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LES RÉGULARISATIONS
D’AVOIRS À L’ÉTRANGER
GÉRÉES PAR LE SERVICE
DE TRAITEMENT
DES DÉCLARATIONS
RECTIFICATIVES (STDR)
Communication à la commission des finances, de l’économie générale et du
contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale
Octobre 2017
Les régularisations d’avoirs à l’étranger gérées par le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) - octobre 2017
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sommaire
AVERTISSEMENT
...............................................................................................................................................
5
SYNTHÈSE
............................................................................................................................................................
7
RECOMMANDATIONS
.....................................................................................................................................
13
INTRODUCTION
................................................................................................................................................
15
CHAPITRE I
DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA
PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
..........................................................................................
17
I - UN CONTEXTE DEVENU PLUS INCITATIF À LA RÉGULARISATION
...........................................
17
A - Des avoirs dissimulés longtemps difficiles à appréhender
...............................................................................
18
B - Une expérience limitée de déclaration volontaire du côté français : la cellule de régularisation de 2009
.......
20
C - Un environnement international désormais plus coopératif
.............................................................................
24
D - Une pression accrue sur les fraudeurs français
................................................................................................
27
II - UNE PROCÉDURE ADMINISTRATIVE DE RÉGULARISATION FONDÉE SUR LE DROIT
FISCAL EN VIGUEUR
.......................................................................................................................................
30
A - Les règles fixées par les circulaires
..................................................................................................................
30
B - Des principes de règlement qui se réfèrent au droit commun fiscal
.................................................................
32
C - L’application pratique
......................................................................................................................................
38
D - Une articulation organisée entre régularisation et contrôle fiscal
....................................................................
50
E - Une information
ex post
du Parlement
.............................................................................................................
53
III - UN RÉGIME UNIFORME DANS SES PRINCIPES, DES VARIATIONS DANS
L’APPLICATION
................................................................................................................................................
54
A - Des disparités objectives entre contribuables
..................................................................................................
54
B - Un mécanisme de régularisation qui se différencie des pratiques étrangères
...................................................
55
CHAPITRE II
UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES
BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
.................................................................................................
57
I - UN DISPOSITIF ADMINISTRATIF RÉACTIF
.........................................................................................
57
A - Les structures et moyens
..................................................................................................................................
57
B - Un processus industrialisé de traitement des dossiers
......................................................................................
62
C - Un recouvrement centralisé et rapide des créances fiscales
.............................................................................
70
II - DES RÉGULARISATIONS NOMBREUSES, UN RENDEMENT BUDGÉTAIRE
SIGNIFICATIF
....................................................................................................................................................
72
A - Un nombre élevé de demandes de régularisation
.............................................................................................
72
B - Des délais de règlement inégaux et parfois longs
............................................................................................
77
C - Plus de 7 Md€ encaissés à la fin de l’année 2016
............................................................................................
82
CHAPITRE III
LE STDR, UNE STRUCTURE TEMPORAIRE DONT LA MISSION
S’ACHÈVE
...........................................................................................................................................
87
I - LES ORIENTATIONS AU TERME DE QUATRE ANNÉES DE FONCTIONNEMENT
.....................
87
A - Un dispositif qui tend à s’éteindre de lui-même
..............................................................................................
87
B - L’impératif de ne pas nuire à la crédibilité du nouveau mécanisme multilatéral
.............................................
88
C - La clôture de la procédure
................................................................................................................................
88
D - L’extinction du STDR après traitement du stock de dossiers
..........................................................................
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II - LA PRÉPARATION À L’ÉCHANGE AUTOMATIQUE D’INFORMATIONS
....................................
89
A - Les limites du mécanisme et les difficultés à prévoir
......................................................................................
89
B - Les mesures à prendre par l’administration fiscale
..........................................................................................
91
CONCLUSION GÉNÉRALE
.............................................................................................................................
95
GLOSSAIRE
........................................................................................................................................................
97
ANNEXES
.............................................................................................................................................
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Les régularisations d’avoirs à l’étranger gérées par le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) - octobre 2017
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Avertissement
En application du 2° de l’article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1
er
août 2001
relative aux lois de finances (LOLF), la Cour des comptes a été saisie par le président de la
commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée
nationale, par lettre du 20 décembre 2016, d’une demande d’enquête sur le service de traitement
des déclarations rectificatives.
Le président de la première chambre de la Cour a rencontré le président de la commission
des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale le
1
er
février 2017 afin de préciser le contenu de cette enquête.
