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PREMIERE CHAMBRE
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Première section
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Arrêt n° S 2017-3942
Audience publique du 24 novembre 2017
Prononcé du 21 décembre 2017
DIRECTION DEPARTEMENTALE DES
FINANCES PUBLIQUES DE L’AUDE
Exercices 2012 à 2014
Rapport n° R-2017-1419
République Française,
Au nom du Peuple Français,
La Cour,
Vu le réquisitoire n° 2017-22 RQ-DB du 11 mai 2017, par lequel le Procureur général près
la Cour des comptes a saisi ladite Cour en vue de la mise en jeu de la responsabilité
personnelle et pécuniaire de M. X
, directeur départemental des finances publiques de l’Aude,
à raison d’opérations relatives aux exercices 2012 à 2014, ensemble la preuve de sa
notification au susdit comptable, le 27 mai
2017, ainsi qu’au directeur départemental des
finances
publiques de l’Aude en fonctions, le 24 mai 2017, et au directeur général des finances
publiques, le 24 mai 2017 ;
Vu les comptes rendus en qualité de
directeur départemental des finances publiques de l’Aude
par M. X pour les exercices 2012 à 2014 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes susvisés, ensemble les pièces
recueillies au cours de l’instruction
;
Vu les observations écrites présentées le 14 juin 2017, en réponse au réquisitoire susvisé,
par M. Y, comptable en fonctions, ensemble les pièces y annexées ;
Vu les observations écrites présentées le 20 juin 2017, en réponse au réquisitoire susvisé,
par M. X ;
Vu la réponse écrite apportée le 12 octobre 2017 à une demande du rapporteur, par M. Y,
ensemble les pièces y annexées ;
Vu le code civil ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts, ensemble son annexe 3 ;
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Vu le code des juridictions financières ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n°
63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa
du VI
de l’article
60 de la loi de finances de 1963 modifiée dans sa rédaction issue de
l’article
90 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
Vu la décision fixant à 474 000
€ le
montant du cautionnement de M. X ;
Vu le rapport de M. Jean-Christophe Chouvet, conseiller maître, magistrat chargé de
l’instruction
;
Vu les conclusions du Procureur général n° 832 du 21 novembre 2017 ;
Entendu,
lors de l’audience publique du 24 novembre 2017, M.
Jean-Christophe Chouvet,
conseiller maître, en son rapport, et M. Bertrand Diringer, avocat général, en les conclusions
du ministère public, M. X
, informé de l’audience, n’étant ni présent
, ni représenté ;
Entendu en délibéré M. Guy Fialon, conseiller maître, en ses observations ;
Sur la charge unique soulevée à l’encontre de M
. X sur les exercices 2012 à 2014
Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité
personnelle et pécuniaire de M. X pourrait être mise en jeu au titre des exercices 2012 à 2014,
au motif que trois créances fiscales détenues sur une société commerciale, la première, de
21 432,70
, mise en recouvrement en 2008, la deuxième, de 21 355
€, mise en recouvrement
en 2009, la troisième, de 16 748
€, mise
en recouvrement en
2009, n’auraient
pas été
recouvrées, à la clôture de l’exercice 2014, et se se
raient trouvées atteintes par la
prescription ; que M. X
n’aurait pas mis en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du
comptable secondaire chargé de recouvrer lesdites créances et que, de ce fait, il aurait
substitué sa propre responsabilité à celle de ce dernier ;
Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations
Sur le droit applicable
Attendu qu’aux termes du I de l’article
60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée,
les comptables
publics
sont
personnellement
et
pécuniairement
responsables
du
recouvrement des recettes et
des contrôles qu’ils sont tenus d'assurer en matière de recettes
dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique et que leur
responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu'une recette n'a pas été
recouvrée ; que la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics en matière
de recouvrement des recettes s’apprécie au regard de leurs diligences,
lesquelles doivent être
adéquates, complètes et rapides ;
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Attendu qu’en vertu des dispositions de l’article
18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, le
comptable public,
dans le poste comptable qu’il dirige, est seul chargé de la prise en charge
des ordres de recouvrer qui lui sont remis par les ordonnateurs, du recouvrement des ordres
de recouvrer et des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre
exécutoire, ainsi que de l’encaissement des droits au comptant et des recettes liées
à
l’exécution des o
rdres de recouvrer ;
Attendu qu’aux termes du III de l’article 60 modifié de la loi du 23
février 1963 susvisée,
la
responsabilité des comptables publics s’étend aux opérations des comptables publics
placés sous leur autorité et à celles des régisseurs et,
dans les limites des contrôles qu’ils sont
tenus d’exercer, aux opérations des comptables publics et des correspondants centralisées
dans leur comptabilité ;
Attendu qu’en application des dispositions de l’article
129 de l’annexe
3 au code général des
impôts susvisé, les comptables publics secondaires de la direction générale des finances
publiques doivent justifier, auprès du comptable principal dont ils relèvent, du recouvrement
des impôts, droits, taxes, pénalités, intérêts de retard et frais de poursuite y afférents,
au 31 décembre de la quatrième année suivant celle de leur mise en recouvrement, pour les
créances fiscales dont ils ont pris en charge les rôles
; qu’à
défaut, la responsabilité des
comptables secondaires est engagée et ceux-ci sont tenus de verser les montants
correspondant aux créances non recouvrées ;
Attendu qu’aux termes des articles 130 et 131 de l’
annexe 3 au code général des impôts
susvisés, la responsabilité des comptables secondaires à raison du défaut de recouvrement
des recettes est mise en jeu par le comptable principal par une décision leur refusant la
dispense de versement des sommes non recouvrées, ladite décision valant ordre de
versement ;
Attendu qu’aux termes de l’article L.
