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Chapitre I
La situation et les perspectives
financières de la sécurité sociale :
un retour à l’équilibre repoussé,
une maîtrise des dépenses à renforcer
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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_____________________
PRÉSENTATION
_______________________
En juin 2019
1
, la Cour a présenté les résultats financiers de la
sécurité sociale en 2018. Le présent chapitre analyse les perspectives
financières de la sécurité sociale en 2019 et au cours des années suivantes.
En 2018, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité
vieillesse (FSV), qui constituent la principale composante de la sécurité
sociale, a continué à se réduire, passant de 5,1 Md€ en 2017 à 1,2 Md€
2
.
La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019
prévoyait pour cette même année un retour à l’équilibre financier du
régime général et du FSV, pour la première fois depuis 2001, avec un léger
excédent (0,1 Md€). Au cours des années suivantes, le régime général et le
FSV devaient dégager des excédents tendanciellement croissants,
permettant à la fois de rester à l’équilibre, de rétrocéder des recettes
fiscales à l’État et de rembourser en grande partie la dette sociale financée
par des emprunts de trésorerie de court terme émis par l’Agence centrale
des organismes de sécurité sociale (ACOSS).
Selon le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
2020, le déficit du régime général et du FSV, loin de disparaître,
augmenterait fortement pour atteindre 5,4 Md€ en 2019. En 2020, il
s’élèverait encore à 5,1 Md€. Le retour du régime général et du FSV à
l’équilibre n’interviendrait pas avant 2023. D’ici là, la dette sociale à
l’ACOSS continuerait à s’accroître, sans qu’une solution d’amortissement
soit à ce jour définie.
Ce premier chapitre examine la dégradation de la trajectoire
financière pluriannuelle de la sécurité sociale depuis la LFSS 2019. En
2019, au lieu de revenir à l’équilibre, le solde du régime général et du FSV
se détériorerait fortement par rapport à 2018, sous l’effet du coût des
mesures d’urgence de la fin 2018, mais aussi d’autres facteurs en recettes
et en dépenses (I). Alors que la sécurité sociale ne reviendrait pas à
l’équilibre avant 2023, des mesures correctrices sont nécessaires afin
d’assurer un équilibre durable et l’extinction de la dette sociale (II).
1
Cour des comptes,
La situation financière de la sécurité sociale en 2018 : un solde
proche de l’équilibre, des efforts de maîtrise des dépenses à poursuivre
.
La Documentation française, juin 2019, 60 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
2
À la suite du présent chapitre, sont présentés, en application des dispositions de
l’article LO. 132-3 du code des juridictions financières, les avis de la Cour sur la
cohérence des tableaux d’équilibre et du tableau patrimonial de la sécurité sociale pour
l’exercice 2018, qui seront soumis à l’approbation du Parlement dans le PLFSS 2020.
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34
COUR DES COMPTES
I -
Un déficit du régime général et du Fonds
de solidarité vieillesse en forte hausse en 2019
A -
Une nette détérioration du déficit attendue en 2019
Alors que la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour
2019 prévoyait un retour à l’équilibre, le déficit du régime général et du
FSV repartirait à la hausse en 2019. Cette évolution romprait avec la
trajectoire de réduction continue du déficit depuis 2011.
Selon le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS)
pour 2020, le déficit du régime général et du FSV s’établirait en 2019 à
5,4 Md€, après 1,2 Md€ en 2018 (graphique n° 1).
Ce déficit est plus élevé que celui qui figure dans la prévision
tendancielle de la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS)
de septembre 2019 (2,5 Md€). À titre principal, cet écart traduit la reprise
par cette prévision de l’hypothèse conventionnelle de la CCSS de juin
2019, selon laquelle les pertes de recettes de la loi portant mesures
d’urgence économiques et sociales (MUES) du 24 décembre 2018, adoptée
après la LFSS 2019, seraient compensées à la sécurité sociale. Le PLFSS
2020 prévoit toutefois la non-compensation de ces mesures d’urgence (à
hauteur de 2,7 Md€).
Le déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale
évoluerait de façon comparable, puisqu’il s’élèverait, d’après le
PLFSS 2020, à 5,5 Md€ en 2019 contre 1,4 Md€ en 2018.
Graphique n° 1 :
évolution du déficit agrégé du régime général
et du FSV (2008-2019, en Md€)
Source : Cour des comptes, d’après les données du rapport de la CCSS de septembre 2019 et du
PLFSS 2020.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
35
1 -
En 2018, un solde qui s’est rapproché de l’équilibre
grâce à l’évolution favorable des recettes
3
En 2018, le déficit du régime général et du FSV s’est réduit à
1,2 Md€, après 5,1 Md€ en 2017. En baisse régulière depuis 2011, il a ainsi
atteint un niveau proche de l’équilibre.
Cette nouvelle réduction du déficit en 2018 résulte au moins pour
moitié du dynamisme spontané des recettes. Ces dernières ont connu une
croissance spontanée supérieure à celle du PIB en valeur (+3 % contre
+2,5 %), du fait pour l’essentiel de la forte progression de la masse salariale
(+3,5 %), sur laquelle reposent la plupart des prélèvements affectés au
financement de la sécurité sociale. En outre, les prélèvements sur les
revenus du capital ont fortement augmenté, en lien avec l’instauration du
prélèvement forfaitaire unique (PFU) au 1
er
janvier 2018.
Les recettes ont également bénéficié d’un effet positif des mesures
nouvelles, à hauteur de 1,6 Md€, dont 0,9 Md€ lié à la hausse des droits de
consommation sur le tabac.
À cet égard, le dynamisme des recettes a plus que compensé
l’accélération des dépenses, en progression de 2,4 % en 2018 contre 2 %
en 2017 à champ constant. En effet, si les dépenses de l’ONDAM ont crû
au même rythme en 2018 qu’en 2017 (+2,2 %), les dépenses d’assurance
vieillesse ont progressé plus fortement, portées par l’effet en année pleine
de la revalorisation des pensions intervenue en cours d’année 2017 et par
un accroissement plus prononcé des effectifs de retraités.
Malgré les limites propres à l’analyse de soldes structurels
4
de sous-
secteurs d’administrations publiques, d’après l’estimation de la Cour, le
déficit du régime général et du FSV en 2018 avait pour l’essentiel un
caractère structurel, à hauteur de 1 Md€ environ.
3
Pour des éléments d’analyse plus détaillés, voir Cour des comptes,
La situation
financière de la sécurité sociale en 2018 : un solde proche de l’équilibre, des efforts de
maîtrise des dépenses à poursuivre
. La Documentation française, juin 2019, 60 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
4
C’est-à-dire de soldes effectifs ajustés des effets du cycle économique et des mesures
exceptionnelles et temporaires.
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36
COUR DES COMPTES
2 -
En 2019, une rupture avec la trajectoire de retour à l’équilibre
La LFSS 2019 prévoyait la poursuite du redressement du solde du
régime général et du FSV, conduisant à un retour à l’équilibre en 2019,
pour la première fois depuis 2001.
Au lieu d’un léger excédent (0,1 Md€), le solde du régime général
et du FSV devrait en réalité se dégrader fortement en 2019, pour la
première fois depuis 2011, en rupture avec la trajectoire de réduction
continue du déficit jusque-là observée.
D’après les prévisions du PLFSS 2020, le solde du régime général
et du FSV s’établirait en effet à -5,4 Md€ en 2019, soit une dégradation de
4,2 Md€ par rapport à 2018 et de 5,5 Md€ par rapport à la prévision de la
LFSS 2019 (tableau n° 1).
Tableau n° 1 :
soldes 2019 du régime général et du FSV
(LFSS 2019 et PLFSS 2020, en Md€)
2018
(1)
2019
LFSS
2019 (2)
2019
PLFSS 2020
(3)
2019
Écart à la
LFSS
(3)-(2)
Variation
2019/2018
(3)-(1)
Maladie
-0,7
-0,7
-3,0
-2,3
-2,3
AT-MP
0,7
1,1
1,1
0,0
0,5
Famille
0,5
1,1
0,8
-0,3
0,4
Vieillesse
0,2
0,6
-2,1
-2,7
-2,
2
Régime général
0,5
2,1
-3,1
-5,2
-3,6
FSV
-1,8
-2
-2,3
-0,3
-0,5
Vieillesse + FSV
-1,6
-1,4
-4,3
-
2
,
9
-2,
7
RG+FSV
-1,2
0,1
-5,4
-5,5
-4,2
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019 et du PLFSS 2020.
En 2019, les recettes connaîtraient une faible augmentation (+1,4 %
contre +2,5 % dans la LFSS 2019 et après +3,4 % en 2018), nettement
inférieure à celle des dépenses, qui s’accélèrent (+2,5 %, après +2,4 % en
2018, contre +2,1 % dans la LFSS 2019).
La dégradation de 5,5 Md€ du solde prévisionnel 2019 dans le
PLFSS 2020 par rapport à la LFSS 2019 a deux causes essentielles, d’égale
importance sur un plan financier.
En premier lieu, les mesures de la loi portant mesures d’urgence
(MUES, adoptée après la LFSS 2019) du 24 décembre 2018 se sont
traduites par 2,7 Md€ de pertes de recettes pour le régime général et le FSV,
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
37
en l’absence de compensation par l’État
5
. Ces pertes de recettes
correspondent à la réintroduction d’un taux de CSG de 6,6 % sur les
pensions de retraite des ménages dont le revenu est inférieur à certains
seuils
6
(-1,5 Md€) et à l’avancement au 1
er
janvier 2019 de l’exonération
des cotisations salariales des heures supplémentaires initialement prévue
au 1
er
septembre par la LFSS 2019 (-1,2 Md€).
Indépendamment du coût de ces mesures, les recettes et les dépenses
actualisées dans le PLFSS 2020 comportent des écarts significatifs par
rapport aux prévisions de la LFSS 2019.
Ainsi, les hypothèses économiques pour 2019 retenues dans le
PLFSS 2020
7
sont moins favorables que celles prises en compte lors de
l’élaboration de la LFSS 2019. À elle seule, la révision de la prévision de
croissance de la masse salariale soumise à cotisations sociales (+3 %
8
contre +3,5 %) entraîne 1 Md€ de moindres recettes entre la LFSS 2019 et
la prévision actualisée relative à 2019 dans le PLFSS 2020 (tableau n° 2).
Tableau n° 2 :
principales hypothèses économiques 2018 et 2019
2018
2019
LFSS
201
9
2019
PLFSS
2020
Taux d’évolution de la masse salariale en valeur
+3,5 %
+3,5 %
+
3
,
0
%
Taux d’évolution de l’indice des prix hors tabac
+1,6 %
+1,
3
%
+1,
0
%
Taux d’évolution du PIB en volume
+1,7 %
+1,7 %
+
1
,
4
%
Sources : LFSS 2019, rapport de la CCSS de septembre 2019 et PLFSS 2020.
De plus, alors que la LFSS 2019 retenait une hausse prévisionnelle
des dépenses de 2,1 % en 2019, à champ constant par rapport à 2018, les
dépenses augmenteraient de 2,5 % d’après la prévision du PLFSS 2020,
5
Ces deux mesures de perte de recettes font l’objet de dispositions expresses de
dérogation au principe de compensation de l’article L. 131-7 du code de la sécurité
sociale, pour la première dans le PLFSS 2020, pour la seconde dans la LFSS 2019.
6
Par exemple, dans le cas d’une personne seule, un revenu fiscal de référence inférieur
ou égal à 22 579 euros par an.
7
Ces hypothèses sont considérées par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP)
comme « atteignables » pour la prévision de croissance et « cohérentes avec les
informations disponibles » pour les prévisions d’inflation et de masse salariale (cf. avis
n°HCFP-2019-3 du 23 septembre 2019 relatif aux projets de lois de finances et de
financement de la sécurité sociale pour l’année 2020).
8
La prévision de croissance de la masse salariale totale, y compris la part non soumise
à cotisations sociales, est quant à elle de +3,3 %.
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38
COUR DES COMPTES
contre 2,4 % en 2018. Il en résulte 1,4 Md€ de dépenses supplémentaires
par rapport à la LFSS 2019.
B -
Une progression amoindrie des recettes, un nouveau
recul des cotisations dans le financement de la sécurité
sociale
La LFSS 2019 prévoyait une progression des recettes du régime
général et du FSV de 2,5 % en 2019, en recul par rapport à celle de 2018
(+3,4 %). Selon la prévision du PLFSS 2020 pour 2019, l’augmentation
des recettes par rapport à 2018 serait nettement plus faible, de 1,4 %
(tableau n° 3).
Tableau n° 3 :
recettes 2019 du régime général et du FSV
(LFSS 2019 et PLFSS 2020, en Md€)
2018
(1)
Variation
2018/2017*
2019
LFSS 2019
2019
PLFSS 2020
(2)
Variation
2019/2018
(2)/(1)
Maladie
210,8
+4,5 %
215,7
214,3
+1,6 %
AT-MP
12,7
-1,2 %
13,3
13,2
+3,7 %
Famille
50,4
+1,3 %
51,4
51,1
+1,3 %
Vieillesse
133,8
+1,6 %
137,5
135,
5
+1,
3
%
Régime général
394,6
+3,1 %
404,8
400,9
+1,6 %
FSV
17,2
+3,6%
16,5
16,6
-3,7 %
Total RG+FSV
394,6
+3,4 %
404,4
400,2
+1,4 %
* Variation nette de l’intégration en 2018 des produits du régime social des indépendants (RSI)
au régime général.
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019, du rapport de la CCSS de
septembre 2019 et du PLFSS 2020.
L’évolution ralentie des recettes traduit trois facteurs d’importance
inégale : un montant important de mesures nouvelles négatives parmi
lesquelles le coût, non compensé par l’État, des mesures de la loi MUES ;
une évolution de la masse salariale moins dynamique que prévu ; un effet
légèrement défavorable des changements d’affectation de recettes liés
principalement à la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité
et l’emploi (CICE) en des allègements généraux de cotisations patronales.
Au-delà de son incidence sur le solde du régime général et du FSV,
la recomposition des recettes ainsi opérée par la LFSS 2019 soulève
d’autres interrogations, qui portent sur la structure même du financement
de la protection sociale.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
39
1 -
Un important montant de pertes de recettes non compensées,
dans le cadre de l’évolution des relations financières entre l’État
et la sécurité sociale
La LFSS 2019 avait prévu l’absence de compensation de certaines
pertes de recettes, par dérogation au principe général de compensation des
exonérations et exemptions de cotisations et contributions sociales
9
,
comme le permettent les dispositions de niveau organique du code de la
sécurité sociale
10
(tableau n° 4).
Ces pertes de recettes non compensées dès la LFSS 2019
représentaient un montant prévisionnel de 1,6 Md€. Les principales
correspondent à la suppression du forfait social pour l’intéressement dans
les entreprises de moins de 250 salariés et pour l’ensemble des versements
d’épargne salariale dans les entreprises de moins de 50 salariés (0,6 Md€),
ainsi qu’à l’exonération au 1
er
septembre 2019 des cotisations salariales des
heures supplémentaires (0,6 Md€). Ces non-compensations étaient prises
en compte dans la prévision d’un retour à l’équilibre du régime général et
du FSV en 2019.
Au-delà, le PLFSS 2020 prend en compte le coût, soit 2,7 Md€,
des mesures de la loi MUES du 24 décembre 2018, non compensées par
l’État (voir A – 2 –
supra
).
Pour leur part, les autres mesures nouvelles se traduiraient par un
effet positif de 0,4 Md€. Il s’agit principalement de la suppression du crédit
d’impôt de taxe sur les salaires (+0,5 Md€), de la hausse des droits de
consommation sur le tabac (+0,4 Md€) et, en sens inverse, de la
compensation par des recettes du régime général des pertes de cotisations
pour les régimes spéciaux liées à la réforme du CICE (-0,4 Md€).
9
Article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.
10
Article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale.
