ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LA FORMATION
EN ALTERNANCE
Une voie en plein essor,
un financement à définir
Cahiers territoriaux
Rapport public thématique
Synthèse
Juin 2022
2
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations, des organismes et des collectivités
concernés figurent à la suite du rapport
.
3
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Sommaire
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Cahier régional Grand Est
7
2
Cahier régional Normandie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11
3
Cahier régional Nouvelle-Aquitaine
15
4
Cahier régional Provence-Alpes-Côte d’Azur
19
5
Cahier régional Pays de la Loire
23
5
Introduction
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Les juridictions financières ont conduit une enquête sur la formation des jeunes
en alternance dans le secteur privé sur la période 2016-2021, à la fois au niveau
national et dans cinq régions (Grand Est, Normandie, Nouvelle-Aquitaine, Pays
de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur) . Les pratiques observées dans ces
cinq régions, qui ont contribué à l’élaboration des constats et recommandations
présentés au plan national, sont analysées dans des cahiers régionaux joints
au rapport .
Transfert de la collecte
des contributions des entreprises
aux Urssaf et aux caisses de MSA
Création des
opérateurs
de compétences
Création de
France compétences
Promulgation de la
loi
pour la liberté de choisir
son avenir professionnel
Obligation de certification
qualité
« Qualiopi »
pour les CFA
Instauration
d’aides
exceptionnelles
à l’embauche d’alternants
Entrée en vigueur de la
réforme du financement
de l’apprentissage
Dérégulation de la création
des CFA
Mise en place de
l’aide unique
aux employeurs apprentis
Les grandes étapes de mise en œuvre de la réforme de l’apprentissage
6
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
7
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Augmentation du nombre
d’établissements proposant
des formations en apprentissage
entre 2018 et 2020 :
soit
57
établissements
supplémentaires
103 en 2018
160 en 2020
+ 55 %
Attention, il convient de bien distinguer les entrées en contrat (données sur le flux) et les effectifs (données sur le stock).
Évolution
2016-2020
Apprentissage
+ 53 %
Contrat de pro – de 30 ans
- 53 %
Entrées de jeunes en alternance
+ 22 %
3
9
0
9
6
4
3
9
2
6
4
8
3
0
2
5
6
1
1
3
5
8
7
8
1
0
2
6
7
Nombre d’entrées
en 2016
Nombre d’entrées
en 2020
apprentis dans le total
des jeunes âgés de 16 à 29 ans
en 2020 (Depp)
apprentis en
postbac en 2020
(Depp, Sifa, 2020)
apprentis occupant un emploi
six mois après la fin de leur contrat
en 2018 et 2019 (InserJeunes)
1
Cahier régional
Grand Est
8
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une région d’ancrage de l’alternance,
où le nombre d’apprentis croît
désormais moins rapidement que
dans les autres régions
Au 31 décembre 2020, la région
Grand Est comptait 48 112 apprentis
dans les centres de formation
des apprentis (CFA), ce qui la situe
au cinquième rang national . La
situation de l’apprentissage demeure
encore marquée par des facteurs
historiques : un développement
important en Alsace et un certain
retard dans l’ancienne région
Champagne-Ardenne . Si, entre 2016
et 2020, sous l’effet de la réforme de
l’apprentissage résultant de la loi du
5 septembre 2018
pour la liberté de
choisir son avenir professionnel
et de
l’aide exceptionnelle aux employeurs
d’apprentis mise en place par le
Gouvernement à l’été 2020, le nombre
d’apprentis a progressé de 29 %,
c’est presque deux fois moins que la
moyenne nationale (+ 53 %) . Pionnière
dans certains domaines comme
l’apprentissage transfrontalier, la
région Grand Est n’a pas autant profité
de la réforme de 2018 que la plupart
des autres régions .
Parallèlement, le nombre
d’entrées de jeunes en contrat
de professionnalisation a baissé en
2019 et fortement chuté en 2020 .
Cette tendance concerne tous les
départements et tous les secteurs,
ce qui évoque un effet de déport des
contrats de professionnalisation vers
l’apprentissage . Globalement, les
entrées de jeunes en alternance sont
passées de 35 878 en 2016 à 43 926 en
2020, soit une hausse de 22 % .
Une bonne collaboration entre les
acteurs, une santé financière des
établissements préservée, mais
une préoccupation à propos du
financement des investissements
Historiquement très impliqué dans
la politique de l’apprentissage, en
particulier en Alsace, le conseil régional
a vu ses compétences réduites du fait
de la mise en œuvre de la réforme de
2018 . Il ne participe désormais à la
définition d’orientations stratégiques
qu’au travers des contrats d’objectifs
territoriaux (COT), signés avec les
représentants de l’État, l’Onisep, les
organisations professionnelles et les
opérateurs de compétences, afin de
définir des objectifs communs en
matière d’orientation, d’emploi et de
formation .
La direction régionale de l’économie,
de l’emploi, du travail et des
solidarités (Dreets)
1
exerce un rôle
de veille juridique, d’animation et
d’accompagnement des acteurs avec
des moyens humains beaucoup plus
limités que ceux dont disposaient le
conseil régional, avant la réforme .
Le rectorat de la région académique
Grand Est encourage le dévelop-
pement de l’apprentissage dans
les lycées professionnels selon des
modalités propres à chaque académie,
celles-ci s’appuyant inégalement sur
Cahier régional Grand Est
1 . Les directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) et les
directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) sont des services
déconcentrés de l’État, dont les missions relèvent à titre principal du ministère chargé du travail .
9
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Cahier régional Grand Est
le développement de classes mixtes
2
(34 % des apprentis concernés dans
l’académie de Reims contre 2 % dans
celle de Strasbourg) . La mise en place
de la mission de contrôle pédagogique
des formations par apprentissage
est toutefois assez laborieuse, ce
qui pose la question du contrôle
pédagogique des formations ouvertes
par les organismes de formation qui
se sont récemment engagés dans
l’apprentissage .
