Chapitre VIII
La politique des greffes :
une chaîne de la greffe fragile
à mieux organiser
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LA POLITIQUE DES GREFFES : UNE CHAÎNE DE LA GREFFE FRAGILE À MIEUX
ORGANISER
315
_____________________
PRÉSENTATION
_______________________
La greffe sauve des vies et contribue à en améliorer d’autres.
Lorsqu’il s’agit de transplantation d’organes, elle est le recours ultime en
cas de défaillance terminale d’un rein, d’un poumon, du foie, du cœur, du
pancréas ou parfois de l’intestin. S’agissant de la moelle osseuse, elle peut
prévenir l’évolution fatale de pathologies hématologiques mal maîtrisables
autrement. Les prélèvements et greffes de tissus (peau, cornée, os,
vaisseaux, valves cardiaques notamment) permettent souvent de remédier
à des défaillances cruciales.
Ces résultats médicaux indiscutables se doublent, comme l’avait
déjà souligné la Cour
442
en s’appuyant sur les travaux médico-
économiques de la Haute Autorité de santé
443
, d’un avantage tout aussi
certain en termes économiques, du moins lorsqu’une alternative à la greffe
existe, comme c’est le cas pour le rein avec la dialyse.
La France, qui été parmi les premiers pays à développer ce type
d’interventions, a fait de ce domaine un secteur prioritaire de son action
en santé publique, en y affectant des moyens organisationnels et financiers
significatifs (337 M€ pour les dépenses hospitalières en 2017).
Ces prémisses pourraient laisser présumer un développement sans
difficultés de cette activité. Les résultats sont en réalité plus contrastés. La
Cour a souhaité les examiner en détail, à la fois auprès du ministère de la
santé et de l’Agence de la biomédecine (ABM), qui a la charge de mettre
en œuvre cette politique, et en enquêtant dans plusieurs établissements de
santé pratiquant des prélèvements et des greffes
444
.
Les efforts substantiels développés par le ministère de la santé,
l’ABM et les établissements de santé produisent des résultats significatifs,
mais insuffisants à couvrir les besoins de greffe (I). Une action plus large
et résolue doit être engagée pour remédier aux faiblesses préoccupantes
qui affectent la chaîne de la greffe (II).
442
Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale, septembre 2015
, chapitre X L’insuffisance rénale chronique terminale :
favoriser des prises en charge plus efficientes, p. 345-378, La Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
443
HAS,
Évaluation médico-économique des stratégies de prise en charge de
l’insuffisance rénale chronique terminale en France
, octobre 2014.
444
Aux CHU d’Angers et de Rennes, au centre hospitalier du Havre, à l’Assistance
publique-Hôpitaux de Marseille et auprès de l’équipe de coordination des prélèvements
du centre hospitalier d’Avignon.
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316
I -
Des résultats significatifs, mais qui peinent
à couvrir les besoins en greffons
Grâce à un cadre favorable à cette activité, le nombre de greffes a
fortement augmenté sur la période récente. Toutefois, les transplantations
effectuées couvrent une part déclinante des besoins de greffe, qui
augmentent plus rapidement. À cet égard, les actions engagées pour
accroître les prélèvements produisent des résultats inégaux.
A -
Un cadre favorable au développement des greffes
Le développement des greffes prend appui sur un cadre légal propice
au prélèvement sur les personnes décédées, une gestion nationale de
l’attribution des greffons et d’importants moyens financiers.
1 -
Un principe de consentement présumé des personnes décédées
Depuis la loi Caillavet du 22 décembre 1976, qui a posé le principe
du consentement présumé au don d’organes des personnes décédées, le
régime juridique du prélèvement vise à en favoriser le développement.
Le prélèvement est ainsi autorisé sur le cadavre d'une personne
lorsque, de son vivant, elle n'y avait pas fait connaître son opposition.
Afin de remédier à la pénurie de greffons, un amendement
parlementaire adopté, après modification, lors de l’examen de la loi du
26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, a prévu que
l’opposition ne peut désormais plus être exprimée, avant son décès, que par
la seule personne qui serait prélevée.
Les dispositions d’application de la loi prises par le décret du
11 août 2016 relatif aux modalités d'expression du refus de prélèvement
d'organes après le décès ont interprété cette règle avec souplesse. Le refus
du prélèvement peut ainsi être exprimé selon trois modalités : une
inscription volontaire au « registre national des refus », une manifestation
écrite du vivant de la personne décédée, ou une attestation circonstanciée
des intentions du défunt par ses proches. Le décret prévoit également qu’un
proche peut témoigner, selon une procédure formalisée
445
, du refus d’un
éventuel prélèvement opposé de son vivant par une personne décédée.
445
Pour être valide, l’attestation doit être transcrite par écrit par le proche, être datée et
signée, et préciser le contexte et les circonstances de l’expression du refus du défunt.
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317
L’arrêté du 16 août 2016 homologuant les règles de bonnes
pratiques relatives à l’entretien avec les proches en matière de prélèvement
d’organes et de tissus prévoit par ailleurs le cas dans lequel « en raison du
contexte, le prélèvement n’a pas été possible ». Cette mention fournit le
cadre juridique qui permet aux équipes hospitalières de ne pas pratiquer le
prélèvement en cas d’opposition des familles, quand bien même les
conditions fixées par le décret du 11 août 2016 ne sont pas remplies.
Comme le corroborent les constatations de la Cour auprès de cinq équipes
de coordination
446
, l’accord des familles reste dans les faits déterminant
dans la pratique du prélèvement sur des sujets décédés.
2 -
Une organisation nationale de la chaîne de la greffe
En 2018, 192 établissements de soins publics et privés, lucratifs ou
non, étaient habilités à effectuer un prélèvement sur une personne décédée
ou, dans le cas du rein ou du foie, sur un donneur vivant volontaire.
La greffe est ensuite réalisée dans l’un des 67 établissements
autorisés, qui sont exclusivement des hôpitaux publics ou privés non
lucratifs. En 2016, les CHU ont effectué plus de 96 % des greffes.
Pour faire le lien entre ces deux opérations, l’Agence de la
biomédecine (ABM), créée en 2004, est chargée de la procédure
d’attribution des greffons, en les proposant aux équipes de greffe qui
peuvent les accepter ou les refuser. Plus largement, l’ABM anime et
supervise, sous la tutelle du ministère de la santé, l’ensemble des aspects
organisationnels, statistiques et financiers, de la politique des greffes, y
compris des actions de communication dotées de moyens substantiels (plus
de 4 M€ en 2017). Elle emploie 240 équivalents temps plein pour un budget
de 75 M€ pour les greffes et l’assistance médicale à la procréation.
3 -
Des ressources financières abondantes
Le financement du dispositif sanitaire du prélèvement et de la
transplantation a été conçu, puis substantiellement modifié dans le second
de ces domaines en 2016, pour inciter au développement de l’ensemble des
compartiments de cette activité.
446
Angers, Rennes, Le Havre, Avignon, Marseille. Ce sont ces équipes, composées de
médecins et d’infirmiers, qui sont chargées de conduire les entretiens avec les proches.
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318
En 2017, plus de 337 M€ ont été consacrés à la greffe par
l’assurance maladie, dont 160 M€ pour la tarification à l’activité des
séjours liés à l’opération de transplantation elle-même, près de 66 M€ pour
le prélèvement, 62 M€ pour le suivi post-greffe donnant lieu à des séjours
à l’hôpital, notamment en cas de rejet et 50 M€ pour des activités
transversales.
S’agissant du suivi des transplantions d’organes, les montants qui
précèdent prennent en compte uniquement les séjours hospitaliers. Pour ce
qui concerne les greffes de reins, les dépenses se sont élevées en 2017 à
554 M€ au total, y compris les examens de surveillance cardiaque et de
biologie et les bilans annuels sans séjour hospitalier.
a)
Des tarifs conformes, voire supérieurs aux coûts
La revalorisation, dans le cadre de la tarification à l’activité, de
certains groupes homogènes de malades (GHM), comme pour le rein en
2012, a incité les établissements qui y sont autorisés à développer les
prélèvements sur des donneurs vivants.
Lorsque, à partir des données collectées par l’Agence technique de
l’information sur l’hospitalisation (ATIH), on compare les tarifs versés aux
« tarifs issus des coûts »
447
, pour les groupes homogènes de séjours relatifs
aux greffes, un écart positif apparaît dans la très grande majorité des cas.
Cet écart est modeste pour les greffes du rein et du foie, les plus fréquentes,
mais significatif pour la moelle osseuse et le cœur.
Dans les cas où la comptabilité analytique de l’hôpital a permis à la
Cour d’établir une comparaison entre les recettes de tarification et les
dépenses, le résultat (Le Havre, Rennes) a toujours été positif, parfois avec
un écart important.
