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LA POURSUITE DES RÉFORMES A LA BANQUE DE FRANCE
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La poursuite des réformes à la Banque
de France
Dans le rapport public annuel pour 2007, la Cour avait examiné
les suites données à son rapport public particulier de mars 2005 sur la
Banque de France portant sur les années 1994 à 2004. Un an après, la
mise en oeuvre de deux réformes majeures dont la Cour avait souligné les
enjeux, le régime de retraite et les modalités de gouvernance, est
effective
. En parallèle, dans de nombreux domaines, les changements
comme les efforts de rationalisation précédemment entrepris se sont
poursuivis.
La réforme du régime de retraite
La Cour avait recommandé une réforme du régime spécial de
retraite des agents de la Banque.
Le 1
er
avril, à l'issue d'un large processus de concertation et
de négociation, la réforme du régime spécial est entrée
effectivement en application. Le nouveau dispositif aligne ce
régime
sur
celui
de
la
fonction
publique
en
instaurant
progressivement un allongement de la durée requise pour
bénéficier d'une pension à taux plein, portée de 37,5 ans à 40 ans,
en même temps qu’un relèvement à 65 ans de la limite d’âge, en
mettant en place un dispositif de décote-surcote et en élargissant
l'assiette de cotisation à l'ensemble des éléments fixes de la
rémunération des agents actifs. Il est également prévu que les
modifications qui seront apportées au régime de la fonction
publique seront automatiquement transposées, s’il y a lieu, dans le
régime de la Banque de France
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COUR DES COMPTES
La mise en oeuvre de cette réforme a recueilli l’accord de
l’État qui s’est engagé à ce que la couverture des engagements de
retraite soit assurée de manière progressive, dans les limites
permises par le résultat brut de la Banque et le versement à l’État
de la part prépondérante de ce dernier. Les modalités en sont les
suivantes :
une dotation annuelle prioritaire à la Caisse de réserve des
employés du montant nécessaire pour que les droits nouveaux
acquis par les agents au cours de l’exercice soient couverts ;
une dotation à une réserve spéciale destinée à couvrir
progressivement la fraction non financée des droits passés
accumulés antérieurement à la réforme.
La répartition du résultat brut de l’année 2006, qui s’établit à
2 054 M€, a ainsi permis d’effectuer :
une dotation à la Caisse de réserve des employés de 155 M€ (ce
montant intègre 125 M€ au titre des droits acquis pendant
l’exercice 2006 et 30 M€ de rattrapage pour l’exercice 2005) ;
une première dotation à la réserve spéciale d’un montant de
109 M€.
A
méthode
et
paramètres
inchangés
par
rapport
à
l’évaluation des engagements de retraite à fin 2006 et selon un
scénario central qui privilégie les départs précoces chez les non-
cadres (ce qui est conforme aux observations relevées dans la
fonction
publique),
l’économie
immédiate,
en
termes
d’engagements de retraite, résultant de la mise en oeuvre de la
réforme du régime serait de l’ordre de 600 M€ et les projections à
horizon de 15 ans font apparaître une économie qui devrait
atteindre 1 Md€. Ce montant est à rapprocher de l’engagement sur
les seuls actifs, soit 4,7 Md€.
L’effort consenti par les actifs sera nettement moindre que
celui consenti par la Banque et, par voie de conséquence, par l’Etat
actionnaire. Mais l’effort accru demandé à l’Etat est, dans une
large mesure, un rattrapage, car au cours des trente dernières
années et alors que le résultat de la Banque a été le plus souvent
très substantiel sur la période, l’Etat n’a laissé la Banque verser
chaque année, au titre de la dotation en fonds propres à la caisse de
réserve, qu’un montant très inférieur à la valeur des droits
nouveaux acquis par les actifs au cours de l’exercice écoulé.
LA POURSUITE DES RÉFORMES A LA BANQUE DE FRANCE
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La réforme de la gouvernance et la clarification des missions
La Cour avait recommandé une réforme de la gouvernance de
la Banque, une clarification des conditions d'application de
dispositions fiscales ou relatives au Code du travail et des modalités
d’exercice de certaines missions.
La loi du 20 février 2007 a tiré toutes les conséquences de
l'intégration de la Banque au sein du Système européen de banques
centrales (SEBC) et notamment du transfert du pouvoir monétaire
à la Banque Centrale Européenne (BCE), en supprimant le Conseil
de la politique monétaire, en replaçant le Conseil général au coeur
de l'administration de la Banque et en instituant un Comité
monétaire au sein de ce dernier.
