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L’aide apportée par l'État au Liban depuis 2020

COUR DES COMPTES

Depuis 2019, les difficultés que traversait déjà le Liban, se sont aggravées sous l’effet d’une crise multiforme, à la fois politique, économique, financière et sociale. Dès le lendemain de l’explosion du port de Beyrouth, le 5 août 2020, le Président de la République a exprimé la solidarité de la nation française et lancé une action d’aide appelée à se prolonger dans le temps. L’objectif était de soulager la population libanaise, en soutenant les efforts des organisations de la société civile, et de l’accompagner vers une sortie de la crise.

Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et les opérateurs placés sous sa tutelle se sont immédiatement mobilisés. Au ministère, le centre de crise et de soutien, conformément à sa mission, a été particulièrement réactif. L’Agence française de développement, l’agence pour l’enseignement français à l’étranger, la direction des Nations Unies du Quai d’Orsay ont également été en première ligne. D’autres acteurs ont été mis à contribution, notamment la direction générale du Trésor.

Cet engagement de chacun, efficacement relayé par l’ambassade de France à Beyrouth, a été apprécié positivement par la Cour, qui a peiné toutefois à collecter les données financières correspondantes, et a fortiori à les consolider. L’urgence de l’action l’a emporté, dans beaucoup de cas, sur la fiabilisation des chiffres et leur agrégation.

Au terme d’échanges approfondis avec chacun des contributeurs et d’ateliers participatifs de mise en commun des données, la Cour a pu établir qu’au total, dès 2020, les crédits annuels de l’État consacrés au Liban ont été multipliés par 2,7. Entre 2020 et 2022, 214 M€ ont été dépensés sur ressources publiques.

45 % de cette aide ont été consacrés à l’éducation et à la formation, 25 % à la santé, 10 % à l’alimentation et à l’agriculture, 10 % à la reconstruction et à l’économie et 10 % à la société civile.

La priorité accordée à l’éducation et à la santé a permis de secourir en particulier les établissements français ou francophones du Liban, confrontés à des difficultés de recrutement d’élèves et de recouvrement des droits de scolarité. Des établissements de santé comme l’hôpital Rafic Hariri de Beyrouth, mais aussi d’autres à travers tout le pays, ont été soutenus, pour préserver l’accès du plus grand nombre aux soins

La population étant la cible de l’aide, les principaux bénéficiaires n’ont pas été les structures étatiques, mais les acteurs de la société civile. 72%, par exemple, des 128 M€ d’aide apportés par l’Agence française de développement ont été dirigés vers les ONG, ce qui contraste fortement avec les modes opératoires habituels de l’Agence. Les grandes agences multilatérales, comme l’Unicef ou le Haut-Commissariat aux réfugiés, ont également été mises à contribution.

Pour évaluer la cohérence et l’efficacité de l’aide publique apportée par la France, pour mesurer son impact et disposer des instruments de pilotage permettant d’orienter, et si nécessaire de réorienter l’action, il est indispensable de déployer des mécanismes permanents de consolidation des statistiques, qui ont fait défaut pour mener jusqu’au bout l’enquête de la Cour.

Au terme de son travail, la Cour des comptes formule donc une recommandation unique : mettre en place un dispositif de suivi financier transversal de l’aide apportée par l’État au Liban permettant de vérifier sa cohérence et sa conformité aux objectifs fixés, d’évaluer son impact et de fournir des instruments de pilotage.