Les principaux axes en ont été définis dans une lettre du Premier président au président
de la commission des finances en date du 7 février 2017. Il a été indiqué dans le même courrier
que le rapport serait remis en octobre 2017.
Ces courriers sont annexés au présent rapport (annexe n° 1).
L’enquête a été réalisée par la première chambre de la Cour des comptes. Le lancement
des travaux de la Cour a été notifié le 13 janvier 2017 à la DGFiP. Un premier questionnaire a
été adressé à la DGFiP le 24 janvier 2017. L’entretien de début de contrôle s’est tenu le 7 février
2017 avec Mme Gabet, chef du service du contrôle fiscal. L’équipe de contrôle a conduit des
entretiens tant avec les services de l’administration centrale que des services déconcentrés de
la DGFiP à Paris, Lille et Lyon.
L’instruction a été complétée par des entretiens avec d’autres services des ministères
financiers (direction de la législation fiscale), le Centre de politique et d'administration fiscales
(CTP) de l’OCDE, le président et le vice-président de l’Institut des avocats conseils fiscaux
(IACF), principale organisation représentative des avocats spécialisés en droit fiscal, et la
Fédération bancaire française (FBF). La liste des personnes rencontrées figure en annexe n° 2.
En vue de situer le dispositif français par rapport aux initiatives analogues prises dans
d’autres pays développés, un parangonnage a été réalisé avec le concours de la direction
générale du Trésor auprès des attachés fiscaux des pays suivants : Allemagne, Royaume-Uni,
Italie, Espagne, États-Unis.
L’entretien de restitution a eu lieu le 9 juin 2017 avec Mme Gabet, chef du service du
contrôle fiscal.
Une note d’étape a été examinée par le comité du rapport public et des programmes de la
Cour des comptes le 11 juillet 2017.
Un relevé d’observations provisoires a été adressé le 19 juillet 2017 à la direction générale
des finances publiques, à la direction de la législation fiscale, à la direction du budget et à la
secrétaire générale des ministères financiers. Seule la DGFiP (service du contrôle fiscal) a
apporté une réponse de substance.
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La cheffe du service du contrôle fiscal a été auditionnée par la première chambre le
8 septembre 2017.
Le présent rapport a été délibéré le 8 septembre 2017 par la première chambre présidée
par M. Briet, président de la première chambre, et composée de MM. Daniel-Georges Courtois,
Christian Charpy, Vincent Feller et Guilhem Blondy. M. Jean-Christophe Chouvet, conseiller
maître et M. Louis-Paul Pelé, rapporteur extérieur, étant rapporteurs et Mme Catherine Périn,
conseiller maître, contre-rapporteur.
Il a ensuite été examiné et approuvé le 26 septembre 2017 par le comité du rapport public
et des programmes de la Cour des comptes, composé de MM. Migaud, Premier président,
MM. Durrleman, Briet, Vachia, Paul, rapporteur général du comité, Duchadeuil, Mme Moati,
M. Morin et Mme de Kersauzon, présidents de chambre, et M. Johanet, procureur général,
entendu en ses avis.
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Synthèse
Le dispositif de régularisation des avoirs non déclarés à l’étranger institué en 2013 et géré
par le STDR (service de traitement des déclarations rectificatives) mis en place par la DGFiP a
obtenu des résultats supérieurs aux attentes : 51 000 déclarations déposées par les
contribuables, 32 Md€ d’avoirs régularisés et 8 Md€ de recettes encaissées sur la période
2014-2017.
Après quatre ans de mise en oeuvre du dispositif, le ministre chargé du budget en
a annoncé la suppression au 31 décembre prochain.
Un changement de contexte favorable à la mise en place d’un dispositif
de régularisation
En matière de lutte contre la dissimulation d’avoirs à l’étranger, les administrations
fiscales ont longtemps rencontré d’importantes difficultés, dès lors qu’elles se heurtaient au
secret bancaire et disposaient de peu de moyens d’enquête et de contrôle. Toutefois, depuis une
dizaine d’années, la situation a sensiblement évolué. Les administrations nationales ont pu tirer
parti de révélations d’origines diverses sur les comptes détenus dans certaines banques
notamment suisses.
C’est ainsi que l’administration fiscale avait, dans le contexte de la révélation des « listes
HSBC », créé une première « cellule de régularisation » pour un laps de temps relativement
court en 2009. Elle avait permis d’encaisser des recettes fiscales d’un montant de 1,2 Md€.
