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Les mesures d'adaptation prises face au risque de recul du trait de cote

CTC NOUVELLE-CALÉDONIE

La Nouvelle-Calédonie est confrontée a un double défi: la montée du niveau de la mer et l'érosion rapide de ses côtes, qui menace ses populations et ses infrastructures. Si des actions ont été mises en oeuvre, elles restent insuffisantes et non coordonnées.

Le territoire calédonien, en particulier ses zones côtières, fait face à des risques majeurs liés à la montée de la mer et au recul du trait de côte, aggravés par le changement climatique et les pressions humaines. Cela menace les populations, les activités économiques et les infrastructures, nécessitant une gestion adaptée et durable de ces risques. Dans la poursuite des travaux de la chambre sur l’action publique face au changement climatique, la chambre a souhaité examiner les moyens et politiques en place et faire des recommandations pour améliorer les réponses apportées par les collectivités aux populations concernées.

De plus, cet audit s’inscrit dans le cadre d’une initiative plus globale d’audits coopératifs sur le changement climatique portée par l’organisation internationale des institutions supérieures de contrôle (INTOSAI) et plus particulièrement le groupe de travail sur l’audit environnemental (WGEA) ainsi que par l’initiative de développement (IDI). Neuf institutions supérieures de contrôle du Pacifique Sud participent à ces travaux (48 au niveau mondial).

  1. Un territoire exposé à un risque lié à l’érosion côtière

 La Nouvelle-Calédonie dispose de 5 900 km de côtes (falaises, plages, mangroves, etc.) dont 71 % est exposé à l'érosion et au recul du trait de côte. Le rythme d'élévation du niveau de la mer est plus important sur le littoral calédonien qu’en moyenne mondiale. Le recul du trait de côte menace les habitations, les infrastructures publiques et privées, notamment les routes, et les zones aménagées. La pollution des eaux douces et les intrusions salines impactent la consommation d'eau et l'agriculture, en particulier sur les îles Loyauté.

En province Nord, plus de 45 % du linéaire côtier est occupé par l'homme à proximité du trait de côte, avec 46 % en érosion. En province Sud, le suivi de l'évolution du trait de côte est limité aux îlots mais insuffisant sur la grande terre. Le littoral des îles Loyauté, utilisé pour diverses activités économiques, est également soumis à l'érosion et aux aléas cycloniques.

Au total, 31 des 33 communes de Nouvelle-Calédonie sont potentiellement exposées au risque d'érosion. La ville de Nouméa s'est développée grâce à de nombreux remblaiements. Entre 1935 et 2016, les côtes artificialisées sont passées de moins de 10 % à plus de 65 % du linéaire côtier de Nouméa, au détriment des espaces naturels.

  1. Une connaissance de la dynamique du trait de côte à consolider

L’acquisition et le développement de connaissances sur le recul du trait de côte est essentiel pour cerner la dynamique des systèmes côtiers et identifier les enjeux et leur vulnérabilité ainsi que les ouvrages ou aménagements de protection existants. L’observatoire du littoral de la Nouvelle-Calédonie, créé en 2013 et rassemblant des acteurs de la recherche et les collectivités, joue un rôle essentiel de suivi de sites et de production de cartes et d’analyses. La chambre recommande que le fonctionnement de cet observatoire soit renforcé afin qu’il puisse pleinement jouer son rôle de tête de réseau, de capitalisation et d’échange de la connaissance pour les acteurs impliqués dans la gestion de la bande côtière.

Un grand nombre d’acteurs publics, parapublics et privés, isolés ou réunis dans des consortiums de projet, se consacrent à la production de connaissances mais ces actions méritent plus de coordination. La Nouvelle-Calédonie est engagée dans des projets d’envergure qui permettront à terme de cartographier l’aléa à différentes échelles de temps ou en cas d’évènement climatique majeur. La chambre recommande aussi que les provinces, en liaison avec les communes, réalisent un état des lieux des enjeux situés sur la bande côtière et des aménagements, y compris leur état d’entretien et leur impact sur l’évolution du trait de côte.

  1. Des mesures de prévention à mettre en place, y compris sur les terres coutumières, par la Nouvelle-Calédonie

La Nouvelle-Calédonie est compétente pour définir le régime juridique de documents analogues aux plans de prévention des risques naturels prévisibles. La chambre recommande que de tels plans soient mis en place pour délimiter les zones exposées, instituer les servitudes d’utilité publique et définir des prescriptions applicables en matière de construction ou de sécurisation dans ces zones.

Relevant de la coutume, aucune règle d’urbanisme n’est opposable en terres coutumières en raison de leur caractère inaliénable, incommutable, insaisissable et incessible. C’est donc au congrès de la Nouvelle-Calédonie, s’il le souhaite et après consultation des autorités coutumières, d'adopter une loi du pays précisant l'incidence sur les terres coutumières des servitudes d'utilité publique.

Le financement des prescriptions imposées par les plans de prévention des risques naturels prévisibles nécessite la création d’un fonds territorial analogue au fonds Barnier dans l’hexagone. La chambre réitère son observation concernant la compétence de la Nouvelle-Calédonie en matière de droit des assurances, lui offrant la possibilité de lier l’assurabilité des biens et la prise en charge des dommages au respect des préconisations des plans de prévention des risques naturels afin d’obliger à leur mise en place et de dégager des ressources financières pour un fonds territorial analogue au fonds Barnier.

Enfin, la chambre estime qu’une information large doit être réalisée au niveau communal ainsi que des palabres sur les terres coutumières concernant les conséquences matérielles de l’élévation du niveau de la mer afin de sensibiliser les populations concernées.

