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RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
ET SA RÉPONSE
COLLECTIVITE DE CORSE
L’action pour la prévention des risques et la
protection environnementale du littoral de la
Corse
Exercices 2018 et suivants
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés, a
été délibéré par la chambre le 26 septembre 2023.
COLLECTIVITE DE CORSE
2
TABLE DES MATIÈRES
TABLE DES MATIÈRES
..............................................................................................
2
SYNTHÈSE
......................................................................................................................
4
RECOMMANDATIONS
................................................................................................
5
RAPPELS DU DROIT
....................................................................................................
6
INTRODUCTION
...........................................................................................................
7
1
LES ENJEUX DU LITTORAL DE LA CORSE
.....................................................
8
1.1
Présentation du littoral
........................................................................................
8
1.2
La protection environnementale du littoral
......................................................
10
1.3
Les risques naturels littoraux
............................................................................
12
2
LES COMPETENCES DE LA COLLECTIVITE DE CORSE EN
MATIERE DE PROTECTION DU LITTORAL
...................................................
13
2.1
Une compétence environnementale élargie
......................................................
13
2.2
Des moyens financiers limités
..........................................................................
15
2.3
Les stratégies nationales en faveur du littoral
..................................................
18
2.3.1
La stratégie nationale intégrée de gestion du trait de côte
......................
18
2.3.2
La stratégie nationale de gestion du risque inondation
...........................
19
2.3.3
La stratégie nationale pour les aires protégées
........................................
19
2.4
Des stratégies régionales qui restent à préciser
................................................
20
2.4.1
Le plan d’aménagement et développement durable de la Corse en
cours d’évaluation
...................................................................................
20
2.4.2
Une straté
gie régionale de gestion de l’évolution du trait de côte
qui reste à finaliser
..................................................................................
22
2.4.3
Une stratégie régionale des espaces naturels protégés à élaborer
...........
23
2.5
Une répartition de compétences et une organisation à rationaliser
..................
24
2.5.1
Une gestion des espaces naturels sensibles qui reste partagée
................
24
2.5.2
Des modes de gestion divergents pour les réserves naturelles
................
26
2.5.3
Natura 2000
: le rôle de la collectivité de Corse et de l’OEC à
clarifier
....................................................................................................
27
2.6
Une gestion des espaces naturels littoraux à consolider
...................................
28
3
LA MISE EN ŒUVRE DE
LA PROTECTION DU LITTORAL
........................
30
3.1
Des documents de planification à renouveler
...................................................
30
3.2
Des instances de concertation à réunir régulièrement
......................................
31
3.3
L’évaluation et le suivi de la gestion à renforcer
.............................................
33
3.3.1
Des actions à mieux valoriser
..................................................................
33
COLLECTIVITE DE CORSE
3
3.3.2
Des outils de suivi et de pilotage à fiabiliser
...........................................
34
3.3.3
Une affectation de la taxe d’aménagement à justifier
.............................
35
3.4
Des progrès certains en matière de protection de l’environnement
.................
36
3.4.1
L’étang de Biguglia, l’exemple d’une protection renforcée en
milieu urbain
...........................................................................................
36
3.4.2
Les efforts en matière d’ouverture au public et de gestion de la
fréquentation
............................................................................................
37
4
LA POLITIQUE D’ACQUI
SITION FONCIERE AU TITRE DES
ESPACES NATURELS SENSIBLES
...................................................................
38
4.1
Une acquisition unique réalisée en
2018 dans un contexte d’incertitudes
.......
39
4.1.1
La procédure de préemption mise en œuvre
...........................................
39
4.1.2
Les caractéristiques de la parcelle de terrain
...........................................
40
4.1.3
L’acceptation du prix fixé par le propriétaire
..........................................
41
4.1.4
Les conditions juridiques et financières entourant
l’acquisition
.............
42
4.2
Un aménagement environnemental contraint jusqu’en 2026
...........................
45
4.2.1
L’existence d’un commerce de restauration en activité
..........................
45
4.2.2
Des mesures de gestion de la parcelle inexistante
...................................
47
4.2.3
La présence de constructions illégales
....................................................
48
4.2.4
Le refus de recouvrement des loyers dus par le locataire
.......................
50
4.2.5
Le défaut de paiement des charges de copropriété
..................................
51
4.3
La difficile transformation de la parcelle à compter de 2027
...........................
53
4.3.1
Une indemnisation obligatoire
du locataire si le bail n’est pas
renouvelé
.................................................................................................
53
4.3.2
Une destination définitive des constructions restant à définir
.................
54
4.3.3
Des difficultés prévisibles d’accessibilité pour le public
........................
54
ANNEXES
......................................................................................................................
58
Annexe n° 1.
La répartition des différents types de littoraux en Corse
................
59
Annexe n° 2. Les différents niveaux de protection des espaces naturels
...............
60
Annexe n° 3. Les espaces naturels protégés en Corse
............................................
62
Annexe n° 4. Précisions sur les aléas et risques naturels littoraux
.........................
63
Annexe n° 5. L’évolution du trait de côte en Corse
...............................................
64
Annexe n° 6. La population communale exposée à un risque
de submersion
marine
...............................................................................................................
65
Annexe n° 7.
La stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte
..............
66
Annexe n° 8.
Le PADDUC et la protection du trait de côte
.................................
68
Annexe n° 9.
Image satellite de la parcelle dont est propriétaire la
collectivité
de Corse sur l’île de Cavallo
.........................................................
70
Réponse de M. Gilles Simeoni, ordonnateur
COLLECTIVITE DE CORSE
4
SYNTHÈSE
La Corse compte plus de 1 000 km de littoral. Sa façade maritime accueille l
essentiel
du peuplement et des activités humaines de l
île. Elle constitue également un patrimoine naturel
remarquable ayant bénéficié très tôt d
une protection renforcée. La pression anthropique et les
risques naturels d
érosion ou de submersion, aggravés par le réchauffement climatique,
fragilisent aujourd
hui son intégrité. Dans ce contexte, la collectivité de Corse a vu ses
compétences environnementales s
accroître depuis 2018,
lui permettant de mettre en œuvre une
politique de gestion des risques et des espaces protégés littoraux.
Son action est toutefois
intervenue dans une période marquée par la fusion des deux départements et la mise en place
de la collectivité unique. Elle intervient également
dans un cadre stratégique national renouvelé
et plus exigeant.
Pour autant, les documents stratégiques régionaux accusent un retard certain. La
collectivité n
a pas arrêté ses orientations pour la gestion du trait de côte, ni défini sa politique
concernant les espaces naturels sensibles, notamment en matière d
acquisition foncière.
Par ailleurs, l
évolution de son champ d
action ne l
a pas conduite à réinterroger son
organisation avec l
office de l
environnement de la Corse, établissement public industriel et
commercial placé sous sa tutelle. La collectivité continue de gérer en propre la majeure partie
des acquisitions foncières réalisées sur le littoral. Elle a également conservé la gestion de la
réserve naturelle de Biguglia, en contradiction des choix opérés pour les six autres réserves de
l
île. Les modalités de répartition et d
exercice des compétences doivent donc être clarifiées et
rationnalisées. La collectivité doit également renforcer et mieux formaliser son contrôle sur son
office, afin de disposer d
une vision consolidée de sa politique en matière de gestion des risques
naturels et de protection des espaces naturels.
En qualité de gestionnaire d
espaces protégés, ses performances sont perfectibles. A
l
avenir, elle doit être plus attentive à la tenue régulière des instances de gestion et veiller à la
production des documents de suivi et d
informations réglementaires s
y rattachant. Enfin, la
collectivité de Corse doit se doter d
outils de pilotage opérationnels et fiabiliser son suivi
financier dans un contexte de ressources dédiées limitées.
Dans le cadre de sa mission de protection du littoral, la collectivité de Corse, depuis
2018, n
a procédé qu
à une seule acquisition foncière pour un montant de 2
M€
. Elle concerne
une parcelle sur l
île de Cavallo en Corse-du-Sud qui revêt, pour son exécutif, une dimension
symbolique et politique forte. La décision de préemption a été prise alors que la collectivité de
Corse ne disposait pas de l’ensemble des information
s matérielles et juridiques tenant à la
nature, la consistance, l
état et la légalité des constructions. En sus de la parcelle, celle-ci se
trouve propriétaire de constructions en partie illégales et bailleur d
un établissement
commercial. Sur le plan financier, elle va devoir faire face à des surcoûts qu
elle n
avait pas
anticipés. Ainsi, la remise en cause du bail avant son terme, prévu le 31 décembre 2026, ou sa
non-reconduction se fera au prix du paiement d
une indemnité d
éviction. En outre, la
collectivité ne s
est pas acquittée des charges de copropriété dont elle est redevable auprès de
l
association des copropriétaires de l
île de Cavallo et s
est refusée, jusqu
à présent, à percevoir
le loyer annuel que lui doit son locataire.
Cinq ans après son acquisition, la parcelle n
a fait l
objet d
aucun aménagement en lien
avec sa destination d
espace naturel sensible, pourtant fondement de la décision de préempter.
COLLECTIVITE DE CORSE
5
RECOMMANDATIONS
Mise en
œuvre
complète
Mise en
œuvre
partielle
Non mise
en œuvre
Refus de
mise en
œuvre
Devenue
sans objet
Page
Recommandation n° 1 :
Finaliser une
stratégie régionale de gestion intégrée du
trait de côte, comme le préconise l
article
L. 321-14 du code de l
environnement.
X
23
Recommandation
n° 2 :
Finaliser
le
schéma régional de gestion des espaces
naturels
sensibles
afin
de
préciser
l
étendue
de
la
compétence
de
la
collectivité de Corse dans ce domaine, sa
stratégie
et
ses
moyens
financiers
d
acquisition foncière et les objectifs
poursuivis en matière d
aménagement
des espaces protégés.
X
24
Recommandation
n° 3 :
Clarifier
les
rôles respectifs de la collectivité de Corse
et de l
office de l
environnement de la
Corse concernant la mise en œuvre des
dispositions de la loi n° 2022-217 du
21 février 2022 relatives aux sites Natura
2000 terrestres.
X
27
Recommandation n° 4 :
Renforcer le
contrôle des missions déléguées à l
office
de l
environnement de la Corse en
matière de gestion des espaces naturels
protégés avec un contrat d
objectifs et de
moyens fixant des objectifs précis et doté
d
indicateurs de suivi opérationnel.
X
29
Recommandation
n° 5 :
Fiabiliser
l
outil de relevé d
activité du service en
charge des espaces naturels sensibles,
afin de disposer de tableaux de bord et
d
indicateurs de suivi.
X
35
COLLECTIVITE DE CORSE
6
RAPPELS DU DROIT
Mise en
œuvre
complète
Mise en
œuvre
partielle
Non mise
en œuvre
Refus de
mise en
œuvre
Devenu
sans objet
Page
Rappel du droit n° 1 :
Pour les réserves
des bouches de Bonifacio et des îles
Cerbicale et de Scandola, établir des
conventions
avec
les
gestionnaires,
conformément à l
article L. 332-8 du
code de l
environnement.
X
26
Rappel du droit n° 2 :
Soumettre le
rapport annuel d
activité et de gestion de
l
office de l
environnement de la Corse à
l
approbation de l
Assemblée de Corse
sur la base du rapport de sa commission
de
contrôle,
conformément
aux
dispositions de l
article 18 quater des
statuts de l
office.
X
29
Rappel du droit n° 3 :
Disposer, pour
chaque réserve naturelle, d
un plan de
gestion
actualisé
et
approuvé
par
l
Assemblée de Corse, conformément
aux dispositions de l
article R. 332-60 du
code de l
environnement.
X
31
Rappel du droit n° 4 :
Fiabiliser le
bilan des recettes et des dépenses de la
part
départementale
de
la
taxe
d
aménagement devant être annexé aux
documents budgétaires, conformément
aux dispositions de l
article R. 113-8 du
code de l
urbanisme.
X
35
Rappel du droit n° 5 :
Procéder à
l’encaissement des loyers annuels dûs par
le locataire et au paiement des charges de
copropriété
conformément
aux
dispositions des articles 9 et 11 du contrat
de bail.
X
53
COLLECTIVITE DE CORSE
7
INTRODUCTION
La chambre a inscrit à son programme de travail pour l
année 2023 le contrôle des
comptes et de la gestion de la collectivité de Corse pour les exercices 2018 et suivants. Il porte
sur la thématique des enjeux environnementaux du littoral en termes de gestion des risques
naturels et de préservation de l
environnement.
Il s
inscrit dans le cadre d
une enquête interrégionale des juridictions financières portant
sur la prise en compte des risques et enjeux environnementaux dans l
aménagement du littoral
méditerranéen. Elle associe les chambres régionales des comptes
Corse, Occitanie et
Provence-Alpes-Côte-d
Azur.
Le contrôle a été notifié par lettre du 8 mars 2023 du président de la chambre
au président du conseil exécutif de Corse, M. Gilles Simeoni, ordonnateur en fonctiondurant
l
ensemble de la période sous revue.
L
entretien de fin de contrôle prévu par l
article L. 243-1 du code des juridictions
financière a eu lieu le 16 juin 2023 avec M. Simeoni.
Le rapport d
observations provisoires a été adressé le 20 juillet 2023 au président du
conseil exécutif de Corse qui en a accusé réception le 25 juillet 2023. Des extraits ont également
été transmis aux personnes nominativement ou explicitement mises en cause.
Le président du conseil exécutif de Corse a demandé, par courrier électronique
réceptionné à la chambre le 3 août 2023, un délai supplémentaire de deux semaines, en sus du
délai d’un mois prévu par le code des juridictions fi
nancières. Le Président de la chambre a fixé
le délai de réponse au 6 septembre 2023.
Après avoir analysé les réponses reçues, la chambre a arrêté, le 26 septembre 2023, ses
observations définitives. Elles ont été adressées le 28 septembre 2023 à M. Gilles Simeoni,
ordonnateur qui en a accusé réception le 6 octobre 2023. La réponse de M. Gilles Simeoni est
parvenue à la chambre le 6 novembre 2023 et est jointe au présent rapport.
COLLECTIVITE DE CORSE
8
1
LES ENJEUX DU LITTORAL DE LA CORSE
1.1
Présentation du littoral
La Corse possède un littoral de plus de 1 000 km, qui constitue un patrimoine écologique
et paysager remarquable.
La plaine orientale, située à l
Est de l
île, est une côte basse sableuse relativement
rectiligne et homogène. Elle s
étend sur une centaine de kilomètres de Bastia à Solenzara. Le
Nord et l
Ouest de l
île sont en revanche composés de côtes rocheuses granitiques entrecoupées
de plages ou d
anses sableuses
1
.
Définition du littoral
Au sens physique du terme, le littoral est la bande comprise entre le niveau des plus basses
mers et celui des plus hautes mers. En géographie humaine, c
est la bande de l
influence réciproque
des activités maritimes et terrestres.
En revanche, il n
existe pas de définition juridique du littoral. L
article L. 321-1 du code
de l
environnement le désigne comme une entité géographique qui appelle une politique spécifique
d
aménagement, de protection et de mise en valeur. L
article L. 321-1 du même code définit les
communes littorales comme celles riveraines des mers et des océans, des étangs salés, des plans
d
eau intérieurs d
une superficie supérieure à 1 000 hectares, des estuaires et des deltas lorsqu
elles
sont situées en aval de la limite de salure des eaux.
Le littoral de la Corse demeure relativement protégé puisque seulement 9 % du territoire
accueille des infrastructures et des aménagements contre 30 % en moyenne au plan national
2
.
Pour autant, il reste soumis à une forte anthropisation. Avec 350 00 habitants au
1
er
janvier 2022
3
, la Corse connaît une croissance démographique importante et continue
4
. Sa
population est à 80 % concentrée sur les communes du littoral, lesquelles offrent des espaces
disponibles sur une île au relief très marqué et connaissent, en retour, la plus forte progression
en termes d
artificialisation des terres. L
espace situé à moins d
un kilomètre du rivage
concentre 32 % de la tache urbaine régionale alors qu
il ne représente que 10 % de la superficie
de l
île.
1
Cf. annexe n° 1.
2
Source
: CEREMA (centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et
l’aménagement).
3
Source : INSEE.
4
Elle est en moyenne de 1 % par an selon l
INSEE, soit la croissance la plus dynamique des régions
métropolitaines (+ 0,3 % par an en moyenne nationale).
COLLECTIVITE DE CORSE
9
Carte n° 1 :
Consommation d
espace entre 2009 et 2021
Source : CEREMA (portail de l
artificialisation).
La bande côtière regroupe l
essentiel de l
activité économique. Cet espace accueille la
majorité des équipements touristiques (campings, hôtels, villages de vacances), secteur qui
représente près de 40 % du produit intérieur brut (PIB) régional
5
. Les activités du secteur
primaire sont également présentes à travers l
exploitation des ressources marines (pêche,
aquaculture) et la présence d
exploitations agricoles en bordure de littoral, notamment dans la
plaine orientale. Enfin, les ouvrages portuaires sont un maillon essentiel du lien entre la Corse
et le continent. Le transport maritime assure en effet la moitié du trafic de passagers et la
quasi-totalité de celui de fret.
Cette concentration des activités humaines multiplie également les pressions physiques,
chimiques
6
et biologiques exercées sur ce milieu fragilisé par l
artificialisation des terres.
L
attractivité de la zone littorale et la densité d
occupation croissante qui en découle emportent
une série de risques environnementaux
7
qui a justifié très tôt la mise en place d
un cadre de
protection renforcée.
5
Source : INSEE.
6
Plusieurs sites SEVESO (sites qui produisent ou stockent des substances dangereuses pour les
populations ou l’environnement)
sont situés sur le littoral insulaire.
7
Atteintes aux milieux naturels, aux paysages et à la biodiversité, destruction des protections dunaires,
pollutions diverses.
COLLECTIVITE DE CORSE
10
1.2
La protection environnementale du littoral
En Corse, une partie du littoral est identifiée comme « aire protégée ». D
après la
définition donnée par l
union internationale pour la conservation de la nature (UICN), reprise
par le ministère de la transition écologique, il s
agit « d
un espace géographique clairement
défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d
assurer à
long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs
culturelles qui lui sont associés.
»
Les statuts juridiques des espaces naturels protégés de la Corse, lesquels incluent
également les espaces littoraux, sont nombreux mais offrent des niveaux de protection
variables
8
.
Carte n° 2 :
Espaces de protection règlementaire et contractuelle en Corse
Source : INSEE.
8
Cf. annexe n° 2.
COLLECTIVITE DE CORSE
11
Des outils de protection règlementaire, qui recouvrent à la fois les réserves naturelles de
Corse, les réserves biologiques, les arrêtés de protection du biotope, encadrent strictement les
activités humaines. Ils offrent aux territoires concernés une protection forte
9
au sens de l
article
2 du décret n° 2022-527 du 12 avril 2022 pris en application de l
article L. 110-4 du code de
l
environnement. Ces espaces protègent 1 % du territoire terrestre insulaire
10
. En 2023, la Corse
compte sept réserves naturelles dont six concernent le littoral
11
ou l
espace maritime
12
.
Une protection contractuelle est également assurée au moyen de conventions conclues
avec le parc naturel régional de Corse (PNRC), le parc naturel marin du Cap Corse et des
Agriates ou les propriétaires de sites « Natura 2000 ».
Enfin, la sauvegarde du littoral peut s
opérer
via
la maîtrise du foncier grâce à l
action
du conservatoire du littoral, à celle du conservatoire d
espaces naturels de Corse ou bien par le
biais de la politique d
acquisition de la collectivité de Corse dans le cadre de sa compétence
spécifique en matière de gestion des espaces naturels sensibles.
Des engagements internationaux viennent plus ponctuellement renforcer ce dispositif :
sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l
UNESCO
13
, réserve de biosphère
14
, zones
humides de Ramsar, protocole de Barcelone
15
.
En marge de ces dispositifs, un inventaire du patrimoine naturel décrit et localise les
zones du territoire national particulièrement intéressantes sur les plans écologique, faunistique
et/ou floristique (ZNIEFF)
16
. La loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l
aménagement et la
mise en valeur du littoral, en identifiant des espaces remarquables
17
, offre également une
protection à certains territoires.
9
Est reconnue comme zone de protection forte une zone géographique dans laquelle les pressions
engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques sont
absentes, évitée
s, supprimées ou fortement limitées, et ce de manière pérenne, grâce à la mise en œuvre d’
une
protection foncière ou d
une réglementation adaptée, associée à un contrôle effectif des activités concernées.
10
Cf. annexe n° 3.
11
Réserves de Scandola
, des îles Cerbicale, de l’étang de Biguglia, de Tre Padule de Suartone, des îles
du Cap Corse. Seule la réserve du massif du Monte Rotondo n’a pas de façade littorale.
12
Réserve des bouches de Bonifacio.
13
Golfe de Porto.
14
Falasorma-Dui Sevi.
15
Pelagos, bouches de Bonifacio.
16
Article L. 411-
1 A du code de l’environnement.
17
Article L. 121-
3 du code de l’urbanisme.
COLLECTIVITE DE CORSE
12
1.3
Les risques naturels littoraux
Le littoral de la Corse subit trois phénomènes naturels qui affectent son intégrité et sa
préservation
18
.
L
érosion a comme conséquence visible la modification du trait de côte. Il s
agit d
un aléa
qui prend la forme d
un recul de la bande littorale
19
. La Corse est principalement exposée à ce
phénomène le long de la plaine orientale allant de Bastia à Solenzara
20
. Face à l
érosion, cette côte
sableuse est la plus vulnérable de l
île notamment sur certaines de ses portions. Pour autant, une
érosion est également à l
’œuvre sur le littoral rocheux de la Corse. Elle concerne toutefois des
territoires plus réduits, notamment les plages situées sur la côte Ouest.
