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(095 105 055)
1ère section
N°/G/62/n° A 60
Séance du 22 août 2006
RECOMMANDE AVEC A.R.
CENTRE NATIONAL DE LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE (CNFPT)
C/ COMMUNE DE BELLEFONTAINE (95)
Article L.1612-15 du Code général des collectivités territoriales
La Chambre Régionale des Comptes d'Ile-de-France,
VU
le Code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 1612-15,
L. 2321-1 et L. 2321-2, R. 1612-32 à R. 1612-37 ;
VU
le Code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-7, L. 232-1, L. 242-1
et L. 242-2, R. 242-1 à R. 242-3 ;
VU
les lois et règlements relatifs aux budgets des communes et des établissements publics
locaux ;
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VU
la lettre en date du 7 juillet 2006, enregistrée au greffe de la Chambre le 11 juillet, par
laquelle le Président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) a
demandé à la Chambre, sur le fondement de l'article L. 1612-15 du Code général des
collectivités territoriales(CGCT) , de se prononcer sur le caractère exigible et obligatoire de la
dépense constituée par les cotisations impayées au CNFPT par la commune de
BELLEFONTAINE (95), d’un montant estimé de 3 715,80 €, pour les exercices 1988 à 1998,
ensemble les pièces à l’appui ;
VU
la lettre en date du 13 juillet 2006 par laquelle le président de la Chambre régionale des
comptes a invité le maire de la commune de BELLEFONTAINE à présenter ses
observations ;
VU
l’avis A 16 rendu par la Chambre en séance du 16 mai 2006 ;
VU
la lettre en date du 17 juillet 2006, enregistrée au greffe de la Chambre le 20 juillet, par
laquelle le maire de BELLEFONTAINE a fait connaître ses observations, confirmant les
observations adressées par lettre du 11 mars 2006 enregistrée au greffe le 15 mars, ensemble
les pièces à l’appui ;
VU
le budget 2006 de la commune de BELLEFONTAINE ;
VU
l’ensemble des informations et documents recueillis en cours d’instruction ;
VU
les conclusions du ministère public ;
Après avoir entendu Mme ESPINOSA, première conseillère, en son rapport ;
REND L’AVIS SUIVANT
:
SUR LA RECEVABILITE DE LA SAISINE :
CONSIDERANT
qu’aux termes de l’article L. 1612-15, 2
ème
alinéa, du CGCT : «
la
Chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l’Etat dans le département,
soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu’une
dépense obligatoire n’a pas été inscrite au budget ou l’a été pour une somme insuffisante
.
Elle opère cette constatation dans le délai d’un mois à partir de sa saisine et adresse une
mise en demeure à
la collectivité territoriale concernée
» ;
CONSIDERANT
que, conformément aux dispositions de l’article R. 1612-32 du Code
général des collectivités territoriales, «
la saisine de la chambre régionale des comptes prévue
à l’article L. 1612-15 doit être motivée, chiffrée et appuyée de toutes justifications utiles, et
notamment du budget voté et, le cas échéant, des décisions qui l’ont modifié
» ;
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CONSIDERANT
qu’aux termes de l’article R.1612-34 du même code, «
la Chambre
régionale des comptes se prononce sur la recevabilité de la demande. Elle constate
notamment la qualité du demandeur et, s’il y a lieu, l’intérêt qu’il a à agir.
» ;
CONSIDERANT
que le président du CNFPT a qualité pour agir ; que sa demande est
motivée, chiffrée et appuyée des justifications utiles ;
CONSIDERANT
, dès lors, que les conditions de recevabilité de la saisine sont réunies ;
SUR LE CARACTERE OBLIGATOIRE DE LA DEPENSE :
CONSIDERANT
que la saisine de la Chambre par le CNFPT porte sur les cotisations
impayées au centre par la commune de BELLEFONTAINE, d’un montant estimé de
3 715,80 €, du 1
er
janvier 1988 au 31 décembre 1998 ;
CONSIDERANT
qu’à l’appui de sa demande, le CNFPT indique qu’il n’avait pas eu
connaissance de l’assujettissement de la collectivité avant la date du 30 juin 2003 et invoque
les dispositions des articles 3 et 4 de la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 selon lesquelles la
prescription quadriennale est suspendue lorsque le créancier (CNFPT) n’a pas connaissance
de la dette de l’organisme public (la commune) ;
Qu’il précise que sa demande de mandatement d’office des cotisations présentée à la
préfecture du Val d’Oise n’a pas été acceptée, au motif que le centre, en tant que créancier,
n’apportait pas toutes les pièces justificatives de la liquidité, de l’exigibilité et de l’absence de
prescription de sa créance ;
CONSIDERANT
que le maire de BELLEFONTAINE, dans sa lettre susvisée du 11 mars
2006, a indiqué que les arriérés de cotisations pour les années 1999 à 2002 avait été mandatés
le 30 septembre 2004 suite à la demande formulée par le centre le 30 juin 2003 ; que,
s’agissant des cotisations antérieures à l’année 1999, le receveur municipal a confirmé
qu’elles étaient atteintes par la prescription quadriennale ;
Qu’il indique, de plus, qu’«
aucune cotisation n’ayant été réclamée avant 2003, la commune
ignorait que les cotisations étaient dues ; qu’en ce qui concerne une éventuelle suspension du
délai de prescription, il convient de noter que cette suspension ne peut que déplacer le délai
pendant lequel le CNFPT a la possibilité de réclamer le paiement d’un arriéré, non déjà
prescrit.
