les inspections de navires étrangers
susceptibles de faire escale, à tout moment, dans les ports français avec un
préavis de 72 heures.
Comme l’a montré le tableau n° 12 du présent rapport concernant le
non-respect des obligations de contrôle au titre de l’État du port entre 2005
et 2010, la France ne respectait déjà pas, dans cette période, les obligations
fixées par le Mémorandum de Paris.
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La cause en était principalement le problème d’organisation du
travail et les inspections non effectuées les week-ends et jours fériés. Sauf
modification des dispositions relatives à ces périodes de congé il était clair,
comme la direction des affaires maritimes le reconnaissait fin 2011, que
l’impact des fins de semaine sur les « manques » devait rester significatif
dans le nouveau régime d’inspection.
Depuis plusieurs années, la direction des affaires maritimes s’était
pourtant préoccupée de trouver une solution à ce problème. Celui-ci
trouvait notamment son origine dans l’armement des centres de sécurité des
navires par un nombre de plus en plus important d’inspecteurs civils et
dans la difficulté à adapter le cycle de travail de ces agents pour traiter d’un
ensemble d’inspections programmables mais restant relativement limités en
nombre au cours de l’année.
Elle avait tenté de le faire par l’instauration en 2009 d’une indemnité
correspondant au montant prévu pour les astreintes de sécurité en précisant
que cette solution était prise dans l’attente de la parution d’un texte créant
une indemnité spécifique destinée à compenser les contraintes imposées par
ces interventions de fins de semaine.
L’évaluation a montré des réalités locales très contrastées et révélé
que globalement ce système ne fonctionnait pas, comme le prouvent les
chiffres d’inspections obligatoires manquées.
Le décret n° 2012-671 du 4 mai 2012 vient d’apporter une première
réponse en instituant une indemnité journalière dont les montants ont été
fixés par arrêté du même jour (200 € le samedi, 250 € le dimanche et les
jours fériés).
Même si cette nouvelle procédure apporte une solution pour le
traitement des escales hors jours ouvrés, il n’en demeure pas moins que le
nouveau régime d’inspection de l’État du port a mis fortement en évidence
la mauvaise répartition des ressources humaines entre les centres de
sécurité des navires.
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Contrôle d’un navire en mer
Crédits photos : © Mer et marine
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B - L’inadéquate distribution des moyens
En s’appuyant sur le seul outil dont dispose la direction des affaires
maritimes, déjà mentionné plus avant et dont une synthèse figure dans le
tableau suivant
42
, et nonobstant toutes les imperfections qui l’affectent, il
est déjà possible de procéder aux quelques constatations suivantes :
-
une très forte sous-dotation du centre de Marseille : effectif réel
de 24 équivalents temps plein comparé à des besoins estimés à
37,3 ETP, sans doute très insuffisamment compensée par
l’activité des 4 unités littorales des affaires maritimes en
dépendant ;
-
une sous-dotation significative des centres de La Rochelle (7
pour 9,4) et de Dunkerque (7 pour 8,3) qui ne bénéficient pas
d’aide de l’unité littorale des affaires maritimes ;
-
les sous-dotations des centres de Sète (9 pour 12,7) et de Caen
(12 pour 13,9) semblent être compensées par les activités des
unités littorales des affaires maritimes 66 et 34 pour Sète et de
l’ULAM 14 pour Caen ;
-
des sur-dotations notables pour les centres de Rouen (7 pour 4,1),
Lorient (11 pour 9,5) et surtout pour Bordeaux (11,4 pour 8,18)
et Le Havre (10 pour 6).
Toutefois ces deux derniers centres ne sont pas dans la même
situation : la sur-dotation de Bordeaux s’accroît quand on remarque qu’il
bénéficie de l’unité littorale des affaires maritimes 64 pour les ports
basques ; celle du Havre doit être relativisée quand on considère que son
effectif comporte plusieurs jeunes inspecteurs sortis récemment d’école, et
que, dès lors, les inspecteurs les plus anciens consacrent une partie de leur
activité à de la formation ou du tutorat.
42
Outil Excel visant à établir à partir de la charge théorique de travail de chaque centre
de sécurité des navires (activités « pavillon » et activité « de contrôle de l’Etat du
port ») le nombre théorique d’inspecteurs dont il devrait disposer et le comparer à ses
effectifs réels.
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Tableau n° 20 : Effectifs théoriques et réels par centre de sécurité des navires
Champ : A chaque type d'activité est affecté un coefficient permettant de calculer les besoins en équivalents temps plein (ETP) par catégorie ; les coefficients
proviennent des
constats effectués sur le passé
- Sources : Direction des affaires maritimes – Réalisation Cour des comptes
Nombr
e de
navires
ETP A
ETP B/C
Nombre
de
navires
ETP A
Nombr
e de
navires
ETP A
ETP B
Nombr
e de
navires
ETP A
Total ETP
A
Total
ETP B/C
Total
ETP A
ETP
B/C
Total
Bordeaux
378
4,1
1,6
0
0,0
30
0,6
0,7
165
1,2
5,9
2,3
8,2
8,0
3,4
11,4
3,2
Boulogne
234
1,3
1,1
2
0,2
13
0,5
0,3
15
0,1
2,0
1,4
3,4
2,0
2,0
4,0
0,6
Brest
718
3,7
2,5
8
0,6
34
0,6
0,8
100
0,8
5,7
3,2
9,0
6,0
2,5
8,5
-0,4
Caen
1045
3,4
4,7
13
1,0
88
1,2
2,0
80
0,6
6,2
6,7
13,9
6,0
6,0
12,0
-1,9
Concarneau
518
3,9
2,8
0
0,0
41
1,7
0,8
20
0,2
5,7
3,5
9,2
6,0
3,0
9,0
-0,2
Dunkerque
137
3,7
0,1
30
2,4
6
0,6
0,1
190
1,4
8,1
0,2
8,3
6,0
1,0
7,0
-1,3
La Rochelle
1567
4,1
3,5
0
0,0
25
0,8
0,5
70
0,5
5,4
4,0
9,4
4,0
3,0
7,0
-2,4
Le Havre
195
2,2
0,4
4
0,3
16
1,2
0,2
210
1,6
5,3
0,6
6,0
9,0
1,0
10,0
4,0
Lorient
1460
3,5
4,2
0
0,0
30
0,9
0,6
50
0,4
4,7
4,8
9,6
7,0
4,0
11,0
1,4
Marseille
2364
22,2
5,6
30
2,4
51
1,7
1,0
320
2,4
28,7
6,6
37,3
18,0
6,0
24,0
-13,3
Rouen
181
1,2
0,5
4
0,3
16
0,9
0,3
130
1,0
3,4
0,8
4,1
6,0
1,0
7,0
2,9
Saint-Malo
664
2,8
3,2
5
0,4
63
1,1
1,4
70
0,5
4,8
4,6
9,4
6,0
4,0
10,0
0,6
Saint-Nazaire
1308
4,1
4,4
0
0,0
40
1,5
0,8
220
1,7
7,3
5,2
13,4
10,0
4,5
14,5
1,1
Sète
1810
3,4
6,3
4
0,3
55
0,8
1,3
95
0,7
5,2
7,5
12,7
6,0
3,0
9,0
-3,7
Fort de France
2856
8,8
12,2
0
0,0
0
0,0
0,0
0
0,0
8,8
12,2
20,9
5,0
5,0
10,0
-10,9
La Réunion
657
1,3
2,6
0
0,0
0
0,0
0,0
0
0,0
1,3
2,6
3,9
4,0
1,0
5,0
1,1
Nouvelle Calédonie
531
4,9
1,1
0
0,0
0
0,0
0,0
0
0,0
4,9
1,1
6,0
2,0
3,0
5,0
-1,0
Polynésie Français
1519
15,4
3,4
0
0,0
0
0,0
0,0
0
0,0
15,4
3,4
18,8
2,0
1,0
3,0
-15,8
Etat du Port
Etat du Pavillon
Toutes activités d'inspection
Ecart
Suivi des navires en
service
Visites conjointes
Mise en service des
navires
Effectifs rééls
Effectifs théoriques
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Au-delà
de
ces
quelques
éléments,
plusieurs
autres
signes
confirment que l’adéquation des ressources humaines à la charge de travail
ou encore des moyens aux besoins des centres de sécurité n’est pas
actuellement satisfaisante.
Il était déjà patent au regard des échanges de ressources organisés de
façon ponctuelle et bilatérale entre chefs de centres de sécurité des navires
que l’allocation des moyens entre les centres ne correspondait plus à la
charge de travail qui leur incombait. En effet, les visites de suivi au titre de
pavillon doivent normalement être effectuées par le centre de rattachement
du navire. Les situations, très contrastées d’un centre à l’autre, relevées
plus haut, concernant la pratique des délégations aux sociétés de
classification, en sont une autre manifestation.
Avec l’entrée en vigueur du nouveau régime d’inspection, les
risques de distorsion s’accroissent comme les réponses des chefs de centres
de sécurité des navires au questionnaire en ligne de la Cour le montrent.
De son côté, la direction des affaires maritimes relevait en novembre
2011 que la diminution du nombre de navires éligibles aux inspections
touchait en particulier les petits et moyens centres. De façon plus détaillée,
elle précisait que les centres en maintien ou hausse d’activités étaient dans
l’ordre : Marseille, Le Havre, Dunkerque, Rouen, La Rochelle ; les centres
les plus touchés par la baisse étant Saint-Nazaire, Caen, Saint-Malo et
Brest.
Les dernières statistiques sur l’évolution de la charge de travail des
centres en matière d’inspection de l’État du port au cours des trois
dernières années le confirment.
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110
COUR DES COMPTES
Tableau n° 21 :
Évolution de la charge de travail des centres
de sécurité des navires en matière d’inspection de l’État du
port (2012)
Centre de sécurité
des navires (CSN)
2009
2010
Nouveau
régime 2011
2012 par
projection à
partir des 6
premiers mois
Bordeaux
200
167
85
78
Boulogne
15
17
6
6
Brest
107
90
52
48
Caen
42
29
25
24
Concarneau
23
10
1
4
Dunkerque
173
153
162
154
La Rochelle
58
78
83
72
Le Havre
179
150
174
202
Lorient
55
61
38
44
Marseille
201
223
235
280
Rouen
145
134
147
118
Saint-Malo
73
90
25
42
Saint-Nazaire
221
223
111
122
Sète
96
95
61
50
Sources : Direction des affaires maritimes.