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40
COUR DES COMPTES
Tableau n° 4 :
effet des mesures en recettes hors schéma de
compensation sur les produits du régime général et du FSV en 2019
(en Md€)
Intitulé de la mesure
Prévision 2019
Mesures de pertes de recettes non compensées par dérogation
au principe de compensation
-4,3
Mesures de la LFSS 2019
-1,6
Lissage des seuils de CSG sur les revenus de remplacement
-0,2
Abattement de l’assiette du forfait social
-0,6
Exonération de CSG et CRDS sur les revenus du capital
-0,2
Exonération au 1
er
septembre des cotisations salariales sur les
heures supplémentaires
-0,6
Mesures de la loi mesures d’urgence économiques et sociales
-2,7
Anticipation au 1
er
janvier de l’exonération de cotisations sur les
heures supplémentaires
-1,2
Baisse du taux de CSG sur une partie des retraites
-1,5
Autres mesures
0,4
Compensation par le régime général des baisses de taux de
cotisations maladie et famille pour les régimes spéciaux
-0,4
Effet en 2019 de mesures antérieures relatives aux prélèvements
sur les revenus de placement
-0,3
Compensation au régime complémentaire des non-salariés
agricoles de la suppression de la taxe sur les farines
-0,1
Effet du prélèvement à la source sur les prélèvements sur les
revenus du patrimoine
-0,1
Suppression du crédit d’impôt de taxe sur les salaires
0,5
Hausse des droits de consommation sur le tabac (LFSS 2018)
0,4
Revalorisation des carrières dans la fonction publique (LFI 2019)
0,1
Autre
11
0,2
Total des mesures nouvelles hors schéma de compensation
-3,9
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019, du rapport de la CCSS
de septembre 2019 et du PLFSS 2020.
Compte tenu par ailleurs de l’apparition d’un léger déséquilibre du
schéma de compensation (voir 3 –
infra
), les mesures nouvelles, prises
ensemble, dégraderaient le solde du régime général et du FSV de près de
4,5 Md€ par rapport à 2018. Ces pertes expliqueraient l’essentiel de cette
dégradation pour les branches maladie et vieillesse et du FSV
(tableau n° 5).
11
Il s’agit principalement de la modification du barème de la cotisation subsidiaire
maladie (-40 M€), de la création d’une contribution des organismes complémentaires
au « forfait médecin traitant » (+70 M€), de l’augmentation des droits de licence des
débitants de tabac (+40 M€) et de la modification des taxes sur les boissons sucrées
(+55 M€).
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
41
Tableau n° 5 :
effet des mesures en recettes sur les produits
du régime général et du FSV en 2019 (en Md€)
Maladie
AT-MP
Vieillesse
Famille
FSV
RG+FSV
Schéma de compensation de
la LFSS 2019
-0,3
0,0
0,4
-0,6
-0,1
-0,5
Mesures nouvelles hors
schéma de compensation
-1,4
0,0
-2,1
0,1
-0,6
-3,9
Total
-1,7
0,0
-1,6
-0,4
-0,6
-4,5
Rappel : variation par
rapport à 2018 du solde des
branches (PLFSS 2020)
-2,3
0,5
-2,2
0,4
-0,5
-4,2
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019, du rapport de la CCSS
de septembre 2019 et du PLFSS 2020.
2 -
Une évolution spontanée des recettes moins favorable que
prévu et affectée d’incertitudes
Les recettes du régime général et du FSV connaîtraient en 2019 une
évolution spontanée plus modérée qu’en 2018 (+2,6 % contre +3 %). En
particulier, l’évolution spontanée des prélèvements sur les revenus de
placement serait nettement plus faible en 2019 (+0,1 % contre +8,3 % en
2018). Surtout, la LFSS 2019 prévoyait une augmentation de la masse
salariale de 3,5 %, comme en 2018. Selon le PLFSS 2020, cette
augmentation serait limitée à 3 %. Il en résulte 1 Md€ de moindres recettes
par rapport à la prévision de la LFSS 2019.
La réalisation de cette hypothèse de progression de la masse
salariale, même révisée, reste cependant à confirmer. Elle nécessiterait une
progression de 0,8 % sur les deux derniers trimestres de 2019, après 0,7 %
en moyenne sur les deux premiers trimestres de cette même année. À cet
égard, les prévisions de recettes 2019 du PLFSS 2020 reposent sur
l’hypothèse que la prime exceptionnelle exonérée de cotisations sociales,
de CSG et de CRDS, instaurée par la loi MUES jusqu’au 31 mars 2019, ne
se substitue à aucun élément de rémunération déjà prévu par les
employeurs. Compte tenu de l’ampleur des montants versés au titre de cette
prime (2,1 Md€ au premier trimestre 2019 après 0,1 Md€ au quatrième
trimestre 2018), cette hypothèse de non-substitution pourrait ne pas être
vérifiée, avec des répercussions potentiellement négatives sur les recettes.
D’autres facteurs d’incertitude affectent le niveau des recettes 2019.
Ainsi, si l’ACOSS ne prend plus en charge en 2019 la compensation
à l’Unédic de la suppression des cotisations salariales d’assurance
chômage, elle assure désormais la compensation à l’Unédic et à
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42
COUR DES COMPTES
l’AGIRC-ARRCO des exonérations de cotisations patronales affectées à
ces régimes (voir 3 –
infra
). Il en découle que le solde de ces pertes de
cotisations, et des fractions de TVA et de taxe sur les salaires affectées à
l’ACOSS pour les compenser, sera imputé aux branches du régime général,
avec d’éventuels pertes ou gains pour ces dernières.
En outre, l’effet de la hausse des prix du tabac est estimé à partir
d’hypothèses d’élasticité-prix de la demande par produit (cigarettes, tabac
à rouler, cigares…) par nature fragiles, la réaction des consommateurs étant
difficile à anticiper une fois franchis des niveaux de prix jamais atteints
auparavant. Si les volumes de vente reculaient plus que prévu, ce qui n’a
pas été constaté à ce jour, les recettes de droits de consommation sur les
tabacs pourraient s’avérer inférieures au niveau anticipé.
3 -
Un effet légèrement défavorable de la recomposition
des recettes opérée par la LFSS 2019
La LFSS 2019 a procédé à une vaste recomposition des recettes de
la protection sociale, qui concerne non seulement le régime général et le
FSV mais, plus largement, d’autres entités des administrations de sécurité
sociale en comptabilité nationale, ou ASSO (Unédic, AGIRC-ARRCO
et CNSA principalement). Elles sont donc évoquées ici conjointement,
cette recomposition s’étant accompagnée de transferts de recettes entre le
régime général, le FSV et ces autres entités.
À cette fin, la LFSS 2019 a organisé un schéma général de
compensation équilibré pour le régime général et le FSV. Selon les données
de la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) de
septembre 2019, cet équilibre serait imparfaitement réalisé.
a)
Des pertes de recettes à compenser : réforme du CICE, suppression
des cotisations salariales chômage et effets de l’arrêt « de Ruyter »
Les pertes de recettes donnant lieu à compensation concernent en
2019 trois grandes opérations.
En premier lieu, la transformation du crédit d’impôt pour la
compétitivité et l’emploi (CICE) en des allègements généraux de
cotisations patronales et la révision concomitante de certaines exonérations
ciblées se traduiraient en 2019 par 24,1 Md€ de pertes de recettes à
compenser, dont 17,6 Md€ pour le régime général et le FSV, 1,1 Md€ pour
l’Unédic et 5,4 Md€ pour l’AGIRC-ARRCO.
En deuxième lieu, la suppression des cotisations salariales
d’assurance chômage en 2018 a été mise en œuvre en deux temps, par une
baisse du taux de cotisation de 1,45 point au 1
er
janvier 2018, suivie d’une
seconde de 0,95 point au 1
er
octobre. L’effet en année pleine de cette
dernière étape conduirait en 2019 à un surcroît de perte de recettes à
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
43
compenser de 4,3 Md€ pour l’Unédic, portant le total des pertes liées à
cette mesure à 14,3 Md€.
En troisième lieu, afin de tirer toutes les conséquences de la
jurisprudence « de Ruyter » (voir encadré), trois prélèvements sur les
revenus du capital (prélèvement social, prélèvement de solidarité et
contribution de solidarité pour l’autonomie), jusque-là affectés au FSV et
à la CNSA, ont été fusionnés en un nouveau prélèvement de solidarité
affecté à l’État. Dans le cadre de cette opération, il a par ailleurs été décidé
de rétrocéder 0,7 point de CSG sur le capital à l’État, afin d’aligner les taux
de CSG sur les revenus d’activité et du capital (9,2 %). L’ensemble de ces
mesures occasionnerait des pertes de recettes de 5,2 Md€ pour le FSV et
de 2,3 Md€ pour la CNSA.
Des réaffectations de prélèvements sur les revenus du capital
visant à tirer toutes les conséquences de l’arrêt « de Ruyter »
En 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé qu’en vertu
du principe d’unicité de législation en matière d’affiliation à un régime de
sécurité sociale, un affilié à un régime de sécurité sociale d’un autre État
membre ne pouvait être assujetti en France à des prélèvements sur les
revenus du capital affectés à des régimes de sécurité sociale (CJUE,
26 février 2015, affaire C-623/13,
Ministre de l’Économie et des Finances
contre Gérard de Ruyter
).
La LFSS 2016 a alors réaffecté la quasi-totalité des prélèvements
sociaux sur les revenus du capital au FSV et, dans une moindre mesure, à la
CNSA et à la CADES. Le législateur a en effet considéré que, ne finançant
pas de prestations contributives, ces organismes ne relevaient pas des
régimes de sécurité sociale au sens du droit de l’Union.
Toutefois, dans un arrêt de 2018, la Cour administrative d’appel de
Nancy a remis en cause ce raisonnement, en considérant que les impositions
affectées au FSV et à la CADES devaient également être soumises au
principe d’unicité de la législation (CAA de Nancy, 31 mai 2018,
Ministre
de l’Action et des comptes publics contre M. et Mme A.)
.
Dans ces conditions, afin de préserver l’assujettissement aux
prélèvements concernés des contribuables par ailleurs affiliés à un régime
de sécurité sociale d’un autre État membre de l’Union européenne, la
LFSS 2019 a réaffecté à l’État le prélèvement social, le prélèvement de
solidarité et la contribution de solidarité pour l’autonomie sur le capital,
désormais fusionnés en un prélèvement unique, le prélèvement de solidarité.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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44
COUR DES COMPTES
c)
Des pertes de recettes compensées par l’affectation
en 2019 d’une nouvelle fraction de TVA par l’État
L’ensemble de ces pertes de recettes sont compensées par l’État à
travers l’affectation de nouvelles fractions de TVA à la branche maladie
pour 30,1 Md€ et à l’ACOSS pour 5,1 Md€, les pertes de recettes
supportées par les autres entités des ASSO étant couvertes par des
redéploiements internes.
Au total, la fraction de TVA nette affectée à la sécurité sociale
12
au
titre des différentes pertes de recettes à compenser est portée en 2019 à
26 % du produit total de la taxe, soit 45,8 Md€, dont 40,7 Md€ pour la
branche maladie
13
et 5,1 Md€ pour l’ACOSS au titre d’AGIRC-ARRCO.
Ces réaffectations de TVA emportent des conséquences distinctes
sur les comptes de la sécurité sociale, établis en droits constatés, et sur la
comptabilité budgétaire de l’État, dont les effets sont neutralisés en
comptabilité nationale.
Une différence de traitement des nouvelles affectations de TVA entre
la comptabilité budgétaire de l’État et la comptabilité en droits
constatés de la sécurité sociale
Du côté de l’État, en comptabilité budgétaire, la part prélevée pour la
sécurité sociale le sera sur 11 mois, à partir de février 2019, et pèsera de l’ordre
de 42 Md€ sur le solde budgétaire en 2019, soit moins que le montant à
compenser (l’annexe du PLF 2019 sur les voies et moyens indique « un gain
de trésorerie ponctuel » de 3,8 Md€). En l’absence de modification du taux de
la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale en janvier 2020, l’écart
constaté en trésorerie en 2019 sera versé début 2020. Ce décalage est
néanmoins sans effet sur le solde du budget de l’État en comptabilité nationale.
Du côté de la sécurité sociale, seront enregistrés sur l’exercice
comptable 2019 ces 11 mois d’encaissements ainsi qu’un mois supplémentaire
au titre de produits à recevoir (TVA sur les ventes de décembre 2019, encaissée
en janvier 2020), soit 45,8 Md€ au total.
12
Les lois financières pour 2019 prévoyaient par ailleurs la compensation en 2019 de
l’exonération de cotisations bénéficiant aux travailleurs occasionnels agricoles
(TO-DE) par l’affectation d’un montant de TVA (0,4 Md€). Cette modalité de
compensation n’étant pas pérenne, cette exonération devant être compensée dès 2020
par des crédits budgétaires, ce montant de TVA n’est pas comptabilisé dans la fraction
de 45,8 Md€.
13
Ce montant de 40,7 Md€ correspond aux 30,1 Md€ de TVA nouvellement affectés à
la branche maladie en 2019 et à la valeur actualisée de fractions de TVA déjà affectées
à la sécurité sociale en 2018 : 0,6 Md€ déjà affectés à la branche maladie et 10,0 Md€
affectés à l’ACOSS pour la compensation de la suppression des cotisations salariales à
l’Unédic, réaffectés à la branche maladie en 2019.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
45
Par redéploiements internes, les pertes de recettes résultant de l’effet
en année pleine de la suppression des cotisations salariales chômage
(4,3 Md€) sont dès lors compensées par l’affectation à l’Unédic de
14,2 Md€ de CSG en provenance du régime général. En contrepartie, les
10 Md€ de TVA qui avaient été affectés à l’ACOSS pour financer en 2018
les pertes de cotisations chômage sont transférés à la branche maladie.
De même, les pertes de recettes de prélèvements sur les revenus du
capital pour le FSV (4,3 Md€ au titre des prélèvements sociaux et 0,9 Md€
au titre de l’alignement du taux de CSG sur les revenus du capital sur celui
des revenus d’activité) et la CNSA (2,3 Md€), soit 7,5 Md€ au total, sont
compensées par l’affectation de 7,3 Md€ de CSG en provenance du régime
général. Enfin, les pertes de recettes portées par les branches autres que la
branche maladie sont couvertes par des réaffectations de CSG et de taxe
sur les salaires internes au régime général.
d)
Un solde du schéma de compensation en définitive déséquilibré
Le schéma de compensation de la LFSS 2019 occasionnerait
néanmoins une perte de 0,5 Md€ pour le régime général et le FSV en 2019
(tableau n° 6).
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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46
COUR DES COMPTES
Tableau n° 6 :
schéma de compensation de la LFSS 2019 actualisé
des prévisions de la CCSS de septembre 2019,
toutes entités ASSO concernées (en Md€)
Intitulé de la mesure
RG
FSV
RG+FSV
ACOSS
Unédic
AGIRC-
ARRCO
CNSA
Mesures de basculement CICE/exonérations
de cotisations compensées
-17,6
0,0
-17,6
0,0
-1,1
-5,4
0,0
Baisse des cotisations maladie
-22,0
-22,0
Renforcement de l’allègement général
dégressif
5,3
5,3
-0,9
-5,1
Modification des exonérations ciblées
-0,8
-0,8
-0,2
-0,2
Suppression des cotisations salariales
chômage
-4,2
0,0
-4,2
0,0
-0,1
0,0
0,0
Effet en année pleine de la suppression des
cotisations
0,0
-4,3
Compensation à l’Unédic de la suppression des
cotisations
-4,2
-4,2
0,0
4,2
Dont fin de la compensation par l’ACOSS
0,0
10,0
-10,0
Dont transfert de TVA
10,0
10,0
-10,0
Dont transfert de CSG
-14,2
-14,2
14,2
Réaffectation à l’État de prélèvements sur
les revenus du capital
-7,3
-0,1
-7,4
0,0
0,0
0,0
-0,1
Transfert de prélèvements sur les revenus du
capital
-5,2
-5,2
-2,3
Réaffectation de CSG
-7,3
5,1
-2,2
2,2
Autres mesures de transferts de recettes
28,6
0,0
28,6
0,0
1,1
5,4
0,0
Affectation de TVA
30,1
30,1
5,1
Réaffectation de taxe sur les salaires
-1,4
-1,4
1,4
Compensation à l’Unédic et l’AGIRC-ARRCO
du basculement CICE/exonérations
0,0
-6,5
1,1
5,4
Bilan du schéma de compensation de la
LFSS 2019
-0,4
-0,1
-0,5
0,0
-0,1
0,0
-0,1
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019 et du rapport de la CCSS
de septembre 2019.