447
Comme l’indique l’ATIH, des différences irréconciliables de périmètre ne
permettent pas de comparer les tarifs directement aux coûts. Dans ces conditions, elle
reconstitue des « tarifs issus des coûts » théoriques, qui fournissent une représentation
approchée des marges réalisées sur tel ou tel type de séjour.
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319
b)
Des forfaits en sus de la tarification à l’activité
De manière unique parmi les activités de soins (en dehors des
urgences), des forfaits détaillés rémunèrent certaines activités afin de
garantir qu’aucun des coûts engendrés par les prélèvements et greffes ne
reste sans financement : coordinations hospitalières de prélèvement (CPO),
prélèvement d’organes (PO) et activités transversales à la greffe, par la voie
d’un forfait annuel greffe (FAG) couvrant une liste détaillée d’opérations
non prises en compte dans le tarif
448
.
Les banques hospitalières de tissus qui stockent ces produits du
corps humain sont rétribuées par une dotation au titre d’une mission
d’intérêt général (MIG) versée en partie forfaitairement, en partie en
fonction de l’activité
449
.
Lorsque des matériels ou des services supplémentaires ont été jugés
utiles par l’ABM pour améliorer la qualité des interventions (comme dans
le cas des machines à perfuser les greffons de rein ou de la transmission
des images pour le prélèvement), le ministère a augmenté le montant des
forfaits greffe et la diffusion de ces équipements s’est rapidement accrue.
B -
Un nombre de greffes qui progresse, mais moins vite
que celui des patients en liste d’attente
Le nombre de greffes a beaucoup augmenté, mais celui des patients
en attente d’une greffe a crû encore plus fortement, si bien que les
conditions d’accès à la greffe se sont dégradées. De manière conjoncturelle
ou peut-être plus durable, le nombre de greffes a baissé en 2018.
1 -
Des chiffres favorables au regard des comparaisons
internationales
Entre 2013 et 2017, le nombre total annuel des greffes d’organe s’est
accru de 19,2 %. En 2015, l’objectif fixé par le plan greffe 2012-2016 de
5 700 transplantations réalisées cette même année a été atteint.
Il a par la suite été dépassé, 6 105 transplantations étant réalisées en 2017.
448
Coordination sujets décédés et donneurs vivants, astreintes, transports de greffons,
typage HLA (incompatibilités), prise en charge des donneurs vivants, etc.
449
Un système analogue de financement (forfaits de prélèvements, GHM, FAG pour la
greffe) s’applique à la moelle osseuse.
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320
Graphique n° 21 :
nombre de greffes, tous organes (2008-2017)
Source : ABM.
Le nombre de greffes d’organe a augmenté pour l’ensemble des
principaux organes concernés, qu’il s’agisse du rein (3 782 en 2017, soit
61,9 % du total), du foie (1 374, soit 22,5 %), du cœur (467), du poumon
(378) et du pancréas (96). Les proportions relatives de ces différentes
greffes sont demeurées stables depuis 2008.
Les progrès sont également marquants pour les greffes de tissus
(+60,5 % entre 2013 et 2017) et de cellules souches hématopoïétiques
450
(+6,4 % pendant la même période).
La France affiche des performances très honorables à l’international
en matière de transplantations d’organe. Les chiffres rassemblés par
l’édition la plus récente de la
Newsletter transplant
451
la placent ainsi en
troisième position en Europe, avec, en 2017, 90,2 greffes par million
d’habitants, derrière l’Espagne (111 par million d’habitants) et la Belgique
(92,1), mais largement devant les Pays-Bas (74,2), le Royaume-Uni (73,6),
l’Italie (66,5) ou l’Allemagne (40). En dehors de l’Europe, seuls les États-
Unis, qui occupent la deuxième place mondiale derrière l’Espagne
(103,3 greffes par million d’habitants), dépassent la France
452
.
La position relative de la France s’est en outre améliorée au cours
des dernières années, puisqu’elle n’occupait, selon le même classement,
que la cinquième place en Europe et la sixième dans le monde en 2009
(derrière les mêmes pays, auxquels s’ajoutaient le Portugal et l’Autriche).
450
Il s’agit d’un type de cellule à l’origine de toutes les lignées de cellules sanguines,
qui intervient lors du processus de production des cellules présentes dans le sang.
451
Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé du Conseil de
l’Europe,
Newsletter transplant, International figures on donation and transplantation
2017
, vol. 23, 2018.
452
La Chine et le Japon ne sont toutefois pas couverts par ces statistiques.
4000
4500
5000
5500
6000
6500
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
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321
2 -
Une détérioration croissante des conditions d’accès à la greffe
Malgré l’augmentation du nombre de greffes, celui des personnes
en attente d’une greffe progresse encore plus rapidement. Entre 2012 et
2018, il est ainsi passé de 10 648 à 16 413 (+54,1 %).
Tableau n° 38 :
nombre d’inscrits en liste d’attente
pour les greffes d’organe (2012-2018, au 1
er
janvier)
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
Cœur
298
321
334
359
378
329
316
Cœur-poumons
16
14
18
15
13
9
7
Foie
941
1 106
1 266
1 297
1 260
1 346
1 432
Intestin
12
10
9
5
4
3
4
Pancréas
145
165
178
200
221
228
236
Poumon
147
127
167
156
160
110
127
Rein
9 089
9 892
10 818
11 807
12 541
13 513
14 291
Total
10 648
11 635
12 790
13 839
14 577
15 538
16 413
Source : ABM.
Les principaux organes donnant lieu à des greffes sont concernés :
le rein (+57,2 %), le foie (+52,2 %), le pancréas (+62,8 %), et, à un moindre
degré, le cœur (+6 %). De ce fait, malgré les progrès réalisés dans le
traitement des patients en attente de greffe, le nombre de décès de
personnes inscrites en liste d’attente reste élevé, autour de 600 par an
depuis plusieurs années.
Pour les tissus, la situation est plus contrastée, mais elle est souvent
dominée par des tensions sur les ressources. Les stocks disponibles en fin
d’année dans les banques de tissus, en baisse sensible depuis trois ans pour
les cornées et la peau, l’attestent. Le maintien d’une forte dépendance aux
importations d’autres pays pour les valves cardiaques (22,9 %
453
) et os
massifs
454
(28,6 %), même si elle tend à se réduire, en est un autre signe.
Les greffes de moelle ne sont pas, sur un plan global, caractérisées
par la même difficulté que celle rencontrée pour les organes et les tissus.
Les durées d’attente découlent pour l’essentiel des délais techniques de
sélection, de prélèvement, d’acheminement, puis d’implantation des
cellules. Cet état de fait plus favorable résulte cependant d’un recours
massif à l’importation de greffons (85 % des receveurs en France).
453
Pourcentage de tissus humains importés par les banques parmi les tissus distribués
en France.
454
Fémurs, tibias, humérus.
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322
L’extrême rareté des bons appariements, qui sont de l’ordre d’une
chance sur un million en raison des contraintes immunologiques, rend
difficile la couverture des besoins nationaux par les seules ressources des
dons faits en France. Ce phénomène est en outre accentué par le nombre
réduit de prélèvements en France, qui fait que l’objectif du 2
ème
plan greffe
2012-2016 de couvrir, à des fins de sécurité, 35 % des besoins par des
greffons nationaux n’a pu être atteint
455
. Pour pallier ces difficultés, la
France participe à un réseau mondial interconnecté regroupant 73 pays, qui
démultiplie les sources possibles de greffons.
3 -
Un recul inquiétant du nombre de greffes en 2018
En rupture avec la tendance observable depuis le début des années
2000, le nombre de transplantation d’organes a fléchi de 5,3 % en 2018
(5 781 greffes, dont 3 546 greffes de reins, contre 6 105 en 2017). Les
prélèvements de greffons ont notamment baissé chez les sujets en état de
mort encéphalique (-4,8 %
456
).
Selon l’ABM, une partie du ralentissement de l’activité pourrait
s’expliquer par un facteur conjoncturel : l’épisode grippal sévère de l’hiver
2017-2018 a pu distraire une partie des ressources en locaux et en personnel
médical qui auraient pu être consacrées aux transplantations. Des
difficultés liées à la disponibilité des blocs et des équipes médicales et à la
logistique hospitalière sont aussi évoquées.
Les causes précises du recul restent néanmoins à objectiver. Le fait
même que la greffe, politique prioritaire, résiste mal à un épisode de
tensions appelle l’attention. Il invite ainsi à une réflexion approfondie sur
l’état et les perspectives de réalisation du plan greffes 2017-2021 et, de
manière plus substantielle, sur les fragilités qui affectent cette activité.
C -
Un développement inégal des prélèvements
Prolongeant les résultats obtenus, le plan greffes 2017-2021 prévoit
la réalisation de 7 800 greffes d’organe en 2021, contre 6 105 en 2017 (dont
6 800 à partir de sujets décédés et 1 000 à partir de donneurs vivants), soit
115 greffes par million d’habitants, ce qui placerait la France légèrement
au-dessus du niveau atteint par l’Espagne en 2017. Dans ce cadre,
4 950 greffes de reins seraient effectuées en 2021 (dont 3 950 à partir de
sujets décédés et les 1 000 autres de donneurs vivants).
