ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LE SOUTIEN
À L’AGRICULTURE
BIOLOGIQUE
Rapport public thématique
Évaluation de politique publique
Synthèse
Juin 2022
2
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations, des organismes et des collectivités
concernés figurent à la suite du rapport
.
3
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Sommaire
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Au terme d’une décennie de forte croissance
de l’agriculture biologique, des turbulences
sur certains marchés
9
2
Une politique de soutien justifiée par les bénéfices
de l’agriculture biologique pour la santé
et l’environnement
15
3
Une politique de soutien qui n’est pas à la hauteur
de l’ambition affichée par les pouvoirs publics
17
4
Une incidence sur la création et la répartition de la valeur
au sein de la filière bio insuffisamment mesurable
23
5
Une contribution à l’autonomie agricole et alimentaire
française qui reste à préciser et à modéliser
25
6
Des leviers au service de l’ambition affichée
27
Recommandations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
5
Introduction
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
L’agriculture biologique est
« un système global de gestion agricole et de
production alimentaire qui allie les meilleures pratiques environnementales, un
haut degré de biodiversité, la préservation des ressources naturelles, l’application
de normes élevées en matière de bien-être animal et une méthode de production
respectant la préférence de certains consommateurs à l’égard des produits
obtenus grâce à des substances et des procédés naturels »,
selon la définition de la
règlementation européenne . Celle-ci fixe son cahier des charges, dont le respect
par les exploitants, contrôlé chaque année par des organismes certificateurs,
donne le droit d’utiliser le label européen de l’eurofeuille et le label français « AB » .
L’agriculture biologique est particulièrement exigeante pour les producteurs
sur le plan des méthodes et des techniques agronomiques, mais aussi pour les
transformateurs . Elle constitue au regard de la production conventionnelle, selon
le préambule du programme Ambition Bio 2013-2017,
« une voie majeure et
pionnière et doit avoir un rôle moteur dans l’évolution des pratiques, notamment
grâce à la diffusion vers les autres formes d’agriculture »
La France a mis en place dès les années 1990, dans le cadre européen, une
politique de soutien à l’agriculture biologique, portée principalement par le
ministère de l’agriculture et de l’alimentation (MAA) avec, de plus, le concours
croissant du ministère de la transition écologique (MTE) . Plusieurs plans ont
été lancés depuis 1998, dont les programmes Ambition bio 2013-2017, puis
2017-2022, poursuivant une série d’objectifs détaillés dans le schéma suivant, en
particulier deux objectifs chiffrés : 15 % des surfaces agricoles utiles (SAU) en bio
et 20 % de la restauration collective publique en bio en 2022 .
6
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Introduction
Sous-objectif
stratégique
Objectifs
spécifiques
Impacts
Objectifs opérationnels
&
Indicateurs
Développer
l’agriculture
biologique
7 logiques
d’action
Le développement de l'AB
permet :
• De réduire l'impact
des activités agricoles
sur l'environnement
• De répondre à une demande
croissante des consommateurs
en produits issus de l'AB
• De stimuler l'innovation
et la recherche agronomique
• De contribuer à une
meilleure rémunération
des producteurs
• D'offrir des produits de
qualité aux consommateurs
à un prix accessible
• D'investir de nouveaux
marchés à l'export et ainsi
contribuer à une meilleure
balance commerciale agricole
7. Impulser une dynamique de
conversion dans les Outre-mer
6. Adapter la règlementation
5. Former les acteurs
4. Renforcer la recherche
3. Développer la consommation
2. Structurer les filières
1. Développer la production
Part de SAU AB :
15 % d’ici fin 2022
Part de l’AB
dans la restauration
collective publique :
20 % d’ici fin 2022
Le programme Ambition Bio 2017-2022
Source : ministère de l’agriculture et de l’alimentation
La politique de soutien à l’agriculture biologique est portée par de multiples
acteurs, dont beaucoup représentent l’ensemble du monde agricole, encore peu
tourné vers cette forme particulière d’agriculture . Le schéma suivant permet de
visualiser, de manière simplifiée, les acteurs du soutien .
Union Européenne
Réglementation
et
financements
MAA
politique agricole
(tous axes)
MTE
politique
environnement
Agences de l’eau
Agence Bio
• APCA
• Coopérative agricole
• FNAB
• Synabio
Interprofessions
Collectivités locales
Code couleurs selon les 6 axes de la politique de soutien à l’agriculture biologique :
Aides à la production
Innovation, recherche
Structuration de la filière
Formation, accompagnement
Soutien à la consommation
Réglementation
Dispositif de soutien à l’agriculture biologique
Source : Cour des comptes
Introduction
La présente évaluation vise à apprécier dans quelle mesure les outils et
moyens de cette politique publique ont permis d’atteindre les objectifs définis
par les programmes successifs depuis 2010 . Elle intervient au terme de
10 années de forte croissance de l’agriculture biologique, à un moment clé où des
interrogations se font jour sur la soutenabilité du modèle, et alors que la politique
agricole commune (PAC) est en cours de redéfinition pour la période 2023-2027,
avec d’importants enjeux de transition agro-écologique valant pour l’ensemble
de l’agriculture française et européenne .