Au cours des années suivantes, la coopération et les échanges d’informations entre États
ont tendu à devenir plus systématiques. La voie a été ouverte par les États-Unis qui ont, de
manière unilatérale et extraterritoriale, imposé aux banques étrangères de leur déclarer les
comptes détenus par des résidents fiscaux américains. C’est en revanche un mécanisme
multilatéral d’échanges automatisé de données entre États sur les comptes détenus par des
non-résidents qui a été élaboré sous l’égide de l’OCDE. Il doit entrer en vigueur
progressivement à compter de l’automne 2017 (2018 pour la Suisse) ; plus de cent pays se sont
engagés à y participer.
Ce contexte nouveau a rendu les titulaires d’avoirs non déclarés à l’étranger plus sensibles
aux risques encourus. En effet, si, en 2009, ceux qui détenaient leurs avoirs dans des
établissements bancaires qui avaient fait l’objet de dénonciation pouvaient se sentir davantage
concernés que les autres, l’entrée en vigueur prochaine de l’échange automatique de données
bancaires a accru l’incitation à régulariser.
Le Gouvernement a décidé en 2013 de stimuler la démarche de régularisation en
proposant aux résidents fiscaux français détenteurs d’avoirs non déclarés un traitement incitatif,
leur offrant ainsi une dernière possibilité de se mettre en règle avant l’entrée en vigueur des
échanges automatiques de données.
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COUR DES COMPTES
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La perspective de trouver par ce moyen des recettes complémentaires pour faciliter à court
terme la réduction du déficit budgétaire a sans doute pesé dans cette option, même si le produit
attendu pouvait difficilement en être évalué à l’avance. La modestie des moyens mis
initialement en place pour traiter les déclarations montre que le rendement fiscal attendu n’était
sans doute pas aussi élevé que le produit finalement encaissé.
Un dispositif temporaire de régularisation fondé sur le droit fiscal en vigueur
Les conditions générales de cette régularisation ont été définies dans une circulaire du
ministre délégué chargé du budget, publiée le 21 juin 2013.
Elle maintient inchangée l’obligation pour les contribuables révélant des avoirs non
antérieurement déclarés de s'acquitter du paiement intégral des impositions éludées (et non
prescrites), calculées par application du droit fiscal en vigueur au moment de l’exigibilité et des
intérêts de retard.
Elle ne comporte aucune mention d’éventuelles poursuites pénales, ce silence étant à
interpréter comme signifiant l’absence
a priori
de poursuites pénales du seul chef de la
détention de ces avoirs non déclarés. Cette clause tacite est rendue possible par le monopole
d’engagement des poursuites pénales pour fraude fiscale dévolu à l’administration fiscale. Cette
dispense de fait de poursuites pénales a vraisemblablement constitué une incitation forte à
recourir à la procédure de régularisation.
La circulaire prévoit également une atténuation des pénalités fiscales, majorations
appliquées aux différents impôts dus (impôt sur le revenu, impôt de solidarité sur la fortune,
droits de mutation à titre gratuit, etc.), amendes prévues par le code général des impôts en cas
de non-respect de l’obligation annuelle de déclaration des avoirs détenus à l’étranger (comptes
en banque, contrats d’assurance-vie, trusts).
Cette modulation des pénalités n’est toutefois pas dérogatoire au droit fiscal, puisqu’elle
s’inscrit dans le cadre de la procédure de « transaction » prévue par le Livre des procédures
fiscales, dont tout contribuable est susceptible de bénéficier.
Cette procédure a été utilisée dans le traitement des régularisations avec la même finalité
que dans son usage courant en matière fiscale, c’est-à-dire préserver les intérêts de l’État en
évitant des contentieux longs, coûteux et aléatoires et permettre un encaissement assuré et
rapide de la plus grande partie de la dette fiscale exigible. Toutefois, les dispositions législatives
du code général des impôts ne prévoient que des possibilités de transaction individuelle. En
l’occurrence cette procédure a été utilisée pour mettre en oeuvre un traitement de masse, par
application d’un barème homogène à tous les contribuables concernés. Cette pratique
exceptionnelle a été avalisée par le comité du contentieux fiscal et douanier (CCFD).
Ce barème comporte notamment une distinction entre fraudeurs « actifs » et « passifs »,
le fraudeur « passif » (quand les avoirs dissimulés ont pour origine une succession ou une
donation) étant réputé moins coupable que le fraudeur « actif ». Cette distinction, reprise de la
pratique de la cellule mise en place en 2009, dite cellule « Woerth », ne repose sur aucun
fondement législatif ou réglementaire. La situation du contribuable fait toutefois partie des
éléments de fait que l’administration est admise à apprécier dans le cadre d’une transaction.