Le
Conseil
Général
comprend
désormais,
outre
le
gouverneur et les deux sous-gouverneurs, deux membres nommés
par le Président du Sénat et deux membres nommés par le
Président de l’Assemblée nationale ainsi que deux membres
nommés en Conseil des ministres sur proposition du ministre
chargé de l’économie et un représentant élu des salariés de la
Banque de France. Sans changement par rapport aux dispositions
antérieures, un censeur, ou son suppléant, nommé par le ministre
chargé de l’économie, assiste aux séances du Conseil général. Le
Comité monétaire comprend le gouverneur, les deux sous-
gouverneurs et les quatre membres nommés par les présidents des
assemblées parlementaires ; il est chargé d’examiner les évolutions
monétaires, d’analyser les implications de la politique monétaire
élaborée dans le cadre du SEBC et d’adopter les mesures
nécessaires pour transposer les orientations de la BCE.
Il reste que les relations avec l’Etat n’ont pas été totalement
clarifiées par la réforme de la gouvernance de la Banque. La Cour
avait recommandé que cette clarification se fasse autour de trois
principes : distinguer le rôle d’actionnaire de l’Etat des autres
fonctions qu’il remplit, généraliser une démarche de type
« délégation de service public » dans des missions telles que le
surendettement et s’assurer régulièrement de la compétitivité de
l’opérateur. Ces principes demeurent d’actualité. Il importe en tout
cas que l’Etat puisse exercer pleinement ses responsabilités
d’actionnaire dans le respect de l’indépendance de la Banque, ce
qui justifie sa participation au comité d’audit créé en octobre 2004
conformément à une recommandation de la Cour.
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COUR DES COMPTES
En outre, la loi du 20 février 2007 a clarifié les conditions
d'application de dispositions fiscales ou relatives au Code du
travail, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles réformes, comme la
Cour l’avait recommandé dans son rapport public de mars 2005.
La loi a aussi précisé les modalités d'exercice de certaines
missions de la Banque. Désormais expressément habilitée à se faire
communiquer tous documents et renseignements nécessaires pour
l’exercice de ses missions fondamentales, la Banque de France
s’est vu confier, au titre de ces dernières, l’établissement de la
balance des paiements et de la position extérieure de la France y
compris la contribution à l’établissement de la balance des
paiements et de la position extérieure de la zone euro. Cette
clarification répond aux recommandations de la Cour. En outre,
autorisée à communiquer les renseignements qu'elle détient sur
leur situation financière aux autres banques centrales, aux
institutions chargées d'une mission similaire à l'étranger et aux
établissements de crédit, la Banque a pu accéder, par décision de la
Commission
bancaire
en
date
du
19 juin 2007,
au
statut
d'organisme d'évaluation externe de crédit, prévu par la réforme
dite "Bâle II". Ce statut conforte l'assise de son activité de cotation
des entreprises.
La poursuite des efforts de rationalisation et de la baisse du point
mort
La Cour avait recommandé que la Banque de France bâtisse et
mette en oeuvre un modèle financier permettant d’abaisser son point
mort
46
afin de pouvoir entrer dans le groupe des banques centrales
nationales les plus efficientes de l’Eurosystème. Dans le rapport
public annuel de février 2007 la Cour avait évalué les efforts engagés
par la Banque en vue de maîtriser ses charges et d’abaisser son point
mort à 1 % en 2008.
La réforme de la fonction achat a permis de réaliser des
économies
assez
substantielles.
La
refonte
du
siège
qui
s’accompagne de réformes de structure, avec le rapatriement des
services du secrétariat général de la commission bancaire, devrait
aussi se traduire par des économies significatives.
46) Le point mort désigne le taux de rendement des placements financiers qui permet
à la Banque de France de couvrir ses charges d’exploitation.
LA POURSUITE DES RÉFORMES A LA BANQUE DE FRANCE
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L’année 2007 marque l’achèvement du plan d’adaptation
territoriale. 115 succursales ont été supprimées. Le réseau est
désormais composé de 96 succursales départementales dont 68
conservent des activités de caisse. Ce maillage départemental est
complété par 32 autres implantations aux missions différenciées :
21 antennes économiques dont 4 disposant d’une caisse, 7 centres
de traitement du surendettement et 4 centres de traitement de la
monnaie fiduciaire. Des bureaux d’accueil et d’information sont
ouverts dans toutes les villes où la Banque de France n’a maintenu
aucune implantation. La cession des immeubles des succursales
fermées dans le cadre du plan d’adaptation territoriale décidé à
l’automne
2003
est
désormais
pratiquement
achevée.