Les travaux conduits par la Cour, en lien avec un comité d’accompagnement,
visent à établir des constats et à formuler des recommandations qui puissent
être de nature à conforter la réalisation des objectifs assignés au développement
de l’agriculture biologique, dans le respect du cadre fixé par l’Union européenne .
Outre le nouveau règlement européen de 2018 précisant les règles concernant
l’agriculture biologique, entrées en vigueur en 2022, l’Union européenne a
adopté en mai 2020, dans le cadre de son pacte vert, la stratégie « de la ferme à
la fourchette » dont l’un des objectifs est de consacrer 25 % des terres agricoles
à l’agriculture biologique d’ici à 2030 . Cette évaluation s’inscrit également dans
la recherche d’une bonne articulation et complémentarité entre les agricultures
biologique et conventionnelle sur la base d’une meilleure exploitation des
données comparatives et au service de la nécessaire transition agroécologique
1
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
1 .
Cf.
Cour des comptes, Accompagner la transition agroécologique, octobre 2021
7
9
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
1
Au terme d’une décennie de
forte croissance de l’agriculture
biologique, des turbulences
sur certains marchés
Longtemps marginale en France,
l’agriculture biologique a fortement
progressé au cours de la dernière
décennie, en particulier depuis 2015,
et la France se hisse désormais au
premier rang européen pour la SAU en
bio avec plus de 2,8 Mha en 2021 .
Évolution des surfaces bio et en conversion
dans les principaux pays européens (2010-2021)
0
5 000 000
10 000 000
15 000 000
20 000 000
25 000 000
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
3 000 000
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
SAU bio (ha) de l'UE
SAU bio (ha)
Espagne
France
Italie
Allemagne
Autriche
Suède
Total UE à 27
Source : Agence Bio
10
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Au terme d’une décennie de forte croissance
de l’agriculture biologique, des turbulences
sur certains marchés
Entre 2010 et 2021, elle est ainsi passée
de 4 % à 13,4 % des exploitations
agricoles représentant 10,3 % de
la SAU et 19 % des agriculteurs, en
moyenne plus jeunes et plus diplômés .
Pour autant, cette progression est
variable : ainsi, la filière céréales, qui
représente 35 % de la SAU française, ne
compte que 6 % de surfaces cultivées
en bio . Par ailleurs, si la consommation
bio a été multipliée par 3,5 en 10 ans,
elle ne représente encore que 6,6 % de
la dépense alimentaire des ménages
en 2021 .
Évolution des surfaces, des fermes et des entreprises engagées
en agriculture biologique (2005-2021)
58 413
fermes
29 233
entreprises
0
20 000
40 000
60 000
80 000
100 000
120 000
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
3 000 000
Surfaces
engagées (ha)
Surfaces en conversion
Surfaces certifiées bio
Nb. exploitations engagées en bio
Nb. préparateurs, distributeurs, importateurs et exportateurs bio
Nombre d'opérateurs
engagés
2,78 millions ha
Source : Agence Bio
11
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Part des surfaces engagées en agriculture biologique selon les départements (2021)
Source : Agence Bio
L a croissance de l’agriculture
biologique a été tirée par une demande
soutenue, avec des prix élevés auxquels
les consommateurs consentent en
raison des bénéfices attendus pour la
santé et l’environnement, dès lors qu’ils
disposent de revenus en conséquence,
ce qui laisse entière la question de
l’accès des ménages à plus faibles
revenus à ce mode de consommation .
La croissance de la production bio
résulte également de performances
é c o n o m i q u e s g l o b a l e m e n t
satisfaisantes et comparables à celles
des exploitations conventionnelles
(aides comprises) sur la période de
2015 à 2019, en dépit de rendements
et d’une productivité animale plus
faibles liés aux contraintes du cahier
des charges
2
Cependant, à l’instar de
la plupart des exploitations agricoles
en France, l’équilibre économique de
celles qui se trouvent en agriculture
biologique reste fragile et tributaire des
soutiens publics .
Au terme d’une décennie de forte croissance
de l’agriculture biologique, des turbulences
sur certains marchés
2 . Pour procéder à l’analyse comparée des performances économiques des agricultures biolo-
gique et conventionnelle, que les bases de données disponibles ne permettaient pas de conduire
en dehors de quelques monographies régionales, la Cour a constitué un nouvel outil, le RICABIO,
croisant différentes bases de données du MAA .
12
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
La forte progression de la demande
et le niveau élevé des prix ont suscité
de fortes vagues de conversions,
mais à l’inverse, lorsque la croissance
de la demande a commencé à
se ralentir et le niveau des prix à
fléchir, des interrogations sur la
pérennité de l’équilibre économique
de l’agriculture biologique sont
apparues . De fait, après de premiers
signaux d’affaiblissement dès 2019,
le marché a connu un retournement
en 2021 avec, pour la première fois,
une baisse des ventes en bio dans la
grande distribution non spécialisée, qui
explique pourquoi, pour la première
fois en 2021, la consommation de
produits bio baisse, de 1,3 % . Toutefois,
dans un contexte où la consommation
alimentaire totale des Français
diminue de 2,3 % en 2021, la part
des achats bio augmente légèrement
à 6,6 % des aliments consommés
en France .
