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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES CONCERNÉS
LE MAILLAGE
AÉROPORTUAIRE
FRANÇAIS
Rapport public thématique
Juin 2023
Le maillage aéroportuaire français - juin 2023
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RÉPONSES
DES
ADMINISTRATIONS,
ORGANISMES ET PERSONNES
CONCERNÉS
Réponses reçues
à la date de la publication (15/06/2023)
Réponse du ministre de la transition écologique
et de la cohésion des territoires
...................................................................
5
Réponse du président de la région Hauts-de-France
.................................
10
Réponse du président de la région Normandie
.........................................
14
Réponse du président de la région Nouvelle-Aquitaine
............................
14
Réponse du délégué général de l’Union des aéroports frança
is (UAF)
....
16
Réponse du directeur général de Ryanair France
......................................
22
Destinataire
n’ayant pas d’observation
Madame la présidente de la région Pays de la Loire
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Réponse reçue après la date de publication -
Destinataire n’ayant pas d’observation
Monsieur le président de la région Grand Est
Destinataires n’ayant pas répondu
Monsieur le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes
Monsieur le président de la région Bretagne
Monsieur le président de la région Centre-Val de Loire
Madame la présidente de la région Occitanie
Monsieur le président de la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur
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RÉPONSE DU MINISTRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE
ET DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES
Par courrier en date du 28 avril 2023, vous avez bien voulu
transmettre à mes services le rapport en objet. Celui-ci appelle de ma part
les remarques suivantes :
Concernant les six recommandations suivantes
Recommandation n° 1 : Adopter pour chaque aéroport un plan de
décarbonation conforme aux objectifs climatiques, annexé à chaque contrat
de concession et intégrant les investissements à consentir ainsi que les
évolutions de la demande (délégants, DGAC).
Mes services veilleront à la bonne application de la future
réglementation européenne (règlements AFIR, RTE
,
Refuel) qui imposera
aux aéroports des objectifs pour la décarbonation de leur activité. Leur
attention sera particulièrement portée sur les aéroports d'État, en
particulier si ceux-ci s'engagent dans la signature de contrats de
régulation économique.
Concernant les aéroports dont l'exploitation est concédée par l'État,
la DGAC renforce déjà, au cas par cas, les obligations environnementales
au moment du renouvellement des concessions en fixant des objectifs plus
ambitieux dans les cahiers des charges des nouvelles concessions.
À titre d'illustration, peut être mentionné le plan de gestion
environnementale qui figure à l'annexe du cahier des charges de la
concession relative à la zone civile de l'aérodrome de Lorient-Lann-
Bihoué, que la DGAC a renouvelée au 1
er
janvier 2022. De même, le projet
de Grandes orientations stratégiques de l'aéroport de Montpellier élaboré
par l'État fixe un projet de décarbonation ambitieux adossé à la
réglementation européenne en cours de révision.
Recommandation n° 2 : Apporter un appui juridique aux préfectures
de département afin d'assurer l'effectivité du contrôle de légalité sur les
délibérations des organes délibérants des collectivités territoriales et
groupements propriétaires d'un aéroport, portant sur les concessions de
service public ainsi que les régimes d'aides aux aéroports et aux
compagnies (DGAC).
La Cour des comptes pointe à juste titre la difficulté que rencontrent
les services de l'État à faire respecter les règles européennes en matière
d'aides d'État. Le dispositif conçu pour assurer leur bonne application est
développé dans l'instruction du 8 juillet 2016 aux services territoriaux de
la direction de la sécurité de l'aviation civile de la DGAC. Il repose sur la
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notification systématique de tout projet d'aide de l'État ou des collectivités
territoriales aux aéroports et aux compagnies aériennes (à l'exception des
aides à l'investissement pour les aéroports de moins de 3 millions de
passagers et les aides au fonctionnement aux aéroports de moins de 200
000 passagers, visées par le règlement général d'exemption par catégories
depuis 2017), qu'il s'agisse d'une notification individuelle à la Commission
européenne ou d'une notification à la DGAC dans le cadre des régimes
nationaux de 2015 (aides au fonctionnement, à l'investissement et aides au
démarrage de liaisons aériennes). Ce dispositif, comme d'ailleurs les
obligations d'information sur les aides d'État mises en place dans le cadre
de l'article L. 15111 du code général des collectivités territoriales, repose
sur les déclarations volontaires des collectivités et de leurs groupements.
Je soutiens la proposition de la Cour des comptes de consolider
l'appui juridique aux préfectures de département afin, qu'elles renforcent
leur contrôle de légalité sur les délibérations des collectivités territoriales
et ou de leurs groupements, propriétaires d'aéroport. Dans cette
perspective, une instruction ministérielle sera rédigée visant à sensibiliser
les préfectures sur l'importance de garantir une plus grande transparence
des aides d'État, en particulier à l'intention des préfectures situées dans les
régions dans lesquelles la Cour des comptes a déjà identifié des aides
importantes et structurelles aux compagnies ;
Mes services étudieront la possibilité, en cas d'aide d'État non
notifiée, de s'opposer aux programmes d'exploitation des compagnies
aériennes concernées sur la base de l'article R. 3308-II du code de
l'aviation civile.
Recommandation n°3 : En concertation avec les régions, contribuer
à l'élaboration d'une stratégie nationale aéroportuaire définissant des
orientations et des scénarios, fondés sur une approche multimodale et
identifiant les lignes d'aménagement du territoire et la répartition
territoriale des moyens de l'État (DGAC ; 2027).
La définition d'une stratégie aéroportuaire couvrant les aéroports
inclus dans le champ du rapport relève, pour l'essentiel, des collectivités
territoriales, dans la mesure où presque tous les aéroports concernés sont
décentralisés. Le renforcement des prérogatives de la Région préconisé
par la recommandation n° 6 sur les sujets aéroportuaires apparaît
difficilement compatible avec une stratégie nationale contraignante, sauf
à revenir sur les équilibres institutionnels et la répartition de compétences
entre l'État et les collectivités fixée par la loi du 7 août 2015 portant sur la
nouvelle organisation territoriale de la République. En revanche, sur les
aéroports qui lui appartiennent (cf. Montpellier, Toulon, Strasbourg et
Lorient), l'État adopte une vision stratégique de long terme.
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Recommandation n°4 : Au vu de la stratégie nationale aéroportuaire,
émettre un avis à chaque renouvellement de délégation de service public
sur le maintien de ligne d'aménagement du territoire et sur la participation
financière de l'État (DGAC).