Dans l
ensemble, la Corse demeure la région littorale française la plus stable en termes
d
érosion côtière avec seulement 7,2 % de son littoral qui est concerné par ce phénomène
21
.
En revanche, le littoral est davantage soumis au risque de submersion marine. Dans une
moindre mesure, il peut également subir des inondations par débordement de cours d
eau estuarien.
Le risque de submersion marine, s
il concerne également la plaine orientale, est toutefois
principalement identifié autour des communes d
Ajaccio et de Bastia
22
. Près de 5 % de la
population des communes littorales de Haute-Corse sont exposés à un risque de submersion marine
contre 3,7 % en Corse-du-Sud
23
.
Ces phénomènes naturels ont, entre eux, des effets amplificateurs. Ainsi, le recul du trait
de côte accroît le risque de submersion marine, cette dernière augmentant l
érosion du littoral. A
l
occasion de tempêtes, l
avancée de la mer et la force amplifiée de la houle perturbent
l
écoulement des cours d
eau majorant, par contrecoup, le risque d
inondation côtière.
Ces différents facteurs d
agression du littoral vont s
amplifier d
ici la fin du 21
ème
siècle
sous l
effet du changement climatique. Ainsi, le niveau moyen des mers devrait progressivement
s
élever
24
et les évènements climatiques violents devenir plus fréquents et plus intenses.
Dans ce contexte, l
action publique locale, dont la collectivité de Corse est le chef de file,
s
avère décisive pour mener à bien des politiques de prévention des risques naturels et de
protection des espaces naturels littoraux.
18
Cf. annexe n° 4.
19
Ce phénomène est également appelé régression du littoral. Inversement, une avancée des terres sur la
mer est dénommée accrétion du littoral.
20
Cf. annexe n° 5.
21
Source : CEREMA -
rapport relatif à l’analyse des effets du changement climatique en Corse –
Approche globale et indicateurs pertinents (Rapport final d’étude –
Mars 2021).
22
Cf. annexe n° 6.
23
Source : CEREMA - rapport relatif à l
analyse des effets du changement climatique en Corse
Approche globale et indicateurs pertinents (Rapport final d
étude
Mars 2021).
24
Selon la synthèse du sixième rapport d’évaluation du groupe intergouvernemental d’experts sur
l’évolut
ion du climat (GIEC) publiée le 20 mars 2023, l
élévation moyenne probable du niveau de la mer à l
échelle
mondiale d
ici 2100, par rapport à la période 1995-2014, se situe entre 0,28 et 0,55 m dans le scénario de très
faibles émissions de gaz à effet de serre (GES) et entre 0,63 et 1,01 m dans le scénario d
émissions de GES très
élevées.
COLLECTIVITE DE CORSE
13
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
La Corse compte plus de 1 000 km de littoral. La bande côtière regroupe l
essentiel du
peuplement et des activités économiques fortement liées aux ressources de la mer et au tourisme
balnéaire. Elle constitue également un patrimoine naturel et une réserve de biodiversité
remarquable ayant très tôt bénéficié d
une protection renforcée contre les pressions anthropiques
croissantes. La réserve naturelle de l
étang de Biguglia, enchâssée dans l
agglomération
bastiaise, est à ce titre emblématique.
L
espace littoral demeure fragile. A l
érosion naturelle du trait de côte, plus marqué sur
la partie orientale de l
île, s
ajoutent les risques d
inondations et de submersions marines que le
réchauffement climatique va rendre plus fréquents et plus intenses. Ces menaces justifient
aujourd
hui une action publique locale portée en premier lieu par la collectivité de Corse.
2
LES COMPETENCES DE LA COLLECTIVITE DE CORSE EN
MATIERE DE PROTECTION DU LITTORAL
2.1
Une compétence environnementale élargie
La collectivité de Corse dispose de compétences environnementales élargies lui
permettant de mettre en œuvre une politique de
gestion des risques naturels et de protection des
espaces naturels littoraux.
L
article L. 4424-35 du code général des collectivités territoriales (CGCT) précise que
«
Dans le cadre de la politique nationale de l
environnement, la collectivité de Corse définit
les actions qu
elle entend conduire pour la protection de l
environnement dans l
île et
détermine ses priorités en matière de développement local
». La compétence environnementale
intègre la protection des espaces naturels, la gestion de la ressource en eau, le plan de gestion
des déchets et les programmes de prospection, d
exploitation et de valorisation des ressources
énergétiques locales.
COLLECTIVITE DE CORSE
14
Depuis la loi sur la Corse du 22 janvier 2002, sur le fondement de l
article L. 332-2-3
du code de l
environnement, la collectivité de Corse est compétente pour la création des
réserves naturelles sur l
île dont elle peut attribuer la gestion à un organisme de son choix
25
. Il
existe sept réserves naturelles sur l
île, dont cinq ont été créées avant 2002
26
. La création des
réserves de Monte Rotondo et des îles du Cap Corse est intervenue en 2017
27
.
Depuis 2018
28
, la collectivité de Corse est également compétente, en lieu et place des
départements de Haute-Corse et de Corse-du-Sud, pour
élaborer et mettre en œuvre une
politique de protection, de gestion et d
ouverture au public des espaces naturels sensibles prévue
par l
article L. 113-8 du code de l
urbanisme.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la chambre, le président du conseil
exécutif de Corse
souligne que la mise en œuvre
de
ces nouvelles compétences s’inscrit
dans
«
un contexte de fusion d’une complexité sans équivalent
»
ouvrant
« une période de
transformation de
l’organisation, d’harmonisation des pratiques, de restructuration des
politiques publiques
afin d’assurer la continuité et la qualité du service public
(...)
»
.
Pour la conduite de sa politique de protection, la collectivité dispose d
un instrument
financier affecté, la part régionale de la taxe d
aménagement
29
, et d
outils juridiques renforcés :
la création de zones de préemption et l
instauration d
espaces boisés classés
30
.
Au titre des espaces naturels sensibles, la collectivité de Corse est propriétaire de
23 sites d
une surface totale de 5 662 hectares. Ces acquisitions s
ajoutent à celles réalisées par
le conservatoire du littoral et des rivages lacustres de Corse
31
, propriétaire de plus de 20 000 ha
terrestres
32
.
25
Article R. 332-
59 du code de l’environnement.
26
Réserve de Scandola (1975), réserves des bouches de Bonifacio et des îles Cerbicale (1999), réserve de
l’étang de Biguglia (1994), réserve de Tre Padule de Suartone (2000).
27
Par décrets du 28 mars 2017 et du 22 septembre 2017.
28
Article L. 4424-1-A issu de l
ordonnance n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 : « La collectivité de
Corse exerce de plein droit les compétences que les lois, dans leurs dispositions non contraires au présent titre,
attribuent aux départements et aux régions ».
29
Article L. 113-10 du code de l
urbanisme : «
Pour mettre en œuvre la politique prévue à
l
article L. 113-8, le département (la collectivité de Corse) peut instituer une part départementale de la taxe
d
aménagement destinée à financer les espaces naturels sensibles, dans les conditions définies à
l
article L. 331-3 ».
30
Articles L. 113-11
et suivants du code de l’urbanisme.
31
Article L. 322-1 du code de l
environnement : « Le Conservatoire de l
espace littoral et des rivages
lacustres est un établissement public de l
Etat à caractère administratif qui a pour mission de mener, après avis des
conseils municipaux et en partenariat avec les collectivités territoriales intéressés, une politique foncière ayant
pour objets la sauvegarde du littoral, le respect des équilibres écologiques et la préservation des sites naturels ainsi
que celle des biens culturels qui s
y rapportent ».
32
Auxquels s’ajoutent 448 ha de domaine public maritime.
COLLECTIVITE DE CORSE
15
Carte n° 3 :
Répartition des espaces naturels sensibles de la Corse
Source : collectivité de Corse.
Enfin, la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 a transféré à la collectivité de Corse, au
1
er
janvier 2023, en qualité de cheffe de file en matière de biodiversité, la compétence pour
désigner les comités de pilotage et approuver le document d
objectifs des sites Natura 2000
terrestres
33
. La collectivité prend ainsi le relais de l
Etat, qui reste compétent pour les sites
maritimes.
A ce jour, la Corse compte 92 sites Natura 2000, dont 71 sites terrestres, 17 sites
majoritairement marins et quatre sites exclusivement marins.
2.2
Des moyens financiers limités
En 2022, selon la présentation budgétaire par fonction, les dépenses en faveur de
l
environnement de la collectivité de Corse se sont élevées à 68,7
M€, soit 4,6 % de
s dépenses
réelles et mixtes du budget exécuté. Près d
un tiers d
entre elles concernait le financement de
l
office de l
environnement de la Corse (OEC) au moyen du versement d
une dotation de
fonctionnement et d
équipement
(23,8 M€).
33
Cf. annexe n° 2.
COLLECTIVITE DE CORSE
16
Tableau n° 1 :
Dépenses de la collectivité de Corse pour la fonction « environnement » en 2022
(en M
€)
Dépenses réelles
Fonction
« environnement »
Part des dépenses
« environnement »
et mixtes totales
Investissement
386,0
32,8
8,5 %
Fonctionnement
1 111,6
35,9
3,2 %
Dont dotation OEC
22,3
Total
1 497,6
68,7
4,6 %
Source : chambre régionale des comptes à partir des données du compte administratif 2022.
Cette présentation par fonction se décompose en divers articles, en fonctionnement et
en investissement : les services communs, les politiques de l
eau et de l
énergie, la préservation
du patrimoine naturel et la gestion des risques technologiques, les infrastructures de
transport-environnement et les autres interventions.
Les dépenses en faveur de la prévention des risques et de la protection des espaces
naturels ont été évaluées par la chambre sur la base des seules charges ventilées sur les articles
fonctionnels 9376/9076 « préservation du patrimoine naturel, risques technologiques » et
9378/9078 « autres actions », lesquels regroupent également la lutte vectorielle et la gestion des
espaces et sites de pleine nature. Les articles fonctionnels relatifs à la « lutte contre les
inondations » (93735/90735) ne comportent aucune dépense ni recette sur la période.
La chambre relève que la majorité des dépenses en faveur de l
environnement ne sont
pas ventilées entre les politiques mais comptabilisées en « services communs ».
Par ailleurs, la fiabilité des données des articles fonctionnels précités
34
n
est pas garantie
compte tenu des fortes variations annuelles constatées, notamment en matière de dépenses de
personnel. Ces dernières s
établissent à 4,1
M€ en 2018
contre seulement 2,7
M€ en 202
2, sans
que les effectifs n
aient évolué de manière significative. Le budget primitif 2023 ne prévoit
aucune dépense de personnel pour les deux articles fonctionnels concernés. Enfin, les dépenses
d
investissement en 2018 ne comportent pas la seule acquisition réalisée par voie de préemption
d
un terrain sur l
île de Cavallo
pour un montant de 2 M€
au titre de la compétence concernant
les espaces naturels sensibles (voir chapitre 4).
Sous réserve de ces insuffisances méthodologiques, les dépenses de fonctionnement
sont évaluées en moyenne à 6,3
M€ par an entre 2018 et 2022
; elles sont en recul de près de
35 % sur la période.
Plus de 50 % d
entre elles étaient des charges de personnel. En 2022, 17 % des dépenses
concernaient le versement de participations ou d
’aides en fonctionnement (0,9 M€)
à d
autres
opérateurs, notamment la commune de Belgodère et les syndicats mixtes ELISA, « Conca
d
Oro, ainsi que celui des « îles sanguinaires et de la pointe de la Parata », dont la collectivité
de Corse est membre, et qui sont en charge de l
entretien de parcelles de terrain pour le compte
du conservatoire du littoral et labellisés « Grands Sites ».
34
9376/9076 et 9378/9078.
COLLECTIVITE DE CORSE
17
Tableau n° 2 :
Recettes et dépenses de fonctionnement et d
investissement des articles fonctionnels
9376/9076 « préservation du patrimoine naturel, risques technologiques » et 9378/9078
« autres actions » entre 2018 et 2022
(en €)
2018
2019
2020
2021
2022
Total
Fonctionnement
9376 - Préservation
patrimoine naturel,
risques technologiques
5 716 583
5 266 015
4 780 416
4 236 141
3 949 131
23 948 286
9378 - Autres actions
2 186 217
1 089 640
1 343 094
1 621 949
1 227 075
7 467 975
Sous total
7 902 800
6 355 655
6 123 510
5 858 090
5 176 206
31 416 261
Dont dépenses de
personnel (C/641)
4 054 153
3 560 278
3 272 906
2 944 879
2 659 135
16 491 351
Investissement
9076 - Préservation
patrimoine naturel,
risques technologiques
374 853
427 271
255 453
304 852
419 509
1 781 938
9078 - Autres actions
2 287 641
1 172 230
845 020
1 690 061
1 212 649
7 207 601
Sous total
2 662 494
1 599 501
1 100 473
1 994 913
1 632 158
8 989 539
Total
10 565 294
7 955 156
7 223 983
7 853 003
6 808 364
40 405 800
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes administratifs.
Les dépenses d
investissement cumulées se sont élevées
à 9 M€
, soit une moyenne
annuelle de 1,8
M€.
En 2022, les subventions aux partenaires extérieurs ont été de 522
000 €.
En 2022, le total des dépenses, de 6,8 M€, représentait 0,5% des dépenses réelles de la
collectivité de Corse.
Les ressources proviennent à près de 95 % de la part départementale de la taxe
d
aménagement prévue par l
article L. 331-3 du code de l
urbanisme
35
, pour un taux de 2,1 %
36
affecté au financement aux espaces naturels sensibles
37
. Son produit a progressé de 37 % en
cinq ans. Les autres recettes sont modestes. Elle se composent du produit de la taxe sur le
transport maritime de passagers à destination des espaces naturels protégés dite « taxe
Barnier »
38
, des conventions d
occupations temporaires d
usage agricole, des conventions de
lutte vectorielle, des locations de gîtes et des financements ponctuels sur certains programmes
nationaux ou européens (Feder).
35
La part départementale de la taxe d
aménagement prévue aux articles 1635 quater A et suivants du code
général des impôts est instituée en vue de financer :1° La politique de protection des espaces naturels sensibles
(..).
36
Article L. 331-17 du code de l
urbanisme.
37
Une part additionnelle de la taxe d
aménagement (0,4 %) est également perçue et reversée aux conseils
d
architecture, d
urbanisme et d
environnement (CAUE). Conformément aux dispositions de l
article L.
331-17
du code de l
urbanisme, la collectivité a délibéré chaque année sur une clef de répartition entre le financement de
la politique de protection des espaces naturels sensibles (2,1 %) et les CAUE (0,4 %) pour un taux plafond global
de 2,5 %.
38
Elle concerne essentiellement l
activité de transport de passagers dans le secteur des Agriates.
COLLECTIVITE DE CORSE
18
Tableau n° 3 :
Recettes (fonctionnement et investissement) des articles fonctionnels 9376/9076
« préservation du patrimoine naturel, risques technologiques » et 9378/9078 « autres actions » entre
2018 et 2022
(en €)
Recettes
2018
2019
2020
2021
2022
Total
Taxe
d
aménagement
5 059 279
4 762 961
4 119 746
5 422 011
6 816 327
26 180 324
Autres
participations
163 728
20 752
79 742
6 109
179 775
450 106
Taxe Barnier
55 091
58 956
44 081
105 708
263 836
COTUA
63 031
84 258
19 931
51 462
144 311
362 993
Autres
prestations
13 170
13 170
Location de
gîtes
22 973
28 713
1 651
12 060
69 870
135 267
Total
5 364 102
4 955 640
4 265 151
5 491 642
7 329 161
27 405 696
Résultat
- 5 201 192
- 2 999 516
- 2 958 832
- 2 361 361
520 797
- 13 000 104
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes administratifs.
Sur la période, la collectivité de Corse
a donc financé 40,4 M€ de dépenses en
bénéficiant de
ressources propres de 27,4 M€.
2.3
Les stratégies nationales en faveur du littoral
2.3.1
La stratégie nationale intégrée de gestion du trait de côte
Une « stratégie nationale intégrée de gestion du trait de côte » a été adoptée en 2012
39
.
Intitulée « Vers la relocalisation des activités et des biens », elle repose, dans sa version
actualisée en 2019, sur neuf principes communs et autant de recommandations stratégiques
40
.
Cette stratégie s
appuie sur le constat que le trait de côte est naturellement mobile et
qu
il faut donc éviter de mettre en place une défense systématique contre la mer. Une adaptation
raisonnée pour la protection et la recomposition spatiale du littoral doit être privilégiée. Pour ce
motif, la relocalisation des activités, des biens et des usages est préconisée comme alternative
à la fixation du trait de côte. Les opérations de protection qui artificialisent fortement ce dernier
doivent être réservées aux seules zones à forts enjeux en évaluant les alternatives et en les
concevant de façon à permettre à plus long terme un déplacement des activités et des biens.
La stratégie nationale a été complétée par deux programmes d
actions portant sur les
périodes 2012-2015 puis 2017-2019.
39
Prévue par l’article L. 321
-
13 A du code de l’environnement, cette stratégie devrait faire l’objet d’une
révision en 2023.
40
Cf. annexe n° 7.
COLLECTIVITE DE CORSE
19
2.3.2
La stratégie nationale de gestion du risque inondation
Une « stratégie nationale de gestion des risques d
inondation » a été adoptée en 2014.
Elle se fixe trois objectifs prioritaires : augmenter la sécurité des populations exposées ;
stabiliser à court terme et réduire à moyen terme le coût des dommages liés aux inondations ;
raccourcir fortement le retour à la normale des territoires sinistrés.
Cette stratégie prend en compte le risque de submersion marine, assimilé à un risque
d
inondation. A ce titre, les quatre orientations stratégiques retenues lui sont applicables
41
.
La stratégie nationale donne lieu à l
élaboration par l
Etat de plans de gestion des risques
d
inondation (PGRI) pour chaque grand bassin hydrographique. En outre, elle a vocation à être
déclinée par des stratégies locales.
Le plan de gestion des risques d
inondation du bassin de Corse
Un plan de gestion des risques d
inondation (PGRI) concernant le bassin de Corse a été
arrêté par le préfet de Corse pour les périodes 2016-2021 puis 2022-2027.
Le PGRI 2022-2027 prévoit une meilleure prise en compte du risque de submersion
marine avec, en cas de besoin, l
élaboration de plans de prévention des risques littoraux qui
concernent l
ensemble des aléas et risques littoraux (érosion littorale ; submersion marine ;
débordement de cours d
eau estuarien). Jusqu
en 2023, aucun plan de ce type n
a été adopté en
Corse
42
.
Depuis 2013, trois territoires à risques importants d
inondation (TRI) ont été identifiés
comme présentant une exposition à la submersion marine. Il s
agit des TRI d
Ajaccio, du grand
Bastia (communes de Bastia, de Ville-di-Pietrabugno et de Furiani) et de la Marana (communes
de Borgo, de Biguglia et de Lucciana). Chacun de ces territoires dispose d
une stratégie locale
de gestion du risque inondation.
2.3.3
La stratégie nationale pour les aires protégées
L
article 23 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise
en œuvre du Grenelle de l’
environnement a défini une stratégie nationale de création des aires
protégées visant notamment à placer 2 % du territoire terrestre métropolitain sous protection
forte à l
horizon 2019.
41
A savoir
: développer la gouvernance et les maîtrises d’ouvrages
; aménager durablement les
territoires ; mieux savoir pour mieux agir ; apprendre à vivre avec les inondations.
42
Le PGRI 2022-2027 indique que les études sur les niveaux marins extrêmes doivent permettre de
déterminer si l’élaboration de
plans de prévention des risques littoraux
s’avère nécessair
e.
COLLECTIVITE DE CORSE
20
L
article 110-4 du code de l
environnement, issu de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021
portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience, est venu
renforcer cet objectif. La nouvelle « stratégie nationale pour les aires protégées » se fixe comme
objectif, à l
horizon 2030, de couvrir, par un réseau cohérent d
aires protégées en métropole et
en outre-mer, sur terre et en mer, au moins 30 % de l
ensemble du territoire. Ce réseau vise
également la mise sous protection forte d
au moins 10 % de l
ensemble du territoire national et
des espaces maritimes
. Ces objectifs contribuent à la mise en œuvre progressive
de la stratégie
nationale pour la biodiversité à l
horizon 2030.
2.4
Des stratégies régionales qui restent à préciser
2.4.1
Le plan d
aménagement et développement durable de la Corse en cours
d
évaluation
Les orientations en matière de risques naturels
Les mesures et actions conduites par la collectivité de Corse en matière de gestion des
risques naturels et de protection des espaces naturels littoraux s
inscrivent dans les
préconisations du plan d
aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC)
adopté par l
Assemblée de Corse le 2 octobre 2015.
Le plan d
aménagement et de développement durable de la Corse
Selon l
article L. 4424-9 du CGCT, la collectivité de Corse élabore un plan
d
aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) qui présente une stratégie
de développement durable du territoire en fixant les objectifs de la préservation de
l
environnement de l
île et de son développement économique, social, culturel et touristique,
qui garantit l
équilibre territorial. Le plan fixe les orientations fondamentales en matière de
protection et de mise en valeur du territoire
43
. Il prend également en compte les risques naturels,
sanitaires et technologiques. Il constitue le cadre de référence pour les documents de
planification qui doivent s
y conformer
44
.
43
Le PADDUC vaut schéma régional de cohérence écologique (SRCE) et schéma régional
d
aménagement, de développement durable et d
égalité des territoires (SRADDET).
44
Tel est le cas pour les plans locaux d’urbanisme (PLU), les schémas de cohérence territ
oriale (SCOT),
les plans climat-air-
énergie territoriaux (PCAET), les schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) et
les plans de déplacement urbain (PDU).