Évolution de la consommation alimentaire des Français et part en bio (2014-2021)
2,80 %
3,20 %
3,80 %
4,80 %
5,40 %
6,00 %
6,57 %
6,63 %
0,00 %
1,00 %
2,00 %
3,00 %
4,00 %
5,00 %
6,00 %
7,00 %
155 000
160 000
165 000
170 000
175 000
180 000
185 000
190 000
195 000
200 000
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Consommation alimentaire des ménage selon Insee (hors tabac et eaux minérales)
en millions €
Part des achats alimentaires bio sur la consommation générale Insee
Source : Agence Bio
Au terme d’une décennie de forte croissance
de l’agriculture biologique, des turbulences
sur certains marchés
13
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Au-delà d’un effet de conjoncture,
suivant l’envol des ventes de produits
bio lors du premier confinement en
2020, des lignes de faille se font jour :
• la réduction de l’écart de prix en
faveur du bio au fur et à mesure du
développement des ventes en grande
distribution non spécialisée (52 %
des ventes de bio en 2021) ;
• le manque de communication sur
l’agriculture biologique, son impact
sur l’environnement et la santé, qui
contribue au ralentissement de la
demande de produits bio face
à la concurrence croissante de
labels « verts » moins exigeants,
conduisant, face à la surproduction
ponctuelle de certains produits
(œufs et lait), à des baisses des prix
payés aux producteurs .
• une structuration insuffisante
des filières bio, avec un manque
d’installations de stockage adaptées
à certaines productions (notamment
en céréales) et la faiblesse des
industries de transformation des
produits bio, qui explique une grande
partie du déficit commercial français
en aliments bio ;
Au vu de cet état des lieux, la présente
évaluation de la politique française
en faveur de l’agriculture biologique
depuis 2010 vise donc à apprécier son
adéquation aux objectifs assignés,
en répondant à quatre questions
évaluatives, détaillées en annexe n°4
du rapport .
En premier lieu, dans quelle mesure
la politique en faveur du bio répond-
elle à ses finalités de préservation de
l’environnement, du climat et de la
santé (question 1.1) ?
Au terme d’une décennie de forte croissance
de l’agriculture biologique, des turbulences
sur certains marchés
15
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une politique de soutien justifiée
par les bénéfices de l’agriculture
biologique pour la santé
et l’environnement
2
La Cour dresse un inventaire de la
littérature scientifique traitant des
bénéfices de l’agriculture biologique,
tant par diminution des externalités
négatives liées à d’autres pratiques
agricoles, que par ses propres
externalités positives, cette forme de
production agricole étant fondée sur
l’interdiction des pesticides chimiques
de synthèse et des OGM, ainsi que sur
une forte limitation des antibiotiques
en élevage .
Même si les agriculteurs sont dans
l’ensemble en meilleure santé que
la moyenne des Français, des études
scientifiques suggèrent un lien entre
l’exposition aux pesticides et plusieurs
pathologies (cancers, maladie de
Parkinson, etc .), ces dernières pouvant,
si ce lien est établi, être reconnues
comme maladies professionnelles
des agriculteurs . D’autres études
d o c u m e n t e n t u n e r é d u c t i o n
substantielle de plusieurs maladies
(cancers et diabète entre autres)
chez les consommateurs réguliers de
produits bio .
L’impact favorable de l’agriculture
biologique sur l’environnement
est également bien documenté .
Alors que la pollution de l’eau,
due essentiellement aux nitrates,
phosphore et produits phytosanitaires
d’origine agricole, continue de
s’aggraver, l’agriculture biologique
permet de la réduire . C’est pourquoi les
agences de l’eau apportent un soutien
financier croissant aux conversions en
bio : la prévention s’avère bien moins
coûteuse que la décontamination
de l’eau potable . Des sociétés d’eau
potable comme celle de Paris ont
commencé à financer l’agriculture
biologique dans des aires de captage .
L’agriculture biologique contribue
également à améliorer la fertilité
des sols, grâce à des teneurs en
matière organique plus élevées,
ainsi qu’à une meilleure capacité des
sols à retenir l’eau et à séquestrer
le carbone . Ce mode de production
présente néanmoins quelques limites,
dont l’usage du cuivre, souvent
incontournable faute de recours
possible aux fongicides de synthèse et
d’alternatives techniques éprouvées,
ou encore le travail profond des sols,
l’absence de couverts ou les rotations
simples toujours possibles voire
nécessaires en bio .
L’impact de l’agriculture biologique
est positif sur la qualité de l’air,
comparativement dégradée par les
émissions d’ammoniac dues aux
engrais azotés utilisés en agriculture
conventionnelle .
L’agriculture biologique contribue
particulièrement à la préservation de
la biodiversité, les espèces de faune
et de flore étant en moyenne 30 %
plus nombreuses et leurs populations
50 % plus abondantes dans les
cultures biologiques, alors que les
populations d’oiseaux des champs et
16
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
les pollinisateurs ont diminué de plus
de 30 % depuis 1990 en Europe .
Cette forme d’agriculture est, à
l’hectare, moins émettrice de gaz
à effets de serre, notamment de
protoxyde d’azote du fait de la non-
utilisation d’engrais minéraux azotés,
comme au niveau de l’exploitation,
dont l’autonomie est recherchée en bio .
