Défaillances et insuffisances dans la
fonction comptable des établissements
publics locaux d’enseignement (EPLE)
_____________________
PRESENTATION
____________________
La gestion des 2 600 lycées et des 5 200 collèges est susceptible
d’avoir des conséquences sur la vie quotidienne des millions d’élèves qui
y sont scolarisés, de leurs familles et des autres membres de la
communauté éducative. Depuis 1986, les lycées et collèges
sont des
établissements
publics
locaux
d’enseignement
(EPLE),
dotés
de
l’autonomie financière et de 2 750 agences comptables. Les collectivités
de rattachement – régions pour les lycées ; départements pour les
collèges- assurent leurs investissements et leur fonctionnement matériels
et immobiliers, y compris, depuis 2006, la gestion des personnels
techniques, ouvriers et de service (TOS), tandis que l’Etat rémunère
directement les autres personnels administratifs et enseignants.
Dans ce contexte, les comptabilités des EPLE, dont le contrôle est
de la compétence des chambres régionales des comptes, retracent des
opérations d’un montant limité, voisin d’une moyenne de 892 000 € en
2005, en Ile-de-France. Le budget de certains collèges est inférieur à
100 000 € ; 18 % seulement des EPLE franciliens disposent d’un budget
supérieur à 1 M€ ; très peu de gros lycées dépassent 10 M€. Pour un
établissement moyen, le nombre des opérations comptables n’excède
guère 500 par an. L’enjeu global est toutefois significatif puisqu’il se
monte sur l’ensemble du territoire à près de 7 Mds€.
562
COUR DES COMPTES
Le budget d’un EPLE
En fonctionnement, les recettes se limitent souvent à une dotation,
allouée par la collectivité de rattachement, pour l’entretien, les fluides et le
chauffage (autour de la moitié du fonctionnement général, soit 450 000 €
dans un établissement moyen) et à quelques subventions d’Etat ou de
collectivités locales pour des dépenses de soutien pédagogique. Les recettes
propres sont généralement faibles : quelques recettes de location et ventes de
prestations.
Des comptes de services spéciaux retracent des actions en équilibre
budgétaire avec recettes affectées : dans tous les établissements, les fonds
sociaux pour des bourses, fréquemment le fonctionnement de la cantine
(130 000 € dans un établissement moyen), et de plus en plus des voyages
scolaires (36 000 € dans un établissement moyen).
Plus rarement, des suivis financiers plus lourds sont induits par les
cuisines centrales, les ventes d’objets confectionnés ou les « mutualisations »,
c’est-à-dire la prise en charge par un établissement pour le compte de
plusieurs autres, d’actions particulières, par exemple la gestion des contrats
aidés à l’emploi.
Les dépenses en capital, habituellement de moins de 100 000 €,
servent surtout à financer des petits équipements. Les recettes proviennent de
subventions ou d’excédents de fonctionnement, l’emprunt étant
interdit aux
établissements.
Les juridictions financières assurent leur mission de contrôle des
comptes des EPLE à travers les contrôles périodiques des chambres
régionales des comptes (CRC) et, quand les sujets le justifient, des
interventions de synthèse de la part de la Cour des comptes.
Ainsi, dans un référé du 4 août 2000, la Cour a déjà attiré
l’attention du ministre de l’éducation sur les difficultés du réseau des
comptables d’EPLE. Une insertion au rapport public de 1997 était
consacrée à l’utilisation de lycées et collèges pour la gestion, irrégulière,
de certains crédits d’Etat. Par ailleurs, la procédure mal maîtrisée des
contrats aidés bénéficiant à certains personnels des EPLE a fait l’objet
d’une communication du Procureur général près la Cour des comptes a
aux administrations concernées le 19 juillet 2000.
La faiblesse du nombre des opérations comptables n’empêche pas
les défaillances dans la tenue de la comptabilité d’une proportion non
négligeable d’établissements : retards dans la production des comptes,
écritures mal exécutées, pertes financières. L’origine de ces défaillances
peut être notamment localisée dans certains traits structurels de leur
organisation comptable : le positionnement ambigu des comptables, une
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
563
gestion médiocre des ressources humaines, un plan comptable complexe
et inadapté à une gestion par objectif.
I
-
Le constat : des défaillances comptables
nombreuses
Les
contrôles
des
EPLE
par
les
CRC
n’appellent
pas
d’observations critiques dans la majorité des cas. Toutefois, ils ont donné
lieu à des suites significatives au regard des sommes en jeu (les comptes
des EPLE représentent, par exemple, seulement 2 % des masses
financières soumises au contrôle de la CRC d’Ile-de-France) : en 2005-
2006, 46 débets ont été prononcés à l’égard des comptables par 11 CRC
pour un montant total de 958 897 € et plusieurs dizaines d’interventions
administratives ont été transmises aux établissements eux-mêmes, aux
collectivités de rattachement et aux recteurs.
A - Les retards des comptables gênent le contrôle des
comptes particulièrement en Ile-de-France
Les comptes des EPLE afférents à l’année N doivent être produits
à la CRC au plus tard à la fin du mois d’octobre de l’année N+1. Or, des
retards significatifs sont constatés, particulièrement en Ile-de-France, où
se concentraient, en 2005, 1 305 des 7 800 EPLE. Ainsi, fin mai 2006,
53 comptes pour l’exercice 2004, soit 4 %, n’y étaient pas encore
produits, contre 2,5 % des autres comptes produits à la chambre. Fin mai
2007, 22 comptes 2004 d’EPLE manquaient toujours alors que tous les
autres comptes 2004 avaient été produits. L’effet des rappels, puis des
mises en demeure du ministère public de la CRC est moins efficace
auprès des comptables EPLE que des autres comptables. L’effet incitatif
des amendes pour retard dans la production de comptes est réduit par leur
plafonnement légal à environ 1 000 € par compte d’un même exercice.
Néanmoins, les seuls agents comptables condamnés à des amendes pour
retard par la CRC d’Ile-de-France sont des comptables d’EPLE. Dans un
cas extrême, les comptes n’ont pas été produits pendant dix ans. Des
difficultés de production de comptes sont également constatées, à un
moindre degré dans d’autres régions (Bourgogne, Nord Pas-de-Calais,
Pays-de-la-Loire, Picardie). La CRC du Limousin a rejeté trois comptes
qui lui avaient été produits mais qui n’étaient pas en état d’être jugés.
Ces retards conduisent à des jugements eux-mêmes tellement
éloignés des faits qu’ils ne permettent généralement plus de procéder à
des recouvrements ou à des régularisations. Il arrive qu’un compte d’une
564
COUR DES COMPTES
année soit produit alors que le compte de l’année précédente ne l’est pas
encore : le contrôle du correct enchaînement des soldes entre les exercices
successifs, qui incombe au juge des comptes, est alors impossible. Pour
un établissement de Seine-Saint-Denis, le retard dans la production des
comptes a permis de dissimuler des faits susceptibles de poursuites
devant la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) et qui n’ont
pu être déférés que tardivement à cette dernière.
Enfin, il n’est pas rare que les comptables ne répondent pas aux
injonctions prononcées par un jugement provisoire de la CRC dans le
délai imparti par celle-ci. La chambre d’Ile-de-France a ainsi condamné
un comptable d’EPLE à une amende pour un retard de 77 mois.
B - La mauvaise tenue de la comptabilité fait obstacle à
la transparence financière
La tenue de la comptabilité ne semble pas assurée de façon suivie :
nombre d’écritures sont passées avec retard, quand elles ne sont pas
renvoyées en fin d’exercice. Cette pratique conduit à de multiples
dysfonctionnements.
Des soldes anormaux dans les comptes sont signalés aux
comptables par l’application informatique gestion financière et comptable
(GFC) lorsqu’ils
établissent les comptes financiers annuels. Ces
signalements ne bloquent cependant pas l’édition des comptes financiers,
et ceux-ci comportent donc des soldes restés anormalement créditeurs, du
fait de la négligence du comptable qui n’a pas soldé une opération. Il est
également fréquent que des opérations en principe transitoires, comme
des comptabilisations de chèques impayés, ne soient pas soldées avant
l’intervention du juge des comptes.
Dans les comptes d’immobilisation, des dépréciations supérieures
au montant des immobilisations sont parfois comptabilisées conduisant à
des bilans avec actif net négatif. Le suivi des actifs et des stocks apparaît
très imparfait.
L’absence de procédure de reversement conduit à ce que ne soient
pas remboursées à l’Etat ou aux collectivités les subventions qui n’ont pas
été utilisées
conformément à
leur
objet initial.