COLLECTIVITE DE CORSE
21
L
orientation stratégique n° 13-2 figurant dans le plan d
aménagement et de
développement durable (PADD) du PADDUC vise à prendre en compte les risques littoraux et
à gérer le trait de côte. Le document fait le constat de l
absence de plan de prévention des risques
littoraux pour les départements de Haute-Corse et de Corse-du-Sud. Dans l
attente de
l
élaboration d
une stratégie intégrée du trait de côte, un seul objectif opérationnel est énoncé :
poursuivre l
action du réseau d
observation du littoral de la Corse complété par le programme
« tempête » fin de mesurer leur impact sur le trait de côte et d
évaluer le risque de submersion.
Le risque inondation n
est que brièvement évoqué à l
orientation n° 12-2, renvoyant les
collectivités à une contractualisation avec l
Etat.
En complément de cet objectif opérationnel, le PADDUC prescrit quatre actions à mener
d
ici 2020 pour répondre aux aléas et risques littoraux : pérenniser le financement des études
liées à la prévention ; développer une stratégie partagée entre les acteurs publics et créer un
outil d
aide à la décision ; évoluer vers une doctrine de recomposition spatiale du territoire
lorsque la relocalisation des activités et des biens est inéluctable compte tenu du risque
encouru ; préciser les modalités d
intervention financière des acteurs publics et privés
concernés.
Par ailleurs, dans l
attente d
une stratégie régionale de gestion du trait de côte, le
PADDUC définit six principes dont quatre concernent la préservation du trait de côte
45
.
Les orientations en matière de protection environnementale
En matière de protection des espaces naturels littoraux, le PADDUC fait le constat que
le littoral de la Corse, lequel est soumis aux pressions liées à l
urbanisation et au tourisme,
bénéficie d
une protection environnementale importante mais de nature et d
intensité variable.
Le PADD se fixe pour objectifs, dans son orientation n° 12.1
46
, de protéger les espaces
nécessaires au maintien de la biodiversité et les équilibres biologiques et d
améliorer la gestion
des espaces protégés et notamment la fréquentation du public. L
orientation n° 13 vise
également à promouvoir une gestion intégrée des zones côtières
47
.
Pour ce faire, le PADD propose un zonage des territoires selon l
usage dédié. En sus
des protections réglementaires, contractuelles ou garanties par la loi littoral, il identifie des
espaces supplémentaires appelés « espaces stratégiques environnementaux » dont la vocation
est d
assurer la continuité écologique et la préservation de la biodiversité. Le schéma de mise
en valeur de la mer (SMVM), qui constitue l
annexe 6 du PADDUC, décline, en conformité
avec les orientations du PADD, les zonages du littoral par vocation, selon que celle-ci soit
exclusive (naturelle, agricole, pêche, plaisance) ou partagée.
Toutefois, le PADDUC ne fixe aucun objectif chiffré. Le seul indicateur en lien avec la
protection du littoral mesure le taux d
artificialisation du linéaire côtier, sans toutefois fournir
de valeur de départ. En matière de protection, le document évoque simplement la nécessité
d
augmenter la part du territoire bénéficiant d
une protection intégrale.
45
Cf. annexe n° 8.
46
Orientation ainsi libellée : préserver la biodiversité et le patrimoine naturel remarquable pour
transmettre la beauté et la richesse écologique de l’île aux générations futures.
47
Orientation n° 13.1 : assurer la préservation des équilibres biologiques et écologiques, des sites et
paysages du patrimoine côtier ; orientation n° 13.3 : développer les activités de façon intégrée, dans le souci de la
préservation de l
environnement et de l
accès du public à la mer.
COLLECTIVITE DE CORSE
22
Le PADDUC est aujourd
hui daté et doit faire l
objet d
une actualisation au regard des
obligations légales et réglementaires intervenues depuis son adoption. L
article L. 4424-14 du
CGCT dispose qu
à «
l
expiration d
un délai de six ans à compter de la date d
approbation du
plan d
aménagement et de développement durable, le conseil exécutif procède à une analyse
globale des résultats de son application notamment du point de vue de l
environnement
». Le
PADDUC ayant été adopté le 2 octobre 2015, l
analyse globale de ses résultats devait intervenir
fin 2021. Par délibération de l
Assemblée de Corse du 25 septembre 2020, l
agence de l
énergie
et de l
urbanisme (AUE)
48
a été chargée d
élaborer une proposition méthodologique visant à
établir les modalités de cette analyse globale. Le document, produit au premier semestre 2021,
a été validée par l
Assemblée de Corse en novembre 2021. Toutefois, aucune évaluation globale
du PADDUC, préalable nécessaire à son éventuelle révision, n
a été présentée à ce jour à
l
Assemblée de Corse.
2.4.2
Une stratégie régionale de gestion de l
évolution du trait de côte qui reste à
finaliser
L
Assemblée de Corse a adopté le 19 décembre 2019, sur la base d
un rapport technique
élaboré par l
OEC, une délibération approuvant les grandes orientations et la méthodologie pour
l
élaboration d
une stratégie territoriale de gestion intégrée du trait de côte.
Le rapport formule des principes et des recommandations spécifiques à la Corse. Il les
articule autour de huit axes qui sont cohérents avec les prescriptions de la stratégie nationale
intégrée de gestion du trait de côte. Ces axes sont notamment censés permettre une transition
entre la stratégie régionale à élaborer et les futures stratégies locales qui auront une vocation
opérationnelle.
Sur un plan pratique, le rapport de l
OEC propose de classer les espaces littoraux en
trois typologies : espaces naturels, espaces à enjeux diffus et/ou déplaçables ou espaces
urbanisés. Pour chacune d
elles, un degré d
exposition au recul du trait de côte sert à déterminer
un niveau d
aléa défini selon deux options possibles
49
. Lorsque celui-ci est modéré à fort,
l
espace est qualifié de prioritaire. Cette méthodologie aboutit,
in fine
, à classer les espaces
littoraux en six catégories distinctes
50
. Pour chacune d
entre elles, un mode de gestion est à
privilégier.
Sur la base de ce rapport, une cartographie de la sensibilité de la côte a été élaborée
51
afin de définir des zones prioritaires en termes d
a
ctions à mettre en œuvre.
Pour autant, la collectivité de Corse n
a toujours pas défini ses objectifs de moyen et de
long terme en matière de gestion du trait de côte en conformité avec la stratégie nationale,
comme le préconise pourtant l
article L.321-14 du code de l
environnement.
48
Etablissement public industriel et commercial,
l
AUE est chargée par la collectivité de Corse de définir
et mettre
en œuvre, avec les acteurs du territoire, les politiques publiques dans les domaines de l’
énergie, de la
qualité de l
air et de lutte et d
adaptation au réchauffement climatique.
49
Aléa faible et aléa modéré à fort.
50
Espaces naturels et espaces naturels prioritaires ; espaces à enjeux diffus et/ou déplaçables et espaces à
enjeux diffus et/ou déplaçables prioritaires ; espaces urbanisés et espaces urbanisés prioritaires.
51
En collaboration avec le bureau de recherche géologique et minière (BRGM).
COLLECTIVITE DE CORSE
23
Selon ces dispositions, une telle stratégie permettrait d
«
anticiper et de gérer les
évolutions du trait de côte, portant notamment sur les mesures d
amélioration des
connaissances, de préservation et de restauration des espaces naturels ainsi que de prévention
et d
information des populations
». Elle déterminerait également «
les modalités d
un partage
équilibré et durable de la ressource sédimentaire.
»
Recommandation n° 1.
:
Finaliser une stratégie régionale de gestion intégrée du trait de
côte, comme le préconise l
article L. 321-14 du code de l
environnement.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la chambre, le président du conseil
exécutif de Corse s’engage à soumettre la stratégie territoriale du trait de côte à l’Assemblée de
Corse au cours du premier semestre 2024.
2.4.3
Une stratégie régionale des espaces naturels protégés à élaborer
En matière de protection des espaces naturels littoraux, et en dehors du cadre normatif
fixé par le PADDUC, la collectivité de Corse, depuis 2018, n
a pas formalisé ses orientations
stratégiques.
Contrairement aux dispositions de l
article L. 110-3 du code de l
environnement, la
collectivité n
a pas élaboré de stratégie régionale pour la biodiversité, déclinaison régionale des
objectifs nationaux. Le comité territorial de la biodiversité de Corse, désigné par délibération
de l
Assemblée de Corse du 26 octobre 2017, et qui doit être, selon l
article D. 134-41 du code
de l
environnement, associé à l
’élaboration et la mise en œuvre de cette stratégie
52
, ne s
est pas
réuni depuis 2020. Seule une première réunion de la commission des aires protégées du comité
territorial de la biodiversité, intervenue en février 2023, a été consacrée à l
élaboration d
une
stratégie territoriale des aires protégées pour 2024-2026.
De même, en matière de gestion des espaces naturels sensibles, la collectivité n
a jamais
précisé l
étendue de sa compétence en fonction de ses caractéristiques territoriales et des
priorités politiques de protection qu
elle se fixe. A ce jour, son action s
appuie sur la seule
délibération de l
ex conseil départemental de Corse-du-Sud du 6 juin 2017. Cette dernière
définit des orientations pour les espaces menacés ou vulnérables présentant un fort intérêt
écologique, paysager, social contribuant à l
identité patrimoniale, paysagère et culturelle du
territoire. Ces dispositions n
ont jamais été précisées depuis 2018 ni étendues au territoire de la
Haute-Corse.
52
Il est également associé
à l’élaboration et à la révision du PADDUC. En particulier, il s’assure de la
prise en compte des orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités
écologiques, ai
nsi que des éléments pertinents du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE).
COLLECTIVITE DE CORSE
24
Il en est de même pour le zonage de parcelles préemptées sur la base des articles
L. 113-8 et L. 215-1 du code de l
urbanisme, qui représentent 16 603 ha
53
de terrains
appartenant à la collectivité de Corse. L
acquisition la plus récente date de 2017, soit
antérieurement à la prise de compétence de la collectivité de Corse. Par ailleurs, la seule
acquisition réalisée depuis 2018, sur l
île de Cavallo, appelle de nombreuses observations de
gestion (Cf. chapitre 4).
Si les travaux d
élaboration d
un schéma territorial des espaces naturels ont débuté en
2020 puis ont été relancés en juin 2022, ceux-ci ne sont toujours pas achevés à la date de
parution du présent rapport. Un comité de pilotage regroupant les élus de la collectivité de
Corse, les représentants de la chambre des territoires et des associations des maires et des
présidents d'établissements publics de coopération intercommunale de Corse-du-Sud et de
Haute-
Corse ainsi qu’un comité technique
réunissant la collectivité de Corse, ses offices et
agences, le parc naturel régional de Corse (PNRC), l'Etat et des associations environnementales
se réunissent régulièrement depuis 2022.
La chambre recommande à la collectivité de Corse de finaliser le schéma territorial de
gestion des espaces naturels afin de préciser l
étendue de sa compétence en matière d
espaces
naturels sensibles, sa stratégie et ses moyens financiers d
acquisition foncière et les objectifs
poursuivis en matière d
aménagement. Ces derniers devront par ailleurs être coordonnés avec
la politique d
acquisition conduite par le conservatoire du littoral lequel a, pour sa part, identifié
13 000 ha dans sa stratégie d
intervention 2015-2050.
Recommandation n° 2.
:
Finaliser le schéma régional de gestion des espaces naturels
sensibles afin de préciser l
étendue de la compétence de la collectivité de Corse dans ce
domaine, sa stratégie et ses moyens financiers d
acquisition foncière et les objectifs
poursuivis en matière d
aménagement des espaces protégés.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la chambre, le président du conseil
exécutif de Corse s’engage à soumettre le schéma territorial des espaces naturels sensibles à
l’Assemblée de Corse au cours du premier semestre 2024.
2.5
Une répartition de compétences et une organisation à rationaliser
2.5.1
Une gestion des espaces naturels sensibles qui reste partagée
Pour la mise en œuvre de ses missions, la collectivité de Corse dispose de
l
OEC,
établissement public industriel et commercial placé sous sa tutelle.
53
6 662 ha pour la Corse-du-Sud et 9 641 ha pour la Haute-Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
25
L
article L. 4424-35 du CGCT précise que celui-ci, assure, dans le cadre des orientations
définies par la collectivité de Corse, la mise en valeur, la gestion, l
animation et la promotion
du patrimoine de Corse. A ce titre, l
office est le principal opérateur de la collectivité en matière
d
environnement et dispose d
une compétence générale s
agissant de la gestion des espaces
protégés et des risques naturels. L
article 2 de ses statuts précise notamment qu
«
il participe,
avec ses partenaires, à la protection des espaces et des équilibres naturels
» et qu
il
«
apportera une attention particulière à la préservation des espaces sensibles tant sur le littoral
qu
en montagne
».
L
office est particulièrement impliqué
dans la gouvernance du
littoral et de l
espace
maritime. Ses représentants siègent au conseil maritime de façade, ainsi qu
au conseil national
de la mer et des littoraux. Il assiste à l
ensemble des comités de pilotage et comités techniques
pour l
élaboration, avec les régions Provence-Alpes-Côte d
Azur et Occitanie, du document
stratégique de façade afin de mettre en application la directive cadre stratégique pour le milieu
marin.
Pour autant, la collectivité de Corse a conservé des moyens propres affectés à la
protection du littoral. Son organigramme identifie ainsi, au sein de la direction générale adjointe
en charge de l
aménagement et du développement des territoires, une direction des milieux
naturels sensibles responsable de la mise en œuvre d’
une politique de protection, de gestion, de
valorisation et d
ouverture au public des espaces naturels sensibles, qui compte une centaine
d
agents, dont cinquante-trois gardes littoraux.
Ses nouvelles compétences acquises en 2018 au titre des espaces naturels sensibles ne
l
ont pas conduite à revoir son organisation avec l
OEC. Au contraire, la collectivité a reconduit
les modes de gestion qui prévalaient avant la suppression des deux départements et créé, pour
ce faire, un service des espaces littoraux et terrestres.
Elle a ainsi conservé en régie la gestion des 23 sites identifiés comme « espaces naturels
sensibles » dont elle est propriétaire (5 662 ha). Sur la base d
une convention du 2 octobre 2018,
elle continue également d
administrer pour le compte du conservatoire du littoral la majorité
des parcelles acquises par ce dernier, soit plus de 13 000 ha répartis sur 59 sites. Sur ce point,
le président du conseil exécutif de Corse indique, dans sa réponse,
que l’exercice
de ces
missions se fait dans un contexte financier contraint, sans moyens budgétaires et humains
supplémentaires.
Graphique n° 1 :
Répartition des acquisitions foncières du conservatoire du littoral par gestionnaire
Source : chambre régionale des comptes à partir des données de la collectivité de Corse.
OEC
19%
Commune de
Belgodère
0,1%
Collectivité de Corse
69%
Syndicat Elisa
12%
COLLECTIVITE DE CORSE
26
Deux conventions de subdélégation de gestion ont été reconduites avec d
autres
organismes : la commune de Belgodère pour le site de Losari
54
et le syndicat ELISA pour les
sites de Campomoro-Senetosa, Capu du Zivia et Cala Barbaria dans le Sartenais-Valinco
55
.
Pour sa part, l
OEC continue de gérer pour le compte du conservatoire du littoral les
sites de l
extrême Sud
56
de l
île se trouvant dans la continuité de la réserve naturelle des bouches
de Bonifacio et qui lui avait été confiés par le département de Corse-du-Sud pour une surface
total de 3 900 ha.
Le processus de mutualisation avec l
office, qui s
était traduit par la mise à disposition
en 2019 de trois agents de la collectivité de Corse pour la gestion et la surveillance des parcelles
du conservatoire, n
a pas été prolongé après 2020. L
aide de la collectivité se limite désormais
au versement d
une participation annuelle aux frais de gestion, de 186
200 € en 2021 et 2022.
De son côté, l
OEC a renforcé ses effectifs opérationnels, notamment en recourant à des emplois
saisonniers.
2.5.2
Des modes de gestion divergents pour les réserves naturelles
Le
statu quo
n
a pas non plus permis d
unifier le mode de gestion des réserves naturelles.
Sur la base de l
article L. 332-8 du code de l
environnement, la collectivité de Corse a délégué
dès 2008 la gestion de cinq réserves naturelles
57
à l
OEC, ainsi que celle de la réserve de
Scandola attribuée au PNRC. En 2018, elle a également confié à son office la gestion des
réserves des îles du Cap Corse et du massif du Monte Rotondo, nouvellement créées.
Pour autant, alors que l
OEC dispose d
une expertise technique et d
une expérience
certaine en matière d
espaces protégés, la collectivité a choisi, en 2018, de conserver en propre
la gestion de la réserve de l
étang de Biguglia, assurée jusqu
à cette date par le département de
la Haute-Corse.
En outre, en 2023, le cadre de gestion de trois réserves
58
n
est plus formalisé. Les
conventions de gestion signées le 17 novembre 2009 sont caduques depuis fin 2022 et n
ont
pas été renouvelées. Les modalités de contrôle et de suivi de la réserve de l
étang de Biguglia,
et nota
mment le contenu du rapport d’activité et du rapport financier devant être adressés au
comité consultatif de la réserve, ne sont plus définies.
Rappel du droit n° 1 :
Pour les réserves des bouches de Bonifacio et des îles Cerbicale et
de Scandola, établir des conventions avec les gestionnaires, conformément à l
article
L. 332-8 du code de l
environnement.
54
Convention du 28 mai 2019.
55
Convention du 3 décembre 2018.
56
Convention du 10 avril 2019.
57
Tre Padule de Suartone, des Bouches de Bonifacio, des îles Cerbicale.
58
Tre Padule de Suartone, des bouches de Bonifacio, des îles Cerbicale.
COLLECTIVITE DE CORSE
27
2.5.3
Natura 2000 : le rôle de la collectivité de Corse et de l
OEC à clarifier
La collectivité de Corse et son office sont tous deux acteurs du dispositif Natura 2000,
sans qu
aucune logique de service ne se dégage. La collectivité est animatrice
59
de 14 des
71 sites terrestres Natura 2000. L
OEC est, pour sa part, opérateur
60
de sites maritimes
Natura 2000.
Graphique n° 2 :
Circuit de décision du réseau Natura 2000 au 1
er
janvier 2023
Source : chambre régionale des comptes à partir des données du parc naturel régional du Morvan.
La mise en œuvre de la loi n° 2022
-217 du 21 février 2022 qui a transféré au
1
er
janvier 2023 à la collectivité de Corse la compétence pour désigner les comités de pilotage
et approuver les documents d
objectifs et de moyens pour les sites terrestres Natura 2000 n
est
pas clarifiée. Six mois après l
entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, la répartition de
compétences entre la collectivité et son office n
est toujours pas formellement arrêtée.
Recommandation n° 3.
:
Clarifier les rôles respectifs de la collectivité de Corse et de
l
office de l
environnement de la Corse
concernant la mise en œuvre des dispositions de la
loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relatives aux sites Natura 2000 terrestres.
Dans sa réponse aux observations provisoires, le président du conseil exécutif de Corse
indique qu’il présentera avant fin 2023 une délibération à l’
Assemblée de Corse visant à confier
à l’OEC la mise en œuvre de la compétence relative au programme «
Natura 2000 ».
59
A ce titre, elle
met en œuvre les documents d’
objectifs élaborés sous la responsabilité du comité de
pilotage (COPIL) du site.
60
L
opérateur est chargé, pour le compte du COPIL, de l
élaboration d
un document d
objectifs. Chaque
opérateur identifié désigne en son sein un chargé de mission. Celui-ci assure la rédaction générale du dossier et
fait des propositions au COPIL.
Collectivité de
Corse
COLLECTIVITE DE CORSE
28
2.6
Une gestion des espaces naturels littoraux à consolider
La compétence de la direction des milieux naturels et des espaces naturels sensibles de
la collectivité de Corse est restreinte aux sites dont elle assure la gestion en régie ou pour le
compte de tiers (conservatoire du littoral, Natura 2000). Le service n
opère aucun contrôle de
la gestion des espaces délégués à l
OEC et se prive ainsi d
une vision globale sur la gestion des
espaces naturels de l
île.
La tutelle mise en place par la collectivité de Corse sur son office, par délibérations de
l
Assemblée de Corse du 18 décembre 2002, 27 mai 2010 et 10 novembre 2017 est insuffisante
pour apprécier l
action de ce dernier en matière de protection du littoral. Le contrôle concerne
essentiellement la conformité des actes de l
office avec la loi, les règlements et les orientations
régionales. Il porte également sur la situation financière et la politique de gestion des ressources
humaines mais ne constitue nullement une tutelle dite « métier », plus centrée sur le suivi de
l
exercice des missions qui sont confiées à l
office.
La collectivité de Corse s
est même dessaisie du contrôle de gestion des réserves
naturelles au profit de l
OEC. Les conventions de gestion signées en 2009 et 2018 confient au
service « espèces et milieux naturels » de l
office l
instruction des documents financiers et des
rapports d
activité produits par les différents gestionnaires (OEC, PRNC, collectivité de Corse).
Ces dispositions conduisent l
office à réaliser le contrôle technique et financier des cinq sites
dont il est lui-même gestionnaire. Pour la réserve naturelle de Biguglia, elle place même l
OEC
en position de contrôleur de sa propre collectivité de tutelle. Pour autant, aucune disposition
n
oblige l
office à communiquer ses analyses à la collectivité de Corse qui n
en a pas
connaissance et ne les exige pas.
