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Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec
les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 21 juillet 2022
.
AUDIT FLASH
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT
DES REMONTÉES MÉCANIQUES
PENDANT LA CRISE COVID-19 DANS LES
ALPES DU NORD
SYNTHÈSE
(Départements de la Savoie et de la Haute-Savoie)
SOUTIEN APPORTE AUX SOCIETES GERANT DES REMONTEES MECANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a, dans le cadre de son
programme de travail 2022, procédé à un
audit flash relatif au soutien apporté aux sociétés
gérant des remontées mécaniques pendant la crise COVID-19 dans les Alpes du Nord
.
Cette nouvelle méthodologie des juridictions financières à vocation à collecter et rendre
publiques des données objectives sur un sujet d’actualité, au périmètre restreint, dans un pas de
temps limité, au plus proche des faits analysés.
Un échantillon de six sociétés délégataires a été constitué
par la chambre,
représentatif des grandes et très grandes stations du Nord des Alpes, où se concentre l’essentiel
de l’activité et des entreprises. Sur les six sociétés délégataires retenues, quatre figurent parmi
l
es quinze plus importantes de France en termes de chiffre d’affaires et sont affiliées à des
grands groupes privés (3) ou publics (1), deux autres, de taille moyenne, sont dans les 45 plus
importantes sociétés et sont des entreprises indépendantes.
Elles ont totalisé, à elles six, près
de 132 M€ d’aides publiques
pour l’exercice 2020
-
2021 (de 4,1 M€ à 34,6 M€), quasi
intégralement financé par l’Etat,
dont près de 112 M€ au titre d’un dispositif spécifique aux
remontées mécaniques
dit dispositif « coûts fixes ».
La contradiction de chaque rapport a été conduite avec les délégataires concernés et,
pour la synthèse, avec Domaine skiable de France, qui fédère les acteurs de la profession.
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
1
TABLE DES MATIÈRES
1
LES EFFETS DE LA CRI
SE SANITAIRE SUR L’A
CTIVITÉ DES DÉLÉGATAIRES DE
REMONTÉES MÉCANIQUES
............................................................................................
5
1.1
L’effondrement du chiffre d’affaires
lors de la saison 2020-2021
.................................
5
1.2
Des charges qui restent élevées
.......................................................................................
6
1.2.1 Des effectifs stables malgré des dépenses de personnel en forte baisse
...........................
7
1.2.2
Le maintien d’une activité malgré la f
ermeture
................................................................
8
2
UN SOUTIEN NÉCESSAIRE
..............................................................................................
9
2.1
Un dispositif spécifique au secteur des remontées mécaniques
....................................
10
2.2
Le bénéfice des dispositifs communs d’aides
...............................................................
12
2.2.1 La prise en charge du chômage partiel
...........................................................................
12
2.2.2 Les exonérations de cotisations sociales
.........................................................................
14
2.2.3 Le fonds de solidarité
......................................................................................................
14
2.2.4 Le soutien des collectivités territoriales
..........................................................................
15
2.2.5
Les prêts garantis par l’État (PGE)
.................................................................................
16
3
UN RÉGIME D’AIDES FA
ISANT LE CHOIX DE LA SIMPLICITÉ AU DÉTRIMENT
DE LA PROPORTIONNALITÉ
.........................................................................................
17
3.1
Des effets positifs sur la situation financière des sociétés
............................................
17
3.2
Des aides qui auraient pu être mieux calibrées
.............................................................
20
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
2
INTRODUCTION
Le tourisme de montagne, et le ski en particulier, représente une part essentielle de
l’économie touristique de la France qui compte 30
% du domaine skiable européen. Les
domaines skiables français accueillent ainsi chaque hiver près de 10 millions de visiteurs dont
près d’un quart de clientèle étrangère, principalement intra
-européenne. Ils génèrent plus de
dix milliards d’euros de chiffre d’affaires, avec un effet démultiplicateur lié aux sports de
glisse
: pour 1 € dépensé en forfait de remontées mécani
ques, six euros sont dépensés par
ailleurs en station (restauration, hébergement, etc.). En outre, les investissements sur les
domaines skiables français s’élèvent à près de 356 millions d’euros chaque année
1
.
En moyenne sur la période 2016-2019, les deux départements savoyards représentent la
part de marché la plus importante en journées-skieur. Pour cette raison, la chambre a choisi de
cibler son étude sur ce territoire.
Figure 1 : Part de marché en journées-skieur 2016-2019 par massif
Source : Domaines skiables de France
La filière emploie directement 18 000 salariés permanents et saisonniers, mais ce sont
au total près de 120 000
emplois directs et indirects qui dépendent de l’ouverture des domaines
skiables, dont 90 000 pour les Alpes du Nord
2
.
Près de 150 sociétés se répartissent à parts égales entre des régies publiques, souvent de
petite taille et à l’échelle d’une station, et
des entreprises privées de taille variable, dont
l’activité peut aller jusqu’à couvrir plusieurs stations sous la forme de groupes œuvrant dans
d’autres secteurs économiques en dehors du ski. Parmi les 45 plus importantes, 36 sont
implantées dans les Alpes, dont 21 sont privées. Sur les 15 plus importantes, 13 sont implantées
dans les Alpes, dont 11 sont privées.
1
Source : Domaines Skiables de France.
2
15 000 dans les Alpes du Sud, 10 000 dans les Pyrénées et 5 000 entre le Jura, les Vosges et le Massif Central.
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
3
Figure 2 : TOP 45 des stations de ski - chiffre d'affaires 2018-2019
Les sociétés sur fond vert sont celles retenues dans l’audit.
NB 2
: l’axe de gauche présente le chiffre d’affaires (CA) de chaque société, l’axe de droite présente la part de
chiffre d’affaires cumulée des sociétés
; lecture : le CA sur la station Chamonix-
Les Houches s’est élevé à 85 M€
en 2018-2019
; les 45 plus grandes stations françaises cumulent 99 % du chiffre d’affaires total du secteur.