455
Ce déséquilibre se manifeste aussi par le fait que seuls 40 % des prélèvements
réalisés en France vont à un patient étranger.
456
Soit, en 2018, 1 743 prélèvements sur des sujets en état de mort encéphalique.
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Malgré l’adhésion majoritaire de la population au prélèvement
d’organes, ces objectifs seront difficiles à atteindre. Les efforts engagés par
les pouvoirs publics pour diversifier et développer les différents types de
prélèvements produisent des résultats inégaux.
1 -
Une adhésion majoritaire au prélèvement d’organes,
mais accompagnée d’oppositions explicites ou latentes
Le prélèvement est majoritairement accepté dans notre pays, comme
le montrent le nombre réduit de personnes inscrites au registre national des
refus (soit 360 000 à la mi-2019) et le pourcentage minoritaire des
oppositions à des prélèvements sur des sujets décédés (30 % en 2018). Ces
attitudes se vérifient également pour les nouvelles catégories de greffons
(Maastricht II et III, voir
infra
). Le nombre de personnes se portant
volontaires pour donner un rein, voire une partie de leur foie, augmente.
Néanmoins, de fortes disparités géographiques peuvent être
observées : en 2017, le taux d’opposition à des prélèvements sur des sujets
décédés atteignait ainsi 23,1 % en Bourgogne-Franche-Comté, 26,6 % en
Pays-de-Loire et 28,8 % en Bretagne, mais 41,5 % en Ile-de-France et
54,5 % à La Réunion.
Par ailleurs, des réticences se font jour dans l’opinion publique.
Ainsi, le dernier bilan sur l’opinion des Français réalisé en 2017 par l’ABM
indique que le prélèvement d’organes est un sujet intime pour 67 % d’entre
eux, contre 57 % en 2015, avant les débats suscités par la loi de 2016 de
modernisation de notre système de santé. Dans la profession médicale,
notamment chez les anesthésistes et les réanimateurs, des réticences
persistent, notamment au sujet des prélèvements après arrêt circulatoire
contrôlé et parfois des prélèvements sur des sujets vivants
457
.
Les états généraux de la bioéthique, tenus en 2018 en vue de la mise
à jour de la loi du même nom, ont relevé qu’« un certain climat de défiance
des patients vis-à-vis du monde médical a pu s’instaurer »
458
.
Les débats qui ont entouré les campagnes de communication de
l’ABM, puis l’amendement au projet de loi de modernisation de notre
système de santé (voir A - 1 -
supra
) ont suscité une vague récente
d’inscriptions au registre national des refus, ainsi passé d’environ
90 000 noms en 2015 à un peu plus de 340 000 en quelques mois en 2017.
457
En vertu du principe déontologique
primum non nocere
(ne pas nuire).
458
Contribution du Comité consultatif national d’éthique à la révision de la loi de
bioéthique, septembre 2018, p. 22.
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324
Sans remettre en cause la disponibilité de greffons, cet afflux a mis
en difficulté l’ABM, qui a dû, pendant une courte période, augmenter
fortement le nombre de ses agents affectés à la réception, au contrôle et à
l’enregistrement des courriers de refus. Elle assure avoir pu dans tous les
cas effectuer les vérifications légales obligatoires, si bien qu’aucune
personne ayant notifié une opposition au registre national n’a fait l’objet
d’un prélèvement.
2 -
Un effort inégalement abouti pour améliorer
la détection des sujets en état de mort encéphalique
Les sujets sur lesquels des prélèvements peuvent être effectués sont
relativement peu nombreux et les délais d’intervention sont très contraints
en raison des impératifs de conservation des organes.
Pour s’en tenir à la catégorie la plus fréquente, le nombre de sujets
en état de mort encéphalique
459
est, selon l’ABM, nettement inférieur à
4 000
460
, sur 587 000 décès en France en 2016.
Les équipes de coordination hospitalière organisées dans les
établissements de santé autorisés à prélever des organes et des tissus (192 en
2018) s’efforcent donc d’établir des liens avec les unités où se trouvent ces
patients, souvent des services d’urgence ou de réanimation, qu’elles soient
situées au sein du même hôpital ou dans un établissement voisin. Ce travail,
institutionnel mais aussi humain, vise à convaincre des structures, dont ce n’est
pas la tâche première, de signaler les sujets sur lesquels des prélèvements
pourraient être effectués, même si le cas se présente rarement dans leur
activité
461
. Le recensement des sujets en état de mort encéphalique continue de
faire apparaître des résultats hétérogènes entre les régions, fonction de
l’ancienneté et de la structuration des organisations locales.
459
La mort encéphalique ou mort cérébrale désigne l'arrêt brutal, définitif et
irrémédiable de toutes les activités du cerveau. Ce cas, relativement rare, permet
souvent le prélèvement dans la mesure où les organes concernés demeurent irrigués.
460
3 547 en 2014, 3 579 en 2015, 3 676 en 2016, 3 539 en 2017 (source : ABM).
461
Ainsi, dans toute l’année 2017, l’hôpital de Saumur n’a signalé que 6 cas, qui n’ont
en définitive donné lieu à aucune transplantation ; celui de Château-Gontier a procédé
à 13 signalements, pour deux prélèvements finalement réalisés.
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325
Carte n° 3 :
nombre de sujets en état de mort encéphalique recensés
par région (2017)
Afin de mieux orienter l’action de la coordination hospitalière et des
services hospitaliers concernés, l’ABM a mis au point en 2010, puis diffusé
progressivement un instrument (Cristal action) qui permet, par l’analyse
des dossiers de décès hospitaliers et leur rapprochement avec les
déclarations faites, de repérer
ex post
les cas qui auraient pu être signalés
et d’en analyser les raisons. Le déploiement de cet outil a favorisé une
diminution du non-recensement
462
. Il reste cependant encore partiel.
462
À Angers, sur plus de 600 cas étudiés, on est ainsi passé de 9 cas non identifiés en
2013 à 2 en 2017 et de 5 non signalés à un seul.
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COUR DES COMPTES
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3 -
Des résultats contrastés pour les prélèvements sur des sujets
en état d’arrêt cardiaque Maastricht II et III
Les catégories de prélèvement Maastricht II et III
À la suite d’une conférence internationale tenue à Maastricht en
1995, la France a fait évoluer sa réglementation en 2005, afin de pouvoir
réaliser, sous certaines conditions, le prélèvement d’organes de sujets en
arrêt cardiaque irréversible dans deux cas notamment, désignés comme les
catégories Maastricht II et III.
Pour Maastricht II, il s’agit de réanimer le patient, souvent après un
accident cardiaque, quand bien même ses chances de survie sont estimées
nulles, aux fins de prélever des organes. Pour Maastricht III, les perfusions
et la ventilation du corps sont maintenues jusqu’au prélèvement.
Les transplantations à partir de sujets relevant de ces catégories
exigent un diagnostic solide de l’irréversibilité de l’arrêt cardiaque. Des
contraintes techniques spécifiques s’y ajoutent, liées au fait que les organes
de ces sujets, moins bien irrigués en raison des moyens artificiels visant à
maintenir les fonctions de base du corps, ne peuvent demeurer en l’état plus
de quelques heures.
Les prélèvements au titre de la catégorie Maastricht II ont débuté en
2006. Dans un premier temps, cette catégorie n'a concerné que le rein. Elle
a ensuite été étendue au foie et au poumon, puis suspendue pour le foie en
2017 en raison d’un taux élevé d’échec des transplantations.
Cette activité mobilise, pour être menée à bien dans de bonnes
conditions, une organisation, des moyens importants et une réactivité
immédiate. Il faut en effet que l’équipe de réanimation, souvent le service
mobile d’urgence et de réanimation (SMUR), qui intervient fréquemment
au domicile du patient ou dans la rue, enclenche très rapidement la
procédure en liaison avec la coordination hospitalière, et que l’ensemble
de l’opération, dont l’échange avec la famille sur le prélèvement, soit
menée dans des délais contraints. Dans ces conditions, seul un petit nombre
d’établissements, 15 en 2017, a obtenu l’agrément, et dix ont effectivement
réalisé des prélèvements de ce type cette même année.
En termes de résultats globaux, l’activité a plafonné, puis a régressé
à partir de 2017, année où elle est passée en deçà de 40 prélèvements pour
toute la France, avant de s’effondrer en 2018 avec 20 prélèvements, loin de
l’objectif fixé pour 2021 par le plan greffes (100 greffes d’organe). Dans
les établissements de santé entrant dans le champ de l’enquête de la Cour,
cette activité est confrontée à de grandes difficultés découlant notamment
de contraintes d’organisation, au point que sa pérennité est parfois
incertaine dans certains établissements (Angers, Rennes).