L’amélioration du bien-être animal par
l’agriculture biologique découle de son
cahier des charges, qui interdit les cages
et le maintien d’animaux attachés, limite
les densités, prescrit une alimentation
plus naturelle (fourrage, lait maternel)
et garantit un accès au plein air .
E n f i n , l e d é v e l o p p e m e n t d e
l’agriculture biologique a un impact
favorable sur l’emploi en milieu rural
du fait de son attractivité pour les
jeunes agriculteurs et agricultrices : un
tiers des installations se font désormais
en bio . Utilisant plus de main d’œuvre,
ce système de production est créateur
d’emplois en agriculture, comme au
sein des filières bio .
A u tot al , m ê m e s i d e s ét u d e s
complémentaires restent nécessaires,
en particulier concernant l’impact
de l’agriculture biologique sur la
santé et sur le climat, la littérature
scientifique reconnaît ses bénéfices
sanitaires et environnementaux . C’est
également la conclusion d’une étude
Itab-Inrae de 2016 sur le chiffrage de
ses externalités, qui mériterait d’être
régulièrement actualisée .
La Cour s’est ensuite interrogée
pour savoir si les objectifs choisis
pour piloter la politique en faveur de
l’agriculture biologique (15 % de la
surface agricole utile en bio et 20 % de
la restauration collective publique en
bio en 2022) étaient pertinents, c’est-
à-dire mesurables et suffisants, pour
poursuivre l’objectif de développement
de l’agriculture bio (question 1.2).
Ces deux indicateurs ont permis
d ’ a f f i c h e r u n e a m b i t i o n d e
développement de l’agriculture
biologique au fil des plans successifs
Horizon et Ambition Bio .
L’objectif de surface agricole, dont il
convient de rappeler qu’il n’est pas
atteint (avec seulement 10,3 % de SAU
bio en 2021), apparaît trop global . Une
distinction par types de production en
accroîtrait la pertinence, compte tenu
de leurs poids très différents dans la
SAU et de la nécessité pour le MAA de
piloter le rythme des conversions en
veillant à l’équilibre de l’offre et de la
demande dans les filières .
La pertinence de l’objectif de 20 % de
produits bio en restauration collective
publique ne fait pas débat, mais la
Cour relève que son affichage pendant
plus d’une décennie n’a pas été assorti
d’un réel suivi .
L’évaluation conduite a mis à jour
d’autres indicateurs qui mériteraient
d’être suivis : la part des installations
d’agriculteurs en bio ; le nombre de
déconversions d’exploitations bio ; la
part de l’agriculture biologique dans
l’emploi agricole et agroalimentaire ;
l’autosuffisance de l’agriculture bio
française par catégories de produits,
notamment celles qui sont les plus
déficitaires (fruits, épicerie) ; sa part
dans les dépenses alimentaires, etc .
La deuxième question évaluative
porte sur les moyens déployés en
faveur de l’agriculture biologique :
les instruments de soutien (normes,
aides budgétaires, fiscalité, moyens en
recherche & développement) sont-ils
adaptés aux objectifs affichés ?
Une politique de soutien justifiée
par les bénéfices de l’agriculture biologique
pour la santé et l’environnement
17
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une politique de soutien
qui n’est pas à la hauteur
de l’ambition affichée
par les pouvoirs publics
3
Les actions de soutien à l’agriculture
biologique prévues dans le cadre des
plans successifs se sont appuyées sur
de nombreux dispositifs existants .
Réévaluées à la hausse en 2015, les
aides à la production biologique
prévues dans le cadre de la PAC ont
favorisé les conversions, de manière
cependant variable selon les filières .
Mais au regard de la forte demande,
le MAA a sous-dimensionné les aides
à la conversion et au maintien en
agriculture biologique entre 2015
et 2020 . Ainsi, près de la moitié de
l’enveloppe des mesures bio du Feader
a été consommée dès la première
année de la programmation (545 M€
engagés dès 2015) .
Engagements des aides à la conversion (CAB) et au maintien (MAB)
en agriculture bio en France (2015-2020), en M€
Source : Cour des comptes d’après ASP
0
600
500
400
300
200
100
2015
Engagements MAB
Engagements CAB
254
289
2016
40
213
2017
35
156
2018
24
230
2019
22
247
2020
21
270
18
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
À cette insuffisance des crédits ayant
conduit à des plafonnements, se sont
ajoutés des retards de paiement et
des taux de rejet des demandes d’aide
particulièrement élevés en bio . Outre
les 50 % apportés par l’Europe, le
budget de l’État cofinance 17 % des
mesures bio du Feader, derrière les
agences de l’eau devenues avec 30 %
de l’ensemble le premier financeur
national depuis 2016, et devant
les régions gestionnaires mais
contributrices à 3 % seulement .