Les 11 opérateurs de compétences
(Opco) qui assurent le financement
des CFA ont dû s’organiser en très
peu de temps au plan régional afin
de répondre aux demandes des
centres . La reprise du financement des
contrats d’apprentissage conclus avant
le 1
er
janvier 2020, date de mise en
œuvre du volet financier de la réforme,
a été lente et l’enregistrement des
contrats conclus en 2020 a connu des
retards importants . Les procédures et
outils spécifiques à chaque opérateur
de compétences (Opco) ont soulevé
des difficultés administratives pour
les CFA, en particulier pour les CFA
interprofessionnels en lien avec
plusieurs Opco .
En 2018, la ressource par apprenti
en Grand Est était plus faible que
la moyenne nationale s’agissant
du financement des CFA, mais plus
élevée pour les aides au transport,
à l’hébergement et à la restauration
des apprentis . Le montant des
dépenses exposées par la région
était nettement inférieur à celui des
ressources qu’elle percevait au titre
de l’apprentissage . Toutefois, les
modalités de financement des CFA par
la région permettaient de s’adapter
aux situations particulières des
centres, notamment à la diversité de
leurs modèles économiques .
En 2020, la situation financière des
CFA ne semble pas s’être dégradée .
L’appel à projets organisé par le conseil
régional pour répartir l’enveloppe
dont il dispose pour majorer le
financement des dépenses de
fonctionnement des CFA n’a d’ailleurs
pas atteint le montant alloué . Le bon
remplissage des formations devient
toutefois un élément critique pour
l’équilibre financier des CFA, dans la
mesure où l’essentiel du financement
des établissements est désormais
fonction du nombre de contrats
d’apprentissage .
Le financement de l’investissement
est aujourd’hui une préoccupation
majeure des CFA, notamment en ce
qui concerne l’immobilier . En outre,
la prise en charge des équipements
pédagogiques, qui fait appel au
cofinancement de plusieurs acteurs
selon des calendriers et des modalités
différents, risque de rendre complexe
le montage des projets et la prise de
décision .
La nécessité de maintenir une
concertation régionale pour soutenir
les formations conduisant aux
métiers en tension
Avec la réforme de 2018 qui a
libéralisé l’ouverture de CFA et de
classes en apprentissage, le nombre
d’établissements proposant des
2 . Accueillant à la fois des élèves sous statut scolaire et des apprentis .
10
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
formations en apprentissage est passé
de 103 en 2018 à 160 en 2020 . Tous
les territoires ont contribué à cette
dynamique nourrie par des acteurs
privés (73 nouveaux établissements
comptant 5 107 apprentis) . Près de
trois CFA sur quatre sont désormais
de statut privé et accueillent près d’un
apprenti sur deux (49 %) .
L’analyse des formations en
apprentissage révèle toutefois
une orientation marquée vers
l’enseignement supérieur et les
grands centres urbains . Entre 2016
et 2020, la hausse du nombre
d’apprentis au niveau du CAP (+ 8 %)
et du baccalauréat (+ 14 %) a été très
inférieure à la dynamique enregistrée
aux niveaux du BTS (+ 46 %), de
la licence (+ 118 %) et du master
(+ 59 %) . Loin des 29 % d’apprentis
supplémentaires constatés entre la
rentrée 2019 et celle de 2020, les sept
CFA de l’artisanat et les cinq CFA du
BTP ont enregistré une évolution de
leurs effectifs limitée à 3,4 % et les
trois CFA de l’industrie connaissent
une stagnation de leurs effectifs . Les
créations de nouvelles formations ne
se font ainsi ni aux niveaux où la voie
de l’alternance est la plus déterminante
pour l’accès à un emploi stable, ni dans
les secteurs en tension qui rencontrent
des difficultés à recruter .
Il apparaît ainsi nécessaire d’organiser
une concertation entre les acteurs
pour soutenir les formations qui
correspondent à des besoins de main-
d’œuvre des entreprises, mais sont
peu attractives pour les jeunes ou
nécessitent des plateaux techniques
importants coûteux . Le comité
régional de l’emploi, de la formation
et de l’orientation professionnelles
(Crefop), qui regroupe les principaux
acteurs, pourrait être le lieu de cette
discussion, sur laquelle le conseil
régional pourrait s’appuyer pour
compléter les fonds versés par les
opérateurs de compétences aux CFA .
Des progrès à réaliser dans
l’accompagnement des jeunes et
dans la prévention des ruptures de
contrat
La collectivité régionale a mis en place,
avec les partenaires du service public
régional de l’orientation, des actions de
promotion de l’apprentissage et l’accès
à l’information pour les collégiens et
les lycéens semble aisé, même si les
statistiques de fréquentation du site
apprentissage-grandest.fr
révèlent des
marges de progression . Néanmoins,
les établissements scolaires ne
promeuvent pas suffisamment
l’apprentissage qui reste encore à
leurs yeux réservé aux élèves en
difficulté . La désignation d’enseignants
expérimentés comme référents
apprentissage dans certains lycées
constitue une bonne pratique pour
améliorer la connaissance de cette
filière par le corps enseignant .
Les CFA ne bénéficient plus de
ressources régionales allouées
spécifiquement à l’accompagnement
des apprentis . Cette priorité doit
cependant être maintenue, y compris
sur leurs ressources propres, dès lors
que le taux de rupture des contrats
d’apprentissage reste élevé (33 %), en
particulier au niveau du CAP (40 %) .
La médiation assurée par les chambres
consulaires pour y pallier demeure
faible . La crise sanitaire a pu accentuer
Cahier régional Grand Est
11
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
cet enjeu, les confinements malgré les
efforts des établissements ayant eu un
impact sur la santé physique et morale
des apprentis .