Certains chefs de centre s’inquiètent aussi de la baisse d’activité
dans les contrôles d’État du port qui risque de faire perdre leur qualification
à leurs inspecteurs. En effet, afin de conserver sa qualification chaque
inspecteur doit réaliser un minimum de 25 inspections par an. Le chef du
centre de Caen indique qu’il collabore avec les centres du Havre et de
Rouen depuis quelques mois afin d’augmenter le nombre d’inspections par
agent (peu de navires à inspecter à Caen et Cherbourg).
La nécessaire transposition des dispositions du « paquet Erika III »
et notamment de celles relatives au nouveau régime d’inspection de l’État
du port dans la réglementation nationale aurait pu offrir l’opportunité d’une
réforme en profondeur du système et surtout d’une réorganisation du réseau
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des centres de sécurité des navires dans le sens d’une meilleure adaptation
aux nouveaux enjeux européens. Une telle occasion n’a pas été saisie.
C -
Une réforme en cours insuffisante
L’évaluation de la Cour s’est, en effet, déroulée alors que
l’administration travaillait à la transposition des textes du paquet « Erika
III » dans la réglementation nationale et parallèlement s’engageait dans une
réforme du dispositif de contrôle rendue nécessaire par le poids des
nouvelles contraintes pesant sur ses moyens.
Comment faire face au surcroît de contrôles et d’obligations réclamé
par la directive 2009/16/C mettant en place le nouveau régime d’inspection
du Mémorandum de Paris et par la prochaine entrée en vigueur de la
convention dite MLC 2006
43
à moyens constants ? Tel était le défi auquel
l’administration française savait qu’elle allait être confrontée depuis
plusieurs années.
La courte étude d’impact afférente à la modification du décret
n° 84-810 du 30 août 1984 se borne à constater que dans le domaine de la
sécurité maritime, le Parlement européen et le Conseil ont adopté, sous
l’impulsion de la présidence française de l’Union européenne, le troisième
paquet sur la sécurité maritime publié le 28 mai 2009 et qu’en conséquence
les obligations qui pèsent sur l’administration maritime française et sur les
acteurs du transport maritime en sont considérablement accrues.
La Cour ne peut que relever, ici encore, la faible anticipation, voire
la négligence, de l’administration française et de ses responsables qui, alors
qu’ils prônaient, dans le cadre de la présidence française de l’Union
européenne, le renforcement des mesures de contrôle inscrites dans le
« paquet Erika III », ne se préoccupaient guère de la réforme de
l’organisation ou des moyens nouveaux qui devenaient nécessaires.
La réforme a simplement consisté à réorganiser les contrôles de
l’État du pavillon en allégeant la charge des centres de sécurité des navires
essentiellement par trois mesures :
-
la délégation, aux sociétés de classification habilitées, de la
délivrance et du renouvellement des titres de sécurité des navires
de charge de plus de 500 UMS effectuant une navigation
internationale à l’exception des titres
International Safety
43
Maritime labour convention (MLC) : convention de l’organisation internationale du
travail de 2006 sur le travail maritime fixant un « socle social » universel.
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112
COUR DES COMPTES
Management
et
International
Ships
and
Port
Facilities
Security
44
;
-
la délégation progressive aux sociétés de classification habilitées
de la délivrance et du renouvellement des certificats de franc-
bord pour les navires de 12 à 24 mètres ;
-
le renvoi à la définition par arrêté des mécanismes de ciblage et
de renouvellement des visites de sécurité pour les navires de
pêche et de charge de moins de 12 mètres.
Absorbée tant par ses activités régaliennes liées à sa participation au
développement des réglementations internationales et à leur transposition
dans le droit national que par la gestion de ses relations avec les armateurs
et les autres acteurs nationaux du monde de la mer, l’administration des
affaires maritimes a trop longtemps négligé le pilotage opérationnel des
centres de sécurité des navires, tant en matière de suivi de leur activité et de
répartition adéquate, quantitative et qualitative, des moyens que de soutien
et d’impulsion à leur donner dans le management de leurs moyens
humains.
Dès lors, le redéploiement des effectifs ou la réorganisation du
réseau et des méthodes de travail, permettant une meilleur adéquation du
dispositif d’ensemble des centres aux charges réels de travail, n’a jamais
constitué une de ses priorités, faute de volontés fortes, politique ou
administrative dans un environnement par ailleurs contraint par les rigidités
du statut de la fonction publique, qui se sont progressivement imposées à
elle avec la nouvelle politique de recrutement suivie à partir du début des
années 2000.
44
Selon des indications fournies par la direction des affaires maritimes fin 2011, la
délégation envisagée qui portait sur 137 navires devait représenter, en tenant compte du
surcroît de travail résultant de l’entrée en vigueur de la convention MLC 2006, un
allégement global évalué à environ 350/jours agents au niveau national du fait d’une
réduction du nombre de visites de 11 à 9 sur cinq ans par navire, soit l’équivalent d’un
peu plus de 2 équivalents temps plein.
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L’exemple britannique
L’agence maritime et de garde-côtes britanniques, responsable du
contrôle de la sécurité des navires a mis en place en avril 2003, sous
forme expérimentale, un dispositif intitulé « système alternatif de
conformité » (
The Alternative compliance scheme
)
Dans cette procédure, les propriétaires, armateurs, concepteurs et
constructeurs de navires sous pavillon britannique peuvent choisir de
faire exécuter tous les contrôles exigés par la réglementation britannique,
à l’exception de ceux requis par le code international de gestion de la
sécurité et à l’époque la convention du travail maritime 178 sur les
conditions de vie et de travail des marins, par les sociétés de
classification reconnues par l’agence. Le choix de cette procédure était
conditionné par des résultats de contrôles subis au titre de l’État du port
jugés satisfaisants et la délivrance d’un certificat établissant que le navire
avait fait l’objet d’une inspection par l’agence également jugée
satisfaisante.
Après analyse des résultats obtenus durant la période expérimentale,
l’agence britannique a conclu que le dispositif ne portait pas atteinte à la
sécurité des navires ayant opté pour cette procédure. Le ministère de
tutelle de l’agence (Ministry of Shipping) a donc décidé en 2010 de le
rendre permanent.
Source : Rapport du national audit office, « The Maritime and Coastguard Agency’s
response to growth in the UK merchant fleet », février 2009
D - Une indispensable réorganisation du dispositif
Pour effectuer cette réorganisation et les redéploiements de moyens
afin de mettre le dispositif de contrôle en adéquation avec les priorités de la
politique
publique,
l’administration
des
affaires
maritimes
doit
entreprendre une double démarche :
-
fixer clairement ses objectifs en matière de contrôle du pavillon
sachant que ses obligations dans le domaine de l’État du port lui
sont désormais imposées par l’Union européenne ;
-
améliorer
rapidement
l’exhaustivité,
la
fiabilité
et
les
performances de son système d’information nationale (GINA) et
développer et mettre en oeuvre les outils de contrôle de gestion
lui permettant de disposer d’une bonne connaissance de
l’activité réelle des centres.
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COUR DES COMPTES
Sur le fondement de cette indispensable démarche préalable,
l’administration des affaires maritimes devrait alors être en mesure de
procéder aux redéploiements de ressources au sein du dispositif existant et,
le cas échéant, à des regroupements de centres en répondant à deux
impératifs de la politique publique de sécurité des navires :
-
un impératif d’efficience et de bon emploi des moyens publics
avec
l’affectation
d’inspecteurs
de
catégorie
B
au
lieu
d’inspecteurs de catégorie A chaque fois que la nature de la flotte
administrée, notamment dans le domaine des plus petits navires
de pêche, justifie la présence de ceux-ci plus que de ceux-là qui
doivent être mobilisés uniquement pour des tâches correspondant
à leur niveau de formation et d’expertise ;
-
un impératif d’efficacité avec un redéploiement et une nouvelle
organisation du dispositif qui doivent viser trois objectifs
stratégiques :
-
assurer la permanence et l’exhaustivité des inspections
de
l’Etat
du
port
conformément
aux
règles
européennes ;
-
contribuer dans le domaine de la pêche à un effort de
diminution sensible des taux d’accidents et des risques
résultant tant de l’insuffisante sécurité des flotteurs que
des comportements des équipages ;
-
réexaminer l’architecture du système de contrôle de la
flotte
de
commerce
nationale,
notamment
celle
pratiquant
la
navigation
internationale,
en
se
rapprochant des modèles britanniques ou d’autres
nations performantes dans le domaine de la sécurité
maritime, qui, tout en déléguant davantage de contrôles
de premier niveau aux sociétés de classification,
privilégient les contrôles et inspections de second
niveau, le cas échéant, inopinés, tant sur les navires de
leur pavillon que sur les sociétés de classification
exerçant des compétences statutaires.
C’est seulement au prix d’un tel effort de rationalisation et de
modernisation que l’administration peut redonner cohérence et pertinence
au dispositif national de contrôle de la sécurité des navires.
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__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Le dispositif français de contrôle de la sécurité des navires, conçu à
l’origine pour les contrôles de l’État du pavillon et armé principalement
par d’anciens navigants, s’est développé en dix ans, en réponse à l’urgence
résultant des sinistres Erika et Prestige, sans anticipation ni ligne
directrice. Il souffre aujourd’hui d’une situation relativement figée et
difficile en termes de gestion des ressources humaines dans laquelle sont
associés des personnels à statuts différents pourtant
appelés à l’exercice
de missions similaires, au sein d’un même ensemble.
L’absence
de
stratégie
et
plus
encore
l’incapacité
de
l’administration centrale à mettre en place et imposer
un système de
pilotage efficace, reposant sur une doctrine unique pour tous les centres et
une remontée d’informations fiables à l’aide d’un système exhaustif et
performant, portent atteinte à l’unité de traitement des usagers-contrôlés
devant le service public. Elle entrave aussi
son aptitude à gérer
efficacement les redéploiements que l’évolution de la quantité et de la
nature des
charges de travail d’un centre à l’autre rend aujourd’hui
nécessaire.