Elle profite
à
l’établissement, mais pénalise ses financeurs. Sur un échantillon de 207
établissements contrôlés entre octobre 2006 et juin 2007, la CRC d’Ile-
de-France en a relevé 28 cas pour plus de 1,1 M€ ; une extrapolation aux
7 800 EPLE conduirait à un montant très significatif. L’ampleur des
sommes en cause a d’ailleurs conduit, les 3 avril et 11 décembre 2006, le
ministre à appeler la vigilance des recteurs sur ce point.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
565
C - Des négligences conduisent à des pertes
Outre des paiements effectués en l’absence de pièces justificatives
également constatés dans d’autres organismes publics, les EPLE se
singularisent par une tenue de la comptabilité suffisamment médiocre
pour dégrader parfois leur situation financière.
Les soldes débiteurs de certains comptes correspondent à des
créances fictives ou à un déficit en deniers, imputables soit à l’absence de
diligences en recouvrement, soit à des paiements effectués par des
régisseurs sans pièces justificatives. Parmi les cas relevés par les CRC
notamment en PACA, sont souvent cités le recouvrement incomplet de
frais de demi-pension, l’absence de versement des entreprises au titre de
conventions de formation, les diligences tardives pour le recouvrement de
chèques restés impayés.
Certains soldes des comptes financiers doivent être justifiés par un
état détaillé. Or, de nombreux « états de développement des soldes » ne
sont remplis que partiellement, ou parfois manquent et ne peuvent plus
être complétés, même après intervention du juge des comptes. Dès lors,
les diligences pour le recouvrement des
créances ne peuvent aboutir.
Ainsi, le comptable d’un lycée de Seine-Saint-Denis n’a laissé aucune
identification des débiteurs de frais de demi-pension impayés au
1
er
semestre 2003 pour un montant total de 15 918 €, alors que lui-même
quittait l’établissement le 1
er
septembre 2003.
Des opérations comptables en principe transitoires, lorsqu’elles ne
sont pas soldées, peuvent également cacher des détournements : une
« avance » sur indemnité non remboursée après 13 ans peut s’assimiler à
un paiement définitif, surtout si le comptable est l’un des bénéficiaires.
Des détournements sont parfois constatés de la part de régisseurs
mal surveillés, de membres du personnel, voire d’agents comptables.
L’agent comptable de deux lycées d’Ile-de-France a ainsi tiré des chèques
sur les établissements à son profit
personnel sans justification et sans
remboursement (estimation de 63 583 €), retiré ou non reversé des
espèces (104 560 €), utilisé les chéquiers des établissements pour des
dépenses personnelles (16 390 €). Le comptable d’un autre lycée d’Ile-de-
France stockait dans un tiroir les enveloppes d’espèces remises pour les
frais de cantine ; il y a prélevé près de 10 000 € pour ses besoins
personnels avant de réintégrer les fonds en caisse à l’occasion d’un
contrôle du Trésor public. Dans un EPLE de la région Centre, des espèces
confiées à des tiers régisseurs pour des voyages scolaires ont été mal
suivies : opérations de change mal retracées, usage des espèces non
justifié, ce qui a conduit à la mise en débet du comptable.
566
COUR DES COMPTES
Les défaillances des comptables peuvent conduire à des pertes très
significatives pour les établissements : 493 559 € pour un lycée de Seine-
Saint-Denis au titre d’avances et d’indemnités irrégulières, puis du suivi
tardif de certaines créances ce qui représente près de 5 % des budgets
concernés ; 57 072 € pour un autre lycée de ce département correspondant
à des paiements effectués par prélèvement automatique sans justification
pendant quatre ans, ce qui représente 2 à 3 % des budgets concernés ;
50 442 € pour un lycée du Val-de-Marne, à la suite d’un suivi déficient de
créances et de prélèvements automatiques sans justification, soit encore
2 % d’un budget annuel.
II
-
Les causes : des insuffisances dans
l’organisation comptable
Les agences comptables des EPLE sont spécialisées et ne
consacrent leurs activités qu’à des établissements de ce type. Elles sont
adossées à un établissement et assurent souvent la fonction comptable de
plusieurs établissements rattachés, près de trois en moyenne.
A - Le positionnement institutionnel du comptable n’est
pas clair
Le principe général de la comptabilité publique qu’est la séparation
de l’ordonnateur et du comptable n’est pas réellement respectée puisque
les agents comptables, personnels de l’éducation nationale, cumulent
toujours leur fonction avec celle de gestionnaire de l’établissement
support de l’agence comptable. Outre que la fonction d’intendance
absorbe une partie de leur temps, elle les installe également dans une
position
de
subordination
hiérarchique
par
rapport
au
chef
d’établissement. L’absence de réelle séparation entre l’ordonnateur et le
comptable peut aller jusqu’à la connivence : ainsi, des paiements indus
ont pu être réalisés par accord entre le comptable et l’ordonnateur. Par
ailleurs, le cumul de la fonction de gestionnaire et de comptable a permis
des détournements de fonds, par exemple : non émission de titres de
recettes pour des produits de cantine par le gestionnaire qui, en tant que
comptable, a ensuite pu procéder aux encaissements en espèces à son
profit personnel.
En outre, les comptables assument des fonctions qui ne sont pas du
ressort de leurs établissements. Ainsi, certains assurent des fonctions
comptables pour le compte de l’Etat : à titre d’exemples, un lycée parisien
a géré des crédits de fonctionnement du rectorat entre 1996 et 1998
et un
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
567
lycée de la Vienne ceux de la modernisation des centres d’information et
d’orientation entre 2000 et 2003 ; dans chaque rectorat, un établissement
centralisait jusqu’en 2006 les contributions des établissements versées au
titre des surveillants de demi-pension. Des établissements sont dits
« mutualisateurs » pour le compte de dizaines d’autres : la gestion des
contrats aidés passés avec des personnels non-titulaires, tels les contrats
emploi-solidarité (CES), est confiée à un comptable centralisateur pour le
compte de plusieurs dizaines d’établissements (17 établissements
centralisateurs en Ile-de-France) et plusieurs centaines de contrats : le
dispositif qui fait interface avec le CNASEA, centralisateur national, reste
toujours
défaillant
malgré
les
observations
formulées
dans
une
communication du Procureur général près la Cour des comptes du
19 juillet 2000 avec, en particulier des difficultés à recouvrer auprès du
CNASEA toutes les sommes avancées aux établissements employeurs. En
sens inverse, le service interacadémique des examens et concours,
responsable des épreuves du bac, faisait payer jusqu’en 2005 par certains
agents comptables des EPLE les défraiements dus aux enseignants au titre
du baccalauréat.
B - La gestion des ressources humaines est
insatisfaisante
Les périmètres des agences comptables sont très inégaux : à la
rentrée 2006, 403 agences comptent un seul établissement, environ 2000
deux à quatre établissements et certains, en Alsace, jusqu’à huit ou neuf.
Ils sont également très instables, leur composition pouvant être remaniée
en fonction, notamment, du grade de l’agent comptable et de sa
compétence. Les équipes de ces agences sont souvent peu étoffées et
n’atteignent pas la taille critique qui garantit une bonne maîtrise des
techniques comptables. Dans nombre d’agences, le comptable lui-même,
absorbé par l’intendance de l’établissement support, est assisté d’un ou
deux agents à temps partiel mis à disposition par les établissements
rattachés.
Les agents comptables sont souvent recrutés sans formation ni
vocation comptable, particulièrement en banlieue parisienne : une partie
d’entre eux est issue des Instituts régionaux d’administration (IRA) où ils
ont généralement suivi leur unique et très modeste formation comptable ;
ils souhaitaient fréquemment une autre affectation fonctionnelle et
géographique. Dans les zones à difficulté scolaire, leur mobilité est en
outre forte. En revanche, il est difficile de muter un comptable défaillant
de longue date.
568
COUR DES COMPTES
L’insuffisance de la formation, au moins lors de la prise de poste..a
été reconnue. Quelques mesures améliorent désormais le niveau à l’entrée
en fonction. Cinq jours de formation ont été instaurés en 2003 pour les
comptables, quelques semaines après leur prise de fonction. A partir de
2007-2008, les élèves des IRA qui choisiront la filière « administration
scolaire » parmi d’autres filières dès le milieu de leur scolarité, suivront
des enseignements et stages adaptés pendant les cinq derniers mois.
L’appui
que
les
services
rectoraux
apportent
aux
agents
comptables est parfois tardif ou insuffisant. Les effectifs dédiés au soutien
des agents comptables peuvent être faibles : trois agents au rectorat de
Versailles. Ils organisent la formation continue des agents comptables,
font conseiller les agents débutants par des comptables confirmés «
tuteurs » ce qui s’avère parfois délicat dans les zones les moins
attractives. Un outil d’autodiagnostic comptable, ODICÉ, est mis en ligne
et ferait l’objet de formations début 2008. Il est d'une incontestable
qualité technique et pourra se montrer efficace si l'effort de formation
envisagé est assez soutenu pour assurer aux agents le niveau comptable
requis ainsi que la capacité de mettre en oeuvre le plan d'action découlant
du diagnostic.
