Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 16 décembre 2021.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
ET SES RÉPONSES
COMMUNE DE CARROS
(Département des Alpes-Maritimes)
Exercices 2014 et suivants
COMMUNE DE CARROS
3
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
5
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
6
INTRODUCTION
......................................................................................................................
7
1
LA QUALITÉ DE L’INFORMATION COMPTABLE ET FINANCIÈRE DOIT
ÊTRE AMÉLIORÉE
.............................................................................................................
8
1.1
Une information financière perfectible
...........................................................................
8
1.2
La qualité de l’information comptable peut être améliorée
............................................
8
1.3
La commune ne se conforme pas à ses obligations en matière de provision
..................
9
2
UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI APPELLE À LA VIGILANCE
.........................
10
2.1
La section de fonctionnement et l’autofinancement
.....................................................
10
2.1.1 Une progression des produits de fonctionnement portée par la hausse des
ressources fiscales
...........................................................................................................
11
2.1.2 Les charges de fonctionnement évoluent peu mais se situent à un niveau élevé
............
12
2.1.3 Une capacité d’autofinancement insuffisante
.................................................................
16
2.2
Un niveau trop élevé d’investissements compte tenu de l’insuffisance de la
capacité d’autofinancement
..........................................................................................
17
2.3
Un niveau de dette élevée
.............................................................................................
19
3
LE CENTRE DE FORMATION DES APPRENTIS
..........................................................
22
3.1
La situation financière du budget annexe du centre de formation des apprentis
..........
23
3.1.1 Un financement principalement assuré par la région
......................................................
23
3.1.2 Les charges de personnel importantes
............................................................................
24
3.2
Les opérations de transfert à la métropole Nice Cote d’Azur en 2017
.........................
25
3.2.1 La métropole NCA est devenue l’autorité gestionnaire du CFA à compter du 1
er
janvier 2017 mais la commune a géré le personnel après cette date
...............................
25
3.2.2 Des charges continuent de peser sur la commune au titre du CFA
................................
25
4
LES RESSOURCES HUMAINES
......................................................................................
27
4.1
Une absence de pilotage et de fiabilité des données en matière de ressources
humaines
.......................................................................................................................
28
4.1.1 Les données relatives aux ressources humaines ne sont pas fiables
...............................
28
4.1.2 Les règles applicables au personnel sont consignées dans de trop nombreux
documents
.......................................................................................................................
28
4.1.3 Le pilotage était, jusqu’à une période récente, inexistant
...............................................
29
4.2
Des recrutements discutables
........................................................................................
29
4.2.1 Des cas de recrutement contestables
...............................................................................
29
4.2.2 Des recrutements qui auraient pu être évités par une meilleure mutualisation avec
la métropole
....................................................................................................................
30
4.3
La rémunération des agents comporte une part indemnitaire importante
.....................
31
4.3.1 Un régime indemnitaire dont la part augmente depuis 2018
..........................................
31
4.3.2 Le régime indemnitaire unifié en 2018 par le passage au RIFSEEP
..............................
31
4.4
La gestion du temps de travail et des congés doit être améliorée
.................................
32
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
4
4.4.1 Le respect de la durée légale de temps de travail ne fait pas l’objet d’un contrôle
effectif
.............................................................................................................................
32
4.4.2 Les heures supplémentaires sont insuffisamment encadrées
..........................................
33
4.4.3 Un régime de report des congés qui a perduré après la mise en place du compte-
épargne temps
.................................................................................................................
33
4.5
Un absentéisme en baisse mais qui reste supérieur à la moyenne
................................
34
4.6
Des conditions d’attribution et de suivi de la nouvelle bonification indiciaire peu
rigoureuses.
...................................................................................................................
35
4.6.1 La NBI est accordée très largement et sans aucun contrôle
............................................
35
4.6.2 Des situations irrégulières
...............................................................................................
36
5
DEUX ÉQUIPEMENTS PROBLÉMATIQUES
................................................................
37
5.1
Le centre de santé
..........................................................................................................
38
5.1.1 Un équipement dont la création a été décidée en 2015 mais dont la gestion n’est
toujours pas assurée fin 2021
..........................................................................................
38
5.1.2 Certains marchés passés pour la réalisation de cet équipement sont contestables
..........
40
5.2
L’espace E.COL.E
........................................................................................................
43
5.2.1 La commune a agi seule en dépit d’un engagement contractuel envers la métropole
Nice-Côte d’Azur
............................................................................................................
43
5.2.2 Les conditions dans lesquelles la gestion a été déléguée à une association puis
reprise en régie sont fortement contestables
...................................................................
44
COMMUNE DE CARROS
5
SYNTHÈSE
La situation financière de commune de Carros invite à la vigilance. Certes, la forte baisse
de ses dotations a été compensée par des ressources en augmentation, portées par une fiscalité
reversée importante et par une fiscalité directe dynamique en partie liée à une augmentation du
taux de la taxe d’habitation et de la taxe sur le foncier bâti en 2017. Toutefois, les charges de
gestion sont élevées et la collectivité n’est pas parvenue à dégager un autofinancement suffisant
pour financer ses investissements.
La commune a donc eu recours important à l’emprunt pour financer ses investissements
et son endettement par habitant est désormais deux fois supérieur à la moyenne nationale de la
strate. La chambre encourage la commune à rechercher les moyens d’une diminution plus
sensible de ses dépenses et à adapter davantage le niveau de ses investissements à sa capacité
d’autofinancement.
Or, l’absence de données suffisamment fiables en matière comptable, financière et de
ressources humaines compromet les possibilités d’identification de pistes d’économies. Il
revient à la commune de corriger rapidement ces lacunes.
La gestion des ressources humaines, marquée par une absence de pilotage jusqu’en
2020, doit ainsi être améliorée dans plusieurs domaines : l’absentéisme est élevé, le contrôle de
la durée légale du temps de travail et des heures supplémentaires n’est pas assuré dans des
conditions conformes à la réglementation, les modalités d’attribution de la nouvelle
bonification indiciaire doivent être corrigées ainsi que le recrutement d’agents sur des emplois
permanents pour des missions ponctuelles.
Enfin, la dissolution en 2016 du budget annexe du centre de formation des apprentis a
entraîné une charge indue, d’un montant résiduel de plus de 200 K
€
, à laquelle il convient de
mettre fin.
Parmi les investissements conduits au cours de la période contrôlée, ceux concernant le
centre de santé et l’espace E.COL.E (espace collaboratif économique) sont intervenus dans les
domaines de la santé et de l’économie qui n’apparaissent pas relever de la compétence
communale. En outre, le centre de santé n’a toujours pas été mis en fonction fin 2021 malgré
une livraison en janvier 2021 et l’espace E.COL.E a été repris en régie municipale après avoir
été confié, dans des conditions irrégulières, à une association.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
6
RECOMMANDATIONS
Recommandation n°
1
: Constituer les provisions nécessaires dans les conditions prévues à
l’article R. 2321-2 du CGCT.
Recommandation n°
2
: Mettre fin à la budgétisation de la subvention exceptionnelle au
budget annexe du CFA.
Recommandation n°
3
: Supprimer les éléments modulables de l’indemnité de fonctions, de
sujétions et d’expertise et les intégrer au complément indemnitaire annuel.
Recommandation n°
4
: Régulariser le versement de la NBI et en assurer le suivi.
COMMUNE DE CARROS
7
INTRODUCTION
La commune de Carros se situe dans le département des Alpes-Maritimes, à environ
25 km au nord de Nice. Elle fait partie depuis 2008 de la communauté d’agglomération
Nice Côte d’Azur (NCA) devenue métropole le 1
er
janvier 2012. Elle a connu un essor
démographique très important lors des 40 dernières années puisque sa population est passée de
8 500 habitants au début des années 1980 à 12 500 habitants en 2017
1
, soit une augmentation
de 50 %.
Ce développement a aussi été urbanistique et économique. En effet, au pied de son
village médiéval d’origine, situé sur un piton rocheux, la commune s’est développée vers la
plaine du Var avec, d’une part, une zone industrielle importante
2
qui a été désignée en 2019 site
pilote dans le cadre de la labellisation « Territoires d’industrie »
3
et, d’autre part, et plus
récemment, avec des quartiers nouveaux situés entre le village et la zone industrielle.
La chambre a inscrit à son programme l’examen des comptes et de la gestion de la
commune de Carros à compter de l’année 2014.
Par lettres du 10 juillet 2020 notifiées le 13 juillet 2020, le président de la chambre a
informé respectivement M. Yannick Bernard, ordonnateur de la collectivité depuis juin 2020,
et M. Charles Scibetta, ancien ordonnateur, de l’ouverture du contrôle et de la composition de
l’équipe de contrôle.
Par lettre du 16 juillet 2020, M. Yannick Bernard a sollicité un report du contrôle à la
fin de l’année 2020 qui a été accordé par la chambre.
Les entretiens de fin de contrôle ont eu lieu respectivement avec M. Yannick Bernard et
M. Charles Scibetta le 11 juin 2021. Les observations provisoires arrêtées par la chambre dans
sa séance du 20 juillet 2021 leur ont été transmises dans leur intégralité
.
Des extraits ont
également été adressés aux personnes explicitement mises en cause.
Après avoir examiné les réponses écrites qui lui sont parvenues et auditionné
M. Scibetta à sa demande, la chambre a, dans sa séance du 16 décembre 2021, arrêté ses
observations définitives et recommandations reproduites ci-après.
1
Source : INSEE.
2
Selon le site Internet de la commune, la zone industrielle de Carros-Le Broc «
est la plus importante du
département des Alpes-Maritimes (…). Créée dans les années 60 (…), elle s'étend aujourd'hui sur une superficie
de 188 ha (…). Elle regroupe environ 550 entreprises et plus de 8000 salariés pour un chiffre d'affaire de plus
d'un milliard d'euros (…). La zone artisanale de la Grave (…) attenante (…) regroupe sur 11 ha une cinquantaine
d'entreprises ainsi que des infrastructures de services pour les entreprises
».
3
Dispositif de contractualisation avec l’État, lancé par le Premier ministre fin 2018, ayant pour but d’accompagner
le renouveau industriel local.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
8
1
LA
QUALITÉ
DE
L’INFORMATION
COMPTABLE
ET
FINANCIÈRE DOIT ÊTRE AMÉLIORÉE
1.1
Une information financière perfectible
Le conseil municipal dispose, en amont du vote du budget, des principales informations
relatives aux finances communales. Ainsi, les rapports d’orientation budgétaire contiennent
l’intégralité des informations obligatoires prévues à l’article D. 2312-3 du CGCT
4
.
En revanche, les documents budgétaires pourraient être complétés, certaines
informations financières n’y figurent pas ou sont insuffisamment précises. Ainsi, le suivi
budgétaire par opération d’équipement (rubrique III-B3 du budget) a été utilisé uniquement
pour l’opération de construction de l’école Simone Veil, alors que des équipements importants
comme le centre de santé et l’espace « E.COL.E » (
cf
.
infra
partie 5) n’ont pas fait l’objet d’une
présentation budgétaire individualisée. La commune, qui en réponse aux observations
provisoires de la chambre a indiqué ne pas souhaiter individualiser le suivi de ses opérations en
cours, est cependant invitée à généraliser ce suivi individualisé afin de mieux informer les élus
pour les opérations à venir.
De même la rubrique relative à la trésorerie figurant à l’annexe IV-A2.1 du budget et du
compte administratif n’est pas renseignée. Il conviendrait qu’elle le soit à l’avenir, au moins en
annexe du compte administratif.
1.2
La qualité de l’information comptable peut être améliorée
À ce jour, la commune ne dispose pas de dispositif de contrôle interne. Elle a néanmoins
indiqué avoir prévu dans ses effectifs un poste de contrôleur de gestion, mais dont le
recrutement n’est pas prioritaire.
Le contrôle de l’exactitude et de la fiabilité des comptes révèle des anomalies
significatives. Ainsi, si la commune procède correctement à l’inscription des dotations aux
amortissements, selon des durées fixées par une délibération de 2012, il s’avère en revanche
qu’elle ne constitue pas de provisions et que la comptabilisation des immobilisations
corporelles, par l’apurement du compte 23, n’est pas effectuée de manière satisfaisante. Par
ailleurs, jusqu’en 2019, le rattachement des produits n’était pas réalisé.
En outre, la commune ne contrôle pas ses douze régies. La chambre l’a invitée en
conséquence à procéder à ce contrôle qui incombe à l’ordonnateur et au comptable
conformément à l’article R. 1617-17 du CGCT. En réponse aux observations provisoires, la
commune a indiqué avoir entrepris une revue de ses régies et une réduction de leur nombre et
envisager un calendrier de contrôle.
4
Même si elles ne sont pas toujours exactes : le ROB 2020 minore ainsi l’encours de dette au 31/12/19 de 0,5 M
€
.
COMMUNE DE CARROS
9
De plus, la chambre a identifié plusieurs erreurs d’imputation comptable. Ainsi, la
commune utilise trop souvent le compte 6228 « rémunérations d'intermédiaires et honoraires
divers » pour des dépenses relevant d’autres comptes, comme par exemple certains frais de
gardiennage (compte 6282), voire d’autres chapitres comme par exemple certains frais de
maintenance et diagnostics immobiliers (compte 6156). La commune a annoncé vouloir réduire
l’utilisation de ce compte pour son budget 2022. De même, tous les véhicules de sa flotte sont
comptabilisés au compte 2182 « matériels de transport », alors que les véhicules destinés à la
voirie, tel que le véhicule de déneigement acheté en 2018, devraient l’être au compte 2157. La
commune devra veiller à de ne pas reproduire ces erreurs.
Enfin, la commune n’est pas toujours en mesure de justifier certains soldes. C’est le cas
par exemple du compte 1021 pour lequel un solde de 17,8 M
€
peut être constaté
depuis 2017, sans aucune explication.
1.3
La commune ne se conforme pas à ses obligations en matière de
provision
Sur la période contrôlée, la commune n’a constitué qu’une provision en 2014, dans le
cadre du contentieux l’ayant opposée à la communauté de communes des Coteaux d’Azur, qui
s’est soldé par une annulation de titres pour un montant total de 6,93 M
€
et a abouti à une charge
ayant fortement dégradé le résultat de l’exercice 2014.
En dehors de ce cas ponctuel et comme le révèle la balance générale des comptes, la
commune n’a enregistré aucun mouvement sur les comptes de provisions
5
. Or, sur la période,
elle a par exemple été condamnée à verser 186 K
€
au titre de divers contentieux, ces sommes
n’ayant pas été provisionnées au préalable. Cette omission affecte la sincérité des comptes mais
elle constitue aussi une irrégularité puisque les dotations aux provisions constituent des
dépenses obligatoires des communes au titre de l’article L. 2321-2, 29° du CGCT. Lors de
l’entretien de fin de contrôle, l’ordonnateur a précisé que la commune devra faire face
a minima
à l’avenir à des charges à provisionner pour un montant approchant 500 K
€
pour couvrir les
risques d’éboulements sur le chemin du Gourg, et de 350 K
€
pour des travaux d’étanchéité. Ces
éléments ne seront pas sans conséquence sur l’équilibre budgétaire de la commune, qui a
annoncé travailler pour le budget primitif 2022 sur un montant de provisions pour risques
contentieux et pour charges exceptionnelles liées au plan de prévention des risques
d’inondation.
