ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LE CHANTIER
DE LA CATHÉDRALE
NOTRE-DAME
DE PARIS
L’achèvement des travaux
de sauvegarde,
les enjeux de la restauration
et les défis de la réouverture
Deuxième bilan
Rapport public thématique
Octobre 2022
•
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Délibéré
..........................................................................................................
7
Synthèse
.........................................................................................................
9
Suivi des recommandations de 2020
...........................................................
13
Introduction
..................................................................................................
15
Chapitre I
L’achèvement des travaux de
sauvegarde
..............................
17
I - Des travaux encadrés par la législation sur les monuments historiques
..........
17
II - Des travaux de sauvegarde achevés pour un coût maîtrisé
......................
19
A - Un montant inférieur au coût révisé
...............................................................
19
B -
La clôture des marchés antérieurs à l’incendie et les
marchés de la phase
de sécurisation et de conservation
...........................................................................
21
III - Des travaux affectés par la pollution au
plomb et l’absence
de réglementation adaptée
..............................................................................
28
A -
Depuis 2019, l’impact sur le chantier du plomb lié à
l’incendie
.....................
28
B -
L’absence de normes et les enjeux
pour la restauration
des monuments historiques
...................................................................................
29
IV - Un établissement public adapté à ses missions
...........................................
31
A - Une pratique équilibrée de la gouvernance
.....................................................
31
B - Une organisation interne déclinant les missions de
l’EP
-RNDP
.....................
34
C -
Les comptes de l’établissement
......................................................................
37
Chapitre II La restauration de la cathédrale : des dons
et des besoins de financement supérieurs aux dépenses
directement liées aux conséquences de l’incendie
.....................................
45
I -
Des dons assurant l’essentiel du financement de l’établissement
public et de ses missions
................................................................................
45
A - Des promesses de dons concrétisées et de nouveaux concours
.......................
45
B -
Le financement de l’établissement public par
les dons reçus par les fondations
.........
47
II - Le respect des obligations légales par l'EP-RNDP et les fondations
........
51
A -
L’action des fondations
..................................................................................
51
B -
Les réponses de l’établissement public à l’obligation d’inform
ation
des donateurs
........................................................................................................
53
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COUR DES COMPTES
4
III - L'engagement et le financement des travaux de restauration
..................
55
A - Les études préalables aux travaux de restauration
..........................................
55
B - Le budget prévisionnel des travaux de restauration pour assurer
la réouverture en 2024
..........................................................................................
57
C - La passation des premiers marchés
.................................................................
60
IV - Des disponibilités pour le traitement des pathologies antérieures
requérant l’accord des fondations et des mécènes
..........................................
62
A - Le traitement des pathologies antérieures
.......................................................
62
B -
L’enjeu du financement du traitement des
pathologies antérieures à
l’incendie
..........
63
Chapitre III La réouverture de la cathédrale en 2024 :
une nécessaire clarification
............................................................................
69
I - Une modification du cadre de gestion de la cathédrale et ses conséquences
........
70
A - La modification temporaire du cadre de gestion domanial
.............................
70
B - Les études pour la réouverture de la cathédrale
..............................................
71
II - Le sujet majeur de la sécurité
...................................................................
73
III -
Préparer un cadre d’accueil à la hauteur de
ce monument
prestigieux et répondre à la problématique de sa surfréquentation
................
75
A -
Une absence de vision d’ensemble
.................................................................
75
B - Un aménagement du parvis à intégrer à un schéma global
.............................
77
Liste des abréviations
..................................................................................
81
Annexes
.........................................................................................................
83
Réponses des administrations et organismes concernés
.........................
109
•
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Procédures et méthodes
Les rapports de la Cour des comptes
sont réalisés par l’une
des six
chambres thématiques
1
que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres et/ou plusieurs chambres régionales ou
territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics :
l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusi
ons tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ;
elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires e
t définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, l
a publication d’un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Leurs réponses
sont présentées en annexe du rapport publié par la Cour.
1
La Cour comprend aussi une chambre contentieuse, dont les arrêts sont rendus
publics.
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COUR DES COMPTES
6
La présente enquête a été pilotée par une formation inter-chambre (FIC)
créée par arrêté du 25 septembre 2019 et chargée de réaliser périodiquement une
enquête sur les opérations de reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris
et leur financement, qui réunit les première, troisième, quatrième et cinquième
chambre de la Cour. La FIC a procédé au premier semestre de 2022 à un contrôle
de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la
cathédrale Notre-
Dame de Paris, qui assure la maîtrise d’ouvrage des travaux
depuis le 1
er
janvier 2020, elle a également conduit ses investigations auprès des
services du ministère de la culture exerçant le contrôle scientifique et technique et
assurant la restauration des objets mobiliers appartenant à l’État et des organismes
désignés par la loi pour assurer la collecte des dons au titre de la souscription
nationale : la Fondation de France, la Fondation du patrimoine, la Fondation
Notre Dame et le Centre des monuments nationaux, sur le fondement des articles
L. 111-3, L. 111-9 et L. 111-10 du code des juridictions financières.
Une visite du chantier de Notre-Dame a été effectuée par les
membres de la FIC, laquelle a également procédé à l’audition des
responsables du ministère de la culture, des dirigeants de l’établissement
public chargé de la conservation et de la restauration ainsi que du président
du Centre des monuments nationaux et du préfet de région Île-de-France.
Le projet de rapport soumis pour adoption à la chambre du conseil a été
préparé, puis délibéré, le 4 juillet 2022, par une formation inter-chambres,
présidée par M. Louis Gautier, président de la formation interchambres, et
composée de M. Hervé-Adrien Metzger, M. Henri Guaino, M. Emmanuel
Glimet, M. Denis Soubeyran, M. Philippe Dubosc, conseillers maîtres, ainsi
que, en tant que rapporteur général, M. Michel Bouvard, conseiller maître, en
tant que rapporteures, Mme Isabelle Latournarie-Willems, conseillère maître,
Mme Jeanne-Marie Prost, conseillère maître en service extraordinaire, assistés
de Mme Fazia Meziane-Boutemeur, vérificatrice des juridictions financières et,
en tant que contre-rapporteur, M. Michel Clément, conseiller maître.
Il a été examiné et approuvé, le 12 juillet 2022, par le comité du rapport
public et des programmes de la Cour des comptes, composé de M. Pierre
Moscovici, Premier président, Mme Carine Camby, rapporteure générale du
comité, MM. Denis Morin, Gilles Andréani, M. Christian Charpy, M. Louis
Gautier, M. Jean-Yves Bertucci, présidents de chambre, Mme Catherine Périn,
présidente de section, représentant la présidente de la 2
ème
chambre, MM.
Christian Martin, Nacer Meddah, Bernard Lejeune et Frédéric Advielle, Mme
Sophie Bergogne, présidents de chambre régionale des comptes,
et
Mme Catherine Hirsch, Procureure générale, entendue en ses avis.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par la Documentation française.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil en
formation ordinaire a adopté le rapport intitulé
: Le chantier de la cathédrale
Notre-Dame de Paris -
L’achèvement des travaux de sauvegarde, les enjeux
de la restauration et les défis de la réouverture - Deuxième bilan
.
Elle a arrêté ses positions au vu du projet communiqué au
préalable au
ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté
industrielle et numérique, à la ministre de la culture, ainsi qu’aux
organismes concernés et des réponses adressées en retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent
la seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont participé au délibéré : M. Moscovici, Premier président, M. Andréani,
Mme Podeur, M. Charpy, Mmes Camby, Démier, M. Bertucci,
Mme
Hamayon, présidents de chambre, M. Tournier, doyen des présidents
de section de la troisième chambre, MM. Courtois, Lefebvre, Le Méné,
Viola, Le Mer, Albertini, Mmes Périn, Bouzanne des Mazery, Coudurier,
M. Appia,
Mmes Mattei,
Mondoloni,
Riou-Canals,
M.
Sitbon,
Mme Roche, MM. Seiller, Mairal, Savy, Hervio, Turenne, conseillers
maîtres,
MM. Bouvier,
Brottes,
conseillers
maîtres
en
service
extraordinaire, Mme Renet, présidente de chambre régionale des comptes.
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COUR DES COMPTES
8
Ont été entendus :
-
en sa présentation, M. Bouvard, conseiller maître et président de
section, rapporteur général de la formation interchambres chargée
des travaux sur lesquels les opinions de la Cour sont fondées et de
la préparation du rapport ;
-
en son rapport, Mme Camby, rapporteure générale, rapporteure du
projet devant la chambre du conseil, assistée de M. Bouvard, conseiller
maître, rapporteur général, Mme Prost, rapporteure, et de M. Guaino,
conseiller maître, contre-rapporteur devant cette même chambre ;
-
en ses conclusions, sans avoir pris part au délibéré, M. Barichard,
premier avocat général, accompagné de M. Nataf, substitut général.
Mme Wirgin secrétaire générale, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 20 septembre 2022.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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Synthèse
Depuis le 1
er
janvier 2020, les travaux de conservation et de
restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
, consécutifs à l’incendie
du 15 avril 2019,
sont confiés à l’établissement public
Rebâtir Notre-Dame
de Paris
. Constitué à cet effet, il a pour objectif principal, formalisé dans son
contrat d’objectif
s et de performance, de rendre la cathédrale au culte et aux
visiteurs avant la fin de
l’année 2024. L’important élan de générosité et de
mécénat constaté après l’incendie s’est prolongé par la confirmation des
promesses de dons, dont 98 %
sont aujourd’hui contractualisées, par
l
’arrivée de nouveaux dons et par la mise en place de mécénats de
compétence au bénéfice de l’établissement public.
Les dons en numéraires
représentent 841,5
M€
à fin 2021, les dons en nature et en mécénat de
compétence au moins 5
M€
. Ceux-ci contribuent à alléger le coût financier
des travaux et à prendre en charge une partie des
missions d’information du
public ou de promotion des métiers du patrimoine.
Les dons provenant de la souscription nationale, collectés par les
fondations désignées par la loi, sont reversés à l’établissement public au
fur et à mesure de l’avancement des travaux, dans le respect des
dispositions prévues par les conventions signées avec le ministère de la
culture. Ils représentent les trois quarts des moyens nécessaires au
financement de la maîtrise d’ouvrage et des travaux. Le
s dons recueillis
directement par l’établissement assure
nt le solde du financement.
La
Cour,
qui
procède
dans
ce
rapport
au
suivi
des
recommandations formulées dans son précédent rapport de 2020
2
,
constate que s
eul le loyer du siège fait l’objet d’une subvention du
ministère de la culture sur crédits budgétaires.
2
Cour des comptes,
La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame
de Paris
.
Premier bilan
, rapport public thématique, septembre 2020.
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COUR DES COMPTES
10
Des travaux de sauvegarde achevés dans des conditions
satisfaisantes malgré les contraintes liées au plomb
Les travaux destinés à assurer la sauvegarde de la cathédrale,
engagés immédiatement après l’incendie par la direction régionale des
affaires culturelles d’
Île-de-
France, puis par l’établissement publ
ic, sous le
régime de l’urgence impérieuse facilitant la passation des marchés, ont été
achevés en 2021 pour un montant de 151
M€
. Ce montant est légèrement
inférieur à l’enveloppe budgétaire qui avait été révisée en 2020 pour
prendre en compte l’ensemble des désordres consécutifs à l’incendie, la
prolongation du chantier occasionnée par la crise sanitaire et surtout les
conséquences de la pollution au plomb après l’incendie.
Le traitement de cette pollution a été conduit avec succès et constitue
une priori
té pour l’établissement, mais l’absence de règlementation précise
applicable à la pollution au plomb a obligé à appliquer les dispositions
prévues pour les logements ou pour l’industrie, qui sont pour partie
inadaptées aux travaux sur des monuments historiques. Cette absence de
réglementation concerne également, une fois les travaux achevés, un
éventuel traitement des eaux pluviales.
Des travaux de restauration qui devraient se poursuivre après
la réouverture
pour traiter les pathologies antérieures à l’in
cendie
Les études engagées dès mars 2020 sur l’état sanitaire de la cathédrale
et le diagnostic établi par l’architecte en chef des monuments historiques en
2021 ont permis l’adoption d’un schéma directeur des travaux de
reconstruction et de restauration nécessaires à la réouverture de la cathédrale
en 2024. Le choix d’une reconstruction à l’identique de la flèche, et
aussi
proche que possible
de l’état préexistant à l’incendie pour la charpente
,
respectueux des matériaux initiaux, a été effectué et validé unanimement par
la commission nationale du patrimoine et de l’architecture.
Le montant prévisionnel prévu en mai 2022
pour l’ensemble de ces
travaux, y compris les provisions et la mise en valeur du chantier et des savoirs
faire,
s’élève à
552
M€
,
s’ajoutant aux 151
M€
exécutés lors de la phase de
conservation. Ces travaux concernent aussi le traitement de quelques
pathologies antérieures à l’incendie intimement liées à la restauration
intérieure de la cathédrale et à l’action de nettoyage de l
a pollution au plomb.
Ils sont aussi l’occasion d’améliorations
de l’accueil dans
la
cathédrale, dont la prise en charge ne relève pas du financement de
l’établissement public et de la souscription nationale
, et sont financées soit
par le Centre des monuments nationaux, soit par des dons reçus à cet effet
par la fondation Notre Dame.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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SYNTHESE
11
Le montant prévisionnel des travaux de restauration intégrant
différentes provisions pour aléas et révision de prix devrait laisser un
montant disponible conséquent, dont la somme sera déterminée précisément
après les résultats de l’ensemble des appels d’offres.
Ce montant disponible
pourrait,
avec l’accord des grands mécènes et des fondations
, être consacré
au traitement des pathologies antérieures à l’incendie sur les parties
extérieures de la cathédrale. L’évaluation de ces pathologies et la
hiérarchisation des urgences doivent pouvoir être effectuées sans attendre
l’échéance de 2024 afin d’en apprécier le coût et d’en définir les modalités
de financement. Ces dernières pourr
aient s’inspirer du mode partenarial mis
en place avec la fondation Notre
Dame avant l’incendie.
Des questions qui appellent des réponses rapides pour assurer
une réouverture dans des conditions satisfaisantes en 2024
L’établissement public, qui a obtenu
, à titre temporaire, le transfert
de la gestion domaniale de la cathédrale, a engagé des études permettant
d’anticiper la réouverture du monument. Ainsi que la Cour l’a recommandé
lors de son précédent contrôle
3
, ce serait
l’occasion de régler des situati
ons
héritées du passé, qui rendent sa gestion complexe, et de se mettre en
conformité avec les dispositions légales relatives aux édifices cultuels.
Dans ce contexte, la place du Centre des monuments nationaux, signataire
de la convention d’octobre 2019 avec l’État relative à la gestion des
cathédrales, devra être clarifiée au cours des discussions. De même, il
importe que l’ensemble des moyens
humains et financiers nécessaires à la
sécurité soient arrêtés avant la réouverture au public et que le rôle de
l’
architecte des bâtiments de France, conservateur du monument, soit
précisé dans le contexte de la convention transférant la gestion de la
domanialité à l’établissement public.
Le décret constitutif de l’établissement l’a doté d’une présidence
exécutive for
te mais aussi d’un
ensemble d’instances consultatives
particulièrement actives qui contribuent à la qualité des processus décisionnels.
L’existence, peu habituelle dans les établissements publics administratifs, d’un
comité d’audit ouvert à des personnalit
és extérieures constitue un atout par la
qualité de ses travaux, comme la place prise par les fondations, au-delà même
de leur simple obligation d’information de
s donateurs dans le processus
d’évaluation des travaux. Le budget de fonctionnement de l’établi
ssement est
maîtrisé et ses effectifs contenus dans l’objectif cible
de 40 emplois défini lors
de sa création. Il peine toutefois à fidéliser une partie de ses équipes pour des
postes soumis à une forte concurrence. Ceci n’affecte pas à ce jour la
préparation et la bonne exécution des marchés.
3
Cour des comptes,
La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame
de Paris
.
Premier bilan
,
op.cit.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
12
L’information régulière délivrée par les fondations comme par
l’établissement public aux nombreux donateurs, sous des formes divers
es,
répond aux obligations légales et permet à ceux-ci de rester associés à
l’action de restauration de la cathédrale. C’est aussi
une occasion pour
l’établissement public
de promouvoir l
es métiers d’art et du patrimoine
,
conformément à l’une de ses
missions, à laquelle il prévoit
d’affecter
d’importants moyens
, grâce notamment à la vente d
u siège de l’Institut
supérieur des métiers dont les deux tiers du produit lui ont été dévolus.
Les conditions permettant d’assurer la réouverture de Notre
-Dame en
2024 semblent donc aujourd’hui réunies. Les risques pesant sur
le respect du
calendrier ont été soumis à
une analyse détaillée et font l’objet d’un suivi
régulier. La cathédrale rendue au culte à cette échéance retrouvera aussi un
flux de visiteurs croissant dont le nombre pourrait atteindre, selon les
estimations, 14 millions, soit deux millions de plus que celui constaté avant
l’incendie. Notre
-Dame de Paris
serait alors l’un d
es monuments les plus
fréquentés de France. Cette surfréquentation, dont la Cour a récemment
relevé les conséquences pour la conservation du patrimoine monumental et
la qualité des visites
4
, constitue une fragilité future.
Au-delà de cette question, les pouvoirs publics, et en premier lieu
l’État, doivent engager rapidement une réflexion sur l’avenir de ce site
prestigieux. Avant l’incendie, Notre
-Dame de Paris ne bénéficiait pas des
conditions
d’accueil
adaptées
à
l’un
des
monuments
les
plus
emblématiques et les plus visités de notre pays, que ce soit en matière
d’accueil touristique, de médiation culturelle ou de sécurité.
C’est la raison pour laquelle la Cour appelle le
ministère de la
culture à engager rapidement, avec les différents partenaires intéressés, des
réflexions permettant de préparer un nouveau cadre d’accueil à la hauteur
de ce monument prestigieux.
4
Cour des comptes,
La politique de l’
État en faveur du patrimoine monumental
, rapport
public thématique, juin 2022.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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Suivi des recommandations de 2020
Recommandation n° 1 : Engager, sans attendre la réouverture de la
cathédrale, les discussions entre l’ensemble des parties concernées par la
propriété et le fonctionnement du monument, afin notamment de mettre en
œuvre les dispositions de la convention de 18 octobre 2019 conclue
entre
le ministère de la culture et le Centre des monuments nationaux (CMN).
(Ministère de la culture, Centre des monuments nationaux).
Non mise en œuvre
Recommandation n° 2 :
Procéder au récolement de l’ensemble des objets
contenus dans la cathédrale de manière à préciser les responsabilités pour
leur restauration
(Ministère de la culture).
Mise en œuvre
Recommandation n° 3 Diligenter une enquête administrative sur les
circonstances dans lesquelles est survenu l’incendie du 15 avril 2019, à
défaut, dégager
sans délais avec l’ensemble des parties prenantes concernées,
au-delà des seuls services du ministère, les enseignements à tirer
opérationnellement sur tous les plans de ce sinistre
(Ministère de la culture).
Refus de mise en œuvre pour l’enquête administ
rative, mise en
œuvre sur les enseignements opérationnels
Recommandation n° 4 :
Mettre en place eu sein de l’établissement public
une comptabilité analytique permettant de donner à chacun des organismes
collecteurs des dons une information détaillée sur l’
emploi des fonds issus
de la souscription nationale et répondant aux obligations de la législation
française sur la générosité publique ainsi qu’aux règles spécifiques des
fondations étrangères
(Ministère de la culture, Établissement public).
Mise en œuvre
Recommandation n° 5 : Apporter directement sur crédits budgétaires à
l’établissement public chargé des travaux de conservation et de restauration
de Notre-Dame une subvention annuelle pour charges de service public
destinée à financer l’ensemble de ses ch
arges de fonctionnement
(Ministère de la culture).
Mise en œuvre partielle pour le seul loyer
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
14
Nouvelles recommandations
1.