Au final, l
exercice de la compétence partagé entre l
OEC et la collectivité de Corse ne
permet pas à cette dernière de disposer d
une approche consolidée de la gestion des espaces
naturels protégés de l
île. A l
avenir, la collectivité doit donc veiller à mieux formaliser le
dialogue de gestion avec son office afin de renforcer le suivi des missions qu
elle lui a déléguées
et de mieux les coordonner avec ses propres actions.
Pour ce faire, la collectivité avait déclaré vouloir initier, en 2023, une démarche de
contractualisation avec l
OEC en déterminant les objectifs stratégiques et opérationnels de
l
office, en précisant ses moyens financiers et humains et en fixant une démarche d
évaluation
adossée à des indicateurs de suivi.
Un tel engagement avait déjà été pris par le président du conseil exécutif de Corse en
réponse au rapport public annuel 2020 de la Cour des comptes
61
, lequel préconisait notamment
la substitution de la collectivité de Corse à l
OEC. Dans sa réponse, l
ordonnateur avait alors
indiqué ne pas «
souhaiter un changement organique brutal mais d
abord opérer une reforme
contractualisée portant sur les performances des établissements surtout sur les politiques
publiques qu
elles portent en tant qu
opérateurs de la collectivité de Corse
». La chambre
relève qu
en juillet 2023, aucun document de contractualisation n
a été élaboré avec l
OEC.
61
Cour des comptes : « Les agences et offices de Corse, une réforme nécessaire » - rapport public annuel
2020.
COLLECTIVITE DE CORSE
29
Recommandation n° 4.
:
Renforcer le contrôle des missions déléguées à l
office de
l
environnement de la Corse en matière de gestion des espaces naturels protégés avec un
contrat d
objectifs et de moyens fixant des objectifs précis et doté d
indicateurs de suivi
opérationnel.
Rappel du droit n° 2 :
Soumettre le rapport annuel d
activité et de gestion de l
office de
l
environnement de la Corse à l
approbation de l
Assemblée de Corse sur la base du rapport
de sa commission de contrôle, conformément aux dispositions de l
article 18 quater des
statuts de l
office.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
La collectivité de Corse dispose de compétences environnementales élargies lui
permettant de mettre en œuvre une politiq
ue de gestion des risques et de protection des espaces
naturels littoraux. En sus de la création des réserves naturelles, lesquelles offrent un niveau de
protection renforcé, elle dispose, depuis 2018, d
outils de maîtrise et de gestion foncière
étendus pour la conservation et la mise en valeur des espaces naturels sensibles. Par ailleurs,
son action s
inscrit dans un cadre stratégique national renouvelé.
Au regard de ces évolutions, les documents stratégiques territoriaux accusent un retard
certain. Le cadre fixé par le PADDUC demeure peu prescriptif et doit être aujourd
hui
actualisé et précisé. De plus, la collectivité de Corse n
a toujours pas arrêté ses orientations
en matière de gestion intégrée du trait de côte, ni défini sa politique de gestion des espaces
naturels sensibles. L
adoption d
un document stratégique, dont les travaux d
élaboration sont
en cours, doit permettre de préciser sa politique d
acquisition foncière et de cordonner son
action avec le plan d
intervention du conservatoire du littoral.
Enfin, à l
occasion de sa prise de compétences en matière d
espaces naturels sensibles,
la collectivité n
a pas réinterrogé la pertinence de son organisation. Bien qu
elle dispose d
un
opérateur dédié pour la mise en œuvre de sa politique environ
nementale, l
office de
l
environnement de la Corse, la collectivité continue de gérer en propre la majeure partie des
acquisitions foncières réalisées sur le littoral. Elle a également conservé la gestion de la
réserve naturelle de Biguglia en contradiction avec les choix opérés pour les six autres
réserves. Ce chevauchement de compétences la prive d
une approche consolidée de la gestion
des espaces naturels. Pour l
avenir, la collectivité doit clarifier les modalités d
exercice de ses
compétences et renforcer sa tutelle sur son office afin d
évaluer précisément le suivi des
missions qu
elle lui a confiées.
COLLECTIVITE DE CORSE
30
3
L
A MISE EN ŒUVRE DE L
A PROTECTION DU LITTORAL
3.1
Des documents de planification à renouveler
La protection des espaces naturels littoraux passe avant tout par la définition d
objectifs
de préservation, de gestion et d
aménagement, en concertation avec les partenaires intéressés
au devenir du site.
En l
absence de schéma régional des espaces naturels sensibles, les seuls documents de
planification existants sont ceux prévus par les dispositifs règlementaires ou contractuels de
protection.
Pour les espaces bénéficiant du statut renforcé de réserve naturelle, l
article R. 332- 60
du code de l
environnement précise que, dans les trois ans suivant sa désignation, le
gestionnaire élabore un projet de plan de gestion de la réserve. Celui-ci s
appuie sur une
évaluation scientifique du patrimoine naturel et de son évolution et décrit les objectifs que le
gestionnaire s
assigne en vue d
une protection optimale des espaces naturels qui lui sont
confiés. Ce plan doit être approuvé par l
Assemblée de Corse.
La mise en œuvre de ces dispositions, tant par la collectivité
de Corse que par les autres
opérateurs auxquels elle a délégué la gestion (OEC et PNRC) accuse de nombreux retards.
Ainsi, aucune des réserves ne dispose à ce jour d
un cadre d
action formalisé et actualisé. Pour
autant, ces manquements n
ont pas été formellement relevés par la collectivité de Corse en sa
qualité d
autorité délégante.
Les plans de gestion des réserves de Tre Padule, Scandola et de l
étang de Biguglia,
couvrant initialement la période 2013-2018, ont été approuvés tardivement par délibération de
l
Assemblée de Corse du 30 mars 2017, repoussant d
’autant leur mise en œuvre jusqu’
en 2022.
Si ces plans sont aujourd
hui caducs, les documents concernant les réserves de l
étang de
Biguglia et de Scandola sont en cours d
évaluation. Celle du plan de la réserve de Tre Padule
est achevée.
En revanche, la réserve naturelle des bouches de Bonifacio n
a plus de plan de gestion
depuis 2011. Le processus devant conduire à l
adoption d
un nouveau plan est toujours en
cours.
Enfin, les réserves du massif du Monte Rotondo et des îles du Cap Corse ne disposent
d
aucun plan de gestion. Pour cette dernière, des feuilles de route ont été présentées aux comités
consultatifs en 2021 et 2022.
Pour les autres sites naturels protégés gérés par la collectivité de Corse, celle-ci voit son
action entravée par le défaut de documents de planification dont la responsabilité de
l
élaboration revient à d
autres opérateurs.
COLLECTIVITE DE CORSE
31
Ainsi, concernant les parcelles acquises par le conservatoire du littoral, l
établissement
n
a pas systématiquement élaboré le plan de gestion prévu par l
article R. 322-13 du code de
l
environnement en concertation avec la collectivité de Corse, gestionnaire du site et la
commune concernée. Dans les faits, la superposition des dispositifs de protection sur un même
site (réserve naturelle, Natura 2000…) conduit à privilégier, pour des raisons de moyens et de
disponibilité des services, un seul document de planification pour asseoir le dialogue de gestion.
Dans certains cas, le conservatoire peut même recourir à d
autres documents tels que des plans
d
interprétation paysagers ou des plans d
intention paysagers qui n
ont pas de valeur
contraignante.
De même, dans le cadre du programme Natura 2000, la collectivité de Corse assure
l
animation de 14 sites, sans toutefois disposer des documents d
objectifs dont l
élaboration ou
la mise à jour revient au comité de pilotage désigné. Ces derniers, pourtant prévus par l
article
R. 141-8-2 du code de l
environnement, fixent notamment les objectifs de développement
durable du site et font des propositions de mesures permettant de les atteindre. Aucun document
n
a été transmis pour la Haute-Corse. S
agissant des sites de Corse-du-Sud, les documents,
approuvés par le représentant de l
Etat en 2011, ne fixent pas d
objectifs au-delà de 2016 et
n
ont pas été mis à jour.
Rappel du droit n° 3 :
Disposer, pour chaque réserve naturelle, d
un plan de gestion
actualisé et approuvé par l
Assemblée de Corse, conformément aux dispositions de l
article
R. 332-60 du code de l
environnement.
3.2
Des instances de concertation à réunir régulièrement
La gouvernance des espaces naturels protégés littoraux dépend des types de protection
dont ils bénéficient et des acteurs publics ou privés en charge de leur mise en œuvre.
L
article R. 322-36 du code de l
environnement prévoit notamment la mise en place
d
un conseil des rivages concernant les parcelles acquises par le conservatoire du littoral et dont
la gestion est notamment assurée par la collectivité de Corse. Ce conseil, composé de huit
représentants de l
Assemblée de Corse et de quatre de la chambre des territoires, est chargé de
donner un avis sur la politique foncière et les orientations du conservatoire du littoral. Il est
également consulté sur les conventions de gestion et de partenariat des biens concernés.
Conformément aux dispositions précitées, le conseil s
est réuni chaque année depuis 2018 à
l
exception de 2021. Les nombreux échanges de ses membres sont retracés dans les
procès-verbaux de séance.
En revanche, la comitologie prévue par la convention cadre du 2 octobre 2018, signée
entre le conservatoire du littoral et la collectivité de Corse, n
’est pas mise en œuvre.
Ainsi, les
comités de gestion et d
évaluation, prévus par l
article 11.1 de la convention et placés sous la
responsabilité conjointe des deux parties, ne sont pas réunis régulièrement et ne font l
objet
d
aucune programmation. Pour les sites qui sont couverts par un dispositif de protection
réglementaire ou contractuel, il est d
usage de considérer que les comités consultatifs ou les
comités de pilotage de ces espaces (réserves naturelles de Corse, sites Natura 2000) fassent
office de comité de gestion au sens de la convention précitée.
COLLECTIVITE DE CORSE
32
Pour autant, s
agissant des réserves naturelles, le suivi de ces instances doit lui aussi être
amélioré. A l
exception de la réserve naturelle des bouches de Bonifacio, les comités
consultatifs, prévus par l
article R. 332-58 du code de l
environnement, ne sont pas réunis
chaque année par le président du conseil exécutif de Corse ou son représentant. Le comité de la
réserve naturelle de l
étang de Biguglia, gérée par la collectivité de Corse, n
a pas été réuni en
2018 et 2020. Il en est de même pour ceux des réserves des îles du Cap Corse et de Tre Padule.
Tableau n° 4 :
Dates des comités consultatifs des réserves naturelles de Corse depuis 2018
(hors consultations)
Etang de
Biguglia
Monte
Rotondo
Iles du Cap
Corse
Scandola
Bonifacio
Tre Padule
15-nov-18
24-avr-18
28-juin-19
24-juin-19
01-juil-19
06-mars-19
12-avr-19
20-juil-20
27-mai-20
26-nov-21
13-déc-21
06-avr-21
16-avr-21
21-avr-21
14-nov-21
08-nov-21
22-nov-21
05-déc-22
17-oct-22
02-déc-22
21-nov-22
03-nov-22
18-nov-22
Source : chambre régionale des comptes à partir des données de la collectivité de Corse.
Si de nombreuses consultations dématérialisées pour avis ont été réalisées, ce mode de
fonctionnement ne saurait se substituer à la tenue régulière d
un comité consultatif, dont la
mission est d
apporter un avis éclairé sur le fonctionnement de la réserve, d
étudier les rapports
d
activité et les budgets prévisionnels et d
être consulté sur le projet de plan de gestion
62
.
Des manquements sont également relevés s
agissant des conseils scientifiques. Ces
instances facultatives, prévues par l
article R. 332-58 du code de l
environnement, ont été
instituées pour cinq réserves
63
et sont consultées sur l
élaboration et le suivi du plan de gestion,
ainsi que sur toute demande de travaux susceptible d
avoir un impact négatif sur le patrimoine
naturel, culturel ou bâti.
La chambre constate que le conseil scientifique de la réserve de l
étang de Biguglia ne
s
est réuni que deux fois depuis 2018,
contrairement aux dispositions de l’article 4 de l’arrêté
constitutif du 27 mars 2019 qui prévoient une réunion au moins une fois par an. Des
consultations ont été réalisées en 2020 et 2022 mais sur un thème unique et par voie
électronique.
62
Article 4 des arrêtés du président du conseil exécutif de Corse du 9 octobre 2018 (Massif du
MonteRotondo) 27 mars 2019 (bouches de Bonifacio, étang de Biguglia, Tre Padule, Scandola, îles du Cap Corse).
63
Arrêtés du 20 novembre 2018 et du 27 mars 2019 instituant un conseil scientifique pour les réserves de
l’étang de Biguglia (déjà créé par arrêté du 15 févr
ier 2007), du massif du Monte Rotondo, des bouches de
Bonifacio-îles Cerbicale (conseil scientifique commun) et de Scandola.
COLLECTIVITE DE CORSE
33
Dans sa réponse, si le président du conseil exécutif de Corse précise que le conseil
scientifique a choisi de se réunir une fois tous les deux ans, cette
décision n’a pas été formalisée
.
Les comités consultatifs de la réserve font pourtant état de problématiques d
hydrodynamisme
récurrents entre 2020 et 2022 pour lesquels le comité pourrait apporter une plus-value
64
. Le
comité scientifique de la réserve du massif du Monte Rotondo, installé en 2021, ne s
est pas
réuni à ce jour. Les comités des réserves de Scandola et des bouches de Bonifacio se sont tenus
trois fois sur la même période, soit moins d
une fois par an.
3.3
L
évaluation et le suivi de la gestion à renforcer
Selon la charte des espaces naturels sensibles, dont la collectivité de Corse est signataire,
la politique des espaces naturels sensibles doit répondre à un double objectif :
-
Préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux naturels et des champs
naturels d
expansion des crues et assurer la sauvegarde des habitats naturels,
-
Aménager ces espaces « pour être ouverts au public, sauf exception justifiée par la
fragilité du milieu naturel ».
3.3.1
Des actions à mieux valoriser
La collectivité de Corse établit chaque année un rapport d
activité des espaces naturels
sensibles. Ces documents sont surtout descriptifs et peu chiffrés notamment quant aux objectifs
fixés, lesquels ne sont pas évoqués en 2021 et 2022.
En qualité de gestionnaire de la réserve naturelle de l
étang de Biguglia, la collectivité
de Corse doit adresser chaque année au comité consultatif un rapport d
activité, un rapport
financier, ainsi que le programme et le budget de l
exercice suivant. Elle doit, par ailleurs,
présenter un état du personnel affecté à la réserve
65
.
Pour la période examinée, la collectivité a produit à deux reprises un rapport d
activité
couvrant deux exercices. Les rapports produits sont documentés et détaillent, par objectifs, les
actions effectuées par l
équipe en charge de la réserve, ainsi que les principaux indicateurs de
suivi retenus dans le plan de gestion. Toutefois, les informations budgétaires ne sont pas
présentées et sont renvoyées à une communication ultérieure auprès du comité consultatif.
L
examen des comptes-rendus des réunions montre, cependant, qu
aucun élément de cette
nature ne lui été transmis par la suite.
Le suivi des autres dispositifs de protection est également perfectible.
64
L
étang de Biguglia est alimenté en eau douce par le fleuve Bevinco et en eau de mer
à l’aide
d
un
grau ouvert mécaniquement. Les taux de salinité et d
oxygénation de l
étang, variables selon les zones, doivent
être surveillés.
65
Article 3 de la convention de gestion du 17 novembre 2009 conclue entre la collectivité de Corse et le
département de Haute-Corse. Dispositions reprises dans les conventions conclues en 2018 pour les réserves du
Cap Corse et du Monte Rotondo.
COLLECTIVITE DE CORSE
34
Ainsi, en contravention de ses obligations, la collectivité de Corse n
a adressé aucun
compte-rendu de gestion au conservatoire du littoral pour les parcelles qui lui sont confiées, à
l
exception du territoire des Agriates en 2021.
De même, en qualité d
animatrice de sites Natura 2000, elle n
a adressé aux comités de
pilotage concernés aucun rapport triennal retraçant les mesures mises en œuvre et les difficultés
rencontrées, contrairement aux dispositions de l
article R. 141-8-5 du code de l
environnement.
3.3.2
Des outils de suivi et de pilotage à fiabiliser
Une brigade dédiée à la surveillance du littoral
Pour l
exercice de ses missions de conservation et de police des espaces naturels
littoraux, la collectivité dispose d
une brigade d
une cinquantaine de gardes du littoral répartis
en six secteurs et couvrant l
ensemble du linéaire côtier, à l
exception des parcelles gérées par
l
OEC. Ces gardes sont assermentés et habilités à constater les infractions, conformément aux
dispositions de l
article L. 332-10-1 du code de l
environnement. Une vingtaine d
agents
bénéficient chaque année de formations en lien avec la protection et l
entretien du littoral. Des
actions de police de l
environnement conjointes sont réalisées avec les services de gendarmerie,
de l
office français de la biodiversité, du parc naturel marin du Cap Corse afin de relever les
infractions les plus significatives.
Jusqu
en 2020, le suivi des espaces naturels sensibles, limité à une ventilation du temps
de travail des agents par activité (entretien, visites, surveillance) et par secteur, est difficilement
exploitable à des fins de pilotage.
Par la suite, le système d
information a été revu et amélioré. Sur la base des engagements
inscrits dans les fiches actions des différents documents de gestion, les équipes de chaque
secteur disposent d
une déclinaison mensuelle et hebdomadaire de leurs interventions. Afin
d
en suivre la mise en
œuvre
, elles sont dotées d
un système d
information géographique
embarqué sur smartphone, permettant d
effectuer des relevés sur les parcelles, de justifier d
une
installation ou de mesurer les quantités de déchets ou de plantes invasives récoltées. Ces
informations viennent renseigner un tableau de bord rapportant les différents types
interventions, les moyens mobilisés et les résultats obtenus. Ces bases de données collectées
doivent également contribuer à une meilleure connaissance des caractéristiques physiques des
habitats naturels, des espèces animales et végétales, des ressources naturelles ou encore des
zones d
activités humaines.
Toutefois, la compilation et l
exploitation de ces données ne sont pas encore
opérationnelles pour des raisons tenant à la fois à la fiabilité de l
application numérique, de
formation des utilisateurs et de moyens humains disponibles pour en assurer le suivi. Le service
en charge des espaces naturels sensibles ne dispose pas à ce jour d
un outil synthétique
permettant un suivi d
ensemble de son activité. Pour la seule réserve de l
étang de Biguglia, les
rapports d
activité font état de 242 infractions constatées en 2018 et 116 en 2020.
La chambre recommande à la collectivité de Corse de fiabiliser son outil de relevé
d
activité afin de disposer de tableaux de bord et d
indicateurs de suivi lui permettant
d
améliorer le pilotage des espaces naturels sensibles.
COLLECTIVITE DE CORSE
35
Recommandation n° 5.
:
Fiabiliser l
outil de relevé d
activité du service en charge des
espaces naturels sensibles, afin de disposer de tableaux de bord et d
indicateurs de suivi.
3.3.3
Une affectation de la taxe d
aménagement à justifier
Conformément aux dispositions des articles R. 113-18 du code de l
urbanisme et
R. 3313-7 du CGCT, l
utilisation de la taxe d
aménagement est retracée dans une annexe des
documents budgétaires. Celle-ci ne peut concerner que les dépenses d
acquisition,
d
aménagement ou d
entretien en lien avec les espaces naturels sensibles, telles que prévues
par l
article L. 331-3 du code de l
urbanisme.
Le document élaboré par la collectivité de Corse présente de nombreuses incohérences
qui empêchent toute interprétation.
Ainsi, le reliquat de la part de la taxe d
aménagement non utilisé à la clôture de
l
exercice 2018, d
un montant de 3
369 298 €,
n
a pas été repris à l
annexe du compte
administratif 2019, faussant d
autant le report du produit disponible pour les exercices suivants.
Ce dernier est d
ailleurs surévalué puisque l
exercice 2018, comme le suivant, n
incluent pas le
reversement d
une part de la taxe au profit des conseils d
architecture, d
urbanisme et
d
environnement (CAUE), fixée à 16 % du produit de la taxe d
aménagement (taux de 0,4 %)
et donc par nature non dédiée au financement des espaces naturels sensibles.
De plus, les dépenses de personnel inscrites au compte 6411 ont varié fortement entre
2019 et 2020,
passant de 2,7 M€ à 3,3 M€ sans
justification. Il en est de même des dépenses de
fonctionnement entre 2021 et 2022, ce dernier exercice comptabilisant une indemnité de
licenciement de 1,3 M€
.
Enfin, les dépenses d
investissement s
écartent sensiblement de celles présentées dans
la nomenclature fonctionnelle. Pour le seul exercice 2022, elles s
élèvent à seulement 182 000
dans l
annexe, alors que la ventilation du budget par fonction les
chiffre à 1,6 M€.
L
acquisition
en 2018, par voie de préemption, d
une parcelle de terrain sur l
île de Cavallo pour un montant
de 2 M€
(Cf. chapitre 4), et répondant spécifiquement à la finalité de la taxe d
aménagement,
n
est pas non plus prise en compte.
Rappel du droit n° 4 :
Fiabiliser le bilan des recettes et des dépenses de la part
départementale de la taxe d
aménagement devant être annexé aux documents budgétaires,
conformément aux dispositions de l
article R. 113-8 du code de l
urbanisme.
COLLECTIVITE DE CORSE
36
3.4
Des progrès certains en matière de protection de l
environnement
3.4.1
L
étang de Biguglia, l
exemple d
une protection renforcée en milieu urbain
Lagune méditerranéenne située au sud de Bastia, qui constitue une zone humide
d
importance internationale au sens de la convention de Ramsar du 2 février 1971, l
étang de
Biguglia est classé « réserve naturelle » par décret ministériel n° 94-688 du 9 août 1994. Sa
propriété et sa gestion ont été transférées du département de la Haute-Corse à la collectivité de
Corse en 2018.
