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COMMUNIQUE DE PRESSE
Le 3 mai 2024
ARRÊT N° S-2024-0723 « DEPARTEMENT DE LA
HAUTE-SAONE »
Le Procureur général avait renvoyé devant la Cour le président du conseil départemental de la
Haute-Saône. La compétence de la Cour pour juger cet élu local était fondée sur les disposifions de
l’arficle L.131-4 du code des juridicfions financières, selon lesquelles les présidents de conseils
départementaux sont jusficiables de la Cour des comptes lorsqu'ils ont engagé leur responsabilité
propre à l'occasion d'un ordre de réquisifion de l’agent comptable, et enfreint à cefte occasion les
disposifions de l'arficle
L. 131-12
du CJF sancfionnant l’octroi d’un avantage injusfifié accordé à autrui
ou à soi-même.
Une infracfion unique, fondée sur ledit arficle L.131-12, était ainsi retenue par la décision de
renvoi du procureur général, laquelle a été qualifiée par la Cour des comptes et a donné lieu au
prononcé d’une amende.
Au cas d’espèce la personne renvoyée avait, à l’occasion de la cessation de fonctions de sa
directrice de cabinet, signé un protocole transactionnel sur le fondement des articles 2044 et 2052 du
code civil, afin d’accorder à cette dernière une indemnité de 70 000
. La comptable publique a notifié
au président du conseil départemental le rejet de ce paiement en se fondant sur l’absence de
délibération approuvant la transaction, ainsi que sur l’insuffisance des éléments de liquidation de la
dépense. Un ordre de réquisition de l’agente comptable a été signé par la personne renvoyée, avec
émission d’un nouveau mandat, lequel fut également rejeté, et a donné lieu à un second ordre de
réquisition conduisant au paiement de l’indemnité transactionnelle.
En outre, que la préfète du département avait fait observer au président du conseil
départemental, d’une part que les conditions de mise en
œ
uvre des transactions au titre de l’article
2044 du code civil n’étaient pas ici réunies et d’autre part que nulle délibération de l’assemblée
délibérante ne l’avait autorisé à signer un protocole transactionnel avec son ancienne directrice de
cabinet.
La Cour a constaté ici la méconnaissance d’obligafions légales par la personne renvoyée, par
la signature d’un protocole transacfionnel en l’absence des condifions déterminées par l’arficle
2044
du code civil, qui exigent l’existence à la fois d’une contestafion née, ou à naître, et de concessions
réciproques et équilibrées par les parfies. Elle a jugé inopérant le moyen selon lequel une autorisafion
préalable de l’assemblée délibérante pour transiger n’avait pas à être demandée en raison de la liberté
de meftre fin aux foncfions d’un collaborateur de cabinet reconnue à l’arficle 110 de la loi du 26 janvier
1984. En effet, cefte liberté accordée aux élus locaux par le législateur est effecfive mais ne permet
pas de déroger au respect des procédures prévues par les textes lors de la fin de foncfions d’un
collaborateur de cabinet, ni de méconnaître les condifions exigées pour procéder à une transacfion.
La juridicfion a ainsi considéré que le premier élément de l’infracfion de l’arficle L.131-12,
relafif à la méconnaissance d’obligafions légales et réglementaires était consfitué.
Au vu des éléments du dossiers, notamment des sommes qui auraient pu être régulièrement
versées à la directrice de cabinet lors de sa cessation de fonctions, la Cour a ensuite constaté que le
versement à cette dernière d’une indemnité transactionnelle n’était pas justifié pour une partie égale
à 57 062,92
et que, par suite, le versement de cette somme constituait un avantage injustifié faisant
supporter un préjudice à la collectivité, au sens de l’article L.131-12 du CJF.
S’agissant enfin de l’existence d’un intérêt direct ou indirect lié à l’octroi de cet avantage
injustifié, la Juridiction a admis que l’existence d’un intérêt politique, même indirect, n’était pas
suffisamment avéré par les pièces du dossier. En revanche, la Cour a considéré que l’intérêt personnel
indirect du président du conseil départemental était établi par l’ancienneté de ses relations
professionnelles avec son ancienne directrice de cabinet, soit une quinzaine d’années, incluant la
période au cours de laquelle cette dernière a été son assistante parlementaire. En outre, leurs
relations professionnelles avaient perduré, chacun étant encore respectivement président et vice-
présidente d’une association locale constituée quelques semaines avant la fin de fonctions de la
directrice de cabinet.
IV - Les sancfions
Le président du conseil départemental renvoyé devant la Cour des comptes au fitre de l’arficle
L.131-12 du CJF a été condamné à une amende de 9 000 euros.
Pour la fixafion du quantum de l’amende, la Cour a retenu une circonstance aggravante car,
du fait de l’ancienneté de ses nombreux mandats d’élu local et de sénateur, il ne pouvait méconnaître
la portée d’une réquisifion de l’agente comptable, ainsi que des averfissements écrits de la préfète,
lesquels auraient dû le conduire à reconsidérer la licéité du protocole transacfionnel.
La Cour a décidé la publicafion intégrale de l’arrêt au
Journal officiel
de la République française.
Lire l’arrêt