De même, le suivi des créances des comptes 654 «
pertes sur créances irrécouvrables
»
et 673 »
titres annulés sur exercices antérieurs
» n’est pas assez rigoureux ce qui conduit la
commune à devoir renoncer à certaines recettes devenues irrécouvrables.
5
À savoir, selon l’instruction budgétaire et comptable M14 applicable aux communes, les chapitres 15
«
Provisions pour risques et charges
», 29 «
Provisions pour dépréciation des immobilisations
», 39 « P
rovisions
pour dépréciation des stocks et en-cours
», 49 «
Provisions pour dépréciation des comptes de tiers
» et 59
«
Provisions pour dépréciation des comptes financiers
».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
10
Les créances irrécouvrables et les titres annulés
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Compte 673
6 929 311
40 155
3 395
1 571
44 871
19 350
16 727
Compte 6541
15 918
17 865
8 985
1 297
2 744
2 239
0
Compte 6542
0
0
0
2 017
23 266
0
0
Source : CRC, d’après la balance des comptes.
La commune a indiqué s’être engagée dans une démarche d’amélioration du
recouvrement de ses recettes, pour l’instant limitée à la gestion locative. Elle a aussi constitué
une provision de 50 K
€
au budget primitif 2021 pour couvrir le risque d’irrécouvrabilité de
certaines créances locatives, qu’elle a reprise pour admettre en non-valeur lesdites créances.
Il est recommandé à la commune de constituer des provisions pour tous les cas prévus
à l’article R. 2321-2 du CGCT. Pour les provisions pour risques contentieux, il lui appartient
de justifier les montants retenus et de documenter ses choix. Pour les provisions pour
dépréciation de créances dont le recouvrement apparaît compromis, elle devra estimer leur
montant à hauteur du risque d’irrécouvrabilité en lien avec le comptable public.
Enfin, les annexes dédiées du budget et du compte administratif devront être renseignées
afin de fournir une information financière exhaustive complète sur ces opérations.
Recommandation n°
1 : Constituer les provisions nécessaires dans les conditions
prévues à l’article R. 2321-2 du CGCT.
2
UNE
SITUATION
FINANCIÈRE
QUI
APPELLE
À
LA
VIGILANCE
L’analyse de la situation financière de la commune porte sur le budget principal et
n’intègre pas le budget annexe du centre de formation des apprentis qui a été dissout en 2018.
Les conditions et les conséquences de la dissolution de ce dernier seront examinées au
chapitre 3
infra
étant d’ores-et-déjà indiqué que les comptes 2017 ont été clôturés à l’équilibre.
2.1
La section de fonctionnement et l’autofinancement
Le budget de fonctionnement de la commune de Carros est supérieur à celui de la
moyenne des communes de la strate démographique (2 103
€
/hab. pour les produits de
fonctionnement en 2019 contre 1 354
€
/hab. pour la moyenne des communes de la strate de
référence).
COMMUNE DE CARROS
11
2.1.1
Une progression des produits de fonctionnement portée par la hausse des
ressources fiscales
Entre 2014 et 2020, les ressources fiscales propres ont enregistré une croissance
annuelle moyenne de 5,7 %. Cette hausse s’explique par l’augmentation en 2017 de 8,7 % du
taux de la taxe d’habitation et de la taxe sur le foncier bâti mais également par le dynamisme
des bases fiscales. Le niveau des taux de la taxe d'habitation (19,34 % en 2019) et de la taxe sur
le foncier non bâti (65,51 % en 2019) est supérieur aux taux moyens de la strate (respectivement
16,66 % et 53,69 % en moyenne nationale 2019) et un peu inférieur pour la taxe sur le foncier
bâti (18,60 % contre une moyenne de 22,58 % en 2019). La commune dispose encore de marges
de man
œ
uvre fiscale. En effet, son potentiel financier atteint 1 722
€
par habitant en 2020, ce
qui est très supérieur à la moyenne nationale de la strate (1 114
€
/hab.). Selon le rapport
d’orientations budgétaires 2021, la commune devrait percevoir un montant complémentaire de
foncier bâti afin de compenser la perte de taxe d’habitation, qu’elle estime à 300 K
€
.
Par ailleurs, si la commune ne perçoit plus la taxe de séjour depuis 2019
6
, le produit de
sa taxe locale sur la publicité extérieure (TLPE) et de sa taxe additionnelle aux droits de
mutation représente une recette supplémentaite d’environ 500 K
€
par an. La progression de la
TLPE a été obtenue grâce aux services d’une société de conseil en ingénierie fiscale.
La fiscalité reversée est principalement constituée de l’attribution de compensation
(AC) pour environ 9,6 M
€
, ce montant ayant été fixé lors de la CLECT
7
de 2012 en
considération des transferts de charges de la commune vers la métropole. L’AC constitue la
ressource la plus importante de la commune et représente en moyenne 43 % de ses produits de
gestion, ce qui est élevé
8
. La variation de la fiscalité reversée correspond principalement aux
évolutions du fonds de péréquation intercommunal (FPIC) pour lequel la commune est
contributrice nette.
Part de la fiscalité propre dans les produits de gestion
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Var. ann. moy.
Ressources fiscales propres
(nettes des restitutions)
6 371 497
6 554 702
6 749 295
7 574 948
7 750 262
8 611 400
8 920 998
5,77 %
+ Fiscalité reversée
9 828 178
9 819 061
9 984 758
9 948 407
9 949 759
9 906 227
9 910 792
0,14 %
+ Ressources d'exploitation
2 424 742
2 371 952
2 323 025
4 954 059
2 556 631
2 491 984
2 157 649
- 1,93 %
+ Ressources institutionnelles
(dotations et participations)
3 612 357
3 422 103
2 812 878
2 816 323
3 041 690
2 435 880
2 672 388
- 4,90 %
= Produits de gestion
22 236 775
22 167 818
21 869 956
25 293 737
23 298 342
23 445 491
23 661 827
1,04 %
Part de la fiscalité propre
dans les produits de gestion
29 %
30 %
31 %
30 %
33 %
37 %
38 %
Part de la fiscalité reversée
dans les produits de gestion
44 %
44 %
46 %
39 %
43 %
42 %
42 %
Source : ANAFI, d’après les comptes de gestion et CRC.
6
La taxe de séjour a été transférée à la métropole avec la compétence promotion du tourisme.
7
CLECT : Commission locale d’évaluation des charges transférées.
8
Selon le guide de l’attribution de compensation publié par la DGCL en février 2019, celle-ci représente en
moyenne 14 % des recettes réelles de fonctionnement des communes bénéficiaires.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
12
Les
ressources
d’exploitation
sont
relativement
stables,
à
l’exception
de
l’exercice 2017, qui a été marqué par le transfert du centre de formation des apprentis à la
métropole NCA. Cette opération, mise en
œ
uvre dans le cadre d’une convention, explique la
hausse importante des recettes constituée, d’une part, par le remboursement par la métropole
de la mise à dispostion de personnels à hauteur de 1,683 M
€
et, d’autre part, par le
remboursement de frais pour 900 K
€
.
Les ressources institutionnelles ont baissé de 26 % sur la période. La dotation générale
de fonctionnement (DGF) est ainsi passé de 1,7 M
€
en 2014 à 31 K
€
en 2019. Toutefois, cette
baisse a été atténuée par une revalorisation de 499 K
€
de la dotation forfaitaire portant sur les
exercices 2015 à 2018, obtenue par la commune auprès de l’Etat. En revanche, la commune n’a
pas perçu de DGF en 2020 et 2021 en raison notamment de son potentiel financier.
Les produits de cessions sont fluctuants par nature. Seuls deux exercices enregistrent
des produits de cessions significatifs en 2017 (680 K
€
) et 2019 (1 M
€
). En 2020, ils s’élèvent
à 280 K
€
au titre de la résiliation anticipée d’un bail à construction accordé dans la zone
industrielle, suivie de la vente de la parcelle correspondante à cette société
9
.
2.1.2
Les charges de fonctionnement évoluent peu mais se situent à un niveau élevé
Avec une augmentation moyenne annuelle de l’ordre de 0,5 %, les charges de
fonctionnement sont contenues sur la période.
Les charges de gestion
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Var. ann. moy
Charges à caractère
général
4 609 832
4 026 018
3 968 321
5 126 258
4 448 138
4 755 151
4 034 920
- 2,2 %
Charges de personnel
12 572 385 12 910 338 13 114 633 14 787 292 13 088 699 13 569 093 13 980 403
1,8 %
Subv. de fonctionnement
1 855 688
1 780 093
1 809 809
1 747 148
1 731 883
1 719 425
1 683 089
- 1,6 %
Autres charges de gestion
1 181 379
1 169 857
1 177 213
1 144 714
1 157 382
1 136 913
1 159 303
- 0,3 %
Charges de gestion
20 219 284
19 886 306
20 069 976
22 805 412
20 426 101
21 180 583
20 857 716
0,5 %
Source : ANAFI, d’après les comptes de gestion.
9
Pour information, l’opération est faite conformément à l’avis des domaines. L’estimation correspond à 15 années
de redevance au prix de 17 334,93
€
/ an, alors que la durée restant à courir était de 24 ans, cela sans prendre en
compte les révisions annuelles. Le bail à construction avait pour objet la construction, d’une part, d’un pont
enjambant le canal « de pied de coteau » et, d’autre part, d’un atelier industriel. Le pont a été réalisé tandis que
l’atelier n’a lui jamais été édifié. La vente conduit à ce que le pont se situe désormais sur un terrain privé bien qu’il
soit ouvert à la circulation publique.
COMMUNE DE CARROS
13
2.1.2.1
Les charges à caractère général
Les charges à caractère général évoluent de manière fluctuante, avec une tendance à la
baisse entre 2014 et 2016 et à la hausse en 2018-2019, les exercices 2017 et 2020 étant
atypiques.
En 2017, ces charges ont connu une hausse importante de 1 167 K
€
(+ 30 %)
principalement en raison, d’une part, du paiement par la ville, pour le compte de la métropole
(contre remboursement,
cf. supra
), de charges de fonctionnement du centre de formation des
apprentis (767 K
€
) et, d’autre part, de travaux d’entretien du domaine forestier (188 K
€
) à la
suite des incendies de l’été 2017
10
.
L’exercice 2020 est, quant à lui, marqué par une baisse de 720 K
€
(- 15 %), que la
commune explique par l’arrêt de nombreux équipements publics et l’absence de consommation
de fluides durant les confinements liés à la crise sanitaire.
Même si l’évolution des charges à caractère général n’est pas préoccupante, leur niveau
est élevé. Aussi, la commune devrait veiller à diminuer certains postes de dépenses notamment
ceux détaillés ci-après.
2.1.2.1.1
Le parc de téléphone mobile est très important
La commune compte environ 180 lignes de téléphonie mobile et appareils pour
400 agents. Dans le détail, certains agents cumulent plusieurs lignes (jusqu’à 13), sans que les
raisons de cette profusion n’apparaissent clairement. En particulier, certaines lignes utilisées
très ponctuellement ne semblent pas nécessiter des abonnements mensuels.
La commune, qui bénéficie d’un accord-cadre conclu par le SICTIAM
11
en 2020 pour
lui et ses membres (dont elle fait partie), dispose de conditions tarifaires avantageuses. Elle
pourrait désormais diminuer ses dépenses de téléphonie mobile en opérant une rationalisation
de son parc de téléphone et en réduisant l’utilisation de ses lignes et de ses abonnements,
lesquels représentent un coût annuel de 21 K
€
.
2.1.2.1.2
Une gestion du parc automobile et des cartes essence qui manque de rigueur
Le parc automobile est constitué de 55 véhicules. Parmi eux, cinq n’ont pas de numéro
d’inventaire tandis que cinq autres ne sont plus utilisables et devraient donc être réformés et le
cas échéant remplacés.
Certains véhicules faisaient l’objet d’un remisage à domicile sans que cela ait été
autorisé par le conseil municipal ni déclaré en tant qu’avantage en nature pour les agents
concernés. Cette pratique irrégulière a cessé au début 2021, un seul véhicule étant désormais
concerné et son remisage étant encadré par une délibération.
10
La dépense nette supportée par la commune s’est au final avérée moins importante puisque le département lui a
octroyée une aide de 75 K
€
, versée en 2018 et 2019.
11
SICTIAM : syndicat d’ingénierie pour les collectivités et territoires innovants des Alpes et de la Méditerranée.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
14
Le nombre des cartes essences est très important (53 cartes en 2020). Ces cartes sont
essentiellement attribuées à un service et pour un véhicule donné. Toutefois, certaines sont
attribuées nominativement (c’est le cas notamment pour le maire), trois d’entre elles n’étant
rattachées à aucun véhicule.
Les documents relatifs au suivi des cartes essence fournis à la chambre révèlent de
nombreuses divergences. Ainsi, le nombre de cartes essence est passé à 65 en 2021, ce qui est
supérieur au nombre de véhicules, voire très supérieur si l’on prend en compte le fait que cinq
d’entre eux sont 100 % électriques. La gestion des cartes essences doit être donc fiabilisée en
vue de leur rationalisation et afin d’éviter les risques de fraude. Cela permettra également de
générer des économies. En effet, en 2018-2019, avant la crise sanitaire, la commune dépensait
environ 3 700
€
par mois en carburant en moyenne.
2.1.2.2
Des charges de personnel en hausse
Entre 2014 et 2020, les charges de personnel ont représenté en moyenne 61,7 % des
charges courantes de fonctionnement et 58 % des produits de gestion. Sur la période, ces
charges ont augmenté de 11 %, soit 1,8 % par an, mais ont enregistré une augmentation
moyenne de 3,4 % par an entre 2018 et 2020.
2.1.2.3
Un soutien marqué du secteur associatif
Sur la période, la commune a subventionné chaque année les personnes morales de droit
privé à hauteur de 1,7 M
€
en moyenne, dont 1,2 M
€
pour les associations, soit un peu plus
de 7 % de ses produits de gestion. En 2019, les subventions aux personnes de droit privé
représentaient ainsi 146
€
par habitant contre une moyenne de 89
€
par habitants pour les
communes de la même strate au niveau national
12
.
Six organismes captent 80 % de ces subventions, le forum Jacques Prévert représentant
à lui seul 43 % du total.
Les principales associations subventionnées (en
€
)
Organismes
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Total général
Carros handball club
58 000
58 000
58 000
58 000
58 000
60 000
60 000
410 000
Football club de Carros
81 000
81 000
81 000
81 000
81 000
81 000
81 000
567 000
Forum Jacques Prévert
570 000
560 000
500 000
500 000
500 000
500 000
500 000
3 630 000
Office de tourisme de Carros
123 500
67 000
55 000
70 000
70 000
0
0
385 500
Olympique Carros basket ball
38 000
40 000
45 000
45 000
46 000
50 000
55 000
319 000
Pari mix cité association
200 300
190 300
190 000
187 000
185 000
190 697
211 623
1 354 920
Autres associations
234 746
223 813
244 664
239 348
219 569
250 778
314 108
1 727 026
Total général
1 305 546
1 220 133 1 173 664 1 180 348 1 159 569 1 132 475 1 221 731
8 393 446
Sources : CRC, à partir des mandats de paiement, pour 2014-2019 et commune pour 2020.
12
Source : DGFiP.