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SYNTHÈSE
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Une approche pragmatique
Les comparaisons internationales montrent que la formule choisie s’est située à mi-
chemin des deux grandes catégories de solutions retenues dans d’autres pays notamment
européens : soit une amnistie assortie du paiement d’une somme proportionnelle au montant
des capitaux déclarés, soit une acceptation de la régularisation mais avec l’application des règles
de droit commun sans atténuation.
La voie choisie a évité à l’administration de déclencher des milliers de poursuites au coût
élevé et au résultat aléatoire. Quant à la modulation des pénalités, elle n’a pas excédé celle
constatée en moyenne dans les transactions fiscales courantes dont s’inspire la procédure du
STDR. Cette option a permis de percevoir des recettes substantielles sans délai et sans les aléas
inhérents aux procédures contentieuses.
Des pénalités tributaires de l’évolution du droit
L’échelle des pénalités applicables s’est trouvée modifiée à plusieurs reprises,
principalement du fait de la décision du Conseil constitutionnel déclarant non conforme à la
Constitution l'amende proportionnelle en cas de non-déclaration d’un compte bancaire, au motif
qu’elle constituait une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits que le
législateur avait entendu réprimer. Cette décision du 22 juillet 2016 n’a pas eu de portée
rétroactive mais a interdit l’application de l’amende proportionnelle à tous les dossiers non
réglés à sa date d’entrée en vigueur, soit le 24 juillet 2016.
La décision du Conseil constitutionnel a entraîné d’abord une modification du barème de
transaction (relèvement du taux minoré de la majoration d’impôts appliqué par
l’administration) par une nouvelle circulaire publiée au mois de septembre 2016 ; le code
général des impôts (CGI) a ensuite été modifié par la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016
de finances rectificative pour 2016 afin d’instituer un régime unique et forfaitaire de majoration
des impôts dus en cas de régularisation, cette pénalité se substituant à celles précédemment en
vigueur.
Ces variations, dans un laps de temps court (quatre ans de l’ouverture de la procédure à
ce jour), ont provoqué des différences de traitement des contribuables, en fonction de la date de
dépôt des dossiers, des exercices fiscaux en cause et de la date de règlement.
L’utilisation de la procédure de transaction a permis à l’exécutif de définir seul les
modalités de la régularisation (à la seule exception de la modification législative du CGI
susmentionnée). Le Parlement est toutefois tenu informé du déroulement et des résultats de ce
processus à l’occasion de l’examen des lois de finances et est destinataire chaque année d’un
rapport spécifique sur l’application de ce dispositif durant l’année écoulée.
Un fonctionnement axé en priorité sur la réalisation d’objectifs budgétaires
Le traitement des dossiers de régularisation a été confié à un service créé à cette fin, le
Service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), rattaché à la direction nationale
de vérification des situations fiscales (DNVSF), service à compétence nationale placé sous
l’autorité du service du contrôle fiscal de la DGFiP.
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COUR DES COMPTES
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Il était impossible de prévoir l’ampleur du recours à ce dispositif. D’une part,
l’administration ne connaissait pas, par définition, le nombre et les caractéristiques des avoirs
non déclarés ; d’autre part, la décision de procéder à une déclaration rectificative dépendait de
choix individuels des contribuables concernés. L’afflux de dossiers s’est vite révélé supérieur
aux capacités de traitement du STDR : à la fin de l’année 2015, sur les 37 000 dossiers complets
déposés depuis l’origine du service, 25 000 étaient encore en cours ou en attente de traitement.
En conséquence, les capacités du service ont été augmentées avec la création en 2015, puis de
nouveau en 2016, de pôles de régularisation déconcentrés (dix au total), dotés d’une
compétence nationale ou régionale selon les cas, portant l’effectif total à 172 agents à la fin de
l’année 2016, alors que le STDR central n’en comptait que 66 fin 2014.
Si la gestion des dossiers a été répartie entre plusieurs pôles, l’administration est parvenue
à en assurer un traitement homogène au moyen de la formation, de l’uniformisation des
méthodes, de la mutualisation des expériences et d’un pilotage serré. Les rapporteurs de la Cour
ont pu vérifier l’homogénéité de traitement des dossiers sur la base des critères publiés.
Les modalités de traitement des dossiers ont été organisées en fonction de la priorité
donnée aux résultats budgétaires : les agents du STDR ont eu pour consigne constante de traiter
en priorité les dossiers présentant les perspectives de recettes les plus élevées, évaluées à l’aune
du montant des avoirs déclarés, auquel est
a priori
corrélé celui des sommes à recouvrer.