Il est difficile pour l'État d'émettre un avis sur le maintien d'une
ligne d'aménagement du territoire compte tenu de la répartition de
compétences entre l'État et les collectivités territoriales. L'article R. 330-7
du code de l'aviation civile donne en effet à ces dernières l'initiative de
l'imposition d'obligations de service public sur une liaison. Cette
imposition est décidée par le ministre chargé de l'aviation civile, mais sur
proposition des collectivités concernées. Concernant sa participation
financière, l'État en décide déjà à chaque renouvellement de délégation de
service public, ainsi que le recommande la Cour des comptes, notamment
en fonction de l'évolution des besoins liés au développement de la
collectivité concernée ou de l'amélioration des infrastructures et services
de mobilité alternatifs (ouverture d'autoroute, réduction des temps de
trajets ferroviaires...). En revanche, à cette occasion, l'État ne prescrit pas
l'action des collectivités territoriales concernées qui peuvent librement,
dans le cadre de leur compétence, décider du financement d'une nouvelle
délégation de service public, qu'elles soient ou non accompagnées
budgétairement par l'État. De fait, la présence ou l'absence de l'État au
tour de table financier a plus de poids dans la décision des collectivités
que ne pourrait avoir un avis sur l'utilité de la conclusion d'une nouvelle
délégation de service public, sans empiéter sur leur libre administration.
Recommandation n°6 : Conforter les prérogatives de chef de file des
régions en matière de mobilités en incluant les aéroports décentralisés dans
l'article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales (DGCL).
La direction générale des collectivités locales a fait valoir, lors de
la contradiction, que cette recommandation souffrait de deux limites.
D'une part, elle semble largement satisfaite par le champ d'application très
large du chef de filât existant, qui porte sur les mobilités en général et
insiste plus spécifiquement sur l'intermodalité. Il inclut donc d'ores et déjà
les mobilités aériennes. D'autre part, le caractère peu contraignant du chef
de filât se limite à un rôle d'incitation et d'influence, en conséquence de
quoi, son efficacité dépend de l'implication des acteurs locaux et de leur
volonté de travailler ensemble plutôt que de l'extension de son champ.
La Cour des comptes maintient sa recommandation, en estimant,
d'une part, que « l'organisation aéroportuaire ne définit pas la
complémentarité entre niveaux de collectivités » et, d'autre part, que «
l'inclusion explicite, dans l'article L. 1111-9 du CGCT, des aéroports
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décentralisés comme relevant des attributions de chef de file des régions
aurait une portée politique et symbolique forte ».
S'agissant, d'une part, de la définition de la complémentarité entre
niveaux de collectivités dans l'organisation aéroportuaire, elle n'est certes
pas aussi directement présentée que dans le cas d'autres modes de
mobilités, tel que le transport ferroviaire. Toutefois, elle n'en existe pas
moins en droit et a été exposée, dans un souci de clarification du droit,
dans une note du 12 mars 2019 relative aux compétences des collectivités
territoriales en matière d'exploitation des aérodromes et d'organisation
des services de transport aérien public.
S'agissant, d'autre part, de la portée symbolique forte de l'ajout des
aéroports décentralisés comme relevant des attributions de chef de file des
Régions, cet argument relève d'un choix en opportunité. Toutefois, le
risque d'une lecture a contrario de l'article L. 1111-9 du code général des
collectivités territoriales ainsi modifié ne peut être ignoré. En effet, ajouter
les aérodromes à côté des mobilités aboutirait à préciser explicitement que
ces infrastructures ne relèvent pas de cette compétence. Une telle lecture
pourrait avoir des effets de bord, en termes d'interprétation, par exemple,
par des juridictions administratives, qu'il est difficile de mesurer. A
l'inverse si l'insertion des aéroports se faisait comme explicitation de
champ de la mobilité, les infrastructures ferroviaires ou portuaires non
visées pourraient être considérées comme exclues.
II. Sur le contenu de l'analyse de la Cour des comptes
rôle de la DGAC
La description qui est faite du rôle de la DGAC n'est pas exhaustive.
La DGAC assure d'autres missions relatives aux aéroports que celles
décrites dans le rapport, notamment :
-
la définition du cadre réglementaire relatif aux redevances
aéroportuaires, à l'assistance en escale, à la mise en oeuvre de la
réglementation européenne relative aux créneaux horaires et à la
gestion de la taxe d'aéroport ;
-
pour les aéroports d'État, le suivi de l'exécution du cahier des charges
applicable, la détermination du cadre de régulation applicable et,
pour les aéroports accueillant moins de cinq millions de passagers
par an, la régulation des redevances aéroportuaires.
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Subventions publiques - Lorient
Depuis le renouvellement de la concession relative à la zone civile
de l'aérodrome de Lorient-Lann-Bihoué le 1
er
janvier 2022, l'État a cessé
de subventionner son exploitation.
Une dette accumulée difficilement remboursable par les petits aéroports
S'agissant du plafond des aéroports de la classe 3, il est indiqué
dans le rapport que de nouvelles augmentations seront nécessaires pour
assurer le remboursement des dettes. Dans cette perspective, le plafond de
la classe 3 a été relevé de 15 à 16 € en lo
i de finances pour 2023. L'objectif
est de procéder à un relèvement progressif du plafond tarifaire afin
d'accompagner en tant que de besoin le renforcement de la capacité
financière des aéroports de de cette classe, pour faire face au
remboursement du principal des « avances Covid », qui débute
respectivement en 2024 (avances 1 et 2) et 2026 (avance 3).
L'identification de nouvelles ressources pour les aéroports passe
soit par un abandon partiel ou total de créances sur les avances, soit par
une augmentation des tarifs de taxe applicables aux passagers, ou à une
combinaison de ces deux leviers.
Modulations des redevances
Le rapport indique que les modulations des redevances se feraient
au bénéfice uniquement des compagnies aériennes. Or ces modulations
doivent répondre à un motif d'intérêt général conformément à l'article R.
224-2-2 du code de l'aviation civile qui dispose que « Les modulations
limitées prévues à l'article L. 6325-1 du code des transports sont
déterminées dans des conditions objectives, transparentes et non
discriminatoires. L'amplitude et, le cas échéant, la durée d'application de
ces modulations sont proportionnées à l'objectif d'intérêt général auquel
elles répondent. »
Ces modulations des redevances aéroportuaires, publiées sur les
sites internet de chacun des aéroports, ne peuvent pas être considérées
comme des aides aux compagnies consenties uniquement pour développer
le trafic.
Plus particulièrement, la « modulation CO
2
» mise en
œuvre
par
l'aéroport de Toulon a fait l'objet en 2022 d'une homologation par la
direction du transport aérien de la DGAC, conformément à l'article
R. 224-3 du code de l'aviation civile. Au cours de l'instruction du dossier,
il a été vérifié que cette modulation était neutre pour l'exploitant de
l'aéroport et ne pouvait être qualifiée d'aide aux compagnies aériennes.
