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SEPTIÈME CHAMBRE
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Deuxième section
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Arrêt n° S-2022-2021
Audience publique du 10 novembre 2022
Prononcé du 2 décembre 2022
UNIVERSITÉ D’ORLÉANS
Exercice 2016
Rapport n° R-2022-0913-1
République française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2022-26 du 10 mai 2022, par lequel la Procureure générale
près la Cour des comptes a saisi la Cour d’une charge unique soulevée à l’encontre
de
Mme X,
agent
comptable
de
l’université
d’Orléans,
au titre de l’exercice 2016, notifié à l’intéressée le 23 mai 2022 ;
Vu
les
comptes
rendus
en
qualité
de
comptable
de
l’université
d’Orléans,
par Mme X, du 1
er
janvier au 31 décembre 2016 ;
Vu les justifications produites au soutien du compte en jugement ;
Vu le code de l’éducation, notamment l’article R. 719-89 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État,
les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu les lois et règlements applicables à l’université d’Orléans, qui a le statut d’établissement
public à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI
de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié, dans sa rédaction issue de l’article 90
de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu l’instruction codificatrice M93 spécifique aux EPSCP, applicable à l’exercice 2016 ;
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Vu l’instruction du 12 février 2014 de la direction générale des finances publiques (DGFiP)
ayant pour objet «
comptabilisation des changements de méthodes comptables, changements
d’estimations comptables et corrections d’erreurs
», publiée au bulletin officiel des finances
publiques du 25 février 2014 ;
Vu le recueil des normes comptables pour les établissements publics, dans sa version
en vigueur au moment des faits ;
Vu le rapport n° R-2022-0913-1 à fin d’arrêt de M. Jacques BASSET, conseiller maître,
magistrat chargé de l’instruction ;
Vu les conclusions n° 559 du Procureur général du 8 novembre 2022 ;
Vu les pièces du dossier ;
Entendu lors de l’audience publique du 10 novembre 2022, M. BASSET, conseiller maître,
en son rapport, M. Benoit GUÉRIN, avocat général, en les conclusions du ministère public,
M. Y,
président
de
l’université
d’Orléans,
ordonnateur,
Mme X, comptable présente ayant eu la parole en dernier ;
Entendu
en
délibéré
M.
Paul
de
PUYLAROQUE,
conseiller
maître,
réviseur,
en ses observations ;
Sur
la
charge
unique,
soulevée
à
l’encontre
de
Mme X,
au titre de l’exercice 2016
1. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, la Procureure générale a saisi la Cour
des
comptes
de
la
responsabilité
encourue,
au
titre
de
l’exercice 2016,
par
Mme X
à
raison
de
l’insuffisance
de
diligences
en
vue
du recouvrement de cinq créances d’un montant total de 140 408,63 €, et aussi de l’écriture,
passée le 15 septembre 2016 pour leur apurement au compte 119 « report à nouveau »,
en contradiction avec les textes réglementaires qui prévoient, pour les créances devenues
irrécouvrables, la procédure d’admission en non-valeur ; qu’en outre aucune délibération
n’aurait été produite à l’appui de cette écriture, qui a eu pour effet de compromettre
définitivement le recouvrement des créances, alors qu’elles n’auraient été ni prescrites,
ni irrécouvrables ;
Sur les éléments apportés à décharge par la comptable
2. Attendu que la comptable rappelle tout d’abord qu’elle a été en fonctions à l’université
d’Orléans de début septembre 2013 à fin novembre 2017, et qu’avant le passage
aux responsabilités et compétences élargies à compter du 1
er
janvier 2016, peu d’attention
était portée à la qualité comptable ;
3. Attendu qu’elle rappelle ensuite que les conventions de recherche, qui en remplissaient
pourtant les conditions, ne faisaient pas l’objet d’une comptabilisation selon le principe
des ressources affectées, consistant à suivre leur exécution en comptes de tiers et à n’émettre
les titres de recettes qu’à hauteur des dépenses réalisées ; qu’elle précise, qu’au contraire,
