La communauté d’agglomération du pays de Gex, communément appelée « Pays de Gex agglo » est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) situé au nord-est du département de l'Ain. Elle est géographiquement très enclavée avec, au nord et à l’ouest, la frontière avec la Suisse, à l’est la chaîne montagneuse du Jura et au sud le « verrou » de Bellegarde. Le Pays de Gex est intégré au bassin de vie transfrontalier du Grand Genève composé du canton de Genève, du district de Nyon (canton de Vaud) et des huit EPCI membres du Pôle métropolitain du Genevois français.
D’une superficie de 405 km2, la communauté d’agglomération compte 100 314 habitants au 1er janvier 2020, soit une densité de plus du double de la région Auvergne Rhône Alpes ou du département de l’Ain. Du fait de la proximité de Genève, qui concentre les deux tiers des emplois de l’agglomération franco-suisse mais seulement un quart des logements, la croissance démographique du Pays de Gex est très forte. Ainsi, en moins de 30 ans, sa population a presque doublé. Pays de Gex agglo se classe au deuxième rang national des intercommunalités pour la croissance de la population, juste derrière la communauté de communes du Genevois.
Le Grand Genève constitue désormais la deuxième métropole de la région Auvergne Rhône-Alpes après Lyon et la deuxième force économique de Suisse, après Zurich.
Des enjeux de mobilité dans un territoire en forte hausse démographique
Depuis 2017, l’EPCI exerce les compétences relatives à l’organisation de la mobilité et à la voirie d’intérêt communautaire. L’exercice de ces compétences structurantes est donc relativement récent, d’autant que le changement de gouvernance et la crise sanitaire intervenues en 2020 ont pu retarder leur mise en œuvre.
L’augmentation de la population et du nombre de travailleurs frontaliers a notamment pour conséquence de générer d’importants flux de déplacements qui devraient encore s’accentuer (+ 30 % à l’horizon 2030) et placent la communauté d’agglomération devant des défis importants en termes d’aménagement du territoire et de mobilité.
A ce jour, 85 % des déplacements depuis le Pays de Gex vers la Suisse sont toujours effectués en voiture et, même si de réels progrès ont été récemment réalisés sur le réseau de transports en commun, l’offre reste inférieure au besoin et ne motive pas les habitants à abandonner l’usage de la voiture individuelle.
Pays de Gex agglo est donc face à des défis urgents et massifs pour, non seulement, absorber l’accroissement démographique important qui l’affecte mais aussi pour faire progresser l’usage des transports en commun et des mobilités douces et ainsi assurer la soutenabilité de son développement, tout en répondant aux objectifs de réduction des gaz à effet de serre qu’il s’est fixé, en cohérence avec ceux du Grand Genève.
En effet, les projets de mobilité de l’EPCI s’inscrivent dans un cadre qui dépasse son strict territoire : celui du Grand Genève. Dans ce cadre l’EPCI est candidat aux appels à projets initiés depuis 2007 par la Confédération helvétique. Ces projets, s’ils sont retenus, sont inscrits sous la dénomination de « mesures » dans un « projet d’agglomération » (PA) et chaque bassin de vie s’engage à mettre en œuvre ces mesures d’urbanisation, transport et aménagements paysagers en contrepartie d’un financement fédéral pour certaines mesures de transport.
De nombreux projets de mobilité non réalisés
Si de nombreux projets existent dans le domaine de la mobilité, ils peinent à être mis en œuvre, alors même que les infrastructures existantes sont déjà insuffisantes et que la pression démographique s’accentue.
Le Pays de Gex ne dispose que d’une seule gare, au sud du territoire, à Pougny, et demeure loin des corridors ferroviaires. L’achèvement du projet de prolongement du tramway à Ferney-Voltaire est attendu pour 2026 au plus tôt. La mise en service des bus à haut niveau de service (BHNS) n’est pas encore effective. Elle est attendue pour fin 2023 s’agissant de la ligne Gex-Ferney-Voltaire. D’importantes difficultés techniques affectant le lancement du projet du BHNS Saint-Genis-Pouilly-Meyrin, si bien qu’il ait peu probable que l’échéance de janvier 2026 puisse être tenue.
