SYNTHESE
Dans le cadre d’une enquête commune conduite par la Cour des comptes et plusieurs chambres régionales sur les concessions d’électricité, la chambre a inscrit à son programme la concession de distribution publique d’électricité de la ville de Marseille.
Le cadre juridique de la distribution de l’électricité en France
La déréglementation du marché de l’électricité au sein de l’Union européenne a conduit à une segmentation des fonctions de production, de transport, de distribution et de fourniture d’électricité. La production, confiée à titre principal à EDF, a été ouverte à la concurrence. Pour des motifs de sécurité nationale et de continuité dans l’approvisionnement, le transport est resté un monopole, confié à RTE (Réseau de transport d’électricité), une filiale d’EDF. La fourniture a également été ouverte à la concurrence, sauf pour le tarif règlementé de vente ou le tarif de première nécessité. La gestion de la distribution est restée un service public local organisé par les collectivités territoriales.
Ce service est géré dans le cadre de contrats de concession entre ces collectivités et ERDF, filiale d’EDF, qui distribue 95% de l’énergie électrique.
Le cadre contractuel de la concession de distribution d’électricité de Marseille
Les relations de la ville avec ERDF sont régies par un contrat passé en 1994 pour 30 ans, dont le cahier des charges reprend les clauses du cahier des charges type de 1992. Ce contrat n’a jamais été modifié pour tenir compte des évolutions juridiques intervenues par exemple en 2000 et 2003 avec la loi SRU de solidarité et de renouvellement urbain et la loi sur l’urbanisme et l’habitat (modification des modalités de facturation des raccordements au réseau public d’électricité) ou en 2007 (décret relatif aux prescriptions techniques en matière de qualité des réseaux). La ville envisage cependant la passation d’un avenant pour prendre en compte ces évolutions.
En règle générale, aucune des parties ne ressent la nécessité d’une adaptation du cadre contractuel ou d’un renforcement de leurs obligations réciproques, en l’absence de perspective d’une remise en cause du cadre juridique actuel des concessions d’électricité et alors que l’échéance du contrat entre la ville de Marseille et ERDF est fixée à 2024.
Le patrimoine de la concession
Les ouvrages et installations composant le réseau de distribution de l’électricité appartiennent à la collectivité concédante. Il est donc utile qu’elle en connaisse la consistance. En 2010, la valeur brute comptable du patrimoine de la concession de la ville de Marseille s’est établie à environ 517 M€, la valeur nette à 274 M€ après amortissements. Le concessionnaire produit à la ville un inventaire technique et un inventaire comptable, qui n’ont toutefois pas la précision et la lisibilité d’un inventaire « âgé et à jour ».
En revanche, la chambre note que les biens de la concession ne sont pas enregistrés dans les comptes de la ville. Une régularisation est toutefois annoncée.
Tous les travaux sont réalisés sous maîtrise d’ouvrage d’ERDF. La ville n’exerce aucun contrôle sur la consistance réelle de ces travaux. Plusieurs projets d’investissement font toutefois l’objet d’une concertation entre ERDF, la ville et la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, et la ville demande, à l’occasion, des déplacements de réseau pour des motifs d’intérêt général.
Les aspects financiers de la concession
Les informations données à la ville par le concessionnaire sont peu précises et manquent d’homogénéité. Depuis 2003, les éléments fournis dans les comptes rendus d’acticité de la concession (les CRAC) sont établis par convention à partir de clés de répartition des principales charges, calculées au niveau national. Or les périmètres et les clés de répartition de ces charges sont assez mouvants. Une stabilisation de la présentation des données financières de la concession et une amélioration de leur précision apparaissent nécessaires.
Ce mode de calcul ne permet pas de faire apparaître un résultat au niveau de la concession. Le « résultat » de chaque concession est en effet déterminé, par convention, à travers une « contribution d’équilibre » (en produit ou en charge) permettant de répartir le résultat national d’ERDF au prorata du chiffre d’affaires de chaque concession.
La concession est à l’origine de recettes pour les collectivités. Outre la redevance de concession versée à la ville (287 000 € en 2010), le concessionnaire doit acquitter une redevance pour occupation du domaine public, qui est désormais due à la communauté urbaine MPM, compétente en matière de voirie. La ville de Marseille perçoit une taxe communale sur l’électricité, dont le produit a atteint 13,02 M€ en 2010. Recouvrée par le gestionnaire du réseau à l’occasion de la facturation aux consommateurs, cette taxe est calculée depuis 2010 en fonction de la quantité d’énergie consommée. Elle est fixée, à Marseille, au taux maximal depuis 1938. La ville exerce peu de contrôle sur les bases de cette taxe ; un simple contrôle de cohérence lui a toutefois permis de récupérer en 2011 près de 400 000 € de taxe non reversée en 2010 par un fournisseur alternatif.
La qualité de la desserte
La qualité de la distribution d’électricité est évaluée essentiellement en fonction de la fréquence et de la durée des coupures, ainsi que de la qualité de l’onde de la tension électrique. Elle tend à se détériorer au niveau national, tout en demeurant meilleure que dans les pays européens comparables, à l’exception de l’Allemagne. Il en est de même à Marseille, où la durée moyenne des coupures tend à augmenter, comme au niveau national. En 2010, près de 8% des clients marseillais ont subi des coupures de plus de 3 heures consécutives.
Le contrôle de l’activité du concessionnaire
Bien que ce contrôle incombe à la collectivité concédante, il est peu exercé en pratique du fait des caractéristiques de la concession : la ville ne participe pas à la maîtrise d’ouvrage ni au financement du patrimoine de la concession, l’ouverture à la concurrence n’est pas d’actualité et l’échéance du contrat (2024) est lointaine. Une meilleure information des élus devrait cependant être assurée à partir, notamment, des comptes rendu annuels d’activité de la concession