La réserve s
étend sur une superficie de 1 790 ha, dont 1 450 constituée de la lagune.
De faible profondeur (1,5 m) et soumis à une forte pression anthropique due à la proximité de
l
agglomération bastiaise et à l
implantation de nombreux complexes touristiques, l
étang n
en
demeure pas moins remarquable de par sa diversité faunistique et floristique. Le site abrite, en
effet, plus de 240 espèces d
oiseaux et se trouve être une zone d
hivernage pour nombre d
entre
eux. Il compte également un fortin datant du XVII
ème
siècle, aménagé en écomusée et abritant
également les services administratifs et scientifiques de la réserve. Il jouxte le parc naturel
aménagé de Fornacina (20 ha), propriété de la collectivité de Corse.
Le plan de gestion 2014-2018 de la réserve de Biguglia fixe cinq objectifs à long terme :
assurer le fonctionnement hydraulique de l
étang, améliorer la qualité des eaux, assurer
l
équilibre entre préservation du patrimoine et pression anthropique, maintenir les fonctions de
réservoir biologique de la réserve et sensibiliser pour mieux protéger.
Conformément à l
article R. 332-60 du code de l
environnement, le document s
appuie
sur une évaluation scientifique préalable, ainsi que sur un avis du comité consultatif et du comité
scientifique. Le plan se décline en 26 objectifs de gestion et 70 opérations. Chaque objectif est
évalué au moyen d
indicateurs de suivi et de grilles de seuils, permettant de situer l
avancement
du plan. Une annexe détaille, par ailleurs, les coûts des mesures en fonctionnement et en
investissement.
Les rapports d
activité précisent qu
en 2020, près des deux tiers des opérations de
gestion étaient en cours de réalisation ou achevées. Les documents relèvent les progrès réalisés
concernant la qualité des eaux, tout en soulignant les risques liés à la présence d
activités
potentiellement polluantes en périphérie immédiate du site et la lenteur de réponse des milieux.
Quatre opérations de dépollution ont été réalisées sur la période. Le document fait également
état d
une gestion raisonnée de la pêche avec l
instauration de zones de non pêche ou de pêche
saisonnière. Sur le plan de la biodiversité, le rapport relève également la progression des
populations d
oiseaux, dépassant les 20 000 en 2020, et la variété des espèces observées.
COLLECTIVITE DE CORSE
37
La zone bénéficie d
un schéma d
aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Selon
l
article L. 212-3 du code de l
environnement, ce document fixe des objectifs généraux
d
utilisation, de mise en valeur et de protection quantitative et qualitative des ressources en
eaux superficielles et souterraines et des écosystèmes aquatiques ainsi que de préservation des
zones humides. Elaboré et suivi par la commission locale de l
eau, il s
impose aux autres
documents de planification (SCOT, PLU
…).
Le fonctionnement de cette commission est
toutefois perfectible. L
instance ne s
est réunie que deux fois depuis 2018. De plus, elle ne
dispose plus de structure porteuse depuis la création de la collectivité de Corse le
1
er
janvier 2018, générant des difficultés dans le déroulement des études ou des réalisations
prescrites par le SAGE. La communauté de Communes de Marana Golo s
est portée candidate
à plusieurs reprises pour assurer ce rôle, sans réponse à ce jour de la collectivité de Corse.
3.4.2
Les efforts en matière d
ouverture au public et de gestion de la fréquentation
La collectivité de Corse conduit des actions d
éducation à l
environnement et au
développement durable à destination des scolaires et du grand public. En 2022, sept journées à
thème de niveau national ou international
66
, se tenant sur le site de la réserve de Biguglia mais
également sur d
autres sites Natura 2000, ont permis de sensibiliser 1 877 personnes, soit près
de trois fois plus qu
en 2019. Les actions à destination des scolaires ont également fortement
progressé, 5 900 élèves ayant participé à une journée ou une animation.
Graphique n° 3 :
Fréquentation des actions d
éducation à l
environnement (en nombre de
personnes)
Source : chambre régionale des comptes à partir des données de la collectivité de Corse.
66
J
ournée mondiale des zones humides, fête de la nature, semaine du développement durable,
rendez-vous au jardin, fréquence grenouille, journées européennes du patrimoine, fête de la science.
682
327
1 491
1 877
1 580
1 339
2 649
5 900
2 262
1 666
4 140
7 777
-
1 000
2 000
3 000
4 000
5 000
6 000
7 000
8 000
9 000
2019
2020
2021
2022
Grand public
Scolaires
Total
COLLECTIVITE DE CORSE
38
La fréquentation de l
écomusée de Biguglia est stable sur la période, autour de
2 300 visiteurs, avec un pic d
activité à 2 728 en 2018.
Plus globalement, la fréquentation des sites fait l
objet d
un suivi effectif de la part de
la collectivité de Corse. Plusieurs méthodes sont utilisées associant le comptage physique
67
, le
recours à des éco-compteurs
68
ou à des drones pour les sites les moins accessibles, ou pour
l
évaluation du nombre de plaisanciers. Une évaluation de la pression anthropique a été
notamment conduite sur le site de la plage de Saleccia en Haute-Corse, en lien avec le parc
marin du Cap Corse, le conservatoire du littoral et les professionnels du tourisme. Elle a
débouché sur des travaux limitant l
accès aux visiteurs
69
et identifiant mieux les zones de
baignade, d
activités nautiques ou d
accès aux bateaux motorisés.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Pour les espaces naturels protégés dont elle assure la gestion, l
action de la collectivité
de Corse est rendue complexe par la superposition de dispositifs juridiques pour un même
territoire faisant intervenir de multiples opérateurs. Néanmoins, la collectivité doit veiller à la
tenue régulière des instances de gestion et à la production des documents de suivi et
d
informations réglementaires. Elle doit également doter ses services d
outils de pilotage
opérationnels et fiabiliser son suivi financier dans un contexte de ressources dédiées limitées.
Des efforts sont à relever en termes d
ouverture au public et de mesure de la
fréquentation. Pour la réserve naturelle de l
étang de Biguglia, espace protégé soumis à une
forte anthropisation, les résultats sont tangibles. Le plan d
action est aux deux tiers mis en
œuvre à ce jo
ur et les populations d
oiseaux présentes sur le site sont désormais mieux connues.
4
LA POLITIQUE D
ACQUISITION FONCIERE AU TITRE DES
ESPACES NATURELS SENSIBLES
En application des articles L. 113-8 et L. 215-1 du code de l
urbanisme, la collectivité
de Corse
peut créer des zones de préemption pour mettre en œuvre une politique de protection,
de gestion et d
ouverture au public des espaces naturels sensibles. A ce titre, elle dispose d
un
droit de préemption sur les biens immobiliers mis en vente. L
Assemblée de Corse, par
délibération du 16 janvier 2018 portant délégation d
attributions au président du conseil
exécutif de Corse, l
a autorisé à faire usage de ce droit. Il est ainsi compétent pour prendre la
décision de préemption et signer l
acte authentique actant le transfert de propriété.
67
Comptage des visiteurs ou de leurs véhicules sur les parkings aux abords des sites.
68
Appareils munis d
une cellule photoélectrique qui permettent un comptage des passages, soit dans un
sens, soit dans les deux sens en fonction du matériel utilisé.
69
Parking sécurisé et payant.
COLLECTIVITE DE CORSE
39
Entre janvier 2018 et juin 2023, la collectivité de Corse a réalisé une seule acquisition
d
espace naturel sensible. Elle a préempté, en 2018, une parcelle de terrain sur l
île de Cavallo
70
,
dans l
archipel des îles Lavezzi. Depuis lors, cet achat rencontre de multiples difficultés
juridiques, aux répercussions financières potentiellement importantes.
Le rôle de l
’o
ffice foncier de la Corse
en matière d’acquis
ition foncière
L’
article L. 4424-26-1 du code général des collectivités territoriales précise que l
’o
ffice
foncier de la Corse (OFC), établissement public industriel et commercial placé sous la tutelle
de la collectivité de Corse, peut, par sa stratégie d
acquisition foncière, contribuer à la politique
de protection contre les risques naturels, ainsi qu
à titre subsidiaire à la préservation des espaces
naturels en coopération avec les autres organismes chargés de la préservation de ces espaces
dans le cadre de conventions.
L’office pourrait financer des acquisitions foncières ayant ces deux finalités par le biais
de la taxe spéciale d’équipement (TSE). Toutefois, ce type d’opération ne figure pas dans son
programme pluriannuel d’intervention 2019
-2024. En o
utre, l’OFC a indiqué n’avoir jamais été
saisi par des collectivités territoriales de l’île pour mener des projets fonciers contribuant à la
politique de protection contre les risques naturels et à la préservation des espaces naturels.
Dans ces conditions, à ce jour aucune acquisition foncière n
a été réalisée
par l’OFC
dans ces deux domaines d’intervention.
4.1
Une acquisition unique réalisée en 2018 dans un contexte d
incertitudes
4.1.1
La procédure de préemption mise en œuvre
La procédure de préemption au titre des espaces naturels sensibles est régie par les
articles L. 215-14 et suivants du code de l
urbanisme.
Une déclaration d
intention d
aliéner du 21 juin 2018, établie par le notaire mandaté
par le propriétaire de la parcelle, a été reçue le 22 juin suivant par la collectivité de Corse.
Conformément au code de l
urbanisme, cette dernière en a informé la commune de Bonifacio
et le conservatoire du littoral, qui ont fait savoir qu
ils n
entendaient pas acquérir ce bien. La
direction régionale des finances publiques a également été sollicitée pour rendre un avis.
70
Cavallo fait partie de la commune de Bonifacio. La zone de préemption est définie par un arrêté
ministériel du 14 mai 1964. L
île se situe dans le périmètre de la réserve naturelle des bouches de Bonifacio et
dans celui de deux zones Natura 2000 (Iles Lavezzi / Bonifacio ; Plateau de Pertusato / Bonifacio et îles Lavezzi).
Elle dispose également d
une protection ZNIEFF de type 1 (Iles Lavezzi). Enfin, une partie de son territoire est
identifié par le PADDUC comme étant un espace remarquable ou caractéristique (ERC) du littoral (fiche n° 2A60).
COLLECTIVITE DE CORSE
40
Dans le délai de deux mois prévu par le code de l
urbanisme, le président du conseil
exécutif a décidé, le 13 août 2018, de préempter la parcelle. L
Assemblée de Corse a examiné
le 25 octobre 2018 un rapport concernant cette acquisition. Elle a délibéré, d
une part, pour
prendre acte de la préemption et des crédits nécessaires au paiement du prix d
achat et, d
autre
part, pour autoriser le président du conseil exécutif à signer l
acte authentique. Cette signature
est intervenue devant notaire le 8 novembre 2018 et le paiement a été réalisé le
26 novembre 2018.
En application des dispositions du code civil, dès l
acte de préemption, la vente était
considérée comme parfaite
71
et donc définitive, ni le vendeur ni le titulaire du droit de préempter
ne pouvant se rétracter. Ainsi, l
autorisation sollicitée le 25 octobre 2018 par le président du
conseil exécutif auprès de l
Assemblée de Corse pour signer l
acte authentique a présenté un
caractère purement formel car sans portée juridique. En effet, la décision de préemption valant
acquisition de la parcelle, par voie de conséquence, la collectivité de Corse était ensuite tenue
de signer l
acte notarié actant le transfert de propriété, quel qu
ait été le résultat du vote portant
sur la délibération soumise à l
Assemblée de Corse.
Selon les termes employés dans le rapport de la délibération du 25 octobre 2018,
l
acquisition de la parcelle située sur l
île de Cavallo a constitué, pour le président du conseil
exécutif de Corse, une décision présentant une dimension politique et symbolique.
Dans sa réponse aux observations provisoires, il insiste sur cette double dimension, tout
en convenant que la décision de préemption a fait naître une situation juridique complexe.
4.1.2
Les caractéristiques de la parcelle de terrain
La parcelle de terrain acquise par la collectivité de Corse, portant le numéro de cadastre
Q 272, est d
une superficie de 3,33 hectares. Elle est enclavée au sein de l
île de Cavallo, sans
accès direct à la mer. Sous l
empire du plan local d
urbanisme (PLU) de la commune de
Bonifacio applicable jusqu
en 2022
72
, le terrain était situé en zone constructible
73
.
Selon la déclaration d
intention d
aliéner, de vieilles bergeries de 478 m² et une zone
de stockage étaient présentes sur la parcelle, qui constituait le lot n° 66 de la zone
d
aménagement concerté (ZAC) de l
archipel des îles Lavezzi.
71
L’article 1583 du code civil prévoit qu’une vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise
de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès
qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas
encore été livrée ni le prix payé.
72
Suite à une action contentieuse, le tribunal administratif de Bastia, par jugement du 17 février 2022, a
enjoint au maire de Bonifacio de saisir son conseil municipal afin qu
il abroge le PLU ce qui a été fait par
délibération du 16 mai 2022.
73
Dans le PLU, la parcelle relevait du secteur UL2b à vocation résidentielle et touristique.
COLLECTIVITE DE CORSE
41
Le rapport environnemental, établi par le service des espaces naturels sensibles de la
collectivité de Corse le 26 juillet 2018, indiquait qu
il existait pour cette parcelle « un fort enjeu
de préservation de l
’environnement et des écosystèmes fragiles (…), un enjeu de préservation
de la qualité naturelle du site et du paysage ainsi qu
un bon potentiel d
aménagement, de mise
en valeur et d
ouverture (maitrisée) au public à des fins pédagogiques ». Ces conclusions ayant
été établies sur la seule base d
images par satellite, le rapport soulignait que, faute de visite du
bien, il était difficile de se prononcer sur la présence d
une flore protégée ou d
habitats jugés
prioritaires en termes de protection et de conservation.
La décision de préemption du 13 août 2018 indiquait qu
elle était prise au titre des
espaces naturels sensibles, eu égard à la situation géographique de la parcelle couverte par
plusieurs dispositifs de protection environnementale. Elle précisait, en outre, que dans
l
hypothèse où les bergeries en ruine édifiées sur ce terrain venaient à être conservées et
réhabilitées, elles seraient affectées à un usage permettant la fréquentation du public et la
connaissance des milieux naturels. La décision envisageait la mise en place d
équipements
légers d
accueil du public et l
aménagement d
espaces de promenade et de repos.
4.1.3
L
acceptation du prix fixé par le propriétaire
Selon le code de l
urbanisme, la déclaration d
intention d
aliéner doit indiquer le prix
demandé par le propriétaire. Le titulaire du droit de préemption peut lui proposer un prix
différent en l
informant qu
à défaut d
acception de l
offre, le juge de l
expropriation sera amené
à le fixer. Le propriétaire, soit accepte le prix proposé, soit maintient le prix figurant dans sa
déclaration et accepte qu
il soit fixé par le juge de l
expropriation, soit renonce à l
aliénation.
Le prix était de 2
M€
dans la déclaration d
intention d
aliéner. Dans son avis du
19 juillet 2018, le service du domaine, à partir des éléments d
information dont il disposait,
évaluait la parcelle à 1,94
M€
en cas de constructibilité épuisée et à 3 M
en cas de possibilité
d
édification de nouvelles constructions. La collectivité de Corse a accepté le prix fixé par le
vendeur, auquel se sont ajoutés des frais d
acte notarié représentant 21 000
de dépense
supplémentaire.
La parcelle de terrain a été acquise à
un prix de 60 €
le m², qui est très supérieur à celui
des terrains non bâtis et non constructibles achetés comme espaces naturels sensibles par le
conservatoire du littoral dans l
extrême sud de la Corse en 2017 et 2018. Pour des terrains
occupés par un couvert végétal identique au milieu naturel rencontré sur l
île de Cavallo, il a
effectué quatre achats fonciers
74
à un prix moyen
de 0,50 €
le m². Le prix le plus élevé qu
ait
payé le conservatoire dans l
extrême sud
a été de 2 € le
m² pour des acquisitions s
intercalant
entre des zones d
habitat diffus composées de maisons individuelles, situation comparable à
l
occupation du sol observée à Cavallo.
74
Le conservatoire, durant ces deux années, a ainsi acquis près de 24 hectares pour seulement 124
000 €.
Les acquisitions ont été réalisées en 2017 sur les communes de Bonifacio (9 925 m² pour 7
940 €) et de
Pianottoli-Caldarello (66 509 m² pour 40
000 €). En 2018, elles ont concerné la commune de Monaccia d’Aullène
(138 600 m² pour 57
700 €) et, à nouveau, celle de Pianottoli
-Caldarello (23 480 m² pour 18
400 €).
COLLECTIVITE DE CORSE
42
En réponse aux observations provisoires, le président du conseil exécutif de Corse
souligne
que, selon les déclarations d’intention d’aliéner dont disposait la collectivité de Corse
pour la période allant de 2015 à 2018, le prix moyen des terrains non bâtis sur l’île de Cavalo
était de 126,27 € le m², soit
plus du double de la valeur de la parcelle acquise par la collectivité.
La chambre observe, néanmoins, que la capacité d
achat au titre de la préservation
d
espaces naturels sensibles est considérablement réduite lorsque l
acquisition porte sur un
terrain constructible, comme cela a été le cas en 2018. Les 2
M€
investis par la collectivité de
Corse pour 3,3 hectares correspondaient à un potentiel d
achat d
au moins 100 hectares dans
l
extrême Sud de la Corse.
4.1.4
Les conditions juridiques et financières entourant l
acquisition
La nature des constructions édifiées sur la parcelle
La déclaration d
intention d
aliéner mentionnait la seule présence sur la parcelle de
vieilles bergeries présentées comme étant en état de ruines. Néanmoins, dès le 29 juin 2018, le
service de la collectivité de Corse chargé de l
instruction de la déclaration d
intention
d
aliéner
75
constatait, en consultant des images satellite de l
île de Cavallo, que le bâti visible
ne semblait pas compatible avec le descriptif de la déclaration.
Le rapport de la délibération du 25 octobre 2018 de l
Assemblée de Corse, qui faisait
également état de cette incohérence, ajoutait qu
aucune information précise et officielle sur la
consistance et la nature réelle du bâti n
avait pu être recueillie dans le temps du délai de
préemption, ceci malgré les diligences effectuées auprès des autorités compétentes, notamment
les services de l
Etat.
Pour autant, l
existence de constructions d
une surface de près de 400 m² a,
de facto,
reçu une confirmation avec l
avis du 19 juillet 2018 du service du domaine. Ce document faisait
bien état de la présence, sur la parcelle, de deux locaux de respectivement 96 et 287 m². Il
fournissait donc à la collectivité de Corse un descriptif notoirement différent de celui de la
déclaration d
intention d
aliéner. La collectivité de Corse a saisi la commune de Bonifacio et la
préfecture de Corse le 8 août 2018, soit 13 jours
avant l’expiration du délai pour préempter,
afin d
obtenir des informations sur les constructions et sur leur situation au regard du droit de
l
urbanisme.
La décision de préemption a donc été prise sans disposer d
informations complètes
concernant la nature, la consistance, l
état et la légalité des constructions.
75
A savoir, le service de la gestion domaniale administrative de Corse-du-Sud qui dépend de la direction
générale adjointe du patrimoine, des moyens et de la commande publique.
COLLECTIVITE DE CORSE
43
In fine
, le décalage entre le bâti décrit dans la déclaration d
aliéner et celui
effectivement présent a été confirmé par l
acte authentique signé par le vendeur et le président
du conseil exécutif le 8 novembre 2018. Cet acte décrit le bien immobilier vendu comme « une
parcelle de terre sur laquelle se trouvent un bâtiment à usage de restaurant, des terrasses, des
logements pour employés, une bergerie »
76
et précise que les constructions initiales ont été
édifiées à la fin des années 1980 sans autorisation d
urbanisme et qu
il en est de même pour la
réhabilitation réalisée dans le courant de l
année 2017 par le locataire des lieux.
La présence sur la parcelle d
un commerce en activité
La déclaration d
intention d
aliéner, si elle faisait état de la présence sur la parcelle de
bergeries en ruines, mentionnait également un usage commercial, sans autre précision. Elle
indiquait, par ailleurs, que le bien mis en vente n
était grevé d
aucun droit réel ou personnel.
L
avis du 19 juillet 2018 du service du domaine signalait qu
un local à usage
commercial et un local professionnel étaient présents sur la parcelle. Selon l
avis, une recherche
réalisée sur internet laissait présumer qu
il s
agissait d
un restaurant.
Le service de la collectivité de Corse en charge de l
instruction de la déclaration
d
intention d
aliéner identifiait également, le 23 juillet 2018, la présence effective sur le site
d
un établissement de restauration en activité
77
.
Le courrier adressé le 8 août 2018 par la collectivité de Corse à la commune de
Bonifacio faisait d
ailleurs état de l
existence d
un restaurant sur la parcelle dont l
acquisition
était projetée, sans pour autant solliciter d
informations à son sujet.
La décision de préemption a donc été prise malgré l
incertitude relative aux conditions
d
utilisation de la parcelle à des fins commerciales. La collectivité de Corse ne disposait alors
d
aucune information sur les relations contractuelles entre le propriétaire de la parcelle et
l
exploitant du commerce installé sur le site, et notamment sur l
existence d
un bail commercial
en cours d
exécution, sa durée et ses conditions financières.
La collectivité de Corse a eu confirmation de l
existence d
un commerce sur place par
un courrier du 29 août 2018, soit postérieurement à la décision de préemption du 13 août,
émanant d
un représentant de la société civile immobilière qui s
était initialement portée
acquéreur du bien, avant d
être évincée par l
effet de la décision de préemption. Il confirmait
l
activité d
un restaurant sur le site depuis 2017 après reconstruction, cette même année, des
bâtiments d
exploitation.
76
L
acte authentique d
acquisition n
a fourni aucune information quant à leur surface.