Définir le cadre juridique applicable aux chantiers patrimoniaux
confrontés à la présence et à l’emploi du plomb
(Ministère de la
cultur
e, Ministère de l’économie, des finances et de la
souveraineté
industrielle et numérique, Ministère du travail, du plein emploi et de
l’insertion,
Ministère de la santé et de la prévention).
2.
Arbitrer l’intégralité du programme de restauration de la cathédr
ale et,
à cette fin, recenser,
sans attendre l’échéance de 2024
,
l’ensemble des
pathologies du monument, hiérarchiser les urgences de traitement,
en établir les coûts et le financement.
(EP-RNDP, Ministère de la culture)
.
3.
Déterminer
les conditions d’
exploi
tation de la cathédrale à l’échéance
de sa réouverture au culte et aux visites, et établir un cadre de
concertation entre toutes les parties prenantes
(Ministère de la culture)
.
4.
Désigner un responsable unique opérationnel en matière de sécurité
(Ministère de la culture).
5.
Élaborer sans tarder un schéma de valorisation de la cathédrale à la
hauteur de l
’importance
de ce monument et du niveau de fréquentation
attendu
(Ministère de la culture, CMN).
6.
Intégrer l’aménagement du parvis dans un schéma d’ensemble de
la
valorisation de la
cathédrale et s’assurer de la compatibilité du
calendrier des travaux avec les chantiers de restauration
(Ministère
de la culture, CMN).
7.
Étudier les possibilités d’implantation d’un musée de l’œuvre et
les
modalités de sa gestion
(Ministère de la culture, CMN).
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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Introduction
Conformément à l’annonce effectuée par son Premier
président lors de
la publication du premier rapport public thématique en septembre 2020
5
, la
Cour a engagé un nouveau contrôle consacré à la conservation et à la
restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et à son financement. Celui-
ci provient
essentiellement des dons issus de l’appel public à la générosité,
encouragés par la souscription nationale instituée par la loi du 29 juillet 2019.
Les contrôles de la Cour sont désormais programmés selon les grandes phases
de la réalisation des travaux. C’est ainsi que le présent rapport porte sur les
travaux de conservation de la cathédrale aujourd’hui achevés et sur les
premiers travaux de restauration. Leur maîtris
e d’ouvrage est confiée à
l’établissement public créé à cet effet par cette même loi
et qui en assure la
conduite depuis le 1
er
janvier 2020. Le rapport revient également sur les cinq
recommandations formulées par la Cour en 2020 pour en assurer le suivi.
L’importance de la collecte qui a été effectuée et qui se poursuit
encore, exceptionnelle par son montant et par le nombre des donateurs, en
France et à l’étranger, et qui est complétée par des mécénats de
compétence, justifie pleinement que la Cour assure régulièrement le
contrôle de l’utilisation des fonds versés, de la conformit
é des travaux
entrepris aux intentions des donateurs et du respect de l’ensemble des
règles de bonne gestion.
Ce contrôle est effectué au titre des compétences ordinaires de la
Cour, conformément aux dispositions des articles L. 111-3, L. 111-9 et
L. 111-10 du code des juridictions financières
6
. Il est distinct de la mission
d’information confiée par
la loi du 29 juillet 2019 dans son article 8 au
comité composé par les présidents des commissions parlementaires en
charge des finances et des affaires culturelles auquel participe également le
Premier président de la Cour des comptes.
5
Cour des comptes,
La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame
de Paris
. Premier bilan, rapport public thématique, septembre 2020.
6
Loi n° 91-772 du 7 août 1991 relative au congé de représentation en faveur des
associations et des mutuelles et au contrôle des comptes des organismes faisant appel à
la générosité publique.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
16
Il ne revient pas sur
le montant de la défiscalisation accordée par l’Etat
pour les dons effectués par les particuliers et les entreprises mentionné dans
le rapport remis au parlement par le gouvernement en application de
l’article
6
de cette même loi.
Le présent rapport dresse le bilan des travaux de sauvegarde. Il
examine les conditions de leur exécution et leur montant financier, ainsi
que
le fonctionnement de l’établiss
ement public chargé de leur réalisation.
Il analyse, par ailleurs, les conditions de la clôture des derniers marchés
passés pour les travaux de restauration antérieurement à l’incendie, e
t,
après celui-ci, par la d
irection régionale des affaires culturelles d’
Île-de-
France (chapitre I). Il établit le montant actualisé des dons et mécénats
reçus par les fondations chargées de la souscription nationale et par
l’établiss
ement public, ainsi que les conditions de leur emploi pour les
travaux de restauration de la cathédrale. Il effectue une première analyse
des travaux de restauration nécessaires à la réouverture de la cathédrale en
2024, au regard des fonds réunis et des disponibilités qui pourraient leur
être affectés postérieurement à cette date (chapitre II). Il examine enfin les
conditions de réouverture de la cathédrale, tant du point de vue du cadre de
gestion et
de la sécurité, que des conditions d’accueil d’un nombre
croissant de visiteurs (chapitre III).
Schéma n° 1 :
Calendrier des grandes phases des travaux
Source : Cour des comptes
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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Chapitre I
L
’achèvement d
es travaux
de sauvegarde
L’achèvement des travaux de sauvegarde marque le terme de la
première phase conduisant à la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de
Paris au culte et aux visites, qui devrait intervenir à la fin de l’année 2024
.
Cette première phase consistait à éviter un écroulement du monument,
à évacuer les matériaux issus de l’effondrement de la flèche, de la charpente
et d’une partie d
e la voûte, et au traitement des poussières de plomb. Elle
devait aussi permettre de procéder à la délicate opération de démontage de
l’échafaudage du chantier initial de restauration de la flèche, et d
e dépose
d’une couverture provisoire de l’édifice. Ces
travaux ont été achevés à la fin
de l’été 2021.
Le bilan peut ainsi en être établi, tant en ce qui concerne les
conditions d’exécution de
s travaux et du respect du budget prévisionnel, que
du fonctionnement de l’établissement public qui en a la charge.
I -
Des travaux encadrés par la législation
sur les monuments historiques
Les premiers travaux de sauvegarde au cours de l’année 2019 ont
été conduits sous maîtrise d’ouvrage de la
direction régionale des affaires
culturelles (Drac)
d’
Île-de-
France, jusqu’à la m
ise en place de
l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la
cathédrale Notre-Dame de Paris (EP-RNDP) au 1
er
décembre 2019. Depuis
cette date, celui-ci
exerce cette mission, à l’exception de la restauration des
objets mobiliers
appartenant à l’État. Le transfert des marchés passés par
la Drac est intervenu au 1
er
janvier 2020.
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COUR DES COMPTES
18
Le transfert de la maîtrise d’ouvrage n’exonère pas pour autant
l’établissement public des procédures ordinaires en matière de restauration
de monuments historiques : les choix de restauration sont donc soumis au
contrôle scientifique et technique de la Drac
d’
Île-de-France. Ainsi les
études de diagnostic dressant le bilan sanitaire de la cathédrale et préalables
à la restauration ont donné lieu à plusieurs réunions de janvier à mai 2021.
La possibilité ouverte par la loi du 29 juillet 2019 au III de son article 11
de recourir à des ordonnances pour «
faciliter la réalisation dans les
meilleurs délais et dans des conditions de sécurité satisfaisantes, des
opérations de conservation et de restauration de la cathédrale
», qui aurait
pu conduire à s’affranchir de certaines dispositions du code du patrimoine
n’a pas été
mise en oeuvre. En dehors des règles relatives à la publicité sur
le chantier, les seules dérogations au code du patrimoine, prévues au I de
ce même article, sont la désignation de l’
Institut national de recherches
archéologiques préventives
(Inrap) comme opérateur des fouilles
archéologiques
7
et la dispense de consultation de la commission régionale
du patrimoine et de l’architecture en cas de saisine de l’autorité
administrative en raison d’un désaccord avec l’
architecte des bâtiments de
France (ABF) pour les installations et constructions temporaires
8
.
L’article 10 de la loi du 29 juillet 2019
rappelle notamment
l’information et la consultation d
e la Commission nationale du patrimoine et
de l’architecture (
CNPA)
sur l’avancement des études et travaux. Ce
lle-ci a
été saisie à cinq reprises
9
: elle a notamment validé unanimement le choix de
recons
truction à l’identique de la flèche et d’une utilisation du bois pour la
reconstruction en chêne de la charpente dans une option conforme à la
construction originelle. Il en est de même pour l’emploi du plomb, ces choix
étant respectueux de la charte internationale sur la conservation et la
restauration des monuments et des sites, dite Charte de Venise.
Au sein de l’EP
-RND,
c’est le conseil scientifique prévu par le
décret constitutif de l’établissement qui est amené à se prononcer sur les
options de restau
ration en amont des décisions du conseil d’administration
et de la transmission des dossiers à la CNPA.
7
Dérogation à l’article L. 523
-9 du code du patrimoine.
8
Dérogation à l’article L. 632
-2 du code du patrimoine.
9
Le 4 juillet 2019 : bilan sanitaire du monument ; le 9 juillet 2020 : restauration de la
flèche et du grand comble ; le 4 février 2021 : décontamination et restauration de
l’orgue de tribune
; le 25 mars 2021 : dessin de la charpente en chêne du grand comble ;
le 9 décembre 2021 : aménagements liturgiques.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
19
II -
Des travaux de sauvegarde achevés
pour un coût maîtrisé
A -
Un montant inférieur au coût révisé
Le coût final communiqué pour ces travaux devrait être de 151
M€
après récupération de la provision pour aléas de 4
M€
, un décompte
définitif devant être établi pour le mois de juin 2022. Ce montant serait
inférieur de 14
M€
à l’estimation de mai 2020 de 165
M€
qui a servi aux
appels de fonds auprès des fondations.
Ces travaux avaient fait l’objet d’un premier chiffrage sommaire à
65
M€
en mai 2019, puis d’une évaluation au mois de juillet 2019
à hauteur
de 85
M€, trois mois seulement après l’incendie et en l’absence de données
encore suffisamment précises sur ses conséquences sur la structure du
bâtiment. Ainsi que cela a été rappelé lors de la réunion du comité des
donateurs du 24 juin 2020 par le président de l’
établissement public,
«
ce montant ne prenait pas en compte l’arrêt temporaire du chantier pour
des raisons liées à la pollution au plomb. Elle était partielle et
prévisionnelle et reposait sur l’hypothèse d’achèvement des travaux de
sécurisation en juin 2020 ce qui ne sera pas le cas
». Ce montant de
165
M€
, supérieur de 100
M€
à la toute première approche, comportait
4,3
M€
de provisions pour aléas et 5,6
M€
pour le financement des études
préalables à la restauration. Cette réévaluation prenait en compte
l’allongement de plus d’un an de la durée du chan
tier, conséquence pour
partie de son interruption et des mesures en lien direct avec la pandémie de
la covid 19, et pour partie des mesures exigées par
l’inspection du travail
en raison des poussières de plomb.
Le comité des donateurs du 17 décembre 2020
fait état d’une
évaluation du coût des conséquences de la pandémie de la covid 19
s’élevant à 3
M€
10
. Le CMN avait indiqué, lors de cette même réunion, un
renchérissement de ses chantiers de 10 % à 18 %.
Ces travaux de sécurisation et de conservation, comme l’a souligné
le ministère de la culture lors de la réunion de l’EP
-RNDP du
16 septembre 2020, anticipent pour partie des dépenses de la phase de
restauration : «
Il y a une porosité entre les deux phases de travaux »
que
l’EP
-RNDP explique lors de cette même réunion en citant par exemple
:
« la mise sur cintre des arcs-boutants et la plupart des échafaudages
montés en sécurisation
».
10
Comité des donateurs du 17 décembre 2020.
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COUR DES COMPTES
20
Tableau n° 1 :
le bilan financier des travaux de sécurisation
et de conservation (en
M€
)
Montant
Juillet
2019
Correction
des
Évaluations
Dépenses
nouvelles
Impact de
l’extension
calendaire
Montant
Révisé CA
05/2020
Montant
Final CA
30/11/2020
Écart entre
le montant révisé
et le montant final
Phase de sécurisation et
de consolidation
75
+ 27
+ 21
+ 26
149
137
- 12
Maîtrise d’œuvre et
prestations intellectuelles
11
8
+ 3
+ 3
14
13
- 1
Travaux
Installations de chantiers
12
+ 10
+ 10
+ 13
45
44
- 1
Sécurisation
38
+ 8
+ 7
+ 7
60
52
- 8
Traitement plomb
6
+ 1
+ 1
+ 3
12
11
- 1
Déblaiement nef et voute
4
+ 5
9
12
+ 3
Dépose et stockage vitraux,
orgue, objets mobiliers
2
+ 2
4
4
-
Autres dépenses
1
1
1
-
Provision pour aléas
4
4
0
- 4
Etudes préalables
restauration
6
6
8
+ 2
Maîtrise d’ouvrage
4
+ 6
10
6
- 4
Total
85
+ 27
+ 21
+ 32
165
151
- 14
Source : Cour des comptes à partir des données EP-RNDP.
Hors provisions pour aléas, le coût de la maîtrise d’œuvre et des
travaux de la phase de sécurisation et de conservation s’établit à 137
M€
pour un montant révisé de mai 2020 de 145
M€
représentant une économie
de 8
M€. Les deux principales variations par rapport à l’estimation
concernent la sécurisation, initialement prévue pour 38
M€
réévalué à
60
M€
et
qui s’établit au final à 52
M€
12
, et les travaux de déblaiement de
la nef et de consolidation de la voûte, initialement prévus pour 4
M€
réévalués à 9
M€
et dont le coût final est de 12
M€
.
11
Le
s prestations intellectuelles intègrent l’instrumentation de la cathédrale permettant
de mesurer la stabilité de cette dernière, cette prestation a pu être allégée après le
démontage de l’échafaudage préexistant à l’incendie.
12
Ce volet du chantier a connu
d’importants mouvements en plus et moins
-values : des
travées supplémentaires de la voûte ont notamment dû être étayées au regard de leur
fragilité mais des économies ont été réalisées sur les prestations des cordistes lors du
démontage de l’échafaudage i
ncendié qui a mobilisé moins de moyens prévus. En outre,
des montants étaient inscrits au budget pour le démontage des échafaudages dont
l’usage est prolongé pour la phase de restauration.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
21
Les économies réalisées sur le chantier ont permis de financer 2
M€
supplémentaires d’études préalables de la phase de resta
uration, soit 8
M€
au lieu de 6
M€. Les frais de la maîtrise d’ouvrage de l’établissement public
ont été contenus : initialement prévus pour 4
M€
, ils avaient été portés à
10
M€
en mai 2020 pour prendre notamment en compte la prolongation de
cette phase ; ils sont désormais ramenés à 6
M€
.
B -
La clôture des marchés antérieurs à l’incendie et
les marchés de la phase de sécurisation et de conservation
1 -
Les marchés passés par la Dracc Île-de-France antérieurement
à l’incendie
13
Les marchés relatifs à la restauration des arcs-boutants, de la flèche,
de la culée n° 10, de la sacristie et de la chapelle Saint-Germain lancés et
signés par la Drac
avant l’incendie du 15 avril 2019
ont tous été soldés ou
sont sur le point
de l’être. Le paiement des entreprises était suspe
ndu dans
l’attente des conclusions de l’enquête judiciaire et
de
l’établissement de
leur éventuelle responsabilité.
L’annexe
n° 2 établit le détail pour chaque
marché des décomptes, avances, et éventuelles indemnités de résiliation
pour la restaurations des arcs boutants, de la culée n° 10, de la sacrisitie et
des vitraux de la chapelle Saint-Germain.
S’agissant des marchés relatifs à la flèche de Notre
-Dame, leur
résiliation
avait été suspendue dans l’attente des conclusions de l’enquête
judiciaire en cour
s, et ce, afin de préserver les possibilités pour l’État de
recourir aux assurances des titulaires de ces contrats.
L’enquête judiciaire et la décision de règlement des marchés
de la flèche
Dans son rapport public de septembre 2020, la Cour avait relevé que
le ministère avait refusé d’ouvrir une enquête administrative à la suite de
l’incendie et que plus d’une année s’était écoulée avant la décision de se
porter partie civile en juin 2020 dans le cadre de l’information judiciaire.
Celle-ci vise les faits de «
dégradations involontaires par incendie par
violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de
sécurité imposée par la loi ou le règlement dans des conditions de nature
à exposer les personnes à un dommage corporel
», articles 322-5 et 322-
15 du code pénal. Dans le cadre de l’instruction
, une ordonnance de
commission d’expertise a été rendue par le magistrat instructeur, ce dont le
ministère a été informé le 2 mai 2021 par l’agent judiciaire de l’État (AJE).
L’ordonnance
prévoyait
une
remise
du
rapport
d’expertise
le
30 septembre
2021. L’AJE a indiqué le 14 février 2022 que son avocat a
été destinataire des conclusions de ce rapport mais non du rapport complet.
13
Au 22 avril 2022, un montant total de 360 992,85
€ doit être récu
péré sur les marchés
engagés avant l’incendie au titre des avances et trop perçus.
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COUR DES COMPTES
22
Selon les informations transmises par l’AJE au ministère de la culture,
«
ces
dernières indiquaient que le feu n’avait pas couvé pendant plusieurs jours,
qu’il s’était déclenché le jour même, en précisait l’heure sans donner
d’indication sur son origine
»
. En l’absence de conclusions à ce stade sur
l’origine et donc la responsabilité de l’incendie, la
Drac
d’
Île de France, qui
avait suspendu le règlement des factures des entreprises, a procédé à la
liquidation des sommes dues à la date de l’incendie
sans attendre le terme
de la procédure et une éventuelle mise en jeu de la responsabilité des
entreprises donnant lieu à dédommagement de l’
État. Le 15 juin 2022,
l’AJE
a informé le secrétariat général du ministère de la culture que
«
l’information judiciaire est toujours ouverte et que celle
-ci durera
certainement encore un temps considérable. À ce stade, de nombreuses
investigations sont en cours. Le magistrat instructeur a notamment formulé
diverses demandes d’expertises portant notamment sur l’analyse des vidéos
de l’évènement ou encore des débris découverts au cours de l’incendie. Il
n’a pas à ce stade d’autres éléments à communiquer
».
Des marchés sont en attente de résiliation :
•
marché de maîtrise d’œuvre
:
-
phase 1
–
Direction de l’exécution du ou des contrats de travaux
(DET) : 263 000
€ ont été réglés sur 311
000
€
;
-
phase 2
–
Projet (PRO) et Dossier de consultation des entreprises
(DCE) : 161 000
€ ont été réglés sur 278
000
€.
•
marchés d’études
:
-
contrôle technique
d’un montant de 3
900
€
;
-
coordination en matière de sécurité et protection de la santé
(CSPS)
d’un montant de 7
000
€
;
-
assistance à maîtrise d’ouvrage d’un montant de 10
000
€.
•
les marchés de travaux
14
:
-
échafaudage (lot 1) : 2,2
M€
(1,1
M€
ont été réglés) ;
-
couverture (lot 2) : 85 000
€
;
-
charpente (lot 3) : 152 000
€
;
-
paratonnerre (lot 5) : 7 000
€
;
-
nettoyage SSI (système de sécurité incendie) : 6 000
€
.
14
Les autres lots ont été respectivement validé par la maîtrise d’ouvrage (lot 4),
infructueux (lot 6) et réceptionné avant l’incendie (lot 7).
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
23
Pour mémoire les marchés de service en cours au moment de
l’incendie ont été résiliés pour motif général comme indiqué dans le rapport
de 2020 (cf
.
son annexe 3 relative à la liste des marchés résiliés à la suite
de l’incendie de la cathédrale).
En effet, les prestations des marchés signés
antérieurement à l’incendie ne pouvant continuer à être exécutés, la D
rac
d’
Île de France a
fait application de la résiliation pour motif d’intérêt
général prévue par le décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics.
La clôture des marchés antérieurs à l’incendie, compte tenu des
avances versées par l’État
, devrait se traduire globalement par un
reversement de 360 292
€
au bénéfice de ce dernier.