Une politique de soutien qui n’est pas
à la hauteur de l’ambition affichée
par les pouvoirs publics
Évolution des paiements de l’aide à la conversion et au maintien
en agriculture biologique par financeur (2015 - 2020), en M€
Source : Cour des comptes d’après ASP
64 %
60 %
59 %
55 %
52 %
50 %
20 %
19 %
18 %
17 %
18 %
17 %
0 %
0 %
0 %
1 %
2 %
3 %
16 %
21 %
23 %
26 %
28 %
30 %
-
50
100
150
200
250
300
2015
2016
2017
2018
2019
2020
M€
Europe
État
Régions
Agences de l'eau
19
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
Ce financement de l’État à hauteur de
35 M€ en 2020 apparaît encore plus
limité lorsqu’il est rapproché des coûts
de dépollution des eaux contaminées
par les produits phytosanitaires et
nitrates d’origine agricole à la charge
des usagers (dans son rapport de
septembre 2011, le commissariat
général au développement durable
estime le coût annuel du traitement
des flux annuels d’azote et de
pesticides entre 540 et 970 M€ par an,
tandis que la dépollution de toutes les
eaux souterraines aurait un coût dix
fois supérieur) .
La suppression en 2017, en France,
de l’aide au maintien a ralenti les
conversions à partir de 2020 . Cette
décision
3
répond d’autant moins à la
nécessité de rémunérer les services
environnementaux, que les « paiements
verts » du premier pilier de la PAC
bénéficient à tous les agriculteurs à
l’identique . Pour certaines productions,
comme les grandes cultures, les
exploitations biologiques perçoivent
à l’issue des cinq années d’aide à la
conversion un niveau d’aides équivalent
à celui alloué aux exploitations
conventionnelles et ne bénéficient donc
d’aucune rémunération des services
environnementaux rendus . Ce constat
peut expliquer en partie le faible
nombre d’exploitations céréalières
en bio .
Si les enveloppes prévues pour
les aides à la conversion sont en
augmentation de 40 % dans la
prochaine programmation de la
PAC (2023-2027), la réalisation des
objectifs de 18 % de SAU en bio en
2027 (objectif défini dans le projet
stratégique national – PSN – transmis
par la France fin 2021 à la Commission
européenne) et de 25 % de la SAU
en 2030 (objectif européen) est loin
d’être assurée . En effet, non seulement
les enveloppes dédiées aux mesures
agro-environnementales et climatiques
(Maec) seraient seulement maintenues,
mais en outre le futur « écorégime
4
»
serait accessible au même niveau
de rémunération à des exploitations
engagées dans des démarches
environnementales moins exigeantes
que l’agriculture biologique
5
En aval, les industries de transforma-
tion sont proportionnellement moins
développées dans les filières bio que
dans les filières conventionnelles . Elles
reposent essentiellement sur un tissu
de PME ancrées dans les territoires
ruraux, qui manquent souvent de
moyens d’investissement pour innover
et gagner des parts sur des marchés
en croissance . Leur développement
constitue pourtant un enjeu de
premier plan, afin de mieux valoriser
les productions bio et de sécuriser
leurs débouchés, créer de la valeur
ajoutée, développer l’emploi, répondre
aux attentes des consommateurs
et des acheteurs de la restauration
collective . Leur croissance serait
également bénéfique pour la balance
commerciale française, sachant que
deux tiers des produits bio importés
sont transformés .
Une politique de soutien qui n’est pas
à la hauteur de l’ambition affichée
par les pouvoirs publics
3 . Seuls quatre pays sur 27 dans l’Union européenne, dont la France, ont renoncé aux aides au
maintien en agriculture biologique .
4 . Qui représentera 25 % du premier pilier de la PAC .
5 . Cette orientation du PSN est néanmoins contestée par la Commission européenne dans sa
lettre d’observations du 31 mars 2022 .
20
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Face à cet enjeu crucial, les mesures
de soutien sont encore insuffisantes .
Ainsi, le fonds Avenir Bio n’a été doté
que de 3,7 M€ par an en moyenne de
2008 à 2020 pour financer des projets
structurants pour la filière bio . Il a été
abondé de 5 M€ en 2021 mais n’est
pas suffisamment accessible aux PME
concernées .
Les moyens consacrés à la promotion
et à la recherche en agriculture
biologique sont également limités . La
communication sur ses bénéfices est
pourtant indispensable pour expliquer
aux consommateurs les coûts de
production inhérents et donc les
prix plus élevés . Elle peut également
contribuer à soutenir la demande
lorsqu’elle fléchit, ce qui est le cas
depuis 2021, notamment pour le lait et
les œufs bio . Or, l’Agence Bio, principal
opérateur de l’État pour la filière bio en
France, ne dispose pas de moyens à la
hauteur de ses missions, en particulier
pour la communication . La campagne
de communication sur le bio du
printemps 2022 a montré la difficulté
de trouver un slogan (« 30 % de
biodiversité en plus, produit avec 0 %
de pesticides chimiques de synthèse,
100% des opérateurs contrôlés au
moins une fois par an ») acceptable
pour l’ensemble des acteurs, bio et non
bio, et reste trop modeste pour avoir
un impact sur des ventes .Ce constat
est d’autant plus préoccupant que les
interprofessions agricoles restent peu
mobilisées sur l’agriculture biologique,
encore minoritaire au sein de leurs
filières, alors même que les acteurs des
filières bio sont tenus de leur verser
des cotisations interprofessionnelles
étendues (CIE) en vertu d’actes
réglementaires pris par l’État .
En outre, les produits biologiques
s u b i s s e nt l a co n c u r re n ce d e s
appellations, marques ou certifications,
dont le niveau d’exigence est
inférieur . C’est notamment le cas de
la certification environnementale .