  1. Des interventions et des ressources financières limitées et éparses

S’agissant des modes de gestion appliqués à l’érosion littorale, deux types de mesures peuvent être mises en œuvre. D’une part des mesures actives de protection et de prévention qui permettent de fixer le trait de côte et de régler une problématique bien souvent urgente à un coût élevé grâce à la construction d’ouvrages ou d’aménagements (digues, murs, cordons de pierre, etc.). En outre, des solutions fondées sur la nature permettent quant à elles d’agir à moyen ou long terme en restaurant, à moindre coût, des écosystèmes naturels, tels que les mangroves ou les herbiers et récifs coralliens. Les mesures d’atténuations des pressions, telles que la gestion intégrée des bassins versants, apparaissent également essentielles pour contribuer à la lutte contre l'érosion littorale en Nouvelle-Calédonie.

 

D’autre part, une alternative consiste à adopter une position d’acceptation, autrement appelée le « vivre avec », pour s'adapter aux effets de l'érosion. Cette position a pour objet de laisser la côte ou le récif s’adapter naturellement. Elle peut entraîner la délocalisation des personnes et éventuellement des biens sur d’autres sites. Ces opérations de délocalisation sont, la plupart du temps, très couteuses et nécessitent de mettre en place des outils financiers adaptés.

En l’absence de centralisation de l’information, la chambre a tenté de mesurer le niveau de l’effort financier consacré à la question du recul du trait de côte sur le territoire (en moyenne 233 MF CFP par an pour la Nouvelle-Calédonie et les provinces Nord et Sud entre 2019 et 2023). La Nouvelle-Calédonie contribue essentiellement à l’amélioration de la connaissance alors que les provinces Nord et Sud participent en priorité à la construction et à l’entretien d’ouvrages de protection. D’autres acteurs, tels que l’agence française de développement ou des opérateurs nationaux de la recherche scientifique interviennent aussi sur cette thématique.

  1. Une stratégie intégrée à celle, encore récente, relative au changement climatique

Le gouvernement a arrêté, en septembre 2024, deux projets de délibérations du congrès relatives d’une part, à la déclaration de l’urgence climatique et environnementale en Nouvelle-Calédonie et à la définition d’une stratégie calédonienne du changement climatique et d’autre part, à la création d’un fonds de résilience calédonien du changement climatique. La chambre prend acte de cette initiative encourageante et note néanmoins que ces deux projets de délibérations n’ont pas encore, en janvier 2025, été validées par le congrès. En outre, la chambre invite la Nouvelle-Calédonie à préciser les actions qui seront menées dans le cadre de chacun des axes de cette stratégie, notamment l’axe relatif à la planification et aux aménagements, leur mode de financement, leur calendrier et la collectivité ou l’opérateur qui en sera responsable, notamment le rôle des provinces et des communes, ainsi des indicateurs de réalisation et d’impact attendu. Enfin, la chambre invite les acteurs concernés à envisager, à l’instar des travaux réalisés en Nouvelle-Zélande, dès la conception des documents stratégiques, leur révision périodique et l’intégration de dispositifs d’ajustements permettant d’intégrer de nouvelles informations scientifiques ou sociales afin de rester adaptables selon les circonstances.

N° Reco.

Intitulé

Nature (1)

Domaine (2)

Gain attendu ou risque couvert

Degré de mise en œuvre (3)

Échéance

1

(Nouvelle-Calédonie)

Formaliser en 2025, l’existence de l’observatoire du littoral de Nouvelle-Calédonie, en faire le portail de la capitalisation de la connaissance et la tête de réseau de l’ensemble des acteurs impliqués dans la gestion de la bande côtière et du recul du trait sur le territoire.

Performance

Relation avec les tiers

Améliorer la connaissance du risque

Non mise en œuvre

2025

2

(Nouvelle-Calédonie)

Cartographier l’aléa lié au risque de montée de la mer à différentes échelles de temps ou en cas d’événement climatique exceptionnel au fur et à mesure de la mise à disposition des données sur le littoral et le trait de côte.

Performance

Relations avec les tiers

Améliorer la connaissance du risque

Non mise en œuvre

Au fur et à mesure de l’acquisition de données

3

(Provinces)

Réaliser en 2026, un état des lieux des enjeux situés sur la bande côtière et des aménagements, y compris leur état d’entretien et leur impact sur le trait de côte.

Performance

Relation avec les tiers

Anticiper le recul du trait de côte

Mise en œuvre partielle

2026

4

(Nouvelle-Calédonie)

Mettre en place en 2026, les plans de prévention des risques prévisibles et les outils juridiques et financiers pour gérer les biens et constructions dans les zones exposées.

Performance

Relation avec les tiers

Augmenter l’efficacité de la gestion du trait de côte

Non mise en œuvre

2026

5

(Nouvelle-Calédonie)

Préciser dans une loi de pays en 2026 l’incidence sur les terres coutumières des servitudes d’utilité publique dans les documents analogues aux plans de prévention des risques naturels liés à l’érosion du trait de côte.

Performance

Relation avec les tiers

Améliorer la connaissance du risque

 

Non mise en œuvre

2026

6

(Nouvelle-Calédonie)

Définir les actions et les acteurs publics ou privés chargés de porter la stratégie du changement climatique et élaborer en 2026, les outils de pilotage de celle-ci en mettant en place un tableau de bord de suivi de l’atteinte des objectifs et de la recherche de financements pérennes.

Performance

Relation avec les tiers

Augmenter l’efficacité de la gestion du trait de côte

Non mise en œuvre

2026

(1) Nature : Régularité, Performance    

(2) Domaines : Achats, Comptabilité, Gouvernance et organisation interne, Situation financière, GRH, Situation patrimoniale, Relation avec des tiers.

(3) Mise en œuvre complète - Mise en œuvre partielle - Non mise en œuvre - Refus de mise en œuvre - Devenue sans objet

           

 

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