Après l’incendie, les marchés de sécurité et de sauvegarde de la
cathédrale lancés et signés par la Drac
ont été transférés à l’EP
-RNDP par
voie d’avenants.
2 -
Les marchés de sauvegarde transférés par la Drac
d’
Île de France à
l’
EP-RNDP
Ces marchés ont fait l’objet pour l’essentiel d’avenants de
prolongation du marché (notamment, le marché relatif à la sécurisation et
la stabilisation de la cathédrale Notre-Dame de Paris attribué à la société
Europe Échafaudage pour un montant de 1,7
M€, lequel a fait l’objet de
cinq avenants de prolongation
15
), hormis le marché de maîtrise d’œuvre
pour la mise en sécurité de la cathédrale attribué à Philippe Villeneuve,
architecte en chef des monuments historiques (ACMH), signé le
2 juillet 2019 pour un montant initial de 71 000
€, porté à l’issue des
avenants (modifiant le titulaire du marché, les conditions de rémunération
et fixant un prix global et forfaitaire de rémunération et intégrant une
décomposition du prix global et forfaitaire) à un montant total de 4,8
M€
pour le groupement constitué de
l’Agence Philippe Villeneuve (sous
-
traitant : Cabinet Patriarche), Covalance Architectes, Prunet Urbanisme
Architecture et Alternet.
3 -
Les marchés signés en propre par l’EP
-RNDP
La Cour a examiné
l’ensemble d
es marchés signés en propre par
l’EP
-
RNDP. Ces marchés n’appellent pas d’observations particulières en
dehors des cas suivants.
15
Le cinquième avenant prévoy
ant la fin du marché à la date de prise d’effet des
marchés qui seront conclus pour la phase de restauration (notifiée un mois avant la date
de fin des prestations).
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
24
Le cas spécifique de la prestation de location d’un échafaudage
Des interrogations ont porté sur le marché attribué à la société
Europe Échafaudage (visé
supra
) et transféré à l’EP
-RNDP par la Drac
d’
Île
de France, qui
a fait l’objet d’une procédure sans publicité ni mise en
concurrence préalables dans le cadre de la restauration de la cathédrale
Notre-Dame de Paris avec le même prestataire.
Signé le 24 février 2022
16
à l’achèvement de la phase de sécurisation,
dans le cadre de la phase de restauration de la cathédrale, il ne relevait plus
de la procédure d’urgence impérieuse autorisée par l’arrêté de péril du
préfet
de police du 17 avril 2019 ; il aurait donc du
faire l’objet d’une mise en
concurrence et d’une publicité préalable
.
Il apparait cependant que ce marché avait pour objet certaines locations
d’installations de chantier ainsi que la mise en œuvre de compléments
d’installati
ons. Au regard des contraintes techniques et de sécurité qui
s’imposaient
, il
ne pouvait être confié qu’au titulaire initial
. Ces contraintes ne
permettant pas d’envisager des solutions alternatives
,
l’EP
-RNDP a donc pu
contracter un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables en
application de l’article R. 2122
-3° b du code de la commande publique et a
procédé à une négociation avec la société susvisée. À l’issue de la négociation
17
,
le montant estimatif du détail des prix unitaires et de l’esti
mation globale a été
arrêté à la somme de 15,5
M€
HT
auquel s’ajoute
une partie à bons de
commande dont le montant maximum a été fixé à 1,6
M€
HT.
Un avenant au marché initial et transféré par la Drac
d’
Île de France
à l’EP
-RNDP a été signé le 24 février 2022 entre la société Europe
Échafaudage et l’établissement
, afin de transférer à ce dernier la propriété
des installations (et leur entretien), intégralement amorties (pour un montant
acquis de 44 241,31
€
), et de supprimer la prestation de dépose des
inst
allations (d’un montant de 142
480,22
€
).
Selon la même procédure, l’EP
-RNDP a également lancé un marché
négocié relatif aux travaux de remaniage et de dépose d’étaiements en bois,
leur contrôle périodique ainsi que la location des échafaudages liés aux
étaiements intérieurs, dont la société Le Bras a été attributaire18,
pour un
montant forfaitaire de 2,5
M€
HT et une partie à bons de commande dont le
montant maximum a été fixé à 2
M€
HT.
16
Marché visé par le CBCM le 11 février 2022.
17
À l’issue de la négociation, la réalisation d’une économie de 4
M€ a été indiquée lors
du conseil d’administration du 8 février 2022.
18
Marché signé le 28 mars 2022 (visé par le CBCM le 25 mars 2022).
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
25
L’analyse des marchés de travaux de sauvegarde et de restauration de
la cathédrale lancés et signés par l’EP
-RNDP n
’a
pas donné lieu à
observations en matière de règlementation relative à la commande publique.
En effet, seuls
certains marchés ont fait l’objet de remarques particulières
.
Les anomalies relevées en matière de règlementation relative
à la commande publique dans le cadre des marchés de sauvegarde
et de restauration
-
visa du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM)
postérieur à la signature du représentant de l’EP
-RDNDP pour un marché
(guide de procé
dure des marchés publics de l’établissement public)
;
-
incidence financière d’un avenant supérieure à 50
% du montant du
marché pour un marché (article R. 2194-3 du code de la commande publique) ;
-
absence d’avis d’attribution (R. 2183
-1 du code de la commande publique)
pour six
marchés (mission d’ordonnancement, pilotage, coordination et
logistique dans le cadre de l’opération de restauration de la Cathédrale
;
mission de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé
et de préventeur dan
s le cadre de l’opération de restauration de la
Cathédrale ; mission de coordination en matière de sécurité et de protection
de la santé et de préventeur dans le cadre de l’opération de restauration de
la Cathédrale ;
exploration de l’espace de stockage et
d’études des vestiges
de la Cathédrale sur le site retenu ;
réalisation d’une étude métrologie
plomb et amiante ; évacuation du mobilier de la sacristie ; prestations
d’organisation, de coordination logistique et technique des manifestations
culturelles p
our l’établissement).
Tel a été le cas pour l’avenant signé le 9 décembre 2020 pour un
montant d
’
1
M€
afférent au marché de maîtrise d’œuvre pour les études
d’évaluation et de diagnostic (d’un montant de 2,5
M€
), représentant ainsi une
augmentation de près de 60 % par rapport au montant total initial du marché.
Cet avenant a fait l’objet d’un avis du comité d’audit et des
investissements de
l’EP
-RNDP dans sa séance du 26 novembre 2020,
lequel a indiqué que s’il était
«
licite de considérer que cette évolution de
périmètre ne faisait pas partie du marché originel
», il a néanmoins
recommandé que «
cela soit pris en compte dans les négociations à venir
du marché de restauration, afin d’éviter une double rémunération d’une
même prestation par l’établissement pu
blic
».
De plus, le comité d’audit a ajouté qu’il
«
convient par ailleurs
d’indiquer au conseil d’administration que l’établissement public en
réponse aux questions du comité d’audit, a indiqué que sauf éléments
nouveau majeur, il ne prévoyait pas d’autre
avenant »
.
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COUR DES COMPTES
26
La rémunération du titulaire du marché de maîtrise d’œuvre relatif
à la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris (calculée sur le
montant de l’enveloppe financière des travaux fixée à 222,9
M€
HT, valeur
décembre 2020) signé le 16 juin 2021 a également été analysée.
Cette rémunération a fait l’objet d’une négociation dont le montant
proposé par le maître d’œuvre au départ (février 2021) a été de 33,5
M€
(hors assurance) et a abouti à l’issue
des négociations (réunion du
4 mai 2021) à un montant de 25,9
M€
19
(hors assurances) et 27
M€
(assurance incluse), soit 12,1 %
20
(11,6 % hors assurance) du montant
prévisionnel des travaux et une diminution de 22,7 % par rapport au
montant initial proposé p
ar la maîtrise d’œuvre.
Enfin, le marché relatif aux prestations de sécurité, de gardiennage
et de surveillance du chantier a été lancé en procédure adaptée bien que le
seuil des procédures formalisées soit atteint, dérogeant ainsi à la procédure
de droit
commun de l’appel d’offres en application de l’article
R. 2123- 1- 3 du code de la commande publique et lui permettant ainsi de
disposer de la possibilité de négocier. Il
n’a pourtant pas donné lieu à
négociations de la part de l’établissement
, bien que ce dernier en ait donné
la possibilité dans sa consultation et que le montant de l’offre du candidat
retenu ait été la plus élevée (+ 24,36 %
par rapport à l’offre du candidat
classé en deuxième position)
21
.
Le rapport d’analyse des offres présenté à la commi
ssion des marchés
a mentionné qu’engager une négociation avec le candidat classé en seconde
position «
reviendrait à refondre quasi totalement l’offre
» au regard des
importantes incohérences relevées,
tant en prix unitaire qu’en volume.
S’agissant du cand
idat classé en troisième position, le rapport indique que la
négociation de l’offre devrait porter principalement sur l’amélioration du
volet technique pour aboutir à un prix quasi similaire au candidat retenu.
19
L’objectif de la négociation fixé
par l’établissement était compris entre 25 et 27
M€,
hors assurance.
20
Interrogée sur ce taux, la direction générale des patrimoines et de l’architecture a
répondu qu’un «
niveau de pourcentage d’environ 12
% était un ordre de grandeur
pratiqué dans les opérations de restauration de monuments historiques complexes et
d’envergure actuellement ou récemment rencontrées
».
21
22 plis ont été reçus dans le cadre de cette consultation et 16 offres ont été analysées.
Les offres des candidats classés en deuxième et troisième position étaient respectivement
de 1 893 854,17
€ pour la première année et 1
870 158
€ pour les années suivantes
(candidat : Sécuris) et 2 315 622,22
€ pour la première année et 2
295 680,42
€ pour les
années suivantes (candidat : Mondial Protection), contre 2 355 197,61
€ et 2
370 101,16
€
pour les années suivantes du candidat attributaire (Tertiaire).
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
27
Lors de la présentation de ce marché au comi
té d’audit et des
investissements dans sa séance du 1
er
octobre 2020, ce dernier a, à juste
titre, regretté que «
s’agissant d’un marché passé selon la procédure
adaptée ouvrant la possibilité de négociation avec les trois candidats les
mieux classés, que
l’établissement n’ait pas eu recours à cette faculté
».
Ce dernier a par ailleurs recommandé que «
l’établissement public
conserve […] les modalités détaillées de comparaisons entre valeurs
techniques des offres, éventuellement complétées par un rapport
ré
capitulatif détaillé, afin […] d’être en mesure de pouvoir répondre à de
potentiels contrôles a posteriori
».
En outre, il convient de préciser que la fonction achat au sein de
l’établissement est organisée autour du service
«
expertise juridique et mise en
œuvre de la commande publique
» composé de quatre juristes spécialisés en
droit de la commande publique, lequel a établi un guide de procédure des
marchés publics qui
décline la définition d’un marché public et d’un besoin,
les seuils internes et règlementaires, les différentes procédures, les modalités
relatives à la préparation du marché (durée, prix, etc.), à la mise en concurrence
(analyse des offres, négociation, etc.), les recours et la sous-traitance.
Il ressort ainsi de l’analyse du lancement et de l’attribution des
marchés signés par l’établissement public que le comité d’audit et des
investissements joue pleinement son rôle. Ce dernier préconise des actions
concrètes en la matière :
la création d’une commission des marchés
composée de membres de droit et de personnes pouvant être invitées par
son président
,
la rédaction et la signature d’un rapport
du directeur
concerné, et
également qu’une distinction
«
explicite
» soit faite entre les
responsables de l’établissement public chargé d’instruire et
de négocier les
marchés et ceux chargés de s’assurer de leur conformité.
Ces préconisations, qui sont suivies par les directions et services de
l’établissement
, permettent,
d’une part, de mieux encadrer la commande
publique au sein de l’établissement et
,
d’autre part, d’assurer une information
éclairée au conseil d’administration
, notamment les raisons qui expliquent le
faible nombre de candidats ayant répondu à la consultation.
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COUR DES COMPTES
28
III -
Des travaux affectés par la pollution
au
plomb et l’absence de réglementation
adaptée
A -
Depuis 2019, l’impact sur le chantier du plomb lié
à
l’incendie
Après l’incendie et la fonte complète de la toiture de la cathédrale, des
mesures rigoureuses ont été mises en place pour assurer la sécurité des ouvriers
et des riverains face aux risques liés à la présence du plomb. Les prélèvements
effectués ont exclu rapidement un risque sanitaire lié à la présence de plomb
dans l’air
22
. En revanche, des quantités importantes de poussière de plomb au
sol étaient alors relevées dans la cathédrale et sur le parvis.
Les mesures quotidiennes auxquelles procède l’établissement public
montrent aujourd’hui que
la situation sur le parvis est désormais conforme
aux normes fixées par l’ARS
23
mais que la cathédrale elle-même est encore
largement contaminée au plomb (sols, murs, voûtes).
Depuis l’été 2019 et conformément au code du travail, le respect de
procédures rigoureuses (obligation de tenues complètes, sas de
décontamination, pédiluve, douche obligatoire) est donc la règle pour toute
personne présente sur
le chantier. Il est difficile d’évaluer les surcoûts
générés mais ceux-ci sont importants
24
et tiennent tant aux équipements
installés qu’à l’impact sur le temps de travail. Le budget de sécurisation
identifiait les surcoûts liés à la pollution au plomb pour un montant de
12
M€. Il s’agit vraisemblablement d’une fourchette basse, d’autres
évaluations faisa
nt état d’un impact à hauteur d’
un quart du temps de travail
des compagnons présents sur le chantier.
L’avancement
des
travaux
de
restauration
permet
une
décontamination progressive de la cathédrale. Le traitement des voûtes et des
murs, le curage des installations techniques et la mise en place de protocoles
en cours de tests sur les chapelles ont pour objectif d’atteindre les normes
cibles qui permettront la réouverture au public dans les délais prévus.
22
L’avis rendu par l’Académie des sciences conclut que «
la température maximale
relevée lors de l’incendie a été de 1
212 degrés centigrades, le plomb se vaporise à
1 750 degrés centigrades
». Par ail
leurs, les différentes études conduites par l’
agence
régionale de santé (
ARS), notamment sur 1 200 enfants situés à proximité, n’ont pas
montré de seuils supérieurs à ceux constatés les années précédentes.
23
Seuil de 1 000 microgrammes en moyenne, pics à 5 000 microgrammes maximum.
24
Les règles sanitaires de décontamination s’imposent à toutes les entrées ou sorties du chantier
(par exemple, pause déjeuner) et réduisent d’autant la durée de travail effective sur site.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
29
B -
L’absence de normes et les enjeux pour
la restauration des monuments historiques
La C
ommission nationale du patrimoine et de l’architecture s’est
prononcée à l’unanimité, lors de sa réunion du 9 juillet 2020, pour une
restauration «
consistant à rétablir l’architecture de Viollet
-le-Duc,
notamment en ce qui concerne la couverture et la flèche, dans le respect des
matériaux d’origine
: le chêne pour la charpente et le plomb pour la
couverture
». Cette position est conforme à la
Charte de Venise, charte
internationale sur la conservation et la restauration des monuments adoptée
en 1964 et signée par la France
25
. Au cours des débats, des membres de la
commission ont souhaité que le chantier soit l’occasion de faire de la
pédagogie sur le plomb et de partager les connaissances sur ce matériau. Le
conseil scientifique de l’EP
-RNDP, consulté en février 2021, a confirmé le
caractère irremplaçable du plomb dans de nombreux monuments historiques.
En raison de sa malléabilité, de son aspect esthétique, de sa durabilité
très supérieure à celle du zinc ou du cuivre, le plomb reste en effet le matériau
le plus adapté à la couverture des plus grands monuments historiques, tels
que le Panthéon, la Sainte Chapelle, le château de Versailles. La question de
la législation de référence à appliquer pour ces chantiers a été posée depuis
plusieurs années, notamment par le Centre des monuments nationaux (CMN)
et l’
Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture
(OPPIC)
26
, qui souhaitaien
t sortir d’un vide juridique conduisant à
des
mesures de précaution variables selon les interlocuteurs et les chantiers. La
norme utilisée aujourd’hui par l’ARS pour les espaces publics ouverts (
cf
.
supra
) est en effet un «
décalque
»
de celle qui s’appliq
ue aux logements
donc à des espaces clos occupés par les mêmes personnes, et non à des lieux
ouverts et de passage.
En 2013, dans le contexte de la restauration du dôme du Panthéon,
un groupe de travail sur le plomb a été initié par le ministère de la culture,
associant la direction générale du travail (DGT), la direction générale de la
santé (DGS) et le Groupement des entreprises de restauration des
monuments historiques. Ces échanges ont abouti en 2018 à
l’adoption d’
un
guide pratique «
Organisation des chantiers patrimoniaux en présence et
avec maintien du plomb
». Ce document
n’a cependant jamais
été publié :
la DGT et la DGS n’ont pas souhaité le cosigner
,
tout en préconisant qu’il
soit décliné en fiches pratiques par thème en lien avec l'Institut national de
recherche et de sécurité (INRS). Cette approche a été validée par le Haut
Conseil de la santé publique le 1
er
février 2021 et il avait été prévu que ces
fiches soient mises en ligne sur le site du ministère de la culture,
ce qui n’a
cependant pas ét
é le cas jusqu’ici
.
25
Le texte de la Charte figure en annexe n° 4.
26
Lettre conjointe du 21 août 2017 des présidents du CMN et de l’OPPIC adressée au
directeur général des patrimoines.
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COUR DES COMPTES
30
Au niveau européen, le plomb a été inclus en 2018 dans la liste des
substances évaluées périodiquement par l’Agence européenne des produits
chimiques. Celle-
ci a ouvert en février 2022 une consultation en vue d’une
proposition de recommandation à la Commission européenne pour un futur
projet de règlement.
Dans ce contexte et afin de définir la position française sur le projet
de règlement, le ministère de la culture a indiqué à la Cour qu’il était
essentiel que les règles applicables aux chantiers patrimoniaux confrontés
à la présence du plomb soient formalisées en lien avec les ministères
chargés de la santé et du travail. Ces travaux s’appuieront sur ceux du
groupe de travail mentionné
supra
et à l’issue de cette concertation
interministérielle, les fiches devraient être enfin mises en ligne.
Dans le cas de Notre-
Dame, l’attention portée à la question du plomb
est particulièrement aigüe et le chantier se veut donc exemplaire à tous égards.
Afin d’assurer les conditions de sécurité maximum et d’éviter tout nouvel
incendie, l’établissement public travaille sur un dispositif anti
-incendie
sophistiqué, basé sur un système de brumisation intégré à la charpente.
En outre,
l’autorisation de travaux pour la réalisation de la
couverture, comme ce
la a été le cas pour la charpente, doit faire l’objet
d’un arrêté du préfet
de région conformément à la législation sur les
monuments historiques
. La question de l’évacuation de l’écoulement des
eaux pluviales des toitures en plomb est aujourd’hui posée
; le ministère de
la culture indique qu’il ne peut
, sur ce point, se reposer sur des retours
d’expérience sur la
«
toxicité du plomb
» liée à cet écoulement. Une
enveloppe de 4
M€
est inscrite dans l’estimation des travaux de restauration
sous l’intitulé
« système de filtration des eaux de pluie » qui pourrait être
engagée à cet effet.
Aussi, une étude a été lancée
par l’EP
-RNDP avec le LEESU,
laboratoire des Ponts et Chaussées spécialisé dans l’étude de l’eau et de sa
gestion en milieu urbain, pour caractériser les risques éventuels de
lixiviation
27
et ajuster, le cas échéant, les futurs équipements en
conséquence
(recueil éventuel des eaux d’écoulement des toitures)
.
Alors que la question de l’usage du plomb dans les monuments
historiques
28
est ouverte depuis
une dizaine d’années, il est
urgent que les
travaux engagés sur le sujet par les différents ministères concernés
aboutissent à une
normalisation à l’échelle nationale
et que ces conclusions
puissent être suffisamment rapides afin de définir un cadre juridique et
donc être dûment prises en compte pour la restauration de Notre-Dame.