la pratique en vigueur à l’université jusqu’à fin 2015 était l’émission d’un titre de recettes
pour la totalité du montant de la convention de la recherche, dès la conclusion de celle-ci,
et la prise en charge du titre par l’agent comptable, sans toutefois que celui-ci soit envoyé
au financeur en vue de son recouvrement ; qu’elle ajoute que tel avait été le cas
pour les conventions et les titres correspondant aux cinq créances visées par le réquisitoire,
d’où l’obligation de rectifier le montant du titre lorsque qu’il s’avérait qu’il n’était finalement pas
dû dans son intégralité ;
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4. Attendu qu’elle rappelle, par ailleurs, que les conventions de recherche étaient gérées
par le service de l’université, dénommé SURéo, chargé notamment de la valorisation
de la recherche, qui émettait les factures au fur et à mesure de l’exécution
de chaque convention de recherche et les envoyait au(x) financeur(s) concerné(s),
mais sans les transmettre à l’agence comptable ;
5. Attendu que la comptable précise ensuite, pour chacune des cinq créances incriminées,
la convention et le titre de recettes correspondants, ainsi que les circonstances l’ayant
amenée, à la demande de SURéo, à procéder à l’apurement du solde qui n’était pas dû,
car résultant d’un titrage trop élevé ; qu’elle produit les conventions correspondantes,
déjà versées au dossier, ainsi que des pièces nouvelles (états et tableaux justificatifs,
attestations
et
courriers
avec
les
financeurs) ;
qu’en
revanche,
elle
se
déclare
dans l’impossibilité de produire des pièces attestant des demandes de l’ordonnateur
d’apurement des créances, ces demandes étant formulées oralement lors des réunions
semestrielles, qu’elle avait instaurées avec le SURéo pour mieux suivre les conventions
de recherche ; qu’elle produit l’attestation sur l’honneur de son ex-adjointe sur l’existence
de ces réunions et la copie de ses agendas personnels, sur lesquels figurent les réunions
semestrielles avec SURéo ;
6. Attendu que, s’agissant de l’écriture incriminée d’apurement passée au compte de report
à nouveau, la comptable fait valoir que cette procédure comptable est celle prescrite
par le recueil des normes comptables pour les établissements publics susvisé, applicable
notamment à tous les EPSCP, et par l’instruction du 12 février 2014 de la DGFiP susvisée ;
qu’elle fait aussi valoir que l’écriture, qui avait reçu l’aval des commissaires aux comptes,
n’a pas eu d’impact sur le résultat de l’exercice, étant donné qu’une provision pour dépréciation
des créances avait été constituée antérieurement ;
Sur les éléments apportés à décharge par l’ordonnateur
7. Attendu que l’ordonnateur fait valoir que l’exercice 2016 visé par le réquisitoire a été,
pour l’université, une année particulière marquée par le départ de son président en mars,
un intérim avant l’élection de son successeur en juin, et un audit de l’Inspection générale
de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), déclenché
par une situation financière précaire ; qu’il fait état, par ailleurs, des efforts entrepris
depuis son élection en février 2021 pour passer de la tradition orale à l’écrit,
afin de documenter les décisions prises ; qu’il indique enfin que SURéo n’existe plus ;
Sur le droit applicable en matière de responsabilité des comptables publics
8. Attendu qu’en application du I de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
les
comptables
publics
sont
personnellement
et
pécuniairement
responsables
du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses, […], du maniement des fonds
et des mouvements de comptes de disponibilités, de la conservation des pièces justificatives
des opérations et documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste
comptable qu’ils dirigent
» ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve
engagée «
dès lors qu’un déficit ou un manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté,
qu’une recette n’a pas été recouvrée, qu’une dépense a été irrégulièrement payée
