Sort by *
Les relations
entre le ministère
du travail
et les acteurs
associatifs :
un pilotage
à renforcer
PRÉSENTATION ________________________________________________
Souvent créée
s à l’initiative des partenaires sociaux ou
grâce au
financement des collectivités territoriales, les associations, acteurs
importants du champ de l’emploi et de la formation professionnelle,
constituent un rouage essentiel pour
la mise en œuvre des politiques
publiques, tant au niveau national que local. Peu connus du grand
public, plusieurs milliers
d’organismes associatifs, de tailles et de natures
très diverses, assument des missions de service public à fort enjeu. Ils
s’adressent directement aux employeurs, aux
personnes en recherche
d’emploi et aux sala
riés pour accompagner des publics éloignés de
l’emploi
, financer les projets de formation des entreprises, des salariés et
de certains demandeurs d’emploi, gérer le régime d’assurance
chômage, contribuer au financement de l
’activité partielle
, etc.
Ces associations mobilisent des ressources publiques variées
(contributions sociales obligatoires, subventions sur fonds publics,
exonérations
de
cotisations
sociales,
crédits
européens),
qui
représentent des enjeux financiers élevés, de près de 47
Md€ en 2019.
L
es mesures prises par l’État depuis le printemps 2020
pour lutter contre
les conséquences socio-économiques de la crise sanitaire ont conforté
leur
rôle de relais de l’action publique et augmenté l’ampleur des enjeux
financiers.
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COUR DES COMPTES
328
Si la Cour examine à intervalles réguliers la gestion des
associations les plus importantes ainsi que l’efficacité et l’efficience des
dispositifs auxquels elles participent, aucune enquête transversale
n’avait été conduite jusqu’à présent sur
les relations
qu’entretiennent
l’
État
et les associations dans le champ de l’emploi et de la formation
professionnelle.
Au terme d’une enquête
menée
auprès d’une vingtaine
d
’acteurs très divers, la Cour constate que l’
État
est à l’origine d’un
processus accéléré de transformation des associations, aux résultats
contrastés (I) ; son rôle dans leur financement et, parfois, leur contrôle,
se renforce (II), sans toutefois que leur pilotage ait été porté au niveau
des enjeux actuels, marqués par les conséquences de la crise sanitaire
(III). Ces constats sont notamment illustrés au travers de deux exemples
d’associations
agissant
dans
les
domaines
de
la
formation
professionnelle et de l’insertion professionnelle et sociale des jeunes
: les
opérateurs de compétences et les missions locales.
I -
Un paysag
e associatif d’une grande
diversité,
objet d’un processus
de transformation à l’initiative de l’État
depuis 2018
La mise en œuvre des politiques publiques de l’emploi et de la
formation professionnelle s’appuie sur un grand nombre d’associations, dont
la taille, la gouvernance, le fonctionnement et le financement sont très divers
selon leurs domaines d’intervention (A). Sous l’impulsion de l’État, plusieurs
changements sont intervenus depuis 2018 pour tenter d’en rationaliser le
nombre et le fonctionnement (B). Si la transformation a été profonde et
rapide dans le champ de la formation professionnelle, le processus s’est
heurté à des résistances dans le champ de l’insertion dans l’emploi.
A -
Un même statut juridique qui recouvre
des disparités importantes dans la gestion
des structures
et leur relation à l’État
Les nombreuses associations, qui interviennent dans la mise en
œuvre des politiques de l’emploi et de la formation professionnelle, ont
peu de points communs, à l’exception de leur statut juridique régi
par la
loi de 1901. Cette forte hétérogénéité est le résultat de leur histoire et
s’explique par les spécificités de leurs champs d’intervention
:
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
329
-
assurance chômage avec l’Unédic
221
, à gestion paritaire, qui
finance les allocations chômage grâce aux cotisations patronales
et à une fraction du produit de la contribution sociale généralisée ;
-
accompagnement
de
publics
spécifiques
en
recherche
d’emploi
par des structures déployées sur le territoire, qui
bénéficient de subventions de la part de l’État, de colle
ctivités
territoriales et de l’Union européenne : missions locales et écoles de
la deuxième chance pour les jeunes, Cap emploi pour les
personnes en situation de handicap, majorité des structures
d’insertion par l’activité économique pour les chômeurs en
d
ifficulté d’insertion
;
-
appui technique aux branches professionnelles et financement
d’actions d
e formation en entreprise par les opérateurs de
compétences (Opco) à gestion paritaire, qui sont financés par des
contributions versées par les entreprises et,
pour l’essentiel, réparties
par France compétences
222
.
Autre différence, les enjeux financiers varient considérablement
d’un type de structure à l’autre. Le budget de l’Unédic s’
élevait à
39
Md€
en 2019, représentant 80
% de l’ensemble d
es concours
financiers publics perçus par ces acteurs associatifs. Certains Opco
gèrent désormais plus d’un milliard d’euros (en incluant le financement
de l’apprentissage depuis 2020), tandis que les associations les plus
petites, qui interviennent dans le champ de l’accompag
nement des
personnes en recherche d’emploi, reçoivent chacune quelques
dizaines ou centaines de milliers d’euros. Le financement d
es
associations
d’insertion
professionnelle, tous réseaux confondus, par le
ministère du travail représentait environ 1,1
Md€ en 2019.
Les associations les plus anciennes dans le champ de l’emploi et
de la formation professionnelle sont celles créées et gérées par les
partenaires sociaux
: l’Unédic en 1958, à l’invitation du Gouvernement,
l’Association pour l’emploi des cadre
s (Apec) en 1966 et les premiers
organismes de mutualisation des fonds de la formation professionnelle à
la suite de la loi Delors de 1971 qui a mis à la charge des employeurs une
obligation de formation de leurs salariés.
Dans
le
champ
de
l’insertion
prof
essionnelle, les acteurs
associatifs organisés en réseau, fortement implantés au niveau local et
cofinancés par les collectivités territoriales, ont pris leur essor à partir des
années 1970 avec les structures d’insertion par l’activité économique,
les missions locales à compter de 1982, les écoles de la deuxième
chance depuis 1997 et l’association qui pilote l’expérimentation
« Territoires zéro chômeur de longue durée » depuis 2016.
221
Cf. le chapitre du présent rapport consacré à l’assurance chômage face à la
crise sanitaire.
222
Créée le 1
er
janvier 2019, France compétences est la nouvelle institution
nationale publique chargée de la régulation et du financement de la formation
prof
essionnelle et de l’apprentissage
.
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COUR DES COMPTES
330
Selon les cas, le recours à des associations répond pour l’État à des
motivations variées
: consacrer une initiative territoriale en faveur de l’intérêt
général, associer les partenaires sociaux à une politique publique,
rechercher une plus grande agilité de mise en œuvre en dehors des circuits
administratifs traditionnels, mobiliser des ressources humaines non soumises
au plafond d’emplois voté chaque année en loi de finances, préserver un
lien de proximité avec les usagers alors que les effectifs des agents publics
en services déconcentrés tendent à se contracter, entretenir des lieux de
discussion avec des partenaires de la société civile.
Schéma n° 1 :
principaux acteurs associatifs impliqués dans la mise
en œuvre des politiques publiques de l’emploi
et de la formation professionnelle
Source : Cour des comptes
* Chiffres 2018.
Légende
: en bleu
: opérateurs de l’État
; en orange : associations à gestion
paritaire ; en rose : association à gestion patronale ; en jaune : associations
fonctionnant en réseau, financées à la fois par l’État et les collectivités territoriales.