27
En matière industrielle, la lixiviation est utilisée pour récupérer des substances en
faissant passer de l’eau sur ou à travers un solide en poudre. En l’espèce, il s’agirait des
eaux de ruissellement pour d’éventuelles particules de plomb.
28
L’usage du plomb n’est plus autorisé pour les constructions neuves.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
31
IV -
Un établissement public adapté à ses missions
En application de l’article 9 de la loi du 29 juillet 2019, c’est à
l’établissement chargé de la conservation et de la restauration d
e la cathédrale
Notre-Dame de Paris, aussi appelé «
Rebâtir Notre-Dame de Paris »
(EP-
RNDP),
qu’a été confié
e la mission «
d’assurer la conduite, la coordination
et la réalisation des études et opérations concourant à la conservation et à
la restauration de la cathédrale
»
. Ce choix d’un établissement public
administratif spécifique, placé sous la tutelle du ministère de la culture, a été
préféré à la pratique habituelle de conduite de cette mission par les services
déconcentrés de l’État, sans doute en rai
son des moyens hors norme
nécessaires à la conduite d’un tel chantier et à l’objectif calendaire fixé.
Il a
également été préféré au recours à l’un des deux opérateurs du
ministère de
la culture intervenant pour les travaux sur les monuments historiques, le
Centre des monuments nationaux (CMN) et l’Opérateur du patrimoine et des
projets immobiliers de la culture (OPPIC),
compte tenu du souhait d’une
gouvernance adaptée au mode de financement, lui aussi spécifique.
A -
Une pratique équilibrée de la gouvernance
L’organisation et le fonctionnement de l’établissement public sont
définis par le décret du 28 novembre 2019 pris en application de l’article 9
de la loi du 29 juillet 2019 pour la conservation et la restauration de la
cathédrale Notre-Dame.
Le caractère exceptionnel du chantier, par sa taille, ses enjeux et son
mode de financement, se traduit par une gouvernance bien formalisée, tant
en ce qui concerne le cadre et les outils de gestion que la comitologie. Les
échanges avec le conseil d’administration, la t
utelle, les donateurs et le
diocèse apparaissent nourris et bien préparés.
1 -
La mise en place d’un
cadre étoffé
Le
cadre de gouvernance s’est
mis en place progressivement après
l’installation de l’établissement le
1
er
décembre 2019. Le président a reçu sa
lettre de mission le 23 janvier
2020, le contrat d’objectifs et de performance
pour la période 2020-
2024 a été adopté par le conseil d’administration du
26 novembre 2020, le schéma directeur des travaux en juillet 2021 et le projet
scientifique et culturel par le conseil du 30 novembre 2021.
Les différents documents organisent un cadre solide et précis permettant
le pilotage dans la transparence de l’établissement. Le dispositif global de suivi
et de contrôle est plus étoffé que pour la moyenne des établissements publics, il
constitue un facteur d’équilibre du poids de la présidence exécutive
, relevé dans
le premier rapport de la Cour. Il reflète aussi
l’importance d’un chantier hors
normes, financé par une souscription nationale et internationale.
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COUR DES COMPTES
32
La lettre de mission du président souligne ainsi la valeur
d’exemplarité qui s’attache à l’ensemble du projet de restauration et à
l’action de l’établissement, compte tenu de sa visibilité médiatique et de
son impact probable sur d’autres grands chantiers du patrimo
ine. Elle
détaille les grands objectifs à atteindre ainsi que les modalités d’action.
Le c
ontrat d’objectif
s et de performance (COP), adopté par le
conseil d’administration en novembre 2020
, couvre la période 2020-2024
et retient trois axes : assurer la restauration exemplaire de la cathédrale et
sa réouverture au culte et à la visite en 2024 ; informer le public et les
donateurs, valoriser les métiers et promouvoir la formation ; assurer le
financement de l’établissement ainsi que l’exemplarité de sa gest
ion. Ces
axes sont déclinés en neuf objectifs, chacun assorti d’un ou plusieurs
indicateurs. Un avenant au COP adopté par le CA de novembre 2021
précise les indicateurs
29
qui n’avaient pas pu être chiffrés en 2020
30
.
L’établissement a présenté au
premier trimestre 2021 le premier
rapport annuel de performance prévu par le COP et validé par le conseil du
16 mars 2021. Ce rapport constate que les différents indicateurs ont été
respectés. Un nouveau rapport de performance a été présenté au conseil de
mars 2022 qui confirme le maintien de cette trajectoire.
Le schéma directeur des travaux, adopté en juillet 2021 sur la base
des études de diagnostic et préparatoires, précise le périmètre des travaux,
les estimations financières et le calendrier.
Le projet scientif
ique et culturel de l’établissement est prévu par le décret
constitutif de l’établissement
31
et par le COP. Il a été adopté par le conseil
d’administration du 30 novembre 2021. Il décline la stratégie de l’établissement
pour conduire les travaux de restauration permettant la réouverture de la
cathédrale en 2024, tout en améliorant les conditions de conservation et de
fonctionnement de l’édifice, dans une logique de conservation préventive
32
. Il
détaille l’important chantier scientifique mis en place par le CN
RS et le ministère
de la culture, et décrit enfin les actions de communication, de médiation, de
formation et d’apprentissage prévues par la loi.
29
Respect du planning de la phase de restauration, audience des outils de
communication numérique, apprentissage.
30
À l’époque, le schéma directeur, désormais joint au COP, n’avait pas encore été arrêté.
31
Article 2, alinéa 5.
32
Selon le Centre international d'études pour la conservation et la restauration des biens
culturels (ICCROM), la conservation préventive est définie comme «
l’ensemble des
mesures et actions ayant pour objectif d’éviter et de minimiser les détériorations ou
pertes à venir. Elles s’inscrivent dans le contexte ou l’environnement d’un bien culturel,
mais plu
s souvent dans ceux d’un ensemble de biens, quels que soient leur ancienneté
et leur état. Ces mesures et actions sont indirectes -
elles n’interfèrent pas avec les
matériaux et structures des biens et ne modifient pas leur apparence
».
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
33
En outre, l’établissement s’est doté d’un plan d’action et de maîtrise
des risques, structuré en trois axes :
-
assurer la restauration exemplaire de la cathédrale et sa réouverture au
culte et à la visite en 2024 ;
-
assurer le financement des actions de l’établissement public
;
-
garantir l’exemplarité de la gestion et du fonctionnement de l’EP
-RNDP.
Un suivi régulier des différents risques correspondant à chacun de
ces axes, qui font l’objet d’une graduation, est assuré, la dernière mise à
jour étant intervenue en octobre 2021.
2 -
Des instances collégiales actives
Le conseil d’administration s’est réuni fréquemment (qua
tre fois en
2020, six fois en 2021), dans des formats divers compte tenu de la crise
sanitaire : présentiel, visioconférence mais également consultation à distance
(prévues par les textes) pour l’approbation de délibérations spécifiques.
Les dossiers prése
ntés au conseil font l’objet de documents détaillés
et les échanges au sein du conseil sont nourris.
La mise en place en mai 2020 du comité d’audit et des
investissements
33
, qui constitue une spécificité de l’établissement par
rapport à la pratique habituelle des établissements publics et qui comprend
des personnalités extérieures au CA, est à souligner. Il permet au conseil
d’administration de disposer sur de nombreux sujets de son ordre du jour,
du travail approfondi et des recommandations du comité. Chacune des
réunions présidées par M. Jean-Pierre Weiss et préparées par des échanges
de questions/réponses écrites de l’établissement donne lieu à un avis écrit
qui contient ses recommandations généralement suivies par le conseil. Le
comité a également souhait
é disposer d’un tableau de bord pour le suivi
des prévisions financières et des plannings.
L’examen des compte
s rendus des réunions montre que le comité
joue un rôle très utile, compte tenu de la technicité des sujets, notamment
en ce qui concerne les budgets, la maîtrise des risques, la comptabilité
analytique, le plan d’audit
, etc.
Il s’attache également à une étude des
marchés soumis à l’approbation du conseil et a souhaité, compte tenu de
l’importance de ceux
-
ci, la création d’une commission des marché
s qui a
été mise en place en février 2021.
33
Prévu par l’artic
le 10 du décret du 28 novembre 2019, le comité est composé de
M. Jean-
Pierre Weiss, administrateur personnalité qualifiée, d’un représentant de la
direction générale des patrimoines et de l’architecture, d’un représentant de la direction
du budget et de M. Jean Gautier, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes.
Le CBCM du ministère de la culture participe également aux réunions.
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COUR DES COMPTES
34
Le conseil scientifique composé de 14 membres a tenu deux
réunions par an comme prévu par les textes. Ses réunions ont permis de
discuter et de valider les grandes options du chantier. Les comptes rendus
de ses travaux ont été communiqués au conseil et à la CNPA. En juin 2020,
il
se prononce en faveur d’une
reconstruction à l’identique, position ensuite
confirmée par la CNPA du 9 juillet ; en novembre 2020, il examine les
premières réflexions du d
iocèse sur l’aména
gement liturgique et les options
de restauration de la charpente ;
en février 2021, les questions de l’orgue
et de la restauration des charpentes ; enfin, en novembre 2021, le
programme d’aménagement liturgique présenté par le
diocèse.
Le comité des donateurs a été installé le 24 juin 2020
34
et s’est à
nouveau réuni le 17 décembre 2020, puis le 10 juin 2021. Les trois
fondations participent également au comité de suivi co-présidé par le
ministère de la culture
et l’EP
-RNDP
qui s’est réuni à deux reprises en
2020 et à nouveau à deux reprises en 2021.
Lors de la réunion de juin 2021 du comité des donateurs, la phase
de restauration a été présentée sur la base d’une note et d’un projet de
budget estimatif. Les discussions du comité sont détaillées
infra
.
B -
Une organisation interne déclinant les missions
de
l’EP
-RNDP
1 -
Un organigramme resserré
L’organisation de l’établissement est calquée sur les deux grandes
missions assignées par la loi à l’établissement public
: la reconstruction de
Notre-Dame,
d’une part
, les actions de sensibilisation et de formation aux
métiers des monuments historiques,
d’autre part
.
Autour du Président de l’établissement et de son directeur général
délégué, deux directeurs métiers sont en charge de la direction des
opérations,
d’une part, de l
a direction de la communication, du
développement et de la programmation culturelle, d’autre part. Une
secrétaire générale pilote les fonctions support de l’établissement. Un
adjoint au directeur général délégué complète l’équipe de direction
.
34
Son fonctionnement est régi par une
« charte de fonctionnement du comité des
donateurs
» adoptée par le conseil d’admin
istration en avril 2020.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
35
Organigramme n° 1 :
Organisation
de l’
établissement en novembre 2020
Source : EP-RNDP.
2 -
Des ressources humaines spécialisées
En 2020, aucun plafond d’emplois n’était fixé en loi de finances pour
l’EP
-
RNDP, comme opérateur de l’État. Les emplois ont donc été
intégralement portés dans le
budget de l’établissement comme emplois hors
plafond. Pour 2021 et 2022, le plafond inscrit en LFI était de 39, conforme à
l’objectif cible initialement établi en accord avec la tutelle.
Le nombre d’agents était de 3
0 au 31 décembre 2020. Au
31 décembre 2021, il était de 34 ETP, dont un agent mis à disposition par
le ministère des armées contre remboursement. Il convient toutefois de
noter que les emplois rémunérés sur l’ensemble de l’année par l’EP
-RNDP
ne représentent que 29,7
ETPT pour l’exercice écoulé
, compte tenu des
mouvements de départs et d’arrivées.
En 2022, l’EP
-RNDP devrait employer 40,5 ETP, 38 sous plafond
d’emplois, dont
toujours un agent mis à disposition par le
Ministère des
armées, et 2,5 hors plafond. Ces deux derniers
35
sont financés par le mécénat
de l’Institut des métiers,
grâce à la vente de son siège (cf
.
infra
), la mise à
35
Emplois fléchés vers les actions de médiation et de formation.
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COUR DES COMPTES
36
disposition
faisant comme pour les exercices précédents l’objet d’un
remboursement par l’EP
-RNDP.
L’effectif global dépasse ainsi pour la
première fois l’objectif
cible initial, et alors même que les postes prévus pour
le suivi de l’aménagement du parvis
36
n’ont pas été pourvus en l’absence de la
convention envisagée avec la ville de Paris, qui a renoncé à déléguer la maîtrise
d’ouvrage. Cette augmentation des effectifs est justifiée par l’EP
-RNDP par la
montée en charge de l’établissement pour la phase de restauration.
Bien que son décret statutaire lui permette de recruter des
contractuels de droit privé, l’ensemble des emplois sous plafond sont des
fonctionnaires détachés sur contrat ou des contractuels de droit public.
La spécialisation des fonctions de l’établissement se traduit par un
nombre réduit d’emplois de catégories B et C, 10 au total.
Lors de la création de l’établissement, un engagement a été pris
d’inscrire l’ensemble des rémunérations dans le cadre de la grille dite Albanel,
applicable aux personnels du ministère et à ses opérateurs. Cette grille de
rémunération s’applique de plein droit aux fonctionnaires détachés sur contrat
et est conforme à ce référentiel. Elle a été approuvée par le conseil
d’administration
dès sa séance du 3 décembre 2019. La mise en place du cadre
de gestion qui régit notamment la part variable de la rémunération assise sur
les résultats professionnels de l’ensemble des agents de
l’EP
-RNDP et fixe les
conditions d’avancement et de changement
de poste des agents contractuels
n’est intervenue par délibération du conseil que le 30 novembre 2021. Le
ministère a consenti que ce cadre de gestion soit, comme il le qualifie lui-
même, «
particulièrement attractif en termes de rémunération et de part
variable
». Le directeur général délégué
s’est référé à
«
l’accord du CBCM
notamment sur des dispositions plus avantageuses
qu’Albanel
» en indiquant
qu’
« il
a été tiré parti du fait que c’est u
n établissement public de mission qui
n’a
pas de pérennité assurée
»
37
. Le cadre de gestion diffère de la circulaire
Albanel sur plusieurs points. Il comporte un plafond de rémunération plus
élevé pour les emplois de catégorie 5, qui comprend notamment les directeurs
de projets, essentiels à la réalisation des objectifs, par analogie à ce qui est
pratiqué à l’OPPIC.
U
ne prime d’intérim a également été mise en place
,
inspirée de celle existante à l’OPPIC
. Enfin, la part variable est étendue à
l’ensemble des a
gents, y compris ceux détachés ou mis à disposition, et une
procédure d’avancement
« constituant un progrès par rapport à cette même
circulaire Albanel
»
38
a été fixée.
Il s’agit
, au travers de ce cadre de gestion, de
compenser, singulièrement pour les agents contractuels, les durées de contrat
limitées liées à l’achèvement du chantier.
36
Quatre postes étaient prévus dans le schéma initial pour le pôle environnement-
valorisation dont relevait l’aménagement des abords.
37
Cf. Comité d’entreprise et des
conditions de travail (CECT) du 17 juin 2021
38
CECT du 17 juin 2021.
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L
’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
37
Malgré ces dispositions et la création récente de l’EP
-RNDP, on
observe une rotation déjà importante sur certains postes :
c’est notamment
le cas, au sein du secrétariat général, des juristes, celle-ci pouvant
s’expliquer par le niveau de rémunération pour des emplois fortement
spécialisés donnant lieu à concurrence, mais aussi des ingénieurs de
conduite de chantier. L’établissement constate également qu’il y a assez
peu de candidatures pour les postes à pourvoir et il reste encore des postes
non pourvus, compte tenu des départs. Ceci n’a pas fait obstacle à ce jour
au suivi et à l’exécution des marchés mais peut constituer comme le
m
inistère l’indique, une vraie fragilité si ce
tte situation devait perdurer.
C -
Les comptes de l’établissement
1 -
Le compte de résultat
Tableau n° 2 :
Évolution du compte de résultat entre 2020 et 2021 (en
€
)
2020
2021
C/ 60
Achats et consommation de marchandises et approvisionnements,
réalisation de travaux et consommation directe de service
par l'organisme au titre de son activité
1 000 548
2 808 458
C/ 64
Charges de personnel (salaires et traitements,
charges sociales et autres charges de personnel)
2 141 685
2 395 390
C/ 65
Autres charges de fonctionnement
(dont 654 « perte pour créances irrécouvrables »).
355 539
1 822 481
C/ 68
Dotation aux amortissement, dépréciations, provisions,
valeurs nettes comptables des actifs cédés
564 205
873 684
Total des dépenses
4 061 978
7 900 015
C/ 70
Vente de biens ou prestations de service
50 000
C/ 74
Subvention pour charge de service public et subvention
de fonctionnement en provenance de l'État et autres entités
publiques, dons et legs
4 031 022
12 335 790
C/ 75
Autres produits de gestion courante
148
690
C/ 76
Produits financiers
C/ 77
Produits et autres produits exceptionnels
34 572
C/ 78
Reprises du financement rattaché à un actif
32 059
832 835
C/ 79
Transfert de charges
Total des recettes
4 063 231
13 253 888
Résultat
1 252
5 353 872
Source : Comptes financiers 2020 et 2021.
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38
À titre liminaire, l’analyse de ce compte fait apparaitre une
évolution importante des dépenses, liée aux frais de gardiennage de la
phase restauration de la cathédrale pour 1,2
M€
, au financement du
programme d’intervention sur les objets mobiliers appartenant à l’État pour
1,5
M€
et aux charges de personnels (254 000
€
)
39
, suite à l’augmentation
des effectifs entre 2020 et 2021.
2 -
Les dépenses
Les dépenses de fonctionnement sont constituées principalement des
charges de fonctionnement de l’établissement, d’une convention de mise à
disposition de personnel signée avec le ministère des armées, du loyer du
siège de l
’établissement public
, des actions de valorisation du chantier et des
métiers, d
es dépenses d’information des donateurs et de relations avec les
mécènes, d
es dépenses d’informations du public et de communication,
des
manifestations culturelles et des frais de gardiennage du chantier.
En outre, il a été relevé
qu’en 2020 le montant des intérêts
moratoires constatés s’est élevé à 131
300
€ (le délai global de paiement
était de 34 jours). En 2021, le délai global de paiement était de 24 jours et
les intérêts moratoires constatés ont été de 34 500
€.
3 -
Les ressources
Les ressources de l’établissement proviennent de trois sources
: tout
d’abord
, des subventions du ministère provenant des fonds de concours
recueillant les versements des dons effectués auprès des fondations, du CMN
et du trésor public dans le cadre de la souscription nationale (
infra
) ; ensuite,
des dons et mécénats reçus directement par l’établissement conformément à
sa mission de collecte ; enfin, marginalement, de la subvention pour charges
de service public versée par le ministère de la culture.
La subvention pour charge de service public correspond
partiellement à la prise en charge du loyer des locaux du siège de
l’établissement sis à la Cité Martignac
(Paris, 7
ème
arrondissement) et
répond à l’
observation de la Cour des comptes, dans son rapport de
septembre 2020, qui avait considéré comme anormal au regard des
dispositions habituelles sur l’hébergement des établissements publics le
versement d’un loyer de surcroît financé par le produit des don
s.
39
34 agents (24 agents contractuels, 9 agents titulaires détachés et 1 agent mis à
disposition) fin 2021, ce qui équivaut à 29,7 ETPT rémunérés par l’établissement en
tenant compte des départs et des arrivées.
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’ACHÈVEMENT DES TRAV
AUX DE SAUVEGARDE
39
Cette recommandation demandait «
d’apporter directement sur crédits
budgétaires à
l’établissement public
chargé des travaux de conservation et de
restauration de Notre-Dame une subvention annuelle pour charge de service
public destine à financer l’ense
mble de ses charges de fonctionnement »
, à
l’instar de ce qui est pratiqué pour l’ensemble des autres opérateurs du
ministère conduisant des travaux sur des monuments historiques.