Les aides allouées pour la restauration,
l’hébergement et le premier
équipement des apprentis semblent
nettement plus élevées que celles qui
prévalaient avant la réforme, pourtant
déjà favorables dans la région . Les
CFA regrettent, cependant, que les
apprentis hébergés dans des structures
partenaires ne soient pas éligibles aux
aides à l’hébergement, tandis que la
disparition des aides aux transports
antérieures n’est pas entièrement
compensée par la mise en place, au
niveau national, d’une aide au permis
de conduire ou les tarifs préférentiels
dont les jeunes peuvent bénéficier dans
les transports en commun .
Cahier régional Grand Est
12
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
13
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
2
Cahier régional
Normandie
Augmentation du nombre d’établissements proposant des formations en apprentissage
entre 2018 et avril 2021
(source : Dreets pour les CFA et Carif-Oref pour les places)
:
Attention, il convient de bien distinguer les entrées en contrat (données sur le flux) et les effectifs (données sur le stock).
Évolution
2016-2020
Apprentissage
+ 73 %
Contrat de pro – de 30 ans
- 51,6 %
Entrées de jeunes en alternance
+ 35,3 %
2
6
4
6
5
2
9
6
8
2
3
2
1
7
1
5
2
9
6
2
1
9
4
4
6
6
4
8
Nombre d’entrées
en 2016
Nombre d’entrées
en 2020
et
36 000
places en septembre 2021
68 CFA en 2018
105 CFA en 2021
+ 54 %
apprentis dans le total
des jeunes âgés de 16 à 29 ans
en 2020 (Depp)
apprentis en
postbac en 2020
(Depp, Sifa, 2020)
apprentis occupant un emploi
six mois après la fin de leur contrat
en 2018 et 2019 (InserJeunes)
14
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une réforme qui a profondément
modifié le paysage institutionnel des
acteurs chargés de l’alternance en
Normandie
La loi n° 2018-771 du 5 septembre
2018
pour la liberté de choisir son
avenir professionnel
a profondément
transformé le champ de l’alternance .
En permettant à l’ensemble des
organismes de formation de dispenser
des formations en apprentissage
et, dans une moindre mesure, en
élargissant la possibilité d’entrer en
apprentissage jusqu’à 29 ans révolus
(au lieu de 25 ans), la loi a favorisé la
hausse du nombre d’apprentis, avec
une augmentation de 44 % du nombre
de contrats signés en Normandie
entre 2016 et 2020 . Cette évolution
est pour partie due à un déport des
contrats de professionnalisation, autre
modalité de formation en alternance,
vers l’apprentissage . La baisse de plus
de la moitié du nombre de contrats
de professionnalisation signés en
Normandie entre 2016 et 2020 par des
jeunes âgés de moins de 30 ans tient
également aux effets de la pandémie
sur certains secteurs d’activité, tels que
la restauration ou le tourisme .
La loi a profondément modifié le
paysage institutionnel de l’alternance
dans des délais contraints et la réforme
a pu être vécue comme « un rouleau
compresseur » . Il lui a été souvent
reproché, au cours des 22 entretiens
qui ont été conduits par les juridictions
financières dans la région, d’avoir été
« mal préparée », de « manquer de
clarté » et de comporter des difficultés
concrètes d’application mal anticipées .
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la
réforme, le conseil régional était
compétent en matière d’apprentissage
et accompagnait de manière assez
étroite les centres de formation des
apprentis (CFA) présents sur son
territoire . Il avait mis en place en
2016 le plan normand de relance
de l’apprentissage (PNRA) et
s’était fortement mobilisé contre la
réforme de 2018, qui a constitué un
bouleversement au niveau local et dont
le déploiement a été rendu difficile
en raison de la crise sanitaire . Alors
que la région détenait la connaissance
en matière d’apprentissage, à travers
le suivi du nombre d’apprentis,
de leur insertion, de la carte de
l’apprentissage, des enveloppes
allouées aux divers organismes, elle
a vu ses compétences réduites pour
exercer désormais un nouveau rôle au
moyen de deux enveloppes financières
allouées par France compétences,
nouvel établissement public créé
au 1er janvier 2019 pour financer et
réguler la formation professionnelle
et l’alternance : l’une pour compléter
le financement des dépenses de
fonctionnement des CFA dans le
cadre de sa politique d’aménagement
du territoire et l’autre pour financer
l’investissement, notamment
immobilier, des CFA .
Les services de l’État se sont
réorganisés de manière à répondre
aux nouvelles compétences qui leur
ont été dévolues, notamment par la
mise en place de nouveaux référents
en matière d’apprentissage au sein
de leurs services . Ceux-ci ont été
mobilisés au cours de l’année 2020
et au premier semestre de l’année
2021 sur la question des « jeunes
sans contrat » : en effet, environ
1 500 jeunes normands ont été
confrontés au fait de débuter leur
Cahier régional Normandie
15
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
formation en apprentissage sans
avoir préalablement conclu de contrat
avec un employeur . La possibilité
de demeurer en formation en CFA
sans contrat a été étendue de trois
à six mois et certains CFA y ont vu,
selon les entretiens réalisés, un
« effet d’aubaine », puisqu’ils ont pu
bénéficier du financement de ces
mois de formation sans pour autant
accompagner ces jeunes dans la
recherche d’un employeur .
Des règles de financement à
harmoniser
Les mois qui ont suivi la mise en
place de la réforme ont été difficiles à
appréhender par les différents acteurs
de l’apprentissage, dans la mesure où
la fin du pilotage par la région a laissé
la place à de nouvelles compétences
partagées entre les services de l’État et
les opérateurs de compétences (Opco),
encore en cours de réorganisation, à
l’échelon national comme à l’échelon
territorial . Ces derniers, qui sont
devenus les principaux financeurs
des CFA au 1
er
janvier 2020, ont
été également confrontés, tout au
long de l’année 2020, à la reprise
des contrats d’apprentissage signés
avant cette date et à leur fiabilisation
administrative et juridique .