Sigles et acronymes
: Afpa (Agence nationale pour la formation professionnelle des
adultes), AFT (Association pour le développement de la formation professionnelle
Transports et Logistique), Agefiph (Association nationale pour la gestion du fonds
pour l’insertion professio
nnelle des personnes handicapées), AGS (Association de
gestion du régime de garantie des créances des salariés), Anfa (Association
nationale pour la formation automobile), CCCA-BTP (Comité de concertation et
de coordination de l’apprentissage du bâtiment e
t des travaux publics), Epide
(Établissement pour l’insertion dans l’emploi), ETCLD (Association de gestion du
fonds d’expérimentation territoriale de lutte contre le chômage de longue
durée), E2C (écoles de la deuxième chance),
IAE (insertion par l’activi
économique), Opco (opérateurs de compétences).
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
331
B -
Un processus de transformation différencié
selon les domaines d’intervention
Depuis 2018, l’
État a engagé une rationalisation des structures
associatives, prenant des formes différentes selon les réseaux, pour rendre
leur gestion plus efficiente
: réduction du nombre d’organismes mutualisant
les fonds de la formation professionnelle, fusion entre missions locales à
défaut de fusion avec Pôle emploi, rapprochement entre les Cap emploi
et Pôle emploi, projet de fusion, finalement abandonné, entre Centre Inffo
et France compétences. Dans le même temps, il s’est assuré d’une
meilleure prise en compte de ses priorités en matière de formation
professionnelle grâce à un encadrement règlementaire et un contrôle plus
étroit sur les nouveaux opérateurs de compétences (Opco).
1 -
Un changement profond des organismes
de mutualisation des fonds de la formation professionnelle
a)
La forte évolution du périmètre et des missions des organismes
La réforme de la formation professionnelle décidée en 2009 avait
déjà procédé à une réduction du nombre d’organismes paritaires
chargés de la gestion des fonds de la formation professionnelle, tout en
laissant libres les partenaires sociaux des choix de regroupement dès lors
que le seuil minimum de collecte des contributions des entreprises était
atteint. La
dernière réforme de la formation professionnelle n’a pas
conservé cette souplesse : la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour
la liberté de choisir son avenir professionnel a donné au ministre du
travail la possibilité,
à travers la procédure d’agrément, de contraindre
le choix de rattachement des branches professionnelles aux nouveaux
opérateurs de compétences
(Opco) chargés de financer l’alternance
et certains dispositifs de formation professionnelle
223
. Elle vise à la fois à
diminuer le nombre de structures et à constituer un champ
d’intervention
économiquement cohérent pour chaque Opco.
Sur la base d’un
schéma-cible préalablement défini
224,
l
’État a
pleinement usé de ses prérogatives pour faire disparaître les deux
organismes collecteurs interprofessionnels et modifier les propositions de
regroupement présentées par les branches professionnelles.
223
11 opérateurs de compétences (Opco) ont succédé aux 20 organismes
paritaires collecteurs agréés (Opca) à compter du 1
er
avril 2019.
224
Jean-Marie Marx et René Bagorski,
Les opérateurs de compétences :
transformer la formation professionnelle pour répondre aux enjeux de
compétences
, rapport remis au ministre du travail, août 2018.
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COUR DES COMPTES
332
La recomposition du paysage institutionnel de la formation
professionnelle et de l’alternance
demeure toutefois incomplète : trois
associations continuent de bénéficier de taxes affectées
225
, bien que
leurs missions recoupent désormais en grande partie celles confiées aux
Opco : promotion des métiers, ingénierie de certification, travaux de
prospective.
La loi du 5 septembre 2018 précitée a également profondément
modifié les missions des associations à gestion paritaire dans le champ
de la formation professionnelle.
Le cœur de métier de ces organismes a été réorienté de la
collecte des contributions
et du financement d’actions de formation à
destination des entreprises de moins de 300 salariés vers le financement
de l’alternance
226
, l’appui technique aux branches professionnelles et
l’accompagnement
de
proximité
des
entreprises
de
moins
de
50 salariés. Le financement du compte personnel de formation, qui leur
incombait depuis 2014, a été transféré à la Caisse des dépôts et
consignations et le montant des moyens consacrés au financement des
plans de développement des compétences a été réduit. Enfin, la
collecte des contributions finançant la formation professionnelle et
l’alternance sera transférée aux Urssaf et à la Mutualité sociale agricole
à compter du 1
er
janvier 2022.
Malgré l’ampleur de ces changements et le délai très court prévu
pour la mise en œu
vre de la réforme, les anciens organismes ont
fusionné au 1
er
avril 2019 pour donner naissance aux 11 nouveaux Opco,
qui assument l’ensemble de leurs nouvelles missions depuis le 1
er
janvier
2020. Les dernières conventions d’objectifs et de moyens ont été
signées
avec le ministère du travail au plus tard à l’été 2020, malgré le contexte
de crise sanitaire.
Dans le même temps, les Fonds paritaires de gestion du congé
individuel
de
formation
(Fongecif),
organismes
paritaires,
interprofessionnels et régionaux
chargés de conseiller, d’orienter et
d’accompagner les salariés dans leurs projets professionnels de formation
et de financer les congés individuels de formation, ont été remplacés par
dix-huit
commissions
paritaires
interprofessionnelles
régionales,
qui
s
’appuient désormais sur des associations dénommées «
Transitions Pro ».
Ces nouvelles entités financent le compte personnel de formation dans le
cadre des projets de transition professionnelle. Elles n’assurent plus qu’un
225
AFT (Association pour le développement de la formation professionnelle
Transports et Logistique), Anfa (Association nationale pour la formation
automobile) et CCCA-BTP (Comité de concertation et de coordination de
l’apprentissage du bâtiment et des travaux publics
).
226
J
usqu’à fin 2019, le financement des contrats d’apprentissage relevait à titre
principal de la compétence des régions.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
333
suivi de la mise en œuvre du conse
il en évolution professionnelle au
bénéfice des salariés, dont la délivrance a été transférée depuis le
1
er
janvier 2020 à des opérateurs régionaux désignés, par voie d’appel
d’offres, par France compétences.
Enfin,
le
Fonds
paritaire
de
sécurisation
des
parcours
professionnels (FPSPP), association nationale à gestion paritaire, a été
supprimé le 1
er
janvier 2019 et une partie de ses missions a été reprise par
France compétences, établissement public à caractère administratif.
b)
Un contrôle plus étroit par l’
État
Depuis 2019, le contrôle de l’activité et du fonctionnement des
Opco est plus strict que celui existant antérieurement vis-à-vis des
anciens
organismes
collecteurs
paritaires
agréés
(Opca).
Non
seulement l’
État agrée les organismes, signe des conventi
ons d’objectifs
et de moyens avec eux et peut diligenter des contrôles, mais il est
également
désormais
représenté
au
sein
de
leurs
conseils
d’administration
par un commissaire du Gouvernement et un contrôleur
d’
État. En cas de dysfonctionnements répétés ou de défaillance, le
ministre du travail peut nommer un administrateur provisoire, après mise
en demeure, dans les conditions fixées par le décret n° 2018-1209 du 21
décembre 2018. Cet administrateur provisoire gère et représente l’Opco
par substitution au
conseil d’administration et à la direction générale.
La nomination d’une administratrice provisoire à la tête
de l’opérateur de compétences de la construction (Constructys)
Si le champ couvert par le nouvel Opco (construction,
bâtiment et travaux publics) a fait consensus, son fonctionnement
interne a été perturbé par un conflit entre les partenaires sociaux.
Toutes les instances paritaires de l’opérateur ont été suspendues à
la suite de l’annulation des statuts de l’Opco par le tribunal judiciaire
de Paris en février 2020. Par un arrêté du 27 février 2020, le ministère
du travail a nommé une administratrice provisoire pour une durée
initiale de six mois, renouvelée jusqu’au 2
0 septembre 2021. Malgré
les difficultés de gouvernance, l’Opco Constructys a ét
é en mesure
de poursuivre ses activités et d’adopter un plan de relance e
n
juillet 2020 pour soutenir les entreprises dans le contexte de crise
sanitaire.