Les contrôles administratifs, à vocation préventive, restent eux-
mêmes très limités dans les agences comptables des EPLE : peu de
missions significatives de la part des corps d’inspection de l’Education
nationale (brèves mentions dans le rapport commun IGEN - IGAENR
« L’EPLE et ses missions » de décembre 2006 ; missions spécifiques en
cas de dysfonctionnements graves ; outil de détection informatique
d’anomalies comptable depuis 2007), contrôles très ciblés des inspecteurs
du Trésor, relativement moins nombreux que dans les trésoreries du
réseau de la comptabilité publique (24 % des EPLE contrôlés en quatre
ans contre 56 % dans le réseau du Trésor en seulement deux ans en 2005-
2006) et inégalement répartis (aucun contrôle dans les Hauts-de-Seine
depuis deux ans, une dizaine en Seine-Saint-Denis en 2007 pour 108
agences).
Enfin, pour faire face aux situations rares mais non exceptionnelles
de remplacement d’un comptable défaillant, le recours aux commis
d’office était difficile. Un cas extrême a été relevé en Seine-et-Marne où
le rectorat a obtenu avec peine d’un comptable le dépôt de ses comptes
avec près de 10 ans de retard, sans pouvoir jusque-là lui trouver de
remplaçant. Avant l’été 2007, la rémunération des commis d’office par le
comptable défaillant demeurait, en effet, sans fondement légal. L’article
146 de la loi de finances rectificative pour 2006 a remédié à cette
situation, le décret n° 2007-1276 du 27 août 2007 réglant les modalités de
mise en oeuvre.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
569
C - Une présentation comptable complexe et pourtant
incomplète
La réglementation comptable est ancienne : elle repose dans son
principe sur un décret de 1985 (décret n° 85-924 du 30 août 1985),
précédant la décentralisation. La principale circulaire valant instruction
comptable qui date de 1988 a été peu modifiée. En outre, la comptabilité
des EPLE n’a pas évolué vers l’application des principes du plan
comptable général, contrairement aux comptabilités des collectivités
territoriales et plus récemment de l’Etat.
Dans la forme, les textes concernant les EPLE apparaissent peu
lisibles et ont été largement modifiés par simples lettres du ministre aux
recteurs, dont le contenu a lui-même beaucoup vieilli, par exemple en ce
qui concerne les immobilisations et leurs dépréciations (lettres de 1966 et
1979). Les comptables des EPLE, pourtant déjà imparfaitement formés
avant leur prise de fonction, ne peuvent pas consulter aisément une
véritable instruction comptable, document unique et actualisé.
La présentation budgétaire et comptable des EPLE reflète leur
situation institutionnelle particulière. L'autonomie financière théorique de
ces établissements publics est, en pratique, très limitée, ce qui peut
déresponsabiliser les équipes de direction. L’essentiel des rémunérations
et des investissements est supporté directement par l’Etat ou la
collectivité de rattachement. Un EPLE ne retrace ainsi dans son budget
qu’une part limitée (souvent 10 à 15 %) de son activité. Une telle
présentation incomplète empêche toute analyse comparative sérieuse et
dénaturerait tout indicateur de performance. Elle ne facilite pas davantage
la compréhension de la situation financière par les membres des conseils
d’établissement, en particulier les représentants des élèves, parents
d’élèves et enseignants.
Pourtant, les subventions affectées, les obligations réglementaires
d'équilibrer certaines activités (fonds sociaux, cantine, voyages), les
suivis de cursus techniques avec vente « d’objets confectionnés » ont
conduit à un plan comptable spécifique avec de nombreuses subdivisions
(environ 25 chapitres fonctionnels). Enfin, les versements de l’Etat ne
sont pas retracés dans des subdivisions harmonisées avec les nouveaux
programmes budgétaires de la LOLF, en vigueur depuis 2006.
570
COUR DES COMPTES
Le ministère de l’Education prépare depuis février 2005 une
refonte de la présentation budgétaire et comptable des EPLE qui ne
débouchera probablement pas avant 2010-2011.
III
-
Un système à rebâtir
La tenue de la comptabilité des EPLE s’avère très imparfaite. Elle
n’autorise pas toujours un contrôle normal des comptes, ne garantit pas
leur parfaite transparence et aboutit parfois à des pertes financières
conséquentes au regard des budgets pourtant très modestes. Il est vrai que
la réglementation comptable, apparaît partiellement obsolète, inutilement
complexe, alors même que les comptes reflètent une faible partie
seulement de l’activité des établissements.
Face à ces difficultés techniques, les agents comptables sont peu
ou pas formés à la comptabilité, insuffisamment appuyés par les rectorats
et inspections d'académie, souvent mal secondés, et si l’on excepte les
vérifications des CRC, relativement peu contrôlés. De surcroît, ils
exercent une mission qui n'apparaît généralement pas prioritaire à la
communauté éducative. Et surtout, leur position fonctionnelle est
inconfortable : parfois distraits par des charges comptables extérieures à
leurs
établissements,
quotidiennement
absorbés
par
les
tâches
d’intendance de l’établissement support, ils sont hiérarchiquement
subordonnés à l’ordonnateur pour les tâches non comptables et notés par
lui, y compris pour celles-ci.
Dès lors, le système actuel, même s’il était maintenu dans ses
grandes lignes, doit être amélioré.
Le ministère de l’Education a d’ailleurs pris quelques mesures en
ce sens en 2003-2006 qui mériteraient d’être renforcées : nouvelles
formations des agents comptables, facilitation de la refonte de la carte des
agences comptables. La réduction du nombre d’agences comptables,
préconisée par la Cour en 2000, appelle un effort particulier car elle s’est
ralentie : 160 suppressions en trois ans entre 1997 et 2000, 160
suppressions en six ans entre 2000 et 2006 à nombre d’EPLE équivalent.
L’indemnité de caisse des comptables atteint son plafond lorsque le
groupement compte trois établissements ; un développement des grandes
agences nécessiterait d’en réviser les règles de calcul. De même, les
rectorats devraient être appelés à stabiliser les regroupements comptables
et mieux organiser l’appui aux comptables.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
571
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Compte tenu des limites inévitables de tels ajustements, la Cour
qui avait déjà attiré l’attention du ministère de l’éducation sur les
dysfonctionnements de ce réseau comptable en 2000, insiste sur l’urgence
de deux réformes
qui apporteraient davantage de clarté dans la
répartition des rôles et favoriseraient une responsabilisation accrue des
gestionnaires et des comptables :
- une séparation fonctionnelle des ordonnateurs et des comptables
avec la création d’agences comptables desservant un nombre plus
important d’établissements, de l’ordre d’une vingtaine correspondant par
exemple aux bassins d’éducation et de formation. Les comptables mieux
sélectionnés, mieux formés, entourés par des équipes dédiées à la
comptabilité et en nombre atteignant un seuil critique de compétence,
pourraient se consacrer aux seules fonctions comptables ;
- la simplification de la présentation comptable organisée par une
véritable instruction comptable avec des dispositions actualisées, son
harmonisation avec la LOLF et un contenu plus exhaustif débouchant sur
des indicateurs de performance. Les projets actuels du ministère, au
demeurant à échéance lointaine (2010-2011) s’orientent en partie
seulement dans cette direction avec une globalisation des subventions,
certaines simplifications de nomenclature et une information budgétaire
sur les dépenses de personnel ; les indicateurs de performance sont
seulement évoqués. En outre, il convient de veiller à ne pas introduire de
nouvelles complexités
572
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU MINISTRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE
La Cour évoque les défaillances affectant la tenue de la comptabilité
d’une proportion non négligeable d’EPLE : retards dans la production des
comptes, écritures comptables mal exécutées, négligences entraînant des
pertes financières.
Elle en repère les causes dans des traits structurels de l’organisation
comptable des EPLE : positionnement ambigu des comptables, gestion
médiocre des ressources humaines, plan comptable complexe et inadapté à
une gestion par objectif.
Elle souligne l’urgence de deux réformes : la séparation fonctionnelle
de l’ordonnateur et du comptable et la simplification de la présentation
comptable.
Les observations développées par la Cour sur le réseau comptable des
EPLE appellent, de la part du ministère de l’éducation nationale, trois séries
de remarques sur les défaillances comptables qu’elle a constatées, les
insuffisances qu’elle a repérées dans l’organisation comptable et les
recommandations qu’elle préconise.