» ;
9. Attendu qu’aux termes du III de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963,
la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics «
ne peut être mise en jeu
à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge
sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable
entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après
» ;
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10. Attendu qu’aux termes de l’article 17 du décret du 7 novembre 2012 susvisé,
«
Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des actes
et contrôles qui leur incombent en application des dispositions des articles 18, 19 et 20,
dans les conditions fixées par l’article 60 de la loi du 23 février 1963
» ;
11. Attendu qu’aux termes de l’article 18 du même décret, «
Dans le poste comptable
qu’il dirige, le comptable public est seul chargé : [...] 4° De la prise en charge des ordres
de recouvrer [...] qui lui sont remis par les ordonnateurs ; 5° Du recouvrement des ordres
de recouvrer et des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre
exécutoire ; 6° De l’encaissement des droits au comptant et des recettes liées à l’exécution
des ordres de recouvrer
» ; qu’aux termes de l’article 19 du même texte, «
Le comptable public
est tenu d’exercer le contrôle : 1° S’agissant des ordres de recouvrer : a) De la régularité
de l’autorisation de percevoir la recette ; b) Dans la limite des éléments dont il dispose,
de la mise en recouvrement des créances et de la régularité des réductions et des annulations
des ordres de recouvrer
» ;
Sur le droit applicable en matière de prescription des créances
12. Attendu qu’aux termes de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, sont prescrites au profit
de l’État, des régions, des départements, des communes et des établissements publics dotés
d’un comptable public «
toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans
à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits
ont été acquis
» ; que l’article 2 de la même loi précise que «
La prescription est interrompue
par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier
à l’autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur,
à l’existence, au montant ou au paiement de la créance […] / Toute émission de moyen
de règlement, même si ce règlement ne couvre qu’une partie de la créance ou si le créancier
n’a pas été exactement désigné
» ;
Sur le droit applicable en matière d’admission en non-valeur
13. Attendu qu’aux termes de l’article 193 du décret du 7 novembre 2012 susvisé,
«
Sur délibération de l’organe délibérant prise après avis de l’agent comptable, les créances
de l’organisme peuvent faire l’objet : […] 3° D’une admission en non-valeur, lorsque la créance
est irrécouvrable
; […] Dans la limite d’un seuil fixé par l’organe délibérant, celui-ci peut
déléguer à l’ordonnateur son pouvoir de décision
» ;
14. Attendu qu’aux termes de l’article R. 719-89 du code de l’éducation applicable à tous
les EPSCP, «
Les remises gracieuses et les admissions en non-valeur des créances
de l’établissement sont décidées par le président ou le directeur de l’établissement
sur proposition du conseil d’administration et, pour les fondations universitaires, du conseil
de gestion de la fondation, après avis de l’agent comptable principal
» ;
Sur les faits
15. Attendu qu’en exécution de conventions de recherche conclues entre l’université d’Orléans
et diverses entités publiques, les quatre titres de recettes et la facture, récapitulés
dans le tableau suivant, ont été émis en 2009 ou 2010 par ladite université ;
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Titre ou facture
Débiteur
Montant
initial
Dernier
paiement
Reste à
recouvrer
N° 463 du 7 oct.
2009
Conseil général du Loiret
48 000 €
17/05/2013
16 000 €
N° 487 du 29 oct.
2009
Direction régionale de l’industrie,
de la recherche et de
l’environnement (DRIRE) du Centre
200 000 €
28/10/2015
57 668,55 €
N° 503 du 6 nov.
2009
Centre national de la recherche
scientifique (CNRS)
223 184 €
28/05/2013
22 318,40 €
N° 560 du 8 janv.