COMMUNE DE CARROS
15
La commune, qui a signé avec chacune de ces associations une convention d’objectif
pluriannuelle, dispose chaque année des documents lui permettant de suivre l’emploi de ses
subventions par ces associations, qu’il s’agisse du rapport d’activité, du bilan et du compte de
résultat.
Jusqu’en 2019, la collectivité subventionnait à hauteur d’environ 65 K
€
par an un office
de tourisme associatif. Cette subvention a cessé avec le transfert de la compétence « promotion
du tourisme » à la métropole le 1
er
janvier 2019. Ce transfert s’est accompagné de la mise à
disposition gratuite des locaux communaux accueillant l’office de tourisme, comme le prévoit
l’alinéa 1
er
de l’article L. 5217-5 du CGCT, mais aussi du transfert d’un agent communal et d’une
réduction de l’attribution de compensation versée à la commune de 39k
€
.
La vente de produits locaux constituait l’essentiel des recettes propres de l’office du
tourisme, la ville lui en achetant fréquemment.
En 2020, malgré la crise sanitaire, la commune a maintenu son niveau de
subventionnement aux secteur associatif.
2.1.2.4
Une gestion de trésorerie à optimiser
La commune a dû faire face à un besoin de trésorerie en 2014 et 2016
La trésorerie
Au 31 décembre en
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Fonds de roulement net global
1 984 708
1 794 079
1 173 189
2 737 438
2 656 583
2 253 201
1 850 496
- Besoin en fonds de
roulement global
3 707 614
1 782 480
1 379 165
547 346
- 511 445
289 261
37 868
= Trésorerie nette
- 1 722
906
11 599
- 205 975
2 190 093
3 168 029
1 963 940
1 812 629
en nombre de jours de
charges courantes
- 29,7
0,2
- 3,5
34,0
54,9
32,9
31,0
dont trésorerie active
277 094
1 411 599
294 025
2 190 093
3 168 029
1 963 940
1 812 629
dont trésorerie passive
2 000 000
1 400 000
500 000
0
0
0
0
Source : logiciel ANAFI, d'après les comptes de gestion.
Cette situation l’a amenée à souscrire dès 2014 une ligne de trésorerie qu’elle a
reconduite annuellement, avec un montant variable oscillant autour de 2 M
€
, et sur laquelle elle
a effectué des tirages et des remboursements pour un montant cumulé de 12 M
€
.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
16
En janvier 2014, le maire a souscrit une ligne de trésorerie interactive de 1,5 M
€
. Dès
le mois d’août 2014, le nouveau maire a signé un avenant par lequel il a souscrit un complément
de 1 M
€
. Ce faisant, il a porté le total de cette ligne à 2,5 M
€
, ce qui excédait largement le
plafond de délégation de 1,5 M
€
dont il disposait en vertu d’une délibération du 24 avril 2014
prise en application de l’article L. 2122-22 du CGCT. La décision du maire était donc
irrégulière car il n’avait pas compétence pour la prendre. Il en résulte que le contrat signé par
le maire en 2014 a été conclu par une autorité incompétente, ce que la commune reconnaît. Ce
n’est qu’à compter de l’année suivante que la délégation accordée au maire a été portée à 3 M
€
.
L’actuel maire dispose, quant à lui, d’une délégation allant jusqu’à 2 M
€
.
Sur la période de contrôle, la mise à disposition de cette ligne de trésorerie a représenté
un coût de 144 K
€
étant précisé qu’elle n’a pratiquement plus généré d’intérêts depuis 2018
avec la baisse de son taux, couplée à la baisse de l’EONIA sur lequel il est basé. En outre, en
2019 et 2020, la commune n’a pas effectué de tirage sur sa ligne de trésorerie et n’a pas prévu
de renouveler le contrat en 2021.
Entre 2014 et 2020, il convient de souligner que son délai global de paiement atteint
18,75 jours en moyenne, y compris le délai de dix jours alloué au comptable public
13
, et se situe
donc bien en deçà du délai de paiement maximum fixé à trente jours
14
. La commune n’a
d’ailleurs pas eu à verser d’intérêt moratoire depuis 2014.
2.1.3
Une capacité d’autofinancement insuffisante
L’excédent brut de fonctionnement (EBF), calculé par différence entre les produits de
gestion et les charges de gestion, est le premier solde financier significatif qui permet
d’apprécier le premier niveau d’équilibre financier de la commune. Sur la période, l’EBF a
enregistré une augmentation annuelle moyenne de 5,6 %, les produits de fonctionnement
progressant plus vite que les charges de même nature notamment en raison de l’augmentation
de la fiscalité en 2017. Toutefois, même à son meilleur niveau, il est constamment resté en-deçà
du seuil de 20 % des produits de gestion (entre 8,2 % et 12,3 %), à partir duquel l’indicateur est
considéré comme satisfaisant par les juridictions financières.
13
Lequel paie en moyenne en 4 jours.
14
Article premier du décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les
contrats de la commande publique, dispositions désormais codifiées à l’article R. 2192-10 du code de la commande
publique.
COMMUNE DE CARROS
17
L’excédent brut de fonctionnement et la capacité d’autofinancement
en
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Produits de gestion (A)
22 236 775
22 167 817
21 869 956
25 293 737
23 298 342
23 445 491
23 661 827
Charges de gestion (B)
20 219 284
19 886 306
20 069 976
22 805 412
20 426 101
21 180 583
20 857 716
Excédent brut de
fonctionnement (A-B)
2 017 492
2 281 511
1 799 980
2 488 326
2 872 241
2 264 909
2 804 111
+/- Résultat financier
- 820 849
- 752 267
- 648 965
- 619 062
- 531 590
- 500 887
- 450 307
dont fonds de soutien - sortie
des emprunts à risques
0
0
11 086
11 086
22 173
11 086
11 086
+/- Autres produits et charges
excep. réels
- 6 666 512
- 90 852
- 13 327
480 429
- 26 069
55 732
- 49 158
CAF brute
- 5 469 869
1 438 393
1 137 688
2 349 692
2 314 581
1 819 753
2 304 646
- Annuité en capital de la dette
1 998 247
1 543 815
4 991 177
1 586 932
1 710 210
2 377 868
1 977 461
= CAF nette ou disponible (C)
- 7 468 116
- 105 422
- 3 853 489
762 761
604 371
- 558 115
327 185
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion.
La capacité d’autofinancement (CAF) brute est la différence entre les recettes et les
dépenses réelles de fonctionnement
15
. Elle doit permettre à la collectivité de financer tout ou
partie de ses dépenses d’investissement (remboursement de la dette en capital et dépenses
d’équipement). Suivant la tendance de l’EBF, elle a nettement progressé à partir de 2017.
L’importante annuité de la dette a obéré les capacités propres d’investissement de la
commune. La CAF nette est en effet soit négative soit très faible
16
. Pour financer ses
investissements, la commune a donc eu recours à l’emprunt.
2.2
Un niveau trop élevé d’investissements compte tenu de l’insuffisance de
la capacité d’autofinancement
Entre 2014 et 2020, les dépenses d’équipement réelles nettes de la commune se sont
élevés à 23,85 M
€
. Bien que soutenues et marquées par une nette augmentation à partir de 2018,
ces dépenses sont restées inférieures
17
à celles de la moyenne des communes de même strate
démographique (en moyenne 246
€
par habitant entre 2014 et 2019 contre 319
€
par habitant
pour la moyenne de la strate). Le niveau de ces dépenses s’est toutefois avéré trop élevé en
considération de la faible capacité d’autofinancement de la commune et de l’insuffisance de ses
recettes propres d’investissement.
15
C’est-à-dire le solde des produits et charges de gestion auxquels on ajoute le résultat financier et le résultat
exceptionnel.
16
L’année 2014 est atypique en raison d’une charge exceptionnelle de 6,93 M
€
(
cf. supra
point 1.1) correspondant
à une annulation de titres (compte 673 «
titres annulés sur exercices antérieurs
») suite au règlement amiable d’un
contentieux avec la communauté de communes Les Coteaux d’Azur.
17
Sauf en 2020.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
18
Les dépenses d’équipement sur la période
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
TOTAL
Dépenses d'équipement
réelles nettes
3 161 473
1 634 128
2 113 851
1 955 873
3 712 354
4 081 165
7 187 854
23 846 699
+ Subventions en
numéraire versées aux
collectivités et à l'État
0
0
397 377
0
70 000
115 913
0
583 289
+ Subventions en
numéraire versées aux
personnes de droit privé
0
0
0
45 000
0
28 150
19 276
92 426
+ Désinvestissements ou
annulations de mandats
0
0
0
52
0
0
0
52
= Dépenses d'équipement
inscrites au compte
administratif
3 161 473
1 634 128
2 511 228
2 000 925
3 782 354
4 225 227
7 207 131
24 522 466
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion.
L’année 2020 comptabilise les dépenses les plus importantes sur la période avec 7,2 M
€
soit 576
€
par habitant. Ce montant est en grande partie lié à la fin de la réalisation
d’équipements structurants que sont le groupe scolaire Simone Veil (montant total de
5,5 M
€
HT), le centre de santé (montant total de 3,4 M
€
HT) et le parc de la Tourre (montant
total de 1,1 M
€
HT), ainsi que la réhabilitation de l’ancienne école Paul Éluard (montant total
de 1,8 M
€
TTC, ce lieu étant destiné notamment à accueillir une pépinière d’entreprise dite
« E.COL.E »,
cf. infra
point 5.3).
Le budget primitif 2021 prévoit 6,4 M
€
de dépenses d’équipement étant précisé
qu’aucun nouvel investissement n’est programmé mais qu’il s’agit surtout de solder des
opérations, dont un reliquat de 2,3 M
€
sur l’opération de l’école Simone Veil.
La commune a un besoin de financement sur toute la période à l’exception de 2017. La
politique d’investissement a donc été financée majoritairement par l’emprunt.
Le financement des investissements
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
CAF nette ou disponible (C)
- 7 468 116
- 105 422
- 3 853 489
762 761
604 371
- 558 115
327 185
+ Recettes d'inv. hors emprunt (D)
609 295
812 265
1 152 366
1 132 622
821 203
2 302 546
2 322 872
= Financement propre disponible (C+D)
- 6 858 821
706 843
- 2 701 123
1 895 382
1 425 573
1 744 431
2 650 058
- Dépenses d'équipement (y compris travaux
en régie )
3 161 473
1 634 128
2 113 851
1 955 873
3 712 354
4 081 165
7 187 854
- Subventions d'équipement (y compris
subventions en nature) hors attributions de
compensation
0
0
397 377
45 000
70 000
144 063
19 276
- Participations et inv. financiers nets
- 251 350
- 259 013
- 265 174
- 275 925
- 286 341
- 296 076
- 156 143
- Charges à répartir
0
0
580 000
0
0
0
COMMUNE DE CARROS
19
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
+/- Variation autres dettes et
cautionnements
- 39 767
- 41 006
- 3 753
6 185
12 415
9 092
1 775
= Besoin (-) ou capacité (+) de financement
propre
- 9 729 177
- 627 266
- 5 523 424
164 249
- 2 082 855
- 2 203 382
- 4 402 705
Nouveaux emprunts de l'année (y compris
pénalités de réaménagement)
0
502 753
4 902 534
1 400 000
2 002 000
1 800 000
4 000 000
Mobilisation (-) ou reconstitution (+) du
fonds de roulement net global
- 9 729 177
- 190 629
- 620 890
1 564 249
- 80 855
- 403 382
- 402 705
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion.
2.3
Un niveau de dette élevée
Selon les chiffres de la DGFiP pour 2019, la dette par habitant atteint 1 613
€
à Carros
contre 850
€
en moyenne pour les communes de la strate au niveau national, soit près du double
de cettte moyenne. En revanche, l’écart est moins important avec les communes maralpines de
la même strate, pour lesquelles la moyenne est de 1 054
€
. Ce ratio déjà élevé s’est encore
dégradé pour atteindre 1 683
€
/hab. fin 2020 alors que, dans le même temps, au regard de la
même strate, il s’est réduit en moyenne à 1 027
€
par habitant dans les autres communes
maralpines et a augmenté moins vite au niveau national. L’évolution suivie par la commune,
orientée à la hausse depuis 2017, s’avère donc préoccupante, dans la mesure où elle entendrait
poursuivre la trajectoire d’investissements qui est la sienne.
La dette par habitant est élevée
Encours de dette BP
/ habitant 31 déc.
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Var. ann. Moy.
Carros
1 773
1 681
1 635
1 593
1 608
1 613
1 683
- 0,7 %
Strate nationale
958
944
918
893
864
850
862
- 1,5 %
Strate maralpine
1 261
1 208
1 207
1 144
1 093
1 054
1 027
- 2,9 %
Sources : ANAFI (chiffres) et CRC (pourcentages).
La commune dispose au 1
er
janvier 2021 de 23 contrats d’emprunt à un taux moyen de
2,5 %, pour une durée résiduelle moyenne de 5 ans et 7 mois. Parmi eux, deux emprunts ont été
souscrits lors de l’exercice 2020, l’un amortissable sur 20 ans et l’autre sur 2 ans, pour un total
de 4 M
€
.
La commune est fortement endettée. Son encours de dette se stabilise aux alentours de
19,5 M
€
entre 2015 et 2018, sa réduction à 18,9 M
€
en 2019 étant suivie d’une augmentation
de 2 M
€
en 2020, pour atteindre 20,98 M
€
.
La période est marquée par la souscription chaque année de nouveaux emprunts depuis
2015, étant précisé que 1,2 M
€
d’emprunts étaient aussi prévus en 2014 mais la commune y a
renoncé. L’exercice 2016 ressort tout particulièrement avec près de 5 M
€
d’emprunts
nouveaux, dont certains sont liés à des renégociations (
cf. infra
, point suivant).
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
20
Encours de la dette 2014-2020
En
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Encours de dettes du BP au
1
er
janvier
22 508 880
20 550 400
19 550 344
19 465 454
19 272 337
19 551 712
18 964 752
- Annuité en capital de la dette
(hors remboursement temporaires
d'emprunt)
1 998 247
1 543 815
4 991 177
1 586 932
1 710 210
2 377 868
1 977 461
- Var. des autres dettes non
financières (hors remboursements
temporaires d'emprunts)
- 39 767
- 41 006
- 3 753
6 185
12 415
9 092
1 775
+ Nouveaux emprunts
0
502 753
4 902 534
1 400 000
2 002 000
1 800 000
4 000 000
= Encours de dette du BP au
31 décembre
20 550 400
19 550 344
19 465 454
19 272 337
19 551 712
18 964 752
20 985 516
- Trésorerie nette hors comptes de
rattachement avec les BA, le CCAS
et la caisse des écoles
1 058 963
2 439 491
1 580 903
2 908 061
3 163 121
1 958 997
1 803 245
= Encours de dette du BP net de la
trésorerie hors compte de
rattachement BA
19 491 438
17 110 853
17 884 551
16 364 276
16 388 591
17 005 755
19 182 271
Capacité de désendettement BP,
trésorerie incluse* en années
(dette Budget principal net de la
trésorerie* / CAF brute du BP)
- 3,6
11,9
15,7
7,0
7,1
9,4
8,3
Encours de dette du budget
principal au 31 décembre
20 550 400
19 550 344
19 465 454
19 272 337
19 551 712
18 964 752
20 985 516
Capacité de désendettement BP en
années (dette / CAF brute du BP)
- 3,8
13,6
17,1
8,2
8,4
10,4
9,1
Source : ANAFI, à partir des comptes de gestion.