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COUR DES COMPTES
334
2 -
L’échec du projet de rapprochement entre les missions
locales et Pôle emploi
L’État a souhaité rat
ionaliser les réseaux associatifs des missions
locales et des Cap emploi, qui accompagnent les personnes en
recherche d’emploi
, en les rapprochant des agences de Pôle emploi.
Missions locales et Cap emploi : des réseaux spécialisés
d’accompagnement vers l’emploi
Les «
missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des
jeunes » ont été créées en 1982 pour fournir un accompagnement
global aux jeunes âgés de 16 à 25 ans qui rencontrent des difficultés
pour accéder à l’autonomie ou à l’emploi
, en recherchant les solutions
appropriées en matière de santé, logement, maîtrise des savoirs de
base, qualification professionnelle, etc. L’essentiel des 13
500 salariés de
ces 436 associations accueillent les jeunes dans plus de 6 800 lieux pour
les inform
er, les orienter et les accompagner dans l’élaboration et la
mise en œuvre de leur projet d’emploi ou de formation. Pour conduire
leur action, les missions locales ont bénéficié de l’aide financière de
l’État à hauteur de
396
M€ en 2019, ainsi que de subve
ntions des
collectivités territoriales et du Fonds social européen.
Autres
exemples
d’associations
spécialisées
dans
l’accompagnement de publics particuliers, les Cap emploi aident
les personnes en situation de handicap à chercher un travail et à se
maintenir en emploi. Présents dans presque chaque département,
les 97 Cap emploi emploient plus de 2 200 salariés, pour un budget
total de 149 M€ en 2020.
En 2018, la tentative de fusion du réseau des missions locales avec
celui de Pôle emploi, qui est le plus important établissement public de
l’
État, a dû être abandonnée face au refus exprimé par les élus locaux,
qui cofinancent et président ces structures. À défaut, le ministère du
travail a encouragé la fusion des associations situées dans les zones
géographiques les plus densément couvertes.
En revanche, le processus de rapprochement géographique des
agences de Pôle emploi et des Cap emploi, est en meilleure voie. À ce
jour, 19
sites pilotes testent des lieux uniques d’accompagnement, à
travers la présence
d’équipes de conseillers des Cap emploi au sein des
agences de Pôle emploi. La première phase d’extension, prévue
initialement pour janvier 2021, a été reportée en raison de la crise
sanitaire.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
335
II -
Le rôle croissant de l’
État
dans le financement des associations
Une part de plus en plus importante des ressources publiques
reçues par les associations dépend directement ou indirectement de
l’État. Cela peut conduire à une perte d’autonomie des acteurs
associatifs (A) et à une évolution de la position de l’État
comme garant
financier en cas de difficulté, particulièrement en période de crise (B).
A -
Une perte d’autonomie de gestion en raison
de schémas de financement de plus en plus liés
à l’État
1 -
Une vraie réduction des marges de manœuvre
financières des opérateurs de compétences
Si la loi du 5 septembre 2018 précitée a confié aux Opco la mission
nouvelle de financement des contrats d’apprentissage, les modalités
retenues ne leur laissent pas de marge de manœuvre
: le niveau de prise
en charge par contrat est validé par France compétences, sur
proposition des branches professionnelles.
S’agissant de la formation professionnelle des salariés hors
alternance, la même loi a réduit les moyens alloués aux Opco et leur
capacité à développer une ingénierie financière pour combiner les
financements.
D’une part, la masse des financements alloués aux Opco en ce
domaine a diminué du fait de la dotation versée chaque année par
France
compétences au budget de l’
État (1,6
Md€ en 2020)
, pour
contribuer au financement de la formation professionnelle des
demandeurs d’emploi. D’autre part, le compte personnel de formation
n’est plus financé par les Opco et l’enveloppe consacrée au
financement des plans de développement des compétences, dont le
bénéfice n’est plus ouvert aux entreprises de 50
salariés et plus, a été
réduite par France compétences, dans le cadre des fourchettes fixées
par voie règlementaire pour répartir les fonds de la formation
professionnelle (et rappelées dans le schéma ci-après).
Enfin, les Opco ne conservent plus les contributions versées par
leurs entreprises adhérentes, mais reçoivent des dotations calculées par
France compétences en fonction de la taille de leurs entreprises
adhérentes et du nombre de salariés couverts.
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COUR DES COMPTES
336
Du fait de l’évolution de leur périmètre d’intervention et de ces
nouvelles règles de répartition de la ressource, certains Opco ont connu
une diminution très sensible des moyens financiers qu’ils peuvent mobiliser
sur les contributions légales pour accompagner les entreprises dans leurs
projets de formation des salariés. C’est pourquoi l’État a incité les Opco,
dans les conventions d’objectifs et de moyens signées avec eux, à
rechercher des cofinancements externes en provenance des branches
professionnelles, des entreprises et du Fonds social européen (FSE).
Schéma n° 2 :
parts de la contribution unique des entreprises
pour la formation professionnelle et l’alternance gérées par les Opco
Note de lecture : les enveloppes financières en jaune correspondent aux financements
gérés par les Opco. Les fourchettes exprimées en points de pourcentage reflètent les
marges de manœuvre règlementaires laissées au conseil d’administration de France
compétences pour répartir le produit de la contribution unique au financement de
l’alternance et de la formation professionnelle une fois déduit le financement consacré
à la formation des demandeurs d’emploi.
Source : Cour des comptes
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
337
2 -
Des financements publics de plus en plus morcelés
qui complexifient la gestion des associations
Les associations peuvent bénéficier de subventions versées par
l’État et les collectivités territoriales, mais aussi de fonds attribués par voie
d’appels à projets au niveau national et au niveau régional, qu’il
s’agisse de crédits de l’Union e
uropéenne (
via
principalement le FSE) ou,
depuis 2018, de financements du plan d’investissement dans les
compétences.
Amplifiée
depuis
2018,
la
multiplication
des
sources
de
financement permet de diversifier les ressources disponibles et de
soutenir certaines innovations. Toutefois, elle rend plus complexe et plus
coûteuse la gest
ion de ces associations. En outre, lorsqu’elle risque de
se substituer à des financements pérennes, la multiplication des
cofinancements sur projets fragilise les structures les plus petites.
En raison du coût d’ingénierie, parfois dissuasif, nécessaire pour
accompagner la montée en charge des financements spécifiques en
lieu et place des subventions de fonctionnement, la réponse aux appels
à projets et le suivi de leur mise en œuv
re nécessitent la mobilisation de
ressources complémentaires (humaines, financières, matérielles).
L’importance des finan
cements spécifiques
: l’exemple
des budgets des missions locales de Paris et de Marseille
Lors du contrôle des missions locales de Paris et de Marseille,
la Cour a constaté le poids croissant des financements spécifiques
dans le budget de ces associations et la multiplication des lignes de
financement nécessitant un financement distinct.
Alors que ces financements spécifiques représentaient une
part marginale des ressources par rapport aux subventions
d’exploitation, ils contribuent désormais respectivement à 32
% et
36 % des ressources totales des deux associations. Pour la seule
mission locale de Marseille, 22 lignes de subventions différentes ont
été recensées, environ les trois
quarts provenant de l’État et de
Pôle emploi, le reste correspondant à des financements de
collectivités territoriales. La mission locale de Paris a, quant à elle,
enregistré jusqu’à 35 lignes de financement.
La variété et la complexité des flux financiers, en raison des
décalages dans les cycles de vie des différents projets, peuvent aussi
conduire à de fortes variations du niveau moyen de trésorerie et imposer
de mobiliser des lignes de crédits au
près d’éta
blissements bancaires.
L
’absence de visibilité
sur la pérennité des financements constitue
également un frein à des recrutements en contrat à durée indéterminée
de professionnels et à l’adaptation des locaux à l’activité
.