L’apprentissage en Normandie, de
même que sur le reste du territoire
national, concerne notamment les
petites entreprises, voire les très
petites entreprises artisanales, qui
ne sont parfois pas dotées de
ressources suffisantes pour répondre
à toutes les exigences administratives
liées à la transmission du contrat
d’apprentissage à l’opérateur de
compétences dont elles dépendent .
Par ailleurs, la question de
l’harmonisation des règles de
financement par les Opco, de la
transmission des données relatives
aux apprentis et de leurs contrats
(notamment lorsqu’il s’agit de
jeunes en transition entre différentes
branches professionnelles ou en
rupture de contrat) constitue
aujourd’hui encore une préoccupation
assez largement partagée .
Une adéquation à trouver entre
offre et demande de formation en
apprentissage pour répondre aux
métiers en tension
La loi a également transformé les
modèles économiques des CFA,
l’essentiel du financement des
dépenses de fonctionnement des CFA
relevant désormais d’une subvention
au contrat versée par les opérateurs
de compétences . La détermination
des niveaux de prise en charge des
contrats et la viabilité financière des
établissements de formation, qu’il
s’agisse de CFA dits « historiques »
ou de nouveaux créés depuis le
1
er
janvier 2019, sont des sujets de
préoccupation pour les organismes de
formation, qui, pour assurer un meilleur
équilibre financier de leur activité,
pourraient être tentés de privilégier
les formations ne nécessitant pas de
plateaux techniques coûteux .
En libéralisant le marché, la loi a permis
de presque doubler le nombre de CFA
sur le territoire normand au cours des
deux dernières années . Cet essor n’a
toutefois pas permis de résoudre les
difficultés de recrutements dans les
métiers en tension et la question de
l’adéquation entre offre et demande de
formation en apprentissage demeure .
Cahier régional Normandie
16
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Cette dernière est complexe : elle tient
autant aux projets des apprenants
qu’à la coordination et à l’accessibilité
de l’offre et requiert une bonne
coopération entre de nombreux
acteurs . La mise en place d’un portail
de l’apprentissage au niveau régional
constituerait une première réponse à
cette problématique et permettrait de
faire se rencontrer offre et demande
de contrats .
Une coordination et une
collaboration des acteurs normands
de l’apprentissage à renforcer
La détermination de lieux de
concertation, de partage et d’arbitrage
en matière d’alternance reste à
faire . Une « cellule apprentissage »,
animée par la Dreets et à laquelle est
associé le Carif-Oref de Normandie,
constitue, depuis la mise en place
de la réforme, le lieu d’échanges
techniques autour de l’apprentissage .
Toutefois, il est possible de s’interroger
sur une concurrence qui pourrait
s’opérer avec la sous-commission
« apprentissage » du comité régional
de l’emploi, de la formation et de
l’orientation professionnelles (Crefop),
instance quadripartite regroupant
les partenaires sociaux, l’État et la
région . Les partenaires sociaux ont
exprimé leur regret, dans un courrier
commun adressé en 2020 au
président du conseil régional et au
préfet, du manque d’anticipation et de
concertation sur les questions en lien
avec la formation et l’emploi au sein
des instances du Crefop .
Par ailleurs, les services de la Dreets,
qui sont chargés de l’enregistrement
des CFA, constituent aujourd’hui le
centre de ressources en matière de suivi
de la création des organismes sur les
territoires . Toutefois, leur connaissance
reste parcellaire dans la mesure où
leurs outils ne leur permettent pas
de suivre les contrats en cours, mais
seulement les nouveaux contrats signés
au cours de l’année . Les services de la
Dreets sont également en lien avec
la mission de contrôle pédagogique
de l’apprentissage (MCPA), qui a été
placée sous l’autorité de la rectrice
de l’académie de Normandie, pour
le suivi des contenus pédagogiques
des formations dispensées . Cette
mission légère, qui assure un rôle de
coordination des acteurs chargés
de contrôler des formations en
apprentissage, commence à être
reconnue des acteurs de l’alternance .
Des progrès à réaliser pour favoriser
l’accessibilité des publics les plus
éloignés
L’image de l’apprentissage auprès
des jeunes et de leur famille est en
train de changer ; les universités
développent davantage de formations
en alternance, l’apprentissage
est considéré comme un vecteur
d’insertion durable dans l’emploi et
la communication institutionnelle,
notamment celle de la région à travers
son agence régionale de l’orientation,
présente l’apprentissage comme une
« voie d’excellence » .
Restent toutefois à ce jour en suspens
plusieurs difficultés non résolues, telles
que la valorisation et la formation
des tuteurs en entreprise ou l’accès à
l’alternance des jeunes plus fragiles ou
précaires, qu’il s’agisse des personnes
en situation de handicap ou des jeunes
éloignés durablement des formations
et du marché de l’emploi .
Cahier régional Normandie
17
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
3
Cahier régional
Nouvelle-Aquitaine
Attention, il convient de bien distinguer les entrées en contrat (données sur le flux) et les effectifs (données sur le stock).
Évolution
2016-2020
Apprentissage
+ 77 %
Contrat de pro – de 30 ans
- 49 %
Entrées de jeunes en alternance
+ 38 %
4
4
7
7
6
5
0
5
3
6
5
7
6
0
2
5
3
4
9
3
6
7
2
8
1
1
3
7
9
Nombre d’entrées
en 2016
Nombre d’entrées
en 2020
apprentis dans le total
des jeunes âgés de 16 à 29 ans
en 2020 (Depp)
parmi les entrées /
44,2 %
sur le stock
(Depp, Sifa, 2020)
apprentis en postbac en 2020
apprentis occupant un emploi
six mois après la fin de leur contrat
en 2018 et 2019 (InserJeunes)
Augmentation du nombre
d’établissements proposant
des formations en apprentissage
entre 2018 et 2020
(source Carif-Oref et Dreets) :
102 CFA
et 458 sites
en 2018
230 CFA
et 1 113 sites
en 2020
+ 125 %
+ 143 %
18
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une région polarisée entre le littoral
et les terres
La région Nouvelle-Aquitaine se
caractérise par une polarisation
marquée entre les départements
littoraux, offrant de nombreuses
opportunités pour les jeunes, et les
départements des terres, vieillissants,
où le dynamisme économique et le
niveau de service public sont plus
faibles . De manière générale, le secteur
industriel est en perte de vitesse, avec
une diminution du volume net des
emplois, tandis que celui des services
connaît un important besoin de main-
d’œuvre . Les jeunes néo-aquitains sont
par conséquent davantage présents
sur le littoral, où les pôles que sont
Bordeaux, La Rochelle et Bayonne
offrent davantage de possibilités de
formation et d’emploi . En Nouvelle-
Aquitaine comme dans le reste du
territoire, le taux de chômage est plus
important chez les jeunes que pour les
autres tranches d’âge . 13 % des jeunes
âgés de 15 à 24 ans sont sans aucune
qualification et 30 % ont un diplôme
de niveau infrabac .