La récente réorganisation territoriale des services de l’État, en
séparant des services traditionnellement placés dans la même chaîne
hiérarchique et oeuvrant de façon proche et complémentaire
à la sécurité
des navires et des équipages, porte également atteinte à l’unité et à
l’efficacité du système.
Même si le caractère sommaire et imparfait du seul outil dont
dispose la direction des affaires maritimes pour mesurer l’adéquation des
moyens des centres à leur charge réelle de travail ne permet pas de porter
un jugement complet dans ce domaine, les indications fournies par cet
instrument et les données et témoignages
recueillis au cours de l’enquête
permettent de conclure à la mauvaise allocation des effectifs au sein du
réseau : certains centres étant manifestement en sous-effectifs pour remplir
correctement leurs missions, d’autres en sureffectifs. De même l’actuelle
répartition des effectifs d’inspecteurs en agents de catégorie A et B n’est
pas adaptée à la nature des flottes administrées par certains centres.
La réforme en cours pour alléger les contrôles de l’État du pavillon,
insuffisamment pensée et étayée, comme la sommaire étude d’impact le
prouve, n’est pas à la hauteur des enjeux. Un choix du type de celui mis en
oeuvre par l’administration britannique pour alléger ses contrôles tout en
maintenant un droit d’inspection de second niveau sur les délégations
consenties, aurait sans doute été plus judicieux au regard des enjeux et des
priorités.
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COUR DES COMPTES
En conséquence, la Cour recommande de :
3.
définir pour les 10 ans à venir une politique de ressources
humaines cohérente avec les objectifs stratégiques de la politique
de sécurité des navires en :
-
homogénéisant les statuts et modalités de gestion des inspecteurs
de la sécurité des navires et de la prévention des risques
professionnels maritimes ;
-
supprimant la mission de contrôle de la sécurité des navires dans
les délégations à la mer et au littoral/unités littorales des affaires
maritimes pour ne la confier qu’aux seuls centres de sécurité des
navires à renforcer en agents de catégorie B correspondant
mieux à la nature de leurs missions sur une grande partie de la
flotte de pêche ;
4.
améliorer et fiabiliser les bases de données et systèmes
d’information gérés par l’administration des affaires maritimes
pour renforcer la qualité et l’efficacité des contrôles en :
-
imposant l’enregistrement des données en mode complet dans
GINA dans tous les centres puis en développant de nouvelles
fonctionnalités permettant le suivi régulier de l’activité de
contrôle du pavillon ;
-
développant l’interopérabilité entre les systèmes existants (suivi
des navires, des marins, des évènements de mer et des
inspections de l’État du port sur les navires français).
5.
renforcer le rôle moteur des directions interrégionales de la mer
dans la nouvelle organisation administrative relative à la
sécurité maritime en :
-
les dotant de contrats d’objectifs et de lettres de mission
formulant des objectifs et des indicateurs de performance
cohérents avec ceux définis au niveau national ;
-
veillant à ce que chacune d’entre elles soit dotée d’un projet de
service définissant des stratégies de zone dans leurs missions de
contrôle de la sécurité applicable tant aux centres de sécurité des
navires qu’aux délégations à la mer et au littoral de leur
ressort ;
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-
incitant les délégations, services départementaux de proximité, à
effectuer des visites sur place et à développer des actions de
contact auprès des armateurs et marins à l’occasion des
procédures de visa des décisions d’effectifs et de contrôle et suivi
des rôles d’équipage ;
6.
procéder à la réorganisation du réseau des centres et aux
réallocations de moyens permettant une meilleure adéquation du
dispositif aux charges réelles et priorités résultant des enjeux
européens (Etat du port) et nationaux (secteur de la pêche) en :
-
dotant la direction des affaires maritimes et les directions
interrégionales de la mer d’un outil permettant le recueil
d’informations précises sur leur activité par nature de missions ;
-
mettant en place un système de « reporting » centralisé
alimentant un système de contrôle de gestion moderne et
performant.
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Conclusion générale
Partie du constat que les résultats obtenus par le système national de
contrôle de la sécurité des navires,
que ceux-ci battent pavillon national ou
qu’ils naviguent sous pavillons étrangers et fréquentent les eaux
territoriales et les ports français, ne sont pas à la hauteur des enjeux actuels,
la Cour parvient, au terme de son évaluation, à la conclusion que le
dispositif existant n’est plus adapté aux priorités de la sécurité maritime de
la France.
Les performances insuffisantes du dispositif mettent en cause la
pertinence de son organisation.
Les risques d’accidents, que courent les marins-pêcheurs français du
fait, tant des conditions actuelles de transformation ou de construction des
navires et de leur exploitation, que des comportements à la mer ou les
risques environnementaux, qui pèsent sur nos côtes lorsque sont mal
remplies
nos obligations européennes d’Etat du port, ne sont pas
suffisamment pris en compte par ce dispositif.
Conçu dans un contexte de crise et dans l’urgence des mesures à
prendre pour satisfaire l’opinion publique et la représentation nationale, à
juste titre « choquées » par les conséquences de graves sinistres maritimes
sur notre environnement côtier, le réseau d’inspections et de contrôles s’est
développé, depuis plus d’une décennie,
sans stratégie ni ligne directrice
anticipant l’avenir. Il est, dès lors aujourd’hui figé, tant dans ses
implantations géographiques que dans les perspectives d’avenir offertes à
ses plus jeunes agents civils.
La faiblesse, pour ne pas dire l’absence de tout pilotage des centres
de sécurité des navires par l’administration centrale et ses services
déconcentrés, se traduisent aussi par l’impossibilité de connaître avec
précision les données et statistiques indispensables pour connaître les
flottes administrées, mesurer ses véritables performances et apprécier
l’adéquation de ses moyens à ses missions.
Dans un contexte de grandes tensions budgétaires c’est à une
profonde réforme et réorganisation du système, à moyens constants,
qu’appelle la Cour.
Elle doit
s’inspirer des réalisations de pays maritimes étrangers
comparables qui ont réussi à alléger et réorienter leurs dispositifs
de
contrôles sur leur pavillon national, sans dégrader la qualité de leur flotte
notamment celle naviguant à l’international, souvent en croissance
comparée à celle de la France. Elle doit, en revanche, chercher à concevoir
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COUR DES COMPTES
un dispositif littoral permettant de mieux cibler et traiter les secteurs à
risques et les enjeux financiers et humains prioritaires.
C’est à la réalisation de cet objectif pour les cinq ans à venir que la
Cour invite l’administration des affaires maritimes et les pouvoirs publics à
s’atteler dès maintenant.
Pour permettre de lancer et conduire cette réforme dans de bonnes
conditions le Cour récapitule, ci-après, les
recommandations formulées
dans le corps du rapport, dont la plupart sont susceptibles d’être mises en
oeuvre dans un délai rapproché.
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Récapitulatif des recommandations
1.
améliorer le pilotage stratégique de la politique de sécurité des
navires sous pavillon français en :
-
mettant à jour la base de données d’immatriculation des navires
(NAVPRO) pour disposer d’une source statistique unique et
fiable rendant compte avec précision de la réalité des flottes de
commerce et de pêche ;
-
rassemblant dans un document unique les données concernant la
sécurité et les accidents dans le secteur de la pêche ;
-
fixant quelques objectifs et indicateurs à afficher dans le
programme 205 de la loi de finances et dans un plan stratégique
pluriannuel et des rapports d’activité de la direction des affaires
maritimes permettant de définir et suivre une politique
d’amélioration de la performance dans ce secteur (baisse des
accidents dans le secteur de la pêche).
2.
fixer dans le programme de la loi de finances traitant de
la
sécurité et la sûreté maritime un (ou des) objectif(s) et
indicateur(s)
pertinent(s)
permettant de rendre compte des
résultats et performances de notre système de contrôle des
navires étrangers dans le cadre de nos obligations européennes au
titre de l’État du port.
3.
définir pour les 10 ans à venir une politique de ressources
humaines cohérente avec les objectifs stratégiques de la politique
de sécurité des navires en :
-
homogénéisant les statuts et modalités de gestion des inspecteurs
de la sécurité des navires et de la prévention des risques
professionnels maritimes ;
-
supprimant la mission de contrôle de la sécurité des navires dans
les délégations à la mer et au littoral (DML)/ULAM pour ne la
confier qu’aux seuls centres de sécurité des navires à renforcer en
agents de catégorie B correspondant mieux à la nature de leurs
missions sur une grande partie de la flotte de pêche.
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122
COUR DES COMPTES
4.
améliorer et fiabiliser les bases de données et systèmes
d’information gérés par l’administration des affaires maritimes
pour renforcer la qualité et l’efficacité des contrôles en :
-
imposant l’enregistrement des données en mode complet dans
GINA dans tous les centres puis en développant de nouvelles
fonctionnalités permettant le suivi régulier de l’activité de
contrôle du pavillon ;
-
développant l’interopérabilité entre les systèmes existants (suivi
des navires, des marins, des évènements de mer et des
inspections de l’État du port sur les navires français) ;
5.
renforcer le rôle moteur des directions interrégionales de la mer
dans la nouvelle organisation administrative relative à la sécurité
maritime en :
-
les dotant de contrats d’objectifs et de lettres de mission
formulant des objectifs et des indicateurs de performance
cohérents avec ceux définis au niveau national ;
-
veillant à ce que chacune d’entre elles soit dotée d’un projet de
service définissant des stratégies de zone dans leurs missions de
contrôle de la sécurité applicable tant aux centres de sécurité
qu’aux délégations à la mer et au littoral de leur ressort ;
-
incitant les délégations, services départementaux de proximité, à
effectuer des visites sur place et à développer des actions de
contact auprès des armateurs et marins à l’occasion des
procédures de visa des décisions d’effectifs et de contrôle et suivi
des rôles d’équipage.
6.
procéder à la réorganisation du réseau des centres et aux
réallocations de moyens permettant une meilleure adéquation du
dispositif aux charges réelles et priorités résultant des enjeux
européens (État du port) et nationaux (secteur de la pêche) en :
-
dotant la direction des affaires maritimes et les directions
interrégionales de la mer d’un outil permettant le recueil
d’informations précises sur leur activité par nature de missions ;
-
mettant en place un système de « reporting » centralisé
alimentant un système de contrôle de gestion moderne et
performant.