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LA POLITIQUE DES GREFFES : UNE CHAÎNE DE LA GREFFE FRAGILE À MIEUX
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327
Toute autre est la situation des prélèvements Maastricht III après
arrêt circulatoire contrôlé, qui ont commencé en 2014. Le plan greffe
affiche des ambitions significatives (pour 2021, 350 sujets recensés
éligibles, 175 sujets prélevés et 400 greffes d’organe). La progression
accomplie l’est également. Alors que
ce dispositif n’est autorisé en France
que depuis septembre 2014, après une longue période de réflexion, près de
200 recensements ont été effectués en 2017. En 2018, l’activité de
prélèvement a nettement progressé (+22,2 % par rapport à l’année
précédente). Il est vrai que dans d’autres pays, le Royaume-Uni
notamment, cette catégorie de prélèvements est développée depuis
longtemps et de façon importante.
Si le développement de ces projets demande du temps
463
, des
ressources financières et humaines, l’organisation de programmes de
formation et, facteur décisif, l’adhésion des équipes médicales concernées,
les perspectives semblent plutôt favorables, au vu, tout au moins, des
constats effectués dans certains établissements (Le Havre, Angers).
Parfois,
comme
en
Provence-Alpes-Côte
d’Azur,
un
net
fléchissement peut être observé dans les plus grands établissements. Ainsi,
à l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM), alors que de 10
à 12 prélèvements Maastricht III annuels étaient attendus, il n’y en a eu que
cinq en 2017 et deux en 2018. Selon l’équipe de coordination des greffes,
la circonspection du corps médical serait un facteur d’explication important
de cette situation. L’ABM a également relevé ces disparités géographiques,
ainsi que le fait que le protocole qu’elle a formalisé à l’attention des
équipes agréées n’était pas systématiquement appliqué.
4 -
Des obstacles au développement des dons du vivant
Selon les données publiées par le
United States Renal Data System
(USRDS) en 2018, la France se situait en 2016 au 5ème rang mondial en
termes de nombre de transplantations rénales rapportées au nombre
d’habitants, derrière le Mexique, l’Espagne, les États-Unis et les Pays-Bas.
En revanche, elle se situait uniquement au 47ème rang mondial quant à la
part des dons du vivant dans celles-ci (16 %), dans le contexte d’une grande
hétérogénéité des législations nationales en ce domaine (notamment en
matière de rémunération ou non des donneurs et de liens familiaux de ces
derniers avec les receveurs).
463
Au Havre, par exemple, les premières réunions à ce sujet ont eu lieu à l’automne
2016 et l’autorisation de l’ABM n’est intervenue qu’en juillet 2018, près de deux ans
plus tard.
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Le plan greffe 2017-2021 a une ambition encore plus élevée que
pour Maastricht III. Ainsi, il vise 1 000 greffes de reins issues de donneurs
vivants en 2021. Cet objectif prolonge la progression intervenue depuis le
début de la décennie
465
et s’inspire des résultats de certains de nos voisins.
Au Royaume-Uni, 1 043 personnes ont fait don d’un organe
466
en
2016/2017, ce qui a représenté 43 % des sources de greffons. En France,
malgré des débuts prometteurs, l’activité a brusquement régressé en 2018
(-11,8 % par rapport à 2017, avec 561 dons de rein ou de morceau du foie).
En 2017, seules 611 transplantations d’un rein
467
ont été effectuées.
Leur nombre a baissé en 2018 à 537.
Outre un encadrement législatif plus strict qu’au Royaume-Uni
468
,
plusieurs obstacles limitent le développement des dons du vivant.
En premier lieu, les néphrologues et centres de dialyse, qui traitent
les malades atteints d’insuffisance rénale qui pourront être candidats à la
greffe, sont inégalement sensibilisés. Ils sont pourtant les mieux à même
d’informer leurs patients sur l’intérêt du don d’un rein par l’un de leurs
proches. Alors qu’à Marseille, le nombre de candidats au don excède les
capacités de prélèvement du fait notamment d’une mobilisation des
urologues, la profession semble davantage partagée et le programme moins
avancé dans les Pays de la Loire, par exemple.
En outre, des difficultés d’organisation peuvent être relevées en
matière de disponibilité des blocs opératoires et des chirurgiens et
anesthésistes dans certains établissements (Marseille).
Enfin, les donneurs peuvent être découragés par les conditions
économiques qui s’attachent à leur démarche. La loi pose le principe de la
neutralité financière, mais dans les faits, de nombreuses difficultés se
manifestent : délais de prise en charge, remboursement des frais de
465
En 2010, 283 greffes rénales avaient été effectuées à partir de donneurs vivants.
466
97 % pour le rein, 3 % pour le foie.
467
Un rein est donné, l’autre conservé. Des prélèvements hépatiques sur donneur vivant
sont également pratiqués, mais beaucoup plus rarement.
468
Au Royaume-Uni, contrairement à la France, le lien familial ou affectif stable avec le
candidat à la greffe n’est pas exigé. Par ailleurs, des programmes d’appariement faisant
intervenir de multiples paires de donneurs – receveurs y sont autorisés, alors qu’ils sont
limités à deux couples en France. Afin de favoriser le développement du don croisé, le
projet de loi relatif à la bioéthique en cours d’examen par le Parlement prévoit notamment
de l’étendre à quatre paires de donneurs – receveurs.
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déplacement, compensation de la perte d’activité, notamment lorsque le
donneur exerce une profession libérale ou artisanale
469
.
II -
Consolider et développer la politique
en faveur des greffes
Afin d’accroître l’efficacité de la politique en faveur des greffes et
de maîtriser les risques propres à cette activité, il convient de rééquilibrer
offre et demande de greffons, d’assurer un accès plus équitable à la greffe
et de sécuriser tous les maillons de la chaîne de la transplantation, tout en
optimisant l’emploi des moyens engagés.
A -
Rééquilibrer l’offre et la demande de greffons
Comme en témoigne l’allongement de la liste des personnes en
attente d’une greffe (voir
supra
), l’offre de greffons, bien qu’en
augmentation, ne permet pas de couvrir la croissance des besoins de greffe.
Une relance des prélèvements, mais aussi une prévention accrue des
pathologies à l’origine de ces besoins, sont indispensables.
1 -
Une extension des indications de greffe plus forte que celle des
prélèvements
Afin d’augmenter l’offre de greffons, les catégories autorisées de
prélèvements ont été continûment étendues, en France comme dans les
autres pays. Des règles ont ainsi été définies au niveau international, avec
des variations selon les organes, permettant en général des prélèvements
sur des sujets de plus de 60 ans et porteurs de comorbidités qui rendent la
transplantation légèrement plus risquée.
Cette évolution a eu une portée considérable, puisque 35,5 % des
sujets en état de mort encéphalique présentaient en 2017, d’après l’ABM,
au moins deux facteurs de risque. L’évolution la plus marquante est
néanmoins celle de l’âge des personnes prélevées : celles de plus de 70 ans,
qui ne représentaient que 6,6 % du total en 2000, comptaient ainsi pour
469
Le prélèvement d’un rein ou d’un morceau de foie est une opération lourde, qui
entraîne un arrêt de travail pouvant être prolongé. Selon l’ABM, un donneur sur dix n’a
pas repris d’activité professionnelle un an après le don et, à la même échéance, trois sur
dix se plaignent toujours de douleurs.
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29,7 % en 2011 et 41,3 % en 2017. Par ailleurs, des prélèvements sur des
sujets souffrant de certaines pathologies (hépatite C) se sont développés et
le plan greffe prévoit d’étudier la faisabilité de greffes à partir de porteurs
de marqueurs des virus HTLV 1-2 et VIH
470
. Au-delà, des tentatives de
greffe sont engagées dans des cas d’incompatibilité immunitaire entre le
donneur et le receveur.
Toutefois, cette extension du champ des prélèvements possibles ne
suffit pas à remédier à l’insuffisance de l’offre par rapport au besoin
de greffons.
Les greffes d’organe peuvent répondre à un nombre croissant de
problèmes de santé. Il ne s’agit pas seulement des nouvelles interventions
qu’il est possible de mener à bien (main, face, utérus), mais d’indications
supplémentaires ou en développement : cancers primitifs du foie,
bronchopneumopathie chronique obstructive, mucoviscidose, emphysème
notamment. Le nombre de maladies du sang susceptibles d’être traitées par
les cellules souches hématopoïétiques a lui aussi augmenté.
En outre, la possibilité de réaliser des transplantations sur des
patients de plus en plus âgés (plus de 80 ans) et de surmonter de mieux en
mieux les contre-indications grâce au progrès des traitements anti-rejets
tend à accroître le nombre de patients éligibles. Les allogreffes de cellules
souches hématopoïétiques peuvent aujourd’hui être proposées à des
patients âgés de plus de 70 ans, alors que, selon l’ABM, seuls les adultes
de moins de 55 ans pouvaient en bénéficier il y a seulement dix ans.