Source : revue Montagne Leaders
septembre/octobre 2019
Domaines skiables concernés par l’audit
Station
Domaine
skiable
Classement
StationoScope
Autorité
organisatrice
Sociétés exploitantes
La Plagne
La Plagne
Très grande
station
SI de la Grande
Plagne (SIGP)
Société d'aménagement de La
Plagne SAP
3
Tignes
Tignes
Très grande
station
Commune de Tignes
Société des téléphériques de la
Grande Motte, STGM
4
Val Thorens
Les trois
vallées (vallée
des Belleville)
Très grande
station
Syndicat Mixte pour
l'aménagement de la
vallée de Belleville
(SYMAB)
Société d'exploitation des
téléphériques Tarentaise-
Maurienne, SETAM
Avoriaz
Morzine
Les Portes du
soleil
Très grande
station
Commune de
Morzine-Avoriaz
Société d'exploitation des
remontées mécaniques de
Morzine-Avoriaz, SERMA
5
Saint Sorlin
d'Arves
Les Sybelles
Grande station
Commune de Saint
Sorlin d'Arves
Société d'Aménagement de
Saint-Sorlin d'Arves, SAMSO
La Toussuire
Les Sybelles
Grande station
Syndicat
intercommunal des
Grandes Bottières
Société des remontées
mécaniques de la Toussuire
SOREMET
Source : Scores & Décisions et StationoScope
3
Filiale de la Compagnie des Alpes.
4
Filiale de la Compagnie des Alpes.
5
Filiale de la SOFIVAL, elle-même actionnaire de la Compagnie des Alpes.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
4
Le présent audit a pour objectif de mesurer les conséquences financières de la crise
sanitaire sur les sociétés exploitant des grandes ou très grandes stations en Savoie et Haute-
Savoie et d’analyser l’impact des mesures d’aides décidées par les autorités publiques. L’audit
s’appuie sur un échantillon de six sociétés privées. Quatre des six entreprises retenues figurent
ainsi parmi les quinze plus importantes de France en termes de chiffre d’affaires. L’audit a
exclu les régies publiques, généralement de plus petite taille, d
ont les comptes n’étaient pas
disponibles au moment de l’enquête et dont les problématiques de gestion sont différentes.
Stations concernées par l’audit
Données
: chiffres d’affaires saison 2018/2019
; Js : nombre de journées skieurs
Source : sociétés délégataires - retraitement CRC
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
5
1
LES EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE SUR L’ACTIVITÉ DES
DÉLÉGATAIRES DE REMONTÉES MÉCANIQUES
À l’aube de la crise sanitaire, les sociétés délégataires contrôlées par la chambre
présentaient toutes une situation financière favorable. La saison 2018-2019 a été la meilleure
depuis au moins trois ans
6
pour cinq d’entre elles, qui ont réalisé cette année
-là leur chiffre
d’affaires et leur résultat net les plus élevés (respectivement 246,7 M€ et 35,2 M€ cumulés), en
progression de près de 3 % par an sur les trois derniers exercices, soit un taux de croissance très
nettement supérieur à la moyenne nationale
7
.
Le confinement du pays, annoncé le 14 mars 2020, a conduit à la fermeture des stations
jusqu’à la fin de la saison d’hiver.
Cette décision a engendré une baisse de fréquentation d’un
peu plus de 15 % sur la saison 2019-2020. Elle a moins touché les stations de moyenne
montagne, dont la fermeture intervient plus tôt, que les stations de haute montagne, dont
l’activité se prolonge au printemps, en fonction de l’enneigement.
Le 4 décembre 2020, le décret n°2020-1519 est venu acter la fermeture des remontées
mécaniques. Cette fermeture a, par la suite, été prolongée jusqu’à la fin de la saison d’hiver, ce
qui a conduit à une saison blanche pour les exploitants. Á
noter qu’une partie
très mineure des
activités de ski a
lpin (jeunes des clubs sportifs locaux, professionnels…) et hors ski alpin (ski
de fond, randonnée, etc.) s’est maintenue
.
1.1
L’effondrement du chiffre d’affaires
lors de la saison 2020-2021
Toutes les sociétés de l’échantillon ont vu leur chiffre d’affaires
(CA) baisser de manière
plus ou moins importante. Comparé à la période de référence, l’exercice 2020, avec la fermeture
des stations le 15 mars, s’est traduit par une baisse de chiffre d’affaires de 18 % en moyenne,
variant de - 8 à - 28 %. Les stations d
’altitude, qui prolongent leur saison jusqu’au milieu du
printemps, sont celles qui ont vu leur CA le plus touché.
L’exercice 2021 a vu les remontées
mécaniques fermées durant toute la saison d’hiver. Le chiffre d’affaire de toutes les sociétés de
l’échantillon s’effondre et ne représente plus que 3 % du CA des exercices 2017
-2019, variant
de 1 à 5 % pour les sociétés qui ont maintenu une activité avant la fermeture des remontées ou
durant l’été.
6
Les données disponibles de la chambre s’arrêtant en 2015, la situation antérieure n’est pas connue.
7
+ 1,1 % en 2016, + 2,3 % en 2017 et + 1,7 % en 2018.
Source : INSEE.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
6
Évolution du chiffre d’affaires sur la période 2017
-2021
E
n K€
Moy.2017-
2019
2020
2021
Evol 17-
19/21
SAP
75 250
63 137
1 895
- 97 %
STGM
50 879
39 528
1 821
- 96 %
SETAM
57 237
41 346
1 135
- 98 %
SERMA
38 301
35 904
1 837
- 95 %
SAMSO
8 674
8 072
317
- 96 %
SOREMET
9 192
8 676
135
-99 %
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
Chiffre d’affaires 2019
-
2021 (en k€)
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
1.2
Des charges qui restent élevées
Alors que le chiffre d’affaires était quasiment nul lors de la saison 2021
-2022, les
charges
d’exploitation sont restées à un niveau assez élevé, leur réduction étant limitée à 53
%
pour l’échantillon.