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Annexes
Annexe 1 :
Méthodologie
Annexe 2 :
Comparaisons internationales
Annexe 3 :
Listes des personnes rencontrées
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ANNEXES
125
Annexe n° 1 : méthodologie
Cette annexe présente les principales méthodes utilisées pour
recueillir et analyser les informations pour cette évaluation.
Le domaine de l’évaluation recouvrait la sécurité du navire et la
protection de l’environnement. Les autres aspects de la sécurité maritime
et notamment la sécurité de la navigation et la sûreté n’ont été examinés
que dans la mesure où existaient des liens entre eux et la sécurité du
navire. En outre le champ de l’enquête s’est limité à la sécurité des
navires de la flotte de commerce et de la flotte de pêche. Les
problématiques de sécurité de la flotte de plaisance, ne rentre pas dans le
champ de l’étude.
I
-
Présentation d’ensemble des méthodes
utilisées
L’enquête proprement dite a été ouverte et conduite à l’égard de
l’administration selon les procédures utilisées traditionnellement dans les
examens de la gestion d’entités ou de services publics par la Cour des
comptes. Elle a été notifiée à la direction générale des infrastructures, des
transports et de la mer (DGITM), à l’inspection générale des affaires
maritimes, au bureau enquêtes accidents mer (BEA mer) et au secrétaire
général de la mer. Le travail d’enquête proprement dit a été précédé de :
-
la
constitution
d’un
groupe
référent
consulté
sur
les
problématiques envisagées puis sur les principales conclusions
et recommandations d’un avant-projet de rapport ;
-
la rédaction d’une note de problématique et de méthode validée
par la Cour, après consultation du groupe susmentionné.
L’enquête a eu recours à des instruments classiques d’investigation
(questionnaires et entretiens) mais aussi à des outils utilisés dans une
démarche évaluative pour recueillir l’opinion de parties prenantes
(répétition d’entretiens structurés ou semis structurés, questionnaires
informatiques en ligne, réunions de groupes témoins) comprenant :
-
des questionnaires principalement à l’administration centrale
des affaires maritimes pour recueillir des informations
générales puis plus précises sur les différents aspects de la
sécurité des navires et des systèmes de contrôle ;
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COUR DES COMPTES
-
des entretiens avec divers responsables administratifs au sein de
la direction des affaires maritimes, l’inspection des affaires
maritimes, le bureau enquêtes accidents/mer (BEAmer), la sous-
direction des ports ; ces entretiens ont été précédés ou suivis de
questionnaires à ces administrations ;
-
des
entretiens
semi-structurés
avec
les
quatre
directeurs
interrégionaux de la mer, cinq chefs de centre de la sécurité des
navires, une cinquantaine d’inspecteurs de la sécurité des
navires ; ces entretiens ont été précédés de demandes de
d’information et de données afin de préparer les visites effectuées
auprès de ces administrations en province ;
-
des ouvrages, articles et document divers portant sur la sécurité
des navires ;
-
une analyse des sources et systèmes d’information (statistiques,
bases de données, données règlementaires et documentaires)
détenus par les parties prenantes intervenant dans le suivi de la
sécurité des navires ;
-
trois questionnaires électroniques en ligne, sur des sites dédiés
destinées à recueillir, par la voie de sondages, les avis de trois
groupes d’acteurs : les 16 chefs des centres de la sécurité des
navires, l’ensemble des inspecteurs de la sécurité des navires des
cinq centres de sécurité des navires formant l’échantillon, une
population de 200 commandants de navires adhérents de
l’association française des capitaines de navire (AFCAN) ;
-
une trentaine d’entretiens individuels avec diverses parties
prenantes
publiques
et
privées
du
secteur
maritime :
constructeurs, armateurs, sociétés de classification, assureurs,
organisations professionnelles ;
-
des déplacements pour rencontrer les parties prenantes publiques
internationales : commission européenne, représentation de la
France auprès de l’Union européenne (Bruxelles), agence
européenne de sécurité maritime (Lisbonne), organisation
maritime internationale et représentation de la France auprès de
l’organisation maritime internationale (Londres).
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ANNEXES
127
Type de partie
prenante
Acteur
Rôle
Autorités
publiques
Ministère de l'écologie,
du développement
durable, des transports
et du logement
(MEDDTL)
Transpose
la
réglementation
internationale
et
détermine
la
règlementation
au
niveau
national
Participe à la représentation de la
France
dans
les
organisations
internationales
compétentes
en
la
matière.
Direction des affaires
maritimes
Assure
au
sein
du
ministère
les
responsabilités
susmentionnées
concernant contrôle de la sécurité des
navires, dirige le dispositif d’ensemble
déconcentré (Direction interrégionale
de la mer, DIRM, et Centres de sécurité
des
navires,
CSN)
ou
le
pilote
(Délégation à la mer et au littoral,
DML)
Organisation maritime
internationale (OMI)
Joue un rôle règlementaire et normatif
au
travers
de
conventions
internationales et autres instruments tels
codes, résolutions et recommandations
Commission
européenne
Exerce
la
compétence
en
matière
maritime
détenue
par
l’Union
européenne
depuis
le
traité
de
Maastricht
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Type de partie
prenante
Acteur
Rôle
Opérateurs
Secrétariat du
Mémorandum de Paris
Gère le dispositif mis en place en 1982
associant les États de l’Union européenne
concernés par la sécurité maritime, le
Canada et la Russie.
Agence européenne de
sécurité maritime
Assiste la Commission et les États en
matière de sécurité maritime. Veille à
l'application de la règlementation, gère et
pilote le dispositif de contrôle d’États du
port
avec
notamment
le
système
d’information Thetis
Centres de sécurité des
navires
Contrôlent et inspectent les navires
Unités littorales des
affaires maritimes
Ont vocation à contrôler la sécurité des
petits
navires
de
leur
ressort
par
convention
avec
les
Directions
interrégionales de la mer/Centres de
sécurité des navires compétents
Sociétés de
classification
Sociétés privées assurant la classification
des navires et dans certains cas, leur
certification par délégation des Etats
Inspection générale des
affaires maritimes
Effectue
les
audits
des
services
déconcentrés et des centres de sécurité
des navires
Bureau enquête
accidents/mer
Réalise les enquêtes techniques sur les
évènements en mer et en assure le retour
d'expérience
Autorités portuaires
Sont responsables de la gestion du suivi
et de la police des activités des ports
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129
Publics cibles
Armateurs
Fournissent les moyens matériels
et humains pour la navigation et
en déterminent les conditions
d'exploitation
Chantiers navals
Conçoivent et construisent les
navires
Bénéficiaires
finaux
Navigants
Assurent la conduite des navires
et sont directement concernés par
les conditions de sécurité
Affréteurs
Louent le navire à un armateur
pour transporter une cargaison ou
des passagers
Chargeurs
Propriétaires de la marchandise
Assureurs
Assurent le navire et sa cargaison
Tiers gagnants
Gens de mer
Zones littorales
(résidents, usagers,
etc.)
Économie nationale
(entreprises, salariés,
contribuables, etc.)
Associations de
défense de
l’environnement et de
la biodiversité
Tiers perdants
Armateurs de navires
bannis ou détenus
États dont le pavillon
est déclassé
Source : Cour des comptes
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COUR DES COMPTES
II
-
Présentation détaillée de certaines
méthodes utilisées
A - La note de problématique
Plus qu’à justifier l’intérêt et de le champ de l’enquête déjà
programmé et défini dans son principe et son périmètre large (le contrôle
de la sécurité des navires), elle a servi à rechercher et préciser au sein de
ce domaine, à partir de premiers entretiens, lectures et hypothèses, les
principaux enjeux et les questions auxquelles celle-ci se proposerait de
répondre. Elle a décrit parallèlement les critères d’analyse et les outils
d’investigation et d’évaluation à mettre en oeuvre pour apporter les
réponses. Elle a aussi déterminé le plan de travail et les étapes de la
démarche jusqu’à la rédaction du rapport.
Les investigations préliminaires ont en effet permis d’identifier
trois grandes problématiques s’agissant de :
-
la stratégie et des orientations de la politique de sécurité des
navires conduite par l’administration française ;
-
la gestion des compétences qu’elle détient et des moyens qu’elle
met en oeuvre au profit de cette politique ;
-
enfin, celle fondamentale des relations entre acteurs publics et
privés concourant à la politique, notamment grâce à la circulation
et au partage de l’information en faveur de la qualité et de
l’efficacité des contrôles et donc de l’amélioration de la sécurité
dans son ensemble.
B - Le groupe de référence
Pour la démarche qualité, à laquelle l’équipe a souhaité
s’astreindre,
en
application
des
bonnes
pratiques
généralement
recommandées dans ce domaine et la plupart du temps en usage dans des
institutions homologues étrangères, la note de problématique et de
méthodes a été soumise par les rapporteurs à un groupe de référence dont
les réactions et suggestions ont été entendues au cours d’une séance de
travail avant le délibéré de la chambre et qui ont contribué à l’éclairer.
Le groupe était composé de 4 personnes choisies en fonction de
leur compétence professionnelle et/ou de leur notoriété et de leur intérêt
pour le sujet :
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131
-
M. Edouard
Berlet, ancien vice-président
- relations
institutionnelles - d’une compagnie maritime, consultant ;
-
M. Jean-Pierre Beurier, professeur émérite à l’université de
Nantes ;
-
M. Gérard Le Houx, ingénieur général des ponts, eaux et
forêts,
membre
permanent
du
conseil
général
de
l’environnement et du développement durable (CEGDD),
section : risques, sécurité, sureté ;
-
M. Frédéric Moncany de Saint Aignan, président de la
fédération française des syndicats de pilotes maritimes.
Ce groupe a été à nouveau réuni à la fin du travail d’évaluation de
l’équipe pour donner son opinion et ses observations sur les conclusions
et recommandations envisagées dans un avant-projet projet de rapport.
Celui-ci, le cas échéant amendé ou complété pour tenir compte des
réactions du groupe référent, a été ensuite soumis à la collégialité de la
chambre conformément aux procédures de droit commun des examens de
gestion en vigueur à la Cour.