4 -
Des interrogations sur la part des cotisations dans les recettes
des branches du régime général et des régimes conventionnels
Indépendamment du niveau global des recettes, la recomposition
des recettes des administrations de sécurité sociale par la LFSS 2019
conduit à faire évoluer la nature de leur financement. Après le
remplacement en 2018 de cotisations salariales par des recettes de CSG, la
part des cotisations sociales dans le financement de la sécurité sociale, et
plus largement des ASSO, se réduit à nouveau en 2019 (graphique n° 2).
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
47
Graphique n° 2 :
évolution de la composition des recettes
du régime général et du FSV (1990-2019, en %)
Source : Cour des comptes, d’après les données des rapports de la CCSS de juin 1991, septembre
2001 et septembre 2019, et du PLFSS 2020.
Sous l’effet de la transformation du CICE en des allégements
généraux
de
cotisations
patronales,
les
cotisations
sociales
ne
représenteraient plus en 2019 que 51 % des recettes du régime général et
du FSV, contre 56 % en 2018. Par ailleurs, après la suppression en 2018
des cotisations salariales chômage, l’extension pour la première fois en
2019 des allègements généraux aux régimes conventionnels d’assurance
chômage et de retraite complémentaire conduit à une nouvelle diminution
de la part des cotisations dans le financement de ces derniers, qui
n’atteindrait plus que 59 % pour l’Unédic et 87 % pour l’AGIRC-ARRCO.
Cette évolution prolonge, en l’accentuant, le recul continu de la part
des cotisations sociales dans le financement de la sécurité sociale depuis le
début des années 1990.
Elle affaiblit la cohérence de la nature des recettes affectées aux
branches du régime général et aux régimes conventionnels avec celle des
prestations servies par ces entités. Certes, depuis 1970, le lien entre le
montant des prestations versées et celui des cotisations acquittées s’est
atténué. Toutefois, cet effacement de la logique contributive a surtout
concerné les branches famille et maladie (à l’exception cependant des
indemnités journalières et des pensions d’invalidité), mais moins la
0%
20%
40%
60%
80%
100%
1990
2000
2017
2018
2019 (p)
Cotisations sociales
CSG
TVA
Autres ITAF
Autre
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48
COUR DES COMPTES
branche vieillesse et les régimes conventionnels, dont le montant des
prestations reste fortement corrélé à l’assiette des cotisations
14
.
À cet égard, le déclin de la part des cotisations dans le financement
de la branche maladie (35 % des recettes en 2019) et la préservation de
cette source de financement pour la branche vieillesse (65 %) et l’AGIRC-
ARRCO (87 %) apparaissent globalement cohérents avec la nature des
prestations servies par ces entités. À l’inverse, la part des cotisations
sociales dans les recettes de l’assurance chômage (59 %) serait désormais
inférieure à celle de la branche famille (60 %), alors même que les
prestations chômage restent très liées aux cotisations, tandis que les
prestations familiales ont un caractère universel, indépendant de la qualité
ou non de cotisant de leurs bénéficiaires (graphique n° 3).
Graphique n° 3 :
composition en 2019 des recettes des principales
branches du régime général et des régimes conventionnels (en %)
Source : Cour des comptes, d’après les données des rapports de la CCSS de septembre 2018 et
juin 2019 et du PLFSS 2020, et les prévisions financières de l’Unédic de mars 2019.
14
Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale, septembre 2015
, chapitre IV Les cotisations sociales : une place prépondérante
mais en déclin dans le financement de la sécurité sociale, une cohérence et une lisibilité
à rétablir, p. 143-180, La Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Cotisations sociales
CSG
Autres ITAF dont TVA
Transferts
Autre
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
49
C -
Une progression plus rapide des dépenses
Le PLFSS 2020 évalue à 405,6 Md€ les dépenses du régime général
et du FSV pour 2019, soit une augmentation de 2,5 % par rapport à 2018
15
(tableau n° 7).
Les dépenses continueraient ainsi à accélérer, après des hausses à
périmètre constant de 2,4 % en 2018 et de 2,0 % en 2017. Par rapport à une
prévision d’augmentation de 2,1 % contenue dans la LFSS 2019, de fait
nettement dépassée, 1,4 Md€ de dépenses supplémentaires pourraient être
constatées fin 2019.
Tableau n° 7 :
dépenses 2019 du régime général et du FSV
(LFSS 2019 et PLFSS 2020, en Md€)
2018
Variation
2018/2017*
2019
LFSS 2019
2019
PLFSS
2020
Variation
2019/2018
Maladie
211,5
+2,4 %
216,4
21
7,2
+2,
7
%
AT-MP
12,0
+2,7 %
12,2
12,
1
+
0,
2
%
Famille
49,9
0,0 %
50,3
50,2
+0,6 %
Vieillesse
133,6
+2,9 %
136,9
137,
5
+2,
9
%
Régime général
394,1
+2,4 %
402,7
403,9
+2,5 %
FSV
19,0
-3,0 %
18,4
18,
9
-0,
5
%
Total régime
général et FSV
395,8
+2,4 %
404,2
405,6
+2,
5
%
* Variation nette de l’intégration en 2018 des charges du régime social des indépendants (RSI)
au régime général.
Source : Cour des comptes, d’après les données de la LFSS 2019, du rapport de la CCSS de
septembre 2019 et du PLFSS 2020.
Ce surcroît de dépenses par rapport à la prévision de la LFSS 2019
(soit +1,4 Md€) serait lié à des dépenses plus élevées que prévu au titre des
prestations sociales (+0,6 Md€), notamment d’assurance vieillesse, des
transferts liés notamment à la compensation démographique généralisée
entre régimes de retraite (+0,5 Md€) et des charges de gestion
administrative (+0,2 Md€).
15
Correspondant à la fois aux champs courant et constant car les mesures de périmètres
en dépenses sont marginales en 2019.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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50
COUR DES COMPTES
1 -
Des évolutions différenciées des dépenses des branches maladie
et AT-MP
En 2019, les dépenses de la branche maladie (soit 217,2 Md€)
augmenteraient de 2,7 %, soit un peu plus qu’en 2018 (+2,4 %). Cette
augmentation est plus élevée que celle des dépenses relevant de l’ONDAM
(+2,5 %), du fait notamment du dynamisme des prestations hors ONDAM
(+4,6 %) portées par la progression des dotations aux établissements et
services médico-sociaux (ESMS) financées sur les ressources propres de la
CNSA.
Les dépenses de la branche accidents du travail-maladies
professionnelles (soit 12,1 Md€) augmenteraient quant à elles de 0,2 % par
rapport à 2018. Pour une part, cette évolution traduit le contrecoup d’un
effet comptable (les provisions 2017, insuffisamment élevées, avaient
conduit à constater un niveau de dépenses plus élevé en 2018).
a)
Les dépenses relevant de l’ONDAM : une progression rehaussée
à 2,5 %, qui s’écarte de la trajectoire de la LPFP 2018-2022
Les dépenses relevant de l’ONDAM représentent 93 % du total des
dépenses de la branche maladie du régime général. La loi de financement
de la sécurité sociale pour 2019 a fixé à 200,3 Md€ (+2,5 %) l’objectif de
dépenses pour 2019, s’écartant de la trajectoire à moyen terme, fixée à
2,3 % par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les
années 2018 à 2022. Ce ressaut du taux de progression en 2019 induit un
montant de dépenses supplémentaires de 0,4 Md€, soit 1,7 Md€ en cumul
sur la période 2019-2022 par rapport à la trajectoire initiale (tableau n° 8).
À
l’exception
du
secteur
médico-social,
l’ensemble
des
sous-objectifs votés en LFSS 2019 connaît un taux d’évolution en
progression par rapport à 2018.
Tableau n° 8 :
évolution prévisionnelle de l’ONDAM 2019
globale et par sous-objectif (en Md€)
Objectif
2018 à
périmètre
2019
Objectif
2019
(LFSS
2019)
Taux
d’évolution
initial voté
ONDAM
2019 (en %)
Taux
d’évolution
initial voté
ONDAM
2018 (en %)
Soins de ville
89,3
91,5
+ 2,5
+2,4
Établissements de santé
80,7
82,7
+2,4
+2,0
Médico-social
20,3
20,8
+2,2
+2,6
FIR
3,3
3,5
+4,8
+3,1
Autres prises en charge
1,8
1,9
+6,3
+4,3
Total ONDAM
195,4
200,3
+2,5
+2,3
Source : LFSS 2018 et 2019.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
51
L’objectif d’économies, conditionnant la réalisation de l’ONDAM,
est légèrement inférieur à celui de 2018 (3,8 Md€ contre 4,2 Md€ en 2018).
Le sous-objectif « soins de ville » a été arrêté à 91,5 Md€ pour 2019,
correspondant à un taux d’évolution initial de 2,5 %, contre 2,4 % pour
2018. Cette accélération des dépenses serait imputable, selon le ministère,
à la mise en œuvre du plan « Ma Santé 2022 », dont l’impact sur l’exercice
2019 sera cependant encore limité, et à la mise en place d’offres de
prothèses dentaires et d’audioprothèses et d’équipements d’optique
comportant un reste à charge nul pour les assurés. La hausse tendancielle
spontanée des dépenses, avant économies et mesures nouvelles, serait par
ailleurs légèrement plus dynamique qu’en 2018 (+ 4,3 % contre + 4,2 %)
16
,
sous l’effet notamment de nouveaux accords conventionnels avec les
professionnels de santé (dont l’incidence est estimée à 0,2 Md€
17
) et
l’achèvement en 2019 de la montée en charge des revalorisations prévues
de la convention médicale de 2016 (soit 0,2 Md€ de dépenses
supplémentaires sur un montant prévisionnel de l’ordre de 1 Md€ à la
charge de l’assurance maladie).
Concernant les établissements de santé, le sous-objectif a été voté à
82,7 Md€, ce qui marque une hausse significative du taux d’évolution
initial (+2,4 %) par rapport à celui retenu pour 2018 (+2 %). L’évolution
tendancielle des dépenses avant économies s’établit à +3,7 %, contre +4 %
en 2018. Cette moindre progression reflète notamment la décélération des
prévisions de volume d’activité, estimées sur ce champ à +2 % pour les
établissements publics et privés non lucratifs (contre +2,6 % de prévision
initiale en 2018) et à +1,4 % pour les établissements privés lucratifs (contre
+1,6 % en 2018).
Le rehaussement de l’ONDAM hospitalier reflète aussi le report de
2018 sur 2019 de l’application du protocole « parcours professionnels,
carrières et rémunérations » (+0,2 Md€), l’intégration du soutien à
l’investissement prévu dans le cadre de la stratégie de transformation du
système de santé (+ 0,2 Md€), ainsi que la prise en compte d’un besoin de
financement exceptionnel des hôpitaux publics des DOM (+ 0,25 Md€). La
progression est toutefois atténuée par la reprise des allègements fiscaux et
16
Pourtant, la structure des jours ouvrés exerce un effet favorable en 2019. Selon la
direction de la sécurité sociale, l’impact sur l’ONDAM devrait être de -0,2 %, toutes
choses égales par ailleurs, alors qu’il avait été de +0,2 % en 2018 (une structure
calendaire neutre correspondant à une année telle que l’année 2021, où l’effet de
correction des jours ouvrés sera de 0).
17
Accords
conventionnels
passés
avec
les
masseurs-kinésithérapeutes,
les
orthophonistes, les orthoptistes, les pharmaciens et les sages-femmes.
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52
COUR DES COMPTES
sociaux pour les établissements privés lucratifs bénéficiant du crédit
d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), du pacte de
responsabilité et du crédit d’impôt de la taxe sur les salaires (-0,1 Md€).
S’agissant du secteur médico-social, le taux de progression des
dépenses comprises dans le champ de l’ONDAM (20,8 Md€) diminuerait
par rapport à 2018 (+2,2 % contre +2,6 %). Cette évolution traduit un
prélèvement accru sur les réserves de la CNSA (qui atteindrait 290 M€
contre 5 M€ en 2018), pour financer des dépenses médico-sociales en
marge de l’ONDAM. Dans le champ de l’objectif global de dépenses
médico-sociales (OGD), financé par l’ONDAM médico-social et des
ressources
propres
de
la
CNSA,
les
dépenses
médico-sociales
augmenteraient de +2,7 % (contre +2,4 % en 2018) afin de poursuivre la
réforme de la tarification des établissements d’hébergement pour
personnes âgées dépendantes et de traduire les engagements liés à
la stratégie nationale pour l’autisme 2018-2022.
D’après la CCSS de septembre 2019, les dépenses couvertes par
l’ONDAM devraient atteindre 200,2 Md€ fin 2019, affichant une sous-
exécution de 130 M€ par rapport à l’objectif de la LFSS 2019. Cette sous-
exécution tiendrait en grande partie au report sur 2019 de la sous-exécution
constatée fin 2018 sur les soins de ville, au décalage sur 2020 de certaines
revalorisations (notamment celles relatives aux soins infirmiers), et pour
les établissements de santé à une dynamique moins forte qu’anticipé des
dépenses de la liste en sus
18
.
Le PLFSS 2020 révise néanmoins à 200,4 Md€ l’objectif de
l’ONDAM pour 2019, fixé dans la LFSS 2019 à 200,3 Md€. L’écart de
0,2 Md€ par rapport à la prévision de la CCSS de septembre 2019
s’expliquerait par une augmentation de 130 M€ de la contribution de
l’assurance maladie au financement des établissements médico-sociaux
dans le PLFSS, ainsi que par une mesure de périmètre à hauteur de 40 M€
(dotation à l’Établissement français du sang).
b)
Une accélération des dépenses hors ONDAM
Les dépenses de prestations qui n’entrent pas dans le champ de
l’ONDAM (18,3 Md€ en prévision selon la CCSS de septembre 2019)
connaîtraient un taux d’évolution très supérieur à celui constaté en 2018
(+3,8 % contre +1,4 %). Cette évolution s’explique principalement par les
dotations aux établissements et services médico-sociaux (ESMS) financées
sur les ressources propres de la CNSA (hors dotations des régimes
18
La liste en sus regroupe les traitements (médicaments et dispositifs coûteux et
innovants) financés par l’assurance maladie en sus des séjours hospitaliers.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
53
d’assurance maladie comprises dans le champ de l’ONDAM), dont la
progression (+ 21,7 %) serait soutenue par la mise en œuvre du plan
« grand âge et autonomie ».
S’agissant des principaux autres postes de dépenses, la décélération
des dépenses de pensions d’invalidité observée en 2018 se confirmerait
(+2,4 % contre +2,5 % en 2018 et +5,1 % en 2017), tandis que les
indemnités journalières pour congés maternité et paternité progresseraient
sensiblement (+2,5 % contre +1,1 %).
2 -
Des dépenses de la branche vieillesse toujours dynamiques,
une évolution plus modérée des dépenses de la branche famille
a)
Une progression toujours forte des dépenses vieillesse
Selon le PLFSS 2020, les dépenses de la branche vieillesse
(137,5 Md€), composées à 95 % de prestations de retraite, augmenteraient
de 2,9 % en 2019, comme en 2018. Cette évolution dépasse sensiblement
la prévision d’une augmentation de 2,4 % des dépenses par la LFSS 2019.
Elle contribue ainsi à hauteur de 0,7 Md€ à la non-réalisation de la
prévision initiale de solde du régime général et du FSV.
Les prestations augmenteraient de 2,7 % en 2019, contre 2,2 % dans
la LFSS 2019, et après 2,9 % en 2018. Ce ralentissement traduit l’incidence
d’une moindre indexation. En effet, les prestations ont été revalorisées de
0,3 % au 1
er
janvier 2019
19
; en 2018, l’effet en année pleine de la
revalorisation intervenue au 1
er
octobre 2017 avait contribué à hauteur de
0,6 % à la progression des dépenses de prestations en moyenne annuelle.
Les autres dépenses de la branche vieillesse (soit 7 Md€)
connaîtraient
des
évolutions
contrastées.
Les
transferts
nets,
principalement composés des transferts de compensation démographique,
augmenteraient en 2019 plus fortement qu’en 2018 (+9,3 % après +4,9 %),
du fait d’une dégradation des ratios démographiques dans les régimes
autres que le régime général, notamment ceux de fonctionnaires. Les
dépenses de gestion courante augmenteraient légèrement (+0,4 % en 2019
après -1,3 % en 2018).