I – Le constat opéré par la Cour de défaillances comptables nombreuses
La Cour indique que « les contrôles des EPLE par les CRC
n’appellent pas d’observations critiques dans la majorité des cas »
En effet, la plupart des cas décrits sont constatés en Île-de-France, où
la mise en oeuvre de mesures spécifiques permettant d’assurer une meilleure
stabilité des équipes apparaît nécessaire. Ils ne sont nullement représentatifs
de la situation de l’ensemble des EPLE.
I – 1. La production des comptes
La Cour constate « des retards significatifs dans la production des
comptes, particulièrement en Ile-de-France » qui gênent le contrôle des
comptes et enlèvent aux jugements prononcés une partie de leur caractère
opératoire.
Comme le souligne la Cour, la nomination de commis d'office, en
l'absence de reddition des comptes par le comptable patent, était difficile
depuis quelques années, notamment du fait d'une absence de base légale et
réglementaire à la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire
du comptable défaillant ainsi qu’à la rémunération du commis d’office.
Désormais, comme le mentionne la Cour, il a été remédié à cette
situation : les dispositions des décrets n° 2007-1276 et 2007-1277 du 27 août
2007, portant respectivement sur la nomination de comptables commis
d'office pour la reddition des comptes des comptables publics et assimilés et
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
573
sur leur rétribution, vont permettre de procéder à ces nominations et à
l’engagement de la responsabilité du comptable défaillant, dans des
conditions homogènes et juridiquement fondées.
La publication de ces textes a constitué une nouvelle occasion de
rappeler aux services académiques la nécessité, dès qu'un retard est constaté
dans l'élaboration du compte financier, lors de ses différentes étapes
(présentation au conseil d’administration, transmission aux autorités de
contrôle, envoi du compte pour mise en état d'examen), de prendre l'attache
du comptable afin d'examiner les mesures permettant de remédier aux
difficultés constatées, avant de procéder, si nécessaire et dans les meilleurs
délais, à la nomination d'un commis d'office.
Au surplus, le fait que la charge de la rétribution du commis d'office
incombe désormais à l’État constituera un facteur de responsabilisation des
services déconcentrés de l'éducation nationale à l’égard des retards de
production des comptes financiers des EPLE.
I – 2. La tenue de la comptabilité
La Cour met en exergue quatre points :
- la passation de certaines écritures présente de fréquents retards ;
- l’absence de contrôles bloquants dans l’application Gestion
Financière et Comptable (GFC) aboutit à laisser perdurer des soldes
anormaux dans les comptes financiers ;
- la gestion patrimoniale présente de graves lacunes (comptabilisation
erronée des dépréciations, suivi imparfait des actifs et des stocks) associées à
une obsolescence des textes relatifs à la gestion des immobilisations ;
- l’absence de procédure de remboursement à l’Etat ou aux
collectivités territoriales de subventions qui n’ont pas été utilisées
conformément à leur objet initial conduit à des reliquats de subventions.
S’agissant des retards dans les écritures, l’introduction d’un dispositif
de contrôle interne comptable en EPLE décrit infra (point II – 3.) vise en
particulier à s’assurer de la régularité de la passation des écritures. Parmi
les 317 items recensés pour l’ensemble des douze cycles à analyser, 35 sont
centrés sur le recouvrement et 61 sur les écritures en comptabilité générale.
L’application GFC prévoit de nombreux contrôles, qui constituent une
« sécurité » pour les gestionnaires et les comptables : certains de ces
contrôles peuvent être utilisés à tout moment de l’exécution budgétaire et
comptable, alors que d’autres sont plus particulièrement adaptés à l’édition
du compte financier (19 contrôles sont prévus à cet effet). Les conséquences
de ces contrôles et en particulier leur caractère bloquant ou non vont être de
nouveau étudiées par les services du ministère.
574
COUR DES COMPTES
La gestion des immobilisations, et plus globalement la gestion
patrimoniale des EPLE soulève des questions d’ordres juridique, comptable
et organisationnel qui sont étroitement liées : préalablement à la rédaction
de nouveaux textes, voire à l’élaboration d’outils informatiques appropriés
qui paraît éminemment souhaitable, il est indispensable de procéder à une
évaluation approfondie de la situation, compte tenu des multiples aspects de
ce dossier, des enjeux économiques et financiers qui y sont attachés et de son
impact sur les relations entre les EPLE et les collectivités territoriales.
Quant aux subventions non utilisées par les EPLE, cette situation
résulte de pratiques, tant des services académiques que de certaines
collectivités territoriales de rattachement, qui consistent à attribuer de
nombreuses dotations avec une affectation prédéterminée. Or, lorsqu’ils ont
été assortis d’une destination particulière, ces crédits sont inscrits dans des
comptes de tiers (classe 4) permettant que leur affectation soit conservée,
conformément au 2
e
alinéa de l’article 44 du décret n°85-924 du 30 août
1985 relatif aux EPLE, qui prévoit que : « les produits attribués à
l'établissement avec une destination déterminée, les subventions des
organismes publics et privés, les dons et legs doivent conserver leur
affectation ».
Cependant, les services académiques ont été incités depuis la mise en
oeuvre de la LOLF à globaliser les crédits d’État attribués aux
établissements. Ainsi, l’attention des recteurs a été attirée, notamment par
courriers des 3 avril et 11 décembre 2006 cités par la Cour (p. 4), sur la
nécessité de procéder à une globalisation accrue des dotations allouées aux
établissements, mais aussi d’autoriser la « déspécialisation » des reliquats
afin d’optimiser l’utilisation de fonds susceptibles de demeurer inemployés.
Les comptes financiers et les délibérations à caractère financier des
conseils d’administration font, en tout état de cause, l’objet d’un examen
attentif, en particulier pour ce qui concerne le développement des soldes des
comptes de tiers, les reliquats étant pris en compte pour la répartition de la
dotation de l’année suivante.
Ces mesures ont permis d’optimiser l’utilisation des crédits d’État, les
reliquats étant passés au plan national de 383 Millions d’Euros (M€) fin
2004 à 200 M€ fin 2005. Les données de l’exercice 2006, encore provisoires,
font apparaître une nouvelle diminution, les reliquats s’élevant à 140 M€,
soit une baisse de 63 % en deux années.
En outre, les principales règles qui doivent présider à l’élaboration et
au contrôle des budgets des EPLE ont été rappelées par courrier du 25 juin
2007.
À la suite d’anomalies constatées par l’Inspection Générale de
l'Administration de l'Education Nationale et de la Recherche (IGAENR), ce
courrier soulignait que le budget d’un EPLE doit comporter l’ensemble des
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
575
ressources susceptibles d’être mobilisées pendant l’exercice, ainsi que toutes
les dépenses prévisibles, conformément au principe de sincérité budgétaire.
Il appelait également les acteurs de l’exécution financière à la
vigilance envers les encaissements, en particulier pour les recettes de
restauration et d’internat ou de taxe d’apprentissage.
Il rappelait enfin que le renforcement de l’autonomie et de la
responsabilité des établissements implique que ceux-ci rendent compte de
leur activité et de l’emploi des moyens mis à leur disposition, tant au sein du
conseil d’administration qu’aux différents financeurs.
I – 3. « Des négligences conduisant à des pertes financières »
La Cour souligne que les défaillances des comptables peuvent
conduire à des pertes significatives pour les EPLE, évoquant l’absence de
diligences pour le recouvrement des créances. Elle relève que « des
détournements sont parfois constatés ».
La formation des comptables d’EPLE, souvent centrée sur la fonction
de payeur, peut en effet les conduire à privilégier la régularité de la dépense
à la mise en oeuvre d’une politique efficace de recouvrement. Il apparaît donc
souhaitable que ce thème qui, comme le souligne la Cour, est un des motifs
les plus fréquents de mise en jeu de la responsabilité des comptables
d’EPLE, soit davantage approfondi, tant lors de la formation initiale des
futurs comptables que dans le cadre de leur formation continue.
D’ores et déjà, le recouvrement fait l’objet d’une séquence
particulière à l’occasion du séminaire national d’une semaine, organisé
chaque année depuis 2003 à l’intention de tous les agents nouvellement
nommés sur des fonctions de comptable en EPLE.
Par ailleurs, concernant l’observation de la Cour relative à des
constats de détournement, il convient de préciser que ces derniers font l’objet
d’une procédure pénale et d’une procédure disciplinaire à l’encontre de son
auteur, mises en oeuvre parallèlement à l’engagement par les services du
ministère de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable.
S’agissant des voyages scolaires, des procédures ont été mises en
place, à la suite des observations formulées par la Cour des comptes, afin de
mettre fin à leur gestion par des associations. Dorénavant, lorsque les sorties
ou voyages poursuivent un objectif pédagogique et qu’ils se déroulent pour
partie sur le temps scolaire, ils font l’objet d’une délibération du conseil
d’administration et sont gérés au sein du budget de l’établissement. Le
montant des dépenses enregistrées au sein du service spécial N3
‘Appariements, voyages, échanges’ dans les comptes des EPLE en 2005
(dernier exercice complètement connu) s’élève à plus de 200 M€.