C - Travaux similaires d’une Institution supérieure de
contrôle des comptes publics homologue
Une attention particulière a été portée aux travaux menés par
l’institution britannique homologue de la Cour des comptes, le
National
Audit Office
, et notamment à la méthodologie employée pour la
réalisation de deux études (dite de «
Value for money
») portant sur le
même domaine et abordant les mêmes problématiques liées à l’évaluation
de l’efficience, de l’efficacité et de la performance d’un dispositif public :
«
Ship Survey and Inspections – 2001
» et «
The Maritime and
Coastguard Agency's Response to growth in the UK Merchant Fleet –
2009
». À deux reprises, des entretiens et des échanges ont eu lieu avec
les équipes d’auditeurs britanniques ayant conduit ces enquêtes.
Les réflexions et travaux méthodologiques menés en interne à la
Cour des comptes ont permis d’exploiter les acquis dans ce domaine. Les
documents fournis à l’appui des séminaires sur l’évaluation ont fourni des
éléments techniques précieux.
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D - Les entretiens semi-structurés avec les responsables
de la sécurité des navires
Des entretiens semi-structurés ont été menés avec les divers
responsables
de
l’administration
centrale,
les
responsables
des
administrations interrégionales, les chefs et inspecteurs des centres de
sécurité des navires visités mais aussi des acteurs locaux, tels les
capitaines de port et les responsables des stations de pilotage maritime.
Les entretiens semi-structurés sont une forme d'entretien guidé dans
lequel seul un canevas général de thèmes est préparé à l'avance et où des
questions plus précises sont soulevées ou naissent au cours de l'entretien.
Les personnes qui conduisent l'entretien utilisent les thèmes et rubriques
de la liste établie préalablement comme un guide flexible plutôt qu'un
questionnaire formel. Des guides d’entretiens ont été préparés pour
chaque catégorie d’acteurs susmentionnés.
E - Groupes témoins
Deux groupes témoins ont été constitués pour faire débattre deux
catégories d’acteurs
sur le thème de la sécurité des navires et des
contrôles de l’administration et des sociétés de classification : les
représentants des armateurs et des patrons de pêche.
Le
premier
groupe,
formé
avec
l’aide
de
l’organisation
professionnelle Armateurs de France, était composé des directeurs
techniques des plus importants armements français acteurs jouant un rôle
central dans la mise en oeuvre des mesures de sécurité au sein de leurs
compagnies
Le second groupe, constitué en partenariat avec le comité national
des pêches, comprenait des représentants régionaux de cette organisation,
et a notamment débattu des difficultés particulières rencontrées par cette
profession et du taux d’accidentologie auquel elle est confrontée.
F - Questionnaires en ligne
L’opinion des contrôleurs (chefs de centre de sécurité des navires
et inspecteurs), d’une part, des navigants (commandants de navires),
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ANNEXES
133
d’autre part, sur la nature et la qualité des contrôles et d’une façon
générale leur appréciation sur la performance du dispositif public ont été
recueillies au moyen de questionnaires électroniques en ligne. Grâce à
cette technique, une population plus large que celle rencontrée lors des
cinq visites de terrain a pu être atteinte. Les réponses, enregistrées sur des
espaces dédiés d’un site web spécifique à chaque catégorie d’acteurs
questionnés, ont fourni la matière d’analyses quantitatives et qualitatives
puis des synthèses insérées dans le rapport.
Les taux de réponse des chefs de centre et des inspecteurs se sont
élevés à 100 % ce qui était l’objectif au regard de leurs statuts d’agents
publics.
La population des capitaines de navires a été contactée par
l’intermédiaire de leurs associations professionnelles (AFCAN et
ACOMM). Dans le cas de l’Association française des capitaines de
navires, le taux de réponse de 10 % pour une population de 200 personnes
questionnées peut être considéré comme significatif ; dans le cas de
l’Association des capitaines et officiers de la marine marchande, le
nombre de réponses est demeuré très insuffisant et n’a pas permis
d’exploitation pour le rapport.
G - Déplacements et visites
En préalable à l’élaboration de la note de problématique, deux
jours de visite de découverte et de prise de connaissance du
fonctionnement d’un centre incluant la participation à une inspection
« État du port » sur un porte-conteneur russe et la présentation des
grandes lignes d’un contrôle « État du pavillon » sur un navire ferry
transmanche ont eu lieu au centre de sécurité des navires du Havre. La
visite a comporté des entretiens avec le chef de centre et le directeur
adjoint de la direction interrégionale des affaires maritimes locale portant
sur les missions et l’activité du centre.
Pour mener à bien le travail de terrain, un échantillon de 5 ports
français a été sélectionné après consultation de la direction des affaires
maritimes (Outre Le Havre, il s’est agi des visites de Marseille,
Bordeaux, Boulogne, Saint-Nazaire et Lorient)
Les critères de choix étaient fondés sur une répartition des visites
entre des centres de sécurité des navires de taille différente, des activités
portuaires et des natures de contrôles variées (flotte commerciale et de
pêche). La couverture équilibrée du littoral métropolitain et la possibilité
d’associer dans un même déplacement des entretiens à la Direction
interrégionale de la mer locale et la visite d’un centre
ont également pesé
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COUR DES COMPTES
dans les choix. Les visites se sont échelonnées entre le début du mois de
mai et la fin du mois de juin 2011. Leur durée était de 2 à 3 jours.
S'apparentant à des études de cas, ces visites ont permis de
recueillir des données quantitatives et qualitatives sur l'organisation locale
du dispositif de contrôle (données sur l'activité, organisation du travail,
gestion des missions), de rencontrer des acteurs locaux du domaine
maritime (ports, pilotes maritimes, représentants des acteurs de la pêche,
etc.), et d’avoir des entretiens avec les acteurs publics du contrôle de la
sécurité
des
navires :
centre
de
sécurité
des
navires,
direction
interrégionale de la mer, unités littorales des affaires maritimes, direction
départementale des territoires et de la mer. Ces visites ont été
accompagnées d'une demande préalable d'envoi et de mise à disposition
de certains documents concernant l'organisation et l'activité des centres de
sécurité des navires.
L'équipe de rapporteurs a pu accompagner des inspecteurs dans
leurs visites d’inspection sur différents types de navires (commerce,
pêche et passages) afin d’évaluer les enjeux et les difficultés des
différents types de contrôle.
H - Comparaisons internationales
Une étude comparative sur le contrôle de la sécurité des navires a
été menée dans 9 pays : Grande-Bretagne, Pays-Bas, Norvège, Espagne,
Italie, Grèce, États-Unis, Canada et Japon. Cette étude a été conçue avec
l’aide de la Direction des affaires maritimes et de l’Inspection générale
des affaires maritimes, commandée à la direction générale du Trésor et
effectuée par son réseau des services économiques à l’étranger.
I - Analyse statistique
Les bases de données statistiques disponibles ont été exploitées
afin d’étayer les différents constats. Ces bases sont gérées par
l’administration française, par des institutions internationales mais aussi
par des opérateurs privés pour le compte ou non des États du pavillon.
J - Analyse des systèmes d’information
Les différents systèmes d’information ont été examinés. Plusieurs
contrôles et tests ont été menés à partir des données entrées en amont et
exploitées en aval afin d’apprécier l’exhaustivité, la qualité des données
et les interventions des agents sur ces données.
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ANNEXES
135
Annexe n° 2 : comparaisons internationales
Quelques exemples de dispositifs de contrôle de la sécurité des
navires existant dans des pays de l’OCDE : organisation du système et
statut des agents de contrôle (source : Étude comparative internationale
sur le contrôle de la sécurité des navires dans dix États occidentaux,
réalisée par le réseau d’expertise et de veille internationale de la direction
générale du Trésor, la DGT, pour l’évaluation de la Cour).
Pour
faciliter
l’analyse
des
données
internationales
ainsi
recueillies, sont rappelés ici quelques ordres de grandeur concernant la
taille de la flotte française : une flotte de pêche métropolitaine d’environ
5 000 navires (hors conchyliculture et petite pèche)
45
et un ensemble de 5
400 navires de commerce (passagers et charge) sous pavillon français
comprenant 209 navires de plus de 100 UMS
de jauge brute dont 94
inscrits au RIF
46
. En outre, on estime à un peu de 6 000 le nombre
d’escales de navires de commerce sous pavillon étranger dans les ports
français métropolitains.
I
-
Allemagne
L’Allemagne présente un registre d’immatriculation de 571 navires
de commerce en 2010 et d’environ 1 700 navires de pêche. 3 034 navires
étrangers ont fait escale dans des ports du pays en 2010.
L’État fédéral est responsable de la sécurité des navires et dispose
d’un service dédié (SEE-BG) dont le siège est à Hambourg. Il dispose
d’équipes également basées à Duisburg (port fluvial) et Rostock pour
mener les actions de contrôle. Cette structure est placée sous la tutelle
conjointe des ministères fédéraux des transports et du travail et des
affaires sociales. Ses salariés sont des civils régis par le droit public. Des
missions de contrôle et d’inspection peuvent être déléguées aux sociétés
de classification habilitées.
45
Source INSEE
46
Source direction générale de infrastructures, du transport et de la mer /direction des
affaires maritimes / mission de la flotte de commerce « Flotte de commerce sous
pavillon français », juillet 2011
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COUR DES COMPTES
Les Länder sont responsables de la sûreté dans les ports et exercent
cette mission avec une police spécialisée dépendant des ministères de
l’Intérieur (Wasserschutz Polizei)
II
-
Canada
Un registre de 2 629 navires de commerce et 22 362 navires de
pêche en 2010
La loi de 2001 sur la marine marchande du Canada est le texte de
référence
qui
a
incorporé
notamment
toutes
les
conventions
internationales ratifiées par le pays.
Le système repose sur un service central « Transports Canada »
(TC) qui détermine les principaux éléments de la politique générale et
cinq administrations régionales autonomes fixant leurs priorités dans le
cadre de la politique générale. Dans certaines régions, les bureaux
regroupant les inspecteurs peuvent être spécialisés sur certaines missions.
Tous les inspecteurs de la sécurité maritime, au nombre de 400,
sont des civils et se répartissent en trois profils professionnels :
capitaines, ingénieurs et architecte navals.
TC met en oeuvre un large système de délégation à 5 sociétés de
classification reconnues.
III
-
Espagne
Un registre de 488 navires de commerce (supérieur à 100 UMS) en
2010. 6 477 escales de navires étrangers en 2009.
La direction générale de la marine marchande et sa sous-direction
de la sécurité maritime au sein du ministère des transports exerce la
compétence au niveau central. Les tâches de contrôle et d’inspection sont
déléguées aux capitaineries maritimes. On compte 30 capitaineries
couvrant l’ensemble du littoral espagnol.