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COUR DES COMPTES
338
Enfin, le recours au FSE expose les associations à des risques de
contentieux
en
cas
d’inélig
ibilité
des
dépenses
déclarées
ou
d’insuffisances dans la prod
uction de pièces justificatives. Certains
organismes renoncent à solliciter des financements européens en raison
de la complexité et de la lourdeur du formalisme administratif, ainsi que
des tensions financières que les flux de recettes engendrent sur la
trésorerie des structures.
B -
L’État, garant financier
ultime des associations
en période de crise
1 -
Un soutien financier ponctuel en cas
de défaillance isolée
Selon les circonstances, l’État peut apporter son concours
financier pour soutenir une association en difficulté en attendant que les
mesures
de
redressement
et
l’amélioration
de
la
conjoncture
économique permettent de combler ces déficits.
Hormis le cas particulier de l’Unédic, les risques financiers attachés
aux associations sont de plusieurs natures : baisse des ressources
provenant de contributions sociales obligatoires, désengagement
d’autres contributeurs ou encore mauvaise gestion
.
Le dialogue de gestion entre les services déconcentrés du
ministère du travail (Direccte) et les acteurs associatifs implantés sur
l’ensemble du territoire est régulier et solide, mais le ministère du travail
ne dispose pas au niveau national d’une bonne
visibilité sur leur situation
financière. En région, la mise en place de « conférences des
financeurs », pourtant prévue par les instructions nationales (notamment
pour les missions locales), n’est pas partout effective. Pourtant, l’intérêt
d’un dialogue approfondi entre l’
État et les autres financeurs est majeur
pour s’assurer de la cohérence des financements apportés et des
méthodes d’évaluation des résultats, mais aussi pour prévenir le
désengagement de certains cofinanceurs ou faire face à une situation
financière dégradée. Dans ces deux dernières hypothèses, l’
État
examine un ensemble de critères (marges financières de la structure,
capacité à trouver un autre cofinanceur, abandon ou refonte de
certaines actions, etc.) avant de statuer sur un éventuel complément
de financement.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
339
2 -
Une protection exceptionnelle et d’ampleur
pendant la crise sanitaire de 2020
Dès le déclenchement de l’épidémie de covid
19, au premier
trimestre 2020, l’État a soutenu financièrement les acteurs associatifs
ancrés dans les ter
ritoires pour qu’ils assurent la continuité du service
public et jouent leur rôle face aux conséquences économiques et
sociales de la crise sanitaire.
Ainsi, en complément des mesures générales de soutien aux
entreprises prises par le Gouvernement, le ministère du travail a maintenu,
en dépit de la baisse d’activité enregistrée pendant le confinement, le
niveau des subventions versées aux missions locales, aux écoles de la
deuxième chance et aux Cap emploi. Il s’agissait de préserver la
capacité des acteur
s du service public de l’emploi à accompagner les
publics particulièrement vulnérables au chômage. Les structures
d’insertion par l’activité économique
227
ont également bénéficié du
redéploiement des crédits non consommés, au titre des subventions qui
leur sont habituellement octroyées. En effet, une partie de ces subventions
n’avait pas lieu d’être versée
,
compte tenu de la baisse d’activité
enregistrée pendant le premier confinement. Les crédits non consommés
ont été employés au second semestre 2020 à financer des mesures de
soutien et d’aide au développement de ces structures.
3 -
Un poids de l’
État dans le financement des acteurs
associatifs qui v
a croître avec la mise en œuvre
du plan de relance
La part des financements de l’État dans les ressources des
acteurs
associatifs va augmenter en raison de la place donnée à ceux-ci dans
la m
ise en œuvre du plan de relance.
Plus de 5
Md€ sur les 16,4
Md€ de crédits prévus au titre du volet
emploi sur 2020-2021 sont financés ou gérés par des acteurs associatifs
liés à l’
É
tat, pour préserver les emplois grâce à l’activité partielle,
accompagner
vers
l’emploi
davantage
de
jeunes,
financer
l’accélération de l’apprentissage, ainsi que la formation des salariés
placés en activité partielle
228
ou en reconversion professionnelle. Le
financement d’acteurs associatifs par le plan de relance dans le champ
de l’emploi (hors Unédic) et de la
formation professionnelle devrait
représenter environ 3
Md€.
227
Cour des comptes,
L’insertion des chômeurs par l’activité économique
,
rapport public thématique, La Documentation française, janvier 2019.
228
Dès le printemps 2020, les Direccte ont délégué aux Opco l’instruction et le
financement de l’essentiel des dossiers de formation
des salariés placés en
activité partielle.
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COUR DES COMPTES
340
Tableau n° 1 :
mesures du plan de relance 2020-2021 financées
ou gérées par des acteurs associatifs dans le champ de l’emploi
et de la formation professionnelle
Source : Cour des comptes à partir du plan de relance annoncé par le Gouvernement le
3 septembre 2020
III -
Malgré les moyens exceptionnels
mobilisés face à la crise, des difficultés
financières persistantes et un pilotage
qui reste à renforcer
Si la principale difficulté, antérieure à la crise et amplifiée depuis
le printemps 2020, est, pour les associations, de nature financière (A), la
crise révèle aussi des limites dans la gouvernance partagée entre
l’
État
et les acteurs associatifs (B).
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
341
A -
Des tensions sur le financement amplifiées
par les conséquences de la crise
1 -
Des points d’alerte antérieurs à la crise
Certains organismes associatifs présentaient déjà avant la crise
des signes de fragilité financière. Ainsi, les structures associatives de
l’insertion par l’activité économique, peu rentables,
ne sont pas en
mesure de constituer des réserves de financement et doivent mobiliser
des lignes de trésorerie et d’emprunt afin de faire face à leurs besoins
de financement.
Les missions locales, mises sous tension par le déploiement de la
Garantie jeunes et le versem
ent parfois tardif des subventions, n’ont pas
non plus de
marges de manœuvre pour absorber des pertes de
recettes, financer des dépenses exceptionnelles ou dégager une
capacité d’investissement
.
2 -
La baisse des ressources des organismes financés
par des contributions sociales en 2020
La
crise
sanitaire
place
les
organismes
percevant
des
contributions sociales (
comme l’
Unédic,
l’
AGS ou les Cap emploi
via
l’Agefiph)
dans une situation délicate. D
’un côté, le
urs recettes
diminuent,
en raison de la chute de l’act
ivité et des disparitions
d’entreprises, de l’importance
du nombre des salariés placés en activité
partielle
229
et en arrêt maladie et des reports et annulations de charges
sociales. D
e l’autre, le
urs dépenses augmentent en raison des besoins
d’accompagnemen
t des personnes touchées par la crise (indemnités
d’activité partielle, prise en charge des créances salariales lorsque
l’entreprise est placée en procédure collective
, allocations chômage,
etc.).
Les Opco subissent également les conséquences de la baisse des
recettes
finançant
l’alternance
et
la
formation
professionnelle.
France compétences leur a ainsi notifié, en juillet 2020, une diminution
du montant de l’enveloppe consacrée au financement des plans de
développement des compétences.
229
L’indemnité d’activité partielle n’est soumise qu’à la CSG sur les revenus de
remplacement et à la CRDS.
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COUR DES COMPTES
342
3 -
La crise, révélateur des fragilités structurelles de
financement de la formation professionnelle
Si le rapport sur les conséquences financières de la réforme de
l’apprentissage et de la formation professionnelle remis par l’Inspection
générale des finances et l’Inspection gé
nérale des affaires sociales en
mars
2020
mettait
déjà
en
évidence
la
nécessité
d’ajuster
le
financement et la régulation du système issus de la loi du
5 septembre 2018 précitée, la crise sanitaire a nettement accru les
besoins de financement non couverts.
L’impasse financière structurelle réside dans le décalage entre,
d’un côté, des dépenses
particulièrement rigides (fonds de concours à
verser au budget de l’État pour financer la formation des demandeurs
d’emploi
) ou potentiellement très dynamiques (alternance et compte
personnel de formation)
et, de l’autre, des recettes plus incertaines qui
dépendent de
l’évolution de la masse salariale
(- 6,9 % selon le projet de
loi de finances pour 2021). Ainsi, la baisse de la masse salariale résultant
de la crise et
l’absence de levier de régulation du système à court terme
ont provoqué des difficultés très importantes de financement du
système dès 2020.