2010 pour 2009
Institut national de la recherche
agronomique (INRA)
85 600 €
25/04/2014
22 124,84 €
N° 200000455 du
31 déc. 2010
Direction régionale à la recherche
et à la technologie (DRRT) du
Centre
800 000 €
25/05/2016
22 206,84 €
Total
140 318,63
Sur la créance correspondant au titre n° 463 de 2009
16. Attendu que l’université d’Orléans a conclu le 1
er
octobre 2008 une convention
avec le département du Loiret, qui s’est engagé à financer, sur une durée maximale
de trois ans, une bourse d’études de 3
ème
cycle au profit d’un étudiant, à hauteur de 16 000 €
par an sur présentation de deux factures annuelles ; que les versements étaient conditionnés
à la non-démission du doctorant et à la soutenance de sa thèse ; que celle-ci était cofinancée
par une société privée à hauteur de 39 000 € ; qu’un titre de recettes (n° 462) a été émis
pour ce montant à l’encontre de la société, qui l’a réglé en totalité ; qu’un second titre (n° 463)
a été émis le 7 octobre 2009 à l’encontre du conseil général du Loiret pour un montant
de 48 000 €, correspondant à trois années de subventions ; que quatre factures, de 8 000 €
chacune, ont été émises en 2009 et 2010 et acquittées par le conseil général du Loiret ;
qu’aucune autre facture n’a été émise à l’encontre du conseil général du Loiret
pour la troisième année de la convention ;
17. Attendu que selon le récapitulatif versé au dossier, les dépenses salariales du doctorant,
qui
a
soutenu
sa
thèse
le
6 décembre 2012,
se
sont
élevées
à
58 840,21 € ;
que ce récapitulatif a été considéré comme justifiant les dépenses de l’ensemble
des deux titres de recettes émis à l’encontre de la société privée et du conseil général du Loiret
pour un montant total de 87 000 € ; qu’en conséquence, le trop-titré global a donc été arrêté
à 28 159,79 € ; que selon la comptable, il lui a été demandé, lors d’une réunion avec SURéo,
de réduire le titre n° 463 de 16 000 €, ce qu’elle a fait le 15 septembre 2016 via le compte
de report à nouveau ; que la différence de 12 159,79 € n’a pas remboursée au confinanceur
privé ;
Sur la créance correspondant au titre n° 487 de 2009
18. Attendu que l’université d’Orléans a conclu le 7 janvier 2009 une convention avec l’État,
représenté par le préfet de la région Centre, correspondant unique de la DRIRE,
pour la réalisation d’une opération de recherche financée par une aide de 200 000 €
au maximum du Fonds européen de développement régional (FEDER), son «
montant définitif
devant être calculé en fonctions des dépenses effectivement réalisées et justifiées
»
selon la convention ; que le titre n° 487 a été émis le 29 octobre 2009 pour un montant
de 200 000 € ; qu’un montant de 142 331,45 € a été recouvré ;
19. Attendu que par un certificat administratif du 7 décembre 2015, la responsable du pôle
financier de la direction « recherche et partenariat » de l’université a demandé à l’agent
comptable de réduire le titre n° 487 à hauteur de 57 668,55 € correspondant au solde
non payé, ce qu’elle a fait le 15 septembre 2016 via le compte de report à nouveau ;
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Sur la créance correspondant au titre n° 503 de 2009
20. Attendu qu’une aide de 223 184 € a été accordée, par l’unité de support de l’Agence
nationale de la recherche au CNRS (USAR-CNRS), à l’université d’Orléans par décision
attributive du 13 octobre 2009 ; que le titre n° 503 a été émis le 6 novembre à l’encontre
du CNRS pour ce montant ; qu’il a fait l’objet d’un recouvrement partiel à hauteur
de 200 865,60 € ; que le solde de 22 318,40 € ne devait être versé, entre autres conditions,
que si le relevé justificatif final des dépenses était produit dans les deux mois de l’achèvement
du projet, soit le 30 novembre 2013 ; que ce relevé n’a été signé par la comptable
que le 9 décembre 2013 au motif, selon elle, que SURéo le lui aurait transmis avec retard ;
21. Attendu que si, selon la comptable, la transmission hors délai du relevé aurait motivé
le non-versement du solde, aucune pièce n’atteste d’un refus de l’USAR-CNRS d’un refus
de paiement ; que, selon la comptable, il lui a été demandé, lors d’une réunion avec SURéo,