19
La mesure de réindexation des retraites inférieures à 2 000 € annoncée par le Président
de la République le 25 avril dernier prendra effet le 1
er
janvier 2020.
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54
COUR DES COMPTES
b)
Une reprise limitée des dépenses de la branche famille
Après avoir été stables en 2018, les dépenses de la branche famille,
d’environ 50 Md€, seraient plus dynamiques en 2019 (+0,6 %), tout en
étant conformes à celles de la LFSS 2019 (avec un écart négatif
de 0,1 Md€).
S’agissant des prestations légales (soit 31,3 Md€), l’effet de la
moindre indexation des prestations (+0,3 % au 1
er
avril plutôt que sur
l’inflation) permet une économie de 0,3 Md€ et conduit à modérer
l’évolution des dépenses des différentes prestations.
Les prestations d’entretien (allocations familiales, complément
familial, allocation de soutien familial, allocation de rentrée scolaire),
augmenteraient ainsi de 0,8 % (après +2 % en 2018). Du fait de mesures
d’économies antérieures, les dépenses liées à la prestation d’accueil du
jeune enfant (PAJE) continueraient à baisser (-2,2 %, après -3,3 % en
2018). Les autres prestations légales continueraient en revanche à
augmenter (+5,4 %, après +6,9 % en 2018), portées notamment par
l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (+6 % par an depuis
trois ans).
Après avoir été stables en 2018, les prestations extra-légales (soit
5,6 Md€) rebondiraient en 2019, comme prévu en LFSS 2019.
Enfin, les dépenses liées à la prise en charge par la branche de
l’assurance vieillesse des parents au foyer et des majorations de pensions
pour enfants, qui constitue l’essentiel des transferts nets entre branches et
régimes (soit 10,3 Md€), augmenteraient de manière modérée (+0,5 %,
après +0,3 % en 2018), sous l’effet notamment de la moindre indexation
des prestations.
D -
La poursuite de la hausse de la dette accumulée
à l’ACOSS
Du fait de la saturation depuis fin 2016 du plafond de reprise de
nouveaux déficits par la caisse d’amortissement de la dette sociale
(CADES), les déficits des branches maladie, famille, vieillesse et du FSV
s’accumulent à l’ACOSS qui les finance par des emprunts de très court
terme
20
. D’environ 15 Md€ fin 2016, ils pourraient atteindre de l’ordre de
30 Md€ fin 2019 selon les données du PLFSS 2020.
20
Il n’est pas pris en compte la branche AT-MP, dont l’équilibre est assuré sur le moyen
terme sans financement externe.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
55
Les déficits déjà transférés à la CADES continuent quant à eux à
être amortis. Grâce à l’affectation de ressources certaines (15,6 Md€ de
CSG et CRDS en 2018 et un versement annuel de 2,1 Md€ du fonds de
réserve des retraites jusqu’en 2024), la dette à amortir par la CADES se
situerait fin 2019 à 89,3 Md€, sur 260,5 Md€ transférés. Un amortissement
complet de cette dette est prévu en 2024.
Comme la capacité d’amortissement de la CADES (15,4 Md€ en
2018) est devenue supérieure depuis 2015 aux déficits constatés chaque
année, le total de la dette sociale porté par la CADES et l’ACOSS diminue
désormais. Dans l’acception ici prise en compte, la dette sociale a ainsi
baissé de 13,5 Md€ par rapport à 2017, pour s’établir à 128,9 Md€ fin 2018.
En 2019, l’augmentation du déficit du régime général et du FSV par rapport
à 2018, telle qu’elle résulte de la prévision du PLFSS 2020, ralentirait cette
évolution à la baisse (tableau n° 9).
Tableau n° 9 :
évolution de la dette sociale
(2015-2019, en Md€)
2015
2016
2017
2018
2019
(p)
(1) Situation nette négative de la
CADES
126,7
135,8
120,8
105,4
89,3
(2) Cumul à l’ACOSS des déficits
maladie, vieillesse, famille et FSV
non repris par la CADES
29,7
15,4
21,6
23,5
30,0
Endettement financier net de
l’ACOSS (p.m.)
31,2
20,9
27,2
21,5
(1)+(2) Dette sociale totale en fin
d’année*
156,4
151,2
142,4
128,9
119,3
* Hors déficits maintenus au régime de retraite des exploitants agricoles (3,7 Md€) et au régime
des mines (0,6 Md€).
Note : l’écart en 2018 entre le cumul des déficits non repris par la CADES et l’endettement net de
l’ACOSS (soit 2 Md€) s’explique par le solde des dettes et créances vis-à-vis des autres régimes
(-2,8 Md€), le solde de trésorerie de la branche AT-MP (+2,4 Md€) et le décalage temporel entre
trésorerie et droits constatés pour les autres branches (+2,4 Md€).
Source : Cour des comptes d’après les données des rapports de la CCSS et du PLFSS 2020.
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56
COUR DES COMPTES
La dette sociale est ici assimilée aux déficits transférés à la CADES
et non amortis par cette dernière et aux déficits des branches maladie,
famille et vieillesse et du FSV qui ne lui ont pas été transférés. En effet, les
pouvoirs publics ont continûment fixé à hauteur des déficits de ces
branches et du FSV le montant des prises en charge par la CADES de leurs
besoins de financement externe
21
.
Au total, la remontée du déficit du régime général et du FSV en 2019
et le maintien de déficits jusqu’en 2022 compris éloignent la perspective
d’une extinction progressive de la dette sociale maintenue à l’ACOSS,
initialement prévue par la LFSS 2019 au moyen de nouveaux transferts à
la CADES financés par l’affectation de fractions supplémentaires de CSG
et d’un léger sur-équilibre du régime général et du FSV à partir de 2019.
II -
À partir de 2020, une maîtrise accrue
des dépenses indispensable à un retour durable
de la sécurité sociale à l’équilibre financier
La LFSS 2019 prévoyait pour le régime général et le FSV un
excédent de 0,1 Md€ en 2019, puis de 0,6 Md€ chaque année entre 2020 et
2022. Ce scénario est désormais caduc. Ainsi, le retour à l’équilibre des
régimes de sécurité sociale et du FSV, prévu en 2019 par la LFSS 2019,
serait reporté à 2023 selon le PLFSS 2020.
La dégradation de la situation financière de la sécurité sociale
conduit par ailleurs à revenir sur l’affectation à partir de 2020 d’une
fraction supplémentaire de CSG à la CADES, prévue par la LFSS 2019
pour financer l’amortissement d’une part prépondérante de la dette sociale
portée par l’ACOSS, ainsi que sur la rétrocession de recettes de TVA à
l’État, prévue par la loi de finances pour 2019 dans le cadre de la rénovation
des relations financières entre l’État et la sécurité sociale.
Un ralentissement des dépenses apparaît ainsi nécessaire afin
d’assurer un retour pérenne de la sécurité sociale à l’équilibre financier,
par-delà les effets du cycle économique sur les recettes.
21
D’autres acceptions de la dette sociale sont parfois utilisées afin de représenter le
besoin de financement externe des régimes de sécurité sociale et du FSV : la somme du
report à nouveau et du résultat de l’exercice, qui reflète les capitaux propres – négatifs
– des branches et du FSV pris dans leur ensemble ; l’endettement financier net, autre
acception, qui correspond à la différence entre le passif et l’actif financier et prend en
compte, outre les besoins de financement des déficits, les besoins de trésorerie liés aux
écarts temporels entre encaissements et décaissements.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
57
A -
Une LFSS 2019 visant à la fois retour à l’équilibre,
extinction de la dette et rétrocession de recettes à l’État
La trajectoire pluriannuelle figurant à l’annexe B de la LFSS 2019
présentait un solde du régime général et du FSV proche de l’équilibre en
2019 (+0,1 Md€). Par la suite, ce solde positif devait augmenter pour
s’établir à +0,6 Md€ chaque année de 2020 à 2022.
Le scénario macroéconomique sous-jacent se caractérisait par une
croissance économique plus élevée que la croissance potentielle (1,7 % sur
2019-2022 pour une croissance potentielle de 1,3 %) et une remontée de
l’inflation qui atteignait 1,8 % en fin de période (tableau n° 10).
Cette trajectoire visait simultanément trois objectifs.
D’abord, elle inscrivait le solde du régime général et du FSV sur une
trajectoire durablement en excédent après près de 20 années de déficit.
Ensuite, elle engageait l’extinction de la dette sociale. D’une part, la
dette portée par la CADES était amortie, comme anticipé, d’ici 2024.
D’autre part, 15 Md€ de dette portée par l’ACOSS étaient également
transférés à la CADES et amortis par un transfert de CSG en sa faveur de
1,5 Md€ en 2020, de 3,5 Md€ en 2021 et de 5 Md€ en 2022 (en cumul).
Au-delà, la poursuite d’une trajectoire d’excédents laissait espérer la
disparition rapide de la dette résiduelle portée par l’ACOSS.
Enfin, dans le cadre de la rénovation des relations financières entre
l’État et la sécurité sociale, la trajectoire intégrait des pertes de recettes non
compensées par dérogation au principe de compensation pour 1,6 Md€ en
2019 (voir I – B – 1 –
supra
), ainsi qu’une rétrocession de TVA à l’État.
La loi de finances pour 2019 avait en effet prévu une réduction du produit
de la fraction de TVA affectée à la branche maladie du régime général, à
hauteur de 1,5 Md€ en 2020, de 3,5 Md€ en 2021 et de 5 Md€ en 2022
(en cumul)
22
.
22
Ce montant est à rapporter à la fraction de 26 % de TVA affectée à la sécurité sociale
en 2019, soit 45,8 Md€.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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58
COUR DES COMPTES
Tableau n° 10 :
évolution du solde agrégé du régime général
et du FSV de 2019 à 2022 selon la LFSS 2019
2019
2020
2021
2022
Croissance du PIB en volume (en %)
1,7
1,7
1,7
1,7
Progression de la masse salariale (en %)
3,5
3,7
3,8
3,7
Taux d’inflation (en %)
1,3
1,4
1,8
1,8
Solde du régime général et du FSV
(en Md€)
0,1
0,6
0,6
0,6
Solde du régime général et du FSV hors
transfert de CSG à la CADES et
rétrocession de TVA à l’État (en Md€)
0,1
3,6
7,6
10,6
Source : LFSS 2019 et calculs Cour des comptes.
B -
La remise en cause de la trajectoire financière de la
LFSS 2019 par le PLFSS 2020
Depuis l’adoption de la LFSS 2019, la révision des hypothèses
macroéconomiques, la progression plus rapide que prévu des dépenses et
le coût des mesures de la loi MUES ou annoncées depuis lors, ont conduit
le Gouvernement, dans les projets de lois financières pour 2020, à revenir
sur la rétrocession de TVA à l’État et les transferts de CSG à la CADES,
et à dégrader la trajectoire financière de la sécurité sociale.
Contrairement à la prévision de la LFSS 2019, le régime général et
le FSV, pris ensemble, ne reviendraient pas à l’équilibre avant 2023. En
2020, leur déficit atteindrait 5,1 Md€, en léger recul par rapport à 2019.
L’impact des différents facteurs de révision de la trajectoire
financière depuis la LFSS 2019 peut être illustré en partant de la trajectoire
d’évolution spontanée de la LFSS 2019, soit hors rétrocession de TVA à
l’État et hors transfert de CSG à la CADES. Dans ce scénario (« Trajectoire
LFSS 2019 spontanée » dans le graphique n° 4 ci-après), l’excédent du
régime général et du FSV aurait été porté de 0,1 Md€ en 2019 à plus de
10 Md€ en 2022.
L’application à cette trajectoire du coût des mesures prises ou
annoncées depuis l’adoption de la LFSS 2019, conduirait, hors rétrocession
de TVA à l’État et transfert de CSG à la CADES, à décaler le retour à
l’équilibre à 2020 (voir scénario « MUES + réindexation retraites » du
graphique n° 4 ci-après). En effet, l’avancement de l’exonération des
heures supplémentaires et la mesure CSG sur les pensions de retraite de la
loi MUES auraient un coût pour le régime général et le FSV de 2,7 Md€ en
2019, puis de 1,5 Md€ par an entre 2020 et 2022. De plus, la réindexation
intégrale sur l’inflation constatée des retraites inférieures à 2 000 euros, au
1
er
janvier 2020, représenterait une dépense supplémentaire pour la branche
vieillesse de l’ordre de 1,5 Md€ par an à partir de 2020.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
59
En outre, l’application des hypothèses de masse salariale du
PLFSS 2020 à cette trajectoire d’évolution conduirait à décaler d’une
année supplémentaire, à 2021, le retour à l’équilibre du régime général et
du FSV (voir « Révision scénario macroéconomique » du graphique n° 4
ci-après). En effet, la croissance de la masse salariale ne serait plus que de
3 % par an, en moyenne, contre 3,7 % auparavant sur la même période.
Enfin, la prise en compte des autres informations disponibles depuis
la LFSS 2019, dont un surplus de dépenses de 1,4 Md€ du régime général
et du FSV, conduirait à dégrader encore davantage la trajectoire.
Graphique n° 4 :
trajectoire de solde
du régime général et FSV du PLFSS 2020 et facteurs de révision
par rapport à la LFSS 2019 (2019-2023 en Md€)*
* Ces scénarios ne prennent pas en compte les rétrocessions de TVA à l’État et les transferts de
CSG à la CADES prévus par la LFSS 2019, ce qui explique les excédents croissants du scénario
« Trajectoire LFSS 2019 spontanée » entre 2020 et 2022, et non stabilisés à 0,6 Md€ comme dans
la LFSS.
Source : LFSS 2019, PLFSS 2020 et calculs Cour des comptes.
Les projets de lois financières pour 2020 tirent les conséquences de
ces révisions en revenant sur les rétrocessions de TVA à l’État et les
transferts de CSG à la CADES prévus par la LFSS 2019, et en reportant le
retour à l’équilibre du régime général et du FSV de 2019 à 2023.
-10
-5
0
5
10
15
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Trajectoire LFSS 2019 spontanée
MUES + réindexation retraites
Révision scénario macroéconomique
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60
COUR DES COMPTES
C -
Des risques en dépenses pour les années à venir
1 -
Des facteurs qui pèseront sur les dépenses de santé
a)
Des contraintes à prendre en compte dans la construction
de l’ONDAM 2020 et des années suivantes
Différentes contraintes pesant sur l’évolution des dépenses peuvent
d’ores et déjà être identifiées pour chacun des sous-objectifs de
l’ONDAM
23
.
S’agissant des soins de ville, les ONDAM des années 2020 à 2023
auront
à
prendre
en
compte
l’incidence
des
revalorisations
conventionnelles avec les professionnels de santé, de l’ordre de +0,6 Md€
en 2020 et de +1,2 Md€ au total sur la période 2020-2023
24
. En outre, la
mise en œuvre d’un « reste à charge 0 » sur une partie des offres de
prothèses dentaires et auditives et d’équipements d’optique engendrera des
dépenses supplémentaires évaluées à 0,7 Md€ sur l’ensemble de la période.
Le taux d’évolution annuel moyen des dépenses de médicaments,
très inférieur à celui des prestations et des autres produits de santé
(+0,2 %
contre +3,5 % sur la période 2014-2018), a contribué à contenir
l’évolution globale du sous-objectif « soins de ville » (graphique n° 5). Le
Gouvernement s’est engagé, à l’occasion du huitième conseil stratégique
des industries de santé (CSIS), à respecter un objectif minimal de
croissance annuelle de 0,5 % du chiffre d’affaires net des remises pour
l’ensemble des médicaments sur trois ans (dont 3 % pour les médicaments
innovants)
25
, ce qui fera peser une contrainte accrue sur le sous-objectif des
soins de ville.
23
Il convient de noter par ailleurs que l’ONDAM devrait être affecté en 2020 par un
effet calendaire défavorable en raison du caractère bissextile de cette année.
24
Négociations conventionnelles avec les médecins, orthophonistes, orthoptistes,
masseurs-kinésithérapeutes,
infirmiers,
sages-femmes,
chirurgiens-dentistes,
pharmaciens, assistants médicaux.