Deux mesures financières ont été annoncées à ce jour pour
permettre à France compétences de continuer à financer les Opco et
les autres acteurs de la formation professionnelle et de l’alternance
: le
conseil d’administration de l’opérateur a voté une autorisatio
n
d’emprunt
à hauteur de 1,5
Md€ en juin 2020 et l’État a prévu le
versement d’une subvention exceptionnell
e de 750
M€
en 2021, dans le
cadre du plan de relance. Un décret devrait doter le conseil
d’administration de France compétences de marges de manœuvre
pour ajuster les fourchettes de répartition des ressources collectées entre
les différents dispositifs de formation et assurer, en priorité, le
financement des contrats d’apprentissage.
Les Opco bénéficient aussi depuis le printemps 2020 de fonds
supplémentaires directement attribués par l’
État dans le cadre du plan
de relance pour financer la formation des salariés placés en activité
partielle. Ils contribueront également à mettre en œuvre le nouveau
dispositif de transitions professionnelles collectives annoncé par le
Gouvernement fin octobre 2020, qui reposera principalement sur les
associations Transition pro. Ces deux dispositifs sont financés par le
FNE- Formation, sur le budget de la mission
Travail et emploi
.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
343
B -
Un enjeu de performance et de sécurisation
financière
1 -
Prendre en compte les réalités de la gestion
associative dans la démarche de maîtrise des risques
Les risques opérationnels et financiers que prend l’État en
recourant à des structures associatives pour mettre en œuvre des
dispositifs en matière d’emploi et de formation professionnelle ne sont
pas bien pris en compte dans la démarche de contrôle interne du
ministère du travail.
Le sujet de la maîtrise des risques est généralement absent des
c
onventions pluriannuelles d’objectifs signées entre l’État et les
associations.
Malgré la situation critique de certains organismes et la détection
de plusieurs cas de fraudes, t
rès peu d’associations ont
déployé une
démarche de contrôle interne
structurée (avec une note d’organisation
interne, une carte des processus, une carte des risques, un plan d’action
et des contrôles de supervision) par manque de res
sources et d’intérêt
,
leur priorité étant de mettre
en œuvre
les missions de service public qui
leur ont été confiées.
De son côté, l’État
dispose de peu de ressources,
ne s’étant pas
doté de ligne de crédits spécifiques, ni de moyens humains pour réaliser
régulièrement des audits flash sur les organismes associatifs.
Une démarche de maîtrise des risques en cours de construction
par les opérateurs de compétences
Alors que les Opca avaient peu investi ce sujet, les Opco se
sont engagés dans la construction
d’une démarche de contrôle
interne. À ce jour, si le recours à un commissaire aux comptes est
systématiquement prévu, la réalité des moyens mobilisés et des
outils et procédures mis en place en matière de contrôle interne
reste toutefois très hétérogène d
’une structure à l’autre. Seul un
Opco a mis en place et systématisé une déclaration d’intérêts
pour l’ensemble de ses administrateurs.
Compte tenu des volumes financiers en jeu et des risques
de fraude dans le domaine de la formation professionnelle, un
échange de bonnes pratiques entre les Opco serait bienvenu.
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COUR DES COMPTES
344
2 -
Adapter les systèmes d’information au pilotage
des politiques publiques
Déjà limités avant la crise sanitaire de 2020, les outils de pilotage
des associations par l’
État ne sont pas à la hauteur des volumes
financiers exceptionnels mobilisés au cours des derniers mois.
Les systèmes d’information utilisés doivent satisfaire
plusieurs
objectifs : être facile
d’utilisation par les
personnels des associations,
traiter les informations de façon homogène, avoir la capacité à mettre
en œuvre de nouveaux dispositifs, respect
er les règles de gestion des
dispositifs et être en capacité de permettre le partage d
informations
de qualité
entre les associations et l’
État. Or, les systèmes de gestion sont
laissé
s à l’initiative des acteurs associatifs dans la plupart des cas, l’
État
s’investissant dans les systèmes d’information attachés à l’allocation des
moyens et à la remontée des données de suivi.
À ce jour, l
e système d’information du
réseau des missions locales,
outil
ad hoc
intégré, fait exception. Il présente toutefois de nombreuses
limites
d’emploi.
I-Milo : une application métier partagée, qui nécessite encore
des améliorations
Ayant succédé à d’autres applications développées dans
les années 1990, I-Milo est un outil mis à disposition des missions
locales par l’État depuis 2015 afin d’aider les structures dans la
gestion de leur activité et de données utiles au pilotage.
I-
Milo présente l’originalité d’être un système d’information
dont le développement et la maintenance sont assurés dans le
cadre d’une délégation de service public, en cours de
renouvellement, dont le financement est conjointement assuré
par l’État et les missions locales, l’État prenant à sa charge les
évolutions
de
l’outil
induites
pa
r
des
changements
de
réglementation.
Le recours à la délégation de service public, décision
atypique, n’a pas donné lieu à un fonctionnement pleinement
satisfaisant du point de vue des missions locales, leurs besoins
d’évolution de l’outil n’étant pas suf
fisamment pris en compte par
le délégataire selon elles. L’Union nationale des missions locales
souhaiterait être davantage associée au pilotage de la
délégation de service public pour y remédier.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
345
Pour les autres associations organisées en réseau (Cap emploi,
écoles de la deuxième chance, structures d
’insertion par l’activité
économique)
, l’État déploie des outils
ad hoc
qui pourraient également
être améliorés. À
titre d’exemple
, le site extranet développé par
l’
Agence de services et de paiement pour le financement et le pilotage
des structures
de l’insertion par l’activité économique
oblige les services
de l’
É
tat à un travail chronophage de saisie d’informations
.
Compte tenu des volumes financiers en jeu, la priorité devrait être
donnée à la création de systèmes de remontée automatique de
données
issues
des
systèmes
de
gestion
des
opérateurs
de
compétences (près de 10
Md€
gérés
) et des structures d’insertion par
l’activité économique (1,5
Md€).
3 -
Déployer une démarche d’évaluation à la hauteur
des enjeux financiers
L’évaluation de la performance des d
ispositifs en matière
d’emploi et
de formation professionnelle est fragilisée par trois facteurs :
la c
apacité inégale de production d’études et d’évaluation par les
acteurs associatifs, le temps moyen de production des études et
l’a
pproche par dispositif, en fonction du statut des publics bénéficiaires
(demandeu
rs d’emploi, j
eunes, salariés, etc.), qui ne permet pas de
suivre l
e parcours vers l’emploi
des personnes ayant bénéficié d’une
action de formation ou d’un accompagnement particulier
. Cette
analyse des trajectoires est pourtant nécessaire pour évaluer la rapidité,
la pérennité
et la qualité du retour à l’emploi.
Des progrès méthodologiques sont intervenus au cours des
dernières années, par exemple avec la constitution de groupes
homogènes permettant de comparer la performance des missions
locales avec celles de structures placées dans une situation similaire. La
démarche d’évaluation des missions locales pourrait à ce titre servir
d’inspiration pour les autres
organismes structurés en réseau.
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COUR DES COMPTES
346
Les missions locales : des progrès dans la démarche
d’évaluation
à conforter
Le
renouvellement des conventions d’objectifs et de
moyens (COM) en 2019 a été l’occasion de redéfinir la démarche
d’évaluation de la performance des missions locales. L’allocation
des moyens est davantage conditionnée au niveau de
performance des entités (avec une part variable représentant
10 % des ressources).
Les données permettent à chaque mission locale de
comparer ses résultats avec la moyenne nationale, la moyenne
régionale et celle des structures de son groupe de référence, sur
la base de 10 indicateurs clés nationaux
parcours du jeune
accompagné, offres de service à destination des entreprises,
efficience de la structure, etc.