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« L'incapacité de l'État à réguler les aides aux aéroports et aux
compagnies »
La DGAC a notifié en 2015 trois régimes cadres nationaux (aides
au fonctionnement, à l'investissement, aides aux compagnies aériennes)
permettant une application nationale des lignes directrices de 2014 aux
projets d'aides concernant les aéroports français, ainsi que deux régimes
exemptés (RGEC) en 2019 permettant un allègement des exigences de
notification pour les petits aéroports. Sur ces bases, les entités d'octroi des
aides (exploitants d'aéroports, collectivités territoriales, chambres de
commerce et d'industrie) doivent notifier à la DGAC tout projet d'aide
entrant dans le cadre des régimes nationaux et exemptés, préalablement à
son octroi. Malgré ce cadre, force est de constater que les régimes
nationaux et exemptés sont très peu utilisés par les aéroports et les
collectivités qui connaissent pourtant les règles. L'administration
française assure par ailleurs les notifications individuelles à la
Commission telles qu'encadrées par les lignes directrices (en fonction de
seuils de passagers des aéroports, en fonction du critère de la zone
d'attraction), avec par exemple la notification en 2022 d'un dispositif
d'aides aux compagnies aériennes à l'aéroport de Saint Pierre-Pierrefonds
(La Réunion) qui a été validé par la Commission européenne.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA RÉGION HAUTS-DE-FRANCE
Tout d'abord, je tenais à vous préciser que j'ai apprécié
globalement ce travail qui permet de poser un regard d'ensemble
pertinent sur la situation des aéroports de taille intermédiaire français,
et s'appuie sur un certain nombre de données et de rapports permettant
une bonne entrée en matière sur la densité et la complexité du maillage
aéroportuaire français fait de cas particuliers.
Je souhaite insister particulièrement sur cet enjeu, en revenant
sur 5 points du rapport :
-
l'idée fausse selon laquelle le contrat de concession de l'aéroport de
Lille fixerait « pour objectif » des hausses de trafic ;
-
le caractère jugé réaliste des projections de trafics et la
complémentarité du transport aérien avec le transport ferroviaire ;
-
l'absence de remise en cause du besoin de modernisation des
infrastructures en raison de sa saturation capacitaire à l'horizon
2026/2027 ;
-
l'absence de toute subvention publique de quelque nature qu'elle soit ;
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-
l'implication forte du syndicat mixte et des élus délégués pour y siéger,
issus des collectivités membres qui le composent, dans le suivi de
l'exécution du contrat de délégation de service public.
En voulant tirer des conclusions sur un panel de 38 aéroports tous
différents les uns des autres, et en faisant certains rapprochements entre
des situations contrastées, vous êtes amenés à mettre en parallèle, par
exemple page 55, l'aéroport de Lille (2,2 millions de passagers en 2019)
avec celui de Tarbes-Lourdes (466.325 passagers en 2019) qui
répondent pourtant à des réalités fort différentes.
À cette occasion, vous affirmez que « les contrats de concession
des aéroports de Tarbes-Lourdes ou de Lille qui fixent pour objectif des
hausses de trafic comprises entre 50 et 75 % sur les 10 à 20 prochaines
années paraissent désormais peu réalistes ».
En premier lieu, il me semble nécessaire de combattre avec force
l'idée fausse selon laquelle le contrat de concession de l'aéroport de Lille
fixerait « pour objectif » des hausses de trafic. Si le plan pluriannuel
d'investissements s'appuie effectivement sur la projection d'un nombre
croissant de passagers auquel sont adossées des recettes d'exploitation,
l'augmentation projetée ne constitue pas un objectif contractualisé.
C'est en effet bien l'inverse. Seuls les investissements à réaliser,
devant répondre notamment au problème de saturation de l'aérogare,
constituent des engagements contractuels. La réalisation des projections
financières demeure aux risques et périls exclusifs du concessionnaire.
Ces projections tiennent compte d'une part d'une augmentation
naturelle du besoin de mobilité des usagers qui constitue un droit au sens
des dispositions du code des transports (articles LII 1 1-1 et suivants du
code des transports), et d'autre part, de l'optimisation continue de l'outil
de production des compagnies aériennes.
Ce besoin de mobilité et l'attachement des Français, notamment
des jeunes, à voyager en avion, a encore récemment été mis en lumière
par le sondage IPSOS réalisé du 21 au 24 avril 2023 à la demande de
l'Alliance France Tourisme, ainsi que par le dernier rapport de la Chaire
Pégase de l'Université de Montpelier récemment publié.
Par ailleurs, l'augmentation projetée du nombre de mouvements est
décorrélée de l'augmentation projetée du nombre de passagers transportés,
en raison notamment de l'amélioration continue déjà constatée de l'emport
des aéronefs ainsi que du taux d'occupation des sièges.
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Ces constats mettent en exergue le dilemme auquel les autorités
publiques en charge du service public aéroportuaire sont confrontées
pour répondre au droit à la mobilité, dans le respect des objectifs de lutte
contre la sédentarité et de limitation ou de réduction des risques,
accidents, nuisances, notamment sonores, émissions de polluants et de
gaz à effet de serre, en référence aux dispositions du code des transports.
En second lieu, les projections de trafic sur lesquelles s'appuie le
PPI de l'offre du concessionnaire de l'aéroport de Lille ont été jugées
réalistes par l'autorité concédante au regard des propres analyses qu'elle
avait commandé. Il apparaît, ainsi, que les taux de croissance sur lesquels
se sont basés les modélisations des projections de trafic du délégataire
Aéroport de Lille SAS sont en dessous des hausses avancées par le
rapport (2,6 %) et correspondent aux études faisant référence à l'échelle
internationale. L'annexe 9, à laquelle il est fait référence, donne des
précisions sensiblement plus mesurées : « Les projections compatibles
avec l'engagement de neutralité carbone en 2050 ne font pas consensus
entre les experts. L'hypothèse de base retenue par les acteurs de l'aérien
au niveau mondial est de 3, 1 % /an entre 2018 et 2050, soit 3,5 %/an de
manière lissée entre 2024 et 2050 en prenant en compte la chute du trafic
liée à la pandémie. Cette croissance est moindre pour l'Europe (2 %/an)
et pour la France (2,3 %). » Peut-être que ces précisions pourraient être
reprises dans le corps de votre rapport pour éviter une formulation qui
nous apparait imprécise.
Par ailleurs, à mon sens, l'impact du TGV sur les perspectives de
trafic ne peut être généralisé à l'ensemble du territoire métropolitain,
l'aéroport de Lille ne subissant pas la concurrence du transport
ferroviaire. Cela est sans doute dû, à la différence d'autres plateformes,
à sa situation géographique, ainsi qu'au fait que le développement du
trafic de l'aéroport de Lille est intervenu essentiellement après la mise
en service de la LGV Nord dans les années 90. En effet, dans le cas de
Lille, la complémentarité avec le transport ferroviaire est telle
qu'aucune des liaisons aériennes opérées depuis Lille n'entre dans le
champ de l'interdiction d'exploitation des services aériens réguliers de
passagers sur des trajets non desservis pas des services ferroviaires sans
correspondance par plusieurs liaisons quotidiennes, en mois de 2h30,
introduite par la loi Climat résilience. Ainsi, a minima, le rapport
pourrait être nuancé sur ce point en mentionnant l'étude Oxera pour
l'Union des Aéroports Français (UAF) qui concluait que « si le TGV a
largement supplanté l'avion sur les liaisons radiales entre Paris et les
métropoles régionales, le transport aérien continue de progresser sur
les liaisons transversales interrégionales ».