Il est à noter que l’établissement a bénéficié de mécénat en nature
ou en compétence. Il en a ainsi été le cas pour les expositions sur les
palissades du chantier (rue du Cloître) qui ont mis en valeur le chantier et
les métiers mobilisés
40
ainsi que l’affichage de dessins d’enfants sur les
palissades au niveau du parvis. Ces opérations ont été réalisées dans le
cadre de mécénats en nature de la société JCDecaux
41
.
Une convention attribuant à l’établissement les droits et prérogatives
de l’affectataire domanial pour toute la durée du chantier a été signée le
7 mai 2021
42
: la cathédrale Notre-Dame (bien immobilier historique)
n’avait donc pas été inscrite au bilan de l’exercice 2020. Les travaux réglés
par l’établissement étaient comptabilisés au compte 2
382 «
acomptes
versés sur commande d’immobilisation
». À la suite de la signature de cette
convention, la cathédrale a été inscrite au bilan de l’exercice 2021
(cf
.
compte 217
supra
) pour une valeur de 12
M€
.
Cette inscription au bilan de l’exercice 2021 a conduit à la
comptabilisation des sommes réglées en 2021 au titre des travaux, au
compte 2313 «
immobilisations en cours
» et à la comptabilisation des
financements associés au compte 10411 «
contrepartie et financements des
actifs mis à disposition de l’établissement par l’État
».
Les produits des fonds de concours reversés via le programme 175,
pour un montant de 72,7
M€, ont permis à l’établissement de disposer
d’une trésorerie élevée, celle
-ci étant ainsi abondée par les fondations
collectrices mais également par le Centre des monuments nationaux.
4 -
Le budget et le financement des investissements
En 2020, sur 165
M€
du
budget de l’établissement affectés à la
phase de sécurisation et de consolidation ainsi qu’aux premières études
préalables à la restauration, un reliquat de 0,18
M€
de crédits de paiement
restait inscrit en 2020 sur le budget du ministère de la culture, afin de solder
les opérations engagées en 2019 dans le cadre de marchés ou commandes
non encore transférés à l’établissement public à sa création.
40
4,8
M€ provenant de l’Institut supérieur des métiers.
41
En comptabilité générale, le montant de ce mécène représente 0,14
M€
.
42
Cf. annexe n° 2.
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40
Un montant total de 0,14
M€
a été réglé et des dégagements ont été
effectués pour la différence, pour 0,04
M€
,
à la suite d’annulation ou
d’ajustement du montant de certaines commandes.
En outre, les dépenses exécutées sur le budget de l’établissement se
sont élevées à 80,9
M€
en AE et 70,1
M€
en CP. L’écart par rapport aux
prévisions d’engagement (2,6
M€
) est essentiellement lié à des décalages
temporels, notamment une plus-value de 1,7
M€
pour les travaux de
démontage de l’échafaudage incendié, qui avait été inscrite au budget 2020
et a donné lieu à des négociations qui n’ont abouti qu’au début de l’année
2021 (cf
. infra
). L’écart aux prévisions de paiement (5,9
M€
) résulte
principalement, outre du décalage du paiement de cette plus-value, de la
progression des travaux d’étaiement.
Il est à noter qu’afin de retracer comptablement la participation de
l’ensemble des
sources de financement aux charges et aux investissements de
la phase des travaux de sécurisation, l’établissement a effectué une correction
à hauteur de 2,4
M€
sur l’imputation des mécénats qu’il a perçus en
2020
43
.
Le budget de 165
M€
a été ramené à 151
M€
, toutes dépenses
confondues, à l’issue du budget rectificatif de l’exercice 2021. Les
dépenses exécutées en 2021 s’établissent à 18,5
M€
en AE et à 43,7
M€
en
CP, dont 16,3
M€
et 41,8
M€
relèvent de dépenses d’investissement.
En cumul depuis avril 2019
, les dépenses réalisées pour l’opération
de sécurisation et de consolidation s’élèvent
, au 31 décembre 2021, à
156,5
M€
en AE et à 148,5
M€
en CP.
S’agissant de l’opération de restauration, celle
-ci a été inscrite au
budget pluriannuel de l’établissement
pour un montant de 548
M€
, toutes
dépenses confondues (personnel, fonctionnement, valorisation des métiers
et investissement). Sur ce montant, la prévision de dépense pour 2021
s’établissait à 71,5
M€
en AE et à 15
M€
en CP, dont 62,5
M€
et 10,8
M€
pour l
es dépenses d’investissement.
43
Comptabilisés intégralement sur l’exercice 2020, ces mécénats ont été imputés en
recettes de fonctionnement selon une quote part de 6 % (dans le budget prévisionnel
2020 d’un montant de 165
M€ de la phase de sécurisation, les dépenses de
fonctionnement 2020 atteignaient 6 %).
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41
5 -
Le fonds de roulement et la trésorerie
Tableau n° 3 :
Fonds de roulement et trésorerie (en
M€
)
Année
2020
2021
Ressources stables
110
171
Emplois stables
71
254
Fonds de roulement
38
41
BFR
- 1,6
- 0,8
Trésorerie nette
40
42
Source : Comptes financiers 2020 et 2021, retraitement Cour.
Le montant élevé de la trésorerie s’explique par le fait qu’en fin
d’exercice 2020, l’établissement a reçu les premières fonds (38
M€
), issus
des trois conventions de mécénat qu’il a signées ave
c la Fondation
Bettencourt-Schueller, Téthys et L
’Oréal (pour un montant total de 200
M€
).
Cette trésorerie abondante donne la capacité à l’établissement de
régler les entreprises dans les délais règlementaires, des intérêts moratoires
ont néanmoins été versés principalement en 2020 dans la période de mise
en place de l’établissement.
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COUR DES COMPTES
42
___________ CONCLUSION ET RECOMMANDATION __________
Depuis sa création,
l’établissement public assure la maîtrise d’ouvrage
des travaux de conservation et de restauration de la cathédrale dans le respect
des choix techniques des services des monuments historiques et de la
commission nationale du patrimoine et de l’architecture. Ces travaux sont
exécutés dans un environnement marqué par la crise de la covid 19 et la
pollution au plomb, conséquence
de l’incendie, et en l’absence pour celle
-ci
d’une réglementation claire applicable aux monuments historiques.
Les travaux
engagés à l’initiative du ministère de la
c
ulture dans le cadre d’un groupe de
travail interministériel et formalisés en 2018 par un guide pratique
« Organisation des chantiers patrimoniaux en présence et avec maintien du
plomb »
n’ont en effet jusqu’ici pas débouché, le guide n’ayant jamais été publié.
Compte tenu des enjeux liés à la reconstruction de la toiture à l’identique, donc
en plomb, il est urgent que le cadre juridique soit rapidement clarifié.
Les travaux de conservation sont aujourd’hui achevés pour un
montant de 151
M€
, inférieur au montant qui avait été révisé en 2020 pour
prendre en compte une meilleure appréciation des conséquences de
l’incendie sur la stabilité de la cathédrale et l’allongement de la durée du
chantier, conséquence de la crise sanitaire et de la pollution au plomb.
La feuille de route de l’établissement public est inscrite dans un
contrat d’objectifs et
de performance précis. Les différentes instances
dirigeantes ou consultatives mises en place par le décret constitutif
remplissent pleinement leurs missions aux côtés d’une présidence
exécutive forte, et permettent d’encadrer les processus de décisions
,
no
tamment en matière de dépenses. L’existence d’un comité d’audit du
conseil d’administration, élargi à des membres extérieurs, constitue une
originalité par rapport aux autres établissements publics administratifs.
Ses avis sont documentés et généralement suivis.
L’organisation interne de l’établissement décline les missions qui
lui sont assignées par la loi. Le nombre d’emplois de l’établissement,
inférieur au plafond fixé en loi de finances et à l’objectif cible retenu lors
de sa création, devrait s’accro
ître en 2022 pour dépasser cette cible à la
faveur notamment d’un important mécénat pour la promotion des métiers
et du démarrage des travaux de restauration. L’établissement peine
toutefois à fidéliser certains collaborateurs malgré un cadre de gestion
attractif.
Les salaires et les charges représentaient un peu plus de la moitié
des dépenses de fonctionnement de l’établissement en 2020, celles
-ci étant
entièrement couvertes par la souscription nationale et le mécénat obtenu
par l’établissement public, à l’exception du loyer du siège.
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43
Le contrôle des marchés par la Cour permet de constater la
régularité de ceux-
ci, la création d’une commission des marchés et le
travail du comité d’audit permettant par ailleurs d’améliorer leur suivi par
le conseil d’admin
istration pour la campagne de restauration.
Plus de deux ans après la création de l’établissement public, le
respect des indicateurs figurant dans son contrat d’objectifs et de
performance montre qu’il est très rapidement monté en puissance et s’est
fortement mobilisé sur sa mission.
La Cour formule la recommandation suivante :
1.
Définir le cadre juridique applicable aux chantiers patrimoniaux
confrontés
à la présence et à l’emploi du plomb
(Ministère de la
culture, Ministère de l’économie, des finances et d
e la souveraineté
industrielle et numérique, Ministère du travail, du plein emploi et de
l’insertion,
Ministère de la santé et de la prévention).
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Chapitre II
La restauration de la cathédrale :
des dons et des besoins de financement
supérieurs aux dépenses directement
liée
s aux conséquences de l’incendie
I -
Des dons assurant
l’essentiel du financement
de l’établissement public et de ses missions
A -
Des promesses de dons concrétisées
et de nouveaux concours
La souscription nationale annoncée par le Président de la République le
soir même de l’incendie et organisée par la loi du 29
juillet 2019 a permis de
recueillir un montant de dons sans précédent, provenant tant des donateurs
individuels que des entreprises et des collectivités territoriales. Bien que lancée
dans un cadre national, la souscription ouverte a suscité également un afflux
de dons en provenance de l’étranger, témoignant du retentissement mondial de
l’incendie de la cathédrale Notre
-Dame.
Outre le Trésor Public et le ministère de la culture, la collecte a été réalisée
par la Fondation du patrimoine, la Fondation Notre Dame, la Fondation de
France et le Centre des monuments nationaux. La plus grande partie des dons a
transité par la Fondation du patrimoine et la Fondation Notre Dame
44
.
44
Le détail des dons et leur provenance figure dans le précédent rapport de la Cour,
La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
,
op. cit
. La
dépense fiscale induite est évoquée à la page 87 de ce rapport et dans le rapport prévu
à l’article 6 de la loi du 29 juillet 2019
, remis au Parlement le 7 octobre 2020.
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COUR DES COMPTES
46
Les dons et promesses de dons reçus en 2019 représentaient au
31 décembre 2019, 824,7
M€
. Fin 2021, ils totalisent (hors frais de gestion)
841,5
M€
.
En 2020 et 2021, au-delà de concrétisations des promesses de dons
initiales dont 98 %
étaient contractualisés au mois d’octobre 2021
(les
promesses de dons se traduisant soit par un versement unique, soit par des
versements séquencés en fonction d’un calendrier défini à l’avance ou en
fonction des appels de fonds), les trois fondations collectrices ont continué à
recevoir des dons pour des montants cependant limités. Par ailleurs,
l’établissement public, comme le prévoit son décret constitutif dans son article
2 alinéa 8
45
, a également reçu directement des dons. C’est notamment le cas des
dons apportés par la Fondation Bettencourt Schueller (100
M€), par L’Oréal
(50
M€
) et par Thétys (50
M€
). Ces dons ont été formalisés en 2020 mais, déjà
annoncés publiquement en 2019, ils étaient intégrés dans le chiffre de collecte
pour 2019. En 2020 et 2021, des entreprises, des associations, des fondations
privées, des collectivités territoriales et des personnes physiques ont continué à
apporter leur soutien à la reconstruction de Notre-
Dame. L’établissement public
ne mène pas de campagne de levée de fonds ; toutefois, il accepte les dons
spontanés, le site internet proposant une fenêtre dédiée à cet effet.
Ces nouveaux concours ainsi que ceux collectés depuis 2020 par les trois
fondations (le cas de la Fondation du patrimoine étant particulier puisqu’elle a
cessé la collecte en 2019, les sommes pour 2020 et 2021 correspondants à des
promesses de dons non encore concrétisées et qui l’ont été par la suite
, ainsi
qu’à la vente de livres, disques et médailles), totalisent 16
M€
.
Tableau n° 4 :
Nouveaux dons reçus par les fondations
et
l’
établissement public en 2020 et 2021 (en
€
)
2020
2021
Fondations de la souscription nationale*
6 447 347
1 157 512
EP-RNDP Fondations diverses
1 150 000
EP-RND Collectivités locales
2 043 456
16 000
EP-RNDP Divers **
68 620
386 173
EP-RNDP Institut sup. métiers
4 800 000
TOTAL
8 559 423
7 509 685
Source : EP-RNDP retraité par la Cour.
*Fondation Notre Dame, Fondation du patrimoine et Fondation de France.
** Comprend les dons de personnes physiques ainsi que d’entreprises ou associations
45
«
Il recherche auprès des personnes publiques et privées en France et à l’étranger
les financements nécessaires à la conduite des travaux de conservation et de
restauration de la cathédrale et à l’accomplissement de l’ensemble de se
s missions
».
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LA RESTAURATION DE LA CATHÉDRALE : DES DONS ET DES BESOINS
DE FINANCEMENT SUPÉRIEURS AUX DÉPENSES DIRECTEMENT LIÉES
AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
47
Ces dons traduisent une montée en puissan
ce de l’EP
-RNDP dans la
collecte. Par ailleurs,
le mécénat de l’Institut des métiers, assuré par le
produit des deux tiers de la vente de son siège, vise spécifiquement les
actions de formation aux métiers du chantier.
Il convient également de noter que le niveau des frais de gestion perçus
par les fondations est resté limité, de l’ordre de 0,4
% à 0,6 % de la collecte.
À ces dons en numéraire s’ajoutent au niveau de l’EP
-RNDP des dons
en nature et mécénats de compétence. 18 conventions à ces titres ont été
signées en 2020 et 2021. Au total, ces apports représentent une somme qui peut
être estimée à fin 2021 au minimum à 5
M€
. Les deux opérations les plus
importantes sont le mécénat en nature de la société Loxam (mise à disposition
de bâtiments modulaires destinés au redéploiement de la base vie du chantier
pour les travaux de restauration) et celui en nature et en compétence de
l’interprofession France Bois Forêt d’apport de 2
000 grumes de chêne et de
leur façonnage destinés à la reconstruction de la charpente et de la flèche. Ce
décompte ne comp
rend pas le mécénat de compétence d’Air France signé le
15 octobre 2019 avec le ministère de la culture au bénéfice du futur
établissement public,
qui n’a donné lieu qu’à un tirage limité par ce dernier
.
Les actions de mécénat des entreprises, qu’ils s’agissent de dons en
numéraires, de dons en nature ou de mécénat de compétence, sont encadrées
par la charte du mécénat de l’établissement public (
cf. annexe n° 3) approuvée
par son conseil d’administration du 30
septembre 2020. Le document décline
la charte de mécénat culturel établie par le ministère de la culture dans sa
version de juillet 2020, en soulignant particulièrement certaines dispositions
ou en les complétant
pour l’adapter à l’
établissement public. Elle définit
notamment dans son article 13 les restrictions à la nature ou à la situation des
partenaires et conflits d’intérêt
. Le g de cet article précise notamment que
«
l’EP
-
RNDP doit mettre en œuvre toute disposition pour éviter qu’un
partenaire engagé dans une procédure de mise en concurrence pour devenir
son fournisseur ou son prestataire soit avantagé par rapport à d’autre
s
opérateurs
». Dans ce même objectif de limiter les risques de conflits
d’intérêts
, la charte indique que «
la recherche de mécénat de compétence doit
être effectuée dans la mesure du possible en amont d’un appel d’offres
».
B -
Le financement de l’établissem
ent public
par les dons reçus par les fondations
Les dons reçus au titre de la souscription nationale par les quatre
collecteurs désignés par la loi représentent les trois quarts des ressources
de l’établissement public, le solde provenant des fonds qu’il
a lui-même
collecté dans le cadre de sa mission. Ces fonds sont appelés selon des règles
fixées par les conventions passées entre le ministère de la culture et
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COUR DES COMPTES
48
chacune des trois fondations
46
au fur et à mesure de l’avancée du chantier.
Ils sont versés sur d
eux fonds de concours au budget de l’État, le premier
pour les dons nationaux, le second pour les dons internationaux.
À la fin de l’année 2021, 160,418
M€
avaient été versés sur les deux
fonds de concours
47
. Les fonds reçus directement par le ministère de la
culture
48
et par le Trésor public, soit 8,6
M€
, ont été versés dans les fonds
de concours pour les sommes déjà perçues.
Tableau n° 5 :
versements sur les fonds de concours (en
€
)
2019
2020
2021
Total
Dons nationaux
Fondation de France
6 289 000
6 289 000
Fondation du patrimoine
24 122 173
9 388 145
33 510 318
Fondation Notre Dame
22 000 000
40 366 707
8 003 724
70 370 431
Centre des monuments nationaux
4 308 251
2 675 669
6 983 920
Conventions ministère culture
1 500 000
5 000 000
200 000
6 700 000
Trésor public
207 899
21 068
228 967
Dons internationaux
Fondation de France
889 000
889 000
Fondation du patrimoine
20 777 827
189 855 20 967 682
Fondation Notre Dame
5 433 293
6 698 276
12 131 569
Fondation Hasso Platner
1 000 000
1 000 000
Participations diverses
82 710
82 710
Centre des monuments nationaux
439 596
145 598
-
585 194
Trésor public
561 090
116 434
1 599-
679 123
Total
74 916 837
53 758 769
31 742 308 160 417 914
Source :
Cour des comptes d’après données
ministère de la culture.
Les versements de la Fondation de France effectués le 30 décembre 2020 (5 900 000
€
) ont été
encaissés sur les fonds de concours en 2021.
Les versements correspondants aux conventions signées par le ministère de la culture ont été
intégralement effectués,
à l’exception de la société ENGIE pour laquelle un premier versement de
200 000
€
a été effectué en 2021 sur un total prévu de 500 000
€
.
46
La collecte du Centre des monuments nationaux a été appelée dès 2019 et
intégralement versée, un premier versement étant intervenu le 31 juillet 2019 et le
second le 27 janvier 2020.
47
Fonds 1-2-00579 dons nationaux, fonds 1-3-00580 dons internationaux.
48
Conventions signées avec Crédit agricole, Air liquide, Engie, Metro France, ainsi
qu’une fondation allemande.
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LA RESTAURATION DE LA CATHÉDRALE : DES DONS ET DES BESOINS
DE FINANCEMENT SUPÉRIEURS AUX DÉPENSES DIRECTEMENT LIÉES
AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
49
Les fonds de concours alimentent,
via
le programme 175 de la mission
culture, le financement de l’établissement public. Le ministère n’a pas donné
suite à la recommandation de la Cour tendant à assurer le financement des
charges de fonctionnement de
l’
établissement public par une subvention sur
crédits budgétaires hors fonds de concours. Seule la prise en charge du loyer
des locaux de l’EP
-RNDP cité Martignac a donné lieu à une révision de
l’arbitrage
rendu antérieurement et est désormais couvert par une subvention
annuelle de 195 250
€
49
. Le ministère considère que le financement par les
dons du fonctionnement de l’établissement
«
est justifié par le lien
indissociable entre une maîtrise d’ouvrage dédiée et performante, et la
bonne réalisation d’un chantier d’une si vaste ampleur
». Cette position ne
fait toutefois pas l’unanimité
,
y compris au sein du conseil d’administration,
dont l’une des membres a considéré
que «
le mode de financement par les
dons constitue une anomalie
50
». Le ministère considère toutefois que
«
l’affectation d’un
e partie marginale de la souscription nationale au
financement de l’EP
-
RNDP fait désormais l’objet d’un consensus avec les
fondations habilitées à collecter la souscription nationale, qui a été
formalisé dans les avenants financiers
». La Cour observe néanmoins que la
Fondation de France rappelle à l’occasion de chacun des virements effectués
sur les fonds de concours à l’occasion des appels de fonds les termes de
l’accord cadre initial signé avec le
ministère sur la nature des dépenses
éligibles, ce qui relativise
l’
affirmation du ministère.
