Les conservations des hypothèques
_____________________
PRESENTATION
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Réparties sur tout le territoire, les 354 conservations des
hypothèques assurent le service public de la publicité foncière,
notamment en tenant le registre officiel des propriétés immobilières et de
certains droits attachés - dont les hypothèques -, ainsi qu’une activité
fiscale connexe, la perception des droits d’enregistrement et de mutation,
de TVA immobilière et, depuis 2004, de l’imposition des plus-values
immobilières.
Composantes du réseau de la direction générale des impôts
(environ 5.000 emplois sur 75.000), elles tiennent, grâce à une
survivance juridique, une place sans commune mesure avec leur effectif
dans la gestion de l’encadrement de l’ensemble de la direction.
En vertu d’un statut toujours fondé sur une loi du 21 ventôse An
VII (11 mars 1799), le conservateur des hypothèques est, en effet, réputé
agir, pour la publicité foncière, non pas en tant que fonctionnaire
responsable d’un service administratif, mais comme un préposé extérieur
à l’administration, civilement responsable des éventuelles erreurs
commises dans la tenue des registres ou la délivrance des informations. Il
est ainsi censé être rémunéré directement par l’usager et, au moyen de
cette rétribution encaissée à titre personnel, prendre en charge lui-même
tous les frais, y compris de personnel, du service qu’il dirige.
Cette curiosité administrative repose, en grande partie, sur une
fiction, mais elle permet à la direction générale des impôts de continuer à
offrir, chaque année, comme fin de carrière, à un assez large éventail
hiérarchique de ses cadres, une centaine d’emplois particulièrement
attractifs par les rémunérations élevées et les pensions de retraite
majorées dont ils sont assortis.
436
COUR DES COMPTES
Les critiques réitérées de la Cour, à la fois sur l’opacité du
système, ses anomalies juridiques et, au-delà, son anachronisme, en
particulier au regard des exigences d’une gestion efficace des ressources
humaines, n’ont, jusqu’à présent, guère été entendues. En 2006, à l’issue
d’un nouveau contrôle, les ministres chargés des finances et du budget
ont, pour l’essentiel, réaffirmé leur préférence pour le statu quo.
Pour sa part, après avoir poursuivi ses analyses en 2007, la Cour
ne peut que conclure, au contraire, à l’urgence accrue d’une réforme.
D’une part, en tant qu’emplois dits de « débouché », les postes de
conservateur se révèlent de plus en plus inadaptés aux besoins d’une
gestion modernisée de l’encadrement de direction et de ses parcours
professionnels, notamment dans le contexte d’une politique de ressources
humaines des administrations financières désormais plus intégrée et donc
moins cloisonnée par direction.
D’autre part, si, dans les conservations, des progrès significatifs
de productivité et de qualité de service ont été réalisés ces dernières
années, les marges présentes et à venir y sont plus importantes encore, du
fait du développement, relativement tardif, de l’informatisation. Il doit
s’ensuivre, non seulement de nouvelles transformations de leur
organisation et de leur fonctionnement, mais aussi une restructuration de
leur réseau.
De tous ces points de vue, la fusion, récemment décidée, des deux
directions générales de la comptabilité publique et des impôts doit être
considérée à la fois comme une opportunité à ne pas manquer et comme
une
nécessité
supplémentaire
d’inscrire
les
conservations
des
hypothèques dans la dynamique d’ensemble de modernisation des
réseaux financiers.
Les missions de publicité foncière et fiscale des conservations des
hypothèques sont étroitement liées aux transactions et autres mutations
immobilières (successions, donations).
L’enregistrement et la publicité des actes ont notamment pour objet
de garantir leur sécurité juridique. Si la délivrance des actes authentiques
incombe aux notaires, l’inscription des actes à la conservation des
hypothèques est un élément probant devant la justice.
La publicité foncière implique également, pour les conservations,
un rôle important de délivrance d’information. Il leur revient de fournir, à
quiconque en fait la demande, toutes les formalités publiées sous le nom
d’une personne, toutes les charges et les inscriptions publiées pour un
immeuble donné, ou bien l’ensemble de ces éléments en croisant à la fois
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
437
le nom d’une personne et un bien immeuble particulier. Dans plus de neuf
dixièmes des cas, les demandes d’information émanent aujourd’hui des
notaires, pour les besoins de la confection de leurs actes.
En 2006, les conservations des hypothèques ont reçu des usagers
714 M€ en rémunération des diverses prestations de publicité foncière.
Dans le même temps, elles ont encaissé 13,3 Md€ de recettes
fiscales, pour le compte de l’Etat et des collectivités territoriales, sous
forme de droits d’enregistrement et de mutation, d’impôt sur les plus-
values et de TVA immobilières.
I
-
Le statut des conservateurs des hypothèques :
un anachronisme grandissant
Pour les activités fiscales de sa conservation, le conservateur
intervient en tant que comptable public, dans les conditions, notamment
de responsabilité, du droit commun propre aux comptables publics.
C’est pour la seule publicité foncière qu’il est supposé opérer en
tant que préposé de l’administration, selon des principes remontant à la
création du corps des conservateurs des hypothèques par un édit de Louis
XV du 17 juin 1771. En contrepartie de leur responsabilité personnelle et
pécuniaire pour les erreurs susceptibles d’être commises dans la tenue des
registres, l’Etat leur abandonnait une partie des recettes perçues au
moment de l’enregistrement des actes et à l’occasion de renseignements
délivrés aux usagers.
Il s’agit là d’un régime de responsabilité civile dont la sanction
relève du juge judiciaire. Il joue en cas de défaut de publication ou bien
d’omission de mention ou d’inscription, durant toute la durée de fonction
du conservateur et pendant les dix ans années suivant son départ à la
retraite. Dans la pratique, les conservateurs couvrent leur responsabilité
par une assurance.