274 du livre des procédures fiscales susvisé, les
comptables publics des administrations fiscales qui n’ont fait aucune poursuite contre un
redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement
du rôle ou de l’envoi de l’avis de mise en recouvrement sont
déchus de tous droits et de toute
action contre ce redevable ;
Sur les faits
Attendu que, par un avis de mise en recouvrement n° 08 05 05010 du 6 juin 2008, remis à la
redevable le même jour, une société commerciale a été invitée à payer une somme
de 23 761
€ au titre de l’impôt sur les sociétés de l’année
2005, cette créance portant le
numéro 0810040 ; que, le 6 septembre 2010, un paiement partiel de 2 328,30
€ a été affecté
à l’apurement de ladite créance,
ramenant le montant dû à 21 432,70
;
Atten
du que, par l’avis de mise en recouvrement n°
09 01 00011 du 22 janvier 2009, reçu par
la redevable le 27 janvier 2009, la susdite société a été invitée à payer une somme de 21 355
au titre de la TVA due pour le quatrième trimestre 2007, cette créance portant le
numéro 0900630 ; que, le 5 février 2009, une mise en demeure de régler immédiatement
ladite somme a été adressée à la redevable et reçue par celle-ci le 7 février 2009 ;
Attendu que, par un avis de mise en recouvrement n° 09 02 05012 du 4 mars 2009, reçu par
la redevable le 6 mars 2009, la susdite société a été invitée à payer une somme de 16 748
au titre de la TVA due pour le quatrième trimestre 2008, cette créance portant le
numéro 0904190 ; que, le 20 mars 2009, une mise en demeure de régler immédiatement ladite
somme a été adressée à la redevable et reçue par celle-ci le 24 mars 2009 ;
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Attendu que, le 29 mars 2013, un procès-verbal de carence a été établi par un huissier des
finances publiques agissant en vue de recouvrer une somme de 250 673,70
€ restant due par
la redevable, les susdites créances étant comprises dans cette somme, ainsi qu’en atteste
l’état de poursuites par voie de saisie afférent, établi le 6 septembre 2012
;
Attendu que, le 17 décembre 2014, un procès-verbal de saisie-vente a été établi par un
huissier des finances publiques agissant en vue de recouvrer une somme de 283 942,70
restant due par la redevable, les susdites créances étant comprises dans cette somme,
ainsi
qu’en atteste l’état de poursuites par voie de saisie
afférent, établi le 8 décembre 2014 ;
que le stock de marchandises saisi a été estimé à 100 213,26
;
Attendu que la redevable a été placée en redressement judiciaire par un jugement
du 24 février 2016 publié le 6 mars 2016 ; que, le 12 avril 2016, les trois créances ci-dessus
ont fait l’objet de la déclaration définitive prévue par les dispositions de
l’article L.