Le ministère précise enfin que «
La définition d’une ligne de partage
claire entre les dépenses qui entrent dans le périmètre de la souscription
nationale et celles qui n’y entrent pas a fait l’objet de débats avec les
fondations collectrices lors du comité de suivi des conventions-cadre de
septembre 2020 »
. Il convient de souligner, comme cela a été fait dans le
précédent rapport de la Cour, que ces conventions cadre ne sont pas
homogènes entre les différentes fondatio
ns s’agissant des prises en charg
e. À
titre d’exemple, la Fondation du patrimoine considére
au regard de sa pratique
habituelle
que les dépenses de maîtrise d’ouvrage sont une partie intégrante du
chantier de restauration et peuvent à ce titre être financées par les donateurs.
Ce mode de financement nécessite d’anticiper les appels de fonds
afin d’assurer à l’établissement public
la trésorerie nécessaire au
financement des travaux et à son fonctionnement. On observe que les
versements effectués depuis le p
rogramme 175 vers l’établissement sont
inférieurs aux dépôts effectués par les collecteurs dans les fonds de
concours : sur la période 2019-
2021 (inclus), l’écart est de 12
M€
.
49
CA du 30 septembre 2020.
50
CA du 30 septembre 2020.
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COUR DES COMPTES
50
À la fin de l’année 2021
,
les subventions versées à l’établissement
public se montaient à 140,3
M€
(de 2019 à 2022), dont 390 500
€
correspondant au loyer acquitté par l’établissement public pour son siège
dans les dépendances des services du Premier Ministre, cité Martignac hors
fonds de concours. Le tableau suivant retrace les différents versements.
Tableau n° 6 :
s
ubventions versées à l’EP
- RNDP (en
€
)
Subventions 2020 (situation au 31 décembre 2020)
P175 - Subvention de fonctionnement (64)
1 130 000
2 514 892
Total 2020 : 3 644 892
P175 - Subvention d'investissement (72)
23 870 000
18 525 000
17 485 108
9 215 000
Total 2020 : 69 095 108
TOTAL Subventions 2020
72 740 000
Subventions 2021 (situation au 31 décembre 2021)
P175 - Subvention de fonctionnement (32)
3 715 236
2 362 680
195 250
Total 2021 : 6 273 166
P175 - Subvention d'investissement (72)
18 249 231
23 889 320
Total 2021 : 42 138 551
TOTAL Subventions 2021
48 411 717
Source : ministère de la culture (CBCM).
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LA RESTAURATION DE LA CATHÉDRALE : DES DONS ET DES BESOINS
DE FINANCEMENT SUPÉRIEURS AUX DÉPENSES DIRECTEMENT LIÉES
AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
51
II -
Le respect des obligations légales
par l'EP-RNDP et les fondations
A -
L’action des fondations
La recommandation n° 4 du premier bilan de la Cour sur la
conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
prescrivait de «
Mettre en place au
sein de l’établissement public une
comptabilité analytique permettant de donner à chacun des organismes
collecteurs des dons une information détaillée sur l’emploi des fonds issus
de la souscription nationale et répondant aux obligations de la législation
française sur la générosité publique ainsi qu’aux règles spécifiques des
fondations étrangères
. »
L’avenant financier n°
2 relatif à la phase de sécurisation et de
consolidation de la cathédrale, signé en 2020, stipule d’ailleurs que
«
l’Établissement public s’engage à mettre en place, à destination des
donateurs, une communication adaptée ».
Aux termes de la loi du
7 août 1991
51
,
cette obligation d’information ne lui incombe pas
directement ; elle pèse en réalité sur les fondations collectrices. De façon
g
énérale, la place importante de la communication dans l’action entreprise
par l’Établissement public a permis de nourrir la communication des
fondations à l’intention de leurs propres donateurs.
Dans le cadre de la souscription nationale organisée par la loi du
29 juillet 2019, la Fondation Notre Dame et la Fondation de France
considèrent que leur rôle est limité à la collecte de fonds pour les reverser
aux fonds de concours créés par l’État à cet effet. Conformément à la
réglementation comptable, l’intégr
alité des versements aux fonds de
concours est comptabilisée en missions sociales dans leur compte d’emploi
ressources respectif. Cette collecte se caractérise donc, pour ces deux
fondations, par un taux élevé de missions sociales dans les emplois. Il est à
noter que la Fondation du patrimoine a également créé pour la collecte Notre-
Dame un compte d’emploi ressources dédié. En outre
, la Fondation Notre
Dame édite une plaquette complète avec bilan, compte de résultat, compte
emplois ressources gérant le Fonds cathédrale comme une fondation abritée.
51
Loi n° 91-772 du 7 août 1991 relative au congé de représentation en faveur des
associations et des mutuelles et au contrôle des comptes des organismes faisant appel à
la générosité publique.
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COUR DES COMPTES
52
Les
avenants
financiers
signés
avec
l’Établissement
public
comportent une annexe budgétaire globale, qui n’est pas ventilée par type de
dépenses ni par origine des fonds ; cette ventilation permettrait pourtant aux
fondations collectrices de s’assurer que les versements financiers issus des
dons qu’elles ont collectés ne couvrent que les dépenses éligibles définies
par l’accord
-cadre signé en 2019. La Fondation de France a sollicité à
plusieurs reprises cette info
rmation de l’établissement public et en dernier
lieu dans le cadre de la finalisation des dépenses de sécurisation. Pour sa part
et pour le même motif, la Fondation du patrimoine n’a pas souhaité adosser
son premier appel de fonds pour la partie restaurati
on sur l’enveloppe globale
retenue par
l’établissement public
(soit 498
M€
), mais au contraire la limiter
au besoin d’engagement pour l’année 2021 (soit 108
M€
)
52
.
Les fondations veillent en effet au respect des prescriptions particulières
exprimées par les donateurs. Les trois fondations ont décaissé dès 2019 et 2020
les dons des personnes physiques, afin qu
’ils
soient bien affectés aux
opérations de sécurisation et de consolidation de la cathédrale. Au contraire,
e
n raison de l’intention affichée par
certains donateurs, leurs dons déjà
encaissés ne peuvent être utilisés qu’au
financement de la phase de restauration
de la cathédrale, à l’exclusion de la phase de sécurisation. Il en va ainsi, par
exemple, du don de 2,5 M$ versé à la Fondation de France par la société
Disney Worldwide Service Inc.
par l’intermédiaire de
Friends of Fondation de
France
qui ne pourra, pour cette raison, être employé qu’à compter de 2022.
Une particularité de cette collecte est l’implication des grands mécènes,
qui conduit les fondations, sinon à intervenir dans les choix techniques, du
moins à porter très directement une appréciation sur les coûts de certains de
ces choix, en raison de la responsabilité qui leur incombe envers leurs
donateurs du bon usage des dons. À
l’instigation de la Fondation Notre
Dame
les trois fondations collectrices ont ainsi
plaidé pour l’intervention d’un
économiste de la construction, recommandation suivie par l’établissement
public qui a fait appel en septembre 2020 à un bureau d’études spécialisé. Pour
la deuxième phase des travaux en octobre 2021, la Fondation Notre Dame et
la Fondation du Patrimoine ont recruté conjointement un conseiller technique,
ingénieur travaux, pour analyser le bilan de la phase de sécurisation et faire des
observations sur le budget des travaux.
Dès le 29 avril 2021, les trois fondations collectrices, Fondation
Notre Dame, Fondation de France et Fondation du patrimoine, ont fait
conjointement
parvenir
à
l’Établissement
public,
un
«
relevé
d’observations sur le premier projet de budget de la phase de travaux de
restauration
», dans lequel elles plai
dent pour la présentation d’un budget
52
Comité de suivi du 17 mai 2021
–
la Fondation du patrimoine ne souhaite pas s’engager
avant d’avoir reçu un compte rendu détaillé des co
ûts de la phase de sécurisation.
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DE FINANCEMENT SUPÉRIEURS AUX DÉPENSES DIRECTEMENT LIÉES
AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
53
de la restauration en fonction de la nature des dépenses
–
et non, comme
actuellement, en fonction des phases, qui n’éclaire pas sur la distinction,
nécessaire au regard de l’objet de la collecte des dons, entre les tr
avaux de
restauration objet de la souscription nationale, d’une part, et les travaux de
restauration globale de l’édifice, nécessités par les désordres antérieurs à
l’incendie, d’autre part. Elles ont par ailleurs appelé à la définition d’un
coût d’objecti
f correspondant à un «
juste prix
» des prestations et travaux
à réaliser, en soulignant en particulier le volume des «
frais annexes
», et
en émettant de nombreuses observations sur des sujets très divers
–
absence
de récupération de la TVA par l’établissement public, nécessité d’identifier
les frais directement liés à la maîtrise d’ouvrage, programmation
pluriannuelle des appels de fonds et compte rendu d’exécution détaillé.
La communication tient une place importante dans ces demandes : les
fondations réclament un échange sur le projet de budget et une élaboration
concertée des messages à l’intention du grand public et des mécènes.
Ainsi, le poids des fondations dans les sommes recueillies dans le cadre
de la souscription nationale et le rôle des mécènes dans cette collecte ont donné
aux fondations collectrices une capacité d’intervention dans le contrôle de
l’emploi des fonds leur permettant d’effectuer les diligences nécessaires pour
vérifier le respect de la volonté des donateurs. Elles considèrent néanmoins que
leur capacité d’intervention reste limitée, la fondation du patrimoine regrettant
que les fondations de la souscription nationale n’
aient pas été directement
intégrées au conseil d’administration de l’établissement public.
B -
Les réponses de l’établissement public à l’obligation
d’information des donateurs
1 -
La mise en place de la comptabilité analytique
Au regard de son importance pour le suivi de l’emploi des fonds
, la
mise en place de la comptabilité analytique est expressément mentionnée
dans la le
ttre de mission adressée au président de l’EP
-RNDP par la tutelle.
Elle est intervenue dès 2020, les modalités de mise en œuvre ont été
approuvées, conformément au décret sur la GPCP
53
, par le conseil
d’administration du 26 novembre 2020
54
. Une présentation a été effectuée
au comité des donateurs de décembre 2020, sans susciter d’observation.
Compte tenu de la date de mise en œuvre, cette comptabilité a été appliquée
rétroactivement pour l’ensemble de l’exercice 2020.
53
Décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
54
Application des dispositions de l’article 209 du décret n°
2012-1246 du
7 novembre 2012.
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54
La comptabilité analytique mise en place
prend en compte l’ensemble
des activités opérationnelles de l’établissement
. Sont ainsi chiffrés :
-
les travaux de conservation et de restauration de la cathédrale ;
-
la conservation et la restauration des objets mobiliers appartenant à l’État
;
-
les travaux
d’aménagement des abords
;
-
la communication presse et numérique ;
-
la valorisation du chantier et des métiers
in situ
;
-
la valorisation des métiers et leur promotion hors site ;
-
les relations avec les fondations, mécènes et donateurs ;
-
la recherche de fonds ;
-
les moyens généraux du siège de
l’établissement public
;
-
le loyer du siège.
Cette déclinaison doit permettre une traçabilité de l’emploi des fonds
issus de la souscription nationale pour les emplois ne relevant pas de celle-ci.
La comptabilité analytique mise en place permet de ventiler le coût
des activités support,
à l’exception des activités des charges de personnel.
Pour ces dernières, afin de respecter les conditons fixées par la loi du
29
juillet 2019 sur l’emploi des fonds de la souscription natio
nale, les
personnels de l’établissement documentent la répartition de leur temps de
travail dès lors qu’ils sont affectés à des
missions qui ne relèvent pas de
celles qui peuvent être financées par cette souscription.
Pour les fondations, cette comptabilité reste toutefois en-deçà de
leurs attentes car elle ne permet pas d’assurer une traçabilité de
l’affectation des dons, même s’il apparait que
,
du côté de l’établissement
public comme des fondations,
l’objectif
est
d’affecter prioritairement
l’ensemble des
dons en provenance des particuliers aux travaux de
conservation et à ceux des restaurations liées à l’incendie afin de privilégier
une discussion avec les grands mécènes pour les autres affectations.
2 -
L’information des donateurs
Outre les informations délivrées dans le cadre du comité des
donateurs et des réunions du comité de suivi, l’établissement mène un
e
politique de communication active en direction des donateurs et plus
largement du public. L’ensemble de l’information est disponible sur le site
dédié
www.rebatirnotredamedeparis.fr
. La fréquentation du site est passée
de 150 000 vues en 2020 à 300 000
vues en 2022 et le nombre d’abonnés
à la lettre d’information de 13
000 à 18 000.
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AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
55
Les dépenses de communication (hors mécénat de compétence et
valorisation des ETP dédiés au sein de
l’établissement public
) ont
représenté un total de 351 000
€
en 2020 et 680 000
€
en 2021.
D’une manière générale, les fondations reconnaissent que
l’information apportée par
l’établissement public leur fournit une base
solide pour informer les donateurs sur l’état d’avancement général du
chantier et ses grandes étapes.
III -
L'engagement et le financement
des travaux de restauration
A -
Les études préalables aux travaux de restauration
Les études préalables à la restauration de la cathédrale, engagées dès
mars 2020, ont conduit à disposer d’une évaluation générale de l’état
sanitaire de l’édifice et à l’élaboration d’un diagnostic dont les études ont été
conduites par l’ACMH entre déce
mbre 2020 et mars 2021. Seuls les travaux
nécessaires à la réouverture de la cathédrale ont fait l’objet d’un diagnostic
approfondi. Ces études ont débouché sur un schéma directeur des travaux qui
s’étend au
-delà de 2024, pour traiter des pathologies antér
ieures à l’incendie.
Les composantes essentielles des travaux à réaliser directement liés à
l’incendie d’ici 2024, objectif fixé pour la réouverture
, comprennent :
-
la reconstruction ou la consolidation des voûtes, la restauration des murs
pignons, du chemin de ronde et des murs bahuts, la restauration du grand
comble, la reconstitution de la flèche, et la restauration des beffrois ;
-
la décontamination des élévations et différents espaces, dans la
cathédrale et la sacristie, la restauration des sols, ainsi que des
éléments mobiliers appartenant à l’État
;
-
la reprise complète de toutes les installations techniques incluant les
dispositifs de sécurité incendie ;
-
la décontamination et la réinstallation du grand orgue et le
remplacement de l’orgue de chœur.
À ces travaux sur le bâtiment lui-
même s’ajoute la restauration des
objets mobiliers appartenant à l’État pour un montant de 3,52
M€
.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
56
La restauration des objets mobiliers
L’incendie a mis en évidence l’absence d’inventaire complet des
objets déposés dans la cathédrale et les interrogations existantes sur la
propriété effective de certains d’entre eux. L’exhaustivité
du récolement
s’avérait d’autant plus nécessaire que la loi du 29 juillet 2019 a établi que
les travaux de restauration financés par les dons provenant de la souscription
nationale ne concernaient que les seuls objets propriétés de l’État. La Cour
avait dans son précédent rapport formulé une recommandation pour qu’il
soit procédé à ce récolement dont le ministère de la culture indique qu’il a
été achevé le 15 février 2022.
Les objets du trésor sont conservés depuis l’incendie par le musée du
Louvre, les tapis au sein du Mobilier national, et la vierge au pilier à Saint
Germain l’Auxerrois. Les éléments présents dans les tribunes sont
accueillis
dans d
es réserves louées par l’EP
-
RNDP après avoir fait l’objet d’un dossier
des collections réalisé par ce dernier sous le contrôle scientifique de la Drac.
Les objets de la sacristie ont quant à eux été transférés mi-février 2022 à la
Banque de France qui les conserve gracieusement.
Le mode de financement des objets
appartenant à l’État fait l’objet
d’une convention passée le 22 juin 2021 entre le
ministère de la culture et
l’EP
-RNDP. La Drac
a établi un programme d’intervention qui doit
s’achever pour la réou
verture de la cathédrale et, selon les termes de la
convention, au plus tard le 15 avril 2024. La convention prend en compte
les dispositions relatives au financement de la restauration des objets
mobiliers de la loi du 29 juillet 2019 et les dispositions de droit commun,
desquelles il ressort que les objets mobiliers,
à l’exception de ceux attachés
à perpétuelle demeure
55
,
voient la maîtrise d’ouvrage de leur restauration
assurée par la Drac. Le montant prévisionnel est arrêté à 3 518 100
€
TTC.
Cette somme
est intégrée au budget pluriannuel de l’EP
-RNDP, qui
assure le financement par un reversement par fond de concours au
programme 175 du budget de l’État. Même si la convention prévoit que le
financement fait également appel aux dons reçus directement par l
’EP
-
RNDP, la Cour constate à nouveau l
’inutile
complexité du circuit de
financement, l’EP
-RNDP
reversant à l’État des crédits reçus de
ce dernier,
via
un fond de concours supplémentaire.
55
La maîtrise d’ouvrage des objets m
obiliers attachées à perpétuelle demeure est
assurée par l’EP
-RNDP sauf pour les statues de la flèche dont la restauration a été
engagée avant l’incendie.
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DE FINANCEMENT SUPÉRIEURS AUX DÉPENSES DIRECTEMENT LIÉES
AUX CONSÉQUENCES DE
L’INCENDIE
57
B -
Le budget prévisionnel des travaux de restauration
pour assurer la réouverture en 2024
Le coût prévisionnel de l’ensemble de la phase de restauration
, y
compris option et provisions,
a été arrêté par l’EP
-RNDP en mai 2022 à un
montant de 552
M€,
réévaluant de 4
M€ l’estimation de
mai 2021. Ce
montant inclut la prolongation
de la mission de maîtrise d’œuvre en 2025, de
même que le coût de la base vie et des prestations de gardiennage pour cette
même année. Ce montant intègre aussi les dépenses de maîtrise d’ouvrage
de l’EP
-RNDP, fixées à 19,5
M€
, ainsi que la mise en valeur du chantier et
des savoir-faire. Un montant de 5,6
M€
est prévu pour ce dernier poste. Ce
montant, en revanche, n
’a jamais pris
en compte la redevance d’occupation
du domaine public, réclamée par la ville de Paris, pour un montant annuel de
3,4
M€
, soit une prévision globale de 20
M€
qui a fait l’objet de l’envoi d’un
projet de convention. La ville de Paris a finalement décidé le 22 mars 2022
d’exonérer l’établissement public
de cette redevance. Un financement de
5,63 M€ correspond à
la brumisation de la charpente
56
(
qui fait l’objet d’une
option
mais dont le préfet de région considère qu’elle a conditionné la
délivrance de son autorisation de reconstruction).
D’importantes provisions figurent dans ce budget prévsionne
l, pour
un total de 125,4
M€
: provisions pour hausses de prix
(66,5 M€)
, provisions
pour aléas et imprévus (38,63
M€)
et enfin provisions pour les risques
calendaires (20,22
M€)
. Le risque calendaire est présenté sous un double
aspect d’interruption de chantier ou de retard. Les précédentes inte
rruptions
du chantier étaient liées à la pandémie de la covid 19 ou à la pollution au
plomb pour des coûts nettement inférieurs à la somme provisionnée.
L’hypothèse de retard pourrait aussi être la conséquence d’une
défaillance d’entreprise ou d’une nouvelle campagne d’archéologie
préventive si, à l’occasion des travaux, celle
-
ci s’avérait nécessaire.
Toutefois, seuls des travaux nécessitant la dépose du sol de la cathédrale
ou des excavations, non prévus à ce jour, pourraient en être la cause.
L’engageme
nt de cette enveloppe pour compenser des retards devra
faire l’objet d’un examen approfondi
:
s’il s’agit de tenir le calendrier pour
éviter des surcoûts liés au retard sur l’ensemble du chantier
, cet engagement
serait légitime ;
s’il s’agit en revanche de
tenir
l’échéance de 2024
, la
mobilisation de ces crédits serait plus discutable.