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En outre, vous observez que « sept aéroports de l'échantillon sont
proches de la saturation. Mais, avec l'effondrement du trafic constaté en
2020 et 2021, le besoin d'étendre les capacités des aéroports
intermédiaires ne se pose plus que pour trois aéroports corses (hors
Calvi) ». Cette remarque concerne certainement l'aéroport de Lille,
puisque celui-ci est proche de la saturation. L'aérogare, dans sa
configuration déjà optimisée en termes capacitaires, peut accueillir jusqu'à
2,4 millions de passagers par an et connait déjà des limites capacitaires en
saison haute. Sa saturation dont il était initialement envisagé qu'elle soit
atteinte en 2023, le sera finalement en 2026/2027 suite à la chute du trafic
lié à la crise sanitaire. Si la question des vols de nuit peut faire débat au
plan local, il semble y avoir consensus à la lecture de la récente enquête
publique sur le fait que l'aéroport de Lille arrivera effectivement à
saturation dans les prochaines années et que celle-ci doit être anticipée par
la puissance publique pour que la qualité du service public, incluant les
missions régaliennes de sécurité et de sureté, soit assurée.
Je vous assure que l'aéroport de Lille s'est inscrit dans une
trajectoire vertueuse depuis sa décentralisation, avec des partis pris forts
des collectivités locales : pas de concours publics versés de quelque
nature qu'il soit. Or, le rapport indique que « Les 38 aéroports de taille
intermédiaire, objet de la présente enquête, représentent des réalités et
des vocations plus diverses. (. Fragiles économiquement, ces aéroports n
'équilibrent leur situation financière qu'au travers d'aides publiques
acceptées à titre transitoire par la Commission européenne ». C'est
absolument faux dans le cas de l'aéroport de Lille qui ne bénéficie
d'aucun soutien public. C'est même le contraire, le délégataire s'étant
engagé contractuellement à reverser un intéressement à l'autorité
concédante au-delà de certains seuils, afin d'éviter tout risque de sur-
rémunération de la concession. Cela doit être précisé.
Enfin, je ne peux qu'être en désaccord avec l'affirmation que les
acteurs publics se sentiraient déresponsabilisés et que les syndicats
mixtes ne suivraient qu'à distance les délégations de service public (DSP)
confiées à des opérateurs privés. Dans le cas de l'aéroport de Lille, il
s'agit d'une méconnaissance du fonctionnement du Syndicat Mixte de
l'Aéroport de Lille Métropole (SMALIM), qui s'explique, sans doute là
aussi, par le nombre d'aéroports examinés dans ce rapport.
En conclusion, je tiens à vous assurer que je comprends le sens des
observations et recommandations formulées par les juridictions
financières mais il faut veiller à ce que la synthèse ne vienne pas
généraliser des constats qui ne correspondent pas toujours à la réalité de
l'aéroport de Lille.
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RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA RÉGION NORMANDIE
La Région remercie la cour et salue la qualité du travail réalisé et
des orientations tracées dans ce rapport. Elle souhaite apporter une
précision concernant un équipement normand
Sur les recommandations, il peut être intéressant de souligner
l'intérêt que revêtent deux propositions :
la recommandation n° 5 propose de mettre en place un
observatoire national des aéroports chargé de collecter et
valoriser les données relatives à la gestion des aéroports. Cette
proposition semble très intéressante puisqu'elle permettrait
notamment, par exemple sous l'égide de la DGAC, de disposer de
données objectives sur les retombées économiques sur les
territoires, données qui font cruellement défaut à ce jour.
il est proposé dans la recommandation n° 6 de donner plus de
pouvoir aux régions dans le domaine de la mobilité aérienne.
Cette mesure permettrait utilement de légitimer l'action des
régions en matière de stratégie aéroportuaire lorsqu'elles ne sont
pas partie prenante dans tous les aéroports de leur territoire.
La recommandation n° 3 propose que l'État élabore une stratégie
nationale, en lien avec les régions, d'ici 2027. Dans cette perspective et en
cohérence avec la recommandation précédente, il est essentiel de
s'appuyer sur les schémas existants ou en réflexion dans les régions.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA RÉGION
NOUVELLE-AQUITAINE
1/ Le diagnostic
Je partage pleinement le diagnostic relatif à la fragilité structurelle
des aéroports et vos constats concernant la nécessité d'un pilotage du
maillage aéroportuaire.
Je note avec une certaine satisfaction que la stratégie aéroportuaire
de Nouvelle-Aquitaine est citée en exemple et que notre action pourrait être
un modèle à dupliquer. En effet, la région Nouvelle-Aquitaine s'est
distinguée depuis 2017 en développant une approche intégrant les multiples
aspects du transport aérien et de l'intermodalité, en lien étroit avec les enjeux
économiques, environnementaux et d'accessibilité de chaque territoire.
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Au terme de la crise COVID, la région a décidé d'approfondir cette
stratégie en accroissant son effort sur la transition énergétique afin de
tendre vers la neutralité carbone des infrastructures et promouvoir
l'utilisation des biocarburants.
Cette action est tout à fait en phase avec la recommandation n° 1 de
votre rapport.
En effet, la réduction des émissions atmosphériques du secteur
constitue un axe prioritaire, qui exige une mutualisation entre les
aéroports de Nouvelle-Aquitaine, en lien avec le fort soutien régional
apporté à la filière aéronautique verte et durable.
2/ Les recommandations
Je relève avec intérêt vos propositions, et en particulier les
recommandations n° 3 et n° 6 visant à élaborer une stratégie nationale
aéroportuaire et à étendre, dans ce cadre, les prérogatives de chefs de file
des régions en matière de mobilités,
Il s'avère effectivement indispensable de privilégier une dimension
territoriale, probablement à une échelle régionale, ce qui permettra de
promouvoir une synergie entre acteurs et une cohérence d'action entre
aéroports.
Dans ce contexte et selon les suites qui seraient données à ce
rapport, la Région Nouvelle-Aquitaine pourrait ainsi faire part de son
retour d'expérience et contribuer activement à une réflexion nationale qui
serait initiée sur le maillage aéroportuaire.
Comme le recommande le rapport, il me parait impératif que l'État
adopte une stratégie nationale en parallèle de ses missions régaliennes,
aussi bien pour les aéroports que pour les lignes aériennes d'aménagement
du territoire. Toutefois, il est vital que les Régions soient dotées de
compétences juridiques et de moyens associés, afin de met
tre en œuvre leurs
propres stratégies aéroportuaires, y compris à un niveau inter-régional. De
telles stratégies doivent s'envisager comme complémentaires aux autres
politiques régionales notamment en matière d'économie, d'aménagement du
territoire, de mobilités, de développement durable et de formation,
L'un des principaux facteurs de réussite d'un plan régional sera de
donner une place primordiale aux aéroports d'intérêt national.
En effet, la stratégie aéroportuaire de Nouvelle-Aquitaine perdrait
de son intérêt et de sa valeur si la société aéroportuaire de Bordeaux-
Mérignac ne devait pas être pleinement intégrée aux politiques publiques
locales et régionales,
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16
Conserver une gouvernance publique de l'aéroport de Bordeaux-
Mérignac revêt donc pour nous une très grande importance, et constitue
un facteur clé pour un aménagement équilibré du territoire et un
développement économique équitablement réparti.
Aussi, j'ai déjà fait part de l'impérieuse nécessité de conserver une
maîtrise de cet aéroport par les acteurs publics locaux.