La capacité de désendettement de la commune, au regard de son encours de dette et en
prenant en compte sa trésorerie qui se situe dans la moyenne
18
, fluctue surtout en fonction de
l’évolution de sa CAF brute. De ce fait, cette capacité de désendettement n’atteint jamais le
seuil d’alerte de 15 années
19
sauf fin 2016, année marquée par 5 M
€
de nouveaux emprunts
et 1 M
€
d’indemnité de réaménagement d’emprunt.
Si elle a depuis lors ramené ce ratio autour de dix années, les nouveaux emprunts de
2020 devraient l’amener à connaître une nouvelle dégradation, dès 2021 du fait du prêt de
2,6 M
€
qui occasionnera une annuité de près de 140 K
€
pendant 20 ans, puis à nouveau fin
2022 avec le remboursement
in fine
du prêt relais de 1,4 M
€
, qui a été souscrit dans l’attente
du versement de certaines subventions d’équipement et du FCTVA en 2021.
18
Elle représente environ un mois de charges courantes.
19
Les juridictions financières considèrent que la durée de vie moyenne pondérée des équipements d’une
collectivité est de 30 ans et que statistiquement ces mêmes équipements sont à mi-vie lors de l’analyse, la durée
résiduelle moyenne se situant donc à 15 ans, durée qui marque le seuil du surendettement pour une collectivité
locale.
COMMUNE DE CARROS
21
La commune devra être vigilante sur l’évolution défavorable à venir de sa capacité de
désendettement, ainsi que sur son ratio d’endettement, qui se révèle très supérieur à celui de la
moyenne des communes comparables de sa strate, lequel se situe à 0,65
20
.
Le taux d’endettement est élevé
En M
€
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Encours de dette du BP au 31 décembre
(A)
20,55
19,55
19,46
19,27
19,55
18,96
20,98
Produits de gestion (B)
22, 24
22,17
21,87
25,29
23,30
23, 44
23,66
Ratio d'endettement
21
(= A / B)
0,92
0,88
0,89
0,76
0,84
0,81
0,89
Source : CRC.
Le poids de la dette représente en moyenne sur la période 85 % des recettes de
fonctionnement. Ce ratio élevé démontre que la commune souffre d’un endettement trop
important.
La rapport d’orientations budgétaires 2020 annonçait la volonté de l’équipe municipale
nouvellement élue de faire baisser la charge des intérêts, en suivant la voie d’un étalement de
sa dette. À cet effet, la commune a sollicité la SFIL pour qu’elle étudie un réaménagement
d’une partie de sa dette. Les propositions faites par la SFIL en juillet 2020, portant sur cinq
emprunts à racheter pour un encours de 7 M
€
et une durée de vie moyenne d’un peu moins de
5 ans, aboutissaient à une indemnité de sortie de 1,3 M
€
. Selon l’étude demandée par la ville à
un cabinet conseil, ces propositions présentaient toutes un surcoût final (de 253 K
€
à 389 K
€
)
pour la collectivité. Celle-ci ne leur a donc pas donné suite.
20
Selon les données de la DGCL. Voir sur ce point « les collectivités locales en chiffres 2020 », page 54, pour les
communes de 10 000 à 20 000 habitants qui comme Carros ne sont ni touristiques, ni de montagne.
21
Ce ratio mesure la charge de la dette d’une collectivité relativement à sa richesse. Un ratio de 1 signifie que la
charge de la dette capte toute la richesse de la collectivité.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
22
La dette a été désensibilisée et ne comporte plus d’emprunt à risque
La commune est sortie en novembre 2015 de deux emprunts structurés cotés
3E et 4E au regard de la circulaire du 25 juin 2010
22
, qui représentaient près d’un
quart de sa dette totale. À cet effet, elle a conclu les 27 et 30 novembre 2015 deux
prêts afin de racheter ses emprunts structurés :
- d’une part, par un contrat avec effet au 1er septembre 2016, elle a renégocié un
emprunt classé 4E, le rachat se faisant pour 4 M
€
comprenant un capital restant dû
(CRD) de 3,42 M
€
et une fraction capitalisée de 580 K
€
de l’indemnité de sortie,
laquelle atteignait un montant total de 1,19 M
€
23
;
- d’autre part, par un contrat avec effet au 1
er
décembre 2015, elle a obtenu le rachat
d’un emprunt classé 3E, le rachat se faisant pour 2 M
€
de CRD, auquel s’ajoutent
500 K
€
de prêt, une indemnité de sortie de 396 K
€
étant due.
Au final, cette restructuration de dette lui aura coûté 1,6 M
€
et non 781 K
€
,
comme cela a été délibéré par le conseil municipal le 12 novembre 2015, ni même
1,2 M
€
, comme cela a été présenté
a posteriori
au même conseil municipal
24
à
l’occasion des rapports d’orientation budgétaire 2018 et 2019. La charge financière
correspondante a en revanche été correctement comptabilisée.
Le dernier contrat portant sur un emprunt structuré à barrière simple classé
B-1, a connu sa dernière échéance le 1
er
janvier 2021, les deux emprunts
supplémentaires souscrits en 2020 sont classé A-1. La structure de la dette de la
commune ne l’expose donc plus à ce jour à un potentiel risque.
3
LE CENTRE DE FORMATION DES APPRENTIS
Le centre de formation des apprentis Métropole Nice Côte d’Azur
25
, qui accueille
environ 1 000 apprentis et stagiaires et compte un internat de 210 places, est implanté sur un
site de 23 000 m² à Carros et dispose par ailleurs d’une antenne à Nice (« académie
d’esthétique »). Il emploie 90 salariés dont 60 enseignants habilités par l’éducation nationale.
Jusqu’en 2017, la commune a géré ce centre dans le cadre d’une convention passée avec
la région, compétente en matière de formation professionnelle. Le centre constituait un budget
annexe de la commune de Carros jusqu’à son transfert à la métropole Nice Cote d’Azur.
22
Circulaire interministérielle du 25 juin 2010 relative aux produits financiers offerts aux collectivités territoriales
et à leurs établissements publics et charte dite « Gissler » de bonne conduite entre les établissements bancaires et
les collectivités locales du 7 décembre 2009.
23
Il existe des différences importantes entre la proposition d’octobre 2015, la délibération du 12 novembre 2015
et le contrat signé le 30 novembre 2015, que la commune ne sait pas expliquer.
24
Aux comptes 6681 «
indemnités pour remboursement anticipé d’emprunt à risques
» et 6682 «
indemnités de
réaménagement d’emprunt
».
25
Selon les données figurant sur son site internet en décembre 2021.
COMMUNE DE CARROS
23
3.1
La situation financière du budget annexe du centre de formation des
apprentis
Le budget annexe a présenté un résultat excédentaire à compter de 2014, sa situation ne
présentait donc plus de problème particulier pour la commune jusqu’à sa dissolution à compter
de 2017.
En réponse aux observations provisoires, l’ancien ordonnateur a rappelé le contexte
antérieur à 2014, en se référant notamment à un audit fait en 2015 à la demande de la Région.
Ce document explique notamment que cette période était marquée par une situation financière
dégradée en grande partie due à «
une gestion trop laxiste liée à l’absence de tout pilotage du
centre par son organisme gestionnaire
», à savoir la commune de Carros.
Le résultat d’exploitation excédentaire du budget annexe du CFA
En
€
2014
2015
2016
Ressources d'exploitation
597 552
519 901
570 856
+ Ressources institutionnelles (dotations et participations)
5 081 854
4 473 909
4 635 286
= Produits de gestion (A)
5 679 406
4 993 810
5 206 142
Charges à caractère général
1 591 787
1 319 222
1 493 690
+ Charges de personnel
3 096 242
3 011 362
3 058 108
+ Autres charges de gestion
1 624
2 362
19 392
= Charges de gestion (B)
4 689 653
4 332 946
4 571 190
Excédent brut de fonctionnement (A-B)
989 753
660 864
634 952
+/- Autres produits et charges excep. réels
- 112 086
- 10 557
- 13 896
= CAF brute
877 667
650 307
621 057
- Dotations nettes aux amortissements
219 407
180 332
164 797
- Dotations nettes aux provisions
0
0
0
+ Quote-part des subventions d'inv. transférées
51 052
51 052
0
= Résultat section de fonctionnement
709 313
521 028
456 260
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion et CRC.
3.1.1
Un financement principalement assuré par la région
Les recettes étaient presque entièrement composées de dotations régionales (70 %), le
reste provenant essentiellement du produit de la taxe d’apprentissage (17 %) et des ressources
d’exploitation (11 %). La commune ne contribuait donc que de manière résiduelle.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
24
Recettes du budget annexe CFA
en
€
2014
2015
2016
Moyenne
Travaux, études et prestations de services
590 437
509 261
525 985
541 894
+ Revenus locatifs et redevances
7 115
10 640
44 871
20 875
= Ressources d'exploitation
597 552
519 901
570 856
545 379
+ Participations
4 194 509
3 643 608
3 621 664
3 819 927
Dont État
0
0
35 840
11 947
Dont régions
4 055 238
3 592 838
3 535 999
3 728 025
Dont départements
0
0
2 000
667
Dont communes membres du GFP
131 484
40 509
40 000
70 664
Dont autres organismes
7 787
10 261
7 825
8 624
+ Autres attributions et participations
26
887 345
830 301
1 013 622
910 423
Total ressources
5 679 406
4 993 810
5 206 142
5 293 119
Part de la région dans les ressources
71 %
72 %
68 %
70 %
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion et CRC.
3.1.2
Les charges de personnel importantes
Le budget annexe supportait des charges de personnel, qui avaient la particularité de ne
concerner jusqu’en 2015 que du personnel non titulaire, ainsi que des charges de personnel
externe correspondant au remboursement des personnels mis à disposition du CFA par la
commune et la chambre de métiers et de l’artisanat des Alpes-Maritimes. En 2016, les
personnels communaux ont été transférés au budget annexe.
Les charges de personnel du budget annexe CFA
En
€
2014
2015
2016
Rémunérations du personnel
1 676 180
1 631 437
2 093 371
+ Charges sociales
661 032
653 585
824 280
+ Impôts et taxes sur rémunérations
87 045
84 564
98 032
+ Autres charges de personnel
0
0
0
= Charges de personnel interne
2 424 257
2 369 586
3 015 684
Charges sociales en % des CP interne
27,3 %
27,6 %
27,3 %
+ Charges de personnel externe
672 612
641 776
43 232
= Charges totales de personnel
3 096 868
3 011 362
3 058 916
CP externe en % des CP total
21,7 %
21,3 %
1,4 %
Source : logiciel ANAFI, d’après les compte de gestion après retraitement par CRC.
26
Il s’agit du produit de la taxe d’apprentissage.
COMMUNE DE CARROS
25
Selon le rapport d’orientation budgétaire 2017, «
la rémunération des agents titulaires
ou sur postes permanents non enseignants avait été passée sur le budget annexe du CFA (en
2015 les dépenses de personnel du CFA étaient de 549 000
€
sur le budget principal). Avec ce
transfert, la masse salariale a augmenté de 5,9 %. Sans ce transfert, la hausse aurait été de
10,2 % sur 4 ans, soit en moyenne 2,5 % par an d’augmentation. La réaffectation des dépenses
de personnel au budget annexe a fait diminuer d’autant les recettes de fonctionnement (013
atténuation de charges) car ces dépenses étaient intégralement remboursées par le budget
annexe
».
Cette opération a été motivée par le transfert à venir de la gestion du centre à la
métropole Nice Cote d’Azur.
3.2
Les opérations de transfert à la métropole Nice Cote d’Azur en 2017
3.2.1
La métropole NCA est devenue l’autorité gestionnaire du CFA à compter du
1
er
janvier 2017 mais la commune a géré le personnel après cette date
Le transfert de la gestion du CFA à la métropole niçoise a été autorisé par la collectivité
régionale en décembre 2016.
Malgré ce transfert, qui a été juridiquement prononcé à compter du 1
er
janvier 2017, la
commune a continué à assurer la gestion du personnel du CFA jusqu’au 31 mars 2017, en vertu
d’une "convention de mise à disposition de service" signée avec la métropole en
décembre 2016. Cela a donné lieu au remboursement par la métropole d’une part, de 1,68 M
€
de frais de personnels et, d’autre part, de 900 K
€
au titre des charges de fonctionnement du
CFA.
3.2.2
Des charges continuent de peser sur la commune au titre du CFA
Par délibération du 29 mars 2018, le conseil municipal a voté la dissolution de son
budget annexe CFA à la date du 31 décembre 2017.
Dans ce cadre, le budget annexe a perçu en 2017 la somme de 455 K
€
de cessions
d’immobilisations correspondant au rachat de son actif par la métropole, pour laquelle cette
opération a été neutre puisqu’elle a bénéficié en contrepartie d’une subvention exceptionnelle
du même montant de la part de la région. Dans le sens inverse, le budget annexe a supporté une
charge exceptionnelle (c/675 «
valeurs comptables des immobilisations cédées
») de 528 K
€
correspondant à la valeur nette comptable de l’actif cédé.
Malgré ce transfert de gestion suivi de la dissolution du budget annexe, la commune a
continué de supporter des charges relatives au CFA. Ainsi, de manière ponctuelle, elle a
supporté en 2018 pour 28 K
€
d’annulations de titres qui avaient été émis par le budget annexe
du CFA. Elle a par ailleurs repris l’ensemble des créances du budget annexe pour un total
de 737 K
€
, dont une créance de 390 K
€
qui était détenue à l’encontre du budget principal.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
26
3.2.2.1
La commune supporte une charge de 390 K
€
dont le fondement juridique est
contestable
La commune demeure débitrice de trois titres de recette émis par le budget annexe à
l’encontre du budget principal de 2012 à 2014, pour un montant annuel de 130 K
€
. Selon elle,
cela correspondrait à la subvention de fonctionnement annuelle (comptabilisée comme une
subvention de fonctionnement exceptionnelle au compte 6748 du budget principal), non payée
par le budget principal sur ces trois exercices, et représenterait donc une charge totale de 390 K
€
pour ce budget.
Or, si le budget primitif 2014
27
du budget annexe avait effectivement prévu une recette
de 130 K
€
, le conseil municipal n’avait pas voté la dépense correspondante au budget principal
2014. En effet, ce dernier ne comportait qu’une subvention de 1 K
€
et non de 130 K
€
, laquelle
n’a finalement pas été versée.
La participation du budget principal au fonctionnement du budget annexe CFA
Exercice
Type budget
Compte
Solde Débit
Type budget
Compte
Solde Crédit
2010
Budget principal
6748
300
Budget annexe
74741
152 640
2011
Budget principal
6748
0
Budget annexe
74741
12 764
2012
Budget principal
6748
17 516
Budget annexe
74741
133 562
2013
Budget principal
6748
17 120
Budget annexe
74741
136 039
2014
Budget principal
6748
0
Budget annexe
74741
131 484
2015
Budget principal
6748
40 000
Budget annexe
74741
40 509
2016
Budget principal
6748
40 000
Budget annexe
74741
40 000
2017
Budget principal
6748
39 000
Budget annexe
74741
0
Source : CRC, d’après la balance des comptes.