25
Selon les entreprises du médicaments (LEEM), le taux de croissance annuel moyen
du chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques aurait été de -0,6 % sur la période
2013-2017, tandis que selon le CEPS, le taux de croissance des ventes de médicaments
remboursables aurait progressé en moyenne de 0,2 % par an sur la période 2012-2017.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
61
Graphique n° 5 :
évolution comparée de la dépense de soins de ville
avec et hors médicaments (base 100 en 2012)
Source : Cour des comptes d’après la direction de la sécurité sociale.
Pour ce qui concerne les établissements publics de santé, le caractère
pérenne du ralentissement observé de leur activité (structurel ou
conjoncturel) demeure incertain. La montée en charge des médicaments
inscrits sur la liste en sus, des nouvelles classes thérapeutiques innovantes
à l’hôpital
26
et l’extension d’indication de certains dispositifs médicaux
27
pèseront sur les dépenses. Par ailleurs, la maîtrise des déficits des
établissements publics de santé (-660 M€ en 2018 selon les données
provisoires communiquées par la DGOS) est conditionnée à leur capacité
à contenir le taux d’augmentation annuel moyen de la masse salariale à
hauteur de +1,59 %, niveau légèrement supérieur à la hausse constatée au
cours des quatre dernières années (+1,50 %, dont +1 % en 2018).
Concernant l’ONDAM médico-social, le ministère chargé de la
sécurité sociale fonde le taux de progression des dépenses en 2020 sur une
hypothèse de reconduction du tendanciel de l’OGD 2019 (+2,7 %), sans
que l’incidence financière de la loi « grand âge et autonomie », dont le
projet de loi est annoncé pour l’automne 2019, ne soit encore connue. Dans
ce contexte, l’augmentation des dotations aux ESMS (+130 M€ en 2019)
dans la partie rectificative du PLFSS 2020 relative à 2019 constitue une
26
En particulier les médicaments anticancéreux (dits « anti-PD1 »), ou encore le
recours aux thérapies géniques (ou « CAR-T Cells ») ciblant spécifiquement les cellules
cancéreuses dans le traitement de la leucémie par immunothérapie.
27
En particulier, extension de la prise en charge des prothèses valvulaires TACI en
cardiologie.
95
100
105
110
115
120
125
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019 (p)
Soins de ville - médicaments (y compris remises)
ONDAM hospitalier
Soins de ville - hors médicaments
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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62
COUR DES COMPTES
première étape, modeste, du renforcement de la contribution de l’assurance
maladie au financement du grand âge. Elle vise surtout à alléger d’autant
l’exécution de l’ONDAM 2020.
b)
Des dispositifs de régulation infra-annuelle
des soins de ville insuffisants
Les contraintes sur l’ONDAM dans les années à venir rendent
d’autant plus nécessaire l’instauration de mécanismes de régulation en
cours d’année qui répartissent sur tous les segments de la dépense de santé
la charge du respect de l’objectif fixé par le Parlement.
À l’heure actuelle, cette charge est portée pour l’essentiel par les
dotations affectées aux établissements de santé et aux établissements
médico-sociaux. En dehors du médicament
28
et de la biologie médicale
29
,
les secteurs de la dépense de soins de ville sont dépourvus pendant l’année
de mécanismes de régulation destinés à assurer le respect de la prévision
de dépenses prise en compte dans le cadre de la construction de l’ONDAM.
Afin de faire contribuer l’ensemble des secteurs de la dépense à la
maîtrise de l’objectif global, la Cour a recommandé à plusieurs reprises
l’instauration pour les soins de ville d’une réserve prudentielle infra-
annuelle permettant de maîtriser les dépassements.
La LFSS 2019 a fait écho à cette recommandation, en intégrant dans
le sous-objectif relatif aux soins de ville une « réserve prudentielle » de
120 M€, dont le montant pourrait croître au cours des exercices suivants.
Cependant, cette réserve est réduite (0,06 % de l’ONDAM 2019 et
0,13 % du sous-objectif soins de ville). En outre, elle a été constituée en
majorant de 0,1 point l’évolution tendancielle des dépenses de soins de
ville ; si le ministère indique avoir gagé ce relèvement par un surplus
d’économies de montant équivalent, les exercices passés montrent que les
économies sur les soins de ville ne sont souvent que partiellement réalisées
(à hauteur de 65 % pour les objectifs de maîtrise médicalisée en 2018).
28
Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale, septembre 2017
, chapitre VIII La fixation du prix des médicaments : des
résultats significatifs, des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité, un
cadre d’action à fortement rééquilibrer, p. 335-444, La Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
29
Accord triennal de maîtrise des dépenses d’assurance maladie 2014-2016, puis
2017-2019.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
63
En dehors du médicament
30
et de la biologie, les conventions avec
les professionnels du secteur de la santé ne comportent pas de clauses de
sauvegarde ou de mécanismes de régulation prix-volume de nature à
permettre de circonscrire des dépassements par rapport à la prévision prise
en compte dans le cadre de la construction de l’ONDAM annuel.
Comme la Cour l’a évoqué
31
, plusieurs types de mesures, visant
chacune une catégorie particulière de dépenses, pourraient permettre de
mettre en œuvre une telle régulation :
-
la constitution d’une réserve à partir d’économies d’effet mécanique,
telles que le report de majorations de tarifs décidés dans le cadre
conventionnel, ou la mise en réserve d’une partie des dotations
forfaitaires ;
-
l’introduction d’une conditionnalité à la mise en œuvre de
revalorisations conventionnelles, liée au respect préalable d’une
norme d’augmentation de la dépense pour des actes ou prestations
concernés ;
-
la mise en place de clauses de sauvegarde, déclenchant par exemple
des baisses de prix temporaires en cas d’augmentation des volumes
remboursés excédant un certain seuil, sur le modèle de l’accord avec
les laboratoires d’analyses biologiques.
Certaines mesures pourraient voir leurs effets reportés sur l’exercice
suivant, notamment quand l’évolution de la dépense gagne à être appréciée
en année pleine, comme c’est le cas pour les dépenses de médicament.
La régulation des dépenses d’assurance maladie, tous dispositifs
confondus, ne sera par ailleurs pleinement efficace que si les déficits
d’exploitation des hôpitaux publics ne constituent pas un point de fuite à la
maîtrise des dépenses.
En 2017, le respect de l’ONDAM s’était accompagné d’un quasi-
doublement du déficit des hôpitaux (au titre de leur budget principal), qui
avait atteint 865 M€ contre 461 M€ en 2016. En 2018, ce déficit a diminué
(à 660 M€ selon des données provisoires) sans revenir à son niveau
antérieur.
30
Le PLFSS 2020 introduit une clause de sauvegarde pour les dispositifs médicaux, à
l’instar du médicament.
31
Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale, octobre 2018
, Chapitre II L’objectif national de dépenses d’assurance maladie :
une construction et une exécution fragiles, p. 65-100, La Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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64
COUR DES COMPTES
Comme la Cour l’a recommandé, la fixation d’une trajectoire
d’évolution pour l’ONDAM et pour ses sous-objectifs devrait donc
s’accompagner de l’adoption d’un objectif de maîtrise des déficits et de la
dette financière des établissements publics de santé.
2 -
Des incertitudes affectant les dépenses liées aux retraites
En 2018, la branche vieillesse du régime général et le FSV ont
dégagé un déficit de 1,6 Md€. Sur le champ global de l’ensemble des
régimes de retraite français légalement obligatoires
32
(y compris FSV et
hors régime additionnel de la fonction publique), le Conseil d’orientation
des retraites (COR) estime le besoin de financement à près de 3 Md€ en
2018. Selon le PLFSS 2020, le déficit de la branche vieillesse du régime
général et du FSV augmenterait en 2019 pour atteindre 4,3 Md€ (contre
1,6 Md€ en 2018).
À horizon de dix ans, à politique inchangée, la situation financière
du système de retraite poursuivrait sa dégradation dans l’ensemble des
scénarios de croissance tendancielle de la productivité du travail retenus
par le COR
33
. Ainsi, le solde global de l’ensemble des régimes de retraite
légalement obligatoires se dégraderait continûment jusqu’en 2030 pour
atteindre, selon le scénario retenu de productivité du travail et d’autres
hypothèses, un niveau compris entre -0,2 % et -0,8 % point de PIB.
Ces scénarios traduisent la conjonction de dépenses qui resteraient
stables ou croîtraient légèrement rapportées au PIB et de recettes qui
seraient moins dynamiques.
Ces
simulations
financières
défavorables
pourraient
rendre
nécessaires de nouvelles mesures pour assurer l’équilibre du système des
retraites d’ici à l’entrée en application de la réforme systémique annoncée.
À cet égard, le Premier ministre a demandé au COR de mettre à jour ses
projections financières jusqu’à 2030 d’ici la fin novembre 2019.
À plus court terme, en 2021 et 2022, comme anticipé dans la
trajectoire financière pluriannuelle de la LFSS 2019, toutes les prestations
de retraite seraient indexées en suivant la règle d’indexation légale (soit au
1
er
janvier). Dans un contexte attendu de hausse de l’inflation et d’une
évolution dynamique des effectifs de retraités, le retour au mécanisme
32
Ce champ contient les régimes de base de salariés du secteur privé (CNAV et MSA
salariés),
les
régimes
complémentaires
des
salariés
des
secteurs
privé
(AGIRC-ARRCO) et public (IRCANTEC), les régimes des fonctionnaires (État,
collectivités locales et hôpitaux), les régimes non-salariés (indépendants et exploitants
agricoles) et les régimes spéciaux (CNIEG, SNCF, RATP, Banque de France
notamment).
33
Conseil d’orientation des retraites, rapport annuel, juin 2019.
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
65
d’indexation de droit commun pour l’ensemble des pensions de retraite
aurait une incidence significative sur le rythme de leur évolution.
Ces dépenses supplémentaires interviendraient à un moment où le
rapport économique, social et financier attaché au projet de loi de finances
pour 2020 affiche l’objectif d’une amélioration significative du solde
structurel (+1 point de PIB entre 2020 et 2023), permise par une maîtrise
renforcée des dépenses des administrations publiques (APU) : celles-ci
croîtraient en volume de +0,4 % en moyenne sur 2021-2023, contre une
évolution moyenne de +0,7 % sur 2019-2020.
D -
Une nécessaire inflexion du rythme
de progression des dépenses
La remise en cause, en l’espace d’une année, de l’année de retour à
l’équilibre du régime général entre la LFSS 2019 et les prévisions du
PLFSS 2020 illustre le fait qu’un retour durable de la sécurité sociale à
l’équilibre financier ne peut être assuré par un simple décalage de quelques
années d’une trajectoire financière dont les paramètres en recettes et en
dépenses seraient maintenus à l’identique, mais exige une action continue
sur les dépenses.
En effet, la trajectoire financière du PLFSS 2020 conduit à une
nouvelle accumulation de déficits du régime général et du FSV (hors
branche AT-MP) de près de 16 Md€ entre 2020 et 2022. C’est ainsi près
de 46 Md€ que l’ACOSS devrait financer à court terme fin 2022, toutes
choses égales par ailleurs. Ce niveau est proche des 50 Md€ de besoin de
trésorerie auquel l’ACOSS a dû faire face fin 2010, au pic des effets de la
récession engendrée par la crise financière de 2008. Cette situation est
d’autant plus préoccupante qu’elle intervient alors que l’économie
française se situe à son niveau potentiel, selon l’évaluation du
Gouvernement.
En l’absence de mesures nouvelles en recettes, pour que le régime
général se maintienne à l’équilibre en termes structurels
34
, ses dépenses ne
doivent pas croître plus vite que la croissance potentielle du PIB
35
, à
34
Le solde structurel du régime général et du FSV est évalué à environ -1 Md€ en 2018.
Voir Cour des comptes,
La situation financière de la sécurité sociale en 2018 : un solde
proche de l’équilibre, des efforts de maîtrise des dépenses à poursuivre
.
La Documentation française, juin 2019, 60 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
35
Variation du PIB potentiel, lui-même défini comme le niveau d’activité soutenable,
sans tension sur les facteurs de production, notamment sur les prix et sur les salaires.
Sécurité sociale 2019 – octobre 2019
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66
COUR DES COMPTES
laquelle correspond le rythme de croissance tendancielle des recettes qui
lui sont affectées. Or, depuis 2000, et à l’exception de l’année 2015, les
dépenses de sécurité sociale à champ constant ont systématiquement crû
plus vite que la croissance potentielle, et ce bien que le respect de
l’ONDAM ait requis de faire chaque année, selon le ministère chargé de la
sécurité sociale, de l’ordre de 3 à 4 Md€ d’économies par rapport à
l’évolution
tendancielle
des
dépenses
d’assurance
maladie
(graphique n° 6).
Graphique n° 6 :
évolution comparée du taux d’augmentation
des dépenses des régimes obligatoires de base et du FSV
et de la croissance potentielle du PIB (en volume*, en %)
* Le taux de croissance des dépenses des régimes obligatoires de base et du FSV en volume est
obtenu en déflatant le taux de croissance de ces mêmes dépenses en valeur par le déflateur du
PIB, qui correspond au prix des biens et services produits sur le territoire national.
Source : Cour des comptes et programme de stabilité d’avril 2019.
Lorsque la croissance de la dépense est supérieure à la croissance
potentielle du PIB, le maintien à l’équilibre structurel du régime général et
du FSV nécessiterait chaque année des mesures nouvelles venant accroître
le niveau des recettes. Compte tenu du niveau atteint par les prélèvements
obligatoires, soit 45 % du PIB en 2018, il serait cependant difficile de les
augmenter ; dans le projet de loi de finances pour 2020, le Gouvernement
affirme d’ailleurs l’objectif d’une baisse du taux de prélèvements
obligatoires rapportés au PIB de 45 % à 44,3 % entre 2018 et 2020.
0%
1%
2%
3%
Croissance potentielle
Dépenses à champ constant
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LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE : UN RETOUR À L’ÉQUILIBRE REPOUSSÉ, UNE MAÎTRISE DES
DÉPENSES À RENFORCER
67
Il n’apparaît pas non plus souhaitable de financer ces mesures
nouvelles par des transferts de recettes de l’État à la sécurité sociale, alors
que le budget de l’État suit une trajectoire financière divergente de celle de
la sécurité sociale : d’après le rapport économique, social et financier
attaché au projet de loi de finances pour 2020, le déficit du budget de l’État
en comptabilité nationale atteindrait 4 points de PIB en 2020.
En définitive, un retour durable à l’équilibre financier du régime
général et du FSV implique de ramener la dynamique des dépenses au
niveau de la croissance potentielle ou en deçà de cette dernière.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
___________
Alors que l’année 2018 s’est inscrite dans la trajectoire, engagée en
2011, de retour progressif à l’équilibre de la sécurité sociale, 2019
marquera une rupture avec celle-ci.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 avait prévu
un retour à l’équilibre de la sécurité sociale en 2019, pour la première fois
depuis 2001. Mais, selon le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2020, le déficit du régime général et du FSV pourrait s’élever
à 5,4 Md€ en 2019, après 1,2 Md€ en 2018, soit un écart de 5,5 Md€ avec
la prévision de la LFSS 2019.
Le régime général et le FSV ne bénéficieraient pas en 2019 de
recettes aussi dynamiques qu’en 2018. D’une part, contrairement à 2018,
les mesures nouvelles viendraient diminuer les recettes d’environ 4,5 Md€,
du fait notamment du coût des mesures de la loi MUES (soit 2,7 Md€).
D’autre part, indépendamment de l’évolution des relations financières
entre l’État et la sécurité sociale, la progression de la masse salariale
prévue pour 2019 ne serait que de 3,0 %, contre 3,5 % en 2018 et dans la
prévision pour 2019 de la LFSS 2019, ce qui entraînerait 1 Md€ de
moindres recettes.
Les dépenses resteraient quant à elles dynamiques en 2019, avec
une augmentation de 2,5 % à champ constant, après 2,4 % en 2018, contre
2,1 % dans la LFSS 2019, d’où un surcroît de 1,4 Md€ de dépenses par
rapport à la prévision. Les dépenses relatives aux prestations de retraite
croîtraient un peu moins rapidement qu’en 2018 (+2,7 % contre +2,9 %),
mais plus que prévu dans la LFSS 2019 (+2,2 %). S’agissant des dépenses
d’assurance maladie, le taux de progression de l’ONDAM a été fixé à
2,5 %, ce qui marque une accélération par rapport à l’augmentation de
2,2 % constatée pour 2018.