Depuis un décret du 3 janvier 1997, le cautionnement auquel sont
astreints les conservateurs est remplacé par une adhésion à l’association
des conservateurs des hypothèques agréée par la direction générale des
impôts, sous réserve que l’association ait conclu un contrat d’assurance.
438
COUR DES COMPTES
A - Une construction largement fictive
Sous des apparences partiellement préservées, la construction
juridique et administrative qui fonde le statut du conservateur procède
aujourd’hui largement d’une fiction.
Certes, le tarif appliqué à l’usager est toujours présenté comme le
« salaire » du conservateur, selon le vocable ancien visant des
émoluments destinés à couvrir tous les frais de la conservation. Mais le
montant acquitté est, en fait, immédiatement reversé à l’Etat, hors la part
correspondant à la rémunération du conservateur.
C’est bien l’Etat qui assure directement le fonctionnement des
conservations. Celles-ci sont des services administratifs classiques,
relevant des directions des services fiscaux et fonctionnant selon les
règles habituelles. Les personnels employés y travaillent et y sont
rémunérés comme dans les autres services de la direction générale des
impôts.
Le conservateur est lui-même un fonctionnaire en situation
d’activité et sa pension ressortit du droit commun des retraites des
fonctionnaires de l’Etat, quand bien même les bases de calcul de la
pension sont majorées.
B - Un régime de responsabilité mal fondé
Si, juridiquement, dans le cadre ancien toujours en vigueur, la
responsabilité du conservateur reste de nature civile, elle correspond, en
réalité, à une responsabilité de nature professionnelle.
Economiquement, la performance du régime, pour l’Etat, est
difficile à apprécier, en particulier le bien-fondé des taux de rémunération
des conservateurs au regard des mises en jeu effectives de leur
responsabilité. La direction générale des impôts déclare ignorer le
nombre, aussi bien que le montant, des sinistres intervenus, et a fortiori
les
indemnisations
versées
par
l’assureur
de
l’association
des
conservateurs des hypothèques
163
. L’absence de données et d’étude
continue à être expliquée par le caractère juridiquement « privé » des
deniers en cause.
163) Cette association est installée dans des locaux de la direction générale des
impôts.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
439
Ainsi l’intérêt pour les finances publiques du régime de
responsabilité actuel reste-t-il un sujet d’interrogation, alors même que
l’informatisation en cours dans les conservations et le développement des
télétransmissions avec les notaires devraient être de nature à réduire les
risques d’erreur. Pour autant, aucune conséquence n’en a, jusqu’à présent,
été tirée.
C - Des régularisations partielles
Les critiques répétées de la Cour visant des irrégularités patentes
ont été suivies de certaines remises en ordre, mais partielles.
S’agissant de personnel de la direction générale des impôts, il est
ainsi particulièrement heureux que les conservateurs des hypothèques ne
bénéficient désormais de leurs rémunérations qu’après service fait, et que
la défiscalisation à hauteur du quart, qui leur était appliquée au titre de
l’impôt sur le revenu, ait été supprimée.
En outre, depuis le 1
er
janvier 2007, ils ne reçoivent plus
d’indemnité de résidence, ni, pour ceux dont la situation familiale pouvait
permettre d’y prétendre, de supplément familial de traitement. Dans les
deux cas, la Cour avait relevé l’absence de texte réglementaire leur
ouvrant droit à ces avantages.
Mais plusieurs anomalies notables demeurent, qui laissent le
système du « salaire » des conservateurs encore entouré d’irrégularités et
d’opacités.
Les textes réglementaires concernant les conservateurs, leurs
rémunérations et leurs pensions de retraite ne sont toujours pas tous
publiés. Ne l’est pas le décret fixant leurs droits à pension. Quant au
barème des prélèvements effectués par l’Etat sur les « salaires », qui fixe
la base de calcul des rémunérations des conservateurs, celui figurant dans
le code général des impôts (article 67 de l’annexe IV) est, en fait, caduc,
car remplacé par un autre, plus favorable aux conservateurs, mais non
publié.
440
COUR DES COMPTES
En outre, la non prise en compte de l’effectif des conservateurs des
hypothèques dans les tableaux et les autorisations d’emplois soumis au
législateur lors des examens de la loi de finances de l’année et de la loi de
règlement apparaît d’autant plus injustifiée que cette entorse à la loi
organique relative aux lois de finances (la LOLF) sert d’argument pour
alléguer le caractère « privé » de la fonction de préposé exercé par les
conservateurs, ainsi que des « salaires » versés par les usagers à ce titre.
D - Des fins de carrière atypiques
L’attractivité des postes de conservateur tient aux suppléments de
rémunération d’activité et de retraite dont bénéficient les titulaires par
rapport à ce qu’auraient été leurs rémunérations et leurs droits à pension
dans le corps ou l’emploi où, sinon, ils auraient terminé leur carrière.
Une rotation rapide sur les postes, avec des nominations
intervenant, en général, dix-huit à trente six mois avant le départ à la
retraite, permet d’en faire bénéficier une centaine d’agents chaque année,
la plupart provenant de la direction générale des impôts. Seuls quatre
agents appartenant à d’autres administrations ont été nommés au titre de
chacune des trois dernières années.
Le niveau des rémunérations nettes annuelles est globalement
élevé : en moyenne, il a été de 113 743 € en 2006 pour des postes
d’envergure très variable, allant du petit chef lieu de canton rural, où les
mutations immobilières sont peu nombreuses et d’un montant modeste,
aux secteurs urbains les plus prisés, où le marché de l’immobilier de
bureau aussi bien que résidentiel est très actif.
