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L’accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes

COUR DES COMPTES En images (1)

L’augmentation du nombre de personnes en situation de handicap âgées de plus de 50 ans constitue un phénomène de grande ampleur. Le nombre de bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) de plus de 50 ans a augmenté de 55 % entre 2011 et 2019. Ces chiffres résultent de la combinaison de l’avancée en âge des générations nées dans l’après-guerre et de l’amélioration sensible de l’espérance de vie des personnes en situation de handicap. Pour autant, cette évolution démographique n’a pas été anticipée par les pouvoirs publics et ses conséquences sur les besoins en établissements et en services spécifiques n’ont pas été prises en compte. Le rapport publié ce jour a pour objet d’étudier les conséquences de ce phénomène démographique majeur, insuffisamment appréhendé par les pouvoirs publics.

Des profils différents selon les handicaps

Selon les données de l’Irdes, il existe en France 9,7 millions de personnes atteintes de limitations motrices et 3,5 millions avec des troubles psychiques, intellectuels ou cognitifs. Parmi celles qui ont plus de 60 ans, à la croisée des secteurs du handicap et du grand âge, il n’est pas possible de distinguer les personnes en situation de handicap vieillissantes. Le travail que la Cour a mené sur les données des maisons départementales des PH a permis d’identifier deux profils principaux de demandeurs aux besoins sensiblement différents :

- les personnes atteintes de déficiences motrices, viscérales et sensorielles qui représentent une majorité de situations de handicap acquis en cours de vie, après 50 ans. Ces personnes sont plus souvent capables de travailler et demandent plus souvent une reconnaissance de travailleur handicapé.
- les personnes présentant des troubles psychiques, intellectuels ou cognitifs, qui sont plus éloignées du monde du travail et auront davantage besoin d’une allocation aux adultes handicapés (AAH) ou d’une orientation en établissement ou service médico-social.

Des besoins partiellement satisfaits en matière d’accès aux soins et d’accompagnement social et médico-social

Les personnes en situation de handicap vieillissantes ont significativement moins accès aux soins que la population générale et si la prestation de compensation du handicap (PCH) joue un rôle important, elle ne couvre pas tous les besoins d’accompagnement. La Cour note que les services d’accompagnement à domicile auxquels accèdent effectivement 41 % des demandeurs seulement sont en forte tension. La situation est également tendue pour l’accès aux établissements pour personnes en situation de handicap. La probabilité pour les demandeurs d’y être admis n’est que de 65 %, tous âges confondus. Cet accompagnement insuffisant conjugué à des difficultés d’accès aux soins, explique que le vieillissement des personnes en situation de handicap soit dégradé par rapport à la population générale. Des nuances doivent néanmoins être apportées à ce constat, tant les parcours se révèlent variés.

De fréquentes ruptures de parcours

Près de 90 % des personnes en situation de handicap vieillissantes vivent dans un domicile autonome et sont pour la plupart non accompagnées. Leurs besoins portent, à la fois, sur l’adaptation de leur logement, mais aussi, sur l’accès à une aide humaine. Pour limiter les situations de crise, l’offre de soutien à domicile doit être étoffée, diversifiée, coordonnée et associée à des procédures de repérage systématique. À l’exception des personnes vivant en foyer d’hébergement, les personnes accueillies en établissements pour personnes handicapées bénéficient, en principe, de plus de stabilité. Le parcours des personnes présentant une déficience psychique ou un handicap neurologique lourd se heurte particulièrement à la très nette insuffisance d’offre médico-sociale adaptée, conduisant à des situations d’exclusion sociale, à des hospitalisations de longue durée inappropriées et à des sorties vers des établissements non adaptés. Les tensions dans le secteur médico-social trouvent une résolution au moins partielle dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), qui sont la principale structure d’accueil des personnes en situation de handicap vieillissantes, avec 40 000 personnes hébergées.

Améliorer le pilotage de la politique du handicap

Les ruptures de parcours des personnes en situation de handicap vieillissantes sont symptomatiques des difficultés que rencontrent toutes les personnes en situation de handicap. Leur vieillissement provoque un fort effet sur l’ensemble de l’offre médico-sociale par l’accroissement de la demande en établissements médicalisés, réduisant ainsi l’accès des plus jeunes adultes à une offre adaptée à leurs besoins. Cette situation appelle une réponse globale déterminée. Elle passe par l’amélioration du pilotage public de l’offre médico-sociale.