Sur la période étudiée (2016 à
2021), les entrées en alternance sont
en hausse (+ 38 %), en particulier
depuis la réforme résultant de la loi
du 5 septembre 2018
pour la liberté
de choisir son avenir professionnel
et
l’instauration d’aides exceptionnelles
à l’embauche : + 77 % pour les entrées
en apprentissage (et – 49 % pour celles
en en contrat de professionnalisation
entre 2016 et 2020) . Le taux
d’insertion dans l’emploi à sept mois
des apprentis a gagné dix points entre
2016 et 2019 . Cette année-là, les deux
tiers des alternants occupaient un
emploi six mois après la fin de leur
contrat, avec de meilleurs résultats
dans le nord de la région .
Cet essor quantitatif a été permis
par un développement de l’offre de
formation depuis la réforme, avec
environ 100 nouveaux organismes
de formation (et un nombre de sites
de formation offrant des places en
apprentissage en hausse de 143 %),
essentiellement implantés dans
des zones urbaines attractives (en
Gironde, en Charente-Maritime et
dans les Pyrénées-Atlantiques),
sur des formations de niveaux
supérieurs, dans le secteur tertiaire,
à faible coût en plateaux techniques,
formations qui sont par ailleurs les
plus demandées par les jeunes . La
demande est également forte en
matière de soins esthétiques et de
mécanique automobile . À rebours, les
domaines de la production alimentaire
(sauf la boulangerie-pâtisserie), de la
restauration et du bâtiment peinent à
recruter des apprentis .
La fin de la subvention d’équilibre
régionale fait peser une menace sur le
maintien des formations dont le coût
des plateaux techniques est élevé et
qui sont situées dans les départements
peu attractifs, où la démographie des
jeunes est peu favorable . Leur maintien
repose aujourd’hui sur l’organisation
en réseau de CFA historiques qui
équilibrent leurs coûts par les gains
réalisés dans les zones urbaines sur les
formations rentables .
Cahier régional Nouvelle-Aquitaine
19
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Une réforme de l’alternance aux
effets multiples
La réforme a entraîné un reposition-
nement des différents acteurs . Si la
région a vu ses moyens divisés par dix
pour financer le fonctionnement de
CFA, elle reste présente en soutien à
l’investissement de ceux-ci dans une
logique d’équilibre territorial . Les
grands réseaux de formation des
chambres consulaires et de l’éducation
nationale se sont réorganisés dans une
logique d’optimisation des moyens
pour assurer un équilibre financier
entre des formations qui dégagent
des marges et celles qui sont sous-
financées . En revanche, les CFA
autonomes ne disposent pas d’une telle
faculté et font face à un avenir incertain .
Il leur est également plus difficile de
financer leurs investissements que les
établissements relevant des ministères
chargés de l’éducation nationale et de
l’agriculture, dont les investissements
restent assurés par la région dans la
mesure où ils accueillent également des
élèves sous statut scolaire .
Outre cette problématique de
l’investissement, l’ensemble des
acteurs rencontrés dans le cadre
de l’enquête met en avant deux
difficultés dans la mise en œuvre de
la réforme : d’une part, celle pour les
opérateurs de compétences (Opco)
et les CFA de s’approprier le nouveau
système de facturation que tente de
résoudre la direction régionale de
l’économie, de l’emploi, du travail et
des solidarités (Dreets) et, d’autre
part, l’absence d’un dispositif de
suivi institutionnalisé et centralisé de
l’alternance en région .
Concernant le parcours du jeune, une
défaillance importante a été constatée
en matière d’orientation . En effet, le
fonctionnement du service public
d’orientation ne permet pas de garantir
un niveau d’information standardisé
et exhaustif sur l’apprentissage auprès
de l’ensemble des jeunes de la région .
Pour l’essentiel, le choix de l’orientation
repose sur le bouche-à-oreille .
Cette hétérogénéité est également
constatée dans les dispositifs d’aides
aux alternants (en matière de
mobilité et d’hébergement), ce qui
implique des conditions de formation
différentes entre jeunes selon l’Opco
de rattachement de l’entreprise qui
accueille l’apprenti et le CFA choisi .
Cahier régional Nouvelle-Aquitaine
20
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
21
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
4
Cahier régional
Provence-Alpes-Côte d’Azur
Attention, il convient de bien distinguer les entrées en contrat (données sur le flux) et les effectifs (données sur le stock).
Évolution
2016-2020
Apprentissage
+ 91,5 %
Contrat de pro – de 30 ans
- 57,8 %
Entrées de jeunes en alternance
+ 36,1 %
3
9
0
6
1
4
4
1
3
6
5
0
7
5
2
0
3
9
7
3
2
4
2
4
1
2
0
2
7
Nombre d’entrées
en 2016
Nombre d’entrées
en 2020
apprentis dans le total
des jeunes âgés de 16 à 29 ans
en 2020 (Depp)
apprentis en postbac
au 31/12/2020
(Depp, Sifa, 2020)
apprentis occupant un emploi
six mois après la fin de leur contrat
en 2018 et 2019 (InserJeunes)
Augmentation du nombre
d’établissements proposant
des formations en apprentissage
(source : Dreets)
58 CFA
en 2019
205 CFA
en juin 2021
22
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Un essor majeur des effectifs et de
l’offre de formation en 2020
Avec le troisième taux de chômage le
plus élevé des jeunes âgés de 15 ans
à 24 ans en métropole, la région
Provence-Alpes-Côte d’Azur est face
à un défi significatif en matière de
formation et d’emploi des jeunes .