77
Ce constat figure dans une note interne du 23 juillet 2018 établie par ce service.
COLLECTIVITE DE CORSE
44
En outre, le 15 octobre 2018, la collectivité de Corse a reçu un projet d
acte authentique
de vente élaboré par le notaire chargé de formaliser la transaction. Il mentionnait l
existence
d
un bail d
une durée de neuf ans, du 1
er
janvier 2018 au 31 décembre 2026, assorti d
un loyer
annuel de 20 000
. De ce fait, le projet d
acte indiquait que la collectivité de Corse n
aurait
jouissance de son bien que par le biais de la perception du loyer. Ces dispositions ont ensuite
été reprises dans l
acte authentique de vente, signé le 8 novembre 2018
78
.
Ces éléments d
information précis et importants sur les caractéristiques du bail n
ont
pas figuré, pourtant, dans le rapport de présentation de la délibération du 25 octobre 2018 de
l
Assemblée de Corse. Selon le compte rendu
in extenso
des débats de l’assemblée délibérante,
ils n
ont pas, non plus, été exposés oralement avant le vote de cette délibération.
L
intégration de la parcelle dans le périmètre d
une ZAC
La déclaration d
intention d
aliéner mentionnait que la parcelle mise en vente
constituait un lot de la zone d
aménagement concerté (ZAC) de l
archipel des îles Lavezzi.
Le 20 juillet 2018, le service en charge de l
instruction de cette déclaration rappelait
79
que le cahier des charges de la ZAC était opposable à tout propriétaire d
un terrain sur l
île de
Cavallo, notamment quant à la répartition des charges de copropriété. En outre, le fait de devenir
propriétaire au titre d
une parcelle comprise dans l
assiette du cahier des charges de la ZAC
emportait adhésion obligatoire à l
association syndicale libre (ASL) chargée d
assurer la
gestion et l
entretien des ouvrages et aménagements d
intérêt collectif et, à ce titre, de répartir
et de recouvrer auprès de ses membres les dépenses afférentes.
L
acte authentique signé le 8 novembre 2018 confirmait que les règles du cahier des
charges de la ZAC devaient être respectées. Il renvoyait, par ailleurs, à l
application des statuts
de l
association syndicale qui avaient été modifiés à la suite d
une assemblée générale des
copropriétaires tenue le 29 juin 2018.
Avec l
acquisition de la parcelle en cause, la collectivité de Corse est devenue redevable
de droit, en tant que propriétaire, de charges de copropriété.
78
Dans l’acte authentique, le notaire a indiqué que les informations concernant, d’une part les travaux de
réhabilitation totale des bâtiments, réalisés par le locataire des constructions, et, d’autre part, l’existence d’un bail
commercial en cours, n’avaie
nt pas été portées à sa connaissance au moment de l
établissement de la déclaration
d
intention d
aliéner
par le vendeur ainsi que par l’acquéreur initialement envisagé.
79
Dans une note interne établie à cette date.
COLLECTIVITE DE CORSE
45
4.2
Un aménagement environnemental contraint jusqu
en 2026
4.2.1
L
existence d
un commerce de restauration en activité
Un bail commercial en cours d
exécution qui, sauf résiliation, interdit à la
collectivité de Corse de disposer de son terrain jusqu
au 1
er
janvier 2027
Le régime des baux commerciaux est défini aux articles L. 145-1 et suivants du code de
commerce. Il s
applique aux contrats portant sur les locaux ou immeubles appartenant à l
Etat,
aux collectivités territoriales et aux établissements publics et donc, en l
espèce, au bail liant la
collectivité de Corse et la société qui exploite le restaurant installé sur la parcelle.
Initialement conclu le 30 novembre 2017 entre l
ancien propriétaire du terrain et la
société exploitant le commerce, le bail concerne la totalité de la parcelle et des constructions
édifiées sur place, à savoir deux bâtiments à usage commercial et un entrepôt. Les biens loués
sont destinés à l
usage commercial de restauration, bar, brasserie
80
. Il a une durée de neuf
années entières et consécutives, allant du 1
er
janvier 2018 au 31 décembre 2026. Durant cette
période, la jouissance de la parcelle revient au locataire.
La collectivité de Corse a eu une connaissance certaine de l
existence du bail suite au
courrier du 29 août 2018 émanant de l
acquéreur évincé, au projet d
acte d
authentique de vente
de la parcelle communiqué le 15 octobre 2018 par le notaire et à la signature de l
acte définitif
le 8 novembre 2018. Ce faisant, le contrat lui est devenu opposable et elle s
est substituée à
l
ancien bailleur dans ses droits et obligations
81
.
De ce fait, la collectivité de Corse ne peut disposer de son terrain jusqu
au
1
er
janvier 2027 et sous réserve, à cette échéance, de ne pas reconduire le bail.
La collectivité de Corse ne dispose d
aucun état des lieux des constructions
Selon l
article L. 145-40-1 du code de commerce, lors de la prise de possession des
locaux par le locataire en cas de conclusion d
un bail, un état des lieux est établi avec le bailleur.
Ce document est joint au contrat de location ou, à défaut, est conservé par chacune des parties.
Le contrat de bail, au cas d
espèce, ne comporte pas d
état des lieux annexé et ne fournit
aucun élément précis sur ce point.
Depuis 2018, la collectivité de Corse n
a, pourtant, engagé aucune diligence pour en
faire élaborer un, en motivant sa démarche par le changement de propriétaire de la parcelle et
par l
absence d
état des lieux établi au moment de la conclusion du bail. Elle ne dispose donc,
à ce jour, d
aucun descriptif des immeubles dont elle est propriétaire et de leur état d
entretien.
80
Selon le bail, le locataire est également autorisé à réaliser toute activité annexe, notamment touristique,
hôtelière, para-hôtelière, d
hébergement touristique, jardin potager, discothèque, salon de thé.
81
Le changement de propriétaire de la parcelle ne nécessitait pas la conclusion d’un aven
ant au bail initial.
COLLECTIVITE DE CORSE
46
Les trois options envisagées par la collectivité de Corse quant au devenir du bail
Alors que l
acquisition de la parcelle est intervenue en novembre 2018, ce n
est que près
de deux ans plus tard que la collectivité de Corse a adressé trois courriers successifs à son
locataire afin de soulever la question du devenir du bail.
Le premier, daté du 5 août 2020 et notifié le 27 août par voie d
huissier de justice,
présentait les trois options principales compatibles avec les objectifs du droit de préemption
relatif aux espaces naturels sensibles. Il s
agissait, soit d
une résiliation du bail à court terme
pour la démolition des locaux, soit d
un refus de renouvellement du bail à l
échéance, soit d
un
maintien de l
activité commerciale sur la partie bâtie de la parcelle selon des modalités
compatibles avec le projet de mise en valeur ayant conduit à exercer le droit de préemption. Le
courrier ajoutait que chacune des options devait désormais faire l
objet d
une analyse juridique
plus approfondie et contradictoire, de manière à ce que chacune des parties puisse faire valoir
ses arguments. Pour cela, la collectivité de Corse proposait que son avocat prenne l
attache de
celui du locataire et sollicitait ses coordonnées.
Ce courrier a fait l
objet de relances les 2 septembre et 24 novembre 2020 restées sans
réponse. Dans ce contexte, une nouvelle démarche a été effectuée par la collectivité de Corse
le 5 mars 2021. Le locataire y a cette fois-ci répondu le 10 mars 2021 en communiquant les
coordonnées de son avocat. Pour autant, la collectivité de Corse n
a réalisé, depuis lors, aucune
démarche auprès de lui soit directement, soit par l
intermédiaire de l
un de ses conseils.
Un cadre juridique limité pour procéder à la résiliation du bail, hors le cas d
un
manquement du locataire à ses obligations contractuelles
L
article L. 213-10 du code de l
urbanisme
82
prévoit que les locataires de locaux à usage
commercial situés dans un bien acquis par préemption ne peuvent s
opposer à leur démolition.
Le propriétaire doit verser les indemnités auxquelles le locataire peut prétendre.
Ainsi, si la collectivité de Corse décidait de résilier le bail avant le 31 décembre 2026
pour détruire les constructions, elle devrait obligatoirement verser une indemnité réparant
l
intégralité du préjudice subi par le locataire. S
y ajouteraient les coûts de démolition des
constructions et de remise en état du site.
Hormis ce cas de figure, les conditions d
interruption d
un bail commercial avant son
terme sont prévues par l
article L. 145-4 du code de commerce et reprises dans le contrat liant
la collectivité de Corse à son locataire. Elles s
avèrent inapplicables au cas d
espèce s
agissant
des cas de figure que le bailleur est susceptible d
invoquer.
Ainsi, le bail prévoit, dans son article 28, sa résiliation de plein droit par le bailleur, soit
du fait d
un défaut de paiement du loyer ou de remboursements de charges, soit du fait de
l
inexécution par le locataire de l
une ou l
autre des dispositions du bail.
82
Bien que l’article L. 213
-
10 du code de l’urbanisme concerne le droit de préemption urbain, il est
applicable au droit de préemption relatif aux espaces naturels sensibles par renvoi de l’article L. 215
-20 du même
code.
COLLECTIVITE DE CORSE
47
Or, depuis 2018, la collectivité de Corse n
a relevé aucun manquement alors que,
pourtant, cette option aurait pu être envisagée suite à la réalisation par le locataire de
constructions non-conformes au permis de construire du 25 avril 2019 mais également après le
dépôt, sans autorisation préalable, d
une déclaration de travaux le 16 août 2022 (Cf point 4.2.3).
Dans l
hypothèse où une telle situation perdurerait jusqu
à l
échéance du bail et faute
de résiliation dans l
intervalle de ce dernier à l
initiative du locataire
83
, la collectivité de Corse
ne pourrait alors récupérer la jouissance de la parcelle qu
en décidant de ne pas renouveler le
contrat au-delà du 31 décembre 2026.
4.2.2
Des mesures de gestion de la parcelle inexistante
L
article L. 215-21 du code de l
urbanisme prévoit que les terrains acquis par voie de
préemption au titre des espaces naturels sensibles sont aménagés pour être ouverts au public,
sauf exception justifiée par la fragilité du milieu naturel.
La parcelle fait partie du domaine privé de la collectivité de Corse. En l
état, du fait de
son intégration dans le périmètre d
une ASL, elle ne peut être incorporée au domaine public
quand bien même elle serait affectée à l
usage direct du public et ferait l
objet d
aménagements
propres à lui conférer cette qualification
84
.
Deux ans après l
acquisition, la collectivité de Corse a adressé au locataire les trois
courriers précités des 5 août, 2 septembre et 24 novembre 2020 afin de solliciter une visite des
lieux en sa compagnie, à une date à définir. Ces demandes sont restées sans réponse et la
collectivité de Corse n
a plus fait de nouvelles démarches en ce sens.
Selon l
article 19 du bail, le locataire doit laisser en permanence un accès libre aux
locaux notamment pour que le bailleur puisse vérifier leur bon entretien. Sauf urgence
manifeste, ce dernier doit simplement l
aviser au moins 48 heures à l
avance. Ainsi, en
respectant l
information préalable et le délai de préavis requis, une visite par la collectivité de
Corse aurait pu avoir lieu. L
absence de réponse aux trois courriers ne pouvait donc être
assimilée à un refus d
autorisation du locataire, le bail ne lui donnant pas cette prérogative.
Depuis 2018, les services de la collectivité ne se sont donc jamais rendus sur le site. Dès
lors, aucun diagnostic n
a été établi quant à l
état environnemental de la parcelle, qui ne fait
l
objet d
aucun plan de gestion. En raison du bail commercial en cours, nul aménagement n
a
été réalisé sur place et aucun public n
y a été accueilli. Selon la collectivité de Corse, une visite
de la parcelle était néanmoins prévue « avant l
été 2023 ».
83
Le bail pré
voyant que la résiliation ne peut intervenir à l’initiative du locataire qu’à l’expiration d’une
période triennale, elle n’est donc désormais plus possible qu’avec une date d’effet au 31
décembre 2023, soit au
terme de la deuxième période de trois ans d’ap
plication du contrat.
84
La domanialité publique est en effet incompatible avec le régime juridique défini par l’ordonnance
n° 2004-632 du 1
er
juillet 2004 relative aux associations syndicales de copropriétaires, notamment au regard du
principe d’inaliénabilité qui s’applique aux biens du domaine public. Conseil d’Etat, chambres réunies,
10 mars 2020 (n° 432555).
COLLECTIVITE DE CORSE
48
L
article L. 215-22 du code de l
urbanisme prévoit un délai de dix ans après l
acquisition
pour que le terrain soit utilisé comme espace naturel sensible. Passé ce délai et faute de pouvoir
justifier d
une telle utilisation, notamment si le terrain conservait sa vocation commerciale
actuelle, la collectivité de Corse s
exposerait à une possible demande de rétrocession que
pourrait formuler l
ancien propriétaire
85
.
4.2.3
La présence de constructions illégales
La régularisation en 2019 des constructions qui avaient été antérieurement édifiées
sans autorisation d
urbanisme
Alors que la décision de préemption a été prise le 13 août 2018 et notifiée au propriétaire
de la parcelle et au notaire respectivement les 16 et 20 août 2018, le locataire avait déposé le
9 août 2018 une demande de permis de construire auprès de la commune de Bonifacio aux fins
de restructuration et d
extension de la cuisine du restaurant
86
.
L
acte authentique de vente signé le 8 novembre 2018 mentionnait que « le bien n
a fait
l
objet d
aucune demande de permis de construire ainsi que le vendeur le déclare, précisant
toutefois que son achèvement a eu lieu à la fin des années 1980. Le bien a fait l
objet de travaux
de réhabilitation totale par le locataire dans le courant de l
année 2017 sans autorisation. »
L
acte authentique ajoutait qu
« il est toutefois précisé que ces travaux ont fait l
objet
a
posteriori
(août 2018) d
une demande de permis de construire ». Une copie du dossier
technique d
architecte établi pour ces travaux figurait en annexe de l
acte authentique.
La commune de Bonifacio a délivré un permis de construire le 25 avril 2019
mentionnant une surface existante avant travaux de 359 m², une surface créée de 137,5 m² et
une surface supprimée de 41 m² soit,
in fine
, un total de 455,5 m². Selon le permis, il s
agissait
de régulariser des travaux réalisés sans autorisation pour la construction existante édifiée dans
les années 1970 et pour la restructuration du restaurant.
La collectivité de Corse n
a pas été sollicitée par le locataire à ce sujet. Elle n
a donc
pas donné d
accord pour la régularisation des constructions.
Pour autant, à partir du moment où elle a eu connaissance de la demande de permis, elle
n
a pas sollicité la commune de Bonifacio afin d
obtenir des informations à son sujet ni formulé
d
opposition, soit au moment de la signature de l
acte authentique, soit durant la phase
d
instruction. Une fois le permis délivré, elle n
a pas établi de recours gracieux auprès du maire
de Bonifacio et de recours contentieux devant le tribunal administratif, alors qu
elle pouvait
juridiquement le faire en sa qualité de propriétaire du bien
87
. Ce faisant, la collectivité de Corse
a implicitement accepté la démarche de régularisation des constructions illégalement édifiées
sur le terrain qu
elle avait acquis et dont elle est également devenue propriétaire.
85
Lorsque la préemption a été exercée au titre des espaces naturels sensibles, aucun droit de rétrocession
n’est prévu en faveur de l’acquéreur évi
ncé.
86
Selon l’article R 423
-
1 du code de l’urbanisme, le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire
ou une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux peuvent déposer une demande
de permis de construire.
87
Et en vertu de l’article L. 600
-1-
2 du code de l’urbanisme.
COLLECTIVITE DE CORSE
49
Le projet de réalisation en 2022 de nouveaux travaux par le locataire sans
autorisation préalable sollicitée auprès de la collectivité de Corse
L
article 24 du contrat de bail prévoit que le locataire peut opérer toute opération
d
aménagement du bien loué et procéder à tous autres travaux, notamment de destruction ou de
construction de nouveaux locaux ou bâtiments, après accord préalable et exprès du bailleur.
Par courrier du 16 août 2022, la commune de Bonifacio a informé la collectivité de
Corse du dépôt par le locataire d
une déclaration préalable de travaux. Or, la collectivité de
Corse n
avait pas été saisie préalablement par celui-ci afin qu
elle l
autorise à établir une telle
déclaration. Elle en a informé la commune de Bonifacio le 13 septembre 2022.
Cette dernière, dès le 31 août 2022, avait toutefois pris une décision d
opposition à la
déclaration du locataire au motif que les travaux envisagés, dépassant une surface au sol de
20 m², nécessitaient une demande de permis de construire. Elle en a informé la collectivité de
Corse le 14 septembre 2022 en lui demandant quelle serait sa position si une telle demande était
ultérieurement déposée par le locataire. Aucune réponse ne lui a été fournie.
L
existence de constructions édifiées illégalement après que la collectivité de Corse
soit devenue propriétaire de la parcelle
Selon la décision d
opposition du 31 août 2022 prise par la commune de Bonifacio, la
déclaration de travaux visait non seulement à autoriser de nouvelles constructions mais
également à en régulariser certaines construites en non-conformité avec le permis de construire
délivré le 25 avril 2019. Il s
agissait d
un auvent de 80 m² abritant des chambres froides et d
un
Algeco de 14 m² permettant le stockage de produits alimentaires.
S
agissant de ces deux constructions, la décision d
opposition visait un procès-verbal
de constat d
infraction du 23 mars 2021 et un rapport de contrôle du 6 juillet 2022 établis par
la direction départementale des territoires de la Corse-du-Sud
88
. Le procès-verbal a été notifié
à la collectivité de Corse par courrier du 15 avril 2021, qui rappelait l
infraction relevée et
demandait la constitution, sous un délai d
un mois, d
un dossier de régularisation. Une même
notification a été adressée au locataire. Pour autant, suite à un contrôle effectué le 6 juillet 2022,
le rapport de la direction départementale des territoires concluait à l
absence de démarches
destinées à régulariser la situation administrative de ces deux constructions illégales.
Or, ces dernières sont juridiquement la propriété de la collectivité de Corse en
application des dispositions de l
article 546 du code civil et du contrat de bail
89
.
88
Le procès-verbal du 23 mars 2021 constatait une violation des règles d
urbanisme avec la présence sur
le terrain appartenant à la collectivité de Corse d
un Algeco d
une surface d
environ 14 m². Le rapport de contrôle
du 6 juillet 2022 faisait état, quant à lui, de ce même Algeco et d’un auvent de 80 m², ces deux éléments n’étant
pas compris dans le permis de construire de régularisation délivrée le 25 avril 2019 par la commune de Bonifacio.
89
Selon son article 24, tous embellissements, améliorations et installations faits par le preneur dans les
locaux loués resteront, en fin de jouissance, la propriété du bailleur sans indemnité à la charge de ce dernier.
COLLECTIVITE DE CORSE
50
Alors même que les dispositions du bail n
avaient pas été respectées s
agissant de
l
autorisation préalable à donner par le propriétaire et que toute nouvelle construction est par
principe interdite sur un espace naturel sensible, la collectivité de Corse n
a pas adressé le
moindre courrier à son locataire afin de dresser le constat de ses manquements contractuels, de
le mettre en demeure de respecter les obligations qui s
imposent à lui et de lui demander de
supprimer les deux constructions édifiées sans autorisation d
urbanisme.
La collectivité de Corse a donc tacitement accepté, d
une part la réalisation sur son
terrain de nouvelles constructions illégales et, d
autre part, que l
édification d
autres éléments
bâtis puisse être envisagée sans que son autorisation préalable soit sollicitée par le locataire.
En réponse à un extrait des observations provisoires de la chambre, le locataire indique
qu
il sollicitera à nouveau une autorisation administrative pour régulariser les constructions et
réaliser son projet de réhabilitation globale.
4.2.4
Le refus de recouvrement des loyers dus par le locataire
La contrepartie financière d
un bail commercial est le versement d
un loyer par le
locataire. Le bail auquel est partie la collectivité de Corse prévoit, dans son article 9, un loyer
de 20
000 € par an
hors droits et hors charges, le premier paiement devant être réalisé le
30 septembre 2018.
L
article 10 fournit les modalités de révision du loyer qui peut intervenir au moins tous
les trois ans révolus. En application de ces dispositions, une révision était possible dès le
30 novembre 2020, au terme de la première période triennale. La collectivité de Corse n
a fait
aucune démarche en ce sens. La prochaine échéance de révision est le 30 novembre 2023.
Depuis l
acquisition de la parcelle, le locataire aurait dû verser un loyer au 30 septembre
des années 2019, 2020, 2021 et 2022, soit un montant cumulé de 80 000
€.
Pourtant, la
collectivité de Corse n
a pas émis de titre de recettes pour les recouvrer
90
.
Dans ce contexte, le locataire a établi un chèque de règlement puis l
a fait remettre par
voie d
huissier de justice au payeur régional, comptable public de la collectivité de Corse. Une
telle démarche est intervenue le 25 septembre 2019, le 30 septembre 2020, le 5 octobre 2021 et
le 29 septembre 2022, chaque fois pour le montant du loyer annuel du.
90
Sur ce point, suite à une question portant sur le suivi de l
acquisition de la parcelle de Cavallo posée
par un conseiller de l
Assemblée de Corse lors de sa session du 25 février 2021, le président du conseil exécutif
de Corse avait répondu que l
exploitant avait proposé de verser des loyers mais qu
il avait refusé de les encaisser
tant que la situation n
était pas juridiquement régularisée. Par ailleurs, en réponse à des interrogations sur la
situation de la parcelle de Cavallo formulées par une association de défense de l
environnement, la collectivité de
Corse lui a notamment indiqué, par courrier du 3 mars 2021, que, dans la mesure où le locataire n
avait pas répondu
aux multiples correspondances qui lui avait été adressées, elle n
avait pas souhaité pour l
heure procéder à
l
encaissement ni même à la demande de paiement des loyers prévus par le bail commercial.