Les
immeubles désaffectés non encore
cédés seront proposés aux
municipalités ou mis en vente selon une procédure d’appel
d’offres. L’élaboration d’un bilan de cette réforme a d’ores et déjà
été entreprise, la situation des unités rattachées à une succursale
fait l’objet d’un examen et une étude à long terme a été demandée
au caissier général sur l’implantation des caisses sur le territoire.
Dans cette perspective la Cour réitère sa recommandation de
poursuivre l’adaptation du réseau afin de tendre vers le modèle
d’une succursale par région, en tirant au mieux parti des gains de
productivité et du meilleur rapport coût/efficacité du service rendu.
En matière de ressources humaines, la Cour avait souligné
la nécessité d’une réforme en profondeur des prestations sociales
facultatives. Conformément aux termes du protocole d'accord du
21 novembre 2006 signé avec tous les syndicats et relatif à
l'amélioration du dialogue social et à l'évolution de la politique
sociale de la Banque, des négociations ont été conduites avec les
partenaires sociaux en vue de redéfinir les moyens mis à la
disposition des organismes sociaux. La Banque s’est ainsi engagée
dans la voie d’une réduction des effectifs détachés dans les
organismes sociaux, qui devrait permettre de ramener le nombre
d’agents détachés à 1,5 % de l’effectif en EATP de la Banque d’ici
2011 et de rapatrier dans l'exploitation d'ici la fin 2008 58 agents
(en équivalent temps plein) sur 295, soit une diminution de près de
20 %. Simultanément, a été arrêté le principe de restitutions totales
ou partielles de plusieurs centres de vacances et sportifs, en vue de
leur cession, pour réduire le parc de centres dont la Banque est
propriétaire. Enfin, l'administration de la Banque a indiqué que les
coopératives de province devraient être fermées à bref délai et que
l'organisation de celle de Paris devrait évoluer en profondeur, étant
précisé que la Banque n'apporterait plus son soutien à ces
organismes.
196
COUR DES COMPTES
L'année 2007 a vu également s'ouvrir une négociation sur le
thème de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Bien qu’aucun accord n’ait pu être signé, la Banque a décidé de
s’engager dans des réalisations concrètes. L'identification de
fonctions sensibles, l'étude de l'évolution des compétences
mobilisées et la définition de parcours professionnels sont au coeur
des réflexions, qui doivent améliorer la mobilité professionnelle et
contribuer à la préparation des départs en nombre que la Banque
connaîtra d'ici 5 à 10 ans. D’ores et déjà, les règles de mobilité
géographique et professionnelle des personnels non cadres ont été
modifiées pour faire prévaloir les critères de compétences sur toute
autre considération.
Les effectifs moyens statutaires et non statutaires, après
avoir décru de 4,7 % en 2006, devraient enregistrer une nouvelle
baisse, du même ordre de grandeur, en 2007.
L’amélioration de la gestion interne de la Banque devrait se
traduire, en 2007 comme en 2006, par une nouvelle réduction des
charges d’exploitation qui devrait avoir une incidence significative
sur l’abaissement du point mort (prévision révisée de 1,07 % en
2007 contre 1,20 % en 2006 et 1,52 % en 2005). L’objectif de 1 %
en 2008 est donc confirmé.
Au titre de l’exercice 2006, la Banque a enregistré un
résultat net de 1 246,3 M€ en 2006, plus de deux fois supérieur à
celui de 2005 et a versé à l’État 807 M€ en impôt sur les sociétés et
922 M€ en dividende, soit un total de 1 729 M€. Le bénéfice
attendu pour l'exercice 2007 devrait à nouveau connaître une
augmentation marquée.
LA POURSUITE DES RÉFORMES A LA BANQUE DE FRANCE
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RÉPONSE DU GOUVERNEUR DE LA BANQUE DE FRANCE
L’insertion au prochain rapport public annuel de la Cour des
Comptes relative à « la poursuite des réformes à la Banque de France »
appelle de ma part les observations ci-après.
J’ai pris note, tout d’abord, du constat effectué par la Cour sur la
concrétisation en 2007 de deux réformes majeures à la Banque de France,
recommandées par la Cour, portant sur le régime de retraite des personnels
et sur les modalités de gouvernance.