56
Le processus de brumisation permet, en cas de départ d’incendie, de lutter contre
celui-ci depuis l
’intérieur de la charpente.
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58
Tableau n° 7 :
Restauration de la cathédrale, prévisions financières
(en
M€
) en mai 2022
Postes de dépenses
Montants
prévisionnels
Phase de restauration assurant la réouverture de la cathédrale en 2024
Maîtrise d'œuvre et autres prestations intellectuelles
59,7
Maîtrise d'œuvre
36,2
OPC/CSPS/CT/Synthèse
11,7
Assistance à maîtrise d'ouvrage
8,1
Études complémentaires
3,8
Travaux
334,7
Opérations préparatoires
Décontamination des sols et aspiration des élévations
3,4
Curage des installations techniques
2,1
Autres travaux préparatoires
1,2
Approvisionnements
5,5
Fouilles archéologiques
1
Décontamination et nettoyage intérieurs - baies hautes et vitraux
Décontamination et nettoyage intérieurs - Restauration des baies hautes
et vitraux - Étanchéité des chapelles
33,4
Flèche et transept
Voûtes de la croisée et des transepts - Charpente et couverture -
Maçonneries associées (Murs bahut et pignons)
55,7
Chœur et nef
Voûtes du chœur et de la nef
- Charpente et couverture - Maçonneries associées
(Murs bahut, pignon, angle NE tour Sud, étanchéité des tribunes,... )
50,4
Restauration intérieure
Sols, menuiseries, mobilier, portes, presbytère, sacristie et travaux
d'accompagnement des lots techniques
15,9
Équipements techniques
Équipements techniques (CFO, CFA, SSI, CVC)
32,9
Équipements techniques : option brumisation
5,6
Raccordement aux concessionnaires
6
Beffrois
Restauration des beffrois et parcours de visite
5,1
Orgues, cloches et objets mobiliers non attachés à perpétuelle demeure
Orgues
5,1
Horloge et cloches des beffrois et de la flèche
1,9
Objets mobiliers sous maîtrise d'ouvrage Drac
3,8
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AUX CONSÉQUENCES DE
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59
Installations de chantier
Base-vie
14,1
Installations de chantier
54,1
Autres dépenses d'installations
5,2
Emprise et sureté du chantier
Gardiennage
10,8
Repli et dépollution en fin de chantier
17,6
Système de filtration des eaux de pluie
4
Mise en valeur du chantier et des savoir-faire
5,6
Mise en valeur du chantier et des savoir-faire
5,6
Maîtrise d'ouvrage
19,5
Dépenses de personnel
13,9
Personnel mis à disposition
0,4
Moyens généraux
2,1
Dépenses d'équipement
0,1
Opérations de levées de réserves et de clôture des comptes
3
Assurances
7,1
TRC, RC et CCRD : hypothèse à 3 %
7,1
Provision pour aléas et imprévus
38,6
Sur la base des travaux et des coûts de maîtrise d'œuvre,
et autres
prestations intellectuelles
38,6
Provision pour risques calendaires
20,2
Provision pour risque d'interruption de chantier ou de retard
20,2
MONTANT TOTAL
485,5
Provision pour hausse des prix
66,5
Provision pour hausse des prix
66,5
MONTANT
TOTAL
RÉSERVÉ
POUR
LA
PHASE
DE
RESTAURATION
ASSURANT
LA RÉOUVERTURE
DE
LA
CATHÉDRALE EN 2024
552
Source : EP-RNDP.
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60
C -
La passation des premiers marchés
L’analyse des premiers marchés attribués, dont celui de la maîtrise
d’œuvre pour un montant après négociation de 27,5
M€, ou l’existence de
mécénats de compétence comme celui de Loxam, qui fournit la moitié des
bungalows de la nouvelle base vie, représentant une économie de 2
M€
, permet
d’anticiper, si cette tendance se confirme, une réduction de l’enveloppe
financière p
révue pour cette phase, où l’incertitude sur les travaux à réaliser est
moins importante que pour la phase de conservation. Le contexte inflationniste
sur les matériaux et la tension sur les chantiers de monuments historiques
occasionnée par le plan de relance a conduit à reconsidérer la provision pour
révision de prix prévue en mai 2021. La révision de prix avait été retenue pour
1,1 %, dans le budget prévisionnel de mai 2021, avec une provision permettant
de prendre en compte un niveau de 2,2 % pour un montant global estimé à
24,4
M€
. 1Ce montant est porté à 66,5
M€ dans le budget prév
isionnel révisé en
mai 2022. Le coût des travaux
stricto sensu
ne représentant
qu’une part limitée
de l’enveloppe et l’importance des
différentes provisions constituées permettront
de dégager un reliquat, comme le confirme
l’
actualisation présentée au conseil
d’administration
le 28 juin 2022 et au comité des donateurs le 6 juillet 2022, qui
prend en compte l’avancement des études
et
l’attribution des premiers marchés.
Tableau n° 8 :
Liste des marchés attribués dans le cadre de la phase
de restauration (en
€
HT)
57
Désignation
Attributaire
Date de
notification
Montant
du marché
de base
montant
maximum (à bons
de commande)
Lot n° 1a - mutation des bases vie propre (bv1)
et plomb (bv2ter) - fournitures base vie
Algeco
30/12/2021
4 082 031
800 000
Lot n° 1b - mutation des bases vie propre (bv1)
et plomb (bv2ter)
–
exploitation base vie
Europe
echafaudage
09/02/2022
2 701 379
5 000 000
Lot n° 2a - installation de chantier - fluides chantier
Lorraine énergie 28/02/2022
3 895 463
2 700 000
Lot n° 2b - installation de chantier -
installation générale chantier
Altempo
07/03/2022
1 359 736
3 000 000
Lot n° 2c - installation de chantier - utilités plomb
Vacuum cleaner
france
28/02/2022
1 317 135
4 000 000
Lot n° 2d - installation de chantier - moyens de
levage
Dartus
22/03/2022
1 803 350
2 900 000
Lot n° 2e - installation de chantier - atelier de
sculpture
Office de services
en batiment
30/03/2022
1 191 663
-
Installation de chantier - marché négocié
Europe
echafaudage
24/02/2022 15 570 416
1 600 000
Installation de chantier - marché négocié
Le Bras frères
28/03/2022
2 588 322
2 000 000
Source : EP-RNDP.
57
Signatures des marchés intervenues avant mai 2022.
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L’INCENDIE
61
La phase de restauration est décomposée en plusieurs sous-
opérations sur la base de critères géographiques et calendaires et de priorité
d’achèvement.
Ces phases sont les suivantes :
-
travaux anticipés (nettoyage des sols et des élévations intérieurs par
aspiration) : les parties hautes sont achevées (restent les parties basses
et les sols de la nef) ;
-
dessalement des voûtes (la mise en place des compresses permettant
de récupérer les sels et l’humidité)
;
-
installation de chantier (dont la fourniture de grues, nacelles, location
de grues mobiles, montage et installation et démontage sur site des
grues mobiles) ;
-
nettoyage intérieur de la cathédrale - baies hautes (vitraux et
remplages)
–
mise hors d’eau des parties basses
de la cathédrale,
collatéraux, déambulatoire et chapelle :
un appel d’offres comprenant
37 lots a été lancé (découpages par corps de métiers et par zones
géographiques de la cathédrale et
des métiers d’art)
;
-
reconstruction de la flèche, de la voûte effondrée de la croisé du
transept et du grand comble du transept (marché lancé et en cours
d’analyse par la maîtrise d’œuvre)
;
-
restauration intérieure en accompagnement des lots techniques et
aménagements liés au programme ;
-
chœur et la nef et restauration des maçonneries incendiées (murs
bahuts, voûtes effondrées, le grand comble avec sa charpente en chêne
et sa couverture en plomb)
–
achèvement hors d’eau des parties basses
(rédaction des pièces de la consultation en cours) ;
-
restauration des beffrois (tour Nord) et aménagements liés au parcours
du public
(la consultation devrait être lancée à l’été 2022).
Le tableau
supra
liste les marchés attribués dans le cadre de cette
phase de restaur
ation au premier trimestre 2022, à savoir, pour l’essentiel,
les marchés relatifs à l’installation de chantier.
Dans ses séances des 8 février et du 15 mars 2022, le conseil
d’administration a eu un point d’information sur la programmation
contractuelle de la phase restauration.
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62
IV -
Des disponibilités pour le traitement
des
pathologies antérieures requérant l’accord
des fondations et des mécènes
A -
Le traitement des pathologies antérieures
L’étude préalable de l’ACMH a recensé les principales pathologies
antérieu
res à l’incendie qui pourraient faire l’objet de prise en charge, sans
toutefois qu’elles ne fassent l’objet d’une étude diagnostic permettant
d’évaluer avec précision les montants nécessaires à leur traitement
d’ensemble, pour un total de 133
M€
réparti selon le tableau suivant.
Tableau n° 9 :
montant prévisionnel des restaurations liées
aux
pathologies antérieures à l’incendie
(en
M€
)
Pathologies à traiter
Montants prévisionnels
Restauration de la sacristie et du presbytère
13
Restauration extérieure de l’avant chœur
dont arcs boutants
50
Restauration extérieure de la nef (Nord et Sud)
30
Restauration extérieure du transept (croisillons nord et sud)
25
Nettoyage et restauration du massif occidental
15
Source : EP-RNDP.
Cette estimation sommaire est à rapprocher du montant estimé des
travaux nécessaires tels que recensés antérieurement à l’incendie. En
particulier l’étude réalisée en 2014 par l’architecte en chef des monuments
historiques en charge de la cathédrale M. Benjamin Mouton, dont le
montant validé par un économiste avait établi à 86,99
M€
le coût du
traitement des pathologies urgentes à court et moyen terme, et au montant
de la convention de partenariat entre l’État et la fondation Notre
Dame pour
le programme de travaux en cours au moment de l’incendie. Le
ministère,
de son côté, évalue entre 163 et 183
M€
les six opérations de restauration
qui pourraient constituer la phase 2 de la restauration portant sur des parties
extérieures à l’édifice. Il annonce l’élaboration d’une programmation
concertée avec calendrier et estimation financière par les services chargés
des monuments historiques et l’EP
-
RNDP d’ici fin 2023.
L’engagement de l’étude diagnostic est d’autant plus nécessaire qu’elle
est indispensable pour avoir une vision précise des travaux à engager pour
assurer une restauration d’ensemble de l’édifice. Cette restauration doit
pouvoir être effectuée en continuité du programme actuel afin, non seulement
de redonner à la cathédrale sa splendeur, mais aussi pour limiter les coûts de
démontage des installations de chantier qui pourraient concourir à ces travaux.
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L’INCENDIE
63
B -
L’enjeu du financement
du traitement
des
pathologies antérieures à l’incendie
Dès la réunion du comité des donateurs du 17 décembre 2020, la
question du traitement des pathologies antérieures à l’inc
endie et de leur
financement a été évoquée. Le représentant de la Fondation du patrimoine,
M. de Feydeau, lors du point abordant l’estimation des futurs travaux de
restauration, revient notamment sur «
la définition du périmètre des
travaux, entre ce qui r
elève de la réparation des dégâts de l’incendie et ce
qui relève d’un état préalable. Il s’accorde sur la pertinence de profiter
des travaux de réparation des dégâts de l’incendie pour rendre à la
cathédrale toute sa splendeur, mais il affirme que cela doit se traduire dans
le budget par une différenciation claire et explicite de ces travaux afin
d’être transparent vis
-à-vis des donateurs »
58
. Dans sa réponse, le
président de l’EP
-RNDP «
convient de la nécessité de procéder à cet
inventaire précis des travaux avec une hiérarchisation des actions à mener
dans une totale transparence avec les fondations et les donateurs
».
Le comité d’audit
, lors de sa séance du 18 mai 2021, constatant que
le montant des travaux à conduire est inférieur au total des dons, indique
que «
la question du réemploi des sommes disponibles se posera en lien
étroit avec les fondations
» et se prononce favorablement dans ce sens :
«
Dès lors que les travaux nécessaires à la réouverture de la cathédrale en
2024 ne remédieront pas à beaucoup des pathologies anciennes de
l’édifice, le consensus se crée pour que les fonds disponibles en fin de
travaux puissent être affectés à d’autres opérations de restauration
bénéficiant à la cathédrale estimées à un montant de 130
M€
».
L
’achèvement des travaux d’estimation de la phase de reconstruction
doit permettre d’évaluer plus précisément ce montant
en prenant les
précautions nécessaires par rapport aux résultats des appels d’offres dans un
contexte de hausse des coûts,
en raison de l’évolution du prix
des matériaux
et de la tension sur les entreprises spécialisées du secteur des monuments
historiques sollicitées par l’importance des financements du plan de relance
.
Quant à la question du «
réemploi des sommes
disponibles »
, elle doit
être tranchée
, d’u
ne part en estimant le solde disponible de la collecteet et,
d’autre part
, au regard des travaux relevant des pathologies antérieures et du
mode de financement de ceux-ci,
c’est
-à-
dire de la reprise d’un financement
de l’État
. L
e comité d’audit a souligné
, lors de cette même réunion du
18 mai 2021,
que
ce
retour
du
fin
ancement
de
l’Etat
serait
vraisemblablement réclamé par les fondations.
58
Procès-verbal du comité des donateurs du 17 décembre 2020.
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64
Le rapport présentant le schéma directeur des travaux de restauration
évoqué au conseil d’administration
de juillet 2021 précise les données
s’agissant de ces pathologies antérieures à l’incendie et indique que
«
La
réparation des dégâts de l’incendie conduit à traiter au cas par cas des
pathologies antérieures (…) lorsque la mise en œuvre des travaux justifie
nécessairemen
t pour des raisons d’efficacité, d’opportunité et de rationalité
de les prendre en compte. Mais ce cas de figure est limité car si l’état de la
cathédrale au moment de l’incendie réclamait une campagne de restauration
(centrée sur l’extérieur, à commencer par le chevet), il n’est pas
envisageable, compte tenu des contraintes spatiales du chantier et dans le
délai de 2024, de mettre en œuvre d’autres travaux que ceux réparant les
dégâts directs de l’incendie et assurant la réouverture de la cathédrale
».
La liste des opérations répondant au traitement de ces pathologies
antérieures prises en compte au cas par cas pour la réouverture fin 2024
figure dans ce même schéma. Il comporte :
-
les
nettoyages
et
restauration
ponctuelle
accompagnant
la
décontamination des espaces intérieurs, élévations intérieures des
collatéraux, déambulatoire, chapelles et décors peints ;
-
le cas échéant,
le mobilier résidant principalement dans le chœur
(clôture du chœur, vœux de Louis XIII, grilles)
;
-
le mobilier évacué de la cathédral
e (sous maîtrise d’ouvrage de la
Drac) ;
-
la restauration des seuls vitraux déposés pour des raisons de sécurisation
(pour les autres, seule la décontamination est effectuée
in situ
) ;
-
certains éléments fragilisés en extérieur, tels que pinacles ou
garantis
sant l’étanchéité des collatéraux et chapelles (mise hors d’eau
de la partie basse de la cathédrale).
Le financement par le produit de la souscription nationale de cette
première série de travaux intimement liés aux travaux de restauration à
engager pour la réouverture de la cathédrale ne donne pas lieu à débat. Il
est d’ailleurs explicitement prévu s’agissant des objets, et ne fait pas l’objet
d’observation de la part des fondations.
S’agissant des autres pathologies antérieures à l’incendie, le rapport
identifie comme «
opérations les plus urgentes
» la consolidation et la
restauration d’arcs boutants mis sur cintre suite à l’incendie ainsi que la
restauration du chevet de la cathédrale qui pourraient faire l’objet d’une
intervention à partir de 2025.
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L’INCENDIE
65
Ou
tre le traitement de ces pathologies antérieures à l’incendie, le
rapport établit aussi une autre catégorie de travaux, celle qualifiée
d’
«
améliorations ponctuelles touchant à l’usage de la cathédrale
». Si
l’option ouverte relative à la brumisation de la
charpente qui concerne la
sécurité est incontestablement liée à la restauration d’ensemble, d’autres
travaux sont distincts de la stricte restauration objet de la souscription
nationale. Il s’agit notamment de
:
-
l’amélioration à la crypte Soufflot
, espace technique et de stockage
demandée par l’archevêché
;
-
l’amélioration des visites des tours
, incluant la problématique des
boutiques demandée par le CMN ;
-
l’augmentation de capacité de l’orgue du chœur.
La Cour a examiné le mode de financement prévu pour ces travaux
qui en première approche ne relèvent pas de la souscription nationale.
L’extension de l’orgue
, représentant un montant estimé à 1,5
M€
,
est assuré indépendamment de la souscription en partie par une
contribution de
Friends of Notre-Dame de Paris
de 1,2
M€
et, pour le
solde, par une prise en charge par le Fonds cathédrale de la Fondation
Notre Dame dans le cadre de la collecte grand public organisée pour le
financement des aménagements liturgiques.
Le coût du réaménagement des circuits de visite des tours de Notre-
Dame est
inclus dans l’enveloppe prévisionnelle du coût de restauration
pour un total de 5,09
M€
financé par l’établissement public à partir des
fonds des donateurs. L’établissement public indique que les travaux prévus
ne comprennent pas
l’aménagement des nouveaux locaux d’accueil des
touristes, des locaux de médiation culturelle et boutiques dont la maîtrise
d’ouvrage et le financement seraient directement assurés par le CMN. Le
montant prévu dans le budget du CMN pour ces travaux indiqués par son
président lors de son audition par la Cour est de 2,6
M€
. À ce montant
s’ajouterait une somme de 0,5
M€
pour les guérites d’accueil du public rue
du Cloître dont la prise en charge n’est pas définie. Aucune subvention
supplémentaire de l’État au CMN n’est prévue,
mais le retour sur
investissement devrait être significatif et se traduire par une augmentation
des recettes de billetterie -
l’objectif étant de pouvoir passer de 500
000 à
600 000 ou 700 000 visiteurs annuels - et de celles de la boutique mieux
positionnée sur le parcours.
Les travaux de la crypte Soufflot sont majoritairement consacrés à
l’accueil des installations techniques nécessaires à l’exploitation de la
cathédrale. La part du local de stockage utilisée par l’affectataire pour ses
besoins de stockage est considérée comme résiduelle par l’EP
-RNDP, ne
justifiant pas une contribution aux travaux de ce dernier tout comme au
financement de l’ascenseur dont l’usage serait utile aux installations techniques.
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66
Au regard des dons effectués dans le cadre de la souscription
nationale et des conventions de
mécénat conclus par l’établissement public,
il est établi qu’une somme conséquente
pourrait être disponible à
l’achèvement des travaux de restauration. Le montant de 130
M€
, évoqué
supra
, ne peut être confirmé à ce jour
dans l’attente du résultat des appels
d’offres et dans le contexte inflationniste présent
. Le recensement des
pathologies antérieures à l’incendie doit donc être effectué, et faire l’objet
d’une hiérarchis
ation des urgences appuyée sur une étude diagnostic
donnant lieu à un chiffrage afin de définir le calendrier des travaux à
réaliser postérieurement à 2024 et son mode de financement. Celui-ci
pourrait s’inspirer de celui mis en place avec la fondation Not
re Dame
avant l’incendie avec l’accord des mécènes.
En tout état de cause, il devient urgent de valider la consistance de
ces travaux de restauration de la cathédrale,
qu’ils soient la
conséquence
indirecte de l’incendie ou qu’ils relèvent de pathologie
s antérieures.
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L’INCENDIE
67
___________ CONCLUSION ET RECOMMANDATION __________
98 % des promesses de dons ont été sécurisées et de nouveaux dons sont
reçus, principalement par l’établissement public
,
auxquels s’ajoutent des
mécénats de compétence.