d’apurer le titre n° 503, ce qu’elle a fait le 15 septembre 2016 via le compte de report
à nouveau ;
Sur la créance correspondant au titre n° 560 de 2009
22. Attendu qu’une convention a été conclue le 20 mars 2009 entre les universités d’Orléans
et de Tours, l’INRA et le conseil régional du Centre pour un projet de recherche ; que le titre
de recettes n° 560 a été émis le 8 janvier 2010, au titre de l’exercice 2019, à l’encontre
de l’INRA pour la totalité du montant devant revenir à l’université d’Orléans, soit 85 600 € ;
qu’un acompte de 70 %, soit 59 920 €, a été versé au démarrage du projet ; que le versement
du solde de 30 % devait intervenir après la remise du rapport et de l’état des dépenses signé
par l’agent comptable ; que le rapport a été transmis le 12 décembre 2012 avec un état
des dépenses s’établissant à 108 267,41 €, soit un montant supérieur à celui de la convention ;
23. Attendu que l’INRA n’a versé qu’un montant de 3 555,16 € le 25 avril 2014,
ce qui a laissé un solde non recouvré de 22 124,84 € et non pas 22 214,84 € comme indiqué
au réquisitoire ;que selon la comptable, SURéo a considéré qu’il s’agissait d’un versement
pour solde de tout compte, après rejet de dépenses non éligibles et lui a demandé,
lors d’une réunion de suivi, d’apurer le titre n° 560, ce qu’elle a fait le 15 septembre 2016
via le compte de report à nouveau ;
Sur la créance correspondant à la facture de 2010
24. Attendu que l’université d’Orléans a conclu le 31 décembre 2010 une convention
avec l’État, représenté par le préfet de la région Centre, correspondant unique de la DRRT,
pour un projet de recherche en nanosynthèse financé par une aide de 800 000 € au maximum
du FEDER, son «
montant définitif devant être calculé en fonctions des dépenses
effectivement
réalisées
et
justifiées
» ;
qu’après
le
versement
de
trois
acomptes
en
décembre 2010,
septembre 2011
et
décembre 2012,
le
versement
du
solde
devait intervenir après l’examen des justificatifs ; que la facture n° 200000455 a été émise
le 31 décembre 2010 à l’encontre de la DRRT pour la totalité du montant prévisionnel ;
25. Attendu que les premiers justificatifs transmis faisaient apparaître une sous-consommation
des crédits, à la suite d’une erreur de saisie par un agent de SURéo, conduisant
à une réduction de créances de 66 467,04 € ; que par un courrier du 9 avril 2015,
la responsable du pôle financier de la direction « recherche et partenariat » de l’université
a adressé de nouveaux justificatifs à la DRRT ; que par courrier du 7 mars 2016, le préfet
a annoncé la mise en paiement d’un solde complémentaire de 44 260,20 €, effectivement
versé le 25 mai 2016, ce qui a réduit le solde non recouvré à 22 206,84 € ; que la comptable
a procédé à l’apurement de celui-ci le 15 septembre 2016 via le compte de report à nouveau ;
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Sur l’existence d’un manquement
26. Attendu que le réquisitoire soulève deux griefs à l’encontre de la comptable
tenant à la procédure comptable utilisée pour l’apurement des cinq créances via le compte
de report à nouveau et en l’absence d’une admission en non-valeur et d’une délibération
l’ayant autorisée, pour l’un, et à l’insuffisance de diligences effectuées en vue du recouvrement
de ces créances, pour l’autre ;
Sur l’existence d’un manquement au titre du premier grief
27. Attendu que la procédure d’admission en non-valeur, telle qu’elle est prévue
par les dispositions de l’article 193 du décret du 7 novembre 2012 et de l’article R. 719-89
du code de l’éducation, rappelées aux points 13 et 14, est réservée aux créances
irrécouvrables ; que tel n’était pas le cas des restes à recouvrer sur les quatre titres de recettes
et la facture visés par le réquisitoire ; que, dès lors, l’absence d’une admission en non-valeur
et d’une délibération l’ayant autorisée ne peut être reprochée à la comptable ;
28. Attendu, par ailleurs, que le recours au compte de report à nouveau pour apurer les soldes
des cinq créances est bien prévu par l’instruction du 12 février 2014 de la DGFiP et le recueil
des normes comptables pour les établissements publics précités, notamment pour le cas