576
COUR DES COMPTES
II – Les insuffisances repérées par la Cour dans l’organisation comptable
II – 1. Le positionnement institutionnel du comptable
La Cour observe que le principe de séparation de l’ordonnateur et du
comptable n’est pas réellement respecté : l’agent comptable, parce qu’il
cumule sa fonction avec celle de gestionnaire de l’établissement siège de
l’agence comptable, est placé dans une position de subordination
hiérarchique par rapport au chef de cet établissement.
Il est exact que la subordination du gestionnaire au chef
d’établissement peut être jugée peu conforme au principe de séparation des
ordonnateurs et des comptables, lorsque le gestionnaire est également le
comptable de l’établissement. Il convient cependant de souligner que tel n’est
pas le cas dans plus de 5.000 établissements (soit près des 2/3 des EPLE) qui
sont membres d’un groupement comptable et dont l’agent comptable est
affecté dans un autre établissement siège du groupement.
En outre, le terme de « connivence » qui pourrait s’installer entre
l’ordonnateur et le comptable en raison de l’absence de réelle séparation et
qui faciliterait des détournements de fonds paraît excessif.
La Cour note également que des comptables d’EPLE assument des
fonctions qui ne sont pas du ressort de leurs établissements, soit pour le
compte de l’État, soit pour le compte d’autres EPLE dans le cadre de
dispositifs de mutualisation ; sur ce point, elle souligne que le dispositif mis
en place pour la gestion des contrats aidés passés avec des personnels non
titulaires reste défaillant « avec, en particulier, des difficultés à recouvrer
auprès du Centre National pour l’Aménagement des Structures Agricoles
(CNASEA) toutes les sommes avancées aux établissements employeurs ».
S’agissant des mutualisations, il convient de rappeler qu’elles
reposent systématiquement sur des dispositions législatives et réglementaires
instituées par l’article L. 421-10 du code de l’éducation et par l’article 6 du
décret n°85-924 du 30 août 1985 modifié relatif aux EPLE : en application
de ces textes, une convention est conclue entre les établissements membres du
groupement, après accord de tous les conseils d’administration.
Par ailleurs, ces dispositifs visent, en particulier pour ce qui concerne
la rémunération des assistants d’éducation et des « contrats aidés », à
constituer des pôles de compétence dans ce domaine, recherchant un triple
objectif de sécurisation des opérations de paye vis-à-vis des salariés et des
organismes sociaux, de rationalisation de l’organisation des EPLE et de
facilitation du suivi des consommations de crédits.
Le même objectif de professionnalisation des agents et d’optimisation
des moyens est poursuivi dans d’autres secteurs que la paye, par exemple par
la création de groupements d’EPLE dédiés à l’achat public.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
577
Les difficultés constatées dans le recouvrement auprès du CNASEA
des sommes servant à rémunérer les contrats aidés appellent les précisions
suivantes :
- S’agissant des dispositifs antérieurs de contrats aidés : Contrats
Emploi Consolidé (CEC) et Contrats Emploi Solidarité (CES)
Avec l’extinction des dispositifs CES et CEC, plusieurs EPLE chargés
de la gestion des contrats aidés ont pu constater d’importantes difficultés
financières liées aux créances détenues sur le CNASEA. Ces constats tardifs
se traduisent par des restes à recouvrer parfois très anciens qui ne facilitent
pas l’organisation des opérations de régularisation par le biais du CNASEA.
Sur ce point, le ministère de l’Education nationale alerte régulièrement les
EPLE sur la nécessité de veiller à formaliser leurs demandes de
régularisation aux antennes locales du CNASEA.
- S’agissant des dispositifs actuels de contrats aidés : Contrats
d’Accompagnement dans l’Emploi (CAE) et Contrats d’Avenir (CAV).
Les articles R.322-16 et R.322-17-9 du code du travail prévoient que
les aides de l’Etat accordées pour financer le coût des rémunérations des
agents recrutés sous CAE et CAV sont versées mensuellement par le
CNASEA pour le compte de l’Etat. Pour les EPLE, ces aides proviennent,
pour l’essentiel, du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Emploi et,
pour la part complémentaire, du ministère de l’Education nationale.
A l’occasion d’un groupe de travail piloté en juin dernier par la
Direction des Affaires Financières (DAF) du ministère avec la participation
du CNASEA et des représentants d’EPLE, il est ressorti que la complexité du
montage budgétaire liée aux circuits de financement des contrats aidés est
une source importante de difficulté pour les EPLE payeurs. Ces derniers
perçoivent en effet
le plus souvent les subventions du CNASEA après avoir
décaissé les paies, ce qui les conduit à gérer et suivre ces versements dans
une tension constante.
Le ministère de l’Education nationale a bien évidemment alerté le
ministère de l’Economie, des finances et de l’Emploi sur ces difficultés. Il a
surtout engagé avec le CNASEA un travail d’amélioration de cette gestion,
notamment au travers de la dématérialisation des avis de versement des
subventions de ce dernier. Expérimentée dans un premier temps sur
l’académie de Paris (été 2007), elle est étendue depuis octobre 2007 aux
académies de Créteil et de Versailles. Un bilan d’étape de cette opération
doit être réalisé par les acteurs des trois académies afin de déterminer, ou
non, la poursuite de l’expérimentation et sa généralisation à l’ensemble des
académies dès 2008.
578
COUR DES COMPTES
Les mutualisations sont donc indispensables et les services du
ministère préconisent dorénavant qu’elles soient limitées au calcul et au
paiement
des
rémunérations,
chaque
EPLE
employeur
assurant
le
recouvrement des subventions auprès du ou des financeurs. Ce dispositif,
d’ores et déjà mis en oeuvre par neuf académies pour les « contrats aidés »,
présente l’intérêt de faciliter le suivi des sommes à recouvrer auprès du
CNASEA et des autres personnes publiques susceptibles de contribuer au
financement de ces contrats (collectivité territoriale de rattachement
notamment, pour les personnels exerçant des fonctions relevant des
compétences transférées : accueil, entretien, restauration, hébergement). Ce
suivi est en effet plus aisé pour les quelques salariés d’un unique
établissement que pour les centaines d’agents dont l’établissement
mutualisateur assure la rémunération. Par ailleurs, le fait que chaque EPLE
employeur ait à assurer lui-même le recouvrement des crédits constitue un
facteur
de
responsabilisation
des
établissements
pour
le
délai
de
transmission des informations à l’EPLE mutualisateur.
S’agissant des fonctions que les EPLE assurent pour le compte de
l’État,
les services du ministère attirent également l’attention sur
l’irrégularité que constitue la gestion par un EPLE de dispositifs relevant de
l’État : les exemples cités par la Cour (gestion de crédits de fonctionnement
du rectorat par un lycée parisien, gestion des crédits de modernisation des
CIO par un lycée de la Vienne, paiement par des comptables des
défraiements dus aux enseignants au titre du baccalauréat dans la région Île-
de-France) ne sont ainsi plus mis en oeuvre.
II – 2. La gestion des ressources humaines
La Cour pointe l’insuffisance de la formation, notamment lors de la
prise de poste, et indique que des mesures récentes améliorent le niveau à
l’entrée en fonction.
Elle souligne l’appui tardif ou insuffisant apporté par les services
rectoraux aux agents comptables, ainsi que les difficultés de sanctionner un
comptable défaillant.
z
La formation aux fonctions comptables
Le ministère de l’éducation nationale, qui partage l’analyse de la
Cour, a été partie prenante à la réforme de la formation assurée par les IRA,
définie par arrêté du 23 août 2007 et mise en oeuvre depuis la rentrée 2007 :
les cinq derniers mois de la scolarité des élèves qui auront choisi l'univers
professionnel de l’administration scolaire et universitaire seront désormais
consacrés à une formation spécifique, qui alternera enseignements et stage.
Les conséquences de cette réforme feront l'objet d'un examen attentif.
S’agissant des
CASU
, d’après la répartition des effectifs par position
administrative et lieux d’exercice des fonctions à la date du 31 décembre
2006, 647 CASU sur un total de 1.616 étaient affectés dans un EPLE.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
579
Le recrutement des CASU, jusqu’en 2007, était effectué par concours
ouvert à des cadres de catégorie A, justifiant au moins de 4 années de service
effectif en catégorie A.
Les CASU stagiaires bénéficient d’une formation statutaire d’une
année, formation alternée, individualisée, et professionnalisante.
Cette
formation
se
déroule
en
alternance
entre
l’académie
d’affectation et l’Ecole Supérieure de l’Education Nationale (ESEN).