Or, force est de constater que la région doit composer avec un cadre
national, tant économique que législatif, qui rend difficile une intégration
optimale de l'aéroport de Bordeaux dans sa stratégie régionale.
À ce titre, il est regrettable de constater que la loi dite 3DS du
21 février 2022, qui impose aux SRADDET de définir une stratégie
régionale en matière aéroportuaire, exclut du dispositif les aéroports
d'État dont Bordeaux-Mérignac, alors même que cette plateforme constitue
précisément un pilier du maillage régional au regard de son réseau, de son
trafic, de son rayonnement et de son rôle pour le territoire,
Enfin, je pense que l'évolution de la gouvernance du secteur
aéroportuaire doit aller plus loin, en opérant un véritable transfert des
aéroports d'État à rayonnement régional, à l'instar des vagues précédentes
de décentralisation, qui ont été des succès. C'est pourquoi la
recommandation n° 6 pourrait utilement être enrichie d'une proposition
privilégiant un transfert, par voie de décentralisation, des aéroports d'État
en faveur des régions qui le souhaitent.
Je suis convaincu qu'il s'agirait d'un élément-clé de réussite des
stratégies aéroportuaires avec la mise en place de synergies efficientes à
un niveau régional.
RÉPONSE DU DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL D
E L’UNION
DES AÉROPORTS FRANÇAIS (UAF)
À titre liminaire et de manière générale, l’UAF regrette l’absence de
mise en perspective de la question des dépenses publiques consacrées au
transport aérien par rapport aux autres modes de transport. Il aurait été
ainsi éclairant de rappeler que les dépenses relatives au transport aérien des
administrations publiques locales représentent moins de 1 % des dépenses
totales en transport de ces mêmes administrations estimées en 2019 à 37
Md€
1
. Il aurait été important également de rappeler que le transport aérien
est le seul mode de transport à couvrir ses coûts internes, y compris le
1
Source CCTN. Calcul UAF.
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17
financement de son administration de tutelle, par les recettes fiscales
générées (taxe de l’aviation civile, tarif
de sécurité et de sûreté, taxe de
solidarité, écocontribution, etc.) ainsi qu’une partie de ses coûts externes
(taxe sur les nuisances sonores aériennes, système européen d’échanges de
quotas d’émission, compensation des émissions des lignes domestiques).
Les comparaisons entre modes de transport n’interviennent dans le
rapport de la Cour qu’a
u sujet des
émissions de CO2 et ne sont d’ailleurs
pas suffisamment représentatives de la véritable empreinte écologique des
différents modes de transport concernant
d’une part les émissions
puisqu’elles ne tiennent pas compte de la construction et de l’entretien des
infrastructures et concernant d’autre part les autres impacts pourtant
essentiels au regard de l’environnement : l’artificialisation des sols, la
biodiversité, la préservation des paysages, les nuisances sonores. La
simple comparaison délivrée par des comparateurs CO2 parfois
contestables induit l’idée que le ferroviaire serait le plus écologique des
modes ce qu’une
approche plus globale déconstruit.
Sur la compétitivité des aéroports français
L’UAF se félicite en revanche de la
reconnaissance par la Cour de
la problématique concurrentielle rencontrée par les aéroports français en
Europe due à un coût de touchée plus élevé que leurs voisins européens en
raison des différentiels de fiscalité. Cette problématique ne se limite
d’aill
eurs pas aux seuls aéroports frontaliers mais est bien réelle sur la
plupart des aéroports régionaux qui atteignent aujourd’hui le plafond du
tarif de sécurité et de sûreté (T2S).
L’UAF observe par ailleurs que le
recours aux aides aux compagnies aériennes
sous la forme d’achat de
prestation de marketing critiqué par la Cour est souvent le fait des
aéroports au plafond du T2S et donc particulièrement concernés par les
problématiques de coût de touchée, de compétitivité et de forte
concurrence européenne
2
.
Ce constat rend d’autant plus nécessaire le
lancement d’une réflexion sur le financement des missions régaliennes de
sûreté et de sécurité aéroportuaires.
De même l’UAF partage l’analyse de la Cour sur les difficultés
engendrées pour la compétitivité des aéroports français par le dispositif
d’avances sur recettes du T2S mis en place par l’
État pour pallier
l’effondrement du trafic pendant la crise. L’augmentation tarifaire
consécutive aux remboursements de ces avances aura de fait dès 2024 un
2
La sensibilité de ce type d’aéroport aux problématiques de coûts de touchée et de
concurrence européenne est une nouvelle fois relevée par l’Observatoire des coûts de
touchée dans son édition de 2022 pp. 25-27 :
-des-couts-touchee
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18
impact très négatif sur le coût de touchée des aéroports français et dégradera
leur compétitivité. L’UAF plaide depuis 2020 pour une transformation de
tout ou partie de ces avances en subventions directes aux aéroports.
Sur les aides d’État
Dans son rapport, la Cour fait le constat des difficultés
d’application du régime des aides d’État dans le secteur aéroportuaire.
L’UAF partage largement ce constat mais considère que ces difficultés de
m
ise en œuvre proviennent avant tout de l’inadéquation des lignes
directrices de 2014 aux réalités du secteur aéroportuaire.
Pour les plus petits aéroports, l’UAF insiste préalablement sur le
fait que, comme détaillé à l’annexe 20 du rapport, le droit eur
opéen prend
désormais en compte la situation particulière des aéroports de moins de
200 000 passagers annuels (fonctionnement et investissement) et de moins
de 3 millions de passagers (investissement uniquement), qui sont depuis
2017 intégrés de façon pére
nne dans le Règlement Général d’Exemption
par Catégories (RGEC
3
).
Mais, l’UAF défend une ambition beaucoup plus large pour les
aides d’État dans le domaine aéroportuaire, en écho à sa conviction que
l’aéroport est aussi un outil au service du développeme
nt économique et
social du territoire desservi. Aussi, pour permettre aux aides d’État d’être
un véritable outil au service de l’attractivité du territoire, l’UAF plaide
-t-
elle de longue date pour :
1.
Étendre les règles du RGEC applicables actuellement aux
aéroports de moins de 200 000 passagers à tous les aéroports réalisant
un trafic annuel inférieur à 700 000 passagers annuels
4
.
2.
Faire évoluer les règles en matière d’aides d’État aux aéroports
réalisant plus de 700 000 passagers annuels. Plus particulièrement,
l’UAF entend a minima que les aéroports de moins de 1 million de
passagers annuels puissent continuer à bénéficier d’aides
au
fonctionnement au-delà de 2024.
3
Article
56
bis
du
RGEC,
cf
https://eur-lex.europa.eu/legal-
content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A02014R0651-20210801
4
Ces aéroports, essentiels
pour l’attractivité de leur territoire, ne représentent d’ailleurs qu’une infime part du
trafic européen en termes de passagers (2,5% du trafic européen en 2018) avec par
conséquent un impact très limité sur le marché.
5
regulation/have-your-say/initiatives/13428-Lignes-directrices-relatives-au-secteur-
delaviation-Prolongation-des-aides-au-fonctionnement-en-faveur-des-aeroports-
regionaux-reaction-a-la-pandemie-de-COVID-19-_fr
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19
3.
