D’une manière générale, l’instruction a mis à jour une insuffisance de rigueur dans la gestion courante de l’établissement et une absence de vision prospective.
Un projet qui devait s’autofinancer
Aux termes de la convention de financement au titre du fonds européen de développement, « l’aquarium représentera un service public et en même temps une infrastructure touristique (…). Les revenus permettront une autosuffisance dès la cinquième année, permettant de donner une autonomie financière à l’Administration ». La chambre constate que cette perspective n’a pas été atteinte, ni même amorcée, et que les participations des membres statutaires représentent, en 2015, 56% des produits de fonctionnement et, en volume, un niveau équivalent à celui du premier exercice d’exploitation, soit 154 MF CFP contre 160 MF CFP.
Une activité qui s’essouffle
L’aquarium a accueilli 119 988 visiteurs payants en 2015 contre 107 196 en 2012, soit une augmentation de 12%. Le nombre d’entrées connait cependant un fléchissement en 2015 (‑1,3%). L’effet ouverture du parc constaté en 2014, avec une augmentation de 7,7% du nombre d’entrées, n’est pas confirmé en 2015. Les travaux liés aux malfaçons, qui devront être entrepris à brève échéance, affecteront la fréquentation et le chiffre d’affaires de l’établissement.
En 2015, les visiteurs locaux et les croisiéristes, principalement des australiens, représentent respectivement 45% et 28% des entrées. Les visiteurs locaux ne constituent plus, pour la première fois depuis l’ouverture de l’aquarium, la clientèle principale. Par ailleurs, l’établissement peine à valoriser le potentiel de développement que constituent les croisiéristes.
L’activité pédagogique de l’établissement connait un développement important illustré par le volume d’animations hebdomadaires qui est multiplié par quatre entre 2012 et 2015. Il est peu probable cependant qu’une augmentation du volume des animations puisse générer une augmentation sensible de la fréquentation.
L’aménagement du parc : un projet non maîtrisé
L’opération d’aménagement du parc aurait dû, en raison de son montant prévisionnel, donner lieu à une procédure formalisée conformément aux dispositions de la délibération n° 136/CP portant règlementation des marchés publics. De plus, une part importante de dépenses a été réalisée hors marchés. L’établissement a manqué aux obligations de transparence et de mise en concurrence, créant une insécurité juridique et un risque financier.
In fine, le coût des travaux et des aménagements, hors études et maîtrise d’œuvre, s’est élevé à 118,2 MF CFP contre une estimation initiale de 62,4 MF CFP, soit une augmentation de près de 90%. Par ailleurs, l’opération a été financée, pour partie, sur des crédits de fonctionnement ce qui a conduit à en brouiller la lisibilité.
La réalisation de ce projet, du fait d’une insuffisante préparation, a affecté l’équilibre budgétaire de l’établissement et généré des difficultés importantes de trésorerie.
Repenser le modèle de développement
L’établissement ne dispose pas de données statistiques fiables sur son activité et ne mesure pas le coût de ses missions. Ces constats conduisent la chambre à recommander à l’établissement de recenser de manière rigoureuse le nombre d’entrées, par type de clientèle, et de se doter d’outils de comptabilité analytique afin de disposer de données fiables pour la définition et l’évaluation de ses orientations.
La gestion de l’établissement ne comporte pas de dimension prospective. Ainsi, l’augmentation des tarifs au 1er janvier 2016 ne traduit pas une orientation stratégique, mais répond à la contrainte de restaurer la capacité d’autofinancement à la suite de l’opération d’aménagement du parc. Une première phase d’aménagement du parc a été réalisée sans qu’un projet d’ensemble et un calendrier ne soient définis. Par ailleurs, les éléments recueillis quant à la fréquentation de l’établissement par les différents types de clientèle ne font pas l’objet de mesures adaptées.
La chambre ne peut que recommander à l’établissement l’adoption d’un plan de développement à moyen terme qui définira les objectifs stratégiques, les actions à mettre en œuvre pour les atteindre, un calendrier de réalisation et des indicateurs de suivi et d’évaluation. Celui-ci devra définir le niveau soutenable de l’engagement financier des membres statutaires au regard de la réalisation des missions et des objectifs fixés et sera l’occasion d’examiner l’ensemble des modes de gestion envisageables.
Des pratiques qui affectent la fiabilité des comptes
Il ressort de l’examen des comptes que les écritures de transfert des immobilisations en cours ne sont pas réalisées de façon régulière, que les provisions pour dépréciation de créances et gros entretien ne sont pas constituées et que les amortissements ne sont pas inscrits pour leur totalité dès le budget primitif. Par ailleurs, le rattachement des produits et des charges à l’exercice n’est pas systématiquement effectué et des factures ne sont pas réglées dès leur réception. Ces pratiques affectent la sincérité des comptes et l’image fidèle de la réalité que ces derniers doivent traduire.
Restaurer l’autofinancement
L’épargne nette s’établit, après retraitement, à 5 MF CFP en 2015 contre 39,2 MF CFP en 2012, soit une diminution de 87%. Cette diminution traduit le différentiel d’évolution des dépenses et des recettes de fonctionnement, qui augmentent respectivement de 11,9% et de 0,5%, et la prise en compte à compter de 2014 du remboursement de l’annuité liée aux travaux d’aménagement du parc. Le taux d’épargne nette est de 1,7% en 2015 contre 14% en 2012. L’établissement a puisé dans son fonds de roulement, en 2014, pour financer l’aménagement du parc. Le fonds de roulement retraité s’établit à 16,8 MF CFP en 2015, soit 22 jours de fonctionnement, contre 53,7 MF CFP en 2012, soit 82 jours de fonctionnement. Cette situation a obéré la trésorerie de l’établissement qui a rencontré d’importantes difficultés pour le règlement de ses fournisseurs.
L’établissement devra, en conséquence, restaurer son autofinancement afin, d’une part, de conforter son fonds de roulement et sa trésorerie et, d’autre part, d’assurer le financement de son plan patrimonial et de son développement.
L’ordonnateur indique que « ce rapport met en exergue l’impérative nécessité de réformer le fonctionnement de l’établissement, en impliquant toutes les parties prenantes dans une réflexion portant sur une nouvelle gouvernance, un nouveau mode de gestion dans un nouveau cadre statutaire. Il est temps d’inscrire rapidement cette structure dans une perspective différente répondant aux ambitions affichées par les membres fondateurs et qui ont présidé à la création de cet outil touristique majeur pour le territoire ». Le président du gouvernement et la maire de Nouméa abondent en ce sens.