Enfin, l’allongement de l’espérance de vie des patients affectés par
des maladies chroniques conduit un nombre croissant d’entre eux à
parvenir au stade où la greffe est le traitement le plus indiqué
471
. Il en va
de même pour certaines greffes de tissus.
Tandis que les besoins augmentent, les sources traditionnelles de
greffons régressent. Qu’il s’agisse d’organes ou de tissus, les sujets
donnant lieu à prélèvement étaient naguère presqu’exclusivement, et sont
encore majoritairement aujourd’hui, des sujets en état de mort
encéphalique, ce qui autorise la constatation du décès, mais dont le cœur et
la respiration continuent de fonctionner grâce à une assistance artificielle,
470
Dans tous ces cas, les prélèvements sur des personnes souffrant de la pathologie en
question sont destinés à des personnes atteintes de la même maladie. Cette opération
permettrait d’augmenter le nombre de greffons disponibles.
471
Les cas pour lesquels les indications de greffe diminuent sont en revanche rares. On
peut principalement citer les greffes de foie pour les patients atteints d’hépatite C, que
les nouvelles molécules apparues depuis 2014 tendent à faire disparaître.
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ce qui préserve la qualité des organes. Il s’agit en majorité de patients
victimes d’accidents vasculaires ou de la route. Or, les décès dus aux
maladies cérébrovasculaires ont baissé de 7,6 % entre 2005 et 2016,
passant de 33 797 à 31 228 individus
472
. Selon l’observatoire national
interministériel de la sécurité routière, le nombre de morts sur la route est
passé de 5 543 en 2005 à 3 488 en 2018 (-37,1 %).
2 -
Relancer les prélèvements
L’exemple de l’Espagne, le pays où le plus grand nombre de greffes
d’organe par habitant est pratiqué au monde et où l’effort principal a porté
sur l’organisation du prélèvement et l’obtention du consentement des
proches (le taux de refus est de l’ordre de 15 %, soit la moitié du niveau
français), montre la possibilité de progrès en la matière.
Plusieurs leviers pourraient permettre de les concrétiser : la
poursuite, dans des conditions maîtrisées, de l’extension des indications
médicales de prélèvement et d’appariement ; l’accompagnement par
l’ABM du développement des réseaux de prélèvement utilisant, pour
maximiser leur efficacité, le logiciel Cristal action qu’elle met à leur
disposition (voir
supra
) ; l’appui par l’ABM à la constitution et au
développement
de
l’activité
d’équipes
Maastricht
III
dans
les
établissements où les enjeux sont les plus importants ; des actions de
sensibilisation des néphrologues et des directions des hôpitaux aux
programmes de donneurs vivants ; le renforcement de la surveillance par
les établissements de santé ; un renforcement des incitations tarifaires à la
constitution et au bon fonctionnement des réseaux de prélèvement ; le cas
échéant, l’adoption de règles juridiques plus précises pour assurer la
neutralité financière du don, en compensant plus complètement les frais
encourus par les donneurs.
En outre, il convient d’améliorer l’efficacité des équipes de
coordination hospitalières. Leur formation, qui compte à juste titre au
nombre des priorités de l’ABM, devrait être encore renforcée, au vu
notamment de la rotation élevée du personnel. Leur fonctionnement plus
sûr devrait être recherché en leur associant plus systématiquement une
expertise médicale et en resserrant leur coordination avec les services
hospitaliers dont proviennent les patients décédés. À cet égard, certaines
bonnes pratiques, comme, à Nantes notamment, la détection anticipée, sur
la base de leur diagnostic médical, des sujets potentiels sur lesquels un
472
INSERM (CepiDc).
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332
prélèvement pourrait être effectué dès le stade des urgences et l’abord
précoce des familles
473
, devraient être mieux reconnues. Cet enjeu
justifierait que l’ABM établisse un référentiel de bonnes pratiques.
3 -
Mieux prévenir les pathologies à l’origine de besoins de greffe
Le déséquilibre entre offre et demande de greffons est tel que, même
si les objectifs de prélèvement du plan greffe devaient être tenus (voir I –
C -
supra
) et si les taux de refus baissaient jusqu’à la cible de 25 %, il n’est
pas certain que la liste des patients en attente de greffe se réduirait.
À côté du développement des prélèvements, une autre voie, celle de
la diminution des besoins en greffons, doit donc être suivie. La mise en
œuvre rapide des résultats de la recherche médicale allant dans le sens du
développement d’alternatives à la greffe peut apporter le cas échéant des
réponses. Mais l’enjeu essentiel porte sur le renforcement de la prévention
des pathologies à l’origine des besoins de greffe.
Si l’on s’en tient au sujet quantitativement le plus important, celui
des besoins en greffe du rein, des progrès récents sont intervenus. En
2015
474
, la Cour avait relevé la prévention insuffisante de l’insuffisance
rénale chronique terminale (IRCT). Dans le cadre de la convention
médicale du 25 août 2016, deux nouveaux objectifs ont été intégrés au
dispositif de rémunération sur objectifs de santé publique des médecins
(ROSP), afin de favoriser un dépistage plus étendu de la maladie rénale
chronique chez les personnes diabétiques et hypertendues.
Selon la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), la part des
patients traités par antidiabétiques ayant bénéficié d'une recherche annuelle
de micro albuminurie sur échantillon d’urines et d'un dosage annuel de la
créatininémie avec estimation du débit de filtration glomérulaire est passée
de 31 % fin 2016 à 39,1 % fin 2018 ; celle des patients traités par
antihypertenseurs ayant bénéficié d’une recherche annuelle de protéinurie
et du dosage précité est quant à elle passée de 7 % à 11,4 %. Ainsi, près de
100 000 personnes diabétiques et 180 000 personnes hypertendues sont
473
Voir NJAMFA, Léa,
Démarche anticipée au don d’organes : évaluation des
pratiques professionnelles des médecins urgentistes dans les services d’accueil des
urgences de la région Pays-de-Loire
, thèse pour le diplôme d’État de docteur en
médecine, octobre 2018. Voir aussi LIBOT, Jérôme, La démarche anticipée de don
d’organes à l’hôpital,
Soins
, vol. 61, n° 808, septembre 2016, p. 44-46.
474
Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale, septembre 2015
, chapitre X L’insuffisance rénale chronique terminale :
favoriser des prises en charge plus efficientes, p. 345-378, La Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
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mieux prises en charge. Cependant, les objectifs cibles de ces indicateurs
ont été réduits courant 2018 par l’avenant n° 6 à la convention médicale
(de 61 % à 49 % et de 14 % à 8 % respectivement).
Par ailleurs, des initiatives visant à améliorer les parcours de soins
des patients diabétiques et en insuffisance rénale ont été engagées ou sont
sur le point de l’être. La HAS a annoncé un travail sur ce sujet. Ainsi,
plusieurs expérimentations faisant application de l’article 51 de la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2018, qui permet de déroger aux
règles tarifaires générales
475
, s’engagent.
Plus en amont, pour prévenir l’obésité, le nouveau plan national de
santé publique (mars 2018) comporte un volet relatif à l’alimentation (avec
notamment un étiquetage nutritionnel optionnel) et une incitation à
l’exercice physique des enfants. La loi de financement de la sécurité sociale
pour 2017
476
autorise l’expérimentation de prescriptions médicales de
consultations de psychologues pour les enfants et les adolescents.
S’agissant du traitement du diabète, un nouveau projet, intitulé «
Dites non
au diabète
», a été lancé en 2018. Il constitue en France la première
expérimentation de prévention primaire du diabète de type 2. Il s’agit
d’accompagner dans un changement durable de leurs habitudes de vie les
personnes à haut risque de développer le diabète
477
.
Ces nouveaux dispositifs, qui se sont multipliés au cours des années
récentes, permettent d’élargir les moyens de prévention de l’IRCT.
Certains volets, comme les traitements non-médicamenteux
478
, semblent
toutefois encore insuffisamment développés. De plus, tous n’ont pas la
même maturité ou efficacité. Leur mise en cohérence est donc
indispensable. Une démarche d’évaluation médico-économique comparée,
qui débute à peine, apparaît indispensable avant une généralisation à
l’ensemble de la population.
475
Les premiers éléments de l’évaluation en cours du programme Sophia, qui vise à
retarder les complications médicales en aidant les patients diabétiques à prendre en
charge leur maladie et qui a progressivement couvert depuis son démarrage en 2008
près de 820 000 patients, sont attendus d’ici fin 2019.
476
Article 68 qui trouve notamment son origine dans les retours d’expérience du plan
obésité 2010, interrompu en 2013.