COLLECTIVITE DE CORSE
51
En application de l
article 2240 du code civil, chacune de ces démarches a interrompu
la prescription quinquennale
91
instituée par l
article 2224 du même code
92
et applicable à la
créance résultant du contrat de bail liant la collectivité de Corse à son locataire
93
.
Le comptable public n
a pas pris en charge les quatre chèques en arguant du fait
qu
aucun titre de recette exécutoire n
avait préalablement été établi par la collectivité de Corse
et qu
il ne lui appartenait pas de s
immiscer dans les relations entretenues entre les parties au
contrat. Après les tentatives de paiement, le payeur régional en a informé la collectivité de Corse
par courriel en 2020, 2021 et 2022. En 2020 et 2021, il a également sollicité dans son message
des instructions quant au recouvrement des loyers concernés. Aucune réponse ne lui a été
fournie.
Depuis 2019, il n
y a pas eu d
échange entre la collectivité de Corse et son locataire
pour parvenir à un paiement régulier du loyer. Aucun recouvrement n
a donc été réalisé.
Le locataire exerce donc son activité commerciale sans que la collectivité de Corse
perçoive la contrepartie financière prévue au bail. Il bénéficie donc,
de facto
, d
une occupation
des lieux qui lui est consentie à titre gratuit.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la chambre, le président du conseil
exé
cutif de Corse confirme son refus d’encaisser les loyers commerciaux. Il
explique cette
position par le caractère complexe de la situation juridique de la parcelle qui doit conduire
«
l’ensemble des pouvoirs publics
à
définir et mettre en œuvre une stratég
ie d'ensemble, en
concertation notamment avec l'Etat, la commune de Bonifaziu et le Conservatoire du littoral,
visant au rétablissement de l'Etat de droit sur l’île de Cavaddu, incluant son libre accès au
public, et le respect des normes urbanistiques et environnementales.
»
La chambre rappelle, toutefois, que le président du conseil exécutif de Corse est, selon
l’article L. 4422
-
25 du CGCT, l’ordonnateur des dépenses et prescrit l’exécution des recettes
de la collectivité de Corse. A ce titre, l
’article 11
du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012
relatif à la gestion budgétaire et comptable publique prévoit qu’il constate les droits et les
obligations, liquident les recettes et émet les ordres de recouvrer.
En l’espèce, les loyers dus à
la collectivité de
Corse s’appuient sur une obligation réelle
non contestée, le bail, et doivent
donc être recouvrés.
4.2.5
Le défaut de paiement des charges de copropriété
Le cahier des charges de la ZAC de l
archipel des îles Lavezzi est opposable à la
collectivité de Corse qui, par effet induit, est également devenue membre de l
ASL des
copropriétaires, dénommée « association syndicale de l
île de Cavallo (ASIC) », et donc
redevable des charges de copropriété.
91
Au cas d’espèce, il s’agit de la prescription d’assiette ou de mise en recouvrement.
92
Cet article dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du
jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits permettant de l’exercer.
93
Cour de cassation, chambre civile, 6 juillet 2022 (n° de pourvoi 21-15.039).
COLLECTIVITE DE CORSE
52
Selon l
acte authentique de vente de la parcelle, la collectivité de Corse s
engage à
exécuter toutes les charges, clauses et conditions contenues dans les statuts de l
ASIC et
supporte les charges à compter du jour de l
entrée en vigueur de la jouissance et le coût des
travaux qui seront décidés à compter de ce jour
94
, exécutés ou non ou en cours d
exécution.
Depuis 2018, plusieurs demandes de paiement de charges ont été notifiées à la
collectivité de Corse.
Celle-ci ne s
est toutefois acquittée d
aucune des sommes demandées. Elle s
est d
abord
retranchée, pour motiver son refus de paiement
95
, sur les termes de l
acte authentique de vente
qui introduisait un doute sur l
appartenance de la parcelle à la ZAC. Après que cette incertitude
ait été levée le 15 juin 2019 suite à une assemblée générale des copropriétaires, ce dont la
collectivité de Corse a eu connaissance le 22 juillet 2019, elle ne s
est pas néanmoins acquittée
des charges dues et n
a pas non plus engagé de démarches auprès de l
ASIC ou de son syndic
afin d
avoir des précisions à leur sujet ou en contester le montant.
Ce n
est finalement que le 24 mai 2023, soit quatre ans et demi après le transfert de
propriété, que la collectivité de Corse, par le biais d
un courrier adressé au syndic, l
a informé
qu
elle serait en mesure de donner suite aux appels de fonds dès lors qu
aura pu être déterminé,
sur les plans juridique et comptable, le montant des charges réellement dues.
Le contrat de bail applicable aux relations entre la collectivité de Corse et le locataire
du restaurant présente, dans son article 11, les modalités de répartition des charges entre les
parties. Il précise que le locataire remboursera au bailleur l
ensemble des charges relatives au
bien loué figurant sur le décompte établi par l
ASIC. Ce remboursement est réalisé sur la base
d
un relevé établi annuellement par le bailleur.
La collectivité de Corse doit donc régler l
intégralité des charges auprès de l
association
des copropriétaires puis demander à son locataire de rembourser celles qui lui incombent. Ce
dispositif n
a jamais été
mis en œuvre.
Depuis l
acquisition de la parcelle, le locataire a payé
directement à l
ASIC les charges de copropriété.
Celui-ci s
est ainsi substitué à la collectivité de Corse sans que les modalités de leur
répartition soient préalablement définie
s
. En tout état de cause, si le bail en cours n
était pas
renouvelé à son échéance, la totalité des charges dues annuellement devrait alors être payée par
la collectivité de Corse
96
.
En réponse à un extrait des observations provisoires, le locataire indique qu
il entend,
dans les meilleurs délais, réclamer à la collectivité de Corse les sommes correspondant aux
charges de copropriété.
94
Selon les termes de l’article L. 213
-
14 du code de l’urbanisme, l
e transfert de propriété intervient à la
plus tardive des dates de signature de l’acte authentique ou de paiement du prix de vente. Au cas d’espèce, cette
date est celle du paiement effectif intervenu le 26 novembre 2018.
95
Le refus de paiement a été notifié au syndic par courrier de la collectivité de Corse du 20 mars 2019.
96
Pour l
année 2022, le budget prévisionnel de l
’association syndicale était de 1,4 M€. La collectivité de
Corse détient, pour la parcelle acquise, 32 756 tantièmes généraux sur un total de 4 220 939, soit 0,8 %. En tenant
compte de ces données générales et hors dépenses particulières et/ou exceptionnelles de l’ASIC, le montant annuel
des charges dues par la collectivité de Corse peut être estimé,
a minima,
à 11
000 € par an. Par ailleur
s, la
collectivité de Corse s’acquitte auprès du Trésor public de la taxe foncière applicable à la parcelle d’un montant
de près de 4
000 € par an.
COLLECTIVITE DE CORSE
53
Rappel du droit n° 5 :
Procéder à l’encaissement des
loyers annuels dûs par le locataire et
au paiement des charges de copropriété conformément aux dispositions des articles 9 et 11
du contrat de bail.
4.3
La difficile transformation de la parcelle à compter de 2027
4.3.1
Une indemnisation obligatoire du locataire si le bail n
est pas renouvelé
L
article L. 145-8 du code de commerce prévoit que le droit au renouvellement du bail
ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux. Selon
l
article L. 145-10 du même code, le locataire doit notifier au bailleur sa demande de
renouvellement dans les six mois qui précèdent l
expiration du bail. Le bailleur dispose de trois
mois pour faire connaître son refus de renouvellement en précisant les motifs de sa décision.
Le bail commercial en cours liant la collectivité de Corse et son locataire ne contient
aucune disposition expresse concernant son éventuel renouvellement à échéance. La collectivité
de Corse pourra donc ne pas renouveler le bail si une demande lui est adressée.
Dans ce cas de figure, l
article L. 145-14 du code de commerce prévoit que le
propriétaire doit payer au locataire une indemnité d
éviction égale au préjudice causé par le
défaut de renouvellement
97
. En vertu de l
article L. 145-26 du même code, lorsque le bail
commercial concerne un immeuble appartenant à une collectivité territoriale, son
non-renouvellement impose à celle-ci le paiement de l
indemnité, même si son refus est justifié
par une raison d
utilité publique.
La collectivité de Corse devra obligatoirement verser une indemnité d
éviction
98
. Ce
point est d
ailleurs évoqué dans le courrier du 5 août 2020 qu
elle a adressé au locataire.
Le montant de l
indemnité peut être fixé amiablement, le cas échéant en recourant à des
experts capables d
évaluer la somme permettant de compenser le préjudice financier subi. En
cas de désaccord, le tribunal judiciaire peut être saisi et fixer lui-même le montant de
l
indemnité en vertu de son pouvoir souverain d
appréciation
99
.
La collectivité de Corse devra donc se soumettre à une procédure amiable ou judiciaire
d
évaluation de l
indemnité d
éviction. A ce stade, elle a indiqué qu
elle n
avait établi aucune
estimation du montant qu
elle pourrait représenter.
97
L
article L. 145-17 du code de commerce ne prévoit que deux cas de figure qui permettent au bailleur
de refuser le renouvellement sans être tenu au paiement d
une telle indemnité. Leur champ d
application est
toutefois particulièrement réduit. En effet, le bailleur doit, soit justifier d
un motif grave et légitime à l
encontre
du locataire sortant, soit établir que l
immeuble doit être totalement ou partiellement démoli en raison de son état
d
insalubrité reconnue par l
autorité administrative ou ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état.
98
Selon l
article L. 145-14 du code de commerce, l
indemnité d
éviction comprend notamment la valeur
marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des
frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds
de même valeur.
99
Cour de cassation, chambre civile, 15 octobre 2008 (n° de pourvoi 07-17.727).
COLLECTIVITE DE CORSE
54
4.3.2
Une destination définitive des constructions restant à définir
L
article L. 215-11 du code de l
urbanisme prévoit que si la construction présente sur le
terrain acquis par voie de préemption est conservée, elle est affectée à un usage permettant la
fréquentation du public et la connaissance des milieux naturels.
La rédaction de ces dispositions induit que la construction doit, en principe, être
supprimée, ce qui est cohérent avec l
objectif de constitution d
un espace naturel sensible. La
destruction du bâti rend intégralement à la nature le terrain concerné. Dans cette logique, la
construction n
est conservée que par exception et convertie en lieu d
information du public.
La collectivité de Corse aura donc le choix entre ces deux options, dès lors qu
elle
donnera à l
espace acquis la destination qui a justifié l
exercice du droit de préemption. Selon
le choix opéré, ses conséquences financières pourraient être significatives.
La démolition des 450 m² de bâtiments présents sur la parcelle va nécessairement
entraîner des coûts de travaux et de remise du site dans son état naturel qui devraient être
importants en raison des contraintes propres que crée l
insularité de Cavallo. Au-delà des
difficultés techniques de réalisation de l
opération, le déplacement éventuel d
engins de travaux
sur l
île sera onéreux, comme le transport hors de Cavallo des gravats issus de la démolition.
Dans le cas de figure où la collectivité de Corse déciderait de conserver tout ou partie
des bâtiment existants, la question de leur restructuration sera alors posée puisqu
ils ont été
conçus pour répondre aux besoins de fonctionnement d
un établissement de restauration. Des
travaux de réaménagement seront donc nécessaires pour transformer les lieux en un espace
d
accueil et d
information du public. Là encore, l
insularité de Cavallo aura une incidence sur
le coût des travaux par rapport à celui constaté d
ordinaire pour des opérations de même nature.
En outre, le fonctionnement d
un tel espace nécessitera la présence sur place de moyens
humains, à tout le moins durant les périodes d
ouverture du site au public. Il s
agira là d
une
dépense nouvelle et supplémentaire pour la collectivité de Corse.
4.3.3
Des difficultés prévisibles d
accessibilité pour le public
Selon l
article L. 215-21 du code de l
urbanisme, les terrains acquis par préemption au
titre des espaces naturels sensibles sont aménagés pour être ouverts au public, sauf exception
justifiée par la fragilité du milieu naturel.
Selon les informations et constats disponibles, cette exception ne trouve pas à
s
appliquer pour la parcelle acquise sur
l’île
de Cavallo, qui devra donc nécessairement
accueillir d
u public pour justifier la préemption mise en œuvre
en 2018 par la collectivité de
Corse. Or, pour rendre cet accueil effectif, plusieurs problèmes existants quant aux conditions
d
accès à l
île puis à la circulation sur place devront être préalablement résolus.
COLLECTIVITE DE CORSE
55
Les conditions restrictives d
accès à l
île de Cavallo
Cavallo n
est accessible par la mer que par le biais de quatre aménagements qui
permettent aux bateaux d
accoster. L
île dispose ainsi d
un port et de trois pontons
100
. L
accès
au port n
est possible qu
en utilisant une navette dont l
ASIC fixe la fréquence de rotation et le
prix du billet.
En l
état, tout visiteur ne pourra donc se rendre sur l
île que par ses propres moyens s
il
dispose d
un bateau, ou en empruntant la navette.
Or, les conditions d
utilisation de celle-ci sont restrictives selon les termes du règlement
« complémentaire et éthique » approuvé le 12 décembre 2020 par l
assemblée générale des
copropriétaires
101
. Ainsi, son article 4 prévoit que le service de liaison maritime entre l
île de
Cavallo et la Corse ne peut être utilisé, sauf exceptions, que par certains usagers dont la liste
est définie limitativement. Il s
agit principalement, d
une part des propriétaires et de leurs amis,
invités et familles et, d
autre part, des gérants de restaurants, bars, magasins et hôtels et de leurs
familles, employés et clients. Le même article précise que le service de transport ne peut en
aucun cas être utilisé à d
autres fins et « encore moins pour le transport de non-résidents non
autorisés. »
En application de ces dispositions, aucun visiteur souhaitant se rendre sur la parcelle
acquise par la collectivité de Corse ne pourra utiliser la navette, sauf à justifier qu
il est l
invité
de ladite collectivité. Le prix associé à un transport depuis les deux points de départ possibles,
à savoir le port de Bonifacio et le ponton sis au lieu-dit Piantarella situé au nord de cette
commune, est élevé et sans doute dissuasif en rapport à l
intérêt potentiel de la visite. En effet,
en 2023 il est de
40 € par personne pour un aller
-retour dans la journée.
En réponse aux observations provisoires de la chambre, le président du conseil exécutif
de Corse fait valoir
que l’utilisation des pontons ne p
eu
t faire l’objet d’une limitation de la part
de l’ASIC
et que les visiteurs peuvent théoriquement utiliser la navette maritime existante ou
le cas échéant, celle que pourrait proposer
à l’avenir
la collectivité de Corse.
Les possibilités limitées de circulation sur l
île
Dans l
hypothèse où un visiteur débarquera pour visiter la parcelle, se posera la
problématique de ses déplacements sur l
île en dehors du domaine public maritime puisque la
parcelle acquise par la collectivité de Corse ne dispose pas d
accès direct à la mer.
En effet, toutes les voies de circulation à Cavallo sont privées et appartiennent aux
copropriétaires. Il n
existe aucune voirie publique. Le règlement de copropriété du
12 décembre 2020, dans son article 17, autorise la circulation sur l
île pour les seules et mêmes
catégories de personnes que celles pouvant emprunter la navette maritime. Cet article fixe
également le type de véhicule électrique pouvant être utilisé, ainsi que leurs règles de
circulation.
100
La propriété de ces pontons n’est pas déterminée. Ils ne font l’objet d’aucune autorisation d’occupation
temporaire (AOT) du domaine public maritime qu’ils occupent. L’amarrage à ces pontons, qui sont situés dans
trois anses de l’île, ne peut être opéré q
ue par des embarcations de taille réduite ou par des bateaux de plaisance.
101
Les prescriptions de ce règlement complètent celles définies dans le cahier des charges de la ZAC
(adopté en mai 1977 et modifié en septembre 1983) et dans les statuts de l’ASIC (
adoptés en avril 1977 et modifiés
en juin 2018).
COLLECTIVITE DE CORSE
56
Ce dispositif restrictif est accentué par les dispositions de l
article 3 du règlement qui,
tenant compte des capacités du système d
épuration des eaux dont dispose Cavallo, limite le
nombre de personnes susceptibles d
être accueillies journalièrement par les propriétaires et,
plus particulièrement, par les établissements recevant du public.
Ainsi, pour le restaurant implanté sur la parcelle appartenant à la collectivité de Corse,
ce nombre ne peut excéder 100, personnel compris. En outre, l
article 3 stipule que les clients
doivent être transportés depuis le port puis y être raccompagnés à bord des voitures électriques
de l
établissement, « sans s
arrêter dans d
autres parties de l
île ».
Ainsi, en application de telles dispositions, seul un nombre limité de visiteurs,
préalablement identifiés comme étant des invités de la collectivité de Corse, pourront se rendre
sur la parcelle depuis le port de Cavallo ou, à défaut, depuis l
un des pontons dont dispose l
île.
Leur circulation sur
l’île
ne pourra nécessairement être ensuite que très réduite.
Dans sa réponse à un extrait des
observations provisoires, le président de l’ASIC
appelle
l’attention quant aux conséquences de l’ouverture
de la parcelle au public à partir du
1
er
janvier 2027. A cet effet, il précise que «
l’
île pourrait être confrontée à des coûts élevés
découlant de
l’entretien des routes, des espaces verts, des plages, des réseaux électriques, des
réseaux hydrauliques, de la collecte et de l’élimination des déchets, et surtout de la sécurité
en
cas d’accès inconditionnel et incontrôlé des personnes et des véhicules a
ux zones privées
actuelles
. »
L
absence de recours contre le règlement de copropriété adopté en décembre 2020
Plusieurs des dispositions du règlement de copropriété adopté par l
ASIC le
12 décembre 2020 posent question quant au principe de libre circulation des personnes et au
droit de propriété. En tout état de cause, elles sont de nature à rendre complexe une éventuelle
ouverture au public de la parcelle à compter du 1
er
janvier 2027.
Pour autant, la collectivité de Corse n
a pas contesté auprès de l
association les
dispositions du règlement. Elle n
a pas non plus introduit de recours contentieux bien qu
elle
puisse le faire en tant que membre de l
ASIC
102
.
La collectivité de Corse n
avait pas assisté à l
assemblée générale des copropriétaires
du 12 décembre 2020, organisée en visioconférence en raison de la crise sanitaire, au cours de
laquelle le règlement a été adopté. Depuis 2019, elle n
a d
ailleurs participé à aucune des
assemblées générales qui se sont tenues. A compter de février 2022, elle n
a plus été destinataire
des convocations, ainsi que des procès-verbaux de réunion, alors que deux assemblées ont eu
lieu les 10 août et 17 décembre 2022
103
. Le 24 mai 2023, la collectivité de Corse a saisi par
courrier le syndic afin de rappeler que ces documents devaient continuer à lui être transmis.
102
Dans la mesure où les statuts de l’ASIC ne fixent pas de délai pour contester les décisions prises par
son assemblée générale, les dispositions de l’article 2224 du code civil relative à la prescription ex
tinctive trouvent
à s’appliquer. Cour de cassation, chambre civile, 14 novembre 2012 (n° de pourvoi 11
-23.808). Un recours peut
donc être introduit devant le tribunal judiciaire dans les cinq ans suivant la notification de la décision de
l’assemblée généra
le du 12 décembre 2020 qui a approuvé le règlement. Cette notification a été faite à la
collectivité de Corse le 5 janvier 2021.
103
La collectivité de Corse a pris connaissance des procès-
verbaux de ces deux réunions par le biais d’une
consultation en ligne, réalisée en mai 2023, du site internet du syndic.
COLLECTIVITE DE CORSE
57
L
association constitue,
de facto
, le seul cadre permettant à un copropriétaire de faire
connaître ses positions, en termes de proposition et/ou de contestation, s
il veut contribuer à
améliorer la gestion de Cavallo en pesant, autant que faire se peut, sur les décisions de l
ASIC.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Au titre de sa compétence de gestion des espaces naturels sensibles, la collectivité de
Corse, depuis 2018, n
a réalisé qu
une seule acquisition portant sur une parcelle de
3,3 hectares sur l
île de Cavallo en Corse-du-Sud pour un montant non négocié de 2
M€
.
La décision de préemption a été prise alors que la collectivité de Corse ne disposait pas
de l’ensemble des informations
juridiques et matérielles qui portaient, d
une part sur la nature,
la consistance, l
état et la légalité des constructions édifiées sur le terrain acquis, d
autre part
sur la présence d
un restaurant en activité sur le site et, enfin, sur l
intégration de la parcelle
au sein d
une zone d
aménagement concertée et son incidence sur les charges de copropriété
à supporter.
Les incertitudes initiales se sont trouvées ensuite confirmées dans les faits, dans un sens
défavorable aux intérêts de la collectivité de Corse.
Ainsi, un bail commercial en cours lui interdit de disposer du terrain jusqu
au
31 décembre 2026. De ce fait, aucun aménagement en vue de son ouverture au public ne peut
être réalisé avant cette échéance. Des constructions édifiées illégalement avant 2018 ont fait
l
objet d
un permis de régularisation en 2019. Pour autant, d
autres éléments de bâtis ont été
construits sans autorisation d
urbanisme après que la collectivité de Corse soit devenue
propriétaire du terrain.
Celle-ci a décidé de ne recouvrer aucun des loyers annuels dus par son locataire. Ce
dernier, à compter de 2018, a, de plus, assuré le paiement des charges de copropriété que la
collectivité de Corse, pour sa part, a refusé de régler.