À ce jour, la démarche présente néanmoins plusieurs
limites : manque de fiabilité de certains indicateurs, absence de
valor
isation du travail d’accompagnement social des jeunes,
sorties positives limitées à l’obtention d’un emploi ou d’un contrat
en alternance, absence de suivi de cohorte de jeunes pour
mesurer à moyen-
long terme l’apport de l’accompagnement par
les missions locales, etc.
Pour autant, une telle démarche n’est utile que si elle permet
d’exploiter des données produites de manière régulière et fiable sur les
résultats obtenus, pour piloter les dispositifs et orienter l’allocation des
moyens vers les dispositifs et les structures les plus efficaces. Elle
permettrait de conforter la modulation des ressources à la performance
qui a été introduite pour les missions locales, comme pour les écoles de
la deuxième chance ou les structures d’insertion par l’activité
économique.
Les données de la déclaration sociale nominative (DSN)
230
,
couplées aux données produites par les gestionnaires des dispositifs,
offrent une opportunité pour faire évoluer à moyen terme les modalités
de production des indicateurs de résultats. Elles devraient également
permettre de réaliser des évaluations reposant sur des études de
cohortes, même si la DSN ne couvre pas toutes les situations d’emploi et
si les données restent à fiabiliser
afin de s’assurer que tous les
changements de situation sont bien pris en compte.
230
Généralisée depuis le 1
er
janvier 2019, la DSN remplace la vingtaine de
déclarations périodiques ou évènementielles adr
essées jusqu’alors par les
employeurs aux organismes sociaux chargés de collecter des cotisations. Les
données sont transmises mensuellement et de manière dématérialisée par
l’intermédiaire des logiciels de paie.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
347
Comme en matière de maîtrise des risques, il revient à l’État
d’impulser la
conception des outils et la mise en commun des travaux
pour éclairer les décisions d’allocation des moyens vers les dispositifs et
les structures les plus efficaces.
S’agissant des Opco, l’enjeu
consiste
pour l’
État, en se détachant
du système en vigueur à l’époque des Opca, à obtenir que les
organismes soient réellement intéressés au respect des objectifs fixés par
les conventions d’objectifs et de moyens, qu’il s’agisse des plafonds de
frais de gestion comme des objectifs concernant l’activité des
opérateurs. Il importe donc qu’un avenant aux conventions signées
avec l’
État intervienne rapidement en 2021 pour tirer les conséquences
de la crise sanitaire et qu’u
ne attention soit portée à la formulation
des indicateurs.
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS ________________________
Les associations, acteurs essentiels des politiques publiques de
l’emploi et de la formation professionnelle, se sont adaptées aux
différentes
réformes
engagées
par
l
’État
depuis
2018.
Les
transformations,
profondes
dans
le
champ
de
la
formation
professionnelle, n’ont –
sauf exception
pas remis en cause leur statut,
qui permet réactivité, ouverture à des partenaires d’horizons divers et
ancrage territorial.
De
l’examen des relations entre l’État et les associations
et même
si des spécificités importantes caractérisent les différentes catégories
d’acteurs, il ressort qu’une attention insuffisante est portée à l’intérêt
d’approches
transversales
concernant
la
détection
des risques
financiers, la professionnalisation des ressources humaines, l’adaptation
des
systèmes
d’information,
la
maîtrise
des
risques
ou
encore
l’évaluation de la performance. Les conséquences de la crise sanitaire
rendent ces préoccupations pourtant essentielles pour assurer la qualité
et la bonne maîtrise des politiques de l’emploi et de la formation
professionnelle, dans un contexte qui requiert le déploiement de
moyens en forte augmentation.
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COUR DES COMPTES
348
La Cour formule quatre recommandations pour améliorer le
pilotage de ces structures et des politiques publiques
qu’elles gèrent
:
1.
construire des indicateurs partagés reflétant la santé financière des
structures associatives et prenant en com
pte l’ensemble des
financements (ministère chargé d
e l’emploi
et acteurs associatifs) ;
2.
intégrer dans la démarche de contrôle interne du ministère chargé
de l’emploi
les risques de gestion liés au recours aux acteurs
associatifs
(ministère chargé de l’emploi)
;
3.
p
orter une attention plus marquée dans les conventions d’objecti
fs
et de moyens à la qualité des moyens (ressources humaines,
systèmes d’information) et à la maîtrise des risques
(ministère chargé
de l’emploi)
;
4.
a
méliorer la mesure et l’analyse de
s résultats des structures
(ministère
chargé de l’emploi) :
- en élaborant, pour les entités organisées en réseau, des groupes
homogènes de comparaison des résultats obtenus sur des
indicateurs nationaux ;
-
en définissant une feuille de route en vue d’exploiter les
données
de la déclaration sociale nominative (DSN).
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Réponses
Réponse du Premier ministre
..................................................................
351
Réponse du président de l’Union nationale
des missions locales
...................................................................................
354
Réponse de l’administratrice provisoire
de l’opérateur
de compétence de la construction Constructys
................................
356
Destinataires n’ayant pas d’observation
Président de l’opér
ateur de compétences AFDAS
Président de l’opérateur de compétences ATLAS
Président de l’opérateur de compétences Ocapiat
Président de l’opérateur de compétences OPCO Santé
Président de l’opérateur de compétences Uniformation
Destinataires n’ayant pas
répondu
Président de l’opérateur de compétences Opco 2i
Président de l’opérateur de compétences AKTO
Présidente de l’opérateur de compétences Opcommerce
Présidente de l’opérateur de compétences Entreprises de Proximité
Président de l’opérateur de com
pétences OPCO Mobilités
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RÉPONSE DU PREMIER MINISTRE
Vous avez bien voulu m’adresser, pour observations, le chapitre
du rapport public annuel « le Ministère du travail et les acteurs associatifs
un pilotage à renforcer ».
Il appelle de ma part les remarques suivantes.
En premier lieu, la Cour fait état de l’échec du projet de
rapprochement entre les missions locales et Pôle emploi.
Afin d’apporter le meilleur service aux personnes en recherche
d’emploi, particulièrement celles qui sont le plus en diffi
culté, mon
prédécesseur a en effet annoncé en 2018 la volonté du Gouvernement
de renforcer la coordination entre les différents acteurs du service public
de l’emploi (SPE). L’objectif est d’améliorer le fonctionnement de celui
-
ci ainsi que l’offre de servi
ce en direction des personnes en recherche
d’emploi et des entreprises, en proposant des parcours efficaces
d’inclusion dans l’emploi.
Il s’agit notamment de favoriser de nouvelles synergies entre les
acteurs du service public de l’emploi (Pôle emploi, mis
sions locales,
Cap
emploi), et de renforcer l’action de ces acteurs grâce à une
meilleure articulation et une coordination renforcée.
Je tiens à préciser que cet enjeu du renforcement de la
coordination des acteurs du SPE et de l’articulation de leur offr
e de
services
est
pleinement
intégré
dans
le
déploiement
du
plan « #1jeune1solution », construit sur la base du dialogue et de la
concertation avec l’ensemble des partenaires sociaux en réponse à la
crise sanitaire et économique que nous traversons.
Conce
rnant plus particulièrement le service public de l’emploi,
chacun des acteurs est mobilisé par l’État
:
-
autour des nouveaux objectifs quantitatifs d’accompagnem
ent et
de formation des jeunes,
-
pour appréhender et diffuser les nouveaux dispositifs (par exemple :
information des chargés d’entreprises des missions locales à propos
de l’aide à l’embauche des jeunes).
Cette mobilisation a donné lieu à une note commune Pôle
Emploi/Union nationale des missions locales/Chéops le 17 novembre 2020
pour le déploiement du plan qui pose les enjeux de renforcement des
collaborations existantes autour de la fluidification et la sécurisation des
parcours de jeunes bénéficiaires, de la mise en place d’actions
coordonnées en faveur de l’accès à la formation et à l’engagement
et des
actions concertées en direction des entreprises qui peuvent être mises en
œuvre pour favoriser le retour à l’emploi des jeunes.