477
45 à 70 ans, indice de masse corporelle supérieur à 25 kg/m
2
, glycémie comprise
entre 1,10 et 1,26 g/l. Les inscriptions sont faites par le médecin généraliste, auprès
desquels des campagnes d’information seront menées ; le contenu du programme
consiste en dix séances collectives abordant tous les aspects du sujet.
478
Régimes, soutien psychologique, activité physique notamment.
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334
B -
Porter une attention renouvelée à l’égalité
des chances des patients
L’égalité des chances des patients en attente de greffe est un ressort
essentiel de l’adhésion d’une grande majorité de la population au
prélèvement d’organes.
A contrario
, l’Allemagne illustre les risques
auxquels est exposée la chaîne de la greffe en cas de perte de confiance de
la population dans les conditions d’attribution des greffons (voir
encadré
infra
).
Dans un objectif d’égalité de traitement des patients, il importe de
favoriser une homogénéité accrue des pratiques médicales en matière
d’inscription des patients sur les listes d’attente des greffes, de continuer à
améliorer la conception des scores d’attribution des greffons et de fiabiliser
les données prises en compte pour déterminer le score des patients.
En Allemagne, une déstabilisation durable du système de la greffe
La révélation de scandales liés à des falsifications, par des praticiens,
de données médicales de leurs patients afin d’améliorer leurs chances
d’obtenir un greffon, a provoqué une chute des dons d’organes, de 14,7 à
9,7 par million d’habitants pour les donneurs décédés entre 2011 et 2017 et
des transplantations du rein par des donneurs vivants ou décédés, tombées
de 34,8 à 23,7 par million d’habitants sur la même période.
Devant cette déstabilisation de la greffe, le gouvernement fédéral a
proposé de substituer le consentement présumé pour les personnes
décédées, comme en France, au consentement explicite en vigueur. Cette
initiative n’a pas abouti à ce jour.
1 -
Harmoniser les pratiques d’inscription sur les listes d’attente
des greffes
L’inscription sur la liste d’attente est une source significative
d’inégalités entre les candidats à la greffe, notamment dans le cas du rein.
Les pratiques des néphrologues diffèrent : certains inscrivent très tôt leurs
patients ; d’autres attendent que leur état de santé se dégrade et nécessite
une greffe à plus courte échéance ; d’autres enfin inscrivent certains
patients, mais les placent aussitôt en contre-indication temporaire de greffe.
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335
Ces différences de pratiques peuvent avoir une incidence sur
l’obtention finale d’un greffon, car la durée d’inscription sur la liste figure
parmi les critères retenus
479
. Les statistiques collectées par l’ABM révèlent
l’ampleur des disparités et leur tendance à l’aggravation, tout au moins au
cours de la période récente
480
.
La Haute Autorité de santé (HAS) a publié des recommandations de
bonne pratique
481
, qui visent à favoriser l’accès à la transplantation et à
réduire les disparités d’accès : définition limitative des situations qui
justifient une contre-indication temporaire, durée de la contre-indication
limitée à un an, avis pluri-professionnel avant toute décision de non-
inscription, âge limite élevé à la réalisation d’une transplantation (85 ans).
Cependant, de nombreuses situations peuvent toujours donner lieu à
des interprétations divergentes et la portée des recommandations de la HAS
sur les pratiques des néphrologues est largement méconnue. L’ABM
devrait suivre les effets de ces recommandations et s’attacher à corriger les
pratiques qui s’en écartent, en sensibilisant plus fortement les
néphrologues.
2 -
Homogénéiser les conditions d’attribution des greffons
dans le cadre national
Afin d’objectiver l’attribution des greffons, l’ABM a mis au point,
pour les organes les plus prélevés - rein, foie, cœur, mais non le poumon à
ce jour -, des algorithmes permettant de calculer, à partir de règles définies
au préalable et des caractéristiques combinées des greffons disponibles et
des sujets prélevés, le meilleur score d’appariement.
Ce progrès indéniable s’accompagne toutefois de difficultés qui
n’ont pas toutes été résolues. Ainsi, s’agissant des greffons de reins,
généralement prélevés par deux sur les sujets décédés et dont la durée de
conservation en vue d’une greffe permet le transport sur toute la France
métropolitaine, l’algorithme prévoit depuis l’origine que l’un d’eux restera
479
En cas d’inscription sur la liste avec contre-indication temporaire, le score d’attribution
d’un greffon est augmenté pendant une année au plus.
480
Ainsi, parmi les nouveaux patients en insuffisance rénale chronique terminale (IRCT)
ayant débuté une dialyse préemptive en 2016, le taux d’inscription sur la liste d’attente
différait fortement selon les régions : 38,2 % en Ile-de-France, 30,9 % en Midi-Pyrénées,
mais 16,6 % en Lorraine, 15,6 % en Auvergne, 13,4 % dans les Hauts-de-France, 9 % à
la Martinique et 6,5 % à La Réunion. Si l’on compare ces chiffres à ceux de 2014-2015,
ces écarts ont augmenté en moyenne.
481
Haute Autorité de santé,
Transplantation rénale, accès à la liste d’attente nationale,
Méthode et recommandation pour la pratique clinique
, octobre 2015.
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336
au niveau de l’établissement ayant effectué le prélèvement, tandis que
l’autre est mutualisé par l’ABM. Par conséquent, deux logiques d’équité
coexistent et le score avantage globalement les zones où les prélèvements
sont les plus nombreux. Les équipes de greffe de petite taille sont
particulièrement attachées au « rein local », dont la suppression pourrait
remettre en cause leur activité.
Depuis la mise en service d’une nouvelle version de l’algorithme en
2015, l’ABM a atténué la portée de l’absence de mutualisation d’une partie
des greffons. Ainsi, elle a unifié les principes d’appariement aux niveaux
local et national, mis en œuvre une mutualisation dans le cadre national des
greffons non conservés par les établissements (au lieu d’une mutualisation
interne aux régions administratives de l’agence) et défini des règles visant
à favoriser les jeunes receveurs
482
et certaines compatibilités, ainsi qu’à
limiter les écarts d’âge entre donneurs et receveurs.
S’agissant du cœur, un nouveau score a été mis en place en 2018. Il
limite les appréciations écrites des équipes médicales difficiles à auditer,
sans toutefois les éliminer, introduit la notion de chance de réussite de la
post-greffe et organise une solidarité purement nationale, à l’instar des
autres organes que le rein.
L’ABM devrait continuer à améliorer la conception des scores
d’attribution de greffons, à la lumière d’études précises sur les résultats des
algorithmes en vigueur, en vue d’assurer une plus grande égalité d’accès à
la greffe au plan national, recommandée par la plupart des parties
prenantes
483
.
3 -
Fiabiliser les données prises en compte pour le calcul du score
des patients en attente de greffe
Les données relatives à l’état médical des patients candidats à la
greffe, comparées entre elles et après prise en compte des caractéristiques
des greffons disponibles, déterminent les scores des patients et, ce faisant,
leurs chances de bénéficier d’une transplantation dans un délai plus ou
moins rapide.
Des faiblesses affectent toutefois la fiabilité du système de données.
482
Des études subséquentes de l’ABM ont mis en évidence un effet réel de réduction
de la durée d’attente pour cette catégorie, aux dépens il est vrai des patients plus âgés.
483
Notamment le Comité national consultatif d’éthique, le conseil d’orientation de
l’ABM et les associations de patients.
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LA POLITIQUE DES GREFFES : UNE CHAÎNE DE LA GREFFE FRAGILE À MIEUX
ORGANISER
337
En premier lieu, les audits de l’ABM sur la concordance entre les
dossiers médicaux et les informations intégrées à ses systèmes
d’information sont espacés : les données relatives à un organe sont
contrôlées tous les quatre ans environ ; pour les cellules souches
hématopoïétiques, la périodicité est encore plus réduite
484
.
Ces audits font apparaître des fréquences significatives d’erreurs de
saisie ou d’absence de données : 9 % dans l’audit sur le rein de 2016, 16 %
pour l’audit sur le foie de 2011-2012, 30 % pour l’audit sur le cœur de
2009-2013 et 10,1 % pour les allogreffes de moelle osseuse en
2008-2009
485
. Ces moyennes nationales recouvrent de fortes disparités
entre les établissements de santé : si, pour les interventions sur le rein,
l’audit de 2016 a mis à jour 3 % d’erreurs à Besançon, elles concernaient
26 % des dossiers à la Pitié-Salpêtrière. Le cas, relevé par l’ABM, du
signalement d’une erreur une fois seulement que le calcul du score eut été
opéré sur la base de données erronées et plus favorables, et après attribution
du greffon, est particulièrement contestable.
D’autres difficultés se manifestent à l’interface des applications
informatiques, comme celles affectant les dates de dialyse pour le rein, qui
peuvent entraîner un score erroné en cas de renouvellement de la greffe
486
.