L’application de ce principe a conduit à de grands écarts dans le délai de traitement des
dossiers : alors que les dossiers portant sur des avoirs supérieurs à un million d’euros sont traités
en moyenne en moins d’un an, les « petits » dossiers, peuvent rester en attente pendant plus de
deux ans. C’est notamment l’accumulation de « petits » dossiers en attente de traitement au
STDR qui a conduit à la mise en place des pôles déconcentrés, auxquels sont confiés les dossiers
comportant des avoirs de moins de 600 000 €.
Le fonctionnement même du STDR n’appelle pas de critique et la DGFiP a su faire
preuve de flexibilité pour l’assurer dans de bonnes conditions : le traitement des dossiers aurait
pu être accéléré avec des effectifs accrus mais ces moyens supplémentaires auraient été prélevés
sur ceux du contrôle fiscal dont sont issus la plupart de ses agents ; dès lors, un renforcement
du STDR n’aurait pu se faire qu’au détriment de cette fonction.
Des régularisations nombreuses et un rendement budgétaire significatif
La procédure instituée en 2013 a connu un grand succès puisque près de 51 000 demandes
de régularisation ont été déposées à ce jour, portant sur environ 32 Md€ d’avoirs.
Les avoirs déclarés sont, dans la majorité des cas, d’un montant relativement modeste
(près des deux tiers des dossiers portent sur des avoirs inférieurs à 400 000 €). Une part
prépondérante (de l’ordre de 90 %) était détenue en Suisse, quelques pourcents au Luxembourg.
En revanche, très peu d’avoirs ont été déclarés en provenance de centres financiers ou paradis
fiscaux. Les détenteurs d’avoirs venus à la régularisation ont été principalement des fraudeurs
« passifs », qui ont vu dans l’instauration de ce dispositif un moyen de sortir d’une situation,
souvent ancienne, dont ils n’étaient pas à l’origine.
Les recettes encaissées par le STDR se sont élevées sur la période 2014-2016 à plus de
7 Md€, dont 1,80 Md€ en impôt sur le revenu, 2,28 Md€ en impôt de solidarité sur la fortune,
1,40 Md€ au titre des droits de mutation à titre gratuit (successions et donations) et 816 M€ de
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SYNTHÈSE
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prélèvement sociaux
1
. Des recettes d’1 à 1,2 Md€ sont attendues en 2017, un peu moins en
2018.
Si le rendement du STDR est élevé, les remises de pénalités représentent près du quart
des sommes totales dues avant transaction. Le taux de remise des pénalités, d’environ la moitié,
constaté sur les dossiers traités par le STDR, est toutefois voisin de celui que la Cour a constaté
en moyenne pour les transactions avant mise en recouvrement.
S’il est incontestable que l’État a renoncé à une partie des recettes théoriques, à hauteur
du montant des atténuations de pénalités consenties, soit un peu plus d’1,8 Md€, ce moindre
gain doit être mis au regard de l’effet incitatif probable de ces aménagements. Il n’est pas
possible par définition de savoir si l’exemption des éventuelles conséquences pénales liées à la
fraude fiscale, sans aménagement des pénalités, aurait à elle seule conduit au même volume de
régularisations. Il ne fait en revanche guère de doute qu’en l’absence de tout dispositif de
régularisation, la plupart des contribuables défaillants n’auraient pas déclaré spontanément
leurs avoirs. Le fisc aurait dû dès lors attendre la mise en oeuvre des échanges automatiques de
données pour obtenir des informations sur ces avoirs. Ces informations risquaient de n’être pas
rapidement disponibles ni complètes ni facilement exploitables. Pour sanctionner les fraudeurs,
l’administration aurait dû en tout état de cause lancer des procédures de contrôle fiscal, plus
lourdes et plus aléatoires que les régularisations opérées dans le cadre du STDR. Même sous
l’hypothèse d’une application de la loi fiscale dans toute sa rigueur au terme de ces procédures,
les recettes qui, de toutes façons, auraient été recouvrées plus tardivement, n’auraient pas
forcément été
in fine
plus élevées que celles obtenues par le STDR.
Une suppression justifiée du dispositif
La Cour avait estimé au cours de l’instruction que plusieurs raisons conduisaient à
procéder à la clôture de la procédure. Les contribuables concernés ont en effet disposé d’une
durée suffisante (quatre ans) pour y recourir ; le nombre de nouveaux dossiers a diminué
fortement depuis 2016 tout comme les recettes fiscales qui en découlent. Parallèlement, la mise
en oeuvre des échanges automatiques de données à partir de 2017 va donner de nouveaux
instruments à l’administration. La clôture a finalement été annoncée le 15 septembre 2017 par
le ministre de l’action et des comptes publics.