Les inspecteurs se répartissent dans 4 spécialités : inspecteurs
navals, maritimes nautiques, machines et radioélectriques.
La délégation aux sociétés de classification est pratiquée pour tous
les navires naviguant à l’étranger et ne touchant pas les ports espagnols.
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ANNEXES
137
IV
-
Grèce
Un registre de 2 096 navires de commerce (supérieur à 100
tonneaux de jauge brute) en 2010 et de plus de 6 000 navires de pêche.
4 373 escales de navires étrangers en 2010.
Les navires sont examinés et visités par des officiers du corps des
garde-côtes à statut militaire placés sous l’autorité de la direction de la
sécurité des navires et des ports du ministère de la protection du citoyen.
Ce corps, dont les agents sont présents dans tous les ports, est en charge
de la sécurité des navires avec l’inspection des navires commerciaux et
des compagnies, mais aussi de l’assistance aux transports maritimes, de la
supervision de l’organisation et des activités opérationnelles des ports.
Il est habilité pour l’ensemble des actions de prévention, de
contrôle et de sanction. Onze sociétés de classification sont autorisées à
délivrées les certificats de franc-bord.
V
-
Italie
L’Italie présente un registre de 1 490 navires de commerce (tenu
par « Registro Italiano Navale » - (Rina) et de 13 585 navires de pêche en
2009.
La définition, la mise en oeuvre et la coordination des mesures de
sécurité relèvent du commandement général du corps des capitaineries de
port. Ce corps, à statut militaire, détient des compétences générales en
matière de sécurité de la navigation exercées par des garde-côtes (14
directions maritimes et 53 capitaineries de port).
Il existe une large délégation aux sociétés de classification.
VI
-
Pays-Bas
1 317 navires de commerce et 404 navires de pêche sont inscrits au
1er registre.
La
loi
sur
le
transport
maritime
(Schepenwet)
consiste
essentiellement en la transposition des conventions internationales et des
codes, résolutions et circulaires de l’OMI l’accompagnant et des
réglementations de l’Union européenne. Le gouvernement néerlandais
s’est attaché ces dernières années à simplifier l’arsenal réglementaire
national pour l’aligner de plus en plus sur les règles internationales et
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COUR DES COMPTES
européennes. C’est ainsi qu’en 2005 un décret sur les navires a supprimé
l’essentiel des règles nationales qui se surajoutaient aux exigences
européennes et internationales.
La sécurité des navires est contrôlée par l’IVW, service
administratif indépendant sous la tutelle du ministère des transports. Il
dispose de 27 inspecteurs pour les contrôles « État du pavillon » et « État
du port ». Ils ont réalisé 1735 inspections « État du port », 200 contrôles
« État du pavillon » et 385 inspections pour le transport de matières
dangereuses en 2010. Les contrôles seront de plus en plus planifiés en
fonction d’une analyse de risque, tenant compte notamment des résultats
des contrôles de l’État du port réalisés à l’étranger et de thématiques
annuelles. Les thèmes pour 2010 étaient : les conditions de travail,
l’inspecteur de la sécurité maritime, la surcharge des dragues et les
déchets des navires.
La totalité des inspections statutaires au titre des conventions OMI
et l’émission des certificats correspondants sont déléguées à 7 sociétés de
classification agrées au niveau européen. L’IVW procède à une
supervision de ces sociétés en faisant des contrôles aléatoires et court
préavis (entre une journée et une semaine) des navires (une à quatre fois
par an) et des sociétés de classification (une ou deux fois par an). Elle
conserve la délivrance des certificats d’inscription au registre national et
des brevets aux équipages et marins.
VII
-
Royaume Uni
La Cour renvoit au rapport du National Audit Office (NAO) du 11
février 2009 intitulé « The Maritime and Coastguard Agency’s response
to growth in the UK merchant fleet » (rapport disponible sur le site du
NAO.)
d_agency.aspx
VIII
-
Norvège
Un premier registre national comprend 907 navires et un second
registre international 537 navires en 2009 et 6 311 navires de pêche en
2010. 15 151 escales de navires étrangers ont été enregistrées en 2010.
L’organisation du système est fondée sur la loi sur la sécurité des
navires du 16 février 2007 complétée par un décret du 15 juin 2007. La
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ANNEXES
139
direction des affaires maritimes emploie 308 personnes (ingénieurs,
marins, juristes) dont 202 au siège et 103 réparties dans 16 stations
côtières. Elle a établi un plan stratégique (2008-2011) dans lequel elle
affiche 5 objectifs (un personnel qualifié disposant de bonnes conditions
de travail ; des navires sûrs et sécurisés ; un environnement propre ; de la
qualité à tous les niveaux ; un environnement de travail attractif)
Des accords de délégation de contrôle sont conclus avec 5 sociétés
de classification reconnues. Les délégations les plus larges sont accordées
pour les navires inscrits au registre norvégien international.
Plan stratégique 2008-2011, direction des affaires maritimes
de la Norvège
Dans son plan stratégique 2008-2011, la direction des affaires
maritimes de la Norvège affiche les objectifs suivants :
Objectif 1 : Avoir un personnel qualifié ayant une bonne
qualité de vie et de bonnes conditions de travail.
-
suivi et contrôle des conditions de travail et de vie en
mer ;
-
suivi et révision de la formation maritime ;
-
gestion du système de remboursement pour les marins ;
-
délivrance et renouvellement des certificats personnels
en temps voulu.
Objectif 2 : Des navires sûrs et sécurisés
-
contrôle de la documentation dans le cadre de nouvelles
constructions, de réparations et de pavoisement ;
-
réalisation des inspections, contrôles des ports, et
contrôles périodiques ;
-
réalisation des audits d’armateurs, de navires, des
sociétés de classification et des organes de contrôle
technique ;
-
délivrance et renouvellement des certificats de navigation
en temps voulu.
Objectif 3 : Environnement propre
-
inspection des navires norvégiens ;
-
inspections
des
navires
étrangers
dans
les
ports
norvégiens ;
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140
COUR DES COMPTES
-
gestion de différentes mesures de lutte contre la pollution
-
Favoriser une réduction des émissions par les navires
norvégiens ;
-
témoigner d’une responsabilité environnementale et
sociale dans le cadre des achats de biens et services.
Objectif 4 : Qualité à tous les niveaux
-
développement
d’une
réglementation
basée
sur
l’expérience et l’analyse ;
-
être un acteur visible dans le travail de réglementation
international ;
-
transposer la réglementation internationale ratifiée
-
transmettre les connaissances tirées des rapports et
analyses sur les accidents ;
-
bonne communication et information ;
-
dispositif d’intervention d’urgence en continu pour les
opérations de sauvetage en mer ;
-
suivi, amélioration et renforcement de l’efficacité
permanent.
Objectif 5 : Environnement de travail attractif
-
recrutement
et
développement
systématique
des
compétences du salarié ;
-
travailler à la mise en place d’une politique personnelle
et de salaire adaptée et en cohérence avec le marché ;
-
solutions attractives et flexibles adaptées aux étapes de
vie de chaque employé.
(Source : Direction générale du Trésor - ETUDES - Réseaux
d’expertise et de veille internationales, Service économique d’Oslo,
mars 2011 : enquête de comparaison internationale réalisée pour la Cour
des comptes).