Enfin, dans certains cas, des critères déterminants pour apprécier le
caractère prioritaire de la greffe ne peuvent être audités. C’est notamment
le cas de ceux qui reposent sur une appréciation manuscrite du médecin,
plutôt que sur une caractéristique clinique mesurable.
Les négligences et mauvaises pratiques qui affectent les données
prises en compte pour calculer le score des candidats à la greffe nuisent à
l’égalité de traitement de ces derniers. Une action résolue de l’ABM et des
établissements de santé concernés s’impose afin de les faire cesser.
484
Ainsi, foie : 2011-12 et 2018 ; rein : 2015. Le dernier contrôle sur les allogreffes
date de 2008-9. Les prochains audits concerneraient le cœur en 2020 et le rein en 2021.
485
Par ailleurs, des difficultés aiguës affectent les cellules souches hématopoïétiques.
La base européenne Promise qui permet de suivre cette activité recèle en effet des
lacunes importantes. L’ABM signale ainsi qu’en 2016, 5,6 % des allogreffes et 29,9 %
des autogreffes n’étaient pas saisies.
486
C’est la date de la première dialyse qui est déversée depuis REIN (application qui
suit les patients dialysés), et non celle en cours, qui devrait être prise en compte. L’écart
entre ces deux dates à une portée importante pour apprécier la nécessité d’une nouvelle
greffe. Seules certaines équipes interviennent pour corriger cette anomalie.
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COUR DES COMPTES
338
C -
Renforcer la surveillance de l’ensemble des maillons
de la chaîne de la greffe
Les prélèvements et les transplantations d’organe sont des
opérations par nature risquées pour la santé des patients greffés et des
donneurs vivants. Plusieurs aspects de la chaîne des greffes présentent des
faiblesses auxquelles il importe de remédier.
1 -
Donner une portée accrue au dispositif de biovigilance
Le dispositif de biovigilance vise à assurer la qualité et la sécurité
des organes et des pratiques de greffe. Il est du ressort de l’ABM depuis
son transfert en 2016 de l’Agence nationale de sécurité du médicament et
des produits de santé (ANSM), cette dernière conservant cependant des
pouvoirs de contrôle et de sanction. Il comprend le repérage, le signalement
et le traitement des incidents par les équipes médicales concernées et, au
regard des enseignements pouvant être retirés de ces situations, la
préconisation par l’ABM d’actions d’amélioration de l’organisation des
activités et des pratiques dans l’ensemble des établissements.
Or, selon l’ABM, le nombre de signalements des incidents par les
équipes médicales « reste faible et inégal »
487
.
L’ABM a engagé plusieurs actions visant à rendre plus efficace le
dispositif de biovigilance. En 2018, elle a mis en ligne un outil de
télédéclaration des incidents afin d’alléger la tâche des correspondants de
la vigilance dans les établissements de santé. Elle a par ailleurs engagé des
travaux visant à dresser, en lien avec les sociétés savantes, une liste d’effets
attendus que les établissements n’auraient plus à déclarer et, à l’inverse,
ceux à surveiller particulièrement. Ces efforts devraient être amplifiés et
accompagnés d’une action de sensibilisation des équipes médicales.
487
ABM,
Rapport annuel sur le dispositif de biovigilance
, 2017. Selon ce même
document, 741 déclarations de biovigilance dans le domaine des greffes ou de
l’administration d’un produit issu du corps humain ont été effectuées en 2017, contre
564 en 2016.
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LA POLITIQUE DES GREFFES : UNE CHAÎNE DE LA GREFFE FRAGILE À MIEUX
ORGANISER
339
2 -
Améliorer les dispositifs de suivi de la santé des donneurs
et des patients greffés
Les donneurs vivants doivent être suivis à la suite du prélèvement,
car il s’agit d’une intervention lourde qui présente, d’après plusieurs études
internationales, un danger vital non nul, quoique statistiquement très faible.
Dans cette tâche, les hôpitaux se heurtent à des difficultés
logistiques, encore modestes mais appelées à croître avec le nombre de
donneurs en vie, ainsi qu’à des difficultés à localiser ces derniers et à
s’assurer que les examens médicaux prescrits sont réalisés. L’ABM a
effectué des études à ce propos, mais, récemment engagées, elles ne
couvrent pas encore la totalité du cycle de vie des donneurs ; de plus,
l’étude la plus récente remonte à 2014
488
.
L’état de santé des patients greffés appelle lui aussi un suivi attentif.
S’agissant des organes, en dépit des améliorations constantes des pratiques
médicales, les complications sont nombreuses et la mortalité, même si elle
est faible, reste significative, surtout dans la période qui suit
immédiatement l’intervention : pour les patients greffés d’un rein en
2015-2016, le taux de survie s’élevait ainsi en moyenne à 99,2 % à un mois
et à 96,8 % à un an
489
. Même quand la vie du patient n’est pas en jeu, le
greffon peut ne pas fonctionner, immédiatement ou après plusieurs années,
et une nouvelle greffe s’avérer nécessaire. Compte tenu du nombre
croissant et des chances élevées de survie des patients greffés, la charge
logistique du suivi de ces derniers s’accroît pour les établissements.
À cet égard, les situations sont contrastées entre établissements.
Selon l’observation de la Cour, elles sont moins favorables lorsque, comme
c’est le cas à l’AP-HM pour le poumon, ils ne peuvent se reposer en partie
sur des médecins de ville. L’appel à des infirmières en pratiques avancées,
pourrait, en dégageant du temps médical, améliorer la situation, mais un à
deux ans seront nécessaires pour rendre cette solution opérationnelle.
488
Ses résultats ont été évoqués
supra
à propos des prélèvements sur des donneurs
vivants.
489
Ces chiffres, issus des bases de données de l’ABM, sont en légère baisse depuis
quelques années, l’âge toujours plus élevé des patients greffés ayant un impact négatif
sur le taux de survie.
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340
3 -
Suivre plus étroitement les performances des équipes de greffe
Un système mis au point par l’ABM permet de mesurer les taux
d’échec des transplantations que les équipes de transplantation ont réalisées
à un, à trois et à cinq ans et de les comparer à la moyenne nationale.
Au CHU de Limoges, à la mi-mars 2016, neuf personnes sont
décédées à la suite de greffes cardiaques réalisées depuis début 2015, soit
un taux d’échec de plus de 50 %. L’activité a été suspendue, puis
définitivement arrêtée. Dans cette affaire, le système de mesure des
résultats n’a été d’aucune utilité car il comporte des délais excessifs : en
raison de décalages dans la collecte des données, mais aussi de la définition
même de cet indicateur, trois années sont nécessaires pour connaître le taux
d’échec à un an des greffes effectuées.
Afin de rapprocher les résultats de la période observée, l’ABM a
élaboré un nouvel indicateur fondé sur un type d’analyse statistique adapté
à la détection du changement dans la chronique des résultats de chaque
équipe de greffe. Cet indicateur, qui doit être prochainement généralisé, est
plus sensible
490
, mais ne permet pas de comparer les résultats des équipes
entre elles. En dépit des multiples données de contexte à prendre en
compte, ce travail pourrait cependant nourrir une réflexion sur
l’amélioration des pratiques des équipes de transplantation, en plus de
procurer une information utile aux candidats à la greffe.
D -
Employer de manière plus efficiente
les moyens accordés
Sur un plan économique, les greffes présentent un avantage
démontré par rapport aux alternatives connues (voir encadré
infra
).
Néanmoins, même dans le domaine de la greffe, des marges d’optimisation
des moyens engagés sont à mobiliser.
490
L’observation des résultats à trois mois et un système de relance pour l’obtention
des données visent à ramener à quatre mois le décalage entre les résultats et les
transplantations.
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LA POLITIQUE DES GREFFES : UNE CHAÎNE DE LA GREFFE FRAGILE À MIEUX
ORGANISER
341
La greffe du rein, stratégie la plus efficiente pour le traitement
de l’insuffisance rénale chronique terminale
Au 31 décembre 2017, 87 275 personnes étaient traitées pour
insuffisance rénale chronique terminale en France. Parmi celles-ci, 47 987
étaient dialysées et 39 288 étaient porteuses d’un greffon.
En 2017, les dépenses d’assurance maladie liées à cette pathologie
se sont élevées à 4,2 Md€, dont 3,4 Md€ au titre de la dialyse (séances,
transports et médicaments à titre principal) et 0,8 Md€ au titre de la greffe
(transplantation et suivi).
En 2017 également, la dépense annuelle moyenne atteignait
62 140 € pour les patients dialysés. Pour les patients en suivi de greffe, elle
s’élevait à 13 952 €.
Sous réserve de la durée d’usage des greffons
491
, qui varie en
fonction de ces derniers et des patients, la dépense annuelle moyenne au
titre d’un patient greffe est ainsi 4,5 fois moins élevée que celle au titre d’un
patient dialysé.