En 2006, les montants des rémunérations se sont étagés, selon les
conservations, entre 55 000 € et 245 000 €. Les plus élevés atteignent un
niveau exceptionnel dans la fonction publique, qui, au surplus, aurait été
dépassé si la direction générale des impôts n’avait, dans certains cas,
appliqué un plafonnement – sans base réglementaire - par rapport au
barème.
L’évolution des rémunérations étant liée, non pas à la grille
indiciaire de la fonction publique, mais au volume et à la valeur des biens
immeubles enregistrés par les conservations, le renchérissement de
l’immobilier de ces dernières années a directement profité aux
conservateurs. En 2006, leur rémunération nette moyenne a ainsi
progressé de 13,1 % par rapport à 2005.
Le graphique ci-après montre à la fois le niveau globalement élevé
des rémunérations et leur large éventail.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
441
Graphique n° 1 : rémunérations annuelles nettes
des conservateurs des hypothèques
en milliers d’euros
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
110
120
130
140
56k-75k
75k-100k
100-125k
125-150k
150k-175k 175k-200k
200k-225k 225k-250k
Traitement annuel net
Nombre de conservateurs
source : ministères chargés du budget et des finances pour les chiffres,
Cour des comptes pour le graphique.
Dix-neuf conservations offraient en 2006 des rémunérations
supérieures à 180 000 € annuels nets, dont trois de plus de 240 000 €,
tandis qu’à l’autre bout de l’échelle, cent sept conservateurs ont perçu
entre 56 000 € et 100 000 €.
Fonction de la valeur des opérations enregistrées, les écarts de
rémunérations ne reflètent pas les différences de charge de travail entre les
conservations. Ils ne sont, en effet, corrélés ni au nombre des inscriptions
enregistrées, ni au volume des demandes d’information traitées, deux
indicateurs beaucoup plus caractéristiques de la charge de travail effective
que le montant unitaire des opérations.
Par exemple, l’écart des rémunérations atteignait seulement 7 % en
2006 entre les postes de Toulouse 1 et de Toulouse 2, pour une différence
de volume d’activité de plus de 300 %, et il était de 47 % entre les postes
de Dijon 1 et de Dijon 2, pour une différence de volume d’activité
supérieure à 400 %.
442
COUR DES COMPTES
Dans le cas des douze conservations parisiennes, l’une a traité
21 179 demandes en 2006 pour une rémunération du conservateur de
243 000 €, quand une autre, où le nombre des demandes traitées à été un
peu supérieur (24 028), n’a procuré à son conservateur que 135 000 €.
Les progressions sont elles aussi très variables : alors que la
rémunération d’un poste de la Sarthe a augmenté de 0,2 % en 2006, celle
d’un autre des Hauts-de-Seine s’est accrue de 50,2 %.
Pour les plus élevées d’entre elles, les rémunérations nettes
annuelles
des
conservateurs
des
hypothèques
se
comparent
avantageusement avec celles des emplois les plus lucratifs de la fonction
publique, comme le montre le graphique ci-après où sont rapprochées les
rémunérations des conservateurs des hypothèques, des trésoriers payeurs
généraux et des directeurs généraux et directeurs de l’administration
centrale des finances.
Graphique n° 2 : rémunérations annuelles nettes des conservateurs des
hypothèques (CH), des trésoriers payeurs généraux (TPG) et des directeurs
généraux et directeurs (Dir Adm Fi) du ministère des de l’économie, des
finances et de l’industrie en 2006
en milliers d’euros
0
20
40
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80
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140
56k-75k
75k-
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125k
125-
150-k
150k-
175k
175k-
200k
200k-
225k
225k-
250k
CH
TPG
Dir Adm Fi
source : ministères chargés du budget et des finances pour les chiffres, Cour
des comptes pour le graphique
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
443
Du même ordre que celles des trésoriers payeurs généraux, soumis
en tant que comptables publics eux aussi à un régime de responsabilité
personnelle et pécuniaire, les rémunérations nettes les plus élevées des
conservateurs ont, en 2006, dépassé 200 000 € dans une dizaine de cas,
contre une vingtaine pour les trésoriers payeurs généraux. Elles ont
culminé dans trois cas contre un seul à plus de 245 000 €. Ces montants
sont nettement supérieurs – entre le double et moitié plus - aux
rémunérations nettes perçues, cette même année, par les directeurs
généraux et les directeurs du ministère de l’économie des finances et de
l’industrie, qui s’échelonnaient entre 120 000 € et 168 000 €.
Lié à la rémunération, l’avantage en matière de pension de retraite
est souvent encore plus appréciable, et donc aussi plus coûteux pour
l’Etat, car il se perpétue durant tout le temps de la retraite, alors que la
durée d’activité dans le poste est généralement assez courte, quoique
suffisante pour obtenir une pension à taux plein. Il tient à ce que les
conservateurs cotisent sur une base et à des taux dérogatoires.
La pension annuelle brute moyenne versée aux conservateurs
retraités s’élevait à 40 383 € en 2006, correspondant à une majoration de
près de 5 000 € en moyenne (4 933 €) par rapport à la pension moyenne
qu’ils auraient reçue s’il n’avaient pas été nommés conservateurs. Dans
certains cas, cet avantage a pu atteindre 11 600 €.
E - Une gestion renouvelée de l’encadrement de direction
Si l’aménagement de parcours professionnels motivants est une
indéniable nécessité, surtout pour les cadres de direction, encore faut-il
que les emplois attractifs s’inscrivent dans les priorités de l’action
administrative, ainsi que dans une gestion modernisée des emplois et des
trajectoires de carrière. Il convient tout autant que les fonctions exercées
soient suffisamment consistantes et que les avantages en termes de
rémunérations et de retraite soient proportionnés à la fois aux
responsabilités assumées et à la hiérarchie d’ensemble des rémunérations
de la fonction publique.