3.2.2.2
Afin de ne pas afficher l’importance de la charge, son étalement a été décidé
dans des conditions irrégulières
Au moment du transfert du CFA à la métropole en 2017, le maire se serait engagé à
honorer sa dette auprès du CFA mais, afin de ne pas grever son budget 2017, a décidé d’étaler
cette charge sur 10 ans, donnant ainsi lieu chaque année à une subvention exceptionnelle
de 39 000
€
, imputée sur le compte 6748 «
autres subventions exceptionnelles
», au profit du
centre de formation devenu métropolitain, et ce jusqu’en 2026.
Cette décision d’étalement a été prise par le maire sans délibération du conseil municipal
ou d’un quelconque autre justificatif. Or, cela n’était pas possible : en effet, comme le prévoient
les développement de l’instruction M14 relatives au compte 4818, «
hormis le cas des frais
27
Les budgets 2012 et 2013 sont hors période de contrôle et ne sont donc pas visés.
COMMUNE DE CARROS
27
d’études, de réorganisation ou de restructuration des services qui peuvent être étalés sur une
durée maximale de cinq ans, le compte 4818 « Charges à étaler » ne peut être utilisé que sur
autorisation conjointe des ministres chargés du budget des collectivités territoriales puisqu’il
constitue une dérogation au plan comptable général avec lequel la présente instruction doit
être en conformité. Cet étalement dérogatoire ne peut concerner que des dépenses
exceptionnelles, dont la nature (comme des décisions de justice par exemple) et par leur
montant rapporté au total des recettes réelles de fonctionnement, qui ne pouvaient pas être
anticipées lors de l’établissement du budget et qui mettraient en péril son équilibre
».
La fiche didactique réalisée sur ce thème par la direction générale des collectivités
locales (DGCL) ajoute que «
L’étalement de charge doit être effectué par une délibération de
l’assemblée délibérante compétente, qui intervient après la décision des ministres. En tout état
de cause, la décision de l'assemblée délibérante d'étaler une charge sur plusieurs exercices
suppose que les crédits nécessaires à l'étalement soient prévus au budget
».
Ainsi, en décidant de son propre chef de procéder à cet étalement de charge, le maire a
commis une irrégularité.
3.2.2.3
Une créance au final détenue par la commune à l’encontre d’elle-même
Les titres de recette émis de 2012 à 2014 par le CFA à l’encontre du budget principal
n’avaient pas fait l’objet d’un mandatement par ce dernier à la clôture des comptes du budget
annexe fin 2017. Cette créance aurait dû être prise en compte au moment de la dissolution du
budget annexe, mais cela n’a pas été le cas.
Compte tenu de la décision prise par le maire de régler, malgré tout, cette charge, celle-
ci a fait l’objet depuis 2017 de mandats de paiement émis par la commune au profit du SIRET
21060033400176, qui correspondait au CFA lorsqu’il était un budget annexe de la commune et
qu’il n’existait donc plus depuis la reprise de ses comptes par le budget principal.
Le comptable encaisse chaque année, pour le compte de la commune, le montant étalé
de titres de recettes émis à l’encontre d’elle-même. Cette opération ne donne donc pas lieu à
une sortie de trésorerie pour la collectivité. Pour autant, elle ne se justifie pas et la collectivité
est donc invitée à y mettre fin.
Recommandation n°
2 : Mettre fin à la budgétisation de la subvention exceptionnelle
au budget annexe du CFA.
4
LES RESSOURCES HUMAINES
La commune dispose d’un nombre important de services publics qu’elle assure en régie :
piscine communale, cinéma, médiathèque, service de restauration municipale (ouvert au
personnel municipal ainsi qu’à leur famille, aux agents municipaux retraités, mais aussi aux
agents de l’éducation nationale, de la gendarmerie ou de la métropole), sans compter les
services scolaires, périscolaires, d’accueil de loisirs et services sportifs qui emploient de
nombreux agents. Cette politique a pour conséquence la présence d’effectifs importants.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
28
Les effectifs au 31/12/N en nombre d’agents
Année
Fonctionnaires
Non titulaires –
emplois
permanents
Non titulaires –
emplois non
permanents
Total
2015
301
16
74
391
2017
273
64
44
381
2019
268
61
70
399
Source : bilans sociaux.
Les effectifs sont relativement stables et se situent fin 2019 aux alentours de 400 agents
dont 330 sur emplois permanents.
4.1
Une absence de pilotage et de fiabilité des données en matière de
ressources humaines
4.1.1
Les données relatives aux ressources humaines ne sont pas fiables
La chambre a relevé des lacunes dans l’établissement des données relatives aux
ressources humaines dont la fiabilité n’est donc pas assurée. Ce constat vaut tant pour les
données du système d’information des ressources humaines (SIRH) que pour celles du bilan
social. Il en résulte une absence de fiabilité des données les rendant inexploitables par la
chambre. En conséquence, la commune est invitée à prendre les mesures nécessaires pour
fiabiliser ces données, préalable indispensable à une gestion RH.
L’exemple de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) peut être mis en avant pour
illustrer cette absence de fiabilité. En effet, les tableaux de suivi des agents bénéficiaires fournis
par la commune omettent un nombre important d’agents qui pourtant la perçoivent
effectivement, au regard de leurs bulletins de paie. Dans le sens inverse, des agents figurant sur
ces listes n’ont pas perçu la NBI. Ce point sera développé plus loin.
4.1.2
Les règles applicables au personnel sont consignées dans de trop nombreux
documents
Malgré les limites précitées la commune dispose d’un corpus de règles applicables au
personnel. Celles-ci sont consignées dans le règlement intérieur du personnel. Ce document,
qui date de 2012, a fait depuis l’objet de modifications ponctuelles, par exemple pour le passage
à un temps de travail de 1 607 h. Sa mise à jour est nécessaire afin d’y intégrer les dispositions
applicables au personnel qui sont développées dans d’autres documents mis en place
ultérieurement. Il en va ainsi des dispositions relatives au compte épargne-temps (CET), au
régime indemnitaire, aux heures supplémentaires ou aux astreintes. Il serait de bonne gestion
de disposer d’un document unique pour plus de lisibilité.
COMMUNE DE CARROS
29
4.1.3
Le pilotage était, jusqu’à une période récente, inexistant
Dans le droit fil de l’absence de données fiables, la commune n’a pas mis en place
d’indicateurs lui permettant de suivre ses ressources humaines. De ce fait, aucun pilotage ne
peut être exercé ce qui s’avère fortement dommageable pour une collectivité qui compte
400 agents. Ainsi, la collectivité n’a pas fourni à la chambre la liste complète des agents et ne
dispose pas d’un organigramme exhaustif. Aucune politique de moyen ou long terme relative
aux ressources humaines ne semble donc pouvoir être mise en place.
Si la commune respectait son obligation réglementaire
28
d’annexer un état du personnel
à
ses
documents
budgétaires,
elle
n’avait
pas
établi
de
tableau
des
effectifs
jusqu’en 2020. La collectivité doit poursuivre ses efforts en mettant notamment en place des
indicateurs de suivi d’activité et d’analyse nécessaires à une bonne gestion.
Parmi les avancées à réaliser, elle devra se mettre en conformité avec la réglementation
en
mettant
en
place
des
lignes
directrices
de
gestion
(LDG,
issues
de
la
loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique et du
décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019). Ces dernières sont absolument nécessaires depuis
le 1er janvier 2021 pour fonder juridiquement les décisions d’avancement et de promotion
prises à compter de cette date. Elles ont aussi comme finalité de déterminer la stratégie de la
collectivité en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Cet objectif
semblait néanmoins difficilement atteignable à court terme bien que la commune ambitionnait
de mettre en place ses LDG en mai 2021, ce qu’elle indique avoir fait en juin 2021, et ce malgré
l’absence de fiabilisation préalable des données.
4.2
Des recrutements discutables
4.2.1
Des cas de recrutement contestables
Outre le poste de collaborateur de cabinet occupé sous un statut contractuel, la commune
a pour particularité de recourir à des cadres non titulaires pour occuper plusieurs emplois à
responsabilité au sein de ses services.
C’est le cas de l’emploi de directeur foncier / urbanisme, occupé par M. B., recruté en
tant que chargé de mission en février 2016. Dans ce cas précis, la commune a justifié l’absence
de recrutement d’un fonctionnaire issu des cadres d’emploi correspondants (attaché ou
rédacteur territorial), par le fait qu’il s’agissait d’une mission d’une durée de 3 ans. Pourtant,
l’intéressé était toujours en poste début 2021, son contrat courant jusqu’en septembre 2022, et
occupe les mêmes fonctions. Il apparaît donc que la commune, qui n’a pas pu prouver que les
fonctions ou les besoins du service le justifiaient, ni qu’aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté,
a irrégulièrement recruté un contractuel pour pourvoir cet emploi qui s’avère au final être
permanent.
28
Issue de l’article R. 2313-3 du code général des collectivités territoriales.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
30
La commune a aussi créé un poste « d’économe des flux » en 2015. L’agent concerné,
M. M., devait selon sa fiche de recrutement remplacer un agent absent et a donc été recruté en
tant qu’agent non titulaire au moyen d’un contrat à durée déterminée. Pourtant, dès le mois
suivant, il a été stagiarisé. Si cela n’est pas contestable juridiquement puisque l’intéressé était
lauréat du concours d’ingénieur territorial, et lui a permis de ne pas perdre le bénéfice de sa
réussite au concours, la chambre peut en revanche s’interroger sur l’intérêt d’une telle démarche
pour la commune. D’ailleurs, le DRH avait émis un avis défavorable au motif que l’agent n’était
pas en poste depuis un temps suffisant pour lui proposer la stagiarisation. Par la suite, la
commune a irrégulièrement réduit à 6 mois la durée du stage de cet agent alors que le décret
statutaire
29
du cadre d’emploi des ingénieurs territoriaux prévoit une durée minimum d’un an
(article 12 du décret), sauf pour un lauréat du concours interne, ce qui n’est pas le cas de
l’intéressé. L’agent concerné a finalement quitté la collectivité en novembre 2017, soit après à
peine plus d’un an en poste. Il aura toutefois eu le temps dans ce court intervalle d’être titularisé.
La collectivité gagnerait à mieux encadrer à l’avenir le recrutement des personnels pour
lesquels une mission spécifique est envisagée et dont la durée est limitée. Elle pourrait à cet
effet conclure des contrats de projet
30
avec les intéressés.
4.2.2
Des recrutements qui auraient pu être évités par une meilleure mutualisation
avec la métropole
Comme cela sera évoqué plus loin (
cf.
point 5.2.1), la commune intervient de manière
très active dans le domaine du développement économique et de l’aide à l’emploi, qui pourtant
ne relèvent pas de ses compétences mais de celles de la région, de la métropole et de l’État.
Elle bénéficie d’un agent de la métropole mis à sa disposition à 50 % de son temps de
travail, pour effectuer des missions de développement économique à son profit. Comme le
rappelle pourtant la convention de mise à disposition, la compétence économique est détenue
exclusivement par la métropole, il s’avère donc que cette mutualisation, même à mi-temps,
n’est par régulière compte tenu de l’incompétence de la ville en la matière.
Pour les mêmes raisons, le recrutement en juillet 2019 d’un agent en CDD de 12 mois
en qualité de « chef de projet de développement local », avec notamment pour mission de
conduire les projets de la commune en la matière. De plus, contrairement à ce qui a été présenté
au conseil municipal afin qu’il autorise la création de cet emploi, ce poste n’est pas cofinancé
par la métropole.
Enfin, la commune dispose d’une direction des affaires sociales et du développement
économique qui comprend dix agents, dont la moitié sont affectés à ces missions. Une « maison
de l’emploi et de l’entreprise », incluse dans la direction susmentionnée, comprend deux agents
communaux (ainsi que des agents de la métropole). Si l’un a des missions d’accueil classiques,
la seconde a des missions de
« référente conseillère à l’emploi
» qui correspondent plutôt à des
compétences relevant de Pôle Emploi.
29
Il s’agit du décret n° 90-126 du 9 février 1990 modifié applicable à la date du recrutement, qui a été abrogé et
remplacé par un décret n° 2016-201 du 26 février 2016 qui n’a rien changé sur ce point (article 15).
30
Créés par le décret n° 2020-172 du 27 février 2020 relatif au contrat de projet dans la fonction publique.
COMMUNE DE CARROS
31
Tous ces moyens humains, affectés à la réalisation de missions ne relevant pas de la
compétence communale, pourraient être utilement redéployés dans d’autres services. La
collectivité est invitée à s’interroger sur la pertinence de son intervention dans le domaine
économique qui n’est pas de sa compétence.
Lors de l’entretien de fin de contrôle, l’ancien ordonnateur a fait valoir que la politique
menée par la commune avait pour but de compléter celle proposée par la métropole et
concernerait des publics différents, plus jeunes ou plus éloignés de l’emploi. Or, cette action
complémentaire n’est pas prévue par le contrat de ville signé avec la métropole, comme cela
sera vu plus loin (partie 5).
4.3
La rémunération des agents comporte une part indemnitaire
importante
4.3.1
Un régime indemnitaire dont la part augmente depuis 2018
Le régime indemnitaire se situe à un niveau relativement important puisqu’il représente
environ 25 % de la rémunération totale sur la période contrôlée. Cette part a augmenté depuis 2018.
Part du régime indemnitaire dans la rémunération totale
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Part des indemnités dans la rémunération
du personnel
24,10 %
24,09 %
18,74 %
24,66 %
25,85 %
27,04 %
26,11 %
Source : logiciel ANAFI, d’après les comptes de gestion.
4.3.2
Le régime indemnitaire unifié en 2018 par le passage au RIFSEEP
31
La collectivité a mis en place le RIFSEEP à compter du 1
er
janvier 2018 par une
délibération du 28 novembre 2017. Le principe retenu est celui d’un maintien intégral du niveau
de primes, détenu à titre individuel par les agents avant le passage à ce nouveau régime.
L’IFSE
32
présente la particularité de comporter deux compléments annuels, l’un étant
attribué en fonction de l’assiduité et variant de 0 à 150
€
, l’autre étant versé à tous les agents,
ainsi qu’un complément quadriennal correspondant à la valorisation de l’expérience et des
acquis. Le complément annuel nommé « maîtrise de la masse salariale » est attribué en fonction
de critères qui n’apparaissent pas dans la délibération précitée, ce n’est que le 21 février 2019
que son régime est fixé.
31
RIFSEEP : régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement
professionnel.
32
IFSE : Indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
32
En tout état de cause, l’IFSE constitue la part fixe du régime indemnitaire des agents
auxquels s’applique le RIFSEEP. Elle n’a pas vocation à être modulée, mais peut seulement
faire l’objet d’un réexamen dans les cas prévus réglementairement
33
. Dans ces conditions, la
commune ne peut faire varier le montant d’IFSE au moyen de divers compléments. Il lui
appartient au contraire d’adjoindre ses compléments au CIA, qui a seul vocation à regrouper
les éléments variables de la rémunération indemnitaire.
En février 2021, la commune a étendu le RIFSEEP, à l’ensemble des cadres d’emplois
susceptibles d’en bénéficier, mettant ainsi en
œ
uvre sans tarder les possibilités offertes par de
décret du 27 février 2020
34
. Ne demeurent pour les agents concernés aucune autre prime ou
indemnité étant précisé que la commune a valablement maintenu le versement de la prime de
fin d’année, au titre des avantages collectivement acquis.