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
70 000
80 000
90 000
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
2018-2019
2019-2020
2020-2021
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
7
Évolution des charges d'exploitation entre 2017 et 2021
(total des 6 sociétés délégataires de l’échantillon)
En K€
Moy.2017-
2019
2020
2021
Evol 17-
19/21
Achats de marchandises
6 806
5 820
2 096
- 69 %
Achats et charges externes
52 734
46 729
31 786
- 40 %
Impôts, Taxes et assimilés
17 789
15 295
3 684
- 79 %
Frais de personnel
60 675
50 403
26 787
- 56 %
Total
138 003
118 246
64 353
- 53 %
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
1.2.1
Des effectifs stables malgré des dépenses de personnel en forte baisse
Les effectifs des six délégataires de l’échantillon ont peu évolué sur la période. Les
sociétés embauchent en effet leurs saisonniers pour
la saison d’hiver dès l’automne, afin de
préparer la saison, et les saisonniers qui ont déjà eu un contrat bénéficient d’un droit à
l’embauche prioritaire compte tenu de la convention collective du secteur. La fermeture des
remontées mécaniques, décrétée le 4 décembre 2020, est donc intervenue alors que la quasi-
totalité des effectifs était déjà en poste. Elle a donc été sans effet majeur sur les effectifs.
Évolution des effectifs au 31 décembre de chaque année entre 2018 et 2021
8
(total des 6 sociétés dé
légataires de l’échantillon)
En nombre d’agents
2018
2019
2020
2021
Permanents
380
390
380
373
Saisonniers
1 310
1 270
1 262
1 332
Total
1 690
1 660
1 642
1 705
Nota les chiffres au 31/12/2021 et en ETP n’ayant pas été fournis par tous les
délégataires, au cours de
l’instruction, ils seront complétés à la contradiction.
Source : sociétés délégataires
8
L’effectif étant indiqué au
31/12
, pour l'exercice 2021 il s’agit de l’effectif de la saison 2021/2022.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
8
La masse salariale a en revanche diminué de près de moitié (de - 47 % à - 70 %). Trois
éléments expliquent cette situation :
Une part importante des salariés a été placée en chômage partiel du fait de l’absence
d’activité, qui a été compensée par l’État.
Une partie des effectifs a été maintenue en activité,
notamment les permanents, pour continuer d’assurer le fonctionnement de l’entreprise, mais
également une fraction plus ou moins importante des saisonniers pour assurer la maintenance
des équipements, la sécurité et une partie des activités maintenues sur la station (ski de fond,
luge, certaines remontées ouvertes aux publics autorisés, etc.). Certaines sociétés
délégataires proposent en outre
à leurs saisonniers des contrats de travail jusqu’à la fin de
l’hiver, incluant une clause de prolongation en cas d’enneigement suffisant permettant de
maintenir l’exploitation de la station, laquelle n’a pas été activée, diminuant d’autant la
masse salariale ;
Par ailleurs, les entreprises de moins de 250 salariés ont bénéficié d’une exonération des
cotisations sociales. Cinq sociétés de l’échantillon
(sauf la SAP) en ont bénéficié ;
Enfin
,
à l’exception d’un délégataire
9
, aucun intéressement
n’a été versé aux salariés sur
l’exercice 2021, celui
-
ci étant assis sur le chiffre d’affaires ou sur le niveau de l’EBE
10
.
Évolution de la masse salariale entre 2019 et 2021
Source : sociétés délégataires
9
La SERMA a versé 634 k€ à 324 bénéficiaires.
10
Cas de la SETAM.
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
30 000
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
2019
2020
2021
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
9
1.2.2
Le maintien d’une activité malgré la fermeture
Le volume des « achats et charges externes » (qui regroupent
l’essentiel des dépenses
d’exploitation courant
:
rémunération d’intermédiaires
,
honoraires, primes d’assurances,
entretien et réparation des biens et équipements, publicité, loyers et charges locatives
) a peu
diminué entre 2019 et 2021, malgré la fermeture des remontées mécaniques sur toute la saison
d’hiver. Trois raisons expliquent cette situation
:
L’existence de coûts fixes importants.
Ceux-
ci s’expliquent par l’obligation règlementaire
de maintenance de certains équipements ainsi que par l’obligation imposée aux délégataires
de remontées mécaniques de maintenir la sécurité des pistes. Le décret prévoit en effet
l’inaccessibilité des rem
ontées mécaniques mais pas la fermeture des stations qui ont
continué d’accueillir du public. Sur ces postes essentiels, les charges ont donc peu diminué
;
La décision, à la demande des délégants, de développer d’autres activités ne nécessitant pas
l’usage
des remontées mécaniques afin de maintenir une partie de l’activité de la station et
qui ont généré des coûts qui n’existent pas en situation normale (création de pistes de ski de
fond ou de parcours en raquette par exemple) ;
Le choix des délégataires de maintenir la station, pour le cas où le Gouvernement aurait
autorisé la réouverture des remontées mécaniques en cours de saison. Dans cette optique, les
délégataires ont notamment assuré la production de la totalité de la neige de culture pour la
saison
et le damage des pistes. L’incertitude sur la durée de la fermeture des remontées
mécaniques a donc induit des surcoûts qui n’auraient pas eu lieu si la fermeture des
remontées pour l’intégralité de la saison avait été décidée en début de saison.
Parmi les
charges qui ont diminué au cours de l’exercice, figurent les fluides
(principal
poste des « achats de marchandises ») et les dépenses liées à certains contrôles règlementaires
des équipements, dont les exploitants ont obtenu la suspension au titre de leur fermeture.
Enfin, les impôts et charges dont se sont acquittés les délégataires (13 % de leurs
charges d’exploitation en moyenne) ont été divisé
s par cinq entre 2019 et 2021, en raison de
l’absence d’impôt sur les sociétés pour celles qui ont eu un résultat négatif, et de l’absence de
redevances aux délégants, qui sont assises sur le chiffre d’affaires.
2
UN SOUTIEN NÉCESSAIRE
Face aux conséquences financières de la fermeture des remontées mécaniques
(effondrement du chiffre d’affaires, maintien à un niveau
élevé des charges), un soutien
financier aux sociétés de remontées mécaniques était nécessaire. Il a essentiellement été porté
par l’État, sous la forme de subventions directes (131,9 M€
pour les six sociétés auditées) ou
de prêts garantis (7
,09 M€
11
).