Or, de tous ces points de vue, la formule actuelle des postes de
conservateur des hypothèques, nonobstant les vertus qu’elle a pu avoir
dans le passé, peut difficilement être considérée comme optimale. Au
contraire, elle apparaît en décalage grandissant avec les exigences d’une
politique renouvelée des ressources humaines.
444
COUR DES COMPTES
Les fonctions exercées par les conservateurs, pour importantes
qu’elles soient, ne sont pas parmi les plus stratégiques ou les plus
exposées de l’administration, notamment fiscale. La cohérence du niveau
de leurs rémunérations avec la réalité à la fois de leurs responsabilités et
des enjeux attachés aux postes ne prête pas moins à discussion.
Par ailleurs, positionner les emplois les plus attractifs en toute fin
de carrière et les localiser dans des services plutôt abrités comme les
conservations des hypothèques n’est pas de nature à faciliter l’évolution
souhaitable vers une plus large place faite, dans la gestion des ressources
humaines, à la professionnalisation par métier, aux exigences de mobilité
et à l’orientation des cadres vers des postes sensibles. D’un coût
probablement moindre, la formule des emplois fonctionnels, assortis de
bonifications indiciaires et de majoration de primes est, par exemple, de
plus en plus souvent privilégiée, mais elle est traditionnellement peu
utilisée par la direction générale des impôts.
De même, une gestion des postes de conservateur cantonnée à la
seule direction générale des impôts n’est plus aujourd’hui de mise. Alors
que la fusion, en préparation, des deux directions générales de la
comptabilité publique et des impôts trouve une de ses principales
justifications dans la mise en place d’une politique et d’une gestion de
personnel intégrées, une reconfiguration des filières actuelles, spécifiques
à chaque réseau, pour les emplois de débouché apparaît incontournable.
Enfin, le système actuel tend aussi à freiner les nécessaires
évolutions induites par l’informatisation, en faisant obstacle à la
rationalisation du réseau des conservations et à l’approfondissement des
synergies avec les autres activités, notamment foncières et cadastrales,
des directions des services fiscaux.
Au total, une approche prospective s’impose, là où la pérennisation
de l’existant a jusqu’à présent prévalu, dans un domaine sensible où les
évolutions ne peuvent être conduites qu’avec précaution et dans la durée.
II
-
Productivité et qualité de service : de fortes
marges de progrès
La qualité du travail d’une conservation des hypothèques dépend
de l’exhaustivité des enregistrements effectués, de leur exactitude et de
leur préservation dans le temps. Elle recouvre aussi la rapidité et la
facilité d’accès aux informations figurant sur les registres.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
445
Non
seulement
toutes
ces
tâches
sont
assez
largement
automatisables, mais, grâce aux nouvelles technologies de l’information,
les améliorations de qualité de service peuvent être tout aussi
considérables que les gains de productivité.
Arrivée avec retard, il y a à peine cinq ans, l’informatisation a eu
rapidement des effets sensibles. Loin d’être épuisés, ils devraient, au
contraire, aller en s’accentuant dans les années à venir. De ce fait, les
enjeux de gestion attachés aux conservations des hypothèques sont
aujourd’hui majeurs.
A - Des gains de productivité potentiels importants
Depuis 2003, tous les enregistrements et inscriptions effectués
auprès des conservations sont saisis dans le système d’information FIDJI
développé entre 1999 et 2004 pour un coût d’environ 90 M€. Les
inscriptions remontant à une période comprise entre les années 1956 et
2002 ont été digitalisées. Au-delà, les documents demeurent sous forme
papier.
Cette informatisation a permis de faire face à l’augmentation de
l’activité de ces dernières années, tout en réduisant sensiblement les
effectifs, qui ont diminué de 23,1 % entre 2002 et 2006. Il en est résulté
des gains de productivité substantiels, puisque le nombre de formalités
effectuées par agent est passé de 1 950 en 2001 à près de 2 800 en 2006
(+43,6 %).
446
COUR DES COMPTES
Graphique n° 3
- Productivité
(France entière en nombre de formalités par agent et par an)
1600
1700
1800
1900
2000
2100
2200
2300
2400
2500
2600
2700
2800
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
source : direction générale des impôts)
Les conservations des hypothèques ont ainsi contribué pour une
large part aux réductions d’effectifs réalisées par la direction générale des
impôts dans le cadre des contrats pluriannuels de performance successifs.
Pour
2008,
400
suppressions
d’emploi
sont
prévues
dans
les
conservations, sur l’objectif de 1 370 retenu dans le contrat pour
l’ensemble de la direction générale.
La digitalisation des registres couvrant la période 1956-2002 s’est
traduite par une réduction significative du volume des documents
conservés. Vingt tonnes d’archives papier peuvent désormais être
stockées sur une série de disques numériques ne pesant pas plus d’un
kilogramme. Les économies de surfaces qui s’en sont suivies ont
concouru aux réorganisations de l’ensemble des services du réseau de la
direction générale des impôts. Elles ont permis de céder des immeubles
pour un montant total estimé à 78 millions d’euros en 2006.