L’alternance permet aux stagiaires d’acquérir savoirs et compétences par
une réflexion permanente sur les pratiques professionnelles réellement mises
en oeuvre ou simplement observées.
L’ESEN a mis en place une individualisation des parcours de
formation des stagiaires et un accompagnement tutoral en académie afin de
prendre en compte leurs acquis antérieurs et d’optimiser leur formation. Elle
propose également en fin de formation des approfondissements à la carte
lors de la période d’adaptation à l’emploi.
Un positionnement financier et comptable est réalisé en début de
formation (juillet). En fonction des résultats de ce positionnement et de
l’entretien conseil avec les formateurs comptables, chaque stagiaire est
affecté dans un groupe de niveau financier et comptable :
- groupe A : approfondissements – établissements complexes (GRETA,
services mutualisateurs, enseignement supérieur) ;
- groupe A’ : perfectionnement
- groupe B : initiation (débutants).
Chaque stagiaire se voit attribuer un tuteur dans son académie de
rattachement. Ainsi, un stagiaire affecté dans le groupe de niveau B
(débutants) sera placé auprès d’un CASU gestionnaire comptable d’un EPLE
auprès duquel il pourra suivre dans le détail, lors de 5 périodes en académie,
la vie financière, comptable et managériale de l’EPLE et mettre en pratique
par des activités adaptées les séquences de formation dispensées à l’ESEN.
En fin de formation, les stagiaires expriment leurs besoins de
formation complémentaires en fonction de leur affectation et l’ESEN
organise 15 jours de formation à la carte sur les thématiques proposées
par
les stagiaires (1
ère
quinzaine de juin).
Le dernier stage en académie (mi-juin à mi-juillet) est réalisé dans
l’organisme d’affectation du stagiaire afin de favoriser un échange
d’informations et de pratiques entre le CASU partant et le stagiaire
nouvellement affecté, et d’amorcer la préparation de la rentrée.
580
COUR DES COMPTES
La
formation
statutaire
des
CASU
est
une
formation
professionnalisante. Son objectif est de
permettre à chaque stagiaire à
l’issue de l’année de formation, d’acquérir les compétences qui lui
permettront
d’être
directement
opérationnel
dans
son
organisme
d’affectation.
Les compétences professionnelles à atteindre par les CASU stagiaires
sont réparties selon quatre grands champs professionnels :
- Gestion administrative et financière du service public d’éducation
dont réaliser les opérations budgétaires et comptables d’un établissement
public ;
- Management ;
- Expertise administrative, juridique et financière au service de la
politique éducative ;
- Représentation du service public d’éducation
Les enseignements financiers et comptables représentent 40 % du
volume total de la formation statutaire, soit un total de 131,5 heures par
stagiaire sur l’année de formation.
Par ailleurs, dans les 6 mois qui suivent leur prise de poste, un stage
de « retour de promotion » est proposé aux anciens stagiaires. Il se compose
de contenus transversaux à l’ensemble des métiers exercés et de contenus
métiers organisés sous forme d’ateliers d’échange et d’analyse de pratiques
professionnelles.
z
L’appui apporté aux comptables
Cet appui, apporté tant par les services centraux que par les services
déconcentrés de l’éducation nationale, doit être souligné : ses diverses
modalités sont présentées à l’occasion du séminaire d’une semaine
rassemblant chaque année tous les agents nouvellement nommés sur des
fonctions de comptable en EPLE.
S’agissant des
services centraux,
cet appui revêt plusieurs formes :
L’espace EPLE de l’Intranet de la Direction des Affaires Financières
(DAF) du ministère constitue pour les chefs d’établissement, comptables et
gestionnaires, un ensemble de ressources important. Par exemple, le Codex
des EPLE rassemble sous format électronique les textes législatifs et
réglementaires, ainsi que les circulaires ou instructions d’application relatifs
à la gestion administrative, financière et comptable des EPLE, y compris
dans le domaine des marchés publics. Cet Intranet comporte également une
« foire aux questions » recensant au sein de différentes thématiques les
questions les plus fréquemment posées au réseau de conseil aux EPLE, ainsi
qu’une rubrique d’actualité, permettant tout à la fois d’appeler l’attention
sur les publications, événements ou jurisprudences susceptibles de trouver un
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
581
écho dans les établissements et de poser, sous forme ludique, une « question
de la semaine » qui peut porter sur un point particulier de la réglementation
comptable.
Par ailleurs, la revue « Objectif Établissement », publiée trois fois par
an et diffusée à 12 000 exemplaires, vise à apporter un éclairage sur de
nombreuses thématiques à caractère financier ou comptable. À titre
d’exemples, dans la dernière publication (numéro 28, Été 2007), plusieurs
articles portent sur les contrats d’objectifs conclus par les rectorats avec les
EPLE, la globalisation des crédits et l’expérimentation en matière de
contrôle interne comptable.
En outre, les équipes académiques de conseil aux EPLE sont réunies
chaque année par les services du ministère pour un séminaire de deux
journées permettant de diffuser l’information sur les réformes à caractère
financier ou comptable en cours.
Pour ce qui concerne les
services déconcentrés
, l'attention des
recteurs d'académie a été appelée, par courrier du 3 avril 2006 relatif à
l’exercice de la fonction d’agent comptable en EPLE, sur la nécessité de
prévenir les insuffisances constatées localement en agissant sur plusieurs
leviers :
- renforcement de la formation initiale et continue, en partenariat
avec les services du Trésor public et/ou les chambres régionales des
comptes ;
- action sur les structures comptables : adéquation entre la complexité
du poste et la qualification du comptable, constitution d'équipes adaptées,
tant en nombre qu'en qualification, réexamen périodique de la carte des
groupements comptables ;
- contrôles réguliers : détection d'anomalies dans la comptabilité,
intervention rapide en cas d'absence de transmission du compte financier ;
- mutualisation, grâce à l'Intranet de la DAF précédemment évoqué,
de guides méthodologiques portant sur les aspects administratifs, financiers
et comptables du fonctionnement des EPLE.
Plusieurs rectorats ont fait connaître les mesures entreprises en la
matière. À titre d’exemples, et sans que ceux-ci soient exhaustifs, on peut
évoquer les cas suivants :
L’académie de Lille organise dès la rentrée de septembre une réunion
d’accueil et d’information des comptables nouvellement nommés en EPLE,
qui vise d’une part à leur rappeler leurs responsabilités et, d’autre part, à
présenter les sessions prévues à leur intention dans le plan académique de
formation.
582
COUR DES COMPTES
Ces nouveaux comptables font l’objet d’un tutorat pendant leur
première année d’exercice, délai susceptible d’être prolongé lorsque les
notions essentielles ne sont pas acquises ; les tuteurs informent régulièrement
les services académiques de la progression du nouveau comptable ou des
difficultés rencontrées.
Enfin, l’académie de Lille produit annuellement plusieurs notes
d’information à destination des ordonnateurs, des gestionnaires et des
comptables, qui présentent tout à la fois un caractère informatif sur
l’actualité en matière administrative ou financière et un caractère technique
(exemples d’écritures comptables liées à des opérations particulières :
voyages scolaires, valeurs inactives, taxe d’apprentissage, etc.). Dans
l’objectif de mutualisation précité, ces notes sont publiées dans l’espace
EPLE de l’Intranet de la DAF précédemment évoqué.
Pour sa part, l’académie de Lyon a construit une politique de conseil
fondée sur une grande vigilance à l’égard des actes financiers soumis au
contrôle de l’autorité académique, la mise en oeuvre d’un tutorat pour les
agents débutants et l’organisation régulière de réunions de bassin à
l’intention des gestionnaires et des comptables. Par ailleurs, un emploi de
cadre A du rectorat est dédié à l’assistance sur place, ce qui constitue un
facteur de repérage et de traitement des dysfonctionnements.
D’autres académies ont mis en oeuvre des dispositifs de ce type et la
plupart d’entre elles font état d’un partenariat actif avec les services locaux
du Trésor public ainsi qu’avec les chambres régionales des comptes,
régulièrement invitées à présenter leurs activités lors de réunions de
comptables d’EPLE.
z
La sanction des comptables défaillants
La Direction de l’Encadrement (DE) du ministère de l’éducation
nationale met en oeuvre les mesures administratives appropriées (saisine de
la commission administrative paritaire siégeant en formation disciplinaire ou
mutation
dans
l’intérêt
du
service)
dès
que
sont
avérés
des
dysfonctionnements d’ordre comptable en EPLE.