11
Non compris les prêts accordés aux groupes auxquels certaines sociétés sont affiliées, comme la Compagnie des
Alpes, au profit de la SAP et de la STGM.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
10
Le principal dispositif financier par subventions, spécifique au secteur des remontées
mécaniques, a été le dispositif dit « coûts fixes
», sous forme d’une subvention égale à 49 % du
chiffre d’affaires de référence de l’exploitant (sur la base des années 201
7-2019), pour la
période de fermeture. Instaurée par le décret n° 2021-311 du 24 mars 2021, cette aide a
représenté, pour les six sociétés auditées, 111,6
M€, soit 8
5 % du total des subventions reçues.
Les autres dispositifs d
’aides
ne sont pas spécifiques au secteur des remontées
mécaniques :
prise en charge du chômage partiel (13,9 M€), des exonérations de cotisations
sociales (3,8 M€) et du fonds de solidarité
(1,4 M€).
Le soutien financier des collectivités locales aux sociétés délégataires de remontées
mécaniques auditées a été marginal. Trois des six sociétés auditées, situées dans le département
de la Savoie (SAP, SETAM et STGM
), ont bénéficié d’une exonération de redevance, relative
au Plan Qualité Routes du département de la Savoie, dite « RN 90 »
12
en application de la
délibération prise le 28 mai 2021 par le conseil départemental
13
, pour un montant de 980
k€.
Par ailleurs, une société délégataire, la SERMA, a bénéficié d’un abattement de cotisation
foncière des entreprises (CF
E), pour un montant de 128 k€.
S’agissant des aides hors subventions, des prêts garantis par l’État (PGE) ont été
souscrits par deux sociétés délégataires sur les six auditées, pour un montant total de 7,09 M€
14
.
Figure 3 : Total des aides versées aux stations auditées
*PGES :
Prêt garanti par l’État Saison.
Source : sociétés délégataires
12
Le Plan Qualité Route du département concerne un programme spécifique de protection des routes de montagne
auquel contribue les collectivités supports de stations de sports d’hiver et
les sociétés exploitant des remontées
mécaniques et/ou gérant un domaine skiable.
13
Lettre du 29 février 2021
du Président du Conseil départemental de la Savoie annonçant l’annulation de la
contribution au Plan Qualité Route lors de la réunion de la commission permanente du 12 mars 2021. Compte tenu
de l’absence totale d’exploitation des remontées mécaniques pour la saison 2020/2021, le département de la Savoie
a décidé d’annuler les recettes prévues à cet effet dans son budget, par la
délibération du 21 mai 2021.
14
Ce montant ne comprend pas les prêts contractés par la Compagnie des Alpes pour l’ensemble du groupe, dont
ont bénéficié ses filiales de l’échantillon (SAP et STGM).
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
11
2.1
Un dispositif spécifique au secteur des remontées mécaniques
En décembre 2021, dans le cadre d’une négociation entre le ministère chargé du
tourisme
15
et les professionnels du ski représentés par le syndicat professionnel Domaines
skiables de France (DSF), une aide exceptionnelle pour le secteur des remontées mécaniques a
été mise en œuvre à raison de la fermeture totale des domaines skiables p
our la saison 2020-
2021, par décret n°2021-310 du 24 mars 2021
16
. Ce dispositif dit « coûts fixes » est opérationnel
depuis le 31 mars 2021, et prend la forme d’une subvention.
La subvention permet de compenser 70 % des charges fixes des exploitants, elles-
mêmes estimées à 61 % du chiffre d’affaires, auxquelles sont ajoutés 9% du chiffre d’affaires
(soit un total de 70 %) au
titre de la sécurisation des pistes. Le montant de l’aide n’est pas
plafonné. Cette estimation a été fournie par DSF sur la base d’un é
chantillon de 42 comptes de
résultats de sociétés délégataires de remontées mécaniques, toutes tailles confondues.
Estimation des coûts fixes des sociétés de remontées mécaniques en pourcentage du
chiffre d’affaires
% du CA
dont % fixe
charges fixes en % du CA
Personnel
33 %
50 %
17 %
Outils de travail
21 %
100 %
21 %
Energie
6 %
70 %
4 %
Contributions
13 %
10 %
1 %
Autres charges
20 %
90 %
18 %
Part de charges fixes
61 %
Source : Domaines skiables de France
Le montant de la subvention est
donc égal à 49 % du chiffre d’affaires de référence de
l’exploitant (calculé sur la base des exercices clos pour 2017, 2018 et 2019) pour la période de
fermeture. Cette aide a été versée aux sociétés délégataires entre avril et juin 2021.
Ce dispositif con
stitue une aide d’État, dérogation rendue possible sur le fondement
du b du 2 de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Sur cette base,
la Commission européenne a donné, pour ce dispositif spécifique aux remontées mécaniques,
15
Avec le concours de la Direction Générale des Entreprises (DGE).
16
Décret instituant une aide visant à compenser les coûts fixes non couverts des entreprises dont l'activité est
particulièrement affectée par l'épidémie de Covid-19, modifié par les décrets n°2021-1086 en date du 16 août 2021,
n°2021-1338 en date du 14 octobre 2021, n°2022-221, n°2022-222 et n°2022-223 du 21 février 2022. Le décret
n° 2022-111 du 2 février 2022 institue une aide dite « coûts fixes consolidation ».
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
12
son accord le 19 mars 2021, moyennant l’établissement d’une attestation de non
surcompensation financière
17
.
Après présentation préalable du dispositif par les préfectures de département et le
commissaire au massif des Alpes
18
, les sociétés éligibles ont eu accès à un guichet unique sous
la forme d’une plateforme dématérialisée. Une simple déclaration des éléments comptables
pour le calcul de la base de la subvention a été requise avant instruction, engagement et
paiement de la dépense par le commissariat au massif des Alpes. Un premier versement de
subvention a eu lieu au mois d’avril pour les sociétés ayant rempli leur attestation avant le
1
er
mai 2021, et, au-delà, un versement unique (ou un deuxième versement) aux mois de mai
ou juin.