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68
COUR DES COMPTES
En raison de la révision du scénario macroéconomique et de la prise
en compte des mesures adoptées ou annoncées depuis la LFSS 2019, le
PLFSS 2020 prévoit pour 2020 un déficit de 5,1 Md€ du régime général et
du FSV et repousse à 2023 leur retour à l’équilibre. Il revient par ailleurs
sur le transfert de 15 Md€ de dette de l’ACOSS à la CADES prévu par
la LFSS 2019 au moyen de la réaffectation de recettes de CSG à ce dernier
organisme. La dette sociale maintenue à l’ACOSS, financée à court terme
et sans solution d’amortissement, qui serait proche de 30 Md€ fin 2019,
continuerait ainsi à croître pour atteindre près de 46 Md€ fin 2022.
Le recul de quatre ans, entre la LFSS 2019 et le PLFSS 2020, de
l’année du retour à l’équilibre financier de la sécurité sociale intervient
alors que l’économie française se situe à son niveau potentiel, selon
l’évaluation du Gouvernement.
Un infléchissement du rythme de progression des dépenses est
impératif pour assurer le retour à un équilibre durable des régimes de
sécurité sociale et du FSV et l’extinction de la dette sociale. Cet effort doit
concerner tant les retraites que les dépenses de santé que prend en charge
l’assurance maladie, dont l’efficience doit être accrue et la régulation doit
être mieux assurée en cours d’année, y compris pour les soins de ville, tout
en maîtrisant les déficits des établissements hospitaliers.
La Cour formule ainsi les recommandations suivantes :
1.
arrêter des mesures d’économies structurelles en dépenses permettant
d’accélérer la trajectoire de retour à l’équilibre des régimes de
sécurité sociale et du FSV ;
2.
dans le cadre d’une trajectoire financière révisée, définir un schéma
d’extinction de la dette sociale maintenue à l’ACOSS ;
3.
intégrer dans la construction de l’ONDAM un objectif de maîtrise des
déficits et de la dette des établissements publics de santé
(recommandation réitérée).
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Avis de la Cour sur la cohérence
des tableaux d’équilibre et du tableau
patrimonial de la sécurité sociale
pour l’exercice 2018
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
71
_____________________ PRÉSENTATION_____________________
En application des dispositions de l’article LO. 132-3 du code des
juridictions financières, la Cour exprime un avis sur la cohérence des
tableaux d’équilibre par branche et sur la cohérence du tableau
patrimonial relatifs au dernier exercice clos, en l’espèce l’exercice 2018.
Ces documents seront soumis à l’approbation du Parlement dans le cadre
du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
Les tableaux d’équilibre correspondent à des comptes de résultat
combinés
72
couvrant, respectivement, l’ensemble des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale, le régime général, ainsi que les organismes
concourant au financement des régimes précités. Cette dernière catégorie
comprend un seul organisme : le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).
Depuis l’exercice 2016, le tableau d’équilibre du régime général
intègre, à la suite de la mise en place de la protection universelle maladie,
la plupart des charges et des produits de l’ensemble des branches maladie
des régimes obligatoires de base de sécurité sociale. En 2018, le déficit
agrégé du régime général et du FSV s’est établi à 1,2 Md€, contre 5,1 Md€
en 2017. Celui de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV a
atteint 1,4 Md€, contre 4,8 Md€ en 2017.
Le tableau patrimonial correspond à un bilan combiné des régimes
obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant à
leur financement (FSV), à l’amortissement de leur dette (Caisse
d’amortissement de la dette sociale – CADES) et à la mise en réserve de
recettes à leur profit (Fonds de réserve pour les retraites – FRR). Par
rapport à 2017, les capitaux propres qui y sont retracés (-77 Md€ au
31 décembre 2018) se sont améliorés de 11,6 Md€ et l’endettement
financier net de la sécurité sociale (86,8 Md€ fin 2018) s’est réduit de
16,1 Md€.
Les comptes des entités intégrées aux tableaux d’équilibre et au
tableau patrimonial font l’objet d’une certification obligatoire par la Cour
(branches et activité de recouvrement du régime général, État) ou, sauf
exception, par des commissaires aux comptes (autres entités).
72
Le terme de combinaison désigne la consolidation des comptes d’entités qui n’ont
pas de liens capitalistiques entre elles, mais qui entretiennent des relations suffisamment
étroites pour justifier l’établissement de comptes communs dans lesquels sont éliminées
leurs opérations réciproques.
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COUR DES COMPTES
72
Sous certaines observations portant sur leur présentation et sur la
fiabilité des données comptables qui y sont intégrées, les tableaux soumis
à l’avis de la Cour fournissent une représentation cohérente des recettes,
des dépenses et du solde (tableaux d’équilibre) et des actifs et passifs
(tableau patrimonial) des entités comprises dans leurs champs respectifs.
I -
Avis de la Cour sur la cohérence
des tableaux d’équilibre 2018
L’article LO. 111-3 (I- A. 1°) du code de la sécurité sociale dispose
que, dans sa partie comprenant les dispositions relatives au dernier exercice
clos, la loi de financement de la sécurité sociale « approuve les tableaux
d’équilibre par branche du dernier exercice clos des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale, du régime général et des organismes concourant
au financement de ces régimes ».
Pour l’application de ces dispositions, sont soumis à l’approbation
du Parlement, dans le cadre du projet de loi de financement annuel, trois
tableaux d’équilibre distincts relatifs au dernier exercice clos : le tableau
d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité
sociale mentionnés dans la liste triennale annexée au projet de loi de
financement pour 2018, présenté par branche, le tableau d’équilibre du
régime général, également présenté par branche, et le tableau d’équilibre
des organismes concourant au financement des régimes précités, cette
dernière catégorie se limitant au Fonds de solidarité vieillesse (FSV).
Depuis 2016, conformément à une recommandation de la Cour,
l’article 1
er
de la loi de financement de la sécurité sociale intègre une
rubrique relative au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) au sein du tableau
d’équilibre du régime général et de celui de l’ensemble des régimes
obligatoires de base de sécurité sociale.
Établis par la direction de la sécurité sociale, les tableaux d’équilibre
ont pour finalité d’assurer l’information du Parlement sur le solde de
l’ensemble des régimes obligatoires de base, du régime général et du FSV.
Les règles retenues pour leur élaboration sont mentionnées à l’annexe 4 au
projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Les tableaux d’équilibre se présentent sous la forme de comptes de
résultat retraités et simplifiés comprenant trois agrégats : le « solde », le
montant total des « recettes » et le montant total des « dépenses ».
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
73
Bien que conforme aux dispositions de l’article LO. 111-3 du code
de la sécurité sociale, cette terminologie n’a pas le même sens que pour la
comptabilité budgétaire de l’État. Ces « recettes » et ces « dépenses » ne
correspondent pas à des recettes encaissées et à des dépenses décaissées,
mais à des produits et à des charges d’une comptabilité générale établie en
droits constatés
73
, auxquels certains retraitements sont apportés ; de même,
le « solde » correspond à un résultat de comptabilité générale, et non à un
solde de trésorerie.
Par nature, la mention de montants globaux de produits et de charges
fournit une information réduite sur la formation des soldes soumis à
l’approbation du Parlement. L’annexe 4 au projet de loi de financement
détaille ces produits et charges par nature et en commente l’évolution par
rapport à l’exercice précédent et aux prévisions.
A -
Les tableaux d’équilibre pour l’exercice 2018
Les tableaux d’équilibre présentés ci-après figureront dans le projet
de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 soumis à
l’approbation du Parlement.
La Cour n’a pas été rendue destinataire par la direction de la sécurité
sociale du projet d’annexe 4 au projet de loi de financement, qui contient
des
informations
intéressant
les
tableaux
d’équilibre
(modalités
d’établissement, détail des recettes et des dépenses, analyse des évolutions
par rapport à 2017 et par rapport aux prévisions 2018).
Depuis l’exercice 2016, le tableau d’équilibre de la branche maladie
du régime général intègre, à la suite de la création de la protection
universelle maladie (PUMa), les charges et produits liés aux droits de base
des régimes financièrement intégrés au régime général (qui correspondent
aux prestations servies par le régime général).
Au titre de l’exercice 2018, les projets de tableaux d’équilibre
transmis à la Cour font apparaître un déficit agrégé des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale et du FSV de 1,4 Md€, contre 4,8 Md€ en 2017.
Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité
sociale, qui atteignait 1,9 Md€ en 2017, a fait place à un excédent de
0,3 Md€ en 2018.
73
Depuis 1996, la comptabilité des organismes de sécurité sociale doit être tenue en
droits constatés.
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COUR DES COMPTES
74
Le sous-ensemble constitué par le régime général et le FSV a dégagé
un déficit de 1,2 Md€, après un déficit de 5,1 Md€ en 2017. Le
régime général a enregistré un excédent de 0,5 Md€, contre un déficit de
2,2 Md€ en 2017. Le déficit du FSV est passé de 2,9 Md€ en 2017 à
1,8 Md€ en 2018.
Contrairement aux précédents exercices, le solde du tableau
d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité
sociale est inférieur à celui du régime général, en raison notamment du
déficit de la CNRACL (-0,6 Md€).
Tableau n° 11 :
tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes
obligatoires de base de sécurité sociale en 2018 (en Md€)
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
211,9
212,7
-0,8
Accidents du travail et maladies
professionnelles
14,0
13,3
0,7
Vieillesse
236,3
236,3
-0,1
Famille
50,4
49,9
0,5
Toutes branches
(hors transferts entre branches)
498,9
498,6
0,3
Fonds de solidarité vieillesse
17,2
19,0
-1,8
Toutes branches
(hors transferts entre
branches), y compris
Fonds de solidarité
vieillesse
497,7
499,1
-1,4
Source : direction de la sécurité sociale.
La liste triennale annexée au projet de loi de financement pour 2018
mentionne trente-cinq régimes obligatoires de base de sécurité sociale,
dont le détail est récapitulé en annexe. En dehors du régime général, les
régimes obligatoires de base comprennent douze régimes d’assurance
vieillesse, deux régimes d’assurance maladie, huit régimes d’accidents du
travail-maladies professionnelles, trois régimes mixtes d’assurance
vieillesse et d’assurance maladie, trois régimes mixtes d’assurance
vieillesse et d’accidents du travail-maladies professionnelles ainsi que six
régimes mixtes d’assurance maladie, d’assurance vieillesse et d’accidents
du travail-maladies professionnelles.
Cette liste n’a pas été mise à jour à la suite de la suppression, à
compter du 1
er
janvier 2018, du régime social des indépendants (RSI) et du
régime spécial d’assurance maladie du personnel du Port autonome de
Bordeaux, ainsi que de l’intégration des fonds communs des accidents du
travail des salariés non agricoles (FCAT) et des salariés agricoles (FCATA)
aux branches respectives des accidents du travail et des maladies
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
75
professionnelles du régime général et de la mutualité sociale agricole
(MSA) et de la clôture du régime des chemins de fer de l’Hérault à la suite
du décès de son dernier bénéficiaire (février 2017).
Tableau n° 12 :
tableau d’équilibre
du régime général de sécurité sociale en 2018 (en Md€)
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
210,8
211,5
-0,7
Accidents du travail et maladies
professionnelles
12,7
12,0
0,7
Vieillesse
133,8
133,6
0,2
Famille
50,4
49,9
0,5
Toutes branches
(hors transferts entre
branches)
394,6
394,1
0,5
Fonds de solidarité vieillesse
17,2
19,0
-1,8
Toutes branches
(hors transferts entre branches), y
compris Fonds de solidarité vieillesse
394,5
395,8
-1,2
Source : direction de la sécurité sociale.
Tableau n° 13 :
tableau d’équilibre des organismes concourant au
financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale
(en Md€)
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de solidarité vieillesse
17,2
19,0
-1,8
Source : direction de la sécurité sociale.
B -
Avis de la Cour
Conformément aux dispositions de la loi organique relative aux lois
de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, la Cour exprime un
« avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre par branche du dernier
exercice clos ».
À cette fin, la Cour s’assure de l’établissement des tableaux
d’équilibre à partir des données comptables des entités entrant dans leur
champ, de l’élimination de l’ensemble des produits et des charges
réciproques de ces entités, de la pertinence des autres retraitements
effectués au regard des principes comptables applicables et de la
permanence des méthodes mises en œuvre. De manière générale, elle
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COUR DES COMPTES
76
apprécie la qualité de l’information procurée au Parlement dans le cadre et
à l’appui des tableaux d’équilibre.
En outre, l’appréciation de la Cour tient compte des opinions
exprimées sur les comptes des régimes de sécurité sociale et du FSV par
leurs auditeurs externes (Cour des comptes pour les branches et l’activité
de recouvrement du régime général, commissaires aux comptes dans le
cadre d’une mission d’audit légal pour la plupart des autres régimes et pour
le FSV, et commissaires aux comptes agissant en tant qu’auditeurs
contractuels pour certains régimes
74
).
°
En application du 2° du VIII de l’article LO. 111-3 du code de la
sécurité sociale, auquel renvoie l’article LO. 132-3 du code des juridictions
financières, la Cour a procédé à des vérifications sur les tableaux d’équilibre
de l’exercice 2018 établis par la direction de la sécurité sociale, qui seront
soumis à l’approbation du Parlement à l’article premier du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2020.
À l’issue de ces vérifications et sur le fondement des éléments
d’information qui lui ont été communiqués par la direction de la sécurité
sociale, la Cour estime que les tableaux d’équilibre précités fournissent une
représentation cohérente des recettes, des dépenses et du solde qui en
découle. Elle formule néanmoins les [trois] observations suivantes :
1. à la date de ses constats, la Cour n’a pas été rendue destinataire du
projet d’annexe 4 au projet de loi de financement qui contient des
informations
intéressant
les
tableaux
d’équilibre
(modalités
d’établissement, détail des recettes et des dépenses, analyse des évolutions
par rapport à 2017 et par rapport aux prévisions 2018) ;
2. les tableaux d’équilibre sont établis en procédant à des
contractions de produits et de charges non conformes au cadre normatif fixé
par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale
pour l’établissement des comptes sociaux (cf. C- 1
infra
) ;
3. les réserves formulées par la Cour dans le rapport de certification
des comptes de 2018 du régime général de sécurité sociale et les opinions
émises par les commissaires aux comptes soulignent les limites qui
continuent d’affecter la fiabilité des comptes des régimes de sécurité sociale
intégrés aux tableaux d’équilibre pour l’exercice 2018, sous l’effet,
notamment, de faiblesses persistantes des dispositifs de contrôle interne et
de difficultés comptables (cf. C- 2
infra
).
74
Sur cette question, voir C- 2
infra
.
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
77
C -
Motivations détaillées de l’avis de la Cour
1 -
Des modalités d’élaboration des tableaux d’équilibre
non conformes au cadre normatif en vigueur
Au-delà des opérations de neutralisation des produits et charges
réciproques entre les entités comprises dans leur champ décrites dans
l’annexe 4 au projet de loi de financement, les tableaux d’équilibre sont
présentés en regroupant en recettes les produits et charges qui concernent
les prélèvements sociaux affectés aux régimes de sécurité sociale et en
dépenses les charges et produits qui concernent les prestations dont ils
assurent le versement.
Cette présentation induit des contractions de produits et de charges,
qui conduisent à intégrer aux tableaux d’équilibre :
-
en réduction des produits : les pertes sur créances de cotisations, de
CSG et d’impositions irrécouvrables (admissions en non-valeur,
abandons de créances et remises de pénalités) ;
-
selon le cas, en réduction ou en majoration des produits :
l’augmentation ou la diminution des dépréciations de créances sur les
cotisants et des provisions pour risques et charges relatives aux
prélèvements sociaux ;
-
selon le cas, en majoration ou en réduction des charges :
l’augmentation ou la diminution des provisions pour rappels de
prestations sociales et des dépréciations de créances sur les
prestations.