Par ailleurs, depuis 2005, FIDJI est relié à l’application utilisée par
les services du cadastre, MAJIC 2, au sein de la base nationale de
données patrimoniales (BDNP). Ce système d’information partagée entre
différents services de l’administration fiscale permet notamment une mise
à jour du cadastre à partir de FIDJI.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
447
Mais une nouvelle étape d’automatisation, au moins aussi
essentielle, a débuté en 2006 avec le déploiement de Télé@ctes, une
application
d’échanges
de
données
entre
les
conservations
des
hypothèques et les offices notariaux. Si sa réalisation avait été inscrite au
schéma directeur informatique de la direction générale des impôts pour
2001 et 2002, la première version opérationnelle n’a été achevée qu’au
début 2006. Entre avril 2006 et septembre 2007, près de 4 200 notaires
(soit un peu plus de la moitié de la profession) ont adopté le logiciel.
Dans un premier temps, les échanges de données portent sur les
demandes d’information, cependant Télé@ctes a vocation à assurer
également le transfert automatique des actes eux-mêmes.
Les conséquences de cet ensemble de processus d’informatisation
ont été d’ores et déjà particulièrement tangibles : rapidité de consultation
et transmission plus fiable et plus aisée de l’information. De nombreuses
manipulations de papier ont été supprimées.
Cependant, la modernisation informatique a aussi ses limites : le
premier travail de saisie de l’information demeure manuel, qu’il soit
effectué par les notaires ou par les agents des conservations des
hypothèques ; surtout, l’information reste aujourd’hui inaccessible
directement, pour les registres non informatisés, à partir du nom ou du
numéro d’immeuble, faute de possibilité de recherche par mots-clef et
donc de moteur de recherche.
En outre, l’informatisation des notaires dépend de l’initiative de
ces derniers et de l’actualisation régulière des produits commercialisés
par les sociétés de service informatiques nécessaires au fonctionnement
du logiciel Télé@ctes.
Ainsi, en 2007, Télé@ctes n’a pu traiter que les actes simples ; ce
n’est qu’en 2008 que tous les types d’actes pourront être transmis. Les
contraintes et les limites du logiciel, comme le caractère encore récent de
son déploiement, ont limité son usage, pour les actes, à moins de 1 % du
volume total des actes notariés intéressant les conservations des
hypothèques en septembre 2007.
Les gains de productivité se sont ainsi ralentis, alors que la montée
en puissance de FIDJI arrivait à son terme et que Télé@ctes n’était pas
encore opérationnel : ils sont passés de + 6,6 % en 2004 à + 4,5 % en
2005 et + 2,1 % en 2006.
Pour autant, les gains de productivité à attendre de Télé@actes
devraient être, à terme, supérieurs à ceux procurés par FIDJI et donc
permettre de nouvelles et importantes réductions d’effectifs.
448
COUR DES COMPTES
B - Une qualité de service en progrès mais encore partiels
Pour une large part également grâce à l’informatisation, le service
aux usagers, aujourd’hui essentiellement les notaires, a été grandement
amélioré s’agissant des délais.
La durée moyenne de publication est ainsi passée de 37 jours et
demi à la fin du premier semestre 2003 à 12 jours à mi 2007. Alors qu’en
juin 2003, on comptait 133 conservations des hypothèques dont les délais
de publication étaient supérieurs à 40 jours, elles n’étaient plus que six en
juin 2007.
L’accélération des délais de réponse aux demandes d’information
et de traitement des actes, également notable, s’explique aussi par le
nouveau mode de perception des droits mis en place en 2001 : depuis
cette date, le conservateur des hypothèques ne reçoit sa rémunération
qu’après la délivrance des documents et non plus au moment où la
demande est faite par l’usager.
Néanmoins, là encore, d’importantes possibilités de progrès restent
à exploiter pour mieux répondre aux attentes des notaires, mais aussi des
particuliers et des entreprises, notamment par l’ouverture de services
accessibles via Internet.
Les informations dont disposent les conservateurs permettraient,
par exemple, de fournir des renseignements sur l’évaluation des biens
immobiliers susceptibles, entre autres, de faciliter, pour les contribuables,
l’accomplissement de certaines formalités fiscales comme les déclarations
de succession ou d’impôt de solidarité sur la fortune.
C - Un réseau dense, disparate et rigide
Les 354 conservations constituent un réseau très dense, avec une
grande disparité de taille et de volume d’activité selon les services. En
dépit de l’importance croissante des zones urbaines, les implantations en
milieu rural sont les mêmes depuis plus de dix ans.
En 2006, vingt conservations traitaient moins de 6 000 demandes
d’information provenant des usagers, une moins de 2 800 (Vouziers),
vingt autres plus de 36 000 et une plus de 52 000 (Bordeaux 3).
Le niveau d’activité est tout aussi variable selon les actes
enregistrés. En 2006, le flux quotidien moyen des ventes, inscriptions et
radiations était inférieur à 10 dans seize conservations, mais supérieur à
50 dans cinquante trois autres, avec un maximum de 102 pour la
conservation de Meaux.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
449
La même hétérogénéité se retrouve dans le découpage du territoire
des grandes agglomérations urbaines : la conservation de Nice 1 gère un
flux deux fois plus important que celle de Nice 3 ; l’écart est de trois entre
les conservations de Toulouse 3 et de Toulouse 1 et 2 ; il atteint un
facteur quatre entre celles de Dijon 1 et de Dijon 2.
Le constat vaut tout autant pour les départements : le flux
journalier moyen, par département, des actes, inscriptions et radiations
s’établissait à 116 en 2006 (hors DOM), mais vingt départements
n’atteignaient pas un flux quotidien de 50.
Pourtant, la direction générale des impôts n’a toujours pas mené
d’étude sur la taille optimale d’un service de conservation, non plus que
sur celle du réseau. Elle explique que la constitution d’une base de
données d’images par conservation des hypothèques - qui revient à tabler
sur un réseau inchangé - a procédé d’un choix consistant à privilégier
l’obtention de gains de productivité dans chaque conservation grâce aux
nouveaux systèmes d’information, plutôt que par des restructurations du
réseau.