La chambre souligne
la simplicité de la procédure ainsi mise en œuvre et la rapidité avec
laquelle cette subvention a été versée aux sociétés éligibles auditées, malgré le nombre de
sociétés éligibles (89) traitées par le commissariat au massif des Alpes sur les Savoie.
Subventions versées pour le dispositif « coûts fixes » (2020-2021) par société
bénéficiaire (total 111,6 M€)
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Dispositif coûts fixes
34 567
23 498
26 823
18 229
4 160
4 276
Source : sociétés délégataires
2.2
Le bénéfice
des dispositifs communs d’aides
2.2.1
La prise en charge du chômage partiel
La mise en œuvre du chômage partiel pour les
entreprises touchées par les mesures de
fermeture liées à la crise sanitaire a permis aux sociétés de remontées mécaniques de recevoir
de
l’Agence de services et de paiement (ASP) une allocation couvrant 70 % de la rémunération
antérieure brute du salarié (soit environ 84 % du salaire net), dans la limite d’une rémunération
de 4,5 SMIC, avec un plancher à 8,37 € par heure, quel que soit l’effectif de l’entreprise.
L’intégralité des personnes employées par les sociétés de remontées mécaniques l’année
précédant la fermeture des stations ont bénéficié du chômage partiel, la convention collective
17
L’accord du 19 mars 2021 de la Commission européenne précise que
:
« Les exploitants dont la comptabilité est
tenue selon les règles du droit public devront transmettre une attestation du directeur départemental des finances
publiques ou, le cas échéant, du directeur régional des finances publiques, établie sur la base d’états déclaratifs
produits
par l’ordonnateur et visés par le comptable public, contenant l’EBE pour l’année 2019 et l’EBE pour
l’année 2021 intégrant l’ensemble des aides versées à l’exploitant
»
.
18
Les commissariats aux massifs sont des antennes du Commissariat Général à l’Egalité
des Territoires (CGET),
placés sous l’autorité des préfets de région coordonnateurs de massif. S’agissant des Alpes, le coordonnateur de
massif est le préfet de région PACA (y compris pour les départements de Rhône-Alpes). Le commissariat de massif
est situé à Grenoble, avec une antenne à Gap.
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
13
du secteur prévoyant une reconduction automatique du contrat de travail, et le ministère du
travail ayant indiqué par voie de presse, le 15 novembre 2021, que les sociétés de remontées
mécaniques étaient invitées à recruter malgré la fermeture prévue. Le contrôle
a posteriori
des
bases déclaratives est effectué par la DDETS à travers des plans de contrôle par secteurs
d’activité, le secteur des remontées mécaniques n’ayant pas été considéré comme prioritaire.
Parallèlement au dispositif de prise en charge du chômage partiel, le Fonds National
pour l’Emploi
(FNE-Formation), préexistant à la crise covid, a été réajusté et proposé aux
salariés en activité partielle sous la forme de formations professionnelles. Une seule des six
sociétés auditées (la SERMA) a sollicité ce fonds au bénéfice de ses salariés.
Montant des allocations versées au titre du chômage partiel (2020-2021) par société
bénéficiaire (total 13,9 M€)
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Chômage partiel
5 660
2 490
1 827
2 403
691
859
Source : sociétés délégataires
Le dispositif coûts fixes estimait que la part incompressible des dépenses de personnels
était de 50 %, comprenant une partie des personnels permanents affectés à la gestion de
l’entreprise, ainsi qu’une part des saisonniers affectés, notamment, aux missions de sécurité,
qui doivent être maintenues même en cas de fermeture des pistes. Or, le chômage partiel a
couvert, dans cinq cas sur six, plus de 50 % des dépenses de personnel des sociétés délégataires
auditées. Ainsi, le dispositif coûts fixes a compensé une partie des charges de personnel déjà
compensée par le chômage partiel (double compensation).
Prises en charge des dépenses de personnels 2020-2021
En %
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Part des dépenses de
personnels compensées
par le chômage partiel
51 %
56 %
70 %
47 %
67 %
66 %
Part des dépenses de
personnels compensées
par l'aide "coût fixes"*
35 %
35 %
35 %
35 %
35 %
35 %
Total de la masse
salariale compensée
par
les pouvoirs publics
86 %
91 %
105 %
82 %
102 %
101 %
*70 % de 50 % des coûts fixes salariaux pris en charge par le dispositif « coûts fixes ».
Source : sociétés délégataires
Comme l’illustre le tableau ci
-dessus, trois sociétés ont vu leur masse salariale
compensée au-delà de 100
% des dépenses exposées, par l’addition des deux aides (chômage
partiel et coûts fixes).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
14
2.2.2
Les exonérations de cotisations sociales
Les exonérations de cotisations sociales durant la période de crise covid ont porté sur
les cotisations de sécurité sociale, les cotisations d’assurance
-chômage, la contribution
solidarité auto
nomie et la contribution au Fonds national d’aide au logement.
L’exonération peut être appliquée à tous les salariés, quel que soit le montant de leur
rémunération, mais uniquement pour la partie inférieure à 4,5 fois le SMIC. L’aide au paiement
des cotisa
tions et contributions sociales est égale à 20 % du montant des revenus d’activité,
avec un plafonnement initialement fixé à 800 k€ par société, puis relevé à 1,8 M€.
Ces exonérations ont concerné, pour les remontées mécaniques, les périodes d’emploi
de décembre 2021 à janvier 2022 pour les entreprises de moins de 250 salariés, soit cinq des
six délégataires objets de l’audit.
L’exonération est accordée sur une base déclarative, via les déclarations sociales
nominatives des sociétés. Cette procédure simpl
e et déclarative n’a pas impliqué de charge de
travail particulière pour les sociétés bénéficiaires.
Le contrôle des bases déclaratives est effectué par l’URSSAF. L’ACOSS, qui a dans un
premier temps donné consigne, en mars 2020, de suspendre son activité habituelle de contrôle
des exonérations, a repris cette activité mi-
septembre 2020. Toutefois, l’activité des remontées
mécaniques, comme les autres secteurs «
particulièrement touchés par la crise
» n’a pas été
considérée par l’ACOSS comme relevant d’un s
ecteur prioritaire de contrôle, ce qui explique
l’absence de contrôle sur les sociétés auditées.