L’annonce le 15 septembre 2017 de la clôture au 31 décembre laisse un intervalle de trois
mois et demi aux contribuables pour bénéficier de la procédure, ce qui est convenable puisqu’il
leur suffit à cet effet de déposer une simple déclaration d’intention, quitte à la compléter
ultérieurement par des déclarations rectificatives. La cohérence impose en contrepartie de ne
pas accorder de « période complémentaire » et de refuser tout nouveau dépôt au-delà du terme
annoncé. Il faudra d’autre part maintenir le STDR en activité jusqu’au règlement des derniers
dossiers déposés (20 000 dossiers étaient encore en attente fin 2016) et organiser sa mise en
extinction progressive.
Enfin, la fermeture du STDR doit s’accompagner d’une intensification de la lutte contre
la fraude par les services fiscaux, qui doivent notamment s’attacher à optimiser l’utilisation des
possibilités de contrôle fournies par l’échange automatique de données bancaires.
1
Le solde est constitué du produit des amendes : 747 M€.
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Recommandations
1.
À compter de la clôture de la procédure du STDR au 31 décembre 2017, ne plus admettre
de nouveau dossier et traiter les contribuables qui n’auraient pas entamé de régularisation
avant cette date comme étant de mauvaise foi ;
2.
prévoir corrélativement un schéma de mise en extinction du STDR en tenant compte de sa
charge résiduelle ;
3.
mobiliser les moyens et mettre en place les processus visant à l’exploitation la plus efficace
des possibilités de contrôle fournies par l’échange automatique de données bancaires.
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Introduction
L’évaluation du montant des avoirs détenus à l’étranger et non déclarés demeure
pratiquement impossible. Les chiffres parfois avancés ont un caractère spéculatif et ces
estimations font masse de données de nature différente. Il est difficile de distinguer les flux et
les stocks d’avoirs. Enfin, au-delà de la fraude « classique » qui a longtemps consisté en la
détention de comptes bancaires, titres ou assurances-vie dans des pays pratiquant le secret fiscal
(notamment en Europe), des montages plus sophistiqués reposent aujourd’hui sur des structures
complexes et transitent par des paradis fiscaux.
Les propriétaires de ces avoirs voulaient généralement les maintenir « à l’abri » pour des
motifs tenant à des situations personnelles, familiales ou d’affaires, mais aussi par volonté
d’échapper à l’impôt, cette dernière motivation étant souvent la principale. En outre l’incitation
à déclarer spontanément des avoirs qui ne l’avaient pas été antérieurement était faible à cause
du risque d’encourir de ce fait des sanctions fiscales et surtout pénales comme de la faible
probabilité de découverte de ces avoirs par les administrations fiscales.
Les entités étrangères abritant ces avoirs n’avaient pas intérêt à informer de leur existence
l’État de résidence fiscale de leurs détenteurs, d’autant que la protection du secret bancaire et
fiscal était le plus souvent un argument auprès de leurs clients et un fonds de commerce pour
eux.
Cette forme d’évasion présente deux inconvénients majeurs pour le pays de résidence
fiscale du détenteur : d’une part, il réduit la masse taxable, à l’impôt sur les revenus tirés de ces
avoirs, aux droits sur les mutations en cas de transmission de ces avoirs, le cas échéant à
l’imposition du patrimoine ; d’autre part, il prive le pays de capitaux qui pourraient y être
utilement investis. Une des raisons pour lesquelles les États en ont longtemps souhaité le
rapatriement était qu’il améliorait le solde de la balance des paiements et, d’un point de vue
économique, était susceptible de nourrir l’épargne et l’investissement dans le pays de retour.
Ce second point a toutefois perdu de son importance avec la libéralisation des mouvements de
capitaux, le développement des investissements internationaux, le passage à l’euro.
La volonté d’éviter un manque à gagner fiscal est devenue en conséquence le facteur
principal, d’autant que les citoyens et contribuables sont devenus progressivement plus sévères
à l’encontre de cette fraude comme vis-à-vis d’autres manquements. Pour lutter contre la
dissimulation d’avoirs à l’étranger, la plupart des États ont renforcé les obligations de
déclaration de ces avoirs en alourdissant les sanctions. Cependant, les moyens d’en vérifier le
respect ont longtemps été réduits, faute d’accès à des données fiables sur les avoirs concernés.
Pour pallier ce blocage, les États ont passé des accords visant à faciliter les échanges
d’informations. Parallèlement, ils ont mis en place des mécanismes incitatifs afin de pousser
les contribuables défaillants à prendre l’initiative de régulariser leur situation. La France a ainsi
mis en place un premier régime aménagé en 2009, géré par une « cellule de régularisation ».