» ; que le CNFPT
«
ne pouvait prétendre se faire verser des cotisations antérieures à
1999 et pour le paiement desquelles il ne s’était, à cette date de 2003, jamais manifesté ;
qu’en conséquence, la commune souhaite faire valoir l’application de la déchéance
quadriennale qui s’applique pour les collectivités locales.
» ;
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Sur le principe du caractère obligatoire de la cotisation au CNFPT :
CONSIDERANT
qu’aux termes de l’article L. 2321-1 du CGCT «
sont obligatoires pour la
commune les dépenses mises à sa charge par la loi
» ;
CONSIDERANT
que la loi n° 87-529 du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à
la fonction publique territoriale a rendu obligatoire la cotisation au budget du CNFPT pour les
collectivités territoriales ayant «
au moins, au premier janvier de l’année de recouvrement, un
emploi à temps complet inscrit à leur budget
» ;
CONSIDERANT
que, de plus, cette cotisation figure sur la liste des dépenses obligatoires de
L. 2321-2 du CGCT, au 5° ;
CONSIDERANT
que la dépense, que constitue la cotisation au CNFPT, trouve son
fondement dans la loi ; qu’elle est, conformément à l’article précité L. 2321-1, obligatoire
dans son principe ;
Sur l’assujettissement de la commune à la cotisation au CNFPT :
CONSIDERANT
que pour être assujetties à la cotisation au budget du CNFPT, aux termes
de l’article 12 ter de la loi précitée du 13 juillet 1987, «
une cotisation obligatoire
[est]
versée
par les communes
[…]
qui ont au moins, au premier janvier de l’année de recouvrement un
emploi à temps complet inscrit à leur budget
; que ces dispositions ne différencient pas les
catégories d’emplois concernés ;
CONSIDERANT
que la commune de BELLEFONTAINE (485 habitants) qui compte au
moins un agent employé à temps complet, est ainsi assujettie à la cotisation au CNFPT ;
CONSIDERANT
que, pour être obligatoire une dépense doit néanmoins présenter un
caractère certain, liquide, exigible et ne doit pas être sérieusement contestée dans son principe
et dans son montant ;
Sur la prescription de la créance :
CONSIDERANT
qu’il convient de distinguer la prescription en matière de recettes, ou
prescription d’assiette de la créance, de la prescription en matière de paiement de la créance ;
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CONSIDERANT
que
le délai de prescription en matière de recettes, ou prescription
d’assiette, est le délai qui court à l’encontre de l’ordonnateur, créancier, pour matérialiser les
droits de la collectivité ou de l’établissement public ; qu’à défaut d’établissement des droits
dans ce délai, la prescription est acquise au profit du débiteur et emporte extinction des droits
de la collectivité ou de l’établissement public créancier ;
CONSIDERANT
qu’en application de l’article 2227 du Code civil, l’Etat, les communes et
les établissements publics sont soumis aux mêmes prescriptions que les particuliers ; qu’en
l’absence de texte particulier, cette prescription est trentenaire conformément à l’article 2262
du Code civil ;
CONSIDERANT
qu’en application des dispositions de l’article 1
er
de la loi du 31 décembre
1968 «
sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, sans préjudice
des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserves des dispositions de la
présente loi, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du
premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis.