Montant des exonérations de charges sociales (2020-2021)
par société bénéficiaire (total 3,8 M€)
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Exonérations de
charges sociales
0
800
1 020
1 302
222
493
Source : sociétés délégataires
Comme pour le chômage partiel, le risque de double compensation des charges de
personnel existe avec le cumul du dispositif coût fixes et les exonérations de cotisations
sociales.
2.2.3
Le fonds de solidarité
Le fonds de solidarité a très tôt été mis en œuvre pour aider les entreprises touchées par
la crise sanitaire. Encore actif durant l’hiver 2020 malgré l’existence d’un dispositif particulier
pour le secteur des remontées mécaniques (
l’aide «
coût fixe »), cette aide a été sollicitée par
seulement trois des six sociétés délégataires auditées. S’agissant du secteur des remontées
mécaniques, cette aide est calculée sur une perte de chiffre d'affaires plafonnée à 10 000 € ou à
15 % du CA (ce taux pouvant être porté à 20 % en cas de perte supérieure à 70 % de CA), dans
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
15
la limite de 200 000 € par mois.
L’aide est versée sur la base d’une simple attestation déclarative
sur le portail Internet de la DGFiP.
Le fonds de solidarité a d’abord été
conçu comme une mesure d’urgence à destination
des TPE, micro-entrepreneurs et professions libérales touchés par les restrictions sanitaires.
Dans l’attente du dispositif coûts fixes, trois des sociétés délégataires auditées ont jugé pertinent
de la solliciter.
La chambre note que ce fonds de solidarité cumule avec l’aide coûts fixes. Or, l’accord
de la Commission européenne du 19 mars 2021 concernant ce dernier dispositif disposait que :
«
les autorités françaises confirment que cette aide n’est pas cumul
able avec une autre aide
portant sur les mêmes coûts éligibles
». Dans ces conditions, le risque existe que les sociétés
délégataires soient amenées à devoir reverser les montants perçus sur le fonds de solidarité.
Montant versée au titre du fonds de
solidarité par société bénéficiaire (total 1,4 M€)
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Fonds de solidarité
0
0
400
0
200
800
Source : sociétés délégataires
2.2.4
Le soutien des collectivités territoriales
Le soutien de la part des collectivités territoriales au secteur des remontées mécaniques
durant la crise a été marginal, l’État ayant pris en charge la quasi
-totalité des aides reçues par
les sociétés du secteur.
Une société délégataire a bénéficié, de la part, de la commune sur laquelle elle est
établie,
d’un abattement de cotisation foncière des entreprises (CFE) pour un montant total de
128 k€, la SERMA.
Par ailleurs, sur le département de la Savoie, un accord ancien entre le conseil
départemental et les stations de ski aboutit à faire contribuer celles-ci à une prise en charge
partielle des navettes de transport et des frais engagés pour la mise en sécurité de la route
nationale 90 (RN 90). Le conseil départemental a décidé, par délibération du 21 mai 2021,
d’annuler cette prise en charge pour les sociétés du secteur pour l’année de fermeture des
remontées mécaniques.
Aides des collectivités locales (montant total : 1,108
M€)
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Abattement CFE
0
0
0
128
0
0
Exonération de charges
départementales
400
260
320
0
0
0
Source : sociétés délégataires
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
16
Ces aides n’étaient pas nécessaires dans la mesure où les sociétés délégataires ont
bénéficié du dispositif coûts fixes, qui a vocation à prendre en compte ces charges. De ce fait,
la chambre
considère que leur attribution n’est possiblement pas compatible avec l’accord de
la Commission européenne du 19 mars 2021 susvisé. Un risque existe donc pour les sociétés
délégataires concernées de devoir reverser les sommes perçues, comme pour les aides versées
au titre du fonds de solidarité.
2.2.5
Les prêts garantis par l’État (PGE)
Le prêt garanti par l’État (PGE) est un prêt de trésorerie pouvant couvrir jusqu’à trois
mois de chiffre d’affaires et bénéficier d’une garantie de l’État à hauteur de 70 à 90 %, selon la
taille de l’entreprise (90
% s’agissant des sociétés auditées), les banques conservant ainsi une
part du risque associé.
Un dispositif analogue supplémentaire, dit « PGE Saison » (PGES) a été ouvert
spécifiquement pour les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, de
l’événementiel, du sport, du loisir et de la culture, particulièrement touchées par la crise
sanitaire, avec la même procédure d’attribution. Le PGES permet simplement de substituer au
plafond s’appliquant normalement aux PGE un plafond calculé comme la somme des
trois
meilleurs mois de chiffre d’affaires du dernier exercice clos.
La procédure pour les entreprises concernées consiste en une demande via un partenaire
bancaire pour faire une demande de prêt. La banque examine les critères d’éligibilité, puis
donne un pré-accord pour un prêt. La société peut alors solliciter en ligne un prêt auprès de
BpiFrance
19
, accordé par l'établissement bancaire. Les sociétés délégataires bénéficiaires dans
le cadre de l'audit n'ont pas relevé de difficultés particulières pour la simplicité et la rapidité de
ce dispositif.
Parmi les sociétés délégataires concerné
es par l’audit, quatre ont activé le dispositif du
PGE, et une le PGES. Pour deux d’entre elles (la SAP et la STGM) le dispositif a été activé
directement par le groupe (la Compagnie des Alpes), qui assure la gestion de la trésorerie de
ses filiales.
La SAMSO a quant à elle souscrit trois prêts pour un total de 4,6
M€ (dont 2,3 M€ au
titre du PGES), en cours de remboursement, tandis que la SOREMET a souscrit un PGE de
2,475 M€, intégralement remboursé le 22
décembre 2021.
Les deux autres sociétés (SETAM et
SERMA) n’ont pas utilisé ce dispositif.
19
Sur la plateforme en ligne sur http://attestation-pge.bpifrance.fr.