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ANNEXES
141
Annexe n° 3 : Liste des personnes
rencontrées
Nom
Fonction
Organisme
Acteurs privés du secteur maritime
Bernard ANNE
Directeur général
Bureau Veritas
Édouard BERLET
Associé-fondateur
EB Conseils
Jean-Marie
BERTHET
Secrétaire général
Conseil supérieur de la
Marine Marchande
Jean-Pierre BEURIER
Professeur d'université
Nantes
Philippe BOISSON
Directeur de la
communication,
conseiller juridique,
direction marine
Bureau Veritas
Pierre-Georges
DACHICOURT
Président
Comité National des
Pêches Maritimes et
des Élevages Marins
Françoise
DOULIAZEL
Directrice adjointe
Institut maritime de
prévention
Patrick DE LA
MORINERIE
Directeur général
adjoint
Axa Corporate
Solutions
Alain DELCROIX
Head of Marine and
Transport Risk
Consulting
Axa Corporate
Solutions
Emmanuel
DESCLEVES
Conseiller défense du
président de DCNS
DCNS
Boris FEDOROVSKI
Conseiller technique et
économique
Groupement des
Industries de
Construction et
Activités Navales
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142
COUR DES COMPTES
Marc GHIGLIA
Délégué général
Union des Armateurs à
la Pêche de France
André GODEC
Représentant syndical
SMPAM - CGT
Alain JEGU
Secrétaire général
Association française
des capitaines de
navires
José JOUNEAU
Président
Comité régional des
pêches des pays de la
Loire
Fernand LANCON
Secrétaire général
Association des
capitaines et officiers
de la marine
marchande
Remy LEMAITRE
Représentant syndical
SMPAM - CGT
Georges MEYNET
Ancien adjoint au
directeur du transport
maritime, des ports et
du littoral
Retraité
Frédéric MONCANY
DE SAINT-AIGNAN
Président
Fédération française
des pilotes maritimes
Michel QUIMBERT
Président
Conseil supérieur de la
marine marchande
Eudes RIBLIER
Président
Institut français de la
mer
Yves RICHARD
Secrétaire général
Fédération française
des pilotes maritimes
Patrick RONDEAU
Responsable Affaires
technique et sûreté
Armateurs de France
Patrick SOISSON
Président
Union des armateurs à
la pêche de france
François THOMAS
Responsable qualité et
sûreté DPA
Louis Dreyfus
Armateurs
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ANNEXES
143
William TILLET
Premier Prud’homme
des pêcheurs de
Martigues
Pêcheurs de Martigues
Georges TOURRET
Président
Institut maritime de
prévention
Francis VALLAT
Président
Cluster Maritime
Français
Acteurs publics du secteur maritime
Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et
du logement
Au niveau central
Philippe
PAOLANTONI
Directeur
Direction des affaires
maritimes
Jean-Paul GUENOLE
Sous-directeur
Sous-direction de la
sécurité maritime
(SDSM)
Jean-Luc LE
LIBOUX
Sous-directeur
SDSM
Daniel DEJARDIN
Adjoint au Sous-
directeur
SDSM
Pierre MITTON
Chargé de mission
qualité
SDSM
Marc LEGER
chef du bureau SM2
SDSM
François-Xavier
RUBIN de SERVENS
Chef du bureau SM3
SDSM
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144
COUR DES COMPTES
François
BEAUGRAND
Adjoint du chef de
bureau SM3
SDSM
Philippe JANVIER
Adjoint du chef de
bureau SM3
SDSM
Alain ULYSSE
Chargé du pôle
international de gestion
de la sécurité (ISM) et
organismes habilités
DAM/SDSM/SM2
Philippe de
LAMBERT DES
GRANGES
Chef du bureau AM1
SDSM
Édouard PERRIER
Chef du bureau AM1
SDSM
Loïc ABALLEA
Responsable de la
mission de la flotte de
commerce
Mission de la flotte de
commerce de la
direction des affaires
maritimes (DAM)
Kathryn
MOOSBRUGGER
Adjointe au sous-
directeur
Sous-direction des
ports et du transport
fluvial
Bruno BARADUC
Inspecteur général
Inspection générale des
affaires maritimes
Jean-Pierre MANNIC
Chef du bureau
enquêtes accidents / mer
(BEAmer)
Bureau d'enquêtes
accidents/mer
Pascal SAVOURET
Sous-directeur des
ressources halieutiques
Direction des pêches
maritimes et de
l'aquaculture
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ANNEXES
145
Au niveau territorial
Directions interrégionales de la mer (DIRM)
Pierre-Yves
ANDRIEU
Directeur interrégional
de la mer
DIRM Méditerranée
Jean-Marie COUPU
Directeur interrégional
de la mer
DIRM Sud-Atlantique
Xavier LA PRAIRIE
Directeur adjoint à la
sécurité maritime
DIRM Nord
Atlantique-Manche
Ouest
Jean-Luc LE
LIBOUX
Directeur adjoint à la
sécurité maritime
DIRM Manche Est-
Mer du Nord
Alain ORTOLE
chef du service emploi
formation de la DIRM
DIRM Méditerranée
Centres de sécurité des navires (CSN)
Mathieu FANONNEL
Chef du CSN du Havre
Philippe VINOT
Chef du CSN de
Marseille
Luc NOSLIER
Chef du CSN de
Bordeaux
Pascal JEHANNO
chef du CSN de
Boulogne
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Alan SYMONEAUX
chef du CSN de St-
Nazaire
Emmanuel JAFFRE
chef du CSN de Lorient
Délégations à la mer et au littoral
Guillaume SELLIER
Délégué à la mer et au
littoral
Direction
départementale des
territoires et de la mer
du Var
Sébastien ROYER
Adjoint au délégué à la
mer et au littoral
Direction
départementale des
territoires et de la mer
de Loire Atlantique
Paul LURTON
Délégué à la mer et au
littoral
Direction
départemental des
territoires et de la mer
du Pas-de-Calais
Centre de formation et de documentation des affaires maritimes
Jean-Michel
CHEVALIER
Responsable du centre
MM PERSON,
LEMAIRE et
MOLNAR
Formateurs
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147
Autres acteurs publics du secteur maritime ou des transports
Jean-François
TALLEC
Secrétaire général de la
mer
Secrétariat général de
la Mer
Jean-Loup
VELUT
Commissaire général de
la marine, adjoint au
préfet maritime.
Préfecture maritime de
la Méditerranée
Michel BABKINE
Administrateur en chef
des Affaires Maritimes
Chef de l’organisme
d’étude et de
coordination pour la
recherche et le
sauvetage (SECMAR)
Secrétariat général de
la Mer
Eric BERDER
Conseiller maritime
Représentation
permanente de la
France auprès de l'OMI
Damien CAZÉ
Directeur général
délégué (ancien
Directeur des affaires
maritimes)
Universciences
Pierre-François
FORISSIER
Chef d'État-major de la
Marine
Marine nationale
Gérard LE HOUX
Ingénieur général des
ponts, des eaux et des
forêts
Conseil général de
l'environnement et du
développement durable
Capitaineries des
ports
Henri FOLLIN
Commandant du port de
Bordeaux
Capitainerie du port de
Bordeaux
Amaury de
MAUPEOU
Commandant du port de
Marseille
Capitainerie du port de
Marseille
Yves JAOUEN
commandant du port de
Nantes- St Nazaire
Capitainerie du port
Nantes- St-Nazaire
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Stations de pilotage
Christophe REUX
Président du syndicat
des pilotes maritimes
Station de Bordeaux
Patrick PAYAN
Président du syndicat
des pilotes maritimes
Station de Marseille
Benoît
GASCHINIARD
Président du syndicat
des pilotes maritimes
Station de Nantes
Chantiers navals
M. PELPEL
Chargé d'affaires
Chantier STX à Nantes
M. GOBERT
Directeur
SOCARENAM à
Boulogne
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149
Acteurs internationaux
Organisation maritime internationale (OMI)
Secrétariat général
Brice MARTIN-
CASTEX
Administrateur de
l'Organisation maritime
internationale
Division de la sécurité
maritime
Lawrence D.
BARCHUE
Directeur en chef adjoint
Bureau Audit des États
membres et de la
surveillance interne de
l’OMI
Commission européenne
Jean-Louis
COLSON
Chef du Bureau C1 de la
direction du transport
maritime (sécurité
maritime et gens de mer)
Commission
européenne-Direction
générale de la mobilité
et des transports
Agence européenne de la sécurité maritime
Mario MIFSUD
Chef de l'unité B1
Evaluation de la sécurité
et inspections
Département mise en
oeuvre de la législation
maritime-sécurité du
navire
Stéphane FLOCH
Chef de projet "enquête
accidents" au sein de
l'unité B2 sécurité du
navire
Département mise en
oeuvre de la législation
maritime-sécurité du
navire
Représentation permanente de la France auprès de l’Union
européenne
Francesco GAETA
Conseiller transport
Représentation
permanente de la
France auprès de
l'Union européenne
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National Audit Office (Royaume-Uni)
Geraldine BARKER
Directrice, responsable du secteur transport pour
les audits de performance
Paul WRIGHT-
ANDERSON
Audit Manager: enquête de 2000 sur le contrôle de
la sécurité des navires, "Ship Surveys and
Inspections"
David HOWES
Audit Manager: enquête de 2009 sur la réponse de
l'agence maritime et des gardes côtes à la
croissance de la flotte de commerce britannique,
"The Maritime and Coast Guard Agency's
response to growth in the UK merchant fleet
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Liste des sigles
AAM : administrateurs des affaires maritimes
AESM : Agence européenne pour la sécurité maritime
BEAmer : bureau enquêtes accidents / mer
code international de gestion de la sécurité (dit code ISM)
code international de la sûreté (dit code ISPS)
CSN : centres de sécurité des navires
DML : délégations à la mer et au littoral
DAM : direction des affaires maritimes
DGITM : direction générale des infrastructures, du transport et de la
mer
DDTM : directions départementales des territoires et de la mer
DIRM : directions
interrégionales de la mer
DPMA : direction des pêches maritimes et de l’aquaculture
IAM : inspecteurs des affaires maritimes
ISM : « International Safety Management »
ISNPRPM : inspecteurs de la sécurité des navires et de la prévention des
risques professionnels maritimes
ISN : inspecteurs de la sécurité des navires
MLC : « Maritime Labour Convention »
MFC : mission de la flotte de commerce
MOU « Memorandum of Understanding »
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152
COUR DES COMPTES
OCTAAM : officiers du corps technique et administratif des affaires
maritimes
OMI : Organisation maritime internationale
PEM : professeurs de l’enseignement maritime
RIF : registre international français
ULAM : unités littorales des affaires maritimes
UMS : Universal Measurement System
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REPONSES DES
ADMINISTRATIONS
CONCERNEES
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SOMMAIRE
Ministre de l’écologie, du développement durable et
de l’énergie et du ministre délégué auprès de la
ministre de l’écologie, du développement durable et de
l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la
pêche
155
Ministre délégué auprès du ministre de l’économie et
des finances, chargé du budget
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RÉPONSE DU MINISTRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT
DURABLE ET DE L’ÉNERGIE ET DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS
DE LA MINISTRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT
DURABLE ET DE L’ÉNERGIE, CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA
MER ET DE LA PÊCHE
Le contrôle de la sécurité des navires est une des composantes
majeures de la sécurité maritime, qui relève prioritairement de la direction
des affaires maritimes (DAM) au sein de la direction générale des
infrastructures, des transports et de la mer (DGITM). Cette mission s'exerce
dans un contexte très encadré au plan réglementaire par les instances
internationales et communautaires. Dans le domaine de la sécurité des
navires, les directives « Erika » ont tracé les orientations stratégiques pour
les années à venir, parmi lesquelles l'activité de contrôle figure en toute
première priorité. Cette activité, en grande partie menée par les centres de
sécurité des navires (CSN), recouvre à la fois le contrôle de la conformité
technique des navires aux règlements relatifs à la sécurité, mais aussi la
qualité des effectifs qui arment les navires, qu'il s'agisse des navires français
(contrôle au titre de l'État du pavillon) ou des navires étrangers en escale
dans les ports français (contrôles au titre de l'État du port).
L'administration française en charge de la sécurité maritime est
considérée comme performante dans ses obligations de contrôle de la
sécurité des navires, tant vis-à-vis de l'Organisation maritime internationale
(OMI) que de la Commission européenne. Le bon classement du pavillon
français, régulièrement placé dans les cinq premiers de la liste blanche du
mémorandum de Paris, l'atteste. C'est aussi sous la présidence française de
l'Union européenne, en 2009, avec une action particulièrement persévérante
du ministère, qu'a été adopté le « paquet Erika III », troisième étage de la
série de directives communautaires destinées à renforcer la sécurité
maritime. La France a achevé la transposition de ces directives au mois de
mai 2012.
Après une lecture attentive du rapport, il est important de se
concentrer non seulement sur l'aspect technique des contrôles, sur le
management des centres de sécurité et sur l'organisation de l'administration,
mais aussi sur les aspects humains (formation, brevets, comportements à la
mer
des
marins)
qui
sont
des
facteurs
déterminants
en
matière
d'accidentologie en mer.