622-24 du
code de commerce ; que lesdites créances ont été admises au passif de la procédure,
ainsi
qu’en attestent les certificats de créance
du 12 janvier 2017 produits par le comptable
en fonctions ;
Attendu qu’il résulte des quatre ordonnances communiquées par le comptable en fonctions
qu’en mars et avril 2017, le juge commissaire de la liquidation judiciaire de la susdite société
a autorisé la vente de divers biens immobiliers appartenant à ladite société pour le prix total
de 269 200
;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
Attendu que, dans sa réponse susvisée du 20 juin 2017 au réquisitoire susvisé, M. X a déclaré
avoir pris connaissance des observations faites par le comptable en fonctions en réponse audit
réquisitoire et n’avoir pas d’autres observations à ajouter
; qu’il se déduit de sa réponse que
M. X a fait siennes les observations présentées par le comptable en fonctions ;
Attendu que, dans ses observations écrites du 14 juin 2017, M. Y, comptable en fonctions, a
fait valoir, en premier lieu,
que la créance de 21 432,70
€ n’était pas atteinte par la
prescription
; qu’en effet, le versement partiel du 6 septembre
2010, les actes de saisie du
29 mars 2013 et du 17 décembre 2014 et la déclaration de la créance à titre définitif,
le 12 avril 2016, lors de la procédure collective, avaient interrompu le délai de prescription et
que celui-ci était suspendu pendant la durée de la procédure collective
; qu’en ce qui concerne
les deux autres créances, celles de 21 355
€ et 16
748
€, l’absence de tiers détenteur identifié
n’avait pas permis de diligenter des poursuites immédiates
; que, si le premier des deux états
de poursuites par voie de saisie a été établi le 6 septembre 2012, soit plusieurs mois avant la
date de prescription des créances, l’acte de saisie lui
-
même n’a pu avoir lieu que
le 29 mars
2013, la direction départementale des finances publiques n’ayant à sa dispos
ition
que deux huissiers des finances publiques ; que lesdites créances ont bien été admises à titre
définitif au passif de la procédure collective sans contestation de la part du mandataire
judiciaire ; que, dès lors, les deux créances ne peuvent pas être considérées comme
prescrites ;
Attendu que le comptable en fonctions a fait valoir, en deuxième lieu, que, s’il n’avait pas pu
exercer des poursuites rapides sous la forme d’envoi d’avis à tiers détenteur, la redevable
n’ayant pas de compte bancaire ouver
t à son nom, le comptable secondaire avait, néanmoins,
adressé à la redevable des mises en demeure en 2008 et 2009, comptabilisé un versement
en 2010 et émis un état de poursuites par voie de saisie en 2012
; qu’en conséquence, et pour
ce premier motif, le
comptable principal ne s’était pas estimé fondé à mettre en jeu la
responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable subordonné ;
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Attendu que le comptable en fonctions a fait valoir, en troisième lieu, que le recouvrement des
créances n’était pas comp
romis
; qu’une grande partie des créances de l’Etat serait apurée
par la vente des biens immobiliers de la redevable ; que, pour ce second motif, le comptable
principal ne s’était pas estimé fondé à mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire
du comptable subordonné ;
Attendu que le comptable en fonctions a fait valoir, en quatrième lieu, que les diligences du
comptable secondaire avaient été adéquates et complètes
; qu’ainsi, le comptable secondaire
avait inscrit l’hypothèque légale du Trésor
en ce qui concerne les créances de juin 2008
et mars
2009, ce qui avait conduit, à la suite de la vente d’un bien, à l’encaissement d’une
somme de 20 430,30
€, dont l’affectation avait permis, outre celui des créances les plus
anciennes, l’apurement, part
iel, de la créance n° 0810040 de juin 2008
; qu’il avait également
engagé les procédures contentieuses à sa disposition, comme le démontraient,
en
l’occurrence, les deux saisies, dont la seconde avait abouti à la saisie d’un stock, dont la
valeur comptable était de 100 000
€ environ
; que, toutefois, c’était l’assignation en liquidation
judiciaire, pilotée par
l’U
RSSAF, qui avait été privilégiée, cette procédure permettant, outre la
vente du stock de marchandises, celle des biens immobiliers de la société ; que le montant
des premières ventes autorisées par le juge commissaire, en l’occurrence, 269
200
€, était de
nature à démontrer le bien-fondé du choix fait par la direction départementale des finances
publiques en vue du recouvrement des créances en cause, sachant que celui-
ci n’était pas
compromis, puisque lesdites créances avaient été admises au passif de la procédure ;
Attendu que le comptable en fonctions a fait valoir, en cinquième lieu, que l’état actuel de la
procédure collective ne permettait pas de connaître les sommes qui seraient obtenues par