En réalité, avec les technologies actuelles, les deux leviers de
productivité ne sont nullement exclusifs l’un de l’autre, étant donné
notamment la grande dispersion du réseau et les synergies que pourraient
dégager
d’éventuels
rapprochements
avec
d’autres
services
de
l’administration fiscale.
Mais, dans les faits, la cartographie du réseau reste aujourd’hui
déterminée par le nombre existant de postes de conservateur, de manière
à le préserver et, dans ce cadre, à « optimiser » les rémunérations. Les
changements apportés aux périmètres géographiques des postes ont ainsi
eu notamment pour objectif d’éviter que la rémunération de certains
conservateurs ne dépasse les montants plafonds souhaités par la direction
générale des impôts.
D - Des tarifs déconnectés des gains de productivité
Deux catégories de tarifs sont pratiquées par les conservations des
hypothèques. La première concerne les biens qui nécessitent une
publication au fichier immobilier, soumis à un taux de 0,05 % ou de
0,1 % de la valeur du bien. La seconde recouvre les demandes de
documents, soumises à un tarif forfaitaire compris entre 6 € et 30 € selon
la nature du document demandé.
Héritage du temps révolu où les agents des conservations se
rendaient dans les offices notariaux pour porter les documents, des « frais
de correspondance » sont également demandés aux usagers. De surcroît,
450
COUR DES COMPTES
ils sont souvent systématiquement majorés de 50 % au titre de
« l’urgence », quand la rapidité de la réponse fournie n’est qu’une
conséquence de l’informatisation.
Ces tarifs n’ont pas de lien direct avec le coût des services rendus
aux usagers. Le tarif proportionnel est réputé lié au coût d’un éventuel
sinistre pour le conservateur en cas d’enregistrement inexact. Toutefois,
la direction générale des impôts n’est pas en mesure de confirmer que le
caractère proportionnel et les taux pratiqués couvrent ce risque de façon
satisfaisante. Quant aux tarifs forfaitaires, ils sont en vigueur depuis 1994,
sans que les gains significatifs de productivité enregistrés depuis 2003
aient été répercutés. De plus, la majoration de 50 % pour demande
urgente est appliquée dans huit cas sur dix du seul fait de
l’informatisation.
Sauf dans ce dernier cas, défavorable – indûment - à l’usager, les
effets de l’informatisation, pourtant importants notamment sur les frais de
fonctionnement, n’ont pas plus été répercutés dans la tarification que dans
les taux de rémunération des conservateurs.
Cette absence de prise en compte de l’évolution des coûts, et donc
des gains de productivité, est spécialement paradoxale dans un système
dont la logique veut que le « salaire » du conservateur corresponde
précisément aux frais engagés, dont les coûts du service lui-même, hors la
rémunération du conservateur, représentent la plus grande part.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Les conservations des hypothèques ont entamé, ces dernières
années, une modernisation dont il faut saluer les premiers résultats.
Toutefois, des marges de progression importantes demeurent, tant pour la
qualité du service rendu au public que pour les gains de productivité
attendus. La rationalisation du réseau, notamment par une meilleure
synergie avec les autres services fiscaux, implique des réorganisations de
grande ampleur et donc une conduite du changement à la mesure.
Cette évolution passe d’autant plus par une profonde réforme du
statut des conservateurs des hypothèques que ce système actuel d’emplois
de débouché essentiellement réservés à la direction générale des impôts
souffre, en plus de ces défauts intrinsèques, d’une inadaptation croissante
aux nouveaux besoins de la politique de personnel, tout particulièrement
au moment de la réunion des deux réseaux du Trésor public et des
impôts.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
451
La Cour recommande donc :
-
de définir une évolution cible, à moyen terme, du réseau des
conservations des hypothèques afin d’optimiser la répartition des moyens
sur le territoire et de rechercher des synergies avec les autres services
déconcentrés de l’administration fiscale, ainsi que, le cas échéant, du
Trésor public ;
-
de planifier l’évolution, également à moyen terme, des effectifs
des conservations en fonction du déploiement de Télé@ctes ; le cas
échéant, en prévoyant des incitations pour que les notaires s’équipent
rapidement et utilisent systématiquement Télé@ctes pour le transfert des
actes ;
-
d’étudier la création de services en ligne pour les différentes
catégories d’usagers, pas seulement les notaires, mais aussi les autres
professionnels et les particuliers, en fonction de leurs besoins et de leurs
attentes et en associant, en tant que de besoin, les autres services fiscaux,
notamment le cadastre ;
-
d’actualiser le tarif des conservations et de supprimer le régime
des frais de correspondance ;
-
de faire figurer les emplois de conservateur des hypothèques
dans les autorisations et les tableaux d’emplois des lois de finances ;
-
de réformer le régime actuel de rémunération des conservateurs
des hypothèques, en supprimant le système du « salaire » et en le
remplaçant par des emplois fonctionnels, avec une grille de rémunération
par catégorie de conservation ;
-
de publier le décret relatif aux pensions de retraite des
conservateurs des hypothèques ;
-
d’inscrire la réforme du statut et de la gestion des postes de
conservateur
dans
une
évolution
d’ensemble
de
la
gestion
de
l’encadrement des administrations financières.
452
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET
DE LA FONCTION PUBLIQUE
La publicité foncière est une mission importante de l’actuelle
direction générale des impôts et de la future direction générale unifiée. Elle
garantit un niveau élevé de sécurité juridique aux transactions et autres
mutations immobilières (donations, successions), à travers les obligations
d’enregistrement et de publicité des actes.
Le mode de délivrance de données relatives aux immeubles, permet
par ailleurs de s’assurer que les informations à la disposition des
conservations des hypothèques soient utilisées dans les meilleures conditions,
en particulier par les notaires pour la confection de leurs actes.