Mieux prendre en compte les retombées économiques, fiscales,
touristiques et en matière d’emploi justifiant les décisions d’octroyer
certains soutiens publics aux aéroports et aux compagnies aériennes :
une réalité du ma
rché du transport aérien d’aujourd’hui.
Si la période transitoire permettant aux aéroports jusqu’à 3 millions
de passagers annuels de recevoir des aides au fonctionnement devait avoir
pour échéance avril 2024, la Commission européenne a d’ores et déjà
proposé de prolonger cette période transitoire de 3 ans supplémentaires
5
.
L’UAF y voit une volonté de l’exécutif européen de se laisser du temps pour
revoir les règles applicables aux aéroports régionaux afin de ne pas leur
interdire toute possibilité de soutien public, notamment au regard des
investissements importants nécessaires pour accomplir la transition
écologique et énergétique du secteur. En témoigne une nouvelle mouture des
Lignes Directrices climat / environnement / énergie publiée début 2022
4
, qui
p
our la première fois autorise sous certaines conditions les mesures d’aide
en faveur des aéroports accueillant plus de 5 millions de passagers par an.
Enfin l’UAF note que les règles en matière d’aides aux compagnies
aériennes restent imparfaitement comprises du fait de leur complexité, et
font régulièrement l’objet de contentieux devant la Cour de Justice de
l’Union européenne, cette dernière étant parfois amenée à censurer en tout
ou partie les décisions et raisonnements de la Commission européenne
5
.
Les
contrats avec les compagnies aériennes font l’objet d’observations
depuis des années sur de nombreux aéroports régionaux en France. Aussi
les difficultés récurrentes au regard des aides aux compagnies aériennes
auxquelles sont confrontés les aéroports régionaux justifieraient-elles de
lancer une réflexion sur les moyens permettant à ces aéroports de travailler
plus sereinement pour mener à bien leur objectif premier qui est le
développement de liaisons aériennes afin de désenclaver leur territoire
6
.
4
Point
2.1
des
Lignes
Directrices
CEEAG
5
Voir récemment en novembre 2022 les arrêts
C-331/20 P - Volotea v Commission
et
C-343/20 P - easyJet Airline v Commission
,
sur l’application du principe de l’opérateur
en économie de marché pour les accords conclus par les aéroports de Cagliari et Olbia
avec les compagnies aériennes Volotea et EasyJet.
6
S’agissant de la définition de la zone d’attraction d’un aéroport, l’UAF note que la Cour
semble retenir une approche élargie par rapport à celle globalement acceptée, en
estimant que celle-
ci s’identifie par une isochrone d’1h30 en voiture pour les aéroports
de 10 000 à 3 millions de passagers, alors que la définition européenne retient que la zone
d’attraction se situe « en principe, dans un rayon de quelque 100 kilomètres ou nécessitant
un temps de trajet de 60 minutes environ en voiture, bus, train ou train à grande vitesse
», sous réserve d’éventuelles spéci
ficités de chaque aéroport considéré.
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20
L’UAF milite pour un cadre européen juridique adapté, clair et
stable permettant aux aéroports de mettre en place des mesures incitatives
pour encourager le développement de leurs activités tout en préservant les
transporteurs aériens d’éventuelles distors
ions de concurrence.
Avec pour objectif de sortir de la crise de la COVID-19 plus
rapidement, certains États européens7 ont mis en place avec succès des
régimes d’aides nationaux permettant de relancer le trafic commercial et de
rétablir la connectivité aérienne. Ces régimes, validés par la Commission
européenne car transparents et exempts de discrimination, pourraient servir
de modèles et être pérennisés dans le corpus règlementaire des aides d’
État
dans le secteur aérien, pour encadrer les soutiens publics au développement
de la connectivité d’un aéroport et de son territoire.
Afin d’assurer des règles du jeu équitables et respectées dans toute
l’Union européenne, l’UAF a ainsi eu l’occasion de proposer à la
Commission européenne la réforme des aides au démarrage, finalement peu
utilisées car mal adaptées aux réalités du marché européen de l’aviation.
L’idée serait de les remplacer par une nouvelle catégorie d’aide autorisée,
qui pourrait par exemple prendre la forme d’une contribution maximum par
passager (un montant forfaitaire) pour toute compagnie aérienne qui
ouvrirait une nouvelle liaison ou qui augmenterait ses fréquences sur des
liaisons existantes, et dont le montant serait fonction de la taille de l’aéroport
dans lequel cette compagnie opère, et dégressif sur trois ans.
7
Chypre :
SA.57691
; Slovénie :
SA.59164
; Roumanie :
SA.57817
,
SA.59156
,
SA.63319
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21
Sur les lignes d’aménagement du territoire (LAT)
L’UAF partage globalement le constat de la Cour sur les défis qui
se posent aux lignes d’aménagement du territoire, et la nécessité pour
l’
État de revoir sa politique et sa stratégie en la matière.
Un axe d’amélioration intéressant pourrait être de faire évoluer la
règlementation nationale encadrant la participation financière de l’
État au
financement de ces lignes. Ce cadre règlementaire, issu de plusieurs textes
de 2005, est malheureusement à ce jour trop contraignant pour les
collectivités. Ainsi, pour obtenir une indispensable participation financière
de l’
État, les collectivités sont parfois obligées de prévoir dans leur contrat
de DSP un nombre de vols conséquent8, qui peut
s’avérer supérieur aux
besoins réels de desserte et de connectivité du territoire.
L’UAF a ainsi proposé à plusieurs reprises (notamment lors des
Assises du transport aérien de 2018)
d’assouplir ce cadre règlementaire,
pour permettre de conserver un fina
ncement de l’
État sur des lignes
d’aménagement du territoire présentant un programme de vols moins
fourni mais plus en adéquation avec les besoins du territoire. La flexibilité
apportée à la définition des obligations de service public, sans perdre le
sout
ien financier de l’
État
, pourrait aussi permettre d’intéresser plus
d’opérateurs, au profit d’une plus
grande concurrence sur ces liaisons.
Sur la mise en place d’une stratégie nationale aéroportuaire
et d’un Observatoire des aéroports
Si l’UAF craint que l’idée d’une stratégie aéroportuaire nationale
et celle d’un Observatoire des aéroports ne viennent heurter les réalités
nées de la décentralisation aéroportuaire de 2004-
2005, elle n’en
reconnaît pas moins la nécessité d’une instance d
e concertation entre les
différents acteurs du secteur aéroportuaire
opérateurs, collectivités
locales propriétaires de la plupart des aéroports régionaux, État.
Cette instance de concertation et le renforcement du dialogue entre
les acteurs devraient d
’ailleurs se
construire
d’abord
autour de la question
de la transition énergétique des plateformes aéroportuaires nécessaires à
la fois à la décarbonation du transport aérien (décarbonation des activités
aéroportuaires et préparation des infrastructures aé
roportuaires à l’avion
décarboné/bas carbone de demain) et à la mutation écologique des
territoires (fourniture des territoires en énergies renouvelables).