Alors que cette démarche est, en l’état
actuel de son cahier des charges, bien
moins exigeante que l’agriculture
biologique, le ministère chargé de
l’agriculture la soutient fortement : un
crédit d’impôt a été accordé en 2021
à un niveau quasi équivalent à celui
des exploitations bio ; en outre, les
produits issus d’exploitations certifiées
au niveau 2 ou 3 de la certification
environnementale (le niveau 3
donnant accès à la mention valorisante
« haute valeur environnementale » ou
HVE) sont inclus depuis 2019 parmi les
signes de qualité devant représenter
5 0 % d e l’a p p rov i s i o n n e m e nt
des cantines publiques ; enfin, le
ministère a proposé, dans le PSN, de
donner aux exploitations certifiées
au niveau 2+ ou 3 (HVE) de la
certification environnementale un
accès au futur écorégime équivalent
à celui de l’agriculture biologique .
À la suite d’une observation critique
de la Commission européenne dans
sa lettre du 31 mars 2022, le ministère
a entrepris de réviser la certification
environnementale, dont le résultat
n’est pas encore connu à la date de
finalisation du rapport ; il a par ailleurs
décidé de maintenir un accès identique
à l’écorégime (même niveau de
rémunération) pour les exploitations
certifiées bio, HVE et au niveau 2+ de
la certification environnementale .
Le soutien de la demande passe
é g a l e m e n t p a r l a c o m m a n d e
publique . Celle-ci est cependant
Une politique de soutien qui n’est pas
à la hauteur de l’ambition affichée
par les pouvoirs publics
21
Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes
insuffisante . L’objectif de 20 % de
produits biologiques en restauration
collective publique en 2022, fixé
pour 2012 et réitéré par la loi Egalim
en 2018, est loin d’être atteint ;
malgré l’engagement de certaines
collectivités territoriales pionnières
dans les cantines scolaires, il plafonne
à environ 5 à 6 %, soit pas davantage
que la part des produits bio dans la
consommation totale (6,6 % en 2021) .
Par ailleurs, tous les professionnels
s’acco rd e nt s u r le fa i t q u e le
développement de la production
biologique appelle un investissement
sur la recherche et le développement
en raison des exigences agronomiques
de son cahier des charges, du manque
de matériel végétal disponible et
des impasses techniques encore à
résoudre faute de recours possibles
aux intrants de synthèse . La tendance
récente à la baisse des prix du bio
conduit aussi à privilégier la recherche
d’une plus grande efficacité technique
pour augmenter la productivité et
les rendements . Mais ni l’État, ni les
interprofessions n’ont fait jusqu’à
présent de l’agriculture biologique une
priorité dans les travaux scientifiques
qu’ils financent . Bien que l’Inrae
soit engagé dans la recherche en ce
domaine depuis plus de 20 ans, son
programme Métabio n’a été lancé
qu’en 2020 .
Tandis que le plan d’action européen
pour le développement de l’agriculture
biologique arrêté en mars 2021 prévoit
de consacrer au bio 30 % du budget
européen de recherche en agriculture
et sylviculture, le compte d’affectation
spéciale développement agricole et
rural (Casdar) y affecte à peine 10 % de
ses moyens et les instituts techniques
agricoles seulement 5 % . Pour sa part,
l’institut technique de l’agriculture
biologique (Itab), qui ne bénéficie pas
de cotisations interprofessionnelles, ne
dispose pas de ressources suffisantes
pour coordonner la recherche
appliquée et l’expérimentation en
agriculture biologique et ne parvient
pas à s’insérer dans le réseau des
instituts techniques agricoles .
Enfin, l’effor t de formation et
d’accompagnement des agriculteurs
dans leur conversion en bio, pourtant
crucial, se révèle également trop limité .
De manière générale, la politique
de soutien à l’agriculture biologique
menée par le ministère de l’agriculture
porte des objectifs ambitieux, sans
allocation de moyens suffisants . Des
résultats notables ont certes été
obtenus, mais cette politique aurait
pu être davantage motrice dans le
développement de l’agriculture
biologique, qu’elle a, au mieux,
accompagné et parfois freiné .
La question évaluative n°3 porte sur la
contribution de la politique publique
en faveur de l’agriculture biologique
à la création de valeur et à sa juste
répartition entre les producteurs et
l’aval de la filière.
Une politique de soutien qui n’est pas
à la hauteur de l’ambition affichée
par les pouvoirs publics
23
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une incidence sur la création
et la répartition de la valeur
au sein de la filière bio
insuffisamment mesurable
4
La politique publique de labellisation
permet au marché de valoriser les
produits bio . Cette identification
aux bénéfices du cahier des charges
autorise des prix à la consommation
plus élevés qui contribuent à l’équilibre
économique de la filière bio .
Cependant, depuis la fin de l’année
2020, cet équilibre de marché est remis
en cause par le fléchissement de la
demande de certains produits bio .
Cette évolution moins favorable paraît
relever de facteurs conjoncturels liés
à la crise sanitaire, mais révèle aussi
des interrogations plus anciennes
sur la pérennité des équilibres du
bio, le ralentissement s’étant fait
jour dès 2019 dans certains secteurs .