où la décision d’apurement intervient après l’arrêté de l’exercice au cours duquel la créance
a été comptabilisée, ainsi que le rappelle le paragraphe 2.2 de la norme 9 ;
29. Attendu que sauf pour le titre n° 487 de 2009 à l’encontre de la DRIRE du Centre,
la comptable ne disposait pas, lorsqu’elle a passé l’écriture d’apurement des soldes,
d’une décision de l’ordonnateur lui demandant de procéder aux réductions de recettes
correspondantes ; que, cependant, le défaut de contrôle de la régularité des réductions
des titres de recettes n’a pas été soulevé par le réquisitoire ;
30. Attendu qu’il résulte de l’analyse qui précède qu’il n’y a pas lieu de mettre en jeu
la responsabilité de la comptable au titre du premier grief du réquisitoire ;
Sur l’existence d’un manquement au titre du second grief
31. Attendu que s’agissant du grief tenant à l’insuffisance des diligences pour le recouvrement
des créances avant leur apurement via le compte de report à nouveau le 15 septembre 2016,
la comptable ne produit aucune pièce attestant de diligences ; qu’elle n’en revendique
d’ailleurs aucune, son argumentation étant que les soldes résultaient d’un titrage initial trop
important ;
32. Attendu qu’il n’a pas pu être démontré, sauf pour le titre n° 487 de 2009 émis à l’encontre
de la DRIRE du Centre, que la demande de réduction de recettes émanait de l’ordonnateur
ou de ses services ; que la comptable se réfère pour tous les autres titres à des demandes
orales de SURéo, lors des réunions semestrielles de suivi des conventions de recherche ;
33. Attendu qu’il n’existe pas davantage de documents prouvant que le financeur aurait rejeté
une partie des justificatifs produits par l’université pour refuser le paiement du solde des titres,
à l’exception de la facture n° 200000455 émise à l’encontre de la DRRT du Centre,
pour laquelle il résulte de courriers échangés entre l’université d’Orléans et le préfet
de la région Centre que le paiement d’un montant complémentaire de 44 260,20 €, réduisant
le besoin d’apurement du titre initial à 22 206,84 €, au lieu de 66 467,04 €, a été accordé
par le représentant de l’État, pour solde de tout compte ;
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34. Attendu que pour le titre n° 463 de 2009 à l’encontre du conseil général du Loiret,
la comptable a pu démontrer que l’apurement du solde de 16 000 € était justifié par l’absence
de facturation par SURéo pour la troisième année de la convention, l’université d’Orléans
ayant plus que couvert ses charges d’un total de 58 840,21 € grâce au versement de 32 000 €
par le département du Loiret au titre des deux premières années, et à celui de 39 000 €
par le cofinanceur privé ;
35. Attendu que la comptable n’a pas manqué à ses obligations en matière de recouvrement
en procédant à l’apurement des titres n° 463 et n° 487 de 2009 et de la facture n° 200000455
de 2010 et à leur retrait de l’état des restes à recouvrer par les écritures passées au compte
de report à nouveau, dès lors que les soldes ne correspondaient pas à des recettes dues
à l’université ;
36. Attendu qu’en revanche le solde de 22 318,40 € du titre n° 503, émis en 2009 à l’encontre
du CNRS, qui n’a jamais fait l’objet de diligences de la comptable en vue de son recouvrement,
avait été justifié par un état liquidatif, signé par elle-même le 9 décembre 2013 et validant
l’ensemble du montant de la convention, soit 223 184 € ; que la comptable se contente
d’affirmer que cet état a été produit hors du délai prévu par la convention, qui expirait
le 30 novembre 2013, sans démontrer que le retard incombait aux services de l’ordonnateur ;
qu’elle ne démontre pas que le financeur a effectivement rejeté le paiement de cette somme ;
qu’elle ne démontre pas non plus que la demande de réduction du titre avait été faite
par l’ordonnateur ; que l’attestation produite par son ancienne adjointe quant à l’existence
des réunions au cours desquelles aurait été prise cette décision n’a aucune valeur probante,
pas plus que les photocopies de ses anciens agendas, indiquant l’existence de réunions
avec le SURéo ;
37.