En ce qui concerne la réforme de la gouvernance de la Banque, le
projet d’insertion prend acte de la suppression du Conseil de la politique
monétaire et du changement de la composition du Conseil général qui est au
coeur de l’administration de la Banque et qui comporte désormais également
en son sein un Comité monétaire chargé d’examiner les évolutions
monétaires, d’analyser les implications de la politique monétaire élaborée au
sein de l’Eurosystème – et non du SEBC – et d’adopter les mesures
nécessaires pour transposer les orientations de la BCE. La Cour note
cependant que les relations avec l’État n’ont pas totalement été clarifiées et
que cette clarification doit notamment conduire à généraliser une démarche
de type « délégation de service public dans des missions telles que le
surendettement et à s’assurer régulièrement de la compétitivité de
l’opérateur ». Á cet égard, je tiens à souligner que la Banque est prête à
s’engager dans cette voie mais que cela implique que l’État prenne en charge
le coût complet des prestations que la Banque effectue pour son compte,
principe que la Cour avait elle-même recommandé. La Cour se prononce
également en faveur de la participation du censeur au comité d’audit créé au
sein du Conseil général en octobre 2004. Sur ce point, je tiens à souligner
qu’en limitant la composition du comité d’audit aux membres du Conseil
général qui ne sont pas parties prenantes, i. e. qui ne sont ni gestionnaires de
la Banque ni représentants de l’actionnaire ou des salariés, la Banque a
cherché à se rapprocher le plus possible d’une composition que l’on trouve
souvent dans les sociétés et qui consiste à ne mettre dans le comité d’audit
que des administrateurs indépendants. Au demeurant, afin d’assurer une
parfaite information de l’actionnaire sur les comptes de la Banque, l’usage
s’est établi que le président du comité d’audit invite le censeur à assister à la
séance au cours de laquelle les commissaires aux comptes présentent le
résultat des investigations auxquelles ils se sont livrés en vue de la
certification des comptes annuels.
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COUR DES COMPTES
C’est avec satisfaction que j’ai en outre noté les appréciations
favorables portées par la Cour sur les évolutions constatées dans nos modes
de gestion. La Banque de France a en effet poursuivi les actions qu’elle avait
mises en oeuvre depuis plusieurs années en vue d’abaisser son point mort et
recherché toutes les occasions d’obtenir des réductions significatives de ses
charges d’exploitation, tout en améliorant la qualité des services qu’elle
rend. Comme l’insertion le souligne, la Banque a en particulier mené à bien,
dans les délais prévus, la réforme de l’implantation territoriale de son
Réseau. L’élaboration d’un bilan de cette réforme a d’ores et déjà été
entreprise et, tout en respectant le cadre départemental fixé en accord avec
les pouvoirs publics, j’ai demandé au directeur du Réseau d’examiner la
situation des unités rattachées à nos succursales départementales ainsi qu’au
Caissier général de conduire une étude à long terme sur l’implantation de
nos caisses sur le territoire.
S’agissant de la réforme touchant aux dépenses sociales, je crois utile
de préciser que les actions engagées par la Banque s’inscrivent désormais
dans le cadre d’un relevé de conclusions signé par quatre organisations
syndicales sur sept. La réduction envisagée du nombre d’agents mis à la
disposition des organismes sociaux devrait permettre au plus tard en 2011 de
limiter ce nombre à 1,5 % de l’effectif eatp de la Banque. En outre, dans un
souci de clarification, la Banque a procédé à la dénonciation du « quasi-
statut » dont bénéficiaient les personnels employés par les organismes
sociaux.
En complément des quelques remarques qui précèdent, j’ai lu avec
une grande satisfaction que la Cour avait souligné que la Banque s’était
engagée dans une politique volontariste de maîtrise de ses dépenses et
d’amélioration de sa productivité. Comme je l’indiquais déjà l’an
dernier, les réformes entreprises au cours de ces derniers exercices visent
en effet toutes à permettre que la Banque assure toutes les missions qui
lui sont confiées par le Traité ou par la loi au meilleur coût pour la
collectivité nationale. Cette gestion rigoureuse devrait continuer à faire
diminuer le point mort qui, après avoir baissé à 1,52 % en 2005 et
1,20 % en 2006, devrait s’établir à 1,07 % en 2007 et s’approcher en
2008 de l’objectif de 1 % fixé par la Cour. Il va de soi que cette
démarche, que la Cour a elle-même qualifiée de « courageuse », sera
poursuivie de manière toujours aussi déterminée pendant les exercices à
venir.