Seuls les 17 agents de la filière « police municipale » demeurent désormais soumis à un
autre régime. Tous cumulent l’ensemble des primes et indemnités auxquelles ils ont droit, à
savoir l’indemnité spéciale mensuelle de fonction et l’indemnité d’administration et de
technicité (IAT) ainsi que la NBI à 15 points, le tout dans des conditions qui n’appellent pas
d’observation.
Recommandation n°
3 : Supprimer les éléments modulables de l’indemnité de
fonctions, de sujétions et d’expertise et les intégrer au complément indemnitaire annuel.
4.4
La gestion du temps de travail et des congés doit être améliorée
4.4.1
Le respect de la durée légale de temps de travail ne fait pas l’objet d’un contrôle
effectif
Depuis un protocole datant de 2002, les agents carrossois travaillaient sur la base
annuelle de 1 591 h. Depuis la mise à jour de ce document par délibération du 23 mars 2017, la
commune se conforme désormais à la durée légale de 1 607 h annuelles. Le cycle de travail est
de 35 h ou de 37 h au choix, donnant dans le second cas droit à 11 jours de RTT en sus des
25 jours de congés annuels. Par ailleurs, les agents de la police municipale sont annualisés.
En l’absence de dispositif de contrôle automatisé des horaires, la commune n’est pas en
capacité d’assurer un contrôle effectif du respect de la durée légale de travail par ses agents.
33
Décret n° 2014-513 du 20 mai 2014, article 3 : 1° En cas de changement de fonctions ; 2° Au moins tous les
quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; 3° En cas de
changement de grade à la suite d'une promotion.
34
Décret n° 2020-182 du 27 février 2020 relatif au régime indemnitaire des agents de la fonction publique
territoriale, modifiant le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article
88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
COMMUNE DE CARROS
33
4.4.2
Les heures supplémentaires sont insuffisamment encadrées
Les heures supplémentaires rémunérées sont très importantes en 2014 et 2015 avant de
baisser. Elles connaissent toutefois une tendance à la hausse depuis 2018, étant précisé qu’elles
ont atteint en 2020 leur niveau le plus haut depuis 2015, bien que de nombreux services avaient
fermé durant les deux mois et demi de confinement du printemps 2020. La commune a expliqué
cette situation par un soutien accru aux personnes isolées pendant le confinement ainsi que par
les heures supplémentaires générées par les élections municipales.
Nombre d’heures supplémentaires rémunérées
En nombre d’heures
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Total
Heures supplémentaires rémunérées
12 310
10 966
7 611
5 642
4 548
5 820
7 536
54 434
Source : CRC, d’après les bulletins de paie.
Six services sont particulièrement concernés (police municipale, enfance, restauration
municipale, petite enfance, citoyenneté état civil élections et bâtiments aménagement magasin)
puisqu’ils comptent pour la moitié du total de ces heures rémunérées.
Le conseil municipal n’a pas délibéré sur la liste des emplois dont les missions
impliquent la réalisation effective d’heures supplémentaires. Or, en vertu des dispositions de
l’article 2 du décret n° 91-875 du 6 septembre 1991
35
, «
l'organe compétent fixe, notamment,
la liste des emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d'heures
supplémentaires ouvrant droit aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires
». Cette
liste, établie par cadre d’emploi et par fonction, conditionne le versement aux agents des
indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) prévues par le décret n° 2002-60 du
14 janvier 2002, et constitue une pièce justificative exigée à l’appui de leur paiement par le
comptable public, au regard de l’annexe 1 au CGCT. Dès lors, en l’absence d’une telle liste, les
IHTS sont octroyées irrégulièrement par la commune. La chambre l’invite à régulariser cette
situation.
4.4.3
Un régime de report des congés qui a perduré après la mise en place du compte-
épargne temps
Depuis février 2018, les agents qui en ont fait la demande ont pu ouvrir un compte
épargne temps afin d’y placer leurs jours de congé non pris ou de les utiliser dans les conditions
prévues par un règlement CET dont la dernière version a été adoptée par délibération du
21 février 2019. Bien que la mise en place du CET exclut par principe la possibilité pour les
agents de reporter leurs congés au-delà du 31 décembre de l’année N, la commune leur a permis
en 2018 et 2019, de reporter leurs congés annuels et RTT non pris en N+1.
35
Décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l’application du premier alinéa de l’article 88 de la loi du
26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
34
Cette pratique était contestable car elle supposait une « autorisation exceptionnelle
36
»
du maire, ce que ne pouvait constituer une note applicable collectivement à l’ensemble des
agents.
La commune y a mis fin en 2020, le conseil municipal ayant depuis conservé cette
position lorsqu’il a statué sur le sort du reliquat de congés 2020, puisqu’il s’est limité aux
dispositions temporaires introduites par le décret n° 2020-723 du 12 juin 2020
37
, en autorisant
par délibération du 17 décembre 2020, la fixation temporaire du plafond de CET à 70 jours
pour 2020 et en passant de 5 à 8 le nombre de jours indemnisables pour cette même année.
4.5
Un absentéisme en baisse mais qui reste supérieur à la moyenne
38
La commune estime son absentéisme à 7,3 % en 2019 selon les données figurant dans
son dernier bilan social, ce qui représenterait un taux bien inférieur à celui de la moyenne de
l’ensemble des collectivités locales. En réalité, ces données manquent de fiabilité. En effet, ce
résultat ne prend en compte que les absences pour raisons de santé. En outre, il n’est atteint
qu’au moyen d’un biais dans la méthode de calcul, puisque si celui-ci résulte bien du quotient
entre le nombre de jours d’absence et le nombre d’agents, il est rapporté aux 365 jours de
l’année et non au nombre de jour ouvrés, soit 228 jours, ce qui a pour effet de minorer
substantiellement la part des absences. Il est noté que jusqu’en 2017, le nombre de jours ouvrés
était seulement de 215 jours
39
.
En réalité, le taux d’absence toutes causes confondues est deux fois plus important que
celui annoncé par la commune puisqu’il atteint 14,11 % en 2019. En se limitant aux seules
absences pour raisons de santé, il est de 10,15 %. Sur la période 2014-2019, il est en moyenne
de 16,26 % globalement et de 13,47 % s’agissant des absences médicales, connaissant toutefois
une tendance à la baisse en 2019.
L’année 2020 n’est pas prise en compte en raison de son caractère atypique, les
accidents du travail ou les formations étant en forte baisse et les autorisations spéciales
d’absences n’ayant pas été comptabilisées. Sous les réserves qui viennent d’être faites et selon
les données de la commune, l’absentéisme total et celui pour raisons de santé seraient en baisse
en 2020 respectivement avec des taux de 12,21 % et 9,87 %.
36
Aux termes de l’article 5 du décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des
fonctionnaires territoriaux.
37
Décret n° 2020-723 du 12 juin 2020 portant dispositions temporaires en matière de compte épargne-temps dans
la fonction publique territoriale pour faire face aux conséquences de l'état d'urgence sanitaire. Ce décret autorise
le dépassement du plafond de 60 jours dans la limite de 10 jours, soit au maximum 70.
38
Il est noté que la situation de l’exercice 2020 n’est pas prise en compte car elle fausserait l’analyse globale, au
regard des nombreuses absences liées aux deux confinements.
39
Les agents disposaient en effet, en vertu d’un accord sur le temps de travail de 2002, d’une semaine
supplémentaire de congés annuels ainsi que de jours de pont en complément des jours fériés.
COMMUNE DE CARROS
35
4.6
Des conditions d’attribution et de suivi de la nouvelle bonification
indiciaire peu rigoureuses.
4.6.1
La NBI est accordée très largement et sans aucun contrôle
La NBI est accordée largement au sein de la commune (
cf. supra
point 4.1.1) puisque
plus d’un tiers des agents la perçoivent. Cela s’explique en partie par la présence en centre-ville
d’un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV). Cela a pour conséquence de donner
droit aux agents exerçant à titre principal leurs fonctions au sein de ce quartier (une école ainsi
que la médiathèque), mais aussi à ceux situés en périphérie de ce quartier et
«
assurant leur
service en relation directe avec la population de ces quartiers
40
» (soit une très grande partie
des services administratifs, de la jeunesse ou culturels municipaux), à cette bonification. Cette
« NBI QPV » est aussi due aux agents exerçant dans les établissements scolaires situés en
réseau d’enseignement prioritaire, soit sept écoles sur les onze que compte la ville.
L’évolution du nombre de bénéficiaires doit toutefois alerter la commune, puisqu’il a
plus que doublé sur la période, passant de 87 à 175 agents fin 2020. La mise en place d’un
pilotage de l’attribution constitue un levier d’économies pour la collectivité.
À cet effet, la commune devrait dresser une cartographie des emplois donnant droit à
NBI, ce qu'elle n'a pas fait.
De plus, la collectivité n’est pas en capacité de contrôler les conditions dans lesquelles
cette bonification est versée. Ainsi, les listes des bénéficiaires qu’elle utilise pour son suivi
diffèrent de manière significative des données résultant des fiches de paie des agents
effectivement bénéficiaires de la NBI.
Le suivi de la NBI n’est pas fiable
Année
Nombre d’agents figurant sur la
liste des bénéficiaires
Nombre d’agents effectivement
bénéficiaires selon les fiches de paie
Différence
2014
73
87
- 14
2015
162
91
+ 71
2016
148
89
+ 59
2017
184
107
+ 77
2018
139
168
- 29
2019
183
182
+ 1
2020
121
175
- 54
Sources : commune de Carros et CRC.
40
Selon l’article 1
er
du décret n° 2006-780 du 3 juillet 2006 modifié portant attribution de la nouvelle bonification
indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale exerçant dans des zones à caractère sensible.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
36
Les données dont dispose la collectivité présentent de nombreuses anomalies. En effet,
outre les différences de chiffres, l’identité des agents varie parfois. Par exemple, en novembre
2020, 50 des 165 agents ayant effectivement perçu la NBI ne figuraient pas parmi les
bénéficiaires listés.
A contrario
, et en prenant par exemple l’exercice 2015, la liste fournie
contient 162 agents. Or, il s’avère au regard des fiches de paie que 83 de ces agents, soit plus
de la moitié de la liste, n’étaient absolument pas concernés par cette bonification cette année-là.
Ces importantes incohérences interrogent d’autant plus que les listes sont, selon la
commune, des extractions de son logiciel de paie.
L’absence de suivi se répercute parfois sur la situation des agents, la commune
régularisant tardivement le versement de la NBI aux agents dont les fonctions le justifient. À
titre d’exemple, un agent devenu fonctionnaire stagiaire le 1
er
octobre 2019 aurait dû bénéficier
de la NBI à raison de ses fonctions à compter de cette date. Or, sa situation a été régularisée en
décembre 2020, soit plus d’un an plus tard. Ces régularisations, plus ou moins tardives, sont
fréquentes au sein des services et gagneraient à être réduites, la NBI étant de droit pour les
agents dont les fonctions le justifient.
Tout ceci illustre, à nouveau, la nécessaire fiabilisation des données RH qui doit être
entreprise par la commune et le besoin de mettre en place un pilotage.
4.6.2
Des situations irrégulières
Quelques situations irrégulières méritent d’être relevées. Ainsi, Mme L., adjointe
administrative principale de 1
ère
classe, responsable du service financier, touchait 50 points
jusqu’à sa retraite en décembre 2019. Il en allait de même pour M. D., rédacteur principal de
1
ère
classe, en tant que directeur de l’administration générale jusqu’à sa retraite en août 2017.
C’est toujours le cas pour l’ancien
41
directeur des ressources humaines M. M. qui touche lui
aussi 50 points. Il s’agit là du nombre maximum de points pouvant être accordés à un
fonctionnaire territorial pour une commune de cette taille (même la DGS ne peut prétendre
qu’à 35 points) au regard des décrets n° 2006-779 et 2006-780 du 3 juillet 2006. Il n’est
accessible qu’aux agents ayant les fonctions de conseiller technique en matière de politique
sociale ou médico-sociale
42
.
Aucun des trois agents concernés n’a, à un quelconque moment, exercé de telles
fonctions, comme cela ressort des organigrammes, des fiches de paie des intéressés ou de leurs
arrêtés attributifs de NBI précédents. Pourtant, leurs derniers arrêtés attributifs de NBI leur
accordent bien 50 points de NBI du fait de l’exercice des «
fonctions de conseiller technique en
matière de politique sociale ou médico-sociale
». La réalité de ces fonctions peut être mise en
doute.
S’agissant de Mme L. et de M. D., elle a sans aucun doute eu pour but de leur permettre
d’augmenter leurs droits à pension (la NBI étant intégrée dans leur calcul), étant donné que
cette libéralité leur a été accordée à un an de leur départ à la retraite. S’agissant en revanche de
41
L’intéressé a été remplacé depuis le 1
er
février 2021, la nouvelle directrice perçoit 25 points (le nombre normal)
au titre des mêmes fonctions.
42
Annexe au décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à
certains personnels de la fonction publique territoriale.
COMMUNE DE CARROS
37
M. M., cette situation perdure depuis octobre 2016, soit plus de 4 ans. Il conviendrait d’y mettre
fin. Enfin un quatrième agent, M. G., animateur territorial, a lui aussi perçu la même
bonification de septembre 2009 à juillet 2015 au titre des mêmes fonctions de conseiller, dont
là aussi la réalité ne ressort ni des organigrammes, ni des bulletins de paie de l’intéressé.
La commune a annoncé fin 2021 avoir engagé le travail de remise en conformité de
l’attribution de la NBI et de normalisation des irrégularités constatées.
Recommandation n°
4 : Régulariser le versement de la NBI et en assurer le suivi.
5
DEUX ÉQUIPEMENTS PROBLÉMATIQUES
En matière d’information, la liste des marchés ne figure pas sur le site internet de la ville
à la date du présent contrôle, ce à quoi la commune doit remédier afin de se conformer aux
dispositions de l’article L. 2196-2 du code de la commande publique
43
et fournir une
information transparente aux usagers et candidats.
En revanche, le maire rend compte chaque année au conseil municipal des marchés qu’il
a passés en vertu de la délégation reçue au titre du 4° de l'article L. 2122-22 du CGCT. À cet
effet, la commune établit des statistiques précises concernant les marchés conclus, par type et
par montant.
La commune n’a pas conclu de délégation de service public pendant la période sous
revue et n’a pas eu recours en 2020 aux procédures dérogatoires prévues en matière de
commande publique liées à la crise sanitaire. Elle a annoncé fin 2021 avoir mis à jour son
logiciel métier et recensé les besoins par nature de commande et par services dans le cadre de
son budget 2022.
Parmi les équipements structurants réalisés dans la période la plus récente, figurent le
centre de santé et l’espace « E.COL.E » (espace collaboratif économique), créé dans les locaux
d’une ancienne école et désormais géré en régie municipale.