Dans le contexte d’une amélioration progressive de la transparence et d’une coopération
renforcée entre États depuis le début de la décennie 2010, un nouveau dispositif de déclaration
volontaire d’avoirs antérieurement dissimulés a été institué en 2013. Ce dispositif s’appuie sur
le régime de droit commun de l’imposition et de la transaction, avec des spécificités, et est géré
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par le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), rattaché à la DNVSF
(direction nationale de vérification des situations fiscales) de la DGFiP.
Le présent rapport analyse les conditions dans lesquelles ce dispositif a été créé et la forme
qu’il a prise, puis expose son organisation, son fonctionnement et ses résultats, enfin évoque
les perspectives ouvertes par sa suppression.
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Chapitre I
Des conditions propices à la mise en place
de la procédure de régularisation
La finalité du STDR est d’amener les contribuables possesseurs d’avoirs à l’étranger qui
ne les avaient pas déclarés et ne s’étaient pas acquittés des impôts qu’ils auraient dû verser du
fait de la possession de ces avoirs à en révéler l’existence et à régler leur dette fiscale. Pour les
y inciter, le régime de pénalités en vigueur a été adapté.
Le recours à un mécanisme spécifique pour obtenir la révélation d’avoirs à l’étranger n’a
pas constitué en soi une innovation puisqu’il a été précédemment pratiqué sous des formes
diverses et des résultats variables, tant dans de nombreux pays étrangers qu’en France même,
en dernier lieu avec la cellule de régularisation mise en place en 2009.
Cependant, la portée de ces expériences était tributaire des difficultés rencontrées par les
pouvoirs publics pour obtenir les informations relatives à ces avoirs dissimulés dans les
établissements étrangers.
La transformation du contexte international a créé un environnement plus favorable et a
permis la mise en place d’une nouvelle procédure de régularisation. Elle se fonde sur les
possibilités offertes à l’administration par le droit fiscal en vigueur. Elle se caractérise par son
caractère en principe uniforme mais l’évolution du contexte juridique a introduit de fait des
variations dans les solutions appliquées.
I -
Un contexte devenu plus incitatif à la régularisation
Jusqu’à une date récente, les moyens de connaissance des avoirs, et donc de répression
de la fraude fiscale, à la disposition des administrations fiscales étaient circonscrits. Ces limites
ont affecté le premier mécanisme de régularisation brièvement institué en France en 2009.
Cependant, l’entrée en vigueur prochaine du mécanisme multilatéral d’échanges automatiques
de données bancaires va modifier la donne. L’intervalle entre l’annonce de sa création et sa
mise en place effective a constitué une fenêtre d’opportunité pour proposer aux contribuables
en situation de fraude de régulariser spontanément leur situation.
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18
A -
Des avoirs dissimulés longtemps difficiles à appréhender
Les avoirs placés sur des comptes bancaires à l’étranger, dans des contrats d’assurance-
vie ou encore sous forme de trusts ont longtemps été soustraits dans une proportion importante
à la connaissance de l’administration du pays de résidence fiscale de leur propriétaire. Afin de
lutter contre cette forme d’évasion et de fraude fiscales, la quasi-totalité des pays ont imposé
des obligations de déclaration assorties de sanctions. L’action dissuasive et répressive n’est
cependant que partiellement efficace. Aussi de nombreux pays ont-ils mis en place, à diverses
époques et selon des modalités variées, des procédures de régularisation destinées à faire révéler
les avoirs et à les réintégrer dans la matière fiscale.
1 -
Des obligations déclaratives souvent mal respectées
a)
Les obligations légales
Des obligations déclaratives existent dans la plupart des pays. Leur portée est variable :
elles peuvent s’imposer aux personnes physiques et morales détentrices des avoirs mais aussi
aux institutions financières nationales ou étrangères qui en sont dépositaires. Selon que les pays
qui les édictent pratiquent ou non la taxation du patrimoine ou de la fortune, elles peuvent porter
soit sur les seuls revenus tirés des avoirs à l’étranger soit aussi sur ces avoirs proprement dits.
Les seuils et modalités de déclaration sont aussi spécifiques à chaque pays.