8
Cf article 1 de l’Arrêté du 16 mai 2005
définissant les critères d'éligibilité d'une
liaison aérienne à une prise en charge financière par l'État
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22
RÉPONSE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DE RYANAIR FRANCE
Ryanair est la plus ancienne et la plus importante compagnie
aérienne à bas coût d’Europe et a transporté 170 millions de passagers
durant l’année passée.
Les observations de Ryanair concernent les seules parties du projet
de rapport qui lui ont été trans
mises, l’introduction, les chapitres I.B et
II.C et l’
annexe n° 7.
1.
Le nombre d’aéroports par habitant
Le projet de rapport indique que « [c]omparée à ses voisins, la
France dispose du plus grand nombre d’aéroports par habitant (1,09
contre 0,29 en Allemagne) et par kilomètre carré »
9
.1.09 aéroports par
habitant semble excessif. Le tableau 1 indique 1.09 par million d’habitant,
ce qui semble probablement correct.
2.
La préconisation d’ententes anticoncurrentielles entre aéroports
Le passage suivant du projet de rapport semble exprimer une
opposition de principe à la concurrence entre aéroports et préférer leur
coopération :
La concurrence observée entre aéroports languedociens invite à
repenser activement la stratégie du maillage
aéroportuaire d’autant que
le monde aéroportuaire fait désormais face à de nouveaux défis
économiques et écologiques. Cet effort ne peut se matérialiser que dans
un cadre coopératif associant étroitement la région, responsable du
maillage territorial, et l
’État en tant que propriétaire de l’aéroport de
Montpellier et garant de la cohérence du maillage national. La région
Occitanie, aujourd’hui absente de la gouvernance de Nîmes et faiblement
présente dans celle de Montpellier, aurait la faculté d’amener à o
pérer
les choix stratégiques nécessaires pour la complémentarité des
infrastructures et ainsi entrainer un nouveau cercle coopératif
vertueux
10
. (souligné par l’exposante)
Un point important des extraits reçus du projet de rapport est de
considérer que Ryanair profiterait indument de la concurrence entre les
aéroports français et que cette concurrence serait regrettable
11
. Une
répartition des rôles (et donc des marchés) entre aéroports serait la
solution.
9
Rapport, introduction.
10
Rapport, annexe 7
.
11
Id., annexe 7.
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23
Il résulte d’une jurisprudence déjà assez ancienne d
e la Cour de
justice de l’Union européenne (Aéroports de Paris
12
) que la gestion et
l'exploitation des aéroports constituent des activités économiques et non
l’exercice des prérogatives de la puissance publique. Les aéroports sont
donc des « entreprises ».
Comme la Commission européenne l’indique
dans ses lignes directrices :
13
[L]es juridictions de l’Union, dans l'arrêt «
Aéroports de Paris »
ont [considéré] que l’exploitation d’un aéroport qui consiste à fournir
des services aéroportuaires aux compagnies aériennes et aux différents
prestataires de services est également une activité économique. Dans son
arrêt « Aéroport de Leipzig-Halle », le Tribunal a précisé que
l’exploitation d’un aéroport constitue une activité économique, dont la
construction d’infras
tructures aéroportuaires est indissociable.
L’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union
européenne (« TFUE ») dispose que tous accords entre « entreprises » qui
ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le
jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur sont incompatibles
avec le marché intérieur et interdits. Parmi ces accords d’entente
interdits, l’article 101 TFUE inclut les accords qui consistent à répartir
les marchés.
La répartition des marchés semble être clairement le but de
l’entente préconisée par le projet de rapport. L’un des objectifs de cette
entente entre aéroports semble être de permettre à l’aéroport de
Montpellier de jouer un rôle central. Les consommateurs français seraient
évidemment les
premières victimes d’une telle entente.
Le fait que certains aéroports soient propriété de l’
État et gérés
par des entités publiques ne les sort pas du champ d’application de
l’article 101 TFUE. En effet, l’article 106 TFUE dispose que « [l]es États
membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises
auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne
maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment
à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus. (souligné par
l’exposante)
Il est donc inquiétant de lire dans le projet de rapport que la
concurrence entre aéroports serait néfaste et, pire encore, qu’une entente
visant à mettre en œuvre une stratégie coopérative entre aéroports afin de
12
Aéroports de Paris / Commission, affaire T-128/98, EU:T:2000:290, confirmé par le
jugement dans l’affaire C82/01, EU:C:2002:617, points 75
-79.
13
Lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes,
[2014] JOUE C 99, paragraphe 27.
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24
supprimer la concurrence serait préconisée. Une telle stratégie de cartel
serait clairement un manquement de la France aux obligations que les
traités européens lui imposent.
Réciproquement, le projet de rapport présente les compagnies
aériennes comme des acteurs qui profitent de la concurrence entre
aéroports. Le rapport indique ainsi qu’«
[u]n maillage aéroportuaire
dense sur une zone géographique resserrée
[…]
permet [aux compagnies
à bas coût]
de bénéficier d’une concurrence entre plateformes qui sert
au
mieux la recherche de coûts d’exploitation les plus bas
»
14.
L’erreur du
rapport est d’ignorer que ces compagnies aériennes sont elles
-mêmes en
concurrence entre elles et que les aéroports peuvent également faire jouer
cette concurrence.
3.
Une déformation des lignes directrices de la Commission
Le projet de rapport se réfère à « [d]es aides aux compagnies
régulièrement condamnées »
15
. Il ajoute que « [l]es lignes directrices
n’autorisent qu’un type d’aides aux compagnies : des aides au démar
rage
de nouvelles lignes, sous la forme d’une réduction plafonnée à 50
% des
redevances aéroportuaires, sur trois ans au maximum, appuyée sur un
bilan économique ex ante permettant d’établir que ces dépenses
correspondent au comportement d’un investisseur
avisé en économie de
marché »
16
. (souligné par l’exposante) Cette affirmation est juridiquement
erronée car la satisfaction du test de l’investisseur avisé en économie de
marché mène à une conclusion d’absence d’aide et non de conformité de
l’aide selon les
critères des lignes directrices.
4.
Une présomption d’existence d’aides d’
État
Le projet de rapport considère que Ryanair bénéficierait d’aides
d’
État à travers des contrats de marketing signés avec Ryanair ou sa
filiale Airport Marketing Services (« AMS »)
17
.
AMS est une filiale de Ryanair et fournit des services de marketing
et de l’espace publicitaire à ses clients. L’espace publicitaire vendu par
AMS est disponible entre autres sur le site internet de Ryanair et loué au
prix de marché. Des aéroports tant privés que publics, des loueurs de
voitures, des sites de réservation d’hôtels, des compagnies d’assurance et
14
Rapport, Chapitre I, Section I.B.1.
15
Id., chapitre I, section II.C.2a
16
Ibid.
17
Id., Chapitre I, Section II.C.1.c.
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25
de télécommunications et d’autres entreprises font de la publicité sur le
site de Ryanair au prix de marché pratiqué sans discrimination par AMS.