l’Etat, lors de la répartition de l’actif entre les divers créanciers
; que, toutefois, le montant des
ventes de biens immobiliers de la redevable laissait entrevoir l’apurement complet des
créances en cause
; que, de la sorte, l’Etat ne devrait subir aucun préjudice financier
;
Sur l’application au cas d’espèce
Sur la créance n° 0810040 de 21 432,70
Attendu que, en ce qui concerne la créance n° 0810040 de 21 432,70
€,
ainsi que le comptable
le soutient dans ses observations susvisées, le versement partiel du 6 septembre 2010, les
actes de saisie du 29 mars 2013 et du 17 décembre 2014 et la déclaration de la créance à titre
définitif, reçue le 12 avril 2016, lors de la procédure collective relative à la redevable, ont eu
pour effet d’interrompre le délai de prescription de l’action en recouvrement, tel qu’il a été
instauré par l’article
L. 274 du livre des procédures fiscales ; que le recouvrement de la susdite
créance ne paraissait pas compromis à la clôture
de l’exercice 2014
;
qu’il n’y a ainsi pas lieu
à charge à raison d
un défaut de recouvrement de cette créance ;
Sur le manquement du comptable secondaire à raison des créances n° 0900630 de 21 355
€ et
n° 0904190 de 16 748
Attendu que, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme
de la prescription en matière civile, l’article 2244 du code civil prévoyait qu’un
commandement,
signifié à celui qu'on voulait empêcher de prescrire, interrompait la prescription ; que, dans sa
rédaction issue de ladite loi du 17 juin 2008, ledit article prévoyait que le délai de prescription
était interrompu par un acte d’exécution forcée, cette nouvelle rédaction emportant pour
conséquence qu’un commandement n’interrompait plus, désorma
is, le délai de prescription ;
que cette conséquence a été privée d’effet, en ce qui concerne les commandements dans les
procédures de recouvrement des créances fiscales, par la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de
finances rectificatives pour 2009, dont l’
article
18, en modifiant l’article
259 du livre des
procédures fiscales susvisé, a explicitement prévu que le commandement interrompait la
prescription de l’action en recouvrement
; qu’il résulte de ce qui précède que les
commandements notifiés entre le 19 juin 2008, date de publication de la loi du 17 juin 2008,
et le 22 avril 2009, date de publication de la loi du 20 avril 2009, étaient
privés d’effet interruptif
;
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Attendu ainsi, s’agissant des créances n°
0900630 de 21 355
€ et n°
0904190 de 16 748
€,
que les mises en demeure reçues par la redevable respectivement le 7 février 2009 et le
24 mars
2009 n’ont pas eu pour effet d’interrompre le délai de prescription de l’action en
recouvrement ; que dès lors lesdites créances se sont trouvées atteintes par la prescription,
en application des dispositions précitées de l’article
L. 274 du livre des procédures fiscales,
quatre ans après l’envoi des avis relatifs à leur mise en recouvrement, soit respectivement
à compter du 23 janvier 2013 et du 5 mars 2013 ;
Attendu que
le fait qu’aucun
tiers détenteur
n’ait pu être
identifié
, la redevable n’ayant pas de
compte bancaire à son nom,
n’a pas été à l’origine de la prescription desdites créances au
cours de l’exercice
2013 ; que de ce fait, cet élément ne peut être utilement invoqué
à décharge ;
Attendu que les poursuites effectuées postérieurement
à l’expiration du délai de prescription
,
en l’occurrence les saisies du 29 mars
2013 et du 17 décembre 2014,
ne pouvaient qu’être
inopérantes, le comptable étant alors déchu de tous droits et de toute action contre la
redevable ; que, de ce fait, elles ne peuvent davantage être utilement invoquées à décharge ;
Attendu que les chances que les créances prescrites déclarées dans le cadre de la procédure
collective soient recouvrées
à l’issue de celle
-ci, si elles ne sont pas nulles, ne sont pas
connues au moment où la Cour juge, selon les dires mêmes du comptable en fonctions,
compte tenu de
l’état d’avancement de la
dite procédure
; qu’en tout
état de cause,
contrairement à ce qui est soutenu, ces chances
n’
en ont pas moins été compromises du fait
des insuffisances de diligences du comptable secondaire ;
qu’ainsi le fait que les créances
prescrites aient été déclarées à titre définitif dans le cadre de la procédure collective
et qu’elles
n’aient pas été rejetées par le juge
-
commissaire ne peut en l’espèce venir utilement à
décharge au stade du constat du manquement du comptable secondaire ;
Attendu ainsi que le comptable secondaire a commis un manquement à ses obligations de
recouvrement,
au titre de l’exercice 2013
;
Sur l’abstention du comptable principal
Attendu
qu’en application du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, la mise en
jeu de la responsabilité d’un comp
table par voie administrative est réservée aux cas dans