Alors que la région avait une tradition
d’apprentissage correspondant à la
place de l’artisanat dans son tissu
économique, les effectifs en alternance
se sont effondrés après la crise
économique de 2008, à l’instar du reste
de la France . La région a conservé des
effectifs bas jusqu’en 2018, avant un
rattrapage très significatif dans les
dernières années, et particulièrement
en 2020, gagnant 37 % en un an pour
atteindre plus de 42 000 apprentis .
Toutefois, en tenant compte du déport
de contrats de professionnalisation
vers l’apprentissage, la hausse
du nombre total d’entrées en
alternance s’établit à 20 % en 2020 .
Cette croissance s’explique par une
diversité de facteurs : accès aux aides
exceptionnelles mises en place par
l’État à l’été 2020, développement
de l’offre de formation, confinement
de la fin 2020 moins contraignants,
meilleure image de l’apprentissage .
En effet, l’offre de formation en
Provence-Alpes-Côte d’Azur a connu
un net essor . Contingentée jusqu’en
2019, dans le cadre d’une carte des
formations élaborée par la région,
elle avait gagné 10 % de places
supplémentaires entre 2016 et
2019 . Avec la pleine mise en œuvre
en 2020 de la réforme issue de la loi
du 5 septembre 2018
pour la liberté
de choisir son avenir professionnel,
le
nombre d’organismes de formation a
triplé entre 2019 et 2021 . Cette offre
nouvelle correspond à des niveaux de
qualification plus élevés qu’auparavant
et à des spécialités tertiaires ;
les caractéristiques des effectifs
d’apprentis ont évolué de manière
similaire en 2020 . Elle ne semble
pas apporter de réponse à certains
secteurs en tension qui peinent
à recruter, tout particulièrement
l’hôtellerie-restauration, l’industrie,
certains métiers artisanaux, faute
d’attractivité de ces métiers pour
les jeunes .
Des dépenses de fonctionnement des
CFA mieux prises en charge
Les ressources perçues par les
CFA (comprises entre 6 865 € et
7 451 € par apprenti entre 2016 et
2018) apparaissent plus faibles en
Provence-Alpes-Côte d’Azur qu’en
France métropolitaine . 37 à 40 % des
ressources des CFA étaient issus de la
subvention d’équilibre versée chaque
année par la région, qui conservait
pour d’autres emplois près d’un tiers
des recettes - 50 M€ - qu’elle percevait
pour exercer sa compétence dans le
domaine de l’apprentissage .
Le nouveau schéma de financement
issu de la réforme, qui consiste
principalement en un financement
au contrat par les opérateurs de
compétences (Opco), a constitué un
grand bouleversement, financièrement
favorable aux CFA en 2020 . Les
effectifs en formation ont fortement
crû cette année-là et les niveaux de
prise en charge de chaque contrat par
les Opco sont apparus comme étant
globalement satisfaisants . En outre, les
dépenses ont été amoindries par les
confinements et la région, qui perçoit
désormais une dotation peu élevée
de la part de France compétences
Cahier régional Provence-Alpes-Côte d’Azur
23
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
pour compléter le financement des
dépenses de fonctionnement des CFA,
a soutenu les formations déficitaires .
En revanche, le financement de
l’investissement des CFA, qui repose
sur une enveloppe attribuée à la
région par France compétences et par
un financement des Opco, n’apparaît
pas en mesure d’assurer l’équipement
des centres de formation régionaux . La
dotation régionale versée par France
compétences est très limitée par
rapport à celle des aux autres régions,
tandis que les Opco sont soumis à de
fortes contraintes réglementaires pour
le financement des investissements
et que l’autofinancement par les CFA
ne saurait suffire à financer les grands
projets .
La nécessité d’une animation régionale
de la politique d’apprentissage
La réforme de 2018 a également
profondément modifié les rôles
respectifs des acteurs en Provence-
Alpes-Côte d’Azur . Ne disposant plus
que de compétences résiduelles en
matière d’apprentissage, le conseil
régional a recentré ses moyens sur
l’observation et la découverte des
métiers correspondant à ses priorités
en matière de développement
économique et à sa nouvelle
compétence en matière d’orientation .
Les services de l’État, en particulier la
Dreets, ont été fortement mobilisés
par le déploiement de la réforme
et leur propre réorganisation .
Les Opco, créés au 1
er
avril 2019,
avaient inégalement digitalisé et
fait convergé leurs procédures en
direction des CFA . La sortie de la
crise sanitaire et l’achèvement de la
réforme de l’organisation territoriale
de l’État comme celle des Opco
doivent permettre aux acteurs de
l’apprentissage de redéfinir et stabiliser
leur nouveau cadre d’intervention .
Les enjeux d’attractivité et
d’adéquation de l’offre aux besoins
des jeunes, des entreprises et des
territoires impliquent un suivi de
la politique d’alternance au niveau
régional, où les acteurs impliqués sont
nombreux . Confrontée à des enjeux
d’organisation interne, la Dreets est
en mesure d’assurer une animation
performante de ce tissu d’acteurs
en s’associant plus étroitement à la
région, en lien avec les Opco . Cette
dernière dispose en effet encore d’un
savoir-faire avéré dans le champ de
l’apprentissage, mais surtout conserve
deux enveloppes de financement des
CFA (constituées des deux dotations
qui lui sont allouées par France
compétences), ainsi qu’un rôle central
en matière de cartographie des enjeux
économiques du territoire, deux
leviers essentiels pour promouvoir
une offre pertinente pour les besoins
du territoire .