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COUR DES COMPTES
352
La coordination des opérateurs s’effectue aussi bien au niveau
national qu’au niveau territorial.
Enfin, la mise en place
, depuis le 18 janvier 2021, de l’aide
financière exceptionnelle pour les jeunes de moins de 26 ans en
recherche d’emploi, engagés dans des accompagnements intensifs
délivrés par Pôle emploi (dans le cadre de l’accompagnement intensif
jeunes) ou par l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) implique
des coopérations renforcées entre Pôle emploi, les missions locales et
l’APEC. En effet, d’une part, afin de déterminer le montant de l’aide,
Pôle emploi et l’APEC peuvent solliciter les missions locales pou
r que
celles-ci réalisent un diagnostic social et financier de la situation du
jeune et préconisent le montant pertinent de l’aide et sa durée
; d’autre
part si le jeune est identifié, à l’occasion de ce diagnostic, comme
nécessitant un besoin d’accompagne
ment social au-delà du besoin
financier ponctuel, un co-accompagnement peut lui être proposé avec
la mise en place, en complément du volet professionnel réalisé par Pôle
emploi ou l’APEC, d’un accompagnement social et financier réalisé par
la mission local
e
dans
le
cadre
d’un
parcours
contractualisé
d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA).
Par ailleurs, l’accord
-cadre de partenariat renforcé entre Pôle
Emploi et le réseau des missions locales a été prolongé pour un an. Les
travaux de révision seront lancés en 2021 dans la continuité et en
cohérence avec les actions précitées.
Concernant le financement des missions locales, plusieurs
remarques peuvent être faites.
Les marges de manœuvre financières sont très variables d’une
mission locale à l’autre. Les missions disposent d’une autonomie de
gestion et ne font donc pas toutes les mêmes choix d’allocation de leurs
ressources.
Ainsi, toutes n’ont pas fait le même usage de la subvention
exceptionnelle de 62
M€ versée en 2019, en supplément de la
subvention
annuelle,
afin
d’accompagner
l’annualisation
du
financement de la Garantie jeunes
: certaines l’ont affectée à leurs
fonds pr
opres quand d’autres l’ont dépensée en charges courantes.
Par ailleurs, si le schéma n° 1 indique correctement le montant de
la subvention de l’État en 2018, le chiffre à retenir pour les missions
locales n’est pas 190
M€ mais 323
M€. Par ailleurs le nombr
e de missions
locales est aujourd’hui de 436.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
353
S’agissant de la démarche de performance des missions locales,
je souhaite apporter les précisions suivantes.
Concernant le manque de fiabilité des indicateurs, l’union
nationale des missions locales (UNML) a été associée à la mise en place
de la démarche de performance et à la construction de l’outil
d’analyse de l’activité des missions locales lors de l’élaboration de
l’instruction du 16 mai 2019 relative à la stratégie pluriannuelle de
performance des missions locales 2019-2022. Au niveau territorial, au
cours du moment privilégié d’échanges que constitue le dialogue de
gestion, la fixation des objectifs est l’occasion de faire le point sur les
forces et les faiblesses de la mission locale en analysant ses résultats de
l’année précédente puis, sur cette base, de définir concrètement son
ambition de progression au regard notamment des caractéristiques du
public accompagné. À
cet égard, les indicateurs ont fait l’objet
d’échanges avec l’UNML et les DIRECCTE,
afin d’améliorer la saisie par
les missions locales des données sous-jacentes dans i-milo et le portail
ICARE. Une notice des tableaux de bord CPO 2019-2022 a ainsi été
diffusée auprès du réseau des DI(R)ECCTE et des missions locales. De
même, une charte de saisie i-
milo, validée par l’UNML, a également été
élaborée pour le réseau des missions locales afin d’éviter les biais de
saisie. Une évolution éventuelle des indicateurs d’efficience serait
conditionnée à la mise en place d’une comptabilité analytique
dans
l’ensemble des missions locales.
Je partage le point de vue de la Cour quant à la nécessité
d’améliorer l’évaluation des difficultés d’insertion sociale rencontrées
par les jeunes et le suivi de leur progression au cours de leurs parcours.
Cela néce
ssite d’engager des travaux avec le réseau des missions
locales afin de compléter les données existantes sur les actions de
logement, de santé ou d’accès aux droits mises en œuvre dans le cadre
d’un parcours en Garantie jeunes et ainsi d’élaborer une grill
e
d’évaluation homogène et partagée sur l’autonomie acquise par le
jeune pendant son parcours d’accompagnement vers l’emploi ou la
formation.
Enfin, concernant les développements sur le rapprochement
entre Centre Inffo et France compétences
, il est exact que celui-ci, qui
s’inscrivait dans la feuille de route de simplification des structures
administratives, n’est effectivement plus d’actualité, compte tenu de
l’effort de redressement budgétaire et du renforcement de la régulation
financière qui sont attendus de France compétences. Il apparaît
également, au vu des conclusions d’un rapport d’inspection, que les
synergies entre les deux opérateurs sont faibles. France Compétences
et Centre Inffo poursuivront donc leurs trajectoires respectives.
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COUR DES COMPTES
354
RÉPONSE DU
PRÉSIDENT DE L’UNION
NATIONALE DES MISSIONS LOCALES
Je vous remercie vivement pour la communication du chapitre
du rapport public annuel 2021 de la Cours des comptes cité en objet.
Comme vous nous y invitez, vous trouverez ci-dessous la réponse de
l’Union
nationale des missions locales sur plusieurs points du chapitre.
1-
Concernant l’abandon du projet de fusion entre les missions
locales et Pôle emploi.
Le rapport précise qu’« en 2018, la tentative de fusion du réseau
des missions locales avec celui de Pôle emploi, qui est le plus important
établissement public de l’État, a dû être abandonné face au refus
exprimé par les élus locaux, qui cofinancent et président ces structures ».
Les élus des collectivités qui président les Missions Locales considèrent
qu’une logique de partenariat est plus efficace qu’une fusion, partant
du constat que les missions et les offres de service développées par
chacun des réseaux sont très complémentaires. Le rôle des Missions
locales ne peut se réduire à un accompagnement vers l
’emploi : celles
-
ci réalisent en effet un travail important d’accompagnement vers
l’autonomie, qui se traduit par une approche globale des besoins du
jeune en terme d’accès au logement, aux soins, d’accompagnement
à la citoyenneté, à la mobilité, à la sécu
risation financière, d’accès aux
droits (sport, culture, …). Afin de renforcer la coordination, Pole Emploi
est largement associé aux stratégies des Missions Locales puisqu’il
dispose d’un siège de droit dans leur conseil d’administration. Dans le
cadre
de
la
mise
en
œuvre
du
plan
#1jeune1solution,
la
complémentarité des interventions prend tout son sens et permet de
renforcer
l’orientation
respective
des
jeunes
vers
la
structure
(Agence Pôle emploi ou Mission Locale) la plus à même de répondre
aux besoins
de chaque jeune, ce qui peut d’ailleurs conduire à un
co-
accompagnement, au bénéfice du parcours d’insertion sociale et
professionnelle du jeune.
2-
Concernant la démarche d’
évaluation (recommandation n° 1
en conclusion du chapitre)
Le rapport précise q
ue « la démarche d’évaluation des missions
locales pourrait […] servir d’inspiration pour les autres organismes
structurés en réseau. »
L’UNML
considère
que
le
système
d’évaluation
de
la
performance des missions locales est essentiel. Par rapport à la
préc
édente génération de COM, le nouveau système d’évaluation de
la performance pour la période 2019-2022 a permis de limiter le nombre
d’indicateurs mis à disposition des services de l’État et ainsi de définir un
cadre d’évaluation commun à tous ces services.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
355
Cependant, comme le souligne le rapport, « la démarche
présente plusieurs limites : manque de fiabilité de certains indicateurs,
absence de valorisation du travail d’accompagnement social des
jeunes ».