lesquels le manquement de ce comptable a causé un préjudice financier ;
Attendu à cet égard que le défaut de
recouvrement d’une
créance cause par principe un
préjudice financier à la collectivité publique créancière
; que le préjudice n’est absent que dans
l’hypothèse où ladite collectivité publique n’aurait pas pu être désintéressée, quand bien même
le comptable aurait satisfait à ses obligations ;
que le préjudice s’apprécie au moyen des
éléments dont la Cour dispose au moment où elle juge ;
Attendu qu
’en l’espèce la preuve n’
a pas été r
apportée de l’insolvabilité du débiteur
au moment
du manquement du comptable secondaire à ses obligations
; qu’au contraire
, la saisie des
biens du 24 décembre 2014 comme les ventes de biens immobiliers de la redevable, dans le
cadre de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à son encontre
, témoignent d’un
patrimoine qui pouvait alors être appréhendé ; que, dès lors, le manquement du comptable
secondaire à s
es obligations en matière de recouvrement des recettes a causé à l’Etat un
préjudice financier ;
Attendu
ainsi qu’il y a lieu d’écarter l’argument
selon lequel les diligences du comptable
secondaire, antérieurement et postérieurement à la prescription des créances, auraient été
telles que la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire
n’aurait pas été
justifiée ;
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Attendu
qu’il résulte de ce qui précède qu’à l’occasion de l’examen des
états de restes à
recouvrer de l’exercice
2013, le comptable principal devait, en application des dispositions des
articles
129 et 130 de l’annexe
3 au code général des impôts susvisé, mettre en jeu, dès 2014,
la responsabilité du comptable secondaire
; qu’en s’en abstenant, il a substitué sa
responsabilité à celle de ce dernier
; qu’il y a donc lieu pour la Cour d’engager la responsabilité
de M. X
au titre de l’exercice 2014
;
Sur le débet
Attendu
qu’aux termes des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi
du 23 février 1963 susvisée, « lorsque le manquement du comptable aux obligations
mentionnées au I a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (…), le
comptable a l'obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme
correspondante » ;
Attendu que, comme il a été dit, le manquement du comptable secondaire a causé un préjudice
financier à l’Etat
; que le comptable principal a substitué sa responsabilité à celle du comptable
secondaire
; qu’il y
a donc lieu de mettre M. X en débet à hauteur du préjudice financier subi ;
Attendu que les créances non recouvrées, nonobstant leur prescription, ont été admises au
passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société redevable, tandis que la vente des
biens immobiliers de celle-ci laissait ouverte une possibilité
pour l’Etat d’être désintéressé,
au moins partiellement ; que cette circonstance est sans effet sur le quantum du préjudice
financier subi, lequel
s’établit à la totalité des sommes non recouvrées
au moment où la Cour
juge ; que toutefois les
sommes éventuellement recouvrées par l’Etat au terme de la procédure
collective
pourront s’imputer sur le débet
prononcé ;
Attendu ainsi
qu’il y a lieu, au titre de l’exercice 2014, de constituer
M. X
débiteur envers l’Etat
de la somme de 38 103
(21 355
€ + 16
748
€)
, augmentée des intérêts au taux légal à
compter du premier acte de la mise en jeu de sa responsabilité personnelle et pécuniaire, soit
à compter du 27 mai 2017, date de sa réception du réquisitoire susvisé ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Charge unique.
Exercices 2012 et 2013
Article 1
er
.
Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. X sur les exercices 2012 et 2013 à raison de la charge unique soulevée dans le réquisitoire
susvisé à son encontre.
Exercice 2014
Article 2.
M. X
est constitué débiteur envers l’Etat de la somme de 38
103
€, augmentée des
intérêts de droit à compter du 27 mai 2017.
Article 3.
Il n’y a pas lieu à charge pour le surplus.
Article 4.
M. X
ne pourra être déchargé de sa gestion pendant l’année
2014 qu’après
apurement du débet ci-dessus fixé.
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Fait et jugé par M. Philippe GEOFFROY, président de section, présidant la formation de
délibéré ;
MM. Daniel-Georges
COURTOIS,
Olivier
MOUSSON,
Vincent
FELLER,
Guy FIALON et Alain LEVIONNOIS, conseillers maîtres.
En présence de Mme Marie-Hélène PARIS-VARIN, greffière de séance.
Marie-Hélène PARIS-VARIN
Philippe GEOFFROY
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice,
sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de
la
République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’
ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R.
142-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions p
révues au I de l’article R.
142-19 du même code.