1 -
Réorganiser les activités de transplantation
À l’occasion d’une récente enquête sur le rôle des CHU dans l’offre
de soins
492
, la Cour a souligné la dispersion de l’activité de greffes
d’organe, tant sous l’angle des risques qu’elle fait courir à la santé que sous
celui des coûts qu’elle entraîne. Ainsi, en 2017, il y a eu quatre greffes de
cœur à Rouen et neuf à Nancy, contre 33 à Lille, 36 à l’hôpital Bichat de
Paris et 105 à la Pitié-Salpêtrière ; une seule greffe de pancréas a été faite
à Créteil, Montpellier ou Nancy, contre 20 à Nantes et 28 à Lyon. Même
pour le rein, qui connaît une activité plus importante, les greffes
pédiatriques sont dispersées : deux à Tours-Clocheville, quatre à Lille
Jeanne de France, contre 19 à Lyon et 20 à Paris Robert Debré.
Afin de favoriser la qualité et la sécurité des soins, l’autorisation des
activités de transplantation devrait être accordée en fonction de seuils
d’activité, différenciés par organe et non exclusifs d’autres critères, qu’il
s’agisse d’une accréditation renforcée des équipes ou de conditions d’accès
garanties au bloc opératoire. Cette évolution devrait constituer l’un des volets
de la réforme des autorisations d’activité engagée par le ministère de la santé.
491
Sur laquelle devrait être répartie une dépense moyenne de 69 138 € par patient greffé
en 2017.
492
Cour des comptes,
Communication à la commission des affaires sociales du Sénat,
Le rôle des CHU dans l’offre de soins, décembre 2018, 201 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
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342
Une réflexion devrait par ailleurs être engagée sur le maillage des
laboratoires d’analyse, généralement communs aux organes et à la moelle
osseuse. Si, dans le premier cas, la nécessité de sécuriser le suivi et de
disposer de résultats très rapidement et à toute heure du jour et de la nuit
impose un maillage assez étroit (29 laboratoires au total, soit plus d’un par
région
493
) et un fonctionnement 24 heures sur 24
494
, les contraintes sont
moindres s’agissant des greffes de cellules souches hématopoïétiques.
Dans ce dernier cas au moins, des économies d’échelle permettant de
réduire les tarifs pourraient être réalisées en spécialisant un nombre réduit
de plateformes, dont une ouverture nocturne ne serait pas nécessaire
495
.
S’agissant de l’activité de prélèvement, l’ABM peine à définir des
orientations concrètes. Entre des modèles théoriques d’équipes spécialisées
dans le prélèvement et des évolutions contradictoires sur le terrain, aucune
direction précise ne se dessine. Les bonnes pratiques ne sont pas
formalisées dans des référentiels. Les formations de base à l’université,
mais aussi celles organisées par l’ABM, ne dégagent pas davantage de
solutions immédiatement applicables. Même si, dans le cas précis de
certains organes comme le pancréas
496
, des groupes de travail ont été
réunis, les solutions à mettre en œuvre ne sont pas encore stabilisées.
2 -
Réviser certains tarifs
La construction complexe de la rémunération des activités liées à la
greffe, dans un domaine où les pratiques médicales évoluent rapidement,
appelle un suivi rapproché afin de procéder à des actualisations régulières
des cotations des actes. Dans plusieurs cas concernant notamment la moelle
osseuse, ce suivi devrait être renforcé.
À cet égard, une difficulté particulière concerne la tarification des
analyses d’histocompatibilité (HLA :
human leukocyte antigen
) pour la
moelle osseuse. Dans ce domaine, le développement particulièrement
rapide des techniques et la lenteur de l’actualisation de la nomenclature des
493
14 dépendent d’un CHU, 15 de l’Établissement français du sang.
494
Dans quelques cas au moyen de conventions passées avec d’autres laboratoires.
495
Dans le domaine des greffes de cellules souches hématopoïétiques en effet, à
l’exception de la sous-catégorie des greffes haplo-identiques, les analyses doivent être
généralement réalisées avant la greffe, donc sans urgence.
496
Pour cet organe au prélèvement difficile, la France est très en retard par rapport à
ses voisins (prélèvements de 1,2 par million d’habitant en 2015, contre 3,8 au Royaume-
Uni, 6 en Norvège, 3,1 en Suède, 2,1 en Espagne, etc.). L’ABM recense un nombre très
élevé de refus «
pour raisons logistiques
», indice d’une organisation perfectible.
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343
actes de biologie médicale effectuée par la CNAM
497
conduisent à des
cotations, pour certains des actes les plus couramment utilisés, supérieures
de 5 à 30 fois aux coûts de revient constatés. Ces écarts sont
particulièrement sensibles sur les techniques de séquençage de nouvelle
génération (NGS)
498
.
À l’enjeu d’économies lié à une révision des tarifs ou des forfaits
(qui peut être estimé à près de 30 M€, soit près de 8 % du total des dépenses
de l’assurance maladie consacrées aux greffes), suivant les modalités qui
apparaîtront les plus adaptées, s’ajoutent des risques médicaux car certains
établissements prescrivent moins d’analyses que ne le recommandent les
sociétés savantes.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
____________
Des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières années dans
le domaine des greffes. Leur nombre s’est accru jusqu’en 2017, permettant
ainsi de sauver de plus en plus de vies. Pour favoriser ce mouvement, le
ministère de la santé, l’Agence de la biomédecine, les établissements et les
professionnels de santé ont déployé des efforts considérables pour
appliquer les dispositions juridiques qui permettent de prélever de
nouvelles catégories de greffons. La France, déjà en avance par rapport à
la plupart des pays comparables, tout au moins pour les greffes effectuées
à la suite de prélèvements sur des sujets décédés, a amélioré sa position
relative en matière de taux de prélèvement et de greffe par habitant.
Au-delà de réussites indéniables, plusieurs signes préoccupants
affectent cependant la politique des greffes. Ainsi, la diminution de
l’activité en 2018, qui touche presque toutes les sources de prélèvement et
la chirurgie de transplantation, pourrait mettre en cause la réalisation des
objectifs du plan greffe 2017-2022 et risque d’accroître encore le nombre
de patients en liste d’attente, voire ceux qui décèderont à défaut d’une
transplantation. Plus profondément, la chaîne de la greffe connaît des
fragilités, qu’il s’agisse des contrôles et du suivi imparfaits de ses
différents maillons ou d’une égalité de traitement encore incomplètement
assurée dans l’accès à la transplantation du rein.
497
Cette faiblesse structurelle de notre système de santé a été fréquemment relevée par
la Cour. Voir Cour des comptes,
Rapport public thématique,
L’avenir de l’assurance
maladie :
assurer
l’efficience
des
dépenses,
responsabiliser
les
acteurs,
La Documentation française, novembre 2017, 287 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
498
Un typage HLA complet par NGS est facturé 25 € en Allemagne, contre 1 890 € en
France.
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344
Afin de donner un nouvel élan à la politique des greffes, il convient
notamment d’actionner les leviers qui peuvent conduire, à moyen terme, à
rééquilibrer l’offre et la demande de greffons, d’identifier et de faire
prévaloir les modes d’organisation du prélèvement les plus pertinents, de
mettre en œuvre un plan de sécurisation des pratiques des équipes de
transplantation et des données médicales des patients greffés et de
resserrer les règles d’autorisation des activités de transplantation.
La complexité et la sensibilité des enjeux font que ces nouveaux
progrès ne seront pas possibles sans la mobilisation, autour du ministère
de la santé et de l’ABM, de l’ensemble des parties prenantes :
établissements et professionnels de santé, patients, mais aussi le grand
public dont l’adhésion est un enjeu déterminant.
La Cour formule ainsi les recommandations suivantes :
31.
analyser les causes des disparités régionales pouvant être constatées
en matière d’opposition au prélèvement et développer les actions
visant à homogénéiser les pratiques des équipes de prélèvement dans
l’entretien avec les proches du défunt (Agence de la biomédecine) ;
32.
relancer les prélèvements, en accompagnant le développement et la
médicalisation des réseaux de prélèvement, en augmentant les actions
de formation des équipes de coordination hospitalières, en
sensibilisant davantage les professions médicales et en établissant des
référentiels de bonnes pratiques (Agence de la biomédecine, ministère
chargé de la santé, Haute Autorité de santé) ;
33.
mettre en œuvre un plan de sécurisation des pratiques des équipes de
transplantation et des données médicales des patients greffés,
reposant notamment sur une refonte des outils et des procédures
d’enregistrement des données et sur la formalisation de chaînes de
responsabilité, et approfondir le travail d’objectivation des scores
d’attribution des greffons (Agence de la biomédecine) ;
34.
instaurer des seuils minimaux d’activité par site géographique pour
les différents organes transplantés (recommandation réitérée)
(ministère chargé de la santé);
35.
rationaliser l’implantation des laboratoires d’analyse spécialisés pour
la greffe (ministère chargé de la santé, Agence de la biomédecine).
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