Ainsi, en écho à la recommandation n° 1 formulée par la Cour
dans la conclusion du chapitre, l’UNML se tient à la disposition des
pouvoirs publics pour construire le prochain système d’évaluation de la
performance pouvant combiner les exigences d’atteinte des objectifs
de la politique publique et la réalité
de l’activité des missions locales.
L’UNML conduit actuellement avec les Missions Locales et l’ARML de
Normandie, le projet intitulé ML21, qui porte notamment sur la mise en
place d’un outil d’évaluation de la progression des parcours d’accès à
l’autonomie et à l’emploi des jeunes, dans toutes ses dimensions
(logement, santé, citoyenneté, mobilité, emploi, formation, ressources
financières). Ce projet est amené à être mis à disposition de tout le
réseau des Missions Locales après sa phase d’ingénierie assu
rée par les
Missions Locales normandes au premier semestre 2021.
3-Concernant la visibilité sur les financements et le besoin de
porter une attention plus marquée dans les conventions d’objectifs et de
moyens à la question des moyens (recommandation n° 3 en conclusion
du chapitre)
Le rapport souligne que « l’absence de visibilité sur la pérennité
des financements constitue également frein au recrutement en CDI de
professionnels et à l’adaptation des locaux à l’activité ». La visibilité des
financements est en effet une des conditions permettant de garantir la
bonne gestion financière et des ressources humaines des structures,
comme pour toutes les structures associatives dont l’exploitation repose
majoritairement sur des subventions. Les financements par appels à
projet et les financements spécifiques se substituent progressivement
aux subventions d’exploitation et contribuent également à fragiliser les
capacités de projection à moyen ou long terme pour les structures, en
particulier sur leur politique de recrutement.
La Cour recommande en conclusion de « porter une attention
plus marquée dans les conventions d’objectifs et de moyens à la qualité
des
moyens
(ressources
humaines,
systèmes
d’information)
»
(recommandation n°3).
L’UNML, en tant que syndical
employeur représentatif de la
branche des Missions Locales, conduit pour le compte de la branche
une enquête annuelle sur les caractéristiques des salariés de la branche,
qui permet d’observer que les effectifs y sont très majoritairement
employés en CDI (87,3 %). Les partenaires sociaux sont attachés à ce
que cet indicateur sur la qualité des emplois ne se dégrade pas dans les
années à venir.
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COUR DES COMPTES
356
Concernant le système d’information, l’UNML demande depuis
de nombreuses années à « être davantage associée au pilotage de la
délégation de service public » du système d’information des Missions
Locales, dont il finance la maintenance et le développement aux côtés
de la DGEFP. La participation au pilotage permettrait
de s’appuyer sur
l’expertise du réseau pour faire é
voluer le SI et mieux prendre en compte
les besoins des jeunes, leur évolution et les effets de l’accompagnement
sur leurs parcours d’insertion sociale et professionnelle.
Plus généralement, la prise en compte de l’expertise des acteurs
associatifs, parti
es prenantes de la mise en œuvre d’une politique
publique,
dans
la
conception
des
systèmes
d’information
et
d’évaluation dès la phase d’élaboration (ou d’évolution) de la politique
publique favoriserait une plus grande lisibilité de l’impact de cette
politique et une capacité à la faire évoluer de façon plus réactive au
regard des besoins des publics ciblés par la politique.
RÉPONSE DE L’ADMINIS
TRATRICE PROVISOIRE
DE L’OPÉRATEUR
DE COMPÉTENCE DE LA CONSTRUCTION CONSTRUCTYS
Dans la réflexion sur la performance des structures associatives, il
a
pparait essentiel de rappeler l’engagement des acteurs qui prennent
part à leur gouvernance : l’enjeu de la mission de la structure doit rester
prédominante à tout autre enjeu et
la responsabilité des acteurs tant sur
les aspects financiers liés au fonctionnement de la structure qu’à ceux
liés à son activité mérite d’être rappelée.
La présence du contrôleur d’état et du commissaire du
gouvernement dans les instances de gouvernance est pertinente à cet
effet, leur rôle pourrait être renforcé.
Il apparait aussi que
la gouvernance des structures pourrait être
adaptée à leur taille
(nombre d’administrateurs versus fonds engagés
et/ou versus nombre de salariés) afin de gagner en responsabilité,
souplesse et efficacité.
La réduction du nombre de structures, la clarification des missions
de chaque structure ont été clarifiées ;
il reste cependant quelques
zones à clarifier comme mentionné dans le rapport : « 3 associations (…)
bien que leurs missions recoupent désormais en grande partie celles
confiées aux OPCO »
.
Recommandation n° 1 : construire des indicateurs partagés reflétant
la santé financière des structures associatives et prenant en compte
l’ensemble des financements
.
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LES RELATIONS ENTRE LE MINISTÈRE DU TRAVAIL ET LES ACTEURS
ASSOCIATIFS : UN PILOTAGE À RENFORCER
357
Au-delà des objectifs de la COM,
un contrôle de gestion du
fonctionnement de la structure et un contrôle de gestion de son activité
permettant de suivre des indicateurs sur la santé financière
est garant
de l’anticipation des risques. C’est de la responsabilité de la structu
re et
de sa gouvernance de mettre en place des indicateurs de suivi et de
faire remonter, à son organisme de tutelle (état, territoires) les difficultés
et de proposer des solutions.
Des indicateurs communs pourraient être
mis en place à partir de l’exista
nt
.
Concernant les financements, il est utile d’identifier :
-
leur origine, (répartition par origine % )
-
l
es facteurs de risque : lié à l’activité économique ( exemple des
collectes qui dépendent de l’activité économique), lié à des choix
politiques
(état,
territoires,
partenaires
sociaux,
).
Comme
mentionné dans le rapport, il apparait que les financements liés à
l’activité économique (collecte) peuvent être en contradiction
avec les enjeux des structures et de ce fait ont besoin d’être
contrebalancé par des choix politiques allouant des ressources
supplémentaires en cas de crise mais apportant de la complexité
de gestion (cofinancements..).
-
leur traçabilité et leur contrôle
Recommandation n° 2 : intégrer dans la démarche de contrôle
interne du ministère chargé de l’emploi les r
isques de gestion liés au
recours aux acteurs associatifs.
La complexité de l’écosystème et des paramètres intervenant
dans la vie des structures ne peut que renforcer le besoin d’anticipation
des risques et le pilotage d’act
ions correctives à intervalle plus court que
par le passé.
Recommandation n° 3 : porter une attention plus marquée dans les
conventions d’objectifs et de moyens à la qualité des moyens
(ressources humaines, systèmes d’information
) et à la maîtrise des
risques.
La mise en place des moyens pour atteindre les objectifs de la
COM et le suivi est la responsabilité de la structure. Certes, la
gouvernance n’interfère pas dans « l’opérationnel » de la structure mais
elle peut vérifier que les moyens alloués sont pertinents au regard des
priorités. À cet effet, une attention plus marquée prévue dans la COM
pour que la structure rende compte de ses plans d’actions y compris
ceux sur la maitrise des risques et des moyens alloués en cohérence
parait justifiée.
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358
Recommandation n° 4 :
améliorer la mesure et l’analys
e des résultats
des structures :
Toute mesure et comparaison est source d’émulation et de
progrès. Des principes pour ces mesures, gages de leur utilité et de leur
acceptation : du sens : être s
ource de progrès : les acteurs peuvent s’en
emparer pour agir ; l
a simplicité : pas d’usine à gaz –
se servir des
éléments qui existent déjà ; la transparence : des mesures faciles à
expliquer, des résultats faciles à interpréter et à communiquer : la
fiabilité.
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