La transparence de l’emploi des fonds prove
nant de
la souscription nationale constitue une exigence légale pour l’établissement
public comme pour les fondations. Le comité des donateurs et les comités de
suivi sont l’occasion pour
celles-ci
de disposer des informations sur l’emploi des
fonds mais a
ussi d’avoir un regard sur la qualité de la dépense et sur le
calendrier des travaux à travers des échanges nourris. Les fondations ont ainsi
contribué au recrutement d’économistes afin de rechercher des économies pour
les travaux de restauration. Les donateurs reçoivent une information régulière
des fondations et de l’établissement public qui a développé une politique de
communication active répondant aux obligations de la loi.
La mise en place d’une comptabilité analytique au sein de l’établissement
public a permis de répondre aux exigences de traçabilité des dépenses,
d’autant
plus que c
es travaux sont aussi l’occasion d’apporter des améliorations aux
conditions d’accueil des visiteurs ou de compléter des équipements de la
cathédrale, qui ne relèvent pas de la souscription nationale et sont financés par
des ressources extérieures.
Les travaux de restauration pour la réouverture de la cathédrale ont fait
l’objet d’un diagnostic approfondi et d’un budget prévisionnel
établi en
mai 2021, réévalué à 552
M€
, y compris les différentes provisions pour
l’ensemble de la période conduisant à la réouverture de la cathédrale. Cette
enveloppe comporte une option pour la réalisation d’une brumisation de la
charpente et d’importantes provisions pour aléas
. Celles-ci devraient largement
couvrir les surcoûts vraisemblables pour révisions de prix dans un contexte
devenu inflationniste, et les éventuelles interruptions ou retards du chantier
(défaillances éventuelles d’entreprises ou nouvelle campagne d’archéologie
préventive) et laisser un disponible.
Au-delà de cette réouverture, certains travaux devront se poursuivre
pour traiter des pathologies antérieures à l’incendie
, dont certaines aggravées
par celui-
ci. Ces travaux n’ont pas fait à ce jour l’objet d’une évaluati
on
détaillée mais une première estimation sommaire
par l’établissement public
fait
état de 133
M€
. Il est nécessaire de la
préciser sans attendre l’échéance de 2024.
L’ampleur du résultat de la souscription nationale et des mécénats
recueillis pour la sauvegarde et de la restauration de la cathédrale permettrait
de financer le traitement d’une partie de ces pathologies antérieures mais ne
peut être engagé qu’avec l’accord des fondations et des grands mécènes et dans
le cadre d’un partenariat financier avec l’Etat qui pourrait s’inspirer de la
convention existante pour l
es travaux de restauration antérieurs à l’incendie.
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68
La Cour formule la recommandation suivante :
2.
Arbitrer l’intégralité du programme de restauration de la cathédrale et
, à
cette fin, recenser,
sans attendre l’échéance de 2024
,
l’ensemble des
pathologies du monument, hiérarchiser les urgences de traitement, en
établir les coûts et leur financement (
EP-RNDP, Ministère de la culture
).
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Chapitre III
La réouverture de la cathédrale en 2024 :
une nécessaire clarification
Lors de son précédent contrôle, la Cour avait relevé la complexité de
l’organisation, héritée du passé, régissant le fonctionnement de la cathédrale,
qu’il s’agisse de la propriété foncière, de l’organisation de la sécurité ou de la
gestion des
ressources. Elle avait recommandé d’engager sans attendre
l’échéance de la réouverture les discussions entre l’ensemble des parties
concernées par la propriété et le fonctionnement pour mettre en place un cadre
nouveau répondant notamment aux dispositions du code du patrimoine et du
code général de la propriété des personnes publiques, ainsi qu’à la convention
du 18 octobre 2019 conclue entre le ministère de la culture et le CMN.
Le ministère de la culture a indiqué à la Cour que «
la gestion de la
cathédrale à la réouverture constitue un enjeu majeur et un risque identifié
dans la cartographie des risques de l’établissement public Re
bâtir Notre-
Dame de Paris (EP-RNDP)
».
Il précise que des discussions ont été engagées entre les différents
acteurs, à savoir
l’affectataire cultuel, l’architecte des bâtiments de France, à
la fois conservateur du monument et responsable unique sécurité, la
conservation régionale des monuments historiques (CRMH) d’
Île-de-France
et le Centre des monuments nationaux en sa double qualité de responsable du
circuit de visite des tours et de gestionnaire domanial de la cathédrale. Ainsi
que le souligne la réponse du ministère, il s’agit comme la Cour en avait fait
le constat « de
remettre à plat les questions liées aux activités non cultuelles
organisées au sein de l’édifice (visites des tours et du trésor, concerts,
comptoirs de vente), mais également de s’interroger sur des questions qui leur
sont intimement liées, celle de la sécurité des biens et des personnes
». Une
consultation a été lancée au début du mois de février 2022 pour deux études
portant l’une sur l’exploitation et la maintenance de l’édifice, l’autre sur
«
les
conditions de l’ouverture provisoire de la cathédrale en 2024
» qui seront
coordonnées par un comité de pilotage
ad hoc
.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
70
I -
Une modification du cadre de gestion
de la cathédrale et ses conséquences
A -
La modification temporaire du cadre
de gestion domanial
Le ministère de la culture est ordinairement l’affectataire domanial
de Notre-Dame de Paris
59
et, comme dans les 86 autres cathédrales
appartenant à l’État
, la gestion et la valorisation domaniale de Notre-Dame
de Paris relèvent de la compétence du Centre des monuments nationaux
aux termes de la convention du 18 octobre 2019 précitée. Or, par
convention d’utilisation du 7
mai 2021, le ministère de la culture a transféré
à l’EP
-
RNDP ses droits et prérogatives d’affectataire domanial, sous
réserve des droits du clergé, ce qui a pour effet de substituer en droit l’EP
-
RNDP au CMN pour les missions qui lui étaient confiées. Sel
on l’exposé
des motifs de la convention, «
l’utilisateur (l’EP
-RNDP) a demandé, pour
l’exercice de ses missions, la mise à disposition […]
».
Le ministère justifie cette décision concernant le CMN en indiquant
que :«
le besoin est apparu de lui substituer
en droit, l’EP
-RNDP pendant
la durée des travaux
» et que :
les autorisations domaniales telles que les
autorisations de tournage et de prises de vues que l’EP
-RNDP peut être
amené à délivrer, nécessitent que lui soit remise la gestion domaniale de
la cathédrale
», étant précisé que «
la délivrance d’autorisation temporaire
demeure soumise à l’accord préalable de l’affectataire cultuel, dans les
mêmes conditions que pour le CMN
».
Cette convention du 7 mai 2021 s’applique rétroactivement puisque
la date d
e prise d’effet est au 1
er
janvier 2020. Elle est signée pour une durée
de cinq ans correspondant à la durée estimée du chantier mais le texte
comme le ministère n’excluent pas des avenants pour en assurer la
prolongation.
Cette modification n’est pas anod
ine car de fait, même si elle prévoit
que le CMN retrouvera sa fonction de responsable de la gestion et de la
valorisation domaniale de Notre-Dame automatiquement au terme de celle-
ci, elle met entre parenthèse la négociation par le CMN de la mise en œuvre
de la convention d’octobre 2019 et fait de l’EP
-RNDP le négociateur des
conditions de réouverture de la cathédrale,
alors même qu’il a vocation à
disparaître au terme de la mission qui lui a été confiée par le législateur.
59
Décret du 4 juillet 1912 portant affectation des anciennes églises métropolitaines et
cathédrales au service de
l’administration des beaux
-arts.
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LA RÉOUVERTURE DE LA CATHÉDRALE EN 2024 :
UNE NÉCESSAIRE CLARIFICATION
71
Ce transfert de compétence expli
que notamment que l’EP
-RNDP se
soit vu confier la réalisation des deux études précitées portant sur
l’exploitation et la maintenance de l’édifice et sur les
«
conditions de
l’ouverture provisoire de la cathédrale en 2024
».
Pour le ministère, ces deux études ont vocation à constituer des aides
à la décision pour les deux conventions à passer, d’une part
, avec la Drac
et le clergé pour la sécurité, et,
d’autre part
, entre le CMN et le clergé pour
les activités culturelles.
La réouverture de la cathédrale doit être examinée sous plusieurs
aspects, un aspect juridique, un aspect financier et un aspect fonctionnel.
B -
Les études pour la réouverture de la cathédrale
La première des deux études consacrées à l’exploitation et à la
maintenance de la cathédrale a déjà d
onné lieu à la remise d’un programme
fonctionnel et technique des aménagements intérieurs de la cathédrale,
élaboré par
un bureau d’étude reconnu
. Il recense les installations
techniques, les besoins de chacun des acteurs de la gestion et du
fonctionnement de la cathédrale. Ce travail doit permettre aux utilisateurs
futurs de s’approprier des installations nouvelles qui se substituent à celles
existantes avant l’incendie.
Pour cette première étude, le ministère indique
que «
compte tenu des rôles et responsabilités en termes de sécurité et de
sûreté dévolus à l’État propriétaire et à l’affectataire cultuel, le comité de
pilotage sera co-
présidé par l’État (directeur de la
Drac
d’
Île de France
et directeur général délégué de l’EP
-RNDP),
d’une part et l’associ
ation
diocésaine de Paris (recteur de la cathédrale),
d’autre part
».
Pour la seconde étude sur «
l’ouverture provisoire de la
cathédrale
»
, c’est un comité technique qui sera réuni auquel participeront
un représentant de l’équipe projet du diocèse et un représentant de l’équipe
du clergé chargé de l’exploitation cultuelle de la cathédrale, un représentant
du CMN chargé de l’exploitation domaniale de l’édifice et l’administrateur
du circuit de visite des tours de Notre-Dame (CMN), un représentant de la
vil
le de Paris pour l’opération d’aménagement des abords et un
représentant de la Drac
d’
Île de France.
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COUR DES COMPTES
72
Lors du comité d’audit du 23 février 2022, le président du comité a
insisté sur l’importance d’une bonne articulation entre les trois maitrises
d’ouvrage
(EP-RNDP, diocèse, CMN)
60
en vue de la réouverture. Le fait que
l’OPC
(pour Ordonnancement, Pilotage, et Coordination et se rapportant à un
professionnel intervenant sur les chantiers de construction) désigné par
l’établissement public
et le planificateur choisi par le diocèse interviennent pour
le compte de la même société est à cet égard la garantie d’un dialogue fluide.
Si les deux études, qui doivent être finalisées au deuxième
semestre 2022, doivent bien constituer des aides à la décision «
qui
reviendront aux futurs exploitants et affectataires de la cathédrale »
, la
Cour relève qu’aucun calendrier
précis
n’est fourni permettant de connaître
quand seront rendus les arbitrages finaux ni qui aura la responsabilité de
les mettre en œuvre.
Le ministère se limite à évoquer une décision dans les
prochains mois. En outre, si le traitement des questions opérationnelles
liées à la réouverture est bien abordé et bénéficiera de l’expertise de ces
études, les sujets juridiques et financiers semblent exclus de leur périmètre.
La Cour constate ainsi que la clarification des propriétés foncières
avec la ville de Paris
qui faisait l’objet d’une recommandation dans son
rapport de septembre 2020, et dont le ministère reconnait la nécessité,
n’
a
donné lieu à aucune réunion à ce jour avec la Ville,
au prétexte qu’il fallait
préalablement trouver «
une solution amiable pour l’exonération de
redevance de l’occupation par le chantier
». La question des flux
financiers issus de l’exploitation de la cathédrale, recettes de billett
erie des
visites des tours ou du trésor et de leurs boutiques respectives qui ne
respectaien
t pas les textes en vigueur à la date de l’incendie
, devra
impérativement être réglée, quelle que soit sa sensibilité. Une unique
réunion s’est tenue le 14
avril 2022 entre la direction générale des
patrimoines
et de l’architecture, l’EP
-RNDP et le CMN, et ce, récemment,
ne permettant pas de considérer que la recommandation formulée par la
Cour en
2020 est mise en œuvre
. Le ministère estime que cette réunion
« a
dégagé des pistes de travail. Il a notamment été convenu que les travaux
nécessaires à la mise en place d’activités non cultuelles au sein de la
cathédrale ainsi que leur mode de gestion fassent l’objet d’un encadrement
juridique :
organisation d’une consultat
ion pour la gestion du trésor et du
comptoir de vente soumise à l’accord du desservant, convention entre
l’exploitant retenu et l’EP
-
RNDP pour la maîtrise d’ouvrage des travaux
et conventions entre le gestionnaire domanial et l’exploitant pour la
gestion de ces activités
».
La Cour sera attentive à la mise en œuvre
effective de ces mesures qui s’imposent au regard de la loi.
60
Le CMN assure la maîtrise d’ouvrage de l’aménagement des locaux commerciaux et
de médiation culturelle du parcours de visite des tours de Notre-Dame, le diocèse assure
la maîtrise d’ouvrage pour les aménagements liturgiq
ues.
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LA RÉOUVERTURE DE LA CATHÉDRALE EN 2024 :
UNE NÉCESSAIRE CLARIFICATION
73
Enfin, le sujet majeur des règles de sécurité à assurer à partir de la
réouverture de la cathédrale doit être envisagé sans faire abstraction de la
poursuite du chantier de restauration au-
delà de l’échéance de 2024
,
qu’il soit
ou non
confié à l’EP
-RNDP.
L’hypothèse évoquée dans la convention du 7 mai 2021 d’une
prolongation de celle-ci au-
delà de l’échéance de la réouverture aurait pou
r
conséquence d’introduire un acteur supplémentaire dans la gestion de la
cathédrale, non seulement pour la conduite du chantier, mais aussi pour
l’exploitation de la cathédrale et pose la question de la place du CMN. Si la
gestion de la cathédrale doit à nouveau lui être confié lors de la réouverture
au public,
ceci suppose qu’il soit associé à l’ensemble des comités et des
discussions. Si le CMN ne devait pas retrouver cette fonction, il conviendrait
qu’on définisse sans tarder un autre modèle et que l’on
indique qui est en
charge de la définition des conditions d’exploitation future.
Ces incertitudes doivent être levées en déterminant les conditions
d’exploitation de la cathédrale à l’échéance de sa réouverture et en créant
rapidement un cadre de concertation entre toutes les parties concernées.
II -
Le sujet majeur de la sécurité
S’agissant d
e la question de la sécurité, la Cour avait invité dans son
précédent rapport le ministère de la culture à tirer opérationnellement les
enseignements de l’incendie. Comme
elle en a fait le constat dans son récent
rapport consacré à la politique de l’État en faveur du patrimoine monumental,
un plan «
sécurité cathédrales
»
61
a été mis en place et transmis aux Drac en
octobre 2019. Ce plan,
qui s’applique aussi à Notre
-Dame de Paris, se donne
pour objectif «
d’atteindre pour chacun des édifices un niveau de sécurité de
référence allant au-delà des exigences règlementaires rappelés par les
commissions de sécurité
».
Les investissements réalisés à l’occasion de la restauration
devraient
permettre de répondre à ce niveau de référence. La Cour note cependant
que
le
«
projet
scientifique
et
culturel
»
présenté
au
conseil
d’administration du 30 novembre 2021
62
renvoie une partie des choix
relatifs à la sécurité incendie à une date postérieure à la réouverture de la
cathédrale : «
ces solutions techniques devront être couplées à des moyens
61
Le plan «
Sécurité cathédrales
» concerne 87 cathédrales et deux autres édifices
cultuels propriétés de l’État. En février 2022, sept édifices étaient à un niveau
insuffisant, dont Notre-Dame de Paris, les cathédrales de Nantes et de Montauban, les
quatre autres édifices faisant l’objet d’un avis «
défavorable à la poursuite de
l’exploitation
». 61 édifices répondaient aux seules obligations règlementaires et
21 seulement atteignaient le niveau de référence recherché.
62
Action n°
3 de l’axe 1.
Le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 2e bilan - octobre 2022
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COUR DES COMPTES
74
humains adaptés et organisés de façon rationnelle, selon des modalités à
définir par les exploitants de la cathédrale après sa réouverture
». Elle
n
ote par ailleurs qu’il était envisagé que deux dossiers distincts soient
préparés par l’établissement et le diocèse.
Sur le premier point,
l’établiss
ement public considère que la rédaction
du projet scientifique et culturel est erronée. Sur le second point, la
commisison de sécurité, qui devra statuer sur la réouverture de la cathédrale,
a depuis demandé la production d’un dossier unique.
Le ministère confirme
bien pour sa part
qu’une partie des travaux de sécurité incendie seront encore
mis en oeuvre par l
’établissement au
-
delà de l’échéance de la réouverture
.
Cette dernière
perspective n’est pas satisfaisante.
Les règles applicables à la sécurité incendie dans les cathédrales
et
leur mise en œuvre à Notre
-
Dame de Paris avant l’incendie
L’
architecte des bâtiments de France, conservateur de la cathédrale,
est le responsable unique de sécurité.
Le clergé, en tant qu’affectataire cultuel, est en charge de la sécurité
pour ce qui concerne son activité.
Le Centre des monuments nationaux assure la sécurité pour ce qui
concerne son activité, il assure donc à Notre-Dame la sécurité des espaces
qu’il ouvre au public pour le circuit de visite des tours.
Une convention du 19 décembre 2014 entre l’État, représenté par
l’ABF, le recteur de la cathédrale et le CMN défini
ssait les modalités de
partenariat entre l’État, le diocèse et le CMN pour la gestion du système de
sécurité incendie, les personnels mis en œuvre et la prise en charge
financière
63
.
Il apparaî
t nécessaire à la Cour que l’ensemble des équipements de
sécurit
é incendie soit réalisé à l’échéance de la réouverture mais aussi que
soit garantie la prise en charge des moyens humains et financiers
nécessaires à leur mise en œuvre. En outre
,
il importe que l’ABF
conservateur du monument, dont la mission de responsable unique de
sécurité a été suspendue à la suite du transfert de la gestion domaniale de
la cathédrale, dispose des moyens nécessaires et de la capacité
opérationnelle
à l’exercice de cette responsabilité
, dès lors que le ministère
considère dans sa réponse à la Cour que ce dernier est «
appelé à redevenir
le responsable unique de sécurité à la réouverture de la cathédrale
».
Aussi, la Cour, compte tenu des carences relevées en la matière dans son
63
Cour des comptes,
La conservation et la restauration de Notre-Dame de Paris.
Premier bilan,
rapport public thématique, septembre 2020.
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LA RÉOUVERTURE DE LA CATHÉDRALE EN 2024 :
UNE NÉCESSAIRE CLARIFICATION
75
précédent contrôle, invite le ministère à ne pas reproduire le système
antérieur au sinistre et, le cas échéant,
à s’interroger sur la pertinence de
l’application à Notre
-
Dame de Paris d’une organisation peu adaptée à
l’intensité de la fréquentation et aux risques qui en découlent
.
Par ailleurs, se pose la question de la sécurité des personnes,
particulièrement durant la
phase où devraient cohabiter l’accueil des fidèles
et des visiteurs et les chantiers de restauration et du parvis jusqu’en 2028.
Les discussions en cours avec la préfecture de police pour définir le
périmètre de sécurité de la cathédrale devront prendre en compte
l’existence de ce chantier, des installations provisoires qui seront de ce fait
rendues nécessaires pour l’accueil et la sécurité, et leur financement.
L’importance du nombre des visiteurs
, comme la spécificité de
Notre-Dame et le nombre des acteurs concernés, plaident, au-delà de la
fonction
propre de l’ABF si elle est confirmée, pour la désignation d’un
responsable unique opérationnel sur les questions de sécurité.
III -
P
réparer un cadre d’accuei
l à la hauteur
de ce monument prestigieux et répondre
à la problématique de sa surfréquentation
A -
Une absence de vision d’ensemble
Dans son récent rapport
consacré à la politique de l’État en faveur
du patrimoine monumental
64
, la Cour a souligné les conséquences de la
surfréquentation d’un certain nombre de monuments. La cathédrale Notre
-
Dame de Paris faisait déjà partie des monuments les plus visités de France
avant l’incendie, avec une tendance de fréq