Longtemps marginale, l’agriculture
biologique a suscité en effet, en raison
de l’ampleur de la demande, du niveau
des prix et des marges, l’intérêt d’un
nombre croissant de producteurs . À
ceux qui avaient fait avec le bio un
choix d’engagement s’ajoutent des
acteurs plus strictement motivés
par les opportunités économiques .
Après plusieurs années de croissance
à deux chiffres de l’offre, la baisse de
la consommation de produits bio de
1,3 % en 2021 déstabilise le marché
bio, notamment pour le lait et les
œufs, dont la production a fortement
augmenté depuis 2015 .
Par ailleurs, si les industries de
transformation de produits bio sont
fortement créatrices de valeur, elles
n’emploient que 13 % de l’effectif total
de la filière bio .
S’agissant de la répartition de la valeur
au sein de la filière bio, les données
sont lacunaires, dans la mesure où
l’observatoire des prix et des marges
agroalimentaires n’a commencé à
publier des éléments qu’en 2020, qui
plus est seulement pour quelques
produits laitiers et des fruits et
légumes .
Des données de FranceAgriMer sur
les évolutions de prix pour certains
produits, en particulier la tomate
ronde, suggèrent bien une meilleure
captation de la valeur par les
producteurs bio comparativement
aux agriculteurs conventionnels . Par
ailleurs, les marges augmentent plus
fortement dans la grande distribution
que dans la distribution spécialisée
en bio . Ces éléments épars ne
représentent que des indices d’une
répartition de la valeur plus favorable
aux producteurs bio .
Rien ne permet d’affirmer que de
manière générale, l’effet en faveur
des producteurs va au-delà d’une
répartition proportionnelle de la valeur
soutenue par les aides et des prix plus
24
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
élevés . Il n’est pas non plus possible
d’identifier les niveaux de captation
des aides publiques, notamment par la
distribution bio spécialisée, par ailleurs
pionnière pour la prise en compte des
coûts de production .
E nf i n , l a q u at r i è m e q u e st i o n
é v a l u a t i v e , p l u s g é n é r a l e e t
prospective, a été formulée comme
suit : dans quelle mesure la politique
de soutien à l’agriculture bio
contribue-t-elle à l’autonomie agricole
et alimentaire française ?
Une incidence sur la création et la répartition
de la valeur au sein de la filière bio
insuffisamment mesurable
25
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une contribution à l’autonomie
agricole et alimentaire française
qui reste à préciser
et à modéliser
5
Au regard de l’objectif d’autonomie
agricole et alimentaire régulièrement
assigné à la politique agricole française
et mis en lumière dans le contexte
de la guerre en Ukraine, l’agriculture
biologique produit deux effets
contraires .
R e c h e r c h a n t p a r n a t u r e u n e
complémentarité entre productions
animales et végétales à l’échelle
de l’exploitation, l’agriculture
biologique est moins tributaire des
intrants importés que l’agriculture
conventionnelle . Son développement
permet ainsi en particulier de réduire
le déficit commercial de la France en
engrais (1,4 Md€ en 2020) .
Cependant, ses moindres rendements,
en moyenne de 18 % selon l’Inrae,
réduisent sa capacité à contribuer à
l’autonomie alimentaire et aux expor-
tations françaises . Si les rendements
de l’agriculture conventionnelle
sont plutôt orientés à la baisse, ceux
des exploitations bio pourraient
présenter un potentiel d’amélioration,
qui dépend de l’effort de recherche
et développement . Par ailleurs,
des études menées à ce sujet, en
particulier par l’Inrae et par l’Iddri, ont
développé des
scenarii
dans lesquels
cette faiblesse des rendements en bio
pourrait néanmoins être compensée
par une réduction du gaspillage et
par une évolution des régimes
alimentaires vers plus de protéines
végétales .
Ces études mériteraient d’être
c o m p l é t é e s , n o t a m m e n t e n
intégrant la capacité de résilience
des exploitations biologiques face au
réchauffement climatique, au moyen
d’une réflexion prospective sur une
évolution des systèmes de production
agricoles et alimentaires permettant
de concilier transition agro-écologique
et sécurité alimentaire .
27
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Des leviers au service
de l’ambition affichée
6
Depuis 2010, les programmes
successifs Horizon ou Ambition Bio
n’ont pas permis d’atteindre les seuls
objectifs chiffrés de 15 % de SAU bio et
20 % de bio dans les cantines publiques
au 1
er
janvier 2022 . Désormais, de
nouveaux objectifs sont définis : 18 %
de surfaces agricoles en agriculture bio
en 2027 par la France et 25 % en 2030
par l’Union Européenne dans le cadre
du pacte vert de 2019 et de la stratégie
« de la ferme à la fourchette » de 2020 .
La France doit se donner les moyens
de son ambition, d’autant plus que les
équilibres qui ont présidé à l’expansion
du bio au cours des 10 dernières années
apparaissent fragilisés .