Le plan des mobilités douces de l’EPCI est obsolète et les itinéraires cycles et piétons sont encore peu développés malgré la récente mise en service de la partie « sud » de la liaison piétons-cycles Gex-Ferney (6km). Enfin, l’offre de parking relais (P+R) est quasi inexistante, Or, ces derniers constituent une condition indispensable à la réussite des projets de tramway et de BHNS en favorisant le report modal au profit des transports en commun.
Dans ces conditions la mise en service des infrastructures nécessaires risque d’être trop tardive au regard de la dynamique démographique observée et de l’augmentation en cours du trafic automobile (quinze nouvelles voitures mises sur les routes chaque jour).
De nombreux freins à la réalisation des projets de mobilité
Plusieurs facteurs sur lesquels il convient d’agir, peuvent expliquer le faible degré de réalisation des projets et les retards par rapport aux échéances annoncées :
• Pays de Gex agglo se singularise par son caractère multipolaire, avec quatre communes principales : Gex, Saint Genis-Pouilly, Ferney-Voltaire et Divonne-les-Bains. Dans ces conditions, l’EPCI rencontre des difficultés à prioriser les projets, occasionnant des retards, particulièrement pour ce qui concerne les parkings relais et les voies douces ;
• Les mesures présentées aux projets d’agglomération et les objectifs fixés dans les documents de planification de l’EPCI ne sont, pour la plupart, ni chiffrés, ni accompagnés d’échéances ;
• Les dépenses d’investissement consacrées à la mobilité représentent 9 % de l’effort total d’investissement de l’EPCI au cours de la période sous contrôle (4 M€ sur 45,4 M€) et paraissent insuffisantes. Au regard des considérables besoins d’investissement à court terme (tramway, P+R), Pays de Gex agglo va devoir mobiliser d’importantes ressources pour rattraper son retard d’investissement. L’EPCI doit rechercher dès à présent ces ressources mais également les moyens d’assurer la couverture des charges de fonctionnement des infrastructures de transports, y compris par de nouvelles ressources fiscales ou d’exploitation. Une réorientation prioritaire de la compensation financière genevoise au profit du financement de la mobilité doit également être étudiée ;
• Les difficultés et retards de planification sont accentués par les faibles ressources humaines consacrées par l’EPCI à la mobilité. L’EPCI doit impérativement anticiper les besoins d’ingénierie supplémentaires auxquels il devra recourir à brève échéance.
Pour pallier la diversité des acteurs et systèmes, le conseil communautaire a adopté en 2021 une charte politique relative à la création d’une autorité organisatrice de la mobilité unique (AOM) à l’échelle du Genevois français incarnée par le pôle métropolitain. Plusieurs facteurs sont venus freiner ce processus et la communauté d’agglomération n’est, à ce jour, à l’instar d’autres EPCI-membres, pas engagée dans le processus de transfert de sa compétence à l’AOM.
Or, la chambre estime que l’existence d’une AOM à l’échelle du bassin de mobilité présenterait des avantages certains en matière de gouvernance et de cohérence territoriale.
RECOMMANDATIONS
- Recommandation n° 1. Définir précisément les équipements, infrastructures et axes d’intervention relevant de l’intérêt communautaire afin de clarifier la répartition des compétences entre Pays de Gex agglo et ses communes membres, et de permettre un portage communautaire des actions prioritaires à mettre en œuvre au titre de la mobilité.
- Recommandation n° 2. Établir un plan de financement des mesures de mobilité incluant les besoins d’investissement mais aussi permettant d’assurer la couverture des frais de fonctionnement induits par l’augmentation du niveau de service et la mise en œuvre des futures infrastructures et équipements de transport.
- Recommandation n° 3. Affermir les projets présentés au titre des projets d’agglomération et les soumettre au vote préalable du conseil communautaire.
- Recommandation n° 4. Élaborer dans les meilleurs délais un plan de mobilité, conformément aux exigences règlementaires.