Le récapitulatif, figurant ci-après, recense les actions menées depuis
2003.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
583
Années
Cas suivis dans
le cadre d’une
procédure
disciplinaire
Sanction disciplinaire
ou mutation dans
l’intérêt du service
Autres modalités
2003
5
1 déplacement d’office
1 mutation dans l’intérêt
du service
1 mise à la retraite pour
invalidité (expertise
pénale : non responsable
de ses actes)
1 suspension
(incarcération)
1 mutation
2004
3
1 exclusion de fonction
2 blâmes
2005
5
2 déplacements d’office
3 exclusions de fonction
2006
1
1 révocation
2007
2 à ce jour *
Conseil de discipline se
tiendra courant
décembre 2007 pour les
deux situations
* 2 autres cas signalés font l’objet d’une attention particulière et pourraient à
court terme relever d’une procédure disciplinaire.
Il convient enfin d’ajouter que, dans le cadre des opérations annuelles
de mutation des CASU, une attention particulière est portée à l’adéquation
poste/personne quant aux nominations sur postes comptables vacants.
II – 3. Le contrôle interne comptable en EPLE
Evoquant brièvement la démarche de contrôle interne comptable en
EPLE, la Cour juge que l’outil d’autodiagnostic comptable ODICÉ présente
une « incontestable qualité technique » mais estime toutefois qu’il « pourra
se montrer efficace si l'effort de formation envisagé est assez soutenu pour
assurer aux agents le niveau comptable requis ainsi que la capacité de mettre
en oeuvre le plan d'action découlant du diagnostic. »
En premier lieu, il convient de souligner que cette démarche est née
d'une initiative académique, lancée par le rectorat de Poitiers, en
concertation avec les services déconcentrés du Trésor public, avec un groupe
de comptables d'EPLE.
L’IGAENR, informée de cette expérience, a souhaité la mettre en
valeur et a préconisé son développement, dans une note publiée en septembre
2006.
584
COUR DES COMPTES
Un groupe de travail piloté par les services ministériels, composé de
chefs d’établissements, de comptables et de responsables académiques de
services de formation et de conseil aux EPLE de six académies, s’est réuni à
plusieurs reprises en 2006- 2007. Ces travaux ont abouti à l’élaboration :
- d’un guide
méthodologique de
l’autodiagnostic
financier
et
comptable ;
- d’un
fichier
automatisé
d’autodiagnostic,
ODICÉ
(Outil
de
Diagnostic Interne Comptable des ÉPLE), permettant d’évaluer un taux de
risque par cycle comptable ;
- d’exemples de plans d’action adaptés visant à maîtriser les risques
identifiés ;
- d’une banque de données rassemblant des fiches de procédures
permettant de rationaliser et sécuriser les pratiques quotidiennes des
personnels des services administratifs et financiers des établissements.
Les communications afférentes à ce dispositif (notamment lettre aux
recteurs en janvier 2007, présentation aux secrétaires généraux d’académie
en juin 2007, plusieurs articles publiés dans la revue Objectif Établissement)
ont incité quatre autres rectorats à s’engager dans la phase de tests, menée
de juin à septembre 2007.
Cette démarche, ainsi que les outils associés, ont donc été conçus par
des comptables d'EPLE pour des comptables d'EPLE et ont été parfaitement
adaptés aux spécificités de ces établissements.
Ces travaux ont d’ailleurs bénéficié de l’appui de la Mission d’Audit,
d’Evaluation et de Contrôle (MAEC) de la direction générale de la
comptabilité publique, qui a exposé la stratégie d’audit du Trésor public vis-
à-vis des EPLE lors du dernier séminaire des équipes académiques de
conseil aux EPLE, le 17 octobre 2007, a incité les trésoreries générales à
s’associer au futur déploiement de la démarche et a contribué à la rédaction
des prochains Cahiers détachables de la revue Objectif Établissement, qui
seront exclusivement consacrés au contrôle interne comptable en EPLE.
Comme annoncé lors de ce récent séminaire, les recteurs d’académie
ont été invités, par courrier du 6 novembre, à désigner des comptables
susceptibles de s’engager dans cette démarche et à participer aux sessions
inter- académiques de formation de formateurs au contrôle interne
comptable en EPLE, début décembre 2007.
Le schéma suivant a été préconisé pour un redéploiement courant
2008 :
- réunions de sensibilisation des chefs d’établissements et des
gestionnaires, organisées selon les académies par département ou par bassin
de formation, avec le concours des secrétaires généraux d’académie et/ou
des inspections académiques ainsi que des services du Trésor public ;
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
585
- formation des comptables, auxquels il appartiendra de piloter la
mise en oeuvre du contrôle interne comptable au sein de l'agence dont ils
assurent la responsabilité.
Un bilan, en termes de nombre de personnes sensibilisées ou formées
au contrôle interne comptable en EPLE et de nombre d’établissements
engagés dans une démarche de contrôle interne comptable, sera effectué à
l’automne 2008.
Enfin, au-delà du contrôle interne comptable, qui devra à terme être
mis en oeuvre dans tous les établissements, l'outil ODICÉ constitue un
support tout à fait approprié de formation des agents chargés de la gestion
financière et comptable des EPLE : cet aspect sera fortement souligné à
l'occasion des prochaines sessions inter- académiques de formation de
formateurs.
Ce calendrier volontariste, de même que le grand intérêt suscité par
ces travaux, manifesté notamment lors des réunions de comptables sur ce
thème organisées par plusieurs académies sous l’égide des services du
ministère, sont la preuve d’une prise de conscience des défaillances
soulignées par la Cour et d’une forte volonté d'y remédier.
II – 4. La présentation budgétaire et comptable
La Cour estime que la présentation budgétaire et comptable des EPLE
est ancienne et pour partie obsolète, à la fois incomplète (un EPLE ne
retrace dans son budget qu’une part limitée de son activité) et inutilement
complexe (25 chapitres
fonctionnels),
et n’aurait pas évolué vers
l’application des principes du plan comptable général (p.9). Elle note que le
ministère a entrepris sa refonte depuis février 2005 (p. 10).
Si la nomenclature budgétaire des EPLE est spécifique,
leur
nomenclature comptable est aussi proche que possible du Plan Comptable
Général (PCG),
les modifications apportées chaque année pour tenir compte
de l’évolution de l’activité des établissements étant toujours fondées sur les
comptes du PCG.
Ainsi, par courrier du 22 octobre dernier, les recteurs d’académie ont
été informés des adaptations de la nomenclature comptable des EPLE pour
2008, étudiées en concertation avec la direction générale de la comptabilité
publique, qui sont liées notamment à la décentralisation, à la fermeture des
comptes chèques postaux détenus par les EPLE ou à la réforme des comptes
de dépôt de fonds au Trésor. À l’occasion de ces adaptations, certains
intitulés de comptes ont été mis en conformité avec le PCG.
Par ailleurs, comme l’indique la Cour, les services de l’éducation
nationale ont engagé
une refonte totale des principes et des textes régissant
l’organisation
économique
et
financière
des
EPLE
(circulaire
interministérielle n°88-079 du 28 mars 1988 et son annexe technique), afin
que chacun des acteurs de l'exécution financière des 8 000 EPLE, de même
586
COUR DES COMPTES
que les divers corps de contrôle, puissent disposer d’un corpus complet,
cohérent et actualisé.
Ce travail de longue haleine, auquel est associée une adaptation
concomitante des outils informatiques, condition de la réussite de cette
réforme, ne peut à l’évidence être achevé dans de brefs délais, même si des
réformes sont progressivement mises en oeuvre, telles que la globalisation des
crédits, évoquée ci-dessus.
Par lettre du 22 octobre 2007 précitée, des préconisations relatives à
la gestion de dotations globalisées ont été apportées, le cadre budgétaire
actuellement en vigueur dans les EPLE ne faisant pas obstacle à la mise en
oeuvre de certains des principes induits par la LOLF, en particulier
l’allocation de moyens globalisés, la définition d’objectifs et d’indicateurs de
performance et la mesure des résultats obtenus.
La réforme engagée vise notamment, comme la Cour le préconise, à
réduire le nombre de chapitres et de services spéciaux : les budgets seront
construits à partir de trois chapitres principaux :
- ‘Administration et logistique’, principalement financé par la
collectivité de rattachement d’une part ;
- ‘Enseignement public du second degré’ et ‘Vie de l’élève’, calqués
sur les programmes de la mission Enseignement scolaire au titre desquels les
EPLE reçoivent les dotations de l’État, d’autre part.
En
outre,
le
montant
des
charges
de
rémunération,
voire
d’investissement, supportées directement par l’État et par la collectivité de
rattachement, fera l’objet d’un document annexe au budget qui récapitulera
ainsi l’ensemble des moyens mis à disposition de l’établissement.
Le ministère sera, en tout état de cause attentif, comme le
recommande la Cour, à ce que cette réforme soit un facteur de simplification
pour les établissements.