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
17
Montant des prêts garantis par l’État (2020
-2021) (total 7,1
M€)
20
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Prêts garantis par
l'État (PGE)
souscrits
Les PGE sont gérés au
niveau du groupe
0
0
2 314
2 475
Prêts garantis par
l'État Saison (PGES)
souscrits
0
0
2 300
0
Source : sociétés délégataires
3
UN RÉGIME D’AIDES FA
ISANT LE CHOIX DE LA
SIMPLICITÉ AU DÉTRIMENT DE LA PROPORTIONNALITÉ
Le dispositif des aides publiques mis en place pour les sociétés de remontées
mécaniques s’est avéré positif pour leur situation financière et simple dans sa mise en œuvre.
Mais leur calibrage est discutable, des effets d’aubaine pouvant apparaitre pour certaines
stations.
3.1
Des effets positifs sur la situation financière des sociétés
Malgré un effondrement du chiffre d’affaires en 2021, l’excédent brut d’exploitation
(EBE), qui présente le solde des produits de gestion moins les charges de gestion, représente
encore 55 % de la moyenne 2017-2019 du CA grâce aux diverses aides ou allègements de
charges dont ont bénéficié ces sociétés.
Si aucune des sociétés délégataires n’a enregistré de perte au titre de la saison
2019-2020, leur résultat net a sensiblement diminué. Sur la saison 2021, marquée par un quasi
arrêt de l’activité, quatre d
es six sociétés ont enregistré des pertes. Deux sociétés sont toutefois
parvenues à maintenir un résultat positif, quasiment égal au résultat 2020 pour l’une d’entre
elles.
20
Dont 2,3 M€ de PGE Saison pour la SAMSO.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
18
Évolution du chiffre d’affaires, de l’EBE et du résultat net sur la période
2017-2019 - 2021
En K€
EBE
Résultat net
Résultat net
2021 /
CA17-19*
Moy. 17-19
2020
2021
Moy.17-19
2020
2021
SAP
27 544
23 286
11 967
8 559
5 607
- 1 824
(2,4 %)
STGM
24 944
16 354
11 913
8 022
2 776
- 674
(1,3 %)
SETAM
25 092
17 510
17 125
12 210
5 756
5 780
10 %
SERMA
17 749
17 343
10 833
5 841
5 066
2 005
5,2 %
SAMSO
2 463
1 871
1 433
379
240
- 258
(2,9 %)
SOREMET
2 516
1 778
1 424
898
396
- 984
(10,7 %)
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
Ce soutien a été utile
pour un secteur d’activité fortement capitalistique. Les actifs que
les sociétés possèdent ou qu’elles exploitent, dans le cadre d’une délégation de service public,
sont constitués très majoritairement d’équipements techniques de for
te valeur, nécessitant des
investissements réguliers et importants pour maintenir le niveau de compétitivité des stations.
De ce fait, la plupart des délégations prévoient des investissements contractuels pour les
exploitants.
L’investissement est priorit
airement financé par les marges dégagées en exploitation,
mesurées par la capacité d’autofinancement. La capacité d’autofinancement a diminué pour
toutes les des sociétés auditées en moyenne de 34 % (de 20 % à 49 %), mais dans une mesure
moindre par rappor
t à la diminution du chiffre d’affaires, de l’EBE et du résultat. La capacité
d’investissement des sociétés délégataires auditées e
st donc restée largement positive grâce à
l’aide «
coûts fixes ».
Évolution de la CAF
2019
2020
2021
Évolution
2019/2021
SAP
19 425
16 846
10 190
- 48 %
STGM
13 455
9 024
8 017
- 40 %
SETAM
19 195
15 957
15 441
- 20 %
SAMSO
1 920
1 705
1 288
- 33 %
SOREMET
2 506
1 990
1 271
- 49 %
SERMA
13 260
13 143
9 620
- 27 %
Total
69 761
58 665
45 827
- 34 %
Source : sociétés délégataires
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
19
En regard, le niveau des investissements effectivement réalisés par les sociétés de
l’échantillon a très fortement diminué. Plusieurs raisons peuvent contribuer à expliciter cette
situation. Le contexte de la crise n’a notamment pas été favorable à l’engagement de
programmes d’investissements importants. Certains investissements contractuels ont pu
également être décalés, en accord avec les délégants, afin de permettre aux sociétés de se
focaliser en premier lieu sur la gestion des conséquences directes de la crise. Enfin, des éléments
exogènes (augmentation du coût des matériaux, de l’énergie, difficultés d’approvisionnement,
etc.) ont également pu contribuer à rendre plus difficile la réalisation des investissements.
Évolution des investissements
SAP
STGM
SETAM
SAMSO
SOREMET
SERMA
21
2020
10 253
9 658
41 975
921
1 905
17 975
2021
16 273
6 092
11 169
608
640
2 224
Ratio 20/21
159 %
- 37 %
- 73 %
- 34 %
- 66 %
- 88 %
Source : sociétés délégataires
CAF et niveau des investissements-2021
Source : sociétés délégataires et liasses fiscales
retraitement CRC
21
La SERMA précise que le montant de ses investissements, en 2020, est exceptionnel, correspondant à la
construction de deux télésièges et la réalisation d'une piste de ski sur deux à trois années. Elle précise qu’il ne peut
être comparé au rythme des investissements usuels de la société, de l’ordre de 2,5
M€ annuels. Elle considère que
la contraction réelle des investissements entre 2020 et 2021 n'est en réalité que de 250 à 300 K€, soit environ
10 %. Aucun investissement structurant n'était programmé en 2021. Par contre, de nouveaux investissements
struct
urants sont prévus en 2022 et 2023 à hauteur de 15 M€.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
20
3.2
Des aides qui auraient pu être mieux calibrées
Le dispositif « coûts fixes
» avait pour objectif de compenser, en l’absence d’activité,
70 % des coûts fixes des délégataires, c’est
-à-dire les charges auxquelles ceux-ci devaient
obligatoirement faire face pour continuer à maintenir en l’état leur outil
de production.
Les coûts fixes ont été estimés d’un commun accord entre la profession et l’État comme
représentant 70 % du montant du chiffre d’affaires des sociétés, soit 49 % du chiffre d’affaires
moyen 2017-2019 pendant la période de fermeture des stations, de novembre 2020 à avril 2021.