La transformation de la parcelle en espace naturel sensible et son ouverture au public
à compter de 2027, fondement de la décision de préemption, pourraient être coûteuses et
complexes à réaliser. La collectivité de Corse devra, en effet, verser une indemnité d
éviction
si elle décide de ne pas renouveler le bail commercial. Par ailleurs, la démolition des
constructions ou leur reconversion en lieu d
accueil et d
information du public aura un coût
important, notamment du fait des contraintes spécifiques créées par l
insularité. Enfin, les
règles définies par les copropriétaires de l
île rendent prévisibles des difficultés d
accessibilité
du public à la parcelle, eu égard aux conditions restrictives pour se rendre à Cavallo et aux
possibilités limitées de circulation sur place.
COLLECTIVITE DE CORSE
58
ANNEXES
Annexe n° 1.
La répartition des différents types de littoraux en Corse
.........................
59
Annexe n° 2. Les différents niveaux de protection des espaces naturels
........................
60
Annexe n° 3. Les espaces naturels protégés en Corse
.....................................................
62
Annexe n° 4. Précisions sur les aléas et risques naturels littoraux
..................................
63
Annexe n° 5. L’évolution du trait de côte en Corse
........................................................
64
Annexe n° 6. La population communale exposée à un risque
de submersion
marine
.........................................................................................................
65
Annexe n° 7.
La stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte
.......................
66
Annexe n° 8.
Le PADDUC et la protection du trait de côte
..........................................
68
Annexe n° 9.
Image satellite de la parcelle dont est propriétaire la collectivité
de
Corse sur l’île de Cavallo
...........................................................................
70
COLLECTIVITE DE CORSE
59
Annexe n° 1.
La répartition des différents types de littoraux en Corse
Source : office de l
environnement de la Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
60
Annexe n° 2. Les différents niveaux de protection des espaces naturels
Réserve naturelle corse
Les réserves naturelles terrestres ou marines ont pour vocation de préserver à long terme des
milieux naturels fonctionnels, écologiquement représentatifs et à forte valeur patrimoniale
.
E
lles
r
é
pondent aux objectifs de conservation
précisés
par l
article L. 332-1 du code de l
environnement.
En
Corse, leur classement revient à la collectivité de Corse.
L
a réglementation permet d
exclure, de
restreindre ou d
organiser les activités humaines qui mettent en cause le patrimoine à protéger. Sont
notamment visés les travaux, la circulation des personnes, des animaux et des véhicules, les activités
agricoles, pastorales, forestières, piscicoles ou récréatives (sports de loisirs). Les activités susceptibles
de porter atteinte à l
intégrité des milieux y sont strictement interdits.
Réserves biologiques
Une réserve biologique est un espace protégé en milieu forestier ou en milieu associé à
la
forêt
(landes, mares, tourbières, dunes). Ce statut s
applique aux forêts gérées par l
office National
des Forêts et a pour but la protection d
habitats remarquables ou représentatifs. Selon les habitats et les
orientations de gestion, on distingue les réserves biologiques dirigées, où est mise en place une gestion
conservatoire et les réserves biologiques intégrales où la forêt est laissée en libre évolution
.
Arrêté de biotope
L
arrête de protection de biotope (APB),
pris par le représentant de l
Etat et
d
é
clin
é
aux
articles R.411-15
à
R.411-17 du code de l
environnement, permet de
protéger
les habitats d
espèces
prot
égées
, animales et
végétales. L
es mesures ainsi prises par arrêté peuvent entre autres interdire
certaines actions pouvant porter atteinte à l
équilibre écologique des milieux (ex : interdiction de
destructions de talus et de haies…)
Les sites du conservatoire du littoral
Les sites du conservatoire du littoral
, établissement public administratif,
ont pour vocation
la sauvegarde des espaces côtiers et lacustres. Leur accès au public est encouragé mais reste défini dans
des limites compatibles avec la vulnérabilité de chaque site. En complément de sa politique foncière,
visant prioritairement les sites de fort intérêt écologique et paysager, le conservatoire du littoral peut
depuis 2002 exercer son action sur le domaine public maritime. Ce mode de protection peut être
superposé avec d
autres dispositifs réglementaires ou contractuels.
Les sites acquis par le conservatoire d
espaces naturels
Les Conservatoires d
espaces naturels (CEN) sont des associations à but non lucratif engagées
à enrayer la perte de biodiversité et du patrimoine paysager. Conformément aux dispositions de
l
article L.414-11 du code de l
environnement,
ils
contribuent à mieux connaître, préserver, gérer et
valoriser le
patrimoine naturel
et paysager notamment par la maîtrise foncière
COLLECTIVITE DE CORSE
61
Les parcs naturels régionaux et marins
Les parcs naturels régionaux ont pour but de valoriser de vastes espaces de fort intérêt culturel
et naturel, et de veiller au développement durable de ces territoires dont le caractère rural est souvent
très affirmé. Chaque parc est géré par un syndicat mixte chargé de l
aménagement et de la gestion du
parc. Il fait l
objet d
une charte, qui constitue le projet du parc naturel régional. Cette charte détermine
en particulier les orientations de protection, de mise en valeur et de développement, notamment les
objectifs de qualité paysagère, ainsi que les mesures permettant de les mettre en œuvre et les
engagements correspondants.
Les parcs naturels marins ont pour but, à l
instar des parcs naturels
régionaux
, de concilier la
protection et le
développement
durable de vastes espaces maritimes dont le patrimoine naturel est
remarquable.
Sites Natura 2000
Le réseau Natura 2000, constitué d
un ensemble de sites naturels, terrestres et marins, vise à
assurer la survie à long terme des espèces et des habitats particulièrement menacés, à forts enjeux de
conservation en Europe.
Selon les dispositions des articles L.414-3 et suivants du code de
l
environnement, les sites ont pour
objectifs
de préserver
la biodiversité biologique
et du patrimoine
naturel et
prendre
en
compte les exigences
économiques
, sociales et culturelles ainsi que les
particularités
régionales
. Les propriétaires de droits réels ou utilisateurs de l
espace
marin
peuvent
signer des contrats portant
engagement
conforme aux documents d
orientation et d
objectifs
définis
pour
chaque
site par un comité de pilotage animé par la
région
ou
collectivité
de
Corse
depuis
le
1
er
janvier 2023.
Les zones humides de Ramsar
Les zones humides qui peuvent être proposées à l
inscription sur la liste des sites Ramsar sont
des milieux humides dont la préservation présente un intérêt international au point de vue écologique,
botanique, zoologique, limnologique ou hydrologique. La gestion de ces sites doit permettre de favoriser
leur conservation et leur utilisation rationnelle.
Réserves de biosphère
Une réserve de biosphère est un territoire reconnu par l
UNESCO conciliant la conservation de
la biodiversité et le développement durable, avec l
appui de la recherche, de l
éducation et de la
sensibilisation, dans le cadre du programme sur l
homme et la biosphère.
Aires spécialement protégées
Aires spécialement protégées (ASP) relevant d
un protocole de la convention de Barcelone,
adopté en 1995 et entré en vigueur en 1999. Il demande aux Parties de protéger les espaces maritimes
ayant une valeur naturelle ou culturelle particulière, par la création d
aires spécialement protégées (ASP)
ou d
aires spécialement protégées d
importance méditerranéenne (ASPIM) et de protéger les espèces
animales et végétales menacées ou en voie de disparition.
COLLECTIVITE DE CORSE
62
Annexe n° 3. Les espaces naturels protégés en Corse
Type de protection
Nombre
Surface
Protection
forte
Protection règlementaire
Réserves naturelles
7
86 961
X
Réserves biologiques
7
715
X
Arrêtés de biotopes
38
961
X
Maitrise du foncier
Espaces naturels sensibles
13
Conservatoire du littoral
72
20 448
Conservatoire d
espaces naturels
5
212
Protection contractuelle
Parc naturel régional
1
449 475
Parc naturel marin
1
95
Sites Natura 2000
92
168 601
Protection internationale
Zone humide protégée par la convention de
Ramsar
5
3 027
Protocole de Barcelone
2
1 099
Réserves de biosphère
3
66 670
Patrimoine mondial de l
Humanité
1
11 900
Source : chambre régionale des comptes à partir des données de la collectivité de Corse.
COLLECTIVITE DE CORSE
63
Annexe n° 4. Précisions sur les aléas et risques naturels littoraux
Le trait de Côte
L
érosion côtière est un processus naturel qui se traduit par le déplacement de sédiments.
Ce phénomène résulte d
une combinaison de facteurs également naturels (courants marins,
action dynamique de la houle, sens et force des vents, niveau et modalité de déplacement des
stocks sédimentaires). Les actions anthropiques peuvent modifier et notamment amplifier
l
érosion côtière.
L
érosion côtière
Le trait de côte constitue la limite entre la mer et la terre. La définition retenue peut
toutefois être variable. Lorsque l
objectif est d
étudier ses fluctuations et leurs impacts sur les
enjeux environnementaux, sociaux et économiques des littoraux, le trait de côte constitue moins
une ligne qu
une bande côtière de largeur variable qui intègre des facteurs à la fois humains,
climatiques, géologiques, écologiques, socio-économiques, historiques et culturels. Cette
notion de bande côtière, qui s
étend du domaine marin au domaine continental, permet de rendre
compte de la diversité des environnements littoraux (côtes sableuses, rocheuses, baies,
estuaires, mangroves, plages coralliennes, etc…).
La submersion marine
La submersion marine est une inondation temporaire de la zone côtière par la mer lors
de conditions météorologiques et océaniques défavorables. Elle peut durer de quelques heures
à quelques jours. Trois modes de submersion marine sont distingués : la submersion par
débordement, lorsque le niveau marin est supérieur à la cote de crête des ouvrages ou du terrain
naturel ; la submersion par franchissements de paquets de mer liés aux vagues, lorsque, après
déferlement de la houle, ces paquets dépassent la cote de crête des ouvrages ou du terrain
naturel ; la submersion par rupture du système de protection (défaillance d
un ouvrage de
protection ou formation de brèches dans un cordon naturel, suite à l
attaque de la houle, au
mauvais entretien d
un ouvrage, à une érosion chronique intensive), lorsque les terrains situés
en arrière sont en dessous du niveau de la mer.
L
inondation côtière
Il s
agit d
un phénomène d
inondation causé par un cours d
eau dans la zone côtière où
il rejoint la mer. Lors de tempêtes, l
action de la houle est de nature à ralentir voire à empêcher
l
écoulement naturel du cours d
eau en crue créant ainsi, par contrecoup, un risque d
inondation
de la bande littorale.
COLLECTIVITE DE CORSE
64
Annexe n° 5. L
évolution du trait de côte en Corse
Source : CEREMA (Rapport 2021
Dynamiques et évolution du littoral
Fascicule 10 consacré à la Corse).
COLLECTIVITE DE CORSE
65
Annexe n° 6. La population communale exposée à un risque
de submersion marine
Source : CEREMA - rapport relatif à l
analyse des effets du changement climatique en Corse
Approche
globale et indicateurs pertinents (Rapport final d
étude
Mars 2021).
COLLECTIVITE DE CORSE
66
Annexe n° 7.
La stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte
-
Les principes communs
1 -
Le littoral est un géosystème dynamique. Le trait de côte est naturellement mobile. Il faut
accompagner le changement de paradigme : éviter la « défense systématique contre la mer » et
développer des systèmes d
adaptation raisonnés pour la protection et la recomposition spatiale
du littoral en évitant l
artificialisation du trait de côte.
2 -
Pour anticiper l
urgence de demain et maîtriser à long terme l
occupation du rivage de la
mer dans les territoires exposés aux aléas naturels littoraux, il est indispensable de planifier dès
à présent la recomposition spatiale du littoral et, lorsque cela est nécessaire, la relocalisation
des activités, des biens et des usages, et d
identifier les mesures transitoires à mettre en
œuvre
.
3 -
L
urbanisation dans les secteurs soumis aux risques littoraux doit être fortement maîtrisée.
Le développement d
activités, et tout autre occupation du sol, peuvent être considérées à
condition de ne pas augmenter la vulnérabilité du territoire et de s
inscrire dans une démarche
permettant la résilience et la réversibilité des aménagements existants ou projetés.
4 -
La mobilité du trait de côte et l
ensemble des aléas naturels littoraux doivent être intégrés
ou pris en compte dans l
ensemble des politiques publiques existantes sur les territoires littoraux
et dans les documents de planification (prévention des risques, urbanisme, gestion des milieux,
continuités écologiques...).
5 -
La gestion intégrée du trait de côte et les stratégies mises en place à cet effet doivent
considérer l
ensemble des enjeux présents sur le littoral. Elles prennent en compte les trois
piliers du développement durable (économie, social, environnement), la dimension culturelle
(patrimoine littoral,
paysages…) et la transition énergétique et écologique.
6 -
La gestion intégrée du trait de côte repose sur l
élaboration d
un véritable projet territorial,
intégrant le littoral et les territoires arrières-littoraux, basée sur une approche transversale et
pluridisciplinaire et sur des périmètres et des temporalités adaptés, en cohérence avec les
options d
urbanisme, d
aménagement du territoire et de prévention des risques.
7 -
Dans la perspective du changement climatique, en particulier l
élévation du niveau marin,
il est nécessaire d
anticiper l
évolution des phénomènes physiques littoraux. Cela passe par une
connaissance approfondie du fonctionnement des écosystèmes littoraux dans leur état actuel et
une prévision de leur évolution à court, moyen et long termes.
8 -
Les données de connaissance des écosystèmes côtiers et les perspectives de leur évolution
doivent être partagées avec l
ensemble des acteurs et de la population.
9 -
Les interactions entre l
évolution du trait de côte, les submersions marines et les inondations
nécessitent d
appréhender les risques littoraux et l
ensemble des enjeux présents pour définir
des stratégies cohérentes et coordonnées pouvant mobiliser des outils de gestion spécifiques.
COLLECTIVITE DE CORSE
67
-
Les recommandations stratégiques
1 -
Articuler les échelles spatiales de diagnostic des aléas, de planification des choix
d
urbanisme et des aménagements opérationnels.
2 -
Articuler les échelles temporelles de planification en tenant compte de l
évolution des
phénomènes physiques et en anticipant la relocalisation des activités, des biens et des usages
comme alternative à la fixation du trait de côte, dans une perspective de recomposition spatiale.
3 -
Développer une gestion territoriale cohérente et coordonnée de l
ensemble des risques et
des aléas naturels dans l
aménagement et la gestion du littoral, partagée par les acteurs locaux
et dans le respect de leurs compétences respectives.
4 -
Justifier les choix opérationnels de gestion du trait de côte sur la base d
une évaluation
globale des impacts (économique, sociale et environnementale) et d
une analyse des différents
scénarios, intégrant notamment l
effacement progressif des ouvrages. Cette justification
s
appuiera utilement sur des analyses multicritères.
5 -
Réserver les opérations de protection artificialisant fortement le trait de côte aux zones à
forts enjeux en évaluant les alternatives et en les concevant de façon à permettre à plus long
terme un déplacement des activités et des biens.
6 -
Inciter à l
expérimentation et à l
innovation en privilégiant des méthodes et des techniques
de gestion souple.
7 -
Protéger et restaurer les écosystèmes côtiers (zones humides, cordons dunaires, mangroves,
récifs coralliens...) qui constituent des espaces de dissipation de l
énergie de la mer et
contribuent à limiter l
impact des risques littoraux sur les activités et les biens.
8 -
Développer les projets d
aménagement et de planification territoriale en valorisant l
espace
rétro-littoral et en cohérence avec les cellules hydro-sédimentaires.
9 -
Anticiper les situations susceptibles d
impacter à court terme les personnes, les biens et les
activités économiques en recherchant les modes de gestion les plus adaptés.
COLLECTIVITE DE CORSE
68
Annexe n° 8. Le PADDUC et la protection du trait de côte
Dans l
attente d
une stratégie régionale de gestion du trait de côte, le PADDUC définit
six principes dont quatre concernent la préservation du trait de côte :
-
La lutte contre l
érosion côtière, par des techniques autres que la gestion
souple des dunes, doit être réservée aux secteurs présentant des enjeux
anthropiques et économiques forts et inamovibles qui le justifient ;
-
La protection des cordons dunaires doit être assurée car ils sont stratégiques
pour stabiliser le trait de côte. Aussi leur fréquentation doit être maîtrisée et
gérée. Ils peuvent faire l
objet d
une consolidation par la végétation.
-
Les mesures de défense contre l
’érosion côtière qui seront mises en œuvre
d
ici 2020, après approbation de l
État, pour répondre à une situation
d
urgence économique et sociale (protection des biens et des personnes)
doivent, dans la mesure du possible, être souples et réversibles, et ne pas
aggraver ou reporter le problème sur un territoire voisin où les enjeux sont
également forts. Elles doivent faire l
objet d
une analyse de leurs
conséquences sur les phénomènes d
érosion côtière au-delà du site
géographique concerné.
-
Pour tous les projets pouvant entraîner des phénomènes d
érosion ou de
comblement du littoral, des études de simulation d
évolution du trait de côte
sur longue distance seront obligatoires, afin de mesurer le plus précisément
possible les risques à assumer et éviter des dégradations prévisibles.
Le schéma de mise en valeur de la mer (SMVM)
104
, reprend les éléments du PADD et
en précise certaines modalités d
application. Ainsi, s
agissant de la gestion du trait de côte, le
SMVM prescrit la mise en œuvr
e des méthodes douces existantes
105
. Seules les zones présentant
des enjeux anthropiques et économiques majeurs et une sensibilité à l
érosion pourraient
justifier le recours à des solutions en dur
106
.
104
Le SMVM constitue l’annexe n° 6 du PADDUC.
105
A savoir
: le recul stratégique qui consiste à
relocaliser les biens et les activités pour qu’ils ne soient
plus exposés aux risques ; le laisser-faire qui
consiste à ne pas intervenir sur l’évolution naturelle du trait de côte
;
le rechargement de plage ou de l’avant
-
plage avec du sable qui permet de limiter le phénomène d’érosion sans le
stopper ; la gestion souple des cordons dunaires par des ouvrages à effet de brise-vent, par la consolidation de la
végétation et la gestion du passage des promeneurs ; le drainage des plages pour favoriser le phénomène naturel
de sédimentation ; le rétablissement du transit littoral qui permet de rétablir un flux stoppé par un ouvrage.
106
Le SMVM précise que celles-
ci ne pourraient être mises en œuvre qu’après une étude des possibilités
offertes par les méthodes douces. Il précise que parmi les solutions possibles et après étude au cas par cas, la
priorité doit être donnée aux récifs artificiels et aux structures en géotextiles.
COLLECTIVITE DE CORSE
69
Le SMVM définit ensuite, par zone du littoral
107
, la méthode à mettre en œuvre. Les
deux principes qui dictent les choix retenus sont une gestion douce du trait de côte et la
préservation du caractère naturel des sites (Cap Corse : laisser-faire ; côte occidentale :
laisser-faire, hors golfe d
Ajaccio pour lequel sont préconisés une restauration de la dune par
végétalisation et un rechargement de l
avant-plage ; côte orientale : plusieurs méthodes sont
préconisées selon la situation de chaque zone
108
).
S
agissant du risque de submersion marine, le SMVM indique que l
état d
avancement
des études ne permet pas d
édicter des prescriptions particulières.
Le SMVM fixe trois orientations régionales : privilégier, autant que possible, les
solutions préventives, les solutions d
aménagement douces et la réhabilitation des milieux ;
limiter, autant que possible, le recours aux infrastructures marines, celles-ci devant être
réservées aux situations nécessitant la protection des biens ou des personnes en l
absence
d
autres options ; envisager le recul stratégique à moyen et long terme sur les zones de forts
enjeux pour lesquels d
autres solutions ne pourraient permettre la protection du littoral.
107
S’agissant du site de Bonifacio, le SMVM se contente de dresser le constat de l’existence d’une roche
sédimentaire particulièrement tendre et sensible aux érosions éolienne et marine créant un risque de chute de blocs
plutôt que d’érosion côtière.
108
A savoir, en allant du Nord au Sud, de Bastia à Porto-Vecchio :
-
Zone Lupino-Golo : laisser-faire, gestion du cordon dunaire, rechargement de plage et rétablissement
du transit littoral. Pour les secteurs à forts enjeux, le recul stratégique est préconisé à moyen et long
terme.
-
Zone Golo-Campoloro : : laisser-faire, gestion du cordon dunaire, rechargement de plage,
rétablissement du transit littoral.
Pour les secteurs à forts enjeux, le recul stratégique pourrait être
envisagé en fonction des résultats des méthodes douces mises en œuvre.
-
Zone Campoloro-Tavignano :
laisser-faire, gestion du cordon dunaire et rechargement de plage.
-
Zone Tavignano-Solenzara :
laisser-faire et gestion du cordon dunaire
. D’autres
méthodes douces
pourraient être mises en œuvre pour les secteurs à enjeux.
-
Extrême Sud : rechargement de la plage de Santa Giulia.
COLLECTIVITE DE CORSE
70
Annexe n° 9.
Image satellite de la parcelle dont est propriétaire la collectivité
de Corse sur l
île de Cavallo
Source : Site Géoportail
prise de vue en 2019.
COLLECTIVITE DE CORSE
71
RÉPONSE DE M. GILLES SIMEONI
ORDONNATEUR
COLLECTIVITE DE CORSE
COLLECTIVITE DE CORSE
COLLECTIVITE DE CORSE
COLLECTIVITE DE CORSE
COLLECTIVITE DE CORSE
Chambre régionale des comptes Corse
Quartier de l’Annonciade
CS 60305
20297 Bastia Cedex
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à tout agent public de son administration »
Article 15 de la Déclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen
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sont disponibles sur le site :
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