43
Article L. 2196-2 CCP : «
Dans des conditions et sous réserve des exceptions prévues par voie réglementaire,
l’acheteur rend accessibles sous un format ouvert et librement réutilisable les données essentielles du marché,
hormis celles dont la divulgation méconnaîtrait les dispositions de l’article L. 2132-1 ou serait contraire à l’ordre
public
».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
38
5.1
Le centre de santé
Au niveau national, des centres de santé municipaux existent principalement en région
parisienne et dans le Sud-Est de la France. Ils s’inscrivent dans un réseau de soins, en
association avec les médecins de ville et les hôpitaux. Ils offrent généralement des prestations
médicales diversifiées comme des consultations de médecine générale ou spécialisée, des soins
infirmiers ou paramédicaux. Ils sont en principe créés à l’initiative des professionnels de santé
du territoire. Ce n’est pas l’option qui a été choisie à Carros.
5.1.1
Un équipement dont la création a été décidée en 2015 mais dont la gestion n’est
toujours pas assurée fin 2021
La commune a décidé lors du conseil municipal du 5 mars 2015 de réaliser un centre de
santé / maison régionale de la santé. Cet équipement d’une capacité prévue de 500 m² devait
permettre «
la synergie et la complémentarité des activités telles que des spécialités médicales,
du dentaire et de l’orthodontie, du paramédical
». La commune prévoyait alors de couvrir par
des subventions l’équivalent de 64 % du montant prévisionnel total, estimé alors
à 1,8 M
€
HT (2,2 M
€
TTC). Ce montant comprend un surcoût de 250 K
€
lié au respect, par cet
équipement, d’exigences environnementales afin d’obtenir le label «
bâtiments durables
méditerranéens
» au niveau « or ». Ce label est délivré par l’association Envirobat BDM dont
la présidente était aussi, au moment du lancement du projet et jusqu’en août 2018, la directrice
des services techniques de la commune durant la même période.
À la suite de cette délibération, une note d’opportunité très détaillée a été réalisée afin
de présenter le projet qui est passé alors à 800 m². Cette étude reste évasive en ce qui concerne
le futur gestionnaire du centre, puisqu’elle renvoie sans plus de précision au livre III du code
de la mutualité.
Rien ne s’est passé ensuite, jusqu’à la réunion du comité de suivi en janvier 2017 puis
la tenue d’autres réunions en 2018, qui n’ont pas permis de définir les modalités d’organisation
et de fonctionnement du centre, mais dont il ressort que le partenaire principal de la commune
est la mutuelle S. Lors des entretiens de fin de contrôle les deux ordonnateurs successifs ont
indiqué que ce choix s’est opéré uniquement en vertu de la présence de cette mutuelle à Carros,
puisque celle-ci assurait des permanences à l’espace santé (qui est une autre structure, déjà en
place depuis plusieurs années). Cette méthode ne reposant sur aucune étude sérieuse sur la
capacité et la volonté du partenaire à porter le projet, va s’avérer désastreuse, comme cela sera
dit plus loin.
Malgré ces fortes incertitudes, la commune va pourtant lancer à partir de 2018 les
marchés relatifs à la construction de cet équipement (
cf. infra
).
Par la suite, et alors que les travaux ont déjà été lancés, le projet connaît un changement
de portage puisque le partenaire principal de la commune, qui jusque-là était le groupe
mutualiste S devient, à partir du printemps 2019, le groupe mutualiste O, union mutualiste
relevant du livre III du Code la mutualité disposant des agréments requis pour gérer des centres
de santé. Toutefois O a indiqué à la chambre avoir, «
dès le démarrage de sa collaboration,
émis des réserves sur la faisabilité économique du projet
».
COMMUNE DE CARROS
39
Le groupe O va devenir en septembre 2019
44
l’actionnaire principal de la SCIC
45
« Centre de santé de Carros », une société
ad hoc
créée avec la ville pour gérer l’établissement.
Les statuts de cette société signés en février 2020 révèlent que la part majoritaire des
actionnaires mutualistes (S puis O) n’a pas varié depuis la délibération de novembre 2018 ayant
autorisé la création de la SCIC, leur participation atteignant 675 K
€
contre 300 K
€
pour la
commune, un professionnel de santé et une association complétant de manière marginale le tour
de table pour 3 K
€
.
Malgré la création de cette SCIC, de nombreuses incertitudes demeurent quant au
devenir du centre. En effet, il ressort du compte rendu de la réunion qui s’est tenue à la
sous-préfecture de Grasse le 12 novembre 2019 que le plan de financement à jour du projet
ainsi que le « business plan » de la structure n’avaient pas été fournis au lancement de
l’opération. Depuis cette date, quelques réunions se sont tenues mais sans avancée concrète,
alors même que les travaux de construction avaient été lancés dès 2019 et devaient s’achever
fin 2020. En particulier, le modèle économique du centre n’était pas connu par la nouvelle
municipalité. Une réunion s’est tenue à cet effet en octobre 2020 mais n’a pas éclairci ce point.
Ce n’est qu’en novembre 2020, après une relance de la commune, que le groupe O a
confirmé son engagement dans le projet, mais à la condition «
que des solutions soient trouvés
notamment sur des financements complémentaires
», et fourni un plan de financement qui
prévoit un déficit de 1,3 M
€
sur trois ans et 945 K
€
d’investissements la première année.
Le maire a, fin décembre 2020, fait part de ses interrogations auprès d’O, sur le modèle
économique de la structure, lesquelles n’ont toujours pas été levées puisque la réunion du
25 février 2021 entre la mairie et O a conclu à la nécessité d’ajuster le diagnostic de l’offre de
soin et de définir le modèle économique du centre. Si à la mi-avril 2021, le diagnostic a bien
été mis à jour, le modèle économique n’était toujours pas connu.
En réponse aux observations provisoires, O a indiqué avoir présenté à la commune en
juillet 2021 un projet prévoyant «
une offre réduite, l’appui de l’offre d’O existante à Nice et le
transfert du SSIAD géré par O à Carros dans les locaux du centre, l’ensemble de ces mesures
ramenant le déficit de gestion entre 90 000 et 140 000 euros par an
». La mutuelle ajoute avoir
proposé à la commune, par courriel du 9 septembre 2021, de «
supporter avec
[elle]
une partie
des déficits susceptibles d’être générés par le centre de santé pendant les trois premières années
d’exploitation
(…) ».
Ces propositions n’ont pas convenu à la commune qui déplore notamment le niveau des
moyens médicaux alloués, le déficit prévisionnel de 142 k
€
pourtant en baisse par rapport aux
projet initial, ainsi que «
la mise à disposition gracieuse du bâtiment, et la question des
investissements mobiliers non tranchée (matériels informatique et mobilier 35 000 euros et
plateau technique 412 000 euros)
». Elle a par conséquent annoncé fin 2021 qu’«
un cahier des
charges de mise en concurrence
[était]
en cours de finalisation et
[allait]
être publié dans les
prochaine semaines
».
44
La délibération du 26 septembre 2019 reprend imparfaitement les statuts car elle mentionne par erreur des
montants de participation de la ville et d’O en euros et non en milliers d’euros.
45
Les société coopératives d’intérêt collectif (SCIC) ont été créées par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant
diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel. Elles ont pour objet la production ou la fourniture de biens
et de services d'intérêt collectif, qui présentent un caractère d'utilité sociale.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
40
Ainsi, l’organisation et le fonctionnement du centre ne sont toujours pas déterminés fin
2021, alors même que la structure a été livrée le 28 janvier 2021. Les démarches engagées
auprès de l’opérateur choisi ne vont pas aboutir. L’avenir de cette structure n’est donc pas
assuré.
Au final ce centre, dont la genèse remonte à 2015 n’a jamais trouvé de modèle
économique qui lui aurait permis de fonctionner. Malgré cela, la commune a construit ce
bâtiment, qui n’a toujours pas été mis en service fin 2021 et n’est toujours pas équipé, cette
situation n’étant pas en voie d’amélioration en l’absence de gestionnaire et de professionnels
de santé devant l’utiliser.
Le coût pour les finances publiques de 2,8 M
€
HT (
cf. infra
) s’avère donc à ce stade
particulièrement élevé pour un équipement inutile dans l’immédiat et dont la pérennité à terme
s’avère hypothétique, d’autant plus qu’un autre centre de santé est en cours de construction à
proximité de Carros (à Colomars, de l’autre côté du Var), ce qui pourrait compliquer encore la
recherche de débouchés pour la structure carrossoise.
5.1.2
Certains marchés passés pour la réalisation de cet équipement sont contestables
Les travaux devaient, selon la consultation, commencer le 1
er
mars 2019, mais la
notification du marché (tous lots confondus) n’ayant finalement été faite que le 10 avril, ils ont
débuté le 18 avril 2019. La livraison du centre était fixée au 31 décembre 2020 mais celle-ci a
été retardée du fait de la crise sanitaire. Ainsi, au 31 décembre 2020, restaient encore
0,33 M
€
HT de travaux à effectuer et payer sur un montant total après avenants de 2,4 M
€
HT.
Le centre a finalement été livré le 29 janvier 2021.
En prenant en compte les études préalables, la maitrise d’
œ
uvre et les travaux, la
réalisation du centre de santé a donné lieu à la conclusion de marchés pour un montant total
après avenants de 2,8 M
€
HT, soit 1 M
€
de plus que ce qui était prévu initialement. Deux
d’entre eux paraissent critiquables.
5.1.2.1
Le marché de maitrise d’
œ
uvre aurait dû être passé sous forme de concours
La maîtrise d’
œ
uvre a été confiée au groupement M / P le 23 janvier 2018 pour un
montant initial de 163 800
€
HT, lequel sera augmenté de 40 575,75
€
HT par un avenant n° 2,
soit 24,77 % du marché initial. Cette augmentation est plus de deux fois supérieure au seuil de
10 %, fixé par l’article 139-6° du décret n° 2016-630
46
, en-deçà duquel un avenant pouvait être
passé sans condition
47
. Dès lors, des doutes peuvent être émis quant à la régularité de cet
avenant.
Par ailleurs, des avenants n° 1 et n° 3 ont été pris, pour respectivement tenir compte du
changement d’identité du titulaire et forfaitiser sa rémunération. Le montant final atteint
204 375,75
€
HT, proche du seuil de procédure formalisée pour les marchés de fournitures et de
services, qui était de 209 000
€
HT au moment de la passation en 2017. Or, la commune avait fait
46
Ce seuil est toujours fixé à 10 % par l’article R. 2194-8 du code de la commande publique pour les marchés de
prestation de service, désormais applicable depuis le 1
er
avril 2019.
47
Ces conditions sont fixées aux articles 139 et 140 de de ce même code.
COMMUNE DE CARROS
41
le choix de lancer un marché de maitrise d’
œ
uvre en procédure adaptée restreinte, en lieu et place
d’un concours d’architecte. Cette option a été prise
in fine
par le maire, malgré les
conseils de
l’assistant à maîtrise d’ouvrage choisi à cet effet tendant à organiser un concours, et ce en dépit
les risques juridiques encourus qui étaient pourtant bien identifiés par la commune. L’assistant à
maîtrise d’ouvrage (AMO) avait estimé qu’en enlevant de la maîtrise d’
œ
uvre la mission
d’ordonnancement, pilotage et coordination (OPC), cela permettrait de ne pas atteindre le seuil
de procédure formalisée.
Cette mission a donc fait l’objet d’un marché distinct (17MAP053), dont elle constituait
le lot n° 3. Ce lot a été déclaré sans suite en septembre 2018. La commune n’a pas relancé de
consultation pour ce lot, mais a, au contraire, décidé de confier la mission d’OPC au maître
d’
œ
uvre par avenant n° 2 au marché, ce qui aurait donc dû logiquement conduire au
dépassement du seuil de procédure formalisée. C’est uniquement au prix d’un effort financier
consenti par le maître d’
œ
uvre, dans le cadre de la conclusion de cet avenant, que ce seuil n’a
pas été dépassé. En effet, celui-ci a baissé son taux de rémunération pour les missions de base
à 8,4 % au lieu des 11 % initiaux qui constituaient déjà un taux faible (
cf. infra
), et a forfaitisé
le tarif de la mission OPC à 20 K
€
, alors qu’elle était estimée initialement à 36 K
€
et que les
offres relatives à cette même mission, faites dans le cadre du marché 17MAP053 précité
finalement déclaré sans suite, atteignaient 33,6 K
€
HT et 36,9 K
€
HT.
Tout cela aurait pu être évité si la commune avait opté pour la procédure du concours, qui
aurait dû s’imposer en l’espèce. En effet, la rémunération du maître d’
œ
uvre pour les missions de
base (et donc sans compter la mission OPC), aurait dû se situer aux alentours de 13 %
48
du montant
des travaux, estimé dès mars 2017 par l’AMO à 1,8 M
€
et confirmé dans l’avis d’appel public à la
concurrence. La maitrise d’
œ
uvre aurait donc dû coûter environ 234 K
€
, soit 25 K
€
de plus que le
seuil de procédure formalisée, sans compter que cette somme aurait dû être augmentée à due
proportion de l’augmentation du coût des travaux, qui a finalement atteint plus de 2,4 M
€
HT.
Au final, l’ancien ordonnateur justifie «
d’avoir procédé à des choix qui ont permis de
limiter le coût de la prestation sans remettre en cause sa bonne réalisation, l’équipement ayant été
livré dans les délais
». L’AMO a quant à lui estimé que c’était « (…)
une erreur d’avoir dévolu la
mission d’OPC à la maîtrise d’
œ
uvre, tant sur le plan technique pour le bon respect du planning
imposé par le Maître d’Ouvrage, que sur le plan juridique
(…) ».
5.1.2.2
Les travaux préparatoires à la construction ont donné lieu à des irrégularités
Le marché de construction (18MAP061), lancé par avis d'appel public à concurrence
publié le 11 décembre 2018, comprend 11 lots.
48
Selon le guide de la rémunération des maîtres d’
œ
uvre, ce taux est fonction de deux variables : la complexité
liée au type de bâtiment et le montant des travaux. En l’espèce, le coefficient de complexité se situe dans une
fourchette de 0,9 à 1,4 s’agissant d’un centre de santé, soit un coefficient moyen de 1,15. Le pourcentage de
rémunération applicable au montant des travaux, pour un coefficient de complexité de 1, se situe quant à lui entre
11,4 % (taux indicatif pour 1,67 M
€
HT de travaux) et 11,2 % (taux indicatif pour 1,95 M
€
HT de travaux), soit
un pourcentage moyen de 11,3 %. Il convient donc d’affecter le coefficient de complexité de 1,15 à ce pourcentage
de 11,3 % pour obtenir la juste rémunération qui aurait dû être appliquée à la mission de base du maître d’
œ
uvre,
soit 12,995 %, que nous arrondirons à 13 %.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
42
De façon surprenante, un « lot 0 » (19MAP010), correspondant à des travaux
préparatoires à la construction, a été ajouté en mars 2019. Ce lot a été considéré comme un
marché de prestations similaires par la commune, qui l’a de ce fait passé sans publicité ni mise
en concurrence. Elle a ainsi directement confié les travaux en question à l’entreprise titulaire
du lot n° 1 (VRD - aménagements) du marché de construction, ce qu’elle ne pouvait pas faire.
En effet, selon la fiche de la direction des affaires juridiques du MINEFR
49
, les
prestations similaires sont « (…)
de nouveaux travaux ou services consistant dans la répétition
de travaux ou de services similaires à ceux qui ont été confiés au titulaire du premier marché,
à condition que ces nouveaux travaux ou services soient conformes au projet de base ayant fait
l'objet du contrat initial. Le marché de prestations similaires ne peut pas se rapporter à une
opération de travaux différente de celle prévue par le premier marché
».