Le rapport présuppose que les contrats de services de marketing
avec AMS permettent l’octroi d’aides d’
État à Ryanair. Cette conclusion
n’est étayée par aucune analyse conforme au droit européen. Les
paiements reçus en exécution des contrats de marketing couvrent la
fourniture de services ayant une valeur de marché établie et dont le prix
reflète cette valeur. Ryanair conteste donc l’usage du terme « aides
marketing » et les montants donnés dans le projet de rapport pour ces
aides présumées10.
5.
Une exte
nsion excessive à l’ensemble des aéroports français de
décisions peu représentatives de la Commission
Le projet de rapport mentionne les décisions négatives de la
Commission concernant cinq aéroports français pour conclure à
l’existence d’«
aides aux compagnies régulièrement condamnées »
18.
Ce
faisant, le projet crée une apparence de généralisation des aides d’
État
incompatibles dans un grand nombre d’aéroports français. Or, comme
l’indique le rapport, les décisions négatives ne concernent que 5 aéroports
sur 27 aéroports énumérés dans les plaintes d’Air France. Dans la grande
majorité des aéroports examinés par la Commission, la conclusion a été
qu’aucune aide n’était accordée. Les aéroports de Marseille
19
et de
Beauvais
20
sont les représentants les plus importants (en nombre de
passagers) de cette catégorie. Au-
delà de l’exemple des aéroports de
Marseille et Beauvais où le test de l’opérateur en économie de marché a
permis de conclure à l’absence d’aide, les aéroports pour lesquels la
Commission a conclu à l
’absence d’aide représentent la quasi
-totalité
(97%) du nombre de passagers concernés par les enquêtes de la
Commission sur la relation entre Ryanair et les aéroports européens
21
.
18
Projet de rapport, Chapitre I, Section II.C.2.a.
19
Décision de la Commission européenne du 20 février 2014 concernant les mesures
SA.22932 (2011/C) mises à exécution par la France en faveur de l'aéroport de
Marseille Provence et aux compagnies aériennes utilisatrices de l'aéroport, JOUE
L260 du 27 septembre 2016.
20
Décision (UE) 2023/105 de la Commission du 26 juillet 2022 concernant les
mesures SA.33960 2012/C mises à exécution par la République française en faveur
des gestionnaires successifs de l’aéroport de Beauvais
-Tillé et des compagnies
aériennes opérant audit aéroport, JOUE L12 du 13 janvier 2023.
21
Dans les affaires suivantes notamment, la Commission a déclaré qu’aucune aide n’a
été accordée :
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26
6.
Les risques passés inaperçus du test sui generis des « besoins réels »
des autorités
Les décisions de la Commission montrent également un penchant
de celle-ci qui pourrait avoir des conséquences graves pour la liberté
d’action des autorités publiques françaises. La Commission a en effet
commencé à appliquer une variante nouvelle
du test de l’opérateur en
économie de marché fondée sur une estimation de l’existence d’un
« besoin réel
» des autorités. La décision de la Commission dans l’affaire
de l’aéroport de Montpellier est l’un des exemples de l’usage de ce
nouveau principe. Dans
cette affaire, la Commission s’attribue le droit
de déterminer quels sont les besoins réels des autorités publiques et de
leur ordonner de modifier leurs décisions si elle décide que les besoins
des autorités françaises ne sont pas réels ou sont simplement
insuffisamment prouvés au goût de la Commission. Cette tendance dans
la pratique de la Commission mène à l’instauration d’une présomption
d’insincérité des autorités nationales dans la définition de leurs besoins
d’achats de biens et services et à la néc
essité pour ces dernières de
constituer des dossiers capables de satisfaire la Commission pour
chaque décision d’achat.
Étonnamment, le projet de rapport (qui cite pourtant la décision de
la Commission dans l’affaire de l’aéroport de Montpellier –
note de bas
de page n° 14) ne trouve rien à redire à ce sujet.
7.
Les analyses passées de la Commission européennes ont récemment
été remises en cause par la Cour de justice de l’Union européenne
La Cour de justice de l’Union européenne a dans son récent arrêt
Volotea
22
estimé qu’à la fois les preuves de la Commission dans ses
analyses de l’existence d’une aide étaient inexistantes et son analyse était
excessivement étroite et donc erronée.
La Cour de justice a ainsi :
-
affirmé qu’il revient «
à la Commission de démontrer
l’existence d’un avantage et non pas aux entreprises concernées
de démontrer l’absence de celui
-ci »
23
;
-
fustigé la tendance de la Commission « à postuler, dans des
termes péremptoires
» que le principe de l’investisseur en
22
Jugement de la Cour de justice de l’Union européenne du 17 novembre 2022,
Volotea
et easyJet Airline c Commission, affaires C-331/20 P et C-343/20 P, EU:C:2022:886.
23
Volotea et easyJet Airline c Commission, paragraphe 132.
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, ORGANISMES
ET PERSONNES CONCERNÉS
27
économie de marché n’e
st pas respecté sans en apporter de
preuves
24
et à ne pas faire « usage des pouvoirs lui permettant
d’obtenir les éléments d’information supplémentaires qui lui
paraissaient nécessaires ou utiles, en particulier de son pouvoir
d’adresser à [l’
État membre] une injonction tendant à ce que
[ce dernier] les lui fournisse, en vertu de l’article 12,
paragraphe 3, du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13
juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108
[TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9) »
25
et
-
condamné la tendance de la Commission à ne pas effectuer une
« appréciation globale et concrète au cas par cas »
26
qui
implique «
d’apprécier, de façon globale et concrète, si ces
entités avaient cherché, chacune en ce qui la concerne, à
acquérir les services concernés dans des conditions normales
de marché eu égard, en particulier, à la rationalité d’une telle
opération, à ses perspectives prévisibles de rentabilité, à
l’intérêt commercial et économique des prestations prévues à
cet effet, au prix à payer en contrepartie de celles-ci ainsi
qu’aux modalités juridiques et pratiques selon lesquelles les
contrats stipulant la fourniture desdites prestations et le
paiement dudit prix avaient été conclus »
27
.
Les analyses de la Commission dans les affaires des aéroports
d’Angoulême, Nîmes, Pau, Montpellier et La Rochelle citées dans le projet
de rapport par lesquelles elle a conclu à l’existence d’aides incompatibles
étaient du même niveau que son analyse dans l’affaire des aéroports de
Sardaigne qui a donné lieu à l’arrêt d’annulation de la Cour de justice cité
ci-dessus.
28
La décision de la Commission concernant l’aéroport de
Montpellier fait actuellement l’objet d’une action en annulation devant le
Tribunal de l’Union dans l’affaire T
-79/21. Cette affaire influencera donc
le sort des relations contractuelles entre Ryanair et les aéroports.
24
Volotea et easyJet Airline c Commission, paragraphe 155.
25
Volotea et easyJet Airline c Commission, paragraphe 157.
26
Volotea et easyJet Airline c Commission, paragraphe 132.
27
Volotea et easyJet Airline c Commission, paragraphe 153.
28
Note de bas de page n° 14. La Commission a par la suite retiré sa décision Aéroports
de Sardaigne en ce qui concerne Ryanair.
Le maillage aéroportuaire français - juin 2023
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