Ce taux a été défini pour toutes les sociétés du secteur, et sans plafond, alors même que la
structure des coûts d’une petite et d’une grande entreprise ne sont pas les mêmes.
Ainsi, le montant de l’aide «
coût fixe » a couvert au minimum 70 % des charges
d’exploitation des délégataires et jusqu’à 123 %, alors même que les charges d’exploitation
réelles de l’exercice ne se sont pas limitées aux charges fixes mais ont inclus des dépenses
supplémentaires.
Part des charge
s de gestion 2021 compensées par l’aide «
coût fixe »
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
TOTAL
Subvention du dispositif
coût fixe (A)
34 567
23 498
26 823
18 229
4 160
4 276
111 553
Charges d’exploitation
2021 (B)
37 358
26 961
21 896
17 809
5 122
6 200
115 346
% subvention / charges
(C=A/B)
93 %
87 %
123 %
102 %
81 %
69 %
97 %
Montant de la sub°
calculée sur la base de 70
% des charges 2021
(D=B*70%)
26 151
18 873
15 327
12 466
3 585
4 340
80 742
Économie (+) /coût supp.
(-) générée si le dispositif
avait couvert 70 % des
charges réelles (E = A-D)
8 416
4 625
11 496
5 763
575
- 64
30 811
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
Si l’aide «
coûts fixes
» n’a pas abouti à une surcompensation au sens du décret et de
l’arrêté qui l’ont instituée, la chambre constate
que cinq des six sociétés de l’échantillon
contrôlé, dont les quatre délégataires de « très grandes stations », ont vu leurs charges réelles
2021 compensées au-delà du seuil prévu par le dispositif, et même au-delà de 100 % pour deux
d’entre elles, ce qui leur a permis de dégager un résultat bénéficiaire malgré l’absence
d’exploitation. Ces sociétés n’ont, dès lors, assumé
qu’un risque d’exploitation
limité voire nul.
SOUTIEN APPORTÉ AUX SOCIÉTÉS GÉRANT DES REMONTÉES MÉCANIQUES PENDANT LA CRISE COVID-19
21
Une stricte application du dispositif couvrant 70 % des charges réelles 2021, qui
devaient correspondre aux charges fixes des sociétés délégataires, aurait représenté une
économie pour les finances publiques
de 30,8 M€
22
.
La chambre constate donc l’absence de proportionnalité entre le volume des aides
accordées aux plus grandes sociétés délégataires de l’échantillon par rapport à leurs charges
réelles, qui a créé un effet d’aubaine contraire à l’esprit du dispo
sitif.
Ce constat remet en cause le calibrage même du dispositif « coûts fixes ». Le choix
aurait pu être fait de faire couvrir par le contribuable les seules charges d’exploitation réelles,
en laissant à la charge des sociétés délégataires le coût des investissements. Cette aide
compensant les charges de gestion à l’euro près, sans générer d’EBE (donc à EBE nul), aurait
été moins coûteuse. Un dispositif à EBE nul, qui aurait permis de compenser aux sociétés leur
déficit d’exploitation, représentait un coût
de 56,9
M€ soit une économie de 5
4,7
M€ par rapport
au dispositif mis en œuvre.
Coût du dispositif à EBE nul
En k€
SAP
STGM
SETAM
SERMA
SAMSO
SOREMET
Total
EBE 2021 réel (A)
11 967
11 913
17 125
10 833
1 433
1 424
54 695
Subv° du dispositif
coût fixe (B)
34 567
23 498
26 823
18 229
4 160
4276
111 553
EBE sans aide coût
fixe (C = A-B)
- 22 600
- 11 585
-9 698
- 7 396
- 2 727
- 2 852
- 56 858
Subv° du dispositif à
EBE nul (D)
22 600
11 585
9 698
7 396
2 727
2 852
56 858
Economie générées
par le dispositif à EBE
nul (E = B-D)
11 967
11 913
17 125
10 833
1 433
1 424
54 695
Source : liasses fiscales
retraitement CRC
Enfin, la chambre a analysé si les sociétés auraient eu la capacité à assumer, sans l’aide
« couts fixes », la perte liée à une
année sans activité. Cela implique d’examiner la solidité
financière des sociétés sur le long terme au travers de leurs situations bilancielles, en remettant
en perspective les résultats d’un exercice.
Les plus grandes sociétés avaient la capacité à ne pas
recevoir d’aides directes.
En effet
certaines auraient vu leurs fonds propres se réduire
, mais cela n’a
urait pas remis en cause leur
solvabilité. De plus, les saisons suivantes (comme la saison 2021-2022) doivent permettre de
reconstituer rapidement les capitaux propres.
22
Soit le total de la ligne E du tableau 12. Seule une société délégataire de l’échantillon aurait bénéficié d’un
montant d’aide supérieur dans cette hypothèse.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
22
Les aides versées ont même pu, paradoxalement, renforcer les fonds propres de certaines
sociétés délégataires, alors qu’il n’y avait eu aucune activité. C’est le cas pour la SETAM dont
le bénéfice réalisé en 2021 (5 780
k€) a permis d’aug
menter le niveau des capitaux propres.
Dans ce cas, la SETAM aura donc significativement amélioré son bilan grâce aux dispositifs
d’aide mis en place par l’État, au premier rang desquelles le dispositif «
coûts fixes ».
Ainsi, l’aide coût fixe, cumulée aux dispositifs d’aides non
-spécifiques au secteur, a créé
un effet disproportionné pour les délégataires des plus grandes stations, qui ont par ailleurs la
meilleure solidité financière. Pour les deux plus petites sociétés de l’échantillon, l’aide a en
revanche pleinement joué son rôle en évitant une dégradation excessive de leur bilan qui aurait
fait peser sur elles un risque de faillite.
Figure 4 : Chiffres-
clefs de l’audit flash sur le soutien apporté aux sociétés gérant des rem
ontées
mécaniques pendant la crise COVID-19 dans les Alpes du Nord
Source : sociétés delégataires
retraitement CRC
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