Comme la Cour l’a souligné, les contractions ainsi opérées
s’écartent du cadre fixé par les dispositions de niveau organique du code
de la sécurité sociale pour l’établissement des comptes sociaux et du
principe
comptable
général
de
non-compensation
des
produits
et des charges.
De ce fait, elles minorent les montants des produits et des charges
par rapport à ceux retracés dans les comptes annuels des régimes de
sécurité sociale et du FSV (à hauteur de 15,8 Md€ pour l’ensemble des
régimes, dont 14,4 Md€ pour le régime général et 0,4 Md€ pour le FSV).
Ainsi, seuls les soldes figurant dans les tableaux d’équilibre
correspondent à l’agrégation des soldes comptables des régimes, tandis que
les recettes et les dépenses diffèrent des charges et des produits arrêtés
selon le référentiel comptable des organismes de sécurité sociale.
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COUR DES COMPTES
78
2 -
La fiabilité des données comptables intégrées
aux tableaux d’équilibre
À l’exception de régimes de petite taille auxquels s’attachent des
enjeux financiers très limités, les comptes de l’ensemble des régimes
obligatoires de base de sécurité sociale mentionnés dans la liste triennale
annexée au projet de loi de financement pour 2018 ainsi que ceux du FSV
ont fait l’objet, selon les cas :
-
d’une certification par la Cour (régime général de sécurité sociale,
État, Assemblée nationale) ;
-
d’une certification par un ou plusieurs commissaires aux comptes
(douze régimes et le FSV) ;
-
contrairement aux dispositions législatives qui prévoient une
certification et, donc, un audit légal, d’un audit contractuel effectué
par les commissaires aux comptes de l’organisme auquel la gestion de
ces régimes a été déléguée
75
.
Le tableau ci-après présente une synthèse des opinions exprimées
par les auditeurs externes.
75
Régimes gérés par la Caisse des dépôts et consignations, à l’exception de la
CNRACL, ainsi que le régime de retraite de la Banque de France.
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
79
Tableau n° 14 :
opinions exprimées par les auditeurs externes sur les
états financiers de l’exercice 2018 des régimes obligatoires de base
et du FSV
76
Branches/organismes
nationaux du régime
général
Autres régimes
En % des
charges
brutes 2018
Certification sans
réserve(s)
-
20 régimes, dont, pour la
première fois, l’établissement
national des invalides de la
marine
8,6 %
Absence de réserve
(régimes sans
personnalité
morale distincte)
-
Régime
des
pensions
des
agents de l’État ;
régime
de
retraite
de
l’Assemblée nationale
9,2 %
Certification avec
réserve(s)
Les
quatre
branches
(maladie, AT-MP, vieillesse
et famille) et l’activité de
recouvrement
du
régime
général
Régimes des salariés et des
non-salariés agricoles ; Caisse
d’assurance
vieillesse,
invalidité
et
maladie
des
cultes ;
Caisse
nationale
d’assurance
vieillesse
des
professions libérales ; Caisse
de retraites du personnel de la
RATP ; Fonds de solidarité
vieillesse
82,2 %
Régimes à enjeux
limités
-
Un
régime
(ex-Seita,
en
extinction)
Non
significatif
Source : Cour des comptes.
76
Par rapport aux 35 régimes mentionnés dans la liste annexée au projet de loi de
financement pour 2018, figurent ici 29 régimes (regroupement en un seul régime - le
régime agricole - des régimes des salariés et des non-salariés agricoles ; intégration à
compter du 1
er
janvier 2018 au régime général du régime social des indépendants, du
régime spécial d’assurance maladie du personnel du Port autonome de Bordeaux et du
fonds commun des accidents du travail ; intégration au régime agricole du fonds
commun des accidents du travail agricole ; clôture du régime des chemins de fer de
l’Hérault).
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COUR DES COMPTES
80
a)
Les positions exprimées par la Cour sur les comptes des branches
et de l’activité de recouvrement du régime général
Pour la sixième année consécutive, la Cour a certifié les comptes de
toutes les entités du régime général de sécurité sociale, tout en formulant
29 réserves
77
.
La levée de 28 points d’audit confirme la poursuite de progrès en
matière de contrôle interne dans l’ensemble des branches, mais aussi les
difficultés rencontrées pour franchir un nouveau palier dans la maîtrise des
risques de portée financière auxquels sont exposées leurs activités.
Le renforcement, par la branche maladie, des dispositifs de contrôle
interne s’est poursuivi en 2018, à travers le déploiement des référentiels
nationaux par processus, qui intègrent le service médical. Les processus de
production
présentent
cependant
des
fragilités
persistantes,
liées
notamment à l’insuffisance des contrôles embarqués dans les systèmes
d’information, s’agissant du règlement des frais de santé facturés par les
professionnels et les établissements de santé. En outre, la fréquence et
l’incidence financière des erreurs qui affectent les indemnités journalières
nouvellement mises en paiement ont continué à se dégrader en 2018.
Dans la branche AT-MP, malgré la mise en place d’un nouveau
référentiel de contrôle interne, des faiblesses continuent d’affecter de
même la fiabilité des prestations mises en paiement. Les fragilités des
échanges de données entre caisses primaires et les organismes tarificateurs
affectent la correcte détermination des taux bruts entrant dans le calcul des
taux de cotisations sociales au titre du risque professionnel.
Dans la branche famille, les dispositifs de contrôle interne ont été
adaptés afin de répondre aux évolutions réglementaires, mais les risques
financiers restent insuffisamment maîtrisés, comme en témoigne la
dégradation des indicateurs relatifs aux montants d’erreurs affectant les
prestations versées. La prime d’activité, le RSA et les aides au logement
concentrent 85 % des erreurs non détectées à titre définitif par les
dispositifs de contrôle interne mis en œuvre par la branche ; la plupart de
ces erreurs sont liées aux données déclarées par les allocataires.
Dans la branche vieillesse, dans le contexte d’une augmentation du
nombre de demandes de retraite, les indicateurs relatifs à la fréquence et à
l’incidence financière des erreurs qui affectent les retraites nouvellement
77
Cour des comptes,
Rapport de certification des comptes du régime général de
sécurité sociale, exercice 2018
, La Documentation française, mai 2019, 63 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
81
attribuées se sont à nouveau dégradés. Ce constat traduit les fragilités
persistantes
des
dispositifs
de
contrôle
interne
applicables
aux
régularisations de carrière et à la liquidation des droits des assurés.
La fiabilité des dispositifs de maîtrise des risques demeure
également insuffisante dans l’activité de recouvrement et les systèmes
d’information conservent des faiblesses de nature à faire peser des risques
sur le recouvrement des prélèvements sociaux. Des difficultés ont
également été observées dans la gestion des rejets de déclarations sociales
nominatives (DSN).
b)
Les opinions exprimées par les commissaires aux comptes
sur les comptes des autres régimes et du FSV
Comme depuis 2016, les états financiers du FSV ont été certifiés par
son commissaire aux comptes sous une réserve, motivée par l’absence de
dispositif de financement externe des dettes du fonds vis-à-vis de la
branche vieillesse du régime général (soit 8,3 Md€ fin 2018). Ces dettes
correspondent aux déficits du fonds qui n’ont pas été repris par la CADES.
Les commissaires aux comptes du régime agricole ont maintenu une
réserve pour limitation aux travaux d’audit au titre des flux notifiés par la
branche maladie et l’activité de recouvrement du régime général ainsi que
par l’État, en raison des réserves exprimées par la Cour sur les états
financiers de ces entités. Une réserve pour limitation a également été émise
sur les cotisations sociales salariés et les comptes rattachés du fait
d’anomalies dans la répartition par branche des cotisations comptabilisées
et de l’absence de rationalisation de la variation des cotisations salariés par
rapport aux exercices précédents.
En l’absence de réconciliation des montants comptabilisés en
créances et en dettes entre la Caisse d’assurance vieillesse, invalidité et
maladie des cultes (CAVIMAC) et la CNAM, le commissaire aux comptes
a émis une réserve pour limitation sur les états financiers de la CAVIMAC.
Comme les exercices précédents et en l’absence de transmission par
l’ACOSS des données individuelles pour 2016, 2017 et 2018 relatives au
régime des micro-entrepreneurs, les commissaires aux comptes de la caisse
nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) ont
estimé ne pas être en mesure de se prononcer sur l’exhaustivité et la
fiabilité des cotisations comptabilisées par l’une de ses sections
professionnelles,
la
caisse
interprofessionnelle
de
prévoyance
et
d'assurance vieillesse des professions libérales (CIPAV).
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COUR DES COMPTES
82
En l'absence de contrôles sur les assiettes déclarées par la RATP,
qui permettraient de s'assurer de la conformité et de l'exhaustivité des bases
servant à l'évaluation des cotisations dues, les commissaires aux comptes
de la CRP RATP ont émis une réserve sur les états financiers de la caisse.
Pour la première fois, les états financiers l’établissement national
des invalides de la marine (ENIM) sont certifiés sans réserve par ses
commissaires aux comptes, en raison des progrès intervenus en matière de
contrôle interne.
Les comptes des autres régimes ont été certifiés sans réserve.
II -
Avis de la Cour sur la cohérence du tableau
patrimonial au 31 décembre 2018
En application de l’article LO. 111-3 (I- A. 3°) du code de la sécurité
sociale, est soumis à l’approbation du Parlement un rapport figurant à
l’annexe A du projet de loi de financement de la sécurité sociale retraçant
la situation patrimoniale, au 31 décembre du dernier exercice clos, des
régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur
financement (Fonds de solidarité vieillesse - FSV -), à l’amortissement de
leur dette (Caisse d’amortissement de la dette sociale - CADES -) ou à la
mise en réserve de recettes à leur profit (Fonds de réserve pour les retraites
- FRR -) et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents
et la couverture des déficits constatés relatifs au dernier exercice clos.
Selon l’article LO. 111-4 (II-) du code de la sécurité sociale, ce
rapport présente un tableau, établi au 31 décembre du dernier exercice clos,
retraçant la situation patrimoniale des entités précitées.
Élaboré par la direction de la sécurité sociale, le tableau patrimonial
a pour objet d’assurer l’information du Parlement sur la situation
patrimoniale de la sécurité sociale et de ses principales composantes. À
cette fin, il consolide l’ensemble des bilans des régimes et organismes
compris dans son périmètre, après neutralisation des actifs et passifs
réciproques de ces entités.
Les règles retenues pour son élaboration et la consistance de ses
rubriques sont détaillées à l’annexe 4 au projet de loi de financement de la
sécurité sociale, où sont, par ailleurs, justifiés les besoins de trésorerie des
régimes et organismes habilités à recourir à l’emprunt.
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
83
Le périmètre du tableau patrimonial est moins étendu que celui de
la loi de financement de la sécurité sociale, puisque certains régimes en
sont écartés, soit en l’absence de bilan, soit parce que le montant total de
leur bilan est inférieur à 30 M€ et qu’ils ne sont, par ailleurs, pas autorisés
à recourir à l’emprunt par la loi de financement de l’année.
A -
Le tableau patrimonial au 31 décembre 2018
Le tableau patrimonial au 31 décembre 2018 présenté ci-après, qui
sera soumis à l’approbation du Parlement dans le cadre du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2020, figurera à l’annexe A visée à
l’article 2 de ce projet de loi.
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84
Tableau n° 15 :
tableau patrimonial au 31 décembre 2018
Source : direction de la sécurité sociale.
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
85
Le tableau patrimonial au 31 décembre 2018 traduit la poursuite de
l’amélioration de la situation patrimoniale de la sécurité sociale, à la suite
des évolutions intervenues au cours des deux exercices précédents.
Par analogie avec la présentation des comptes de l’État, le montant
présenté en capitaux propres (-77 Md€ au 31 décembre 2018) pourrait être
assimilé à la situation nette consolidée des entités entrant dans le champ
des lois de financement de la sécurité sociale.
En 2018, les capitaux propres se sont améliorés de 11,6 Md€, après
12,8 Md€ l’année précédente et 8,1 Md€ en 2016 :
-
le résultat net d’ensemble est positif, en 2018, à hauteur de 14,9 Md€,
soit une amélioration de 2,4 Md€ par rapport à 2017. Cette évolution
s’explique principalement par l’amélioration du solde du régime
général, qui passe de -2,2 Md€ à +0,5 Md€ et par la réduction du solde
déficitaire du FSV, de -2,9 Md€ à -1,8 Md€. Ce résultat net
d’ensemble incorpore le déficit des autres régimes (-0,2 Md€ en 2018,
contre +0,2 Md€ en 2017), ainsi que les résultats excédentaires
dégagés par la CADES et par le FRR à hauteur, respectivement, de
15,4 Md€ et de 0,9 Md€
78
;
-
le report à nouveau, qui reflète les résultats des années antérieures,
apporte une contribution positive à la variation des capitaux propres
(à hauteur de 6,6 Md€). Le report à nouveau du FSV se dégrade de
6,6 Md€, compte tenu de l’affectation, en 2018, du déficit de
l’exercice 2016 en sus du déficit de l’exercice 2017, les comptes de
l’exercice 2016 n’ayant été approuvés par le conseil d’administration
du fonds qu’en 2018. Le report à nouveau du régime général se
dégrade de 1,6 Md€, du fait, notamment, de l’affectation des déficits
pour 2017 des branches maladie (-4,9 Md€) et famille (-0,2 Md€),
partiellement compensée par l’excédent des branches AT-MP
(1,1 Md€) et vieillesse (1,8 Md€). Le report à nouveau négatif de la
CADES se réduit de 15 Md€, soit l’affectation de son résultat 2017,
pour s’établir à -121 Md€.
78
Ces derniers n’ont toutefois pas pour objet de compenser les résultats déficitaires des
régimes et du FSV relatifs au même exercice. La CADES a pour mission d’amortir la
dette sociale qui lui a été transférée. Son résultat mesure donc sa capacité à réduire son
endettement propre. Le FRR concourt au financement à long terme des régimes de
retraite de base, après déduction du versement annuel de 2,1 Md€ à la CADES prévu
de 2011 à 2024.
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COUR DES COMPTES
86
L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à
la différence entre le passif
79
et l’actif financiers
80
, atteint 86,8 Md€ au
31 décembre 2018. Pour la troisième fois depuis la création du tableau
patrimonial, en 2009, il connaît une réduction (de 16,1 Md€ par rapport à
2017), sous l’effet combiné de :
-
la diminution de l’endettement financier net du régime général
(-5,2 Md€), qui s’établit à 26,1 Md€ au 31 décembre 2018, dont
21,3 Md€ portés par l’ACOSS
81
;
-
la diminution de l’endettement financier net de la CADES
(-13,7 Md€), qui s’établit à 106,6 Md€ au 31 décembre 2018. Ses
passifs financiers ont baissé de 16,5 Md€, notamment sur les postes
relatifs aux papiers commerciaux émis en devises (-7,2 Md€), aux
emprunts obligataires (-9,5 Md€) et aux dépôts de garantie reçus
(+0,2 Md€). La dégradation de la trésorerie nette de la CADES
(-1,9 Md€, contre -1,5 Md€ en 2017) s’explique principalement par
les flux de trésorerie liés aux émissions et remboursements de dettes
financières (-17,3 Md€ nets, contre -16,4 Md€ en 2017) dans le
contexte de l’absence de reprise de nouveaux déficits par cet
organisme depuis 2017 (après 23,6 Md€ en 2016). Dans le cadre de
l’élaboration du tableau patrimonial, les créances nettes au titre des
instruments financiers incluent par ailleurs 0,2 Md€ de dépôts de
garantie versés correspondant à des appels de marge (contre 1,1 Md€
en 2017), reclassés du poste « Immobilisations » au poste « Actifs
financiers ».
B -
Avis de la Cour
Conformément
aux
dispositions
de
la
loi
organique
du
13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la Cour exprime
un avis sur la cohérence du tableau patrimonial du dernier exercice clos.
79
Pour l’essentiel, l’endettement social porté par la CADES et par l’ACOSS.
80
Les actifs financiers sont principalement détenus par le FRR (32,6 Md€), le régime
de retraites de la Banque de France (11,1 Md€), la CADES (2,7 Md€), la MSA
(2,2 Md€) et l’ACOSS (2,1 Md€).