Attendu qu’il en est de même pour le solde de 22 124,84 € du titre n° 560, émis en 2009
à l’encontre de l’INRA, qui n’a pas fait non plus l’objet de diligences de la comptable en vue
de son recouvrement ; que l’état des dépenses, qu’elle a signé le 12 décembre 2012,
s’établissait à 108 267,41 €, soit un montant supérieur à celui de la convention (85 600 €) ;
que malgré la production des justificatifs dans le délai prescrit, l’INRA n’a effectué
qu’un versement de 3 555,16 € le 25 avril 2014, sans expliquer pourquoi il n’acquittait pas
le solde de 22 124,84 € ; qu’aucune pièce ne fait état d’une relance en vue du recouvrement
de celui-ci, ou d’une demande d’explications ; qu’aucune pièce n’atteste non plus
d’une demande de réduction par l’ordonnateur, ni l’attestation précitée de l’ancienne adjointe
de la comptable, ni les photocopies de ses anciens agendas, n’ayant valeur probante ;
38. Attendu que, pour les titres n° 503 et n° 560 de 2009, la comptable a manqué
à ses obligations en n’accomplissant pas des diligences rapides, complètes et adéquates
en vue du recouvrement de leur solde, soit un montant total de 44 443,24 €, et en passant
une écriture comptable d’apurement ayant eu pour effet de les retirer de l’état des restes
à recouvrer, et de renoncer ainsi à toute perspective de recouvrement alors que les créances
n’étaient pas prescrites ; qu’il y a donc lieu de mettre en jeu la responsabilité
de
Mme X,
au
titre
de
l’exercice 2016,
à
hauteur
des
soldes
cumulés non recouvrés ;
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Sur l’existence d’un préjudice financier
39. Attendu que le défaut de recouvrement d’une créance cause par principe un préjudice
financier à l’organisme concerné ; que, toutefois, il n’y a pas de préjudice lorsque la preuve
est apportée qu’en toute hypothèse la créance n’aurait pas pu être recouvrée ; qu’en l’espèce
cette preuve n’est pas apportée, aucune pièce du dossier et nul argument de la comptable
ne conduisant à envisager que les deux créances de 22 318,40 € et de 22 124,84 €
étaient irrécouvrables ; que le manquement de la comptable a ainsi causé un préjudice
financier au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi
du 23 février 1963 susvisée, à l’université d’Orléans ;
40. Attendu qu’aux termes du même article, «
Lorsque le manquement du comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable a l’obligation
de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme correspondante
» ;
qu’ainsi
il
y
a
lieu
de
constituer
Mme
X
débitrice
de
l’université
d’Orléans pour la somme totale de 44 443,24 € au titre de l’exercice 2016 ;
41. Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée,
«
Les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce,
cette date est le 23 mai 2022, date de réception du réquisitoire par Mme X.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Au titre de l’exercice 2016 (charge unique)
Article 1
er
. – Mme X
est
constituée
débitrice
de l’université d’Orléans, au titre de l’exercice 2016, pour la somme de 44 443,24 €,
augmentée des intérêts de droit à compter du 23 mai 2022.
Sursis à décharge
Article 2. – La
décharge
de
Mme X
au
titre
de l’exercice 2016 ne pourra être donnée qu’après apurement du débet fixé ci-dessus.
Fait et jugé par Mme Michèle COUDURIER, présidente de section, présidente de la formation ;
M. Paul de PUYLAROQUE, conseiller maître, Mme Catherine PAILOT-BONNÉTAT,
conseillère maître, et M. Patrick SITBON, conseiller maître.
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En présence de Mme Nadine BESSON, greffière de séance
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous commissaires de justice,
sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs
de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants
et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par
Nadine BESSON
Michèle COUDURIER
Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières,
les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État
dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt peut
être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions
prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.