Des marges de progrès significatives
dans l’accompagnement des apprentis
Il existe une multitude de points
d’orientation en Provence-Alpes-
Côte d’Azur (centres d’information
et d’orientation – CIO, Office national
d’information sur les enseignements
et les professions - Onisep, Carif-Oref),
mais leur action a été amoindrie par
le manque de lisibilité de l’offre de
formation engendrée par la réforme
de 2018 . De plus, si l’apprentissage
n’est plus considéré comme une
voie destinée aux élèves en difficulté
scolaire, des marges de progrès
existent encore au sein de l’éducation
nationale pour faciliter l’orientation
Cahier régional Provence-Alpes-Côte d’Azur
24
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
après la classe de troisième vers
cette voie de formation ; le rôle
des enseignants est à cet égard
déterminant . En outre, plusieurs
dispositifs d’accompagnement vers
l’apprentissage sont expérimentés,
sans être évalués, en Provence-Alpes-
Côte d’Azur et ne présentent pas
de résultats saillants . Pour certains
jeunes, les difficultés matérielles
demeurent prégnantes .
De ce point de vue, la réforme a
conduit à modifier la logique en
vigueur en Provence-Alpes-Côte d’Azur .
La région privilégiait le financement de
services collectifs assurés par les CFA
et concentrait les autres ressources sur
les apprentis en situation de précarité .
Les Opco attribuent désormais aux
CFA des financements pour la prise en
charge de frais annexes pour chaque
contrat éligible, mais le fonds d’aide ou
fonds social pour les apprentis dépend
désormais du CFA .
Les résultats en matière de taux de
rupture des contrats d’apprentissage
comme de taux d’insertion
professionnelle six mois après la fin du
contrat sont inférieurs à la moyenne
nationale . Les marges de manœuvre
financières nouvelles et l’aiguillon de
la certification qualité « Qualiopi »
des CFA, ainsi que la concurrence
entre centres, doivent contribuer à
soutenir une meilleure démarche
de prévention et de lutte contre les
ruptures de contrat dans l’appareil de
formation régional . Dans un contexte
de croissance de l’offre, il importe que
tous les organismes de formation, y
compris ceux qui n’appartiennent à
aucun réseau ou sont de petite taille,
s’approprient davantage encore ces
enjeux . Les médiateurs consulaires,
aujourd’hui inexistants dans le paysage
régional, pourraient y contribuer, de
même que les Opco et la mission de
contrôle pédagogique académique .
Une meilleure qualité de l’accom-
pagnement des jeunes en cours de
formation favoriserait leur insertion
professionnelle . La publicité renforcée
donnée aux indicateurs d’insertion
dans l’emploi déclinés régionalement,
établissement par établissement,
pourrait être une voie de progrès pour
améliorer l’orientation des jeunes et
stimuler les efforts des CFA . À moyen
terme, ces indicateurs doivent aussi
contribuer à un meilleur suivi de l’offre .
Cahier régional Provence-Alpes-Côte d’Azur
25
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
5
Cahier régional
Pays de la Loire
Attention, il convient de bien distinguer les entrées en contrat (données sur le flux) et les effectifs (données sur le stock).
Évolution
2016-2020
Apprentissage
+ 80,9 %
Contrat de pro – de 30 ans
- 46,4 %
Entrées de jeunes en alternance
+ 36,8 %
3
3
0
4
0
4
8
2
3
8
5
1
9
8
1
8
2
6
2
2
7
9
5
1
9
6
8
9
Nombre d’entrées
en 2016
Nombre d’entrées
en 2020
apprentis dans le total
des jeunes âgés de 16 à 29 ans
en 2020 (Depp)
apprentis occupant un emploi
six mois après la fin de leur contrat
en 2018 et 2019 (InserJeunes)
apprentis en
postbac en 2020
(Depp, Sifa, 2020)
Augmentation du nombre d’établissements proposant des formations en apprentissage
entre 2018 et 2020
(source Dreets)
:
54 CFA en 2018
145 CFA en 2020
+ 169 %
et en août 2021
214
organismes dispensant des formations
en apprentissage
(source Carif-Oref).
26
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Des effectifs en hausse et une offre
nouvelle dans une région qui avait
fait de l’apprentissage une priorité
La région Pays de la Loire est depuis
plusieurs années la première région
de France par la proportion de jeunes
âgés de 16 à 29 ans en apprentissage,
avec des résultats satisfaisants en
matière de réussite aux examens et
d’insertion professionnelle . À l’instar
du reste de la France, la réforme
issue de la loi du 5 septembre 2018
pour la liberté de choisir son
avenir professionnel
et les aides
exceptionnelles aux employeurs
d’apprentis mises en place à l’été
2020 y ont permis une croissance
des effectifs d’apprentis (+ 22,3 % de
2019 à 2020), principalement dans
l’enseignement supérieur .
Si l’on considère l’ensemble des
jeunes en contrat d’apprentissage ou
en contrat de professionnalisation,
les entrées en alternance ont crû
chaque année de 6,9 % à 9,6 % entre
2016 et 2020, en phase avec le cycle
économique . L’évolution la plus forte
a d’ailleurs eu lieu avant la réforme,
entre 2017 et 2018, à la suite du plan
de relance régional de l’apprentissage
lancé en 2016 par le conseil régional
avec le soutien des acteurs locaux . Le
plan avait accompagné la progression
des effectifs dans un cadre budgétaire
maîtrisé, sans évolution significative du
coût moyen par apprenti .