Les prestations de publicité foncière, ainsi que le rappelle la Cour des
Comptes, font l’objet d’une tarification aux usagers, dont le produit s’est
élevé à 714 millions d’euros en 2006. Elles s’accompagnent d’une mission de
recouvrement de plusieurs prélèvements (droits d’enregistrement et de
mutation, impôt sur les plus-values et de TVA immobilière), dont le produit
s’est élevé à 13,3 milliards d’euros en 2006.
La Cour des comptes, dans son développement relatif aux
conservations des hypothèques, analyse leur activité à travers trois points :
la qualité de service, la productivité des structures et le statut de
conservateur des hypothèques. Ses remarques appellent, de la part du
ministère du Budget, des comptes Publics et de la Fonction Publique, les
réponses suivantes.
1. La qualité de service dans les conservations des hypothèques.
La direction générale des impôts et la direction générale de la
comptabilité publique ont fait de l’amélioration de la qualité de service l’un
des axes structurants de leur action. La mission de publicité foncière s’inscrit
naturellement dans cette perspective depuis plusieurs années, avec des
progrès avérés, comme le souligne le rapport de la Cour.
Du point de vue des usagers, le délai de réponse aux demandes
d’information et de traitement des actes constitue l’un des principaux critères
de qualité de service. La direction générale des impôts a donc fait de sa
réduction une priorité, en s’appuyant sur l’application FIDJI, qui automatise
depuis 1999 l’enregistrement et les inscriptions effectués auprès des
conservateurs. Le nouveau mode de perception des droits mis en place en
2001, qui consiste à faire de la date de traitement des formalités le point de
départ de la rémunération du conservateur, en lieu et place du précédent
système de rémunération avant service fait, a également contribué à
accélérer la réduction du délai de réponse.
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
453
Au total, et comme le souligne la Cour des comptes, le délai moyen de
publication a été divisé par 3
en l’espace de 4 ans. Les délais de la
délivrance des renseignements sommaires urgents, c’est-à-dire les états
hypothécaires demandés, par exemple, par les notaires pour établir les actes
de vente, ont été également fortement réduits. Depuis 2004, la direction
générale des impôts s’engage à fournir les renseignements sur les immeubles
dans un délai de 10 jours. Tel a été le cas, en 2006, pour 99,9 % des
5,31 millions de demandes (66,5 % en moins de 5 jours).
Cet effort doit être poursuivi. Le délai de mise à jour du fichier foncier
et de transmission des documents aux usagers, en particulier aux notaires,
constituera, à ce titre, l’un des objectifs structurants de la mission de
publicité foncière de la future direction générale unifiée.
La Cour des comptes propose par ailleurs de développer des services
en ligne, permettant, grâce à la richesse des informations détenues par les
conservations des hypothèques, de « fournir
des renseignements sur
l’évaluation des bines immobiliers susceptibles, entre autres, de faciliter
pour les contribuables, l’accomplissement de certaines formalités fiscales
comme les déclaration de succession ou d’impôt de solidarité sur la
fortune ».
Le ministère du Budget, des Comptes Publics et de la Fonction
Publique suscrit à la préconisation de la Cour des comptes, qui permettra de
répondre effectivement à une attente des usagers. A ce titre, une étude est
actuellement menée pour élaborer un outil informatique, distinct du fichier
immobilier, permettant aux usagers de consulter le prix des transactions
immobilières et de bénéficier d’études de marché. Cet outil apporterait,
conformément au souhait de la Cour, une véritable valeur ajoutée pour les
usagers, puisque l’ensemble des mutations sont enregistrées dans les outils
de la DGI avec une réactivité quotidienne. La future direction générale
unifiée s’emploiera à la rendre accessible en 2011, en veillant à ce que les
importants développements informatiques nécessaires à sa constitution soient
effectués dans le respect de ce calendrier.
L’analyse de la qualité des prestations assurées par les conservations
des hypothèques faite par la Cour porte également sur leur tarification. En la
matière, la Cour préconise d’actualiser le tarif des conservations et de revoir
le régime des frais de correspondance. L’actualisation viserait à répercuter
dans la tarification les effets de l’informatisation.
Le ministère du Budget, des Comptes Publics et de la Fonction
Publique n’est pas opposé à la baisse des tarifs de délivrance des actes,
cohérente, comme le souligne la Cour, avec la réduction des coûts de
fonctionnement induite par l’informatisation. Cette réduction devrait être
cependant mise en oeuvre au fur et à mesure que le retour sur investissement
des investissements informatiques réalisés dans les conservations se
concrétisera. Une étude en la matière est souhaitable, pour préciser le
454
COUR DES COMPTES
rythme de baisse des tarifs et leur calendrier et l’articuler avec les priorités
budgétaires du Gouvernement. Elle sera donc lancée dès 2008. Le cas
échéant, la baisse pourrait porter en priorité sur la majoration pour
demande urgente.
En ce qui concerne plus spécifiquement les frais de correspondance,
leur perception est liée à l’envoi aux notaires des documents par voie
postale. La tarification d’un service facultatif est donc fondée sur le plan des
principes. La suppression progressive de ces frais est cependant de facto
engagée sous l’effet de la transmission dématérialisée des documents aux
notaires par l’application Télé@ctes. La montée en charge de l’équipement
des notaires laisse en effet augurer une basse rapide des envois postaux.
2 600 notaires sur 4 500 utilisent aujourd’hui l’application, et 200 s’équipent
chaque mois. A ce rythme, l’objectif du Conseil supérieur du notariat d’un
taux d’équipement de 70 % à l’été 2008 est largement susceptible d’être
atteint.
