LE STATUT DE LA COMMISSION DE RECOURS DES REFUGIÉS
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Le statut de la commission de recours
des réfugiés (CRR)
La Commission de recours des réfugiés (CRR), juridiction
administrative spécialisée en matière de droit d'asile, a pour mission
d'instruire les recours introduits contre les décisions de l'Office français
des réfugiés et apatrides (OFPRA). Par le nombre des affaires traitées,
elle constitue la plus importante des juridictions avec plus de 131 000
décisions rendues entre 2004 et 2006.
A la suite du contrôle des comptes et de la gestion de l’OFPRA, la
Cour avait adressé, le 25 juin 2007, un référé au ministre des affaires
étrangères et des affaires européennes et au ministre de l’immigration, de
l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, afin
d’appeler leur attention sur le caractère problématique, au plan des
principes, de la situation statutaire actuelle de cette juridiction. Placée
pour son administration auprès de l'OFPRA, la Commission de recours
des réfugiés se trouve, de manière paradoxale et critiquable, dans la
dépendance directe de son justiciable. De ce fait, elle ne jouit pas d'un
statut garantissant pleinement l'indépendance qu'exige, au regard du
droit et des libertés publiques, sa fonction.
C’est la raison pour laquelle, sans contester l’indépendance des
membres de la Commission, la Cour suggérait qu’à l’avenir la CRR se
voit reconnaître un statut conforme à sa nature de juridiction
administrative et soit éventuellement rattachée au Conseil d’État. Pour
autant, elle considérait que le souci légitime de clarifier, au plan
juridique, les relations entre l'OFPRA et la CRR ne devrait pas aboutir à
mettre un terme aux liens fonctionnels qui unissent ces deux organismes
et qui sont nécessaires à leur bon fonctionnement respectif.
Aussi
suggérait-elle qu'une fois reconnue, sur le plan juridique, l'autonomie de
la CRR, une convention, passée entre la Commission et l'Office, précise
leurs relations administratives et détermine les modalités de mise à
disposition des différents moyens (humains, budgétaires, comptables et
logistiques etc.) qu'ils doivent ou peuvent partager.
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COUR DES COMPTES
Par une lettre en date du 9 octobre 2007, les deux ministres ont,
de manière conjointe, fait connaître à la Cour leur accord de principe
avec cette analyse et leur volonté d’engager sans délai une réforme
destinée à y remédier.
Ils estiment que la dépendance actuelle de la CRR à l'égard
de l'OFPRA est difficilement compatible avec le principe de
l'indépendance du juge par rapport aux parties. Cette réforme
visera d’une part,
à mieux assurer l’autonomie de la juridiction et
d’autre part, à renforcer la professionnalisation des magistrats
administratifs
.
Par ailleurs, les ministres ont indiqué que les opérations de
transfert des personnels et des crédits de rémunération et de
fonctionnement, qui conditionnent le passage de la CRR au statut
de juridiction administrative, ont été expertisés lors d’une réunion
avec le Conseil d’État en juillet 2007. Les partenaires concernés
ont décidé de renvoyer cette réforme budgétaire et comptable à la
préparation de la loi de finance de 2009. Ce report a pour objet
d'examiner plus significativement les capacités des services du
Conseil d’État d'absorber, dès 2008, la gestion du fonctionnement
de la CRR, de déterminer avec précision les tâches de gestion
courante assurées actuellement par l'OFPRA pour le compte de la
CRR et enfin de prévoir le raccordement de la comptabilité de la
CRR à celle de l’État.
Enfin, les deux ministres ont précisé que, dans une approche
plus globale, la réforme de la juridiction spécialisée pourrait
comprendre la diminution du nombre des formations de jugement
dont la présidence serait confiée à des magistrats exerçant cette
fonction non pas sous forme de vacations, comme c'est le cas
aujourd'hui, mais à plein temps.
***
La Cour constate que les décisions ainsi arrêtées par le
Gouvernement et les modalités de mise en oeuvre envisagées pour mieux
assurer, conformément à son statut de juridiction administrative
spécialisée, l’autonomie de la Commission de recours des réfugiés vont
dans le sens de ses recommandations.
LE STATUT DE LA COMMISSION DE RECOURS DES REFUGIÉS
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RÉPONSE DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET
EUROPÉENNES
L’insertion de la Cour des comptes
sur « le statut de la commission
de recours des réfugiés » reflète fidèlement le point de vue du ministère des
affaires étrangères et européennes et n’appelle pas d’observations de ma
part.
Par ailleurs, la nouvelle dénomination de « Cour nationale du droit
d’asile », conférée à la juridiction par la loi relative à la maîtrise de
l’immigration, à l’intégration et à l’asile, adoptée par le Parlement le
23 octobre dernier, constitue, comme d’ailleurs par ce ministère et par le
ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-
développement.
Le ministère des affaires étrangères et européennes n’exerce plus la
tutelle administrative et financière de l’Office français de protection des
réfugiés et apatrides. Toutefois le représentant de ce ministère au conseil
d’administration de l’Office ne manquera pas d’appuyer à l’avenir toutes les
initiatives visant à renforcer l’indépendance de la Cour nationale du droit
d’asile.
RÉPONSE DU MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DE
L’INTÉGRATION, DE L’IDENTITÉ NATIONALE ET DU
CODÉVELOPPEMENT
L’insertion au rapport public annuel de la Cour des Comptes, relatif
au statut de la commission de recours des réfugiés (devenue, depuis la
publication au JORF du 21 novembre 2007, de la loi relative à la maîtrise de
l'immigration, à l'intégration et à l'asile du 20 novembre 2007, Cour
nationale du droit d’asile (article 29)) appelle de ma part les observations
suivantes.
Les conclusions dont la Cour des comptes fait état dans cette
insertion, consécutives à la lettre conjointe que je vous ai adressée avec le
ministre des affaires étrangères et européennes le 9 octobre 2007,
n’appellent pas de commentaire particulier de ma part.
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COUR DES COMPTES
Je vous confirme mon engagement, ainsi que j’ai pu le souligner en
plusieurs occasions au Parlement à l’occasion de l’examen des crédits de la
mission « Immigration, asile et intégration » dans le cadre de l’adoption du
projet de loi de finances pour 2008, de conduire cette réforme d’importance
dès la préparation du projet de loi de finances pour 2009.
J’ajoute enfin que par lettre datée du 15 novembre 2007, le
Premier Ministre a confié à Monsieur Jacky Richard, conseiller d’Etat,
une mission d’expertise et de propositions tendant à préparer les
conditions de cette réforme dans ses deux aspects (autonomie budgétaire
et réforme des formations de jugement). Monsieur Jacky Richard
conduira cette mission avec l’appui de l’IGA et en lien avec la mission
d’audit RGPP relative aux politiques d’immigration et d’intégration. Son
rapport devra être remis au Premier Ministre pour le 29 février 2008.