Si, aux dires des acteurs locaux, l’offre
de formation était globalement
en adéquation avec les besoins de
la région avant la réforme, cette
dernière a permis l’émergence
rapide d’une offre nouvelle . Début
avril 2021, on dénombrait 145 centres
de formation d’apprentis (CFA),
dont 69 nouveaux, des prestataires
privés majoritairement situés en
Loire-Atlantique . Ces centres offrent
particulièrement des formations en
apprentissage de niveau postbac
et dans le secteur tertiaire, dans le
domaine du commerce et de la
vente ainsi que dans les fonctions
« support » des entreprises . Les
contrats de professionnalisation, au
niveau régional, s’inscrivent aussi pour
près des deux tiers dans ce type de
formation . C’est en effet le domaine
le plus rentable, avec des coûts
facilement maîtrisables, ne nécessitant
pas de plateaux techniques, si bien que
ces formations se prêtent aisément
au nouveau système de financement
au contrat qui valorise la croissance
des effectifs, dans un contexte de
moindres ressources d’investissement .
Si la libéralisation de l’offre n’a pas
engendré à ce jour de véritables
doublons de formations, les nouvelles
modalités de financement pourraient
conduire à des distorsions de l’offre,
qui ne correspondraient plus aux
besoins des employeurs, en remettant
en cause les formations de proximité
aux effectifs faibles à moyens, qu’elles
soient dispensées en territoire rural ou
qu’elles concernent certains métiers
de l’artisanat en tension mais peu
attractifs . Seule une concertation
renforcée peut y remédier .
Une refonte complète des missions
des acteurs de l’apprentissage, des
habitudes de coopération historiques
qui perdurent
Dans ce nouvel environnement
concurrentiel et malgré la profonde
évolution de leurs compétences, la
réforme n’a pas mis fin à la pratique
de collaboration des acteurs locaux
Cahier régional Pays de la Loire
27
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
de l’alternance : groupe de travail sur
l’apprentissage, animé par la Dreets,
contrats d’objectifs territoriaux
sectoriels conclus par la région Pays
de la Loire avec l’État, des branches
professionnelles et les opérateurs de
compétences (Opco) . Depuis 2020, le
conseil régional intervient dans une
logique d’aménagement du territoire
et de soutien au tissu économique
artisanal, avec l’aide de France
compétences et de certains réseaux de
CFA (éducation nationale, chambres
consulaires) . Ces interventions
permettent aussi de disposer
d’un amortisseur – certes limité –
permettant de sécuriser les CFA en cas
d’évolution de la conjoncture .
La réforme de 2018 a consacré les
opérateurs de compétences (Opco)
comme les acteurs pivots du
financement de l’apprentissage, sans
en faire cependant les pilotes de cette
politique . Les CFA tirent l’essentiel de
leurs ressources de fonctionnement du
financement au contrat par les Opco,
ce qui a permis aux établissements,
grâce à la croissance concomitante des
effectifs en formation, de présenter un
résultat favorable en 2020 . Après une
perturbation de la gestion financière
durant la période de transition qui
a suivi l’entrée en vigueur de la
réforme, l’ensemble des acteurs est
prudemment optimiste pour l’avenir,
sous réserve que les Opco poursuivent
leur effort de simplification,
d’harmonisation et de digitalisation de
leurs procédures .
Le nouveau dispositif de financement
au contrat pourrait cependant
nécessiter des correctifs : la
proratisation du montant au temps de
la formation (plutôt que du contrat)
et le suivi des certifications financées
« en amorçage » pour passer plus
rapidement aux niveaux de prise en
charge normalisés . La logique de
rentabilité à la formation introduite
par la réforme ne doit pas dispenser
les CFA d’une réflexion à l’échelle de
l’établissement, notamment pour
financer sur fonds propres de nouvelles
formations en lien avec les métiers
émergents . Le schéma de financement
de l’investissement dans les CFA
doit également être clarifié . En effet,
aujourd’hui, les Opco ne finançant que
des équipements pédagogiques et
la région disposant d’une enveloppe
légale largement gagée par les projets
en cours, les CFA comptent financer
leurs investissements au travers de
leur résultat, qui dépend désormais
des financements au contrat versés par
les Opco au titre du fonctionnement
des CFA .
La qualité des formations et de
l’accompagnement, un défi persistant
Du point de vue des jeunes, la réforme
n’a pas modifié en profondeur la
situation au sein des CFA . Depuis
plusieurs années, ceux-ci avaient
renforcé leurs actions en matière
d’accompagnement individualisé,
tandis que les taux nets de rupture
des contrats d’apprentissage
baissaient . Si la région présente le taux
d’interruption de contrat le plus faible
de France, l’enjeu demeure significatif .
En matière d’orientation, la région a
pris en main sa nouvelle compétence
dans une logique de concertation,
avec les limites inhérentes au contexte
sanitaire, tandis que des résistances à
l’encontre de l’apprentissage de la part
de certains établissements scolaires
restent à vaincre . Il convient également
de renforcer l’efficacité des actions
Cahier régional Pays de la Loire
28
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
de diversification du public apprenti,
y compris des prépa-apprentissage .
Les apprentis bénéficient d’aides
individuelles et collectives
intermédiées par le CFA dans les
mêmes domaines que précédemment .
En effet, la région continue à financer
le fonds social de certains CFA
ainsi que des aides à la mobilité, en
complément des obligations des
Opco en matière de financement
des frais annexes aux contrats
(hébergement, restauration) et des
frais d’équipement .
S’agissant de la qualité des formations,
celle-ci était garantie précédemment
par la bonne coopération entre le
service académique de l’inspection
de l’apprentissage (Saia) et le conseil
régional . Ce dernier incitait aussi les
CFA à obtenir des certifications qualité
et à développer certains services
minimaux, dans le cadre du dialogue
de gestion, à la lumière des résultats
obtenus . Désormais, à l’instar du
champ de la formation professionnelle
continue, la qualité des formations
doit résulter de la mise en concurrence
entre les centres - les familles et les
jeunes disposant des indicateurs de
résultats, notamment en matière
d’insertion professionnelle -,
de l’obligation de certification
« Qualiopi » et du maintien d’une
mission de contrôle spécifique à
l’apprentissage au sein du rectorat, aux
moyens cependant très limités .
Cahier régional Pays de la Loire