En l’espèce, des travaux préparatoires sont bien prévus dans le lot 1 du marché initial,
et les travaux « supplémentaires » portent bien sur la même opération, ce point ne pose donc
pas problème. De plus, le marché initial prévoyait bien la possibilité de passer des marchés
similaires, ce qui constitue aussi une condition à leur utilisation.
En revanche, il n’y a pas de réitération de travaux déjà effectués au titre du premier
marché. En effet, si le CCAP (article 5.1) du marché similaire prévoyait un début des prestations
le 1
er
avril 2019, tandis que le lot n° 1 du marché initial (18MAP061) devait débuter le 1
er
mars
selon l’AAPC (
cf. supra
), cela s’est déroulé bien différemment. En effet, le marché de
prestations similaires s’est en réalité exécuté avant même que le marché initial ne soit conclu le
10 avril 2019. Enfin, ce lot aurait été notifié le 27 mars 2019, soit un jour avant la date de
signature par le maire de l’acte d’engagement, anomalie sans doute due à la précipitation
compte tenu de l’imminence du chantier.
Ces irrégularités auraient pu être évitées, d’autant plus qu’elles ne sont pas dues à une
impréparation de la commune dans le montage du marché de construction, puisque le lot 0 était
bien prévu dès l’été 2018, avant de disparaître à l’automne de la même année, puis de
réapparaitre sous forme de marché similaire au printemps 2019. En effet, une consultation a été
lancée en juillet 2018 sur ce seul lot, dont il apparaissait alors explicitement qu’il était inclus
dans un marché plus large de construction du centre de santé. Cette consultation s’étant avérée
infructueuse
50
, le rapport d’analyse des offres a invité la commune à négocier directement avec
trois sociétés qui n’avaient pas candidaté.
Cette négociation a abouti à la signature d’un marché (18MAP048) avec l’entreprise
S. le 28 août 2018 pour 15 320
€
HT. L’exécution de ce marché n’a en fait jamais eu lieu. En
effet, le chantier a été immédiatement arrêté pour «
raisons administratives
», cet arrêt ayant
été confirmé en septembre 2018. Ce n’est qu’après signature d’un nouveau lot 0 (marché
19MAP010) fin mars 2019 que l’ordre sera finalement donné de réaliser les prestations, qui
en réalité se confondent avec celles du nouveau lot, comme en atteste l’ordre de service n° 3
(18MAP048 et 19MAP10) au marché similaire, qui a été pris le même jour que l’ordre de
service n° 1(19MAP10) : les deux se sont finalement déroulés à partir du 2 avril 2019.
49
Ministère de l'économie, des finances et de la relance (
MINEFR
).
50
Aucune offre n’ayant été formulée, ce qui n’est pas étonnant, tout ceci s’étant déroulé en plein c
œ
ur de l’été :
l’avis est publié le 13 juillet avec une date de remise des offres au 30 juillet, incluant l’obligation d’une visite sur
site, pour un début des travaux le 31 août.
COMMUNE DE CARROS
43
Au final, la commune a conclu deux marchés dénommés lot 0 avec la même entreprise,
pour respectivement 15 320
€
HT (18MAP048) et 15 890
€
HT (19MAP10). Dans les deux cas,
elle a conclu ces marchés sans publicité ni mise en concurrence préalable. Si elle pouvait le
faire concernant le marché 18MAP048, au regard de l’infructuosité de la consultation lancée à
l’été 2018, conformément aux dispositions de l’article R. 2122-2 du code de la commande
publique, elle l’a en revanche fait irrégulièrement pour le marché 19MAP10 de prestations
similaires prévu à l’article R. 2122-7 du même code.
5.2
L’espace E.COL.E
5.2.1
La commune a agi seule en dépit d’un engagement contractuel envers la
métropole Nice-Côte d’Azur
La commune a décidé, officiellement en 2018, de créer un espace dédié au
développement économique et à l’accompagnement à l’emploi dans une ancienne école qu’elle
a déclassée à cet effet. Ce projet date en réalité de 2016, débutant lorsque la commune a confié
à la SPL AREA PACA le soin de réaliser une étude en vue de l’implantation d’un espace de
co-working sur le site de l’école. La commune est d’ailleurs devenue actionnaire de ladite SPL
cette même année 2016, en vue notamment de réaliser cette opération.
L’équipement qui a finalement été réalisé accueille sur un niveau des services de la
ville
51
et de la métropole
52
et sur deux autres niveaux des entreprises privées dans le cadre de
la pépinière d’entreprises ou de l’espace de co-working. L’animation du site a été confiée en
février 2018 à l’association A, ainsi que celle d’un espace destiné aux artisans, dénommé
« l’Artilab », situé dans la zone artisanale de la Grave
53
.
Il s’agissait principalement pour la commune de réaliser des espaces destinés à accueillir
des entreprises, dans le quartier prioritaire du centre-ville. Dans sa délibération de février 2018,
elle justifie son intervention par les engagements qu’elle a pris dans le cadre du contrat de ville
métropolitain 2015-2020.
51
La cellule communication et la direction des affaires sociales et du développement économique. La ville, qui
assure aussi l’accueil général de la structure au rez-de-chaussée, compte au total une dizaine d’agents sur le site.
52
Il s’agit d’un agent du service politique de la ville et d’un agent chargé du plan local pour l'insertion et l'emploi
(PLIE), le premier étant présent sur site à temps complet.
53
Cet équipement n’est pas examiné dans le rapport parce qu’il n’a pas fait l’objet de travaux de la part de la
commune. Elle loue une partie des locaux à la chambre des métiers et de l’artisanat de PACA qui, en lien avec la
région PACA, y dispose d’un « Fab Lab », soit un laboratoire de fabrication.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
44
En effet, ce contrat prévoit clairement un pilotage par la métropole, en lien avec l’État,
des actions menées en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville, dans des
domaines constituant trois « piliers » dont le développement économique et l’emploi font
partie. Celle-ci contribue d’ailleurs à l’activité du site puisque deux de ses agents y sont présents
pour exercer leurs missions d’accompagnement à l’emploi au titre du plan local pour l’insertion
et l’emploi (PLIE). En dépit de la compétence métropolitaine, la commune a choisi de financer
seule cet investissement
54
. En dehors de la question du contrat de ville, seule la métropole aurait
pu créer une pépinière d’entreprise et un espace de coworking, comme elle l’a d’ailleurs fait
dans l’Éco-plaine du Var à Nice
55
.
La commune ne disposait pas, quant à elle,
contrairement à ce qu’affirme l’ancien maire
qui estime que la commune pouvait intervenir dans le cadre de la clause générale de
compétence, d’une base juridique solide pour créer la structure E.COL.E. En effet, si la loi
NoTRé, qui a redéfini les compétences du bloc communal dans le domaine des interventions
économiques, permet bien aux communes d’intervenir en «
matière d'investissement
immobilier des entreprises et de location de terrains ou d'immeubles
» (article L. 1511-3 du
CGCT), il apparaît que certaines conditions posées par l’article R. 1511-14 du CGCT ne sont
pas réunies en l’espèce : aucune entreprise n’a présenté une demande avant que l’investissement
ne soit réalisé et l’investissement est entièrement réalisé sur fonds publics alors que 25 % de
l’investissement devaient être financés sans aucune aide publique. Dans ces conditions, la
commune n’était pas compétente pour réaliser l’équipement concerné. En outre, et pour la
même raison, rien ne permettait à la ville de gérer une structure comme E.COL.E. C’est sans
doute la raison pour laquelle cette gestion a été confiée à une association.
Au final, en considération des contrats passés avec la SPL AREA PACA, cet
équipement a représenté pour la commune un coût de plus de 1,9 M
€
HT. Ce coût paraît
d’autant plus important que lors de la visite sur place, l’équipe de contrôle a pu constater que
le taux de remplissage de la structure était faible : l’espace de co-working était inoccupé et très
peu de bureaux individuels étaient loués. Cela interroge quant à la pertinence de la solution
proposée par la ville aux entreprises.
5.2.2
Les conditions dans lesquelles la gestion a été déléguée à une association puis
reprise en régie sont fortement contestables
5.2.2.1
L’association A a été créée uniquement dans le but de gérer les projets E.COL.E
et Artilab
L’association A a été déclarée le 25 avril 2017. Dès le 11 mai 2017, le conseil municipal
décide de lui confier la mise en
œ
uvre de sa politique de soutien aux entreprises et, à cet effet,
conclut avec elle une convention d’objectifs et de moyens lui accordant une subvention de
30 K
€
destinée à «
soutenir financièrement les coûts de fonctionnement de l’association A la
réalisation des objectifs de la présente convention
».
54
Il peut toutefois être noté que la commune a obtenu en 2020 une aide du FEDER de 926 K
€
pour cette opération.
55
Le potentiel d’attractivité du site et les moyens qui lui sont accordés par la métropole, qui transparaissent en
carrossoise.
COMMUNE DE CARROS
45
Comme cela ressort clairement de son objet social
56
et de ses statuts, cette association
n’a pas d’autre activité que celle qui lui a été confiée par la commune, à savoir gérer pour le
compte de celle-ci les structures E.COL.E et Artilab.
L’article 3 des statuts précise que l’association devait se transformer en SCIC sans
création d’une nouvelle personne morale. De même, l’article 5 prévoit que la durée de vie de
l’association est limitée, sa dissolution devant intervenir au moment du transfert de sa
personnalité morale à la SCIC. Bien que la création de la SCIC ne puisse être faite qu’en
coopération avec la commune, les statuts évitent de mentionner la collectivité, puisque celle-ci
n’a pas compétence en matière économique.
Au final, la SCIC ne va jamais voir le jour. À la dissolution de l’association A prononcée
le 29 octobre 2019, la ville a repris seule la gestion de l’outil.
5.2.2.2
La convention avec A est en fait un marché public
La commune fait le choix de confier à A la gestion d’E.COL.E par le biais d’une
convention, assortie d’une subvention de fonctionnement. Ce faisant, elle a méconnu les
dispositions de l’article 9-1, alinéa 2, de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2020
57
qui prévoient,
s’agissant des subventions, que «
ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de
prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les
accordent
».
Or, l’association A ne dispose pas d’une activité propre mais agit exclusivement dans le
but de satisfaire un intérêt communal, comme cela ressort de son objet. Par ailleurs, ses
ressources proviennent principalement de la subvention que la commune lui verse annuellement
afin qu’elle accomplisse cette mission, qui en constitue donc la contrepartie directe.
Enfin, la convention d’objectifs et de moyens fixe dans son article 2.2 des missions
précises à l’association qui constituent les besoins exprimés par la collectivité dans ce qui
s’apparente à un cahier des charges. L’association A n’est pas à l’initiative
58
de la gestion
d’E.COL.E mais a agi à la demande de la commune qui lui a confié cette mission. Dans ces
conditions, les relations de la commune et de l’association s’analysent comme un marché public
(
CE, 23 mai 2011, Commune de Six-Fours-Les-Plages
, req. n° 342520, concernant le festival
des Voix du Gaou). De surcroît, la subvention de la ville atteignait 30 K
€
, dépassant donc le
seuil de 25 K
€
HT : elle aurait donc dû passer le marché correspondant en assurant une publicité
et une mise en concurrence préalable, ce qu’elle n’a pas fait. Il en résulte que les conditions
dans lesquelles la commune a recouru à l’association A sont irrégulières.
56
À savoir : «
développer la coopération économique, sociale et culturelle sur le territoire de Carros en lien avec
son écosystème ; accompagner ses adhérents au développement de leurs projets locaux et coopératifs en mettant
à disposition des espaces, outils et compétences mutualisés tout en assurant leur intégration dans le tissu
économique de manière durable
».
57
Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
58
Cette absence d’initiative est l’un des critères sur lesquels se base la jurisprudence pour requalifier une
subvention en concession. Voir par exemple,
a contrario
, CE, 6 avril 2007, Commune d’Aix-en-Provence
(req. n° 284736) dont le considérant principal est libellé comme suit : «
lorsqu’une personne privée exerce, sous
sa responsabilité et sans qu’une personne publique en détermine le contenu, une activité dont elle a pris l’initiative,
elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d’une personne publique de la
dévolution d’une mission de service public
».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
46
5.2.2.3
La commune a repris la gestion de la structure en régie à la suite de la défaillance
de l’association gestionnaire
Les équipements E.COL.E et Artilab ont été inaugurés en avril 2019. Au bout de
quelques mois d’existence, l’association A n’aurait pas, selon la commune, été en mesure
d’assumer la gestion de ces derniers. Cela aurait conduit à sa dissolution le 29 octobre 2019,
moins d’un mois après un changement de gouvernance, intervenu le 2 octobre 2019, mais
décidé au mois de juillet 2019 par le conseil d’administration.
Comme cela ressortait des statuts de l’association, sa dissolution devait entraîner la
reprise de son activité par une SCIC à créer. Cette dernière n’ayant jamais vu le jour, la
commune a décidé de prendre la suite de l’association et de gérer ces équipements en régie.
Bien qu’il n’y ait pas eu de discontinuité dans l’activité d’E.COL.E, la décision de
reprise en régie n’est intervenue que par délibération du 19 mai 2020, soit plus de six mois après
la dissolution d’A, durée pendant laquelle la commune s’est
de facto
substituée à l’association
en mobilisant à cet effet le personnel de sa « direction des affaires sociales et du développement
économique ».
Six mois après la décision officielle de reprise en régie, en novembre 2020, la commune
a choisi de reprendre dans ses comptes le déficit d’A, qui s’élevait à 10 400
€
au
30 septembre 2020, ainsi que les contrats de crédit-bail portant sur des photocopieurs, pour un
montant total restant à courir de 40 046
€
. Cette opération s’est donc soldée par une dépense de
plus de 50 K
€
pour la commune.
Enfin, la reprise des activités en régie prouve que la commune a considéré qu’il
s’agissait là d’un service public, ce qui d’une part confirme le caractère de marché public
attaché à la convention avec A et, d’autre part, aurait pu conduire la commune, en application
de l’article L. 1224-3 du code du travail, à proposer un contrat de droit public aux salariés de
l’association, ce qu’elle n’a pas fait.
Tout ceci montre que l’association n’était qu’un montage fictif de la commune. Celle-
ci a finalement repris l’activité en régie puis créé en décembre 2020 un règlement intérieur, qui
n’existait pas, et établi une nouvelle tarification. À cette occasion, le maire a indiqué qu’il se
donnait un an pour décider du maintien ou de l’arrêt de ces activités. Néanmoins, sa marge de
man
œ
uvre est limitée en la matière car l’aide du FEDER devrait, selon l’article 9 de la
convention attributive, être reversée
prorata temporis
en cas de modification importante du
projet dans les 5 ans suivant le paiement du solde de l’aide, lequel est prévu
en 2022. La sortie du dispositif avant 2027 aura donc un coût pour la commune.
Dans cette situation, deux solutions, toutes deux défavorables à la commune, semblent
permettre de se conformer au droit en vigueur, consistant soit à mettre fin à ce service avec
comme contrepartie le remboursement des aides du FEDER, soit à transférer cette activité à la
métropole Nice Cote d’Azur, compétente en la matière.
Chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur
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