» ;
CONSIDERANT
que ces dispositions doivent être combinées ; qu’ainsi, si le créancier
public d’une collectivité publique dispose, en droit, d’un délai supérieur à 4 ans pour réclamer
son dû, ce débiteur public peut lui opposer la déchéance quadriennale de la loi du
31 décembre 1968, à moins qu’elle n’ait été interrompue ; à défaut, son droit à réclamer le
paiement de sa créance serait éteint, sauf pour son débiteur à le relever de cette prescription
dans les conditions fixées à l’article 6 de la loi de 1968 ;
CONSIDERANT
qu’en application de l’article 2 de la loi du 31 décembre 1968, la
prescription est interrompue notamment par «
toute demande de paiement ou toute
réclamation écrite adressée par un créancier à l’autorité administrative, dès lors que la
demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l’existence, au montant, ou au
paiement de la créance, […]
»
;
CONSIDERANT
qu’en application de l’article 3 de la loi de 1968, «
la prescription ne court
ni contre le créancier qui ne peut agir,[…], ni contre celui qui peut être légitimement regardé
comme ignorant l’existence de sa créance […]
»
;
CONSIDERANT
que l’article 12 ter de la loi précitée du 13 juillet 1987 a établi le principe
et l’assiette de la cotisation dues par les communes au CNFPT, ainsi que les modalités et la
périodicité du versement de la cotisation comme les versements faits aux organismes de
sécurité sociale ; que cette loi à mis en place un système déclaratif selon lequel les
collectivités débitrices de la cotisation au CNFPT sont tenues de prendre l’initiative ;
CONSIDERANT
que le CNFPT n’était pas en mesure de connaître l’assiette des cotisations
s’il n’était pas informé par les communes ; que les dispositions de la loi n° 96-1093 du
16 décembre 1996, mises en vigueur par le décret n° 2002-696 du 29 avril 2002, prévoient
que le CNFPT est désormais habilité à se faire communiquer les informations nécessaires au
contrôle des versements par l’intermédiaire des centres de transfert des données sociales
(TDS) ;
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CONSIDERANT
qu’ainsi le CNFPT, en l’absence d’action de la commune, ne pouvait avoir
connaissance de sa créance, jusqu’à la publication du décret du 29 avril 2002 ; que, par
conséquent, la prescription quadriennale ne lui est pas opposable pour la période antérieure à
2002 ;
CONSIDERANT
que le CNFPT, ayant adressé sa demande à la commune le 30 juin 2003, il
peut être fait application des dispositions de l’article 2 de la loi, relatif à l’interruption de la
prescription quadriennale, à partir de cette date ;
Sur la liquidité de la créance
:
CONSIDERANT
que l’article 12 ter de la loi du 13 juillet 1987 dispose que la cotisation est
«
assise sur la masse des rémunérations versées aux agents relevant de la collectivité, telles
qu’elles apparaissent aux états liquidatifs mensuels ou trimestriels dressés pour le règlement
des charges sociales dues aux organismes de sécurité sociale, au titre de l’assurance
maladie.
» ; qu’elle est égale à 1 % du montant des salaires bruts déclarés à l’URSSAF
figurant sur les états liquidatifs mensuels ou trimestriels
;
CONSIDERANT
que le CNFPT réclame à la commune de BELLEFONTAINE les
cotisations pour les années 1988 à 1998, pour un montant total de 3 715,80 € ; que les
montants des cotisations sont indiqués par année ;
CONSIDERANT
que le CNFPT, dans une correspondance au préfet du val d’Oise, en date
du 18 novembre 2005, indique ne pas être en mesure de calculer le montant exact des
cotisations impayées ; que ces montants font l’objet d’une estimation à partir de la dernière
année de cotisation et en déduisant de ce montant 3 % par année ; que ce calcul est sans lien
direct avec les dispositions légales précitées et que les montants en résultant ne sont
qu’estimatifs ; que ces cotisations doivent être liquidées par trimestre pour une commune
employant moins de 10 agents ;
CONSIDERANT,
dans ces conditions,
que les cotisations, pour les années 1988 à 1998, ne
peuvent être considérées comme liquides et certaines dans leur montant ;
CONSIDERANT
en conséquence que la créance alléguée par le CNFPT à l’encontre de la
commune de BELLEFONTAINE ne présente pas le caractère de dépense obligatoire au sens
de l’article L. 1612-15 du CGCT et qu’il n’y a pas lieu de mettre en demeure la commune de
procéder à l’inscription de crédits correspondants à son budget ;
PAR CES MOTIFS,
DECLARE
recevable la saisine du Président du CNFPT ;
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DIT
que la dépense, que constitue la cotisation au budget du CNFPT, trouve son fondement
dans la loi ; qu’elle est obligatoire dans son principe ;
CONSTATE
que la créance alléguée par le CNFPT de 1988 à 1998 ne peut être considérée
comme liquide et certaine dans son montant ; qu’en conséquence, elle ne présente pas le
caractère de dépense obligatoire au sens de l’article L. 1612-15 du CGCT ;
DIT
qu’il n’y a pas lieu en conséquence de mettre la commune de BELLEFONTAINE en
demeure d’inscrire des crédits à son budget.
Délibéré par la Chambre régionale des comptes d'Ile-de-France, première section, en sa
séance du vingt-deux août deux mille six.
Présents : M. François DAVID, président de section, président de séance ; Mme Marie-France
GOETZ, M. Jean-Marc DUNOYER de SEGONZAC, premiers conseillers ; M. Patrick SOLI,
conseiller ; Mme Josée ESPINOSA, première conseillère-rapporteure.
Josée ESPINOSA,
François DAVID,
première conseillère
président de section
Christian DESCHEEMAEKER,
président