Bon nombre d'actions ont d'ores et déjà été menées par nos services
pour garantir des navires français sûrs, exemplaires, conformes aux normes
de sécurité, armés par des équipages qualifiés, ainsi que pour assurer le
contrôle des navires étrangers faisant escale dans nos ports en cohérence
avec les orientations européennes. Ces actions anticipent en partie les
recommandations de la Cour, dans un domaine où la réglementation est en
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COUR DES COMPTES
constante évolution, demandant des contrôles toujours plus nombreux et plus
complexes, et ce, dans un contexte de contraintes importantes sur les moyens.
1/ En matière de pilotage et de management, les activités de contrôle
de la sécurité des navires ont été résolument inscrites dans une démarche de
performance et d'amélioration continue, à travers la mise en place d'un
système de management de la qualité. La direction des affaires maritimes a
obtenu le 3 septembre 2012 la certification ISO 9001aux titres de la sécurité
des navires, de la délivrance des titres de sécurité et de prévention de la
pollution, et de la délivrance des titres de formation professionnelle
maritime.
Dans cette démarche, le système d'information « GINA » fait l'objet
d'un suivi très attentif et va être amélioré, notamment en augmentant
régulièrement les taux de saisie en « mode complet » et en poursuivant la
mise à jour de la base de données « NAVPRO ». L'objectif est de traiter 75 %
des navires dans « GINA » en 2013 (contre 60 % fin 2012).
C'est dans ce cadre également que plusieurs indicateurs de
performance ont été définis et font l'objet d'un suivi régulier, notamment :
1.
le nombre de pertes de vies humaines en mer par accident ou
événement de mer (passé de 24 en 2009 à 9 en 2011 sur les
navires français professionnels) ;
2.
1e classement du pavillon français dans le mémorandum de Paris
(l'objectif est de rester dans les cinq premiers de la liste
blanche) ;
3.
1a maîtrise de la norme et de la réglementation, y compris celle
des délais de transposition (83 % des textes sont transposés dans
les délais, le retard est de 2 jours pour les 17 % restant) ;
4.
1'inspection des sociétés de classification déléguées (au minimum
une fois tous les deux ans, objectif tenu) ;
5.
1e
suivi
de
la
délivrance
des
titres
de
qualification
professionnelle maritime (22 000 titres délivrés par an, ce chiffre
étant en augmentation et le sera encore du fait de la mise en
oeuvre des amendements de Manille à la STCW et à la future
convention SCTW Pêche) ;
6.
1e taux de contrôle des navires étrangers faisant escale dans les
ports français (indicateur LOLF du programme 205 : l'objectif
est de 1 345 navires inspectés en 2013).
Le décret du 11 février 2010 relatif à l'organisation et aux missions
des directions interrégionales de la mer (DIRM) a confié à celles-ci le soin
de porter la politique maritime à l'échelon de la façade dans un souci de
meilleure déconcentration, notamment en matière de management. Chaque
DIRM reçoit une lettre de mission qui lui fixe des orientations, en particulier
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS CONCERNEES
157
en matière de sécurité maritime. Dans ce cadre, les adjoints aux DIRM
chargés de la sécurité maritime disposent d'une vue générale sur les enjeux
de sécurité maritime dans leurs ressort géographique. C'est à leur niveau que
se place le pilotage des services spécialisés que sont les Centres régionaux
opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) et les Centres de
sécurité des navires (CSN). Ils peuvent également s'appuyer sur la mission,
dévolue à la DIRM par le décret du 11 février 2010, de coordination en
matière maritime de l'action des directions départementales des territoires et
de la mer (DDTM) et de leurs délégations à la mer et au littoral (DML).
Comme le préconise à juste titre la Cour, la réorganisation des
Centres de sécurité des navires et le redéploiement de la ressource font
d'ores et déjà l'objet d'une réflexion approfondie dans le cadre de la
démarche « Budget en base zéro » (BBZ) qui s'accompagnera de la mise en
place d'un dispositif de suivi de la performance et de contrôle de gestion. Il
s'agit en particulier de revoir le dispositif littoral pour mieux cibler les
secteurs à risque (notamment en matière de contrôle de l'état du port ou du
contrôle de la flottille de pêche), en répartissant autrement la charge, ou
l'armement en personnel, des CSN. Ce chantier nécessitera toutefois un
dialogue renforcé avec les organisations syndicales compte tenu de son
impact sur la mobilité des agents. Il devra être conduit sur une durée de
l'ordre de 3 à 5 ans.
Le rôle des Unités littorales des affaires maritimes (ULAM) dans le
domaine de la sécurité des navires est actuellement revu : seules certaines
ULAM apportant une contribution significative aux CSN conservent
transitoirement cette mission.
2/ Dans le domaine de la gestion des ressources humaines, des
mesures ont été prises ou sont en passe de l'être pour faire face à
l'augmentation de la charge des Centres de sécurité des navires et consolider
le statut et la carrière des inspecteurs de la sécurité des navires (ISN) :
- augmentation du nombre d'inspecteurs de la sécurité des navires
entre 2002 et 2005 : comme le souligne le rapport de la Cour, des
recrutements exceptionnels ont permis de doubler le nombre d'inspecteurs
entre 2000 et 2010. Malgré une baisse de 190 ETP entre 2009 et 2011
appliquée aux affaires maritimes, ce secteur a été « sanctuarisé » ;
- transfert d'une partie de la charge des contrôles aux sociétés de
classification (à l'instar des mesures prises par le Royaume-Uni), avec
parallèlement un renforcement du contrôle de l'État sur ces sociétés : dès
2012 en effet, les sociétés de classification habilitées effectuent pour le
compte de l'État les tâches de mise en service et de délivrance de la quasi-
totalité des certificats internationaux aux navires de charge de plus de
500 UMS qui effectuent une navigation internationale (il s'agissait en
particulier d'anticiper sur la surcharge de travail que la mise en oeuvre de la
convention du travail maritime adoptée en 2006 par l'Organisation
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158
COUR DES COMPTES
internationale du travail ferait peser sur les CSN). Cette délégation
renouvelle ipso facto les relations des services du ministère avec les sociétés
de classification, en lien avec l'Agence européenne de sécurité maritime
(AESM) ;
- redéploiement des moyens de contrôle vers les navires sensibles ou à
risque : navires de pêche, navires spéciaux, navires à passagers ;
- en matière de politique statutaire, les évolutions sont menées
notamment dans le cadre et la perspective de fusion de corps. C'est ainsi que
des perspectives de diversification de carrière seront offertes aux inspecteurs
civils ;
- dans les domaines de la formation et du maintien des qualifications,
comme le souligne la Cour, le dispositif mis en place répond bien à la
demande. Par ailleurs, une plus grande reconnaissance de la spécificité du
métier d'ISN dans le cadre des comités de domaine, notamment le comité
« Transport durable, sécurité, intermodalité et mobilité », est recherchée ;
- enfin les aspects indemnitaires ont fait l'objet tout récemment
d'avancées significatives (prime de fonction et de résultat, indemnité
forfaitaire pour visite obligatoire au titre de l'Etat du port pour les week-end
et jours fériés, etc.).
3/ En ce qui concerne le métier de la pêche, dont la Cour souligne à
juste titre la dangerosité, la nouvelle réglementation a instauré un suivi fondé
sur le « ciblage » des navires à contrôler en fonction d'un critère qui utilise
une dizaine de paramètres (type du navire, âge, catégorie de navigation,
antécédents, etc.). On passe ainsi d'un système quantitatif à un système
qualitatif, tout en maintenant le principe des visites périodiques de sécurité.
Ce nouveau système se met en place et sera pleinement opérationnel avant la
fin de l'année 2012. Il fera l'objet d'une évaluation.
L'intégration dans notre ministère de la direction de la pêche
maritime et de l'aquaculture (DPMA) et le rattachement de ses politiques au
programme 205 (dénommé « Sécurité et affaires maritimes, pêche et
aquaculture » à compter du 1
er
janvier 2013), facilitera la prise en compte
des spécificités de ce domaine.
Néanmoins l'effort de contrôles des CSN sur la flottille de pêche ne
pourra jamais éliminer totalement les risques inhérents à l'âge avancé de ces
navires (moyenne d'âge de plus de 25 ans), ni le facteur humain,
prépondérant
en
matière
d'accidents
(fatigue,
perte
de
vigilance,
comportements addictifs, etc.). Des campagnes de sensibilisation et de
prévention sont menées sur ces sujets, notamment en liaison avec l'Institut
maritime de prévention (IMP) et au sein du Conseil supérieur des gens de
mer (CSGM) nouvellement créé et qui regroupe l'ensemble des acteurs du
secteur maritime.
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS CONCERNEES
159
En définitive, nous confirmons l’engagement total du ministère face
aux enjeux de sauvegarde de la vie humaine en mer et de protection de
l'environnement. Nos services s'appliquent sans relâche à atteindre les
objectifs que le gouvernement lui a fixés et qui sont mis en oeuvre par les
Centres de sécurité des navires (CSN) armés par des personnels motivés et
compétents.
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La sécurité des navires et de leurs équipages – novembre 2012
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RÉPONSE DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DE
L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES, CHARGÉ DU BUDGET
La Cour des comptes relève que les résultats obtenus par la France en
matière d'inspection des navires apparaissent insuffisants. Les pouvoirs
publics prendront bien évidemment les mesures nécessaires afin d'apporter
une réponse aux risques soulignés par la Cour portant tant sur la sécurité
des biens et des personnes que sur les conséquences environnementales
d'éventuels
défauts de sécurité des navires dangereux.
La Cour souligne également que l'information du Parlement sur les
contrôles de sécurité des navires pourrait être améliorée. L'indicateur 1.3 du
programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » ne rend en effet compte
que du pourcentage de navires étrangers contrôlés, sans préciser le second
objectif communautaire portant sur le contrôle des navires particulièrement
dangereux (« priorité 1 »).
Je veillerai à ce que cet indicateur soit complété lors du prochain
projet de loi de finances, afin que le Parlement dispose d'une information
exhaustive sur les performances de cette politique publique.
Le présent projet de rapport thématique n'appelle pas de remarque
complémentaire de ma part.
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS CONCERNEES
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Destinataire n’ayant pas répondu :
-
Le ministre de l’économie et des finances
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