81
L’endettement financier net de l’ACOSS au 31 décembre 2018 correspond au
montant de ses dettes financières (23,5 Md€), déduction faite du solde de ses
disponibilités au bilan (2,2 Md€). Pour l’essentiel, les dettes financières comprennent
des titres émis sur les marchés financiers (23,1 Md€, contre 27,3 Md€ en 2017).
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
87
À cette fin, la Cour s’assure de l’établissement du tableau
patrimonial à partir des données comptables des entités entrant dans son
champ, de l’élimination de l’ensemble des actifs et des passifs réciproques
de ces entités
82
, de la pertinence des autres retraitements des données
comptables effectués au regard des principes comptables et de la
permanence des méthodes mises en œuvre. De manière générale, elle
apprécie la qualité de l’information procurée au Parlement dans le cadre et
à l’appui du tableau patrimonial.
En outre, l’appréciation de la Cour tient compte des opinions
exprimées sur les comptes des régimes de sécurité sociale, du FSV, de la
CADES et du FRR par leurs auditeurs externes (Cour des comptes
s’agissant des branches et de l’activité de recouvrement du régime général
et commissaires aux comptes pour les autres régimes, le FSV, la CADES
et le FRR).
Dans le cadre des avis qu’elle a portés sur la cohérence du tableau
patrimonial des exercices précédents, la Cour a relevé que les actifs et
passifs du régime social des indépendants (RSI) intégrés au tableau
patrimonial restaient imparfaitement fiabilisés. À la suite de la suppression
de ce régime au 1
er
janvier 2018, les bilans des régimes de base du RSI au
31 décembre 2017 ont été, en application des dispositions de l’article 15 de
la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
83,
, intégrés aux bilans
d’ouverture de l’exercice 2018 des branches maladie et vieillesse du régime
général.
Les rapports d’audit émis par les commissaires aux comptes de la
caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs
indépendants (CNDSSTI) attestent de la conformité des balances
combinées transmises aux organismes nationaux du régime général en vue
de leur intégration dans les comptes de ce régime. Ces balances retracent
les opérations relatives aux activités au titre desquelles la CNDSSTI et les
caisses de son réseau apportent leur concours aux caisses nationales du
régime général.
82
La détermination et le rapprochement des actifs et passifs réciproques sont justifiés
par des accords de soldes, validés par les agents comptables, ou directement à partir des
balances comptables auditées. Plusieurs accords de soldes n’étaient pas disponibles
sous leur forme définitive à la date du présent avis. Les montants pour lesquels la
réciprocité n’a pu être observée au 31 décembre 2018 sont non significatifs.
83
Certains postes du bilan consolidé des caisses déléguées pour la protection sociale
des travailleurs indépendants, telles que les immobilisations, ne seront intégrés aux
comptes des branches concernées du régime général qu’au 1
er
janvier 2020.
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COUR DES COMPTES
88
L’ensemble des éléments communiqués à la Cour par les
commissaires aux comptes de la CNDSSTI fournissent une assurance
raisonnable quant à la correcte ventilation des actifs et passifs de la
CNDSSTI entre les régimes de base intégrés au tableau patrimonial et ceux
des régimes complémentaires qui n’en relèvent pas.
°
En application du 2° du VIII de l’article LO. 111-3 du code de la
sécurité sociale, auquel renvoie l’article LO. 132-3 du code des juridictions
financières, la Cour a procédé à des vérifications sur le projet de tableau
patrimonial au 31 décembre 2018 établi par la direction de la sécurité
sociale, qui figurera à l’annexe A soumise à l’approbation du Parlement à
l’article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020,
ainsi que sur les éléments d’information qui seront intégrés aux annexes A
et 4 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour cette même
année.
À l’issue de ces vérifications, la Cour estime que le tableau
patrimonial qui sera soumis à l’approbation du Parlement à l’article 2 du
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 fournit une
représentation cohérente de la situation patrimoniale de la sécurité sociale
au 31 décembre 2018.
Elle formule néanmoins l’observation suivante :
-
les réserves formulées par la Cour dans le rapport de certification des
comptes de 2018 du régime général de sécurité sociale et les opinions
émises par les commissaires aux comptes de certains des autres régimes
soulignent les limites qui continuent d’affecter la fiabilité des comptes des
régimes de sécurité sociale intégrés au tableau patrimonial, sous l’effet,
notamment des faiblesses des dispositifs de contrôle interne et de la
persistance de difficultés comptables (cf. C-
infra
).
Par ailleurs, la Cour appelle l’attention sur les cinq éléments
suivants, nécessaires à la compréhension des informations procurées par le
tableau patrimonial au regard de celles portées dans les états financiers de
plusieurs entités majeures de son périmètre :
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
89
1.
les dettes comptabilisées par le FRR à l’égard de la CADES (12,6 Md€
au 31 décembre 2018)
84
ont été réintégrées à ses capitaux propres, en
diminution de « dotations » du fonds
85
, compte tenu de l’absence de
comptabilisation par la CADES de créances réciproques sur le FRR
86
.
Ce reclassement n’a pas d’incidence sur le montant total des capitaux
propres retracés par le tableau patrimonial, mais uniquement sur leur
ventilation entre la CADES et le FRR ;
2.
en application de la réglementation comptable
87
, le FRR comptabilise
ses instruments financiers à une valeur de marché (31,8 Md€ au
31 décembre 2018) et, au passif de son bilan, un écart positif
d’estimation par rapport au coût d’acquisition de ces mêmes actifs
(1,1 Md€) ;
3.
dans le cadre de l’adossement, en 2005, du financement du régime des
industries électriques et gazières (IEG) à la branche vieillesse du
régime général, les employeurs des IEG ont versé une soulte de
3,1 Md€ à la CNAV, qui l’a elle-même reversée au FRR, chargé d’en
assurer la gestion jusqu’en 2020. Conformément à la réglementation
comptable (cf.
supra
), le FRR réévalue à chaque clôture d’exercice les
actifs financiers qu’il gère pour le compte de la CNAV (4,9 Md€ au
31 décembre 2018), tandis que la CNAV comptabilise à sa valeur
nominale la soulte dont la gestion financière a été confiée au FRR (soit
3,1 Md€ au 31 décembre 2018). Dans le tableau patrimonial, les actifs
financiers gérés par le FRR pour le compte de la CNAV au titre de la
soulte (soit 4,9 Md€ au 31 décembre 2018) ont pour contrepartie un
passif de même montant classé parmi les « autre passifs ». Outre la
soulte à sa valeur historique, il comprend un produit constaté d’avance
correspondant
à
l’écart
entre
les
montants
comptabilisés
respectivement par la CNAV et par le FRR (soit 1,9 Md€), en
84
En vue de financer une partie des reprises de déficits des branches famille, maladie
et vieillesse du régime général et du FSV, la LFSS pour 2011 a prévu le versement par
le FRR à la CADES de 2,1 Md€ par an entre 2011 et 2024, soit 29,4 Md€ au total.
85
Par analogie avec le traitement comptable des versements du FRR aux régimes de
retraite alors prévu à partir de 2020 (avis n° 2008-10 du conseil national de la
comptabilité - CNC -), les versements du FRR à la CADES sont opérés en premier lieu
sur les réserves du fonds et, quand celles-ci sont épuisées, sur ses dotations. De ce fait,
dans le tableau patrimonial, le montant restant dû à la CADES a été reclassé dans le
poste « dotations » du FRR.
86
Dans l’annexe à ses comptes, la CADES mentionne ces ressources en tant
qu’engagements reçus du FRR (hors bilan).
87
Avis n° 2003-07 du conseil national de la comptabilité (CNC), modifié par l’avis
n° 2008-10 du 5 juin 2008.
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COUR DES COMPTES
90
conformité avec le traitement de cette opération défini par le Haut
conseil interministériel de la comptabilité des organismes de sécurité
sociale
88
;
4.
le conseil général de la Banque de France a décidé le transfert de
4,7 Md€ d’actifs financiers à la Caisse de réserve des employés de la
Banque de France (régime de retraite non doté de la personnalité
juridique), dont, au 1
er
janvier 2018, 3,2 Md€ de titres de placement et
0,9 Md€ de trésorerie adossée à la réserve spéciale et, courant 2018,
une dotation complémentaire en trésorerie de 0,7 Md€ provenant de
l’affectation à la réserve spéciale d’une partie du résultat excédentaire
de la Banque de France au titre de 2017. Ces transferts ont été effectués
en contrepartie de la constatation d’une dette d’un montant identique
(soit 4,7 Md€). Compte tenu de sa nature particulière, ce passif,
comptabilisé par la Banque de France en « Dettes auprès des
établissements de crédit » a été reclassé en « Autres dettes » dans le
tableau patrimonial
89
;
5.
les titres de participation, inscrits initialement en immobilisations par
les entités détentrices, sont reclassés, comme les années précédentes,
en valeurs mobilières et titres de placement pour un montant de
3,2 Md€
90
(2,8 Md€ en 2017). Si ces actifs ne répondent pas
strictement à la définition comptable des valeurs mobilières de
placement
91
, ce reclassement permet de présenter l’ensemble des actifs
financiers dans une même rubrique « Actif financier ».
88
Dont les missions ont, depuis lors, été confiées au conseil de normalisation des
comptes publics (CNoCP).
89
Cf.
supra
.
90
Ces titres, essentiellement détenus par les autres régimes, sont principalement portés
par la CNAVPL (1 Md€), la Banque de France (0,6 Md€) et la MSA (1 Md€).
91
Le plan comptable général (PCG) définit les valeurs de placement comme étant des
titres acquis en vue de réaliser un gain à brève échéance (PCG 82, p. I.44), tandis que
les titres de participation sont détenus de façon durable et permettent d’exercer une
influence sur la société émettrice des titres ou d’en assurer le contrôle (PCG 82, p. I.42).
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AVIS DE LA COUR SUR LA COHÉRENCE DES TABLEAUX D’ÉQUILIBRE ET
DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
91
C -
Motivations détaillées de l’avis de la Cour
Les données comptables intégrées au tableau patrimonial présentent
une fiabilité inégale.
S’agissant des entités qui sont comprises dans le champ du tableau
patrimonial, mais non dans celui des tableaux d’équilibre, les états
financiers du FRR au 31 décembre 2018 ont été certifiés sans réserve par
ses commissaires aux comptes, de même que ceux de la CADES
92
.
Pour ce qui concerne les régimes et le Fonds de solidarité vieillesse
qui sont compris dans le champ des tableaux d’équilibre comme du tableau
patrimonial, il est renvoyé aux développements précédents sur les tableaux
d’équilibre (cf. I- C- 3-
supra
).
Comme le précisent les opinions de certification avec réserves
exprimées par la Cour sur les neufs jeux de comptes du régime général et
celles formulées par les commissaires aux comptes sur les états financiers
de plusieurs autres régimes (CCMSA, CAVIMAC, CNAVPL, CRPRATP)
la fiabilité des données comptables intégrées au tableau patrimonial est
affectée, notamment, par des insuffisances des dispositifs de contrôle
interne et des difficultés comptables ayant trait à la fiabilité des données
notifiées par des entités tierces, aux estimations comptables relatives à
l’actif et au passif circulants et aux provisions pour risques et charges.
Enfin, les commissaires aux comptes de la caisse nationale déléguée
pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants (CNDSSTI)
formulent, dans leur rapport d’audit sur les comptes combinés tous risques
gérés par cette caisse, une réserve justifiée par l’absence d’évaluation
financière, dans les comptes clos au 31 décembre 2018, des conséquences
attendues de la cessation définitive des activités de la CNDSSTI, fixée au
31 décembre 2019 par la loi de financement de la sécurité sociale pour
2018. Pour le présent avis, la portée de cette réserve se limite à la quote-
part des éléments de l’actif et du passif de la gestion administrative qui, se
rapportant au régime général, sont intégrés au tableau patrimonial.
92
Dans son rapport sur la qualité des comptes des administrations publiques de
l’exercice 2013 (Cour des comptes,
La qualité des comptes des administrations
publiques,
La Documentation française, octobre 2014, p. 25, disponible sur
www.ccomptes.fr), la Cour a estimé qu’au regard des enjeux financiers liés à ses
activités, les états financiers de la CADES devraient faire l’objet d’une certification
obligatoire en application de dispositions légales à instaurer.
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92
___________ CONCLUSION ET RECOMMANDATION __________
Au regard des projets communiqués à la Cour, les tableaux
d’équilibre et le tableau patrimonial qui seront soumis à l’approbation du
Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2020 fournissent une représentation cohérente du résultat et
de la situation patrimoniale des entités comprises dans leurs périmètres
respectifs au titre de l’exercice 2018.
Cependant, une partie des produits et des charges retracés dans le
cadre des tableaux d’équilibre soumis à l’approbation du Parlement
restent issus de contractions de produits et de charges non conformes au
cadre normatif applicable aux comptes des organismes de sécurité sociale.
La Cour formule, ainsi, la recommandation suivante :
4.
mettre fin aux contractions de produits et de charges dans les tableaux
d’équilibre, non conformes au cadre normatif fixé par la loi organique
relative aux lois de financement de la sécurité sociale pour
l’établissement des comptes des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale (recommandation réitérée).
Comme les années précédentes, les faiblesses constatées dans les
dispositifs de contrôle interne et les difficultés d’ordre comptable, relevées
par la Cour dans les branches et l’activité du recouvrement du régime
général et par les commissaires aux comptes pour certains des autres
régimes entrant dans le champ des tableaux d’équilibre et du tableau
patrimonial, continuent d’affecter la fiabilité des données comptables
intégrées dans ces documents
.
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DU TABLEAU PATRIMONIAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE
2018
93
Annexe - liste des régimes (hors régime général) intégrés au tableau
d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité
sociale, présentés par branche
93
Risque
Maladie
Risque
Vieillesse
Risque
AT/MP
Régimes des salariés
Régime des salariés agricoles (MSA)
X
X
X
Régimes des non-salariés
Régime des exploitants agricoles (MSA)
X
X
X
Caisse autonome d’assurance vieillesse
des professions libérales (CNAVPL)
X
Caisse nationale des barreaux français
(CNBF)
X
Régimes
spéciaux
Régime de retraite des fonctionnaires
civils et militaires (SRE)
X
X
Caisse nationale militaire de sécurité
sociale (CNMSS)
X
Caisse de prévoyance et de retraite du
personnel de la société nationale des
chemins de fers français (CPRP SNCF)
X
X
Caisse de retraite du personnel de la régie
autonome des transports parisiens (CRP
RATP)
X
X
X
Caisse nationale des industries électriques
et gazières (CNIEG)
X
X
Établissement national des invalides de la
marine (ENIM)
X
X
X
Caisse autonome nationale de sécurité
sociale dans les mines (CANSSM)
X
X
X
Caisse de retraite et de prévoyance des
clercs et employés de notaires (CRPCEN)
X
X
X
Caisse d’assurance vieillesse invalidité et
maladie des cultes (CAVIMAC)
X
X
Banque de France
X
X
Régime de retraite de l’Assemblée
nationale (personnel et anciens députés)
X
Régime de retraite de l’Opéra national de
Paris (CROP)
X
93
À la suite des évolutions intervenues au 1
er
janvier 2018.
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94
Risque
Maladie
Risque
Vieillesse
Risque
AT/MP
Régime de retraite de la Comédie française
(CRCF)
X
Régime d’assurance vieillesse du personnel
du Port autonome de Strasbourg
X
Ex-SEITA
X
Régimes gérés par la Caisse des dépôts et consignations
Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités locales (CNRACL)
X
Fonds spécial des pensions des ouvriers des
établissements industriels de l’État
(FSPOEIE)
X
Rentes accidents du travail des ouvriers
civils des établissements militaires
(RATOCEM)
X
Service de l’allocation de solidarité aux
personnes âgées (SASPA)
X
Allocation temporaire d’invalidité des
agents des collectivités locales (FATIACL)
X
Régime d’indemnisation des sapeurs-
pompiers communaux non professionnels
(RISP)
X
Rentes accidents du travail (département de
Paris)
X
Rentes accidents du travail (mairie de
Paris)
X
Rentes accidents du travail (assistance
publique des hôpitaux de Paris)
X
Régime des cultes d’Alsace-Moselle
X
Source : Cour des comptes, à partir de la liste des régimes annexée au PLFSS 2018 et après prise
en compte des évolutions intervenues en 2018.
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