2. L’organisation et l’efficacité des conservations des hypothèques.
Les conservations des hypothèques sont engagées dans un important
effort
de
productivité.
Sous
l’effet
de
l’informatisation
des
flux
d’enregistrements et d’inscriptions et de digitalisation du stock d’inscription
réalisées entre 1956 et 2002, les gains de productivité ont en effet connu une
croissance importante. Ainsi que le souligne la Cour, l’application FIDJI a
permis d’augmenter significativement le nombre de formalités effectuées par
agent (+43,6 % entre 2001 et 2006). Les conservations des hypothèques ont
par ailleurs largement contribué à la réduction des emplois à la direction
générale des impôts. En 2003, les effectifs des conservations s’élevaient à
5 800 agents. En 2007, à 4770, soit une baisse de près de 20 % en 5 ans.
Cet effort de productivité sera maintenu dans les prochaines années.
La poursuite du mouvement d’informatisation des conservations permettra en
effet de maintenir un niveau élevé de gains d’efficacité. La poursuite du
déploiement de Télé@actes apparaît à cet égard essentielle. L’augmentation
du taux d’équipement des notaires, favorisée par la forte implication du
Conseil supérieur du notariat dans le déploiement de l’application, laisse
augurer des marges de manoeuvre supplémentaires. La généralisation des
types d’actes pouvant être transmis par l’application favorisera également le
maintien de l’effort de productivité.
Au-delà de l’informatisation des structures, cet effort doit être porté
par chacune des conservations des hypothèques. Homogénéiser l’efficacité
du réseau est en effet indispensable pour s’assurer que toutes les
conservations participent à l’effort de bonne gestion et d’amélioration de la
qualité du service rendu.
Ce principe de convergence dans l’efficacité des structures qui a
guidé les gains de productivité réalisés ces dernières années, sera maintenu
dans le cadre de la direction général unifiée. Il ne fait pas obstacle à
LES CONSERVATIONS DES HYPOTHÈQUES
455
l’évolution du réseau des conservations, dont les implantations sont
inchangées depuis 10 ans. A l’évidence, à partir du moment où la
dématérialisation produit ses effets et que les gains de productivité générés
par Télé@ctes et FIDJI se concrétisent, la physionomie du réseau des
conservations des hypothèques est appelée à évoluer. Il peut dés lors être
envisagé d’adapter la répartition du réseau sur le territoire, tout en
optimisant le dimensionnement des conservations. Cette adaptation doit
nécessairement respecter deux conditions.
Premièrement, si le principe d’adaptation permanente des services
publics justifie de tirer les conséquences de l’évolution des besoins des
usagers et de la capacité à y répondre, il ne peut être mis en oeuvre qu’en
tenant compte des besoins locaux. Comme c’est aujourd’hui le cas pour
l’adaptation des autres structures de la DGI et de celles la DGCP, c’est donc
à partir d’une démarche locale d’appréciation de la pertinence de chaque
implantation que devront être réalisés d’éventuels ajustements.
En second lieu, toute réorganisation locale doit être précédée d’un
intense effort de concertation, dans le respect notamment de la charte des
services publics en milieu rural. Ce travail fait partie intégrante de la
mission confiée à chaque responsable territorial.
3. Le statut de conservateur des hypothèques.
La Cour, dans son rapport, émet plusieurs remarques à l’égard du
statut de conservateur des hypothèques.
La première porte sur l’absence de publication des éléments relatifs
aux pensions de retraite des conservateurs des hypothèques et d’inscription
dans les autorisations et les tableaux d’emploi des lois de finances.
Conformément à la demande de la Cour, la future direction générale unifiée
va rapidement conduire une expertise sur les conditions qui permettraient
d’inclure les emplois de conservateur dans les autorisations et les tableaux
d’emplois des lois de finances. Les éléments relatifs aux pensions de retraite
des conservateurs seront désormais publiés.
La seconde remarque de la Cour porte sur la pertinence du statut de
conservateur comme élément de gestion des fins de carrières de l’actuelle
direction générale des impôts. La Cour constate que « si l’aménagement de
parcours professionnels motivants est une indéniable nécessité, surtout pour
les cadres de direction, encore faut-il que les emplois attractifs s’inscrivent
dans les priorités de l’action administrative, ainsi que dans une gestion
modernisée des emplois et des trajectoires de carrière ». Elle regrette, à cet
égard, que « les fonctions exercées par les conservateurs, pour importantes
qu’elle soient, ne [soient] pas parmi les plus stratégiques ou les plus
exposées de l’administration, notamment fiscale ».
456
COUR DES COMPTES
Le ministre du Budget, des Comptes Publics et de la Fonction
Publique rejoint naturellement la Cour sur la nécessité d’offrir aux cadres de
la direction des perspectives professionnelles motivantes tout au long de la
carrière. Les conservations des hypothèques s’inscrivent dans cette
perspective. Elles ne sauraient néanmoins épuiser le sujet, et la possibilité
d’offrir d’autres types de postes à responsabilité doit être envisagée dans le
cadre de la fusion, compte tenu du nombre de fonctions qui trouveraient
bénéfice à être exercées par des cadres riches d’une forte expérience
professionnelle.
L’évolution de la fonction de conservateur des hypothèques est par
ailleurs possible. Une réflexion consistant à remplacer le système actuel par
des emplois fonctionnels peut, à cet égard, être conduite dans le cadre de la
fusion, sous réserve de permettre de maintenir un dispositif financièrement
attractif. Cette orientation supposera d’intégrer la contrainte que représente
ce type de basculement pour le budget de l’Etat, les rémunérations, y compris
les charges patronales, étant alors prises en charge sur le titre des dépenses
de personnel.