Pour contribuer à les atteindre, la Cour,
en conclusion de cette évaluation,
formule 12 recommandations, regrou-
pées en trois grandes orientations :
• éclairer les choix des citoyens et des
consommateurs sur l’impact envi-
ronnemental et sanitaire du bio ;
ce moyen de soutenir la demande
suppose, au-delà de campagnes in-
terministérielles de communication,
une nette clarification des bénéfices
environnementaux comparés de
l’agriculture biologique et de l’agri-
culture conventionnelle, ainsi que
des certifications et labels correspon-
dants ; ce qui suppose une révision
de la certification environnementale
et de l’affichage environnemental ;
• redéployer les soutiens publics en
faveur de l’agriculture biologique ;
il s’agit de réallouer les ressources
de la PAC et la part nationale en
faveur de l’agriculture biologique
et de se donner les moyens d’une
meilleure régulation de l’offre et de la
demande en s’appuyant sur l’Agence
bio associant tous les acteurs des
filières ; encore faudrait-il que les
interprofessions dotées de moyens
significatifs grâce aux cotisations
étendues interprofessionnelles
acquittées par tous les agriculteurs
acceptent de soutenir cette agence
tout comme l’Itab sur le champ de la
recherche ;
• favoriser la création de valeur au sein
du secteur agricole et alimentaire
bio ; il s’agit de mettre en oeuvre sans
délai la loi Egalim 2 en encourageant
fortement la contractualisation
entre producteurs, transformateurs
et distributeurs . En effet, une juste
et transparente rétribution des
produits et des services rendus ainsi
qu’une meilleure régulation de l’offre
et de la demande conditionnent
la structuration des filières bio de
l’amont à l’aval et la pérénnité du
modèle de l’agriculture biologique
en complémentarité avec une
agriculture conventionnelle en
transition agroécologique .
Au-delà des recommandations
retenues, l’évaluation a mis en
évidence la nécessité de définir une
politique publique en faveur de
l’agriculture biologique plus structurée,
mieux intégrée et plus ambitieuse .
29
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
Orientation n°1 : éclairer les citoyens
et les consommateurs sur l’impact
environnemental et sanitaire de
la filière issue de l’agriculture
biologique
1.
Rehausser fortement le niveau
d’exigence du cahier des charges
a p p l i c a b le à l a ce r t i f i c at i o n
environnementale, notamment
pour la mention Haute valeur
e n v i r o n n e m e n t a l e ( H V E ) e t
p ro p o r t i o n n e r le n i ve a u d e s
aides en fonction des bénéfices
environnementaux des divers labels
et certifications
(2022, MAA).
2.
Établir un plan interministériel de
communication grand public sur les
bénéfices de l’agriculture biologique,
en s’appuyant sur des évaluations
scientifiques de son impact sanitaire
et environnemental
(2023, MAA,
MTE, MSS, MEN, MESRI).
3.
Valoriser tous les bénéfices de
l’agriculture biologique dans la
méthode de calcul du futur affichage
environnemental sur les produits
alimentaires
(2023, MAA, MTE).
4.
Corriger et enrichir l’appareil
statistique public, de manière à
mesurer l’atteinte des objectifs fixés
en matière d’agriculture biologique
et comparer les différents modes
de production agricole
(2023, MAA,
MEFR, FranceAgriMer, ASP).
5.
Adopter un dispositif interminis-
tériel de suivi permettant d’évaluer
l’impact environnemental et de santé
publique des mesures de la PAC mises
en œuvre
(2023, MAA, MTE).
Orientation n°2 : réorienter les
soutiens publics à l’agriculture au
profit de la filière bio
6.
Pour la mise en œuvre de la future
PAC, instaurer une rémunération
pour services environnementaux
de l’agriculture biologique dans le
cadre de l’écorégime et renforcer les
mesures agroenvironnementales et
climatiques (Maec)
(2022 ; MAA, MTE,
MEFR).
7.
Renforcer les moyens de la
recherche et de l’innovation en
agriculture biologique et en assurer
la diffusion des résultats
(2023 ; MAA,
MTE, MEFR, MESRI).
8.
Conforter le rôle de coordination
de l’Institut technique de l’agriculture
biologique (Itab), en renforçant
ses moyens, notamment par une
mobilisation financière sensiblement
accrue des interprofessions agricoles
(2023 ; MAA, MTE).
9.
Conforter et élargir les missions
de l’Agence Bio, et lui donner
les moyens financiers et humains
correspondants par une mobilisation
financière sensiblement accrue des
interprofessions agricoles et par
l’accroissement des subventions pour
charges de service public
(2024 ;
MAA, MTE, MEFR, MSS, MEN, MESRI) .
30
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Recommandations
Orientation n°3 : favoriser la création
de valeur au sein de la filière issue de
l’agriculture biologique
1 0 .
A p p l i q u e r r a p i d e m e n t à
l’agriculture biologique la loi Egalim
2 et en particulier, inciter à la
contractualisation entre producteurs,
transformateurs et distributeurs
(2022, MAA).
11.
Pérenniser le Fonds Avenir Bio à
hauteur d’au moins 15 M€ par an et
examiner la création, auprès de BPI
France, d’un fonds d’investissement
pour les industries agroalimentaires
bio et d’un accélérateur au profit des
PME agroalimentaires biologiques
(2023, MAA, MEFR).
12.
Lancer, sous l’égide de France
Stratégie, une mission prospective
sur la contribution de l’agriculture
b i o l o g i q u e à l ’ a u t o n o m i e
agroalimentaire française et
européenne, ainsi que sur les
moyens de la renforcer
(2022, France
Stratégie, MAA, MTE, MEFR INRAE,
Agence Bio)