Garantir le respect du droit à l’accompagnement en augmentant significativement l’offre de soutien à domicile

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005, pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, crée un droit pour les personnes en situation de handicap à bénéficier d’un accompagnement conforme aux orientations prononcées par la MDPH. Or, trop souvent, ce droit n’est pas respecté - ce qui a déjà donné lieu à plusieurs condamnations de l’État pour carence. Face à ce constat, la réponse graduée aux besoins des personnes en situation de handicap vieillissantes doit être renforcée par un repérage de leurs besoins, de manière à favoriser l’accompagnement à domicile, et par la création de 120 000 places de services à domicile. 

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L’accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes

En France, 6 millions d’adultes de moins de 60 ans sont porteurs d’une déficience motrice et 2 millions d’une déficience psychique, intellectuelle ou cognitive. Alors que leur espérance de vie a fortement progressé, la Cour des comptes s’est penchée sur l’accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes.

Lorsqu’elles vieillissent, les personnes porteuses de handicap ont besoin d’un accompagnement adapté à leur situation, à domicile pour l’immense majorité ou en établissements spécialisés pour les moins autonomes.

Or, 60 % des demandes d’accompagnement à domicile par des services adaptés n’aboutissent pas. En l’absence d’un tel soutien, le vieillissement dans un logement autonome peut aboutir à des ruptures de parcours. Par exemple, lorsqu’un aidant décède, un logement doit être recherché en urgence pour la personne en situation de handicap. Elle peut alors être hospitalisée, ou amenée à accepter la première proposition d’hébergement disponible sans que celle-ci ne soit totalement adaptée à son besoin.

40% des demandes d’entrée en établissement spécialisé restent également sans suite. Et cette proportion augmente avec l’âge. Quand l’autonomie des personnes qui vivent à domicile diminue, elles ont alors seulement une chance sur trois d’accéder à un établissement spécialisé qui leur convienne.

L’offre est en particulier très déficitaire pour les personnes qui présentent des troubles envahissants du développement, des troubles psychiques importants, ou qui ont un handicap neurologique lourd à la suite d’un accident. Cela peut conduire à des situations d’exclusion sociale, à des hospitalisations de longue durée dans des établissements psychiatriques, à des transferts en Belgique ou encore à des entrées dans des établissements moins adaptés.

Faute de place en établissements pour adultes en situation de handicap, les Ehpad sont la seule offre d’hébergement facilement mobilisable sur tout le territoire. Ils représentent aujourd’hui la principale structure d’accueil des personnes porteuses de handicap vieillissantes, avec 40 000 personnes accueillies.

Mais les Ehpad ne sont pas suffisamment financés et outillés pour ce public spécifique. Ils ne peuvent devenir une solution acceptable d’hébergement qu’à condition de s’adapter aux besoins particuliers de ce nouveau public. Cela passe par le développement d’activités adaptées afin de maintenir leurs capacités cognitives et par une évolution des recettes allouées aux Ehpad pour les accueillir.

Les ruptures de parcours des personnes en situation de handicap vieillissantes sont symptomatiques des difficultés d’accès à un accompagnement adapté que rencontrent toutes les personnes porteuses de handicap. Elles sont  le résultat d’un manque d’anticipation de la part des pouvoirs publics de la forte progression de leur espérance de vie au cours des dernières décennies. Les places sont occupées pour des durées de plus en plus longues, les entrées sont rares et le nombre de personnes en attente de solution adapté s’accroît. On a donc un effet en chaîne sur l’ensemble de l’offre médico-sociale : l’accès des jeunes adultes à ces  structures est rendu plus difficile encore. Cette situation appelle une réponse déterminée et globale.

La loi du 11 février 2005 a créé un droit pour les personnes en situation de handicap à bénéficier d’un accompagnement conforme aux orientations prononcées par les Maisons départementales des personnes handicapées. Ce droit est trop souvent ignoré. La Cour des comptes recommande de renforcer en premier lieu les moyens dédiés à l’accompagnement à domicile, évalué à hauteur d’un milliard d’euros par an. Cet effort doit permettre aux personnes en situation de handicap qui le souhaitent de vieillir chez elles dans de bonnes conditions et d’éviter les entrées en établissement quand elles ne sont pas souhaitées.  

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