III – Les recommandations formulées par la Cour en vue d’améliorer le
système
III – 1. La carte comptable : nombre et taille des agences comptables en
EPLE
La Cour note que le ministère a accompli des efforts en matière de
refonte de la carte comptable mais observe que la réduction du nombre
d’agences comptables, qu’elle avait préconisée, s’est ralentie depuis 2000
Une enquête menée à la rentrée 2007 montre une nette diminution du
nombre de postes comptables en EPLE : on compte 2.558 agences
comptables en 2007-2008 contre 2.923 en 2000-2001, soit une diminution de
plus de 12% sur
la période. Une agence comptable regroupe aujourd’hui en
moyenne 3,1 établissements.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
587
Par
ailleurs,
il
ne
subsiste
plus
que
238
postes
« mono-
établissement », localisés essentiellement dans certaines académies, en
particulier Créteil (73), Lille (58), Bordeaux (18), Toulouse (15) et
Versailles.
III – 2. Une séparation fonctionnelle des ordonnateurs et des comptables
La Cour recommande « une séparation fonctionnelle de l’ordonnateur
et du comptable », avec la création d’agences comptables desservant un
nombre plus important d’établissements.
La constitution de groupements comptables beaucoup plus importants
qu’aujourd’hui (les agences comptables regroupent actuellement un
maximum de 9 EPLE) est étudiée par plusieurs académies dans l’objectif de
professionnaliser la fonction comptable et d’en accroître l’efficacité.
Ce choix permettra de constituer des pôles comptables, de former de
véritables techniciens de la comptabilité et, comme le préconise la Cour des
Comptes, de contribuer à l’objectif de séparation fonctionnelle de
l’ordonnateur et du comptable.
Parallèlement, est à l’étude une modification des modalités du calcul
de l’indemnité de caisse et de responsabilité, dont la réglementation actuelle
limite
l’attractivité
des
groupements
composés
de
plus
de
trois
établissements.
III – 3. La publication d’une nouvelle instruction comptable
La Cour préconise la « simplification de la présentation comptable
organisée par une véritable instruction comptable, son harmonisation avec la
LOLF et un contenu plus exhaustif débouchant sur des indicateurs de
performance ».
Outre les éléments apportés ci-dessus sur la refonte des principes et
des textes régissant l’organisation économique et financière des EPLE (II –
4), il est nécessaire de souligner que la modification du cadre budgétaire ne
constitue pas un préalable à la mise en oeuvre
d’indicateurs de performance
.
La mesure de la performance d’un établissement d’enseignement,
principalement
axée sur l’action éducative, doit aussi incorporer des
éléments de pilotage financier. Le ministère s’est engagé dans cette
démarche avec le fichier autorisé d’auto- diagnostic qui permet d’identifier
les risques associés à chaque cycle comptable (voir supra
II – 3. Le contrôle
interne comptable en EPLE).
******
588
COUR DES COMPTES
Il ressort de l’ensemble de ces développements que le ministère de
l’éducation nationale est tout à fait conscient de certaines insuffisances et de
défaillances regrettables, qui constituent toutefois des cas d’espèce dont on
ne peut extrapoler des conclusions trop générales.
Les démarches conduites par le ministère vis-à-vis du réseau des
comptables d’EPLE vont d’ailleurs dans le sens des préconisations de la
Cour.
L’adhésion des personnels impliqués dans ces dispositifs, tant au sein
des établissements que dans les équipes académiques de conseil, voire
l’anticipation dont certains d’entre eux ont fait preuve pour moderniser et
rationaliser les procédures, sont incontestablement des éléments positifs pour
développer la qualité comptable dans les établissements publics locaux
d’enseignement.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION DU
CENTRE NATIONAL POUR L’AMÉNAGEMENT DES STRUCTURES
DES EXPLOITATIONS AGRICOLES (CNASEA)
Avant d’aborder de façon plus précise le passage qui vise le CNASEA,
je
souhaiterais
vous
apporter
quelques
éléments
d’information
complémentaire
sur
le
cadre
juridique
et
financier
dans
lequel
l’établissement intervient dans la gestion des contrats aidés.
1 - Les conditions d’intervention du CNASEA
Le CNASEA, établissement public national sous double tutelle du
ministère de l’Agriculture et de la Pêche, et celui de l’Economie, des
Finances et de l’Emploi, est chargé de payer pour le compte de l’Etat
plusieurs mesures d’aide à l’emploi, dont les plus récentes relèvent du Plan
de cohésion sociale (contrats d’accompagnement dans l’emploi et contrat
d’avenir pour le secteur non marchand).
Les règles de versement des aides sont fixées par décret et leurs
modalités d’exécution sont précisées par convention de gestion entre le
CNASEA et chaque ministère financeur, à savoir le ministère chargé de
l’Emploi et celui de l’Education nationale pour le sujet considéré ici.
DÉFAILLANCES ET INSUFFISANCES DANS LA FONCTION
COMPTABLE DES EPLE
589
La convention de gestion conclue avec le ministère de l’Education
nationale
est
renouvelable
annuellement
et
couvre
l’ensemble
des
contributions gérées pour son compte : les contrats emploi-solidarité (CSE),
les contrats emploi-consolidé (CEC), les contrats d’accompagnement dans
l’emploi (CAE) et les contrats d’avenir (CA).
Qu’il s’agisse des anciennes mesures (CES, CEC) ou des nouvelles
(CAE, CA), l’aide est versée par le CNASEA chaque mois, pour sa totalité
(part Emploi et part Education nationale), à compter de la réception de la
convention conclue avec l’employeur et de la décision de prise en charge
complémentaire prise par l’autorité académique compétente.
Les employeurs sont tenus de justifier régulièrement le versement de
l’aide en adressant au CNASEA un état de présence trimestriel des salariés
sous contrat subventionné.
Le CNASEA verse la totalité des contributions soit à l’agent
comptable de l’établissement employeur soit à l’agent comptable de
l’établissement mutualisateur en fonction de l’option que ceux-ci ont retenue
localement.
2 - Réponse aux observations concernant le CNASEA
L’extrait porté à ma connaissance évoque un dispositif toujours
défaillant, avec en particulier des difficultés constatées dans le recouvrement
auprès du CNASEA de toutes les sommes avancées aux établissements
employeurs.
Ce constat appelle de ma part la réponse suivante :
Quel que soit le mode de gestion choisi par les comptables des
établissements concernés (mutualisateur et employeur), le CNASEA envoie
systématiquement et chaque mois à l’établissement gestionnaire un avis de
paiement détaillant pour chaque salarié : le montant payé avec la part de
chaque financeur, le ou les mois d’effets correspondants, le type de
versement (acompte ou régularisation).
De même, il revient à l’établissement gestionnaire de compléter et
renvoyer au CNASEA l’état de présence trimestriel permettant de vérifier la
présence du salarié.
Le cas échéant, les sommes indûment versées à l’employeur sont
récupérées sur les paiements des mois suivants. En outre, l’absence de renvoi
des états de présence provoque, après u rappel, la suspension des paiements.
Ces différents mécanismes qui s’appliquent à l’ensemble des
employeurs de contrats aidés visent à sécuriser la gestion des mesures. Ils
peuvent apparaître lourds à certains agents comptables d’établissements
mutualisateurs chargés de suivre chaque mois plusieurs dizaines voire
centaines de contrats répartis dans de multiples établissements.
590
COUR DES COMPTES
Il conviendrait probablement afin de simplifier le suivi des contrats
que chaque établissement mutualisateur n’ait pas en charge un nombre trop
important de contrats mais ce choix relève évidemment de la seule décision
du ministère de l’Education nationale.
Le CNASEA d’efforce au niveau local comme au niveau national de
faciliter le travail des mutualisateurs, en recensant les situations posant
problème et en aidant les agents comptables à reconstituer l’historique des
dossiers à régulariser ce qui représente une charge importante pour
l’établissement.
Afin d’améliorer la transmission d’information, le ministère de
l’Education nationale et le CNASEA ont conçu une procédure de restitution
électronique des données de paiement concernant des établissements
d’enseignement. Celle-ci est expérimentée en Ile-de-France au cours du
dernier trimestre de l’année 2007.
De même, le CNASEA a proposé au ministère de l’Education
nationale de dissocier le remboursement du salaire brut, cofinancé par
l’Emploi et l’Education nationale, du paiement des autres frais à la charge
de l’employeur (FNAL, transport etc.) financé uniquement par le ministère de
l’Education nationale.
Dans cette hypothèse, les frais annexes supportés par les EPLE
seraient remboursés par le CNASEA sur factures attestées et transmises par
les
comptables
des
établissements
gestionnaires.
Les
demandes
de
remboursement seraient donc parfaitement en phase avec les frais
enregistrés par les comptables.
Ainsi, le CNASEA est naturellement disposé à examiner toute
amélioration du dispositif, qu’il s’agisse des règles ou des circuits de
gestion.