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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le 23 juin 2022
Rapport public thématique
LA FORMATION EN ALTERNANCE
La formation en alternance constitue une mesure phare de lutte contre le chômage des
jeunes, en améliorant l’insertion professionnelle des moins qualifiés d’entre eux. La
dernière réforme de l’alternance, résultant de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de
choisir son avenir professionnel, en a profondément modifié le pilotage et le financement.
À l’été 2020, le Gouvernement a en outre mis en place dans le cadre de la crise sanitaire une
aide exceptionnelle aux employeurs d’alternants, d’un coût total de 4,4 Md€ en 2021, pour
soutenir ces dispositifs de formation. Dans le rapport publié ce jour, complété par cinq
cahiers régionaux, les juridictions financières soulignent que, malgré les quelque
800 000 jeunes entrés en alternance en 2021 et le doublement du coût de ce dispositif, le
développement de l’alternance n’apporte pas suffisamment de réponses aux jeunes en
situation de fragilité, ni aux entreprises rencontrant des difficultés de recrutement et aux
besoins spécifiques des territoires. Parallèlement à ces travaux, la Cour des comptes publie
un référé, complété par des observations définitives, portant sur la situation financière
préoccupante de France compétences, établissement public créé en 2019 pour financer les
dispositifs d’alternance et de formation professionnelle.
Une hausse des effectifs en alternance principalement portée par les entrées en
apprentissage dans les niveaux supérieurs et dans les formations tertiaires
Entre 2016 et 2021, le nombre d’entrées de jeunes en alternance est passé de 438 000 à près
de 800 000, soit une hausse de 82 %, largement imputable aux années 2019 à 2021. Alors que
les entrées en contrat de professionnalisation se sont effondrées, le nombre d’entrées en
apprentissage a augmenté, malgré la crise sanitaire, de 42 % en 2020 et de 39 % en 2021. Cette
croissance inédite repose, d’une part, sur la mise en œuvre de la réforme intervenue fin 2018,
qui a facilité la création de formations en apprentissage, et, d’autre part, sur les aides
exceptionnelles versées aux employeurs dès la rentrée 2020. Cette hausse des effectifs s’est
accompagnée d’une évolution du profil des apprentis : en 2020, les apprentis préparant un
diplôme supérieur sont devenus majoritaires (51 %), quand la part des apprentis préparant un
diplôme d’un niveau inférieur ou équivalent au baccalauréat professionnel s’élevait à 63 % en
2016. En parallèle, les effectifs se concentrent sur le secteur tertiaire plutôt que sur les secteurs
traditionnellement concernés, comme l’industrie, la construction ou l’agriculture. Cette
recomposition ne correspond plus aux objectifs historiquement associés au soutien à
l’apprentissage, qui visait depuis près de 20 ans à améliorer l’insertion professionnelle des
jeunes titulaires des plus bas niveaux de qualification, qui sont ceux qui rencontrent le plus de
difficulté à s’insérer sur le marché du travail.
Un déséquilibre financier qui appelle à définir une stratégie nationale pour l’alternance
associée à une stratégie de financement adaptée
En 2021, les dépenses d’apprentissage pourraient atteindre plus de 11 Md€ sous l’effet de
l’augmentation du coût des aides (5,7 Md€) et des contrats d’apprentissage (5,3 Md€).
La réforme du financement des centres de formation en alternance (CFA) qui s’est mise en
place au 1
er
janvier 2020 repose sur un financement au contrat, et non plus sur des subventions
régionales complétant les versements des entreprises. Or, les juridictions financières
constatent que le changement de mode de financement a fait augmenter le coût par apprenti
et produit des écarts injustifiés de financements entre formations de même niveau et de même
domaine. L’augmentation du coût moyen par apprenti conjugué à la forte hausse des entrées
en apprentissage entre 2019 et 2021 et, dans une moindre mesure, le dynamisme du compte
personnel de formation sont à l’origine d’un déficit très important de l’opérateur chargé de son
financement de la formation professionnelle - France compétences - en 2020 (4,6 Md€) et
en 2021 (3,2 Md€ provisoires). Malgré 2,75 Md€ de subventions exceptionnelles versées par
l’État en complément des 7,6 Md€ de recettes issues des contributions des entreprises,
l’établissement a dû négocier des lignes de trésorerie à hauteur de 1,7 Md€. Pour 2022, le
déficit prévisionnel est estimé à 5,9 Md€. Dans les conditions actuelles, le nouveau système
issu de la réforme n’est pas en mesure de financer le développement de l’apprentissage et
place France compétences dans une situation préoccupante en 2022 et au-delà. Les juridictions
financières appellent à définir une stratégie nationale pour l’alternance qui identifie les
priorités et les modalités de financement correspondantes.
Des limites d’accès persistantes et de nouveaux risques concernant l’adéquation de l’offre
de formation aux besoins des entreprises et des territoires
Le nombre d’apprentis préparant des diplômes de l’enseignement secondaire, pour lesquels
l’apprentissage favorise le mieux l’insertion professionnelle, avait nettement baissé de 2000 à
2017 et a peu augmenté depuis, malgré l’essor récent de l’apprentissage. Il est nécessaire de
mieux adapter les actions de promotion et de soutien à l’apprentissage aux âges des
populations concernées. Dans cet objectif, il conviendrait de renforcer les relations entre les
établissements scolaires et les CFA, notamment dans les quartiers prioritaires de la ville. Par
ailleurs, la réforme a entraîné la création de très nombreux CFA plus particulièrement
positionnés dans des formations tertiaires et supérieures au niveau bac+2. Or, il existe un risque
que la réforme fragilise les formations peu attractives, pourtant nécessaires aux filières
économiques, et entraîne une évolution de l’offre uniquement tirée par la demande des jeunes
et la rentabilité des CFA. La Cour recommande ainsi de mettre en place une concertation entre
les principaux acteurs régionaux.
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