En France il n’est pas illégal pour un résident fiscal français de détenir des avoirs
mobiliers ou immobiliers dans un État étranger mais il doit remplir deux obligations
déclaratives :
-
il a l’obligation de déclarer l’existence de l’ensemble des avoirs détenus à l’étranger, sous
peine de sanctions. La loi a en effet institué des obligations déclaratives des comptes,
contrats d'assurance vie et trusts détenus à l’étranger (respectivement par les articles
1649 A, 1649 AA et 1649 AB du CGI – cf. annexe 1). L'obligation de déclaration des
comptes à l'étranger qui découle du deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général
des impôts (CGI) ne porte pas uniquement sur les comptes dont le contribuable est titulaire,
mais aussi sur ceux qu'il a utilisés (Conseil d'État,30/12/2009, 299131) ;
-
il a également une obligation fiscale illimitée de déclaration de ces avoirs et des revenus
qui en sont tirés. En outre, l'article 1649 A du CGI institue une présomption, réfragable,
selon laquelle les sommes, titres ou valeurs transférés vers ou depuis l'étranger par
l'intermédiaire d'un compte non déclaré doivent être considérés comme des revenus
(instruction du 22 mars 2012 13 k-2-12, Conseil d'État, 30/12/2009, 299131). Ces avoirs et
revenus doivent également faire l’objet de déclaration au titre de l’impôt de solidarité sur
la fortune (qui porte sur les biens français et étrangers) et être intégrés dans les déclarations
de successions et de donations.
Les deux obligations déclaratives sont liées : les personnes physiques, les associations,
les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues
de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des
comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger.
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
19
Les dispositions législatives pertinentes figurent en annexe n° 6.
b)
Les sanctions
Le contribuable qui ne respecte pas ces obligations déclaratives s’expose à des sanctions.
S’agissant de la déclaration de l’existence des avoirs, un système de pénalités fiscales
réprime les infractions aux dispositions des articles 1649 A, 1649 AA et 1649 AB du CGI. Elles
sont définies par l’article 1736 IV du CGI (comptes bancaires non déclarés), l’article 1766 du
CGI (contrats d’assurance-vie non déclarés) et l’article 1736 IV bis du CGI (trusts non déclarés)
et consistent en des amendes, forfaitaires ou proportionnelles selon les cas. L'administration
fiscale peut appliquer aux droits afférents aux avoirs non déclarés les majorations pour
manquements délibérés ou pour manoeuvres frauduleuses visées à l'article 1729 du CGI.
L’article 1741 du CGI prévoit en outre des sanctions pénales
2
en cas de soustraction ou
tentative de soustraction intentionnelle à l'établissement ou au paiement total ou partiel des
impôts visés au code général des impôts. Ces sanctions sont alourdies lorsque les faits sont
commis en bande organisée, ou réalisés ou facilités grâce à des domiciliations fictives ou
artificielles à l’étranger ou avec l’interposition d’entités fictives ou artificielles.
L’annexe n° 7 expose les régimes d’obligation déclarative et de sanction de la violation
de cette obligation en vigueur dans les principaux pays européens et aux États-Unis.
2 -
Des mécanismes de régularisation de portée variable
Les avoirs dissimulés n’ont pu, pendant longtemps, être identifiés qu’à partir
d’informations en provenance de tiers ou au terme de contrôles fiscaux. Toutefois, les
dénonciations présentent un caractère aléatoire et fragmentaire et l’obtention de renseignements
auprès d’informateurs et de « lanceurs d’alerte » est affectée de fragilités juridiques. Les
contrôles sont par essence difficiles sur des avoirs détenus à l’étranger et tributaires du degré
de coopération des institutions et des établissements financiers des pays de détention.
Face à ces difficultés, beaucoup d’États ont donc pris des initiatives visant à encourager
les déclarations spontanées en allégeant les conséquences pénales et fiscales de la révélation
tardive d’avoirs cachés à l’étranger, sous plusieurs formes.
La formule la plus simple consiste à faciliter la révélation et le rapatriement d’avoirs en
effaçant en quelque sorte le passé moyennant (ou non) le versement d’une taxe spécifique. La
France, après avoir institué plusieurs amnisties depuis la deuxième guerre mondiale (cf. annexe
n° 9), y a eu recours pour la dernière fois en 1986. D’autres pays européens ont pratiqué de
2
Si l'administration fiscale détecte un comportement frauduleux, elle peut engager des poursuites pénales après
avis de la commission des infractions fiscales. Indépendamment des sanctions fiscales, l'auteur d'une fraude fiscale
encourt 500 000 € d'amende et 5 ans d'emprisonnement. Ces peines sont portées à 2 000 000 € d'amende et 7 ans
d'emprisonnement lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou grâce à :
•l'ouverture de comptes ou à la souscription de contrats auprès d'organismes établis à l'étranger ;
•l'interposition de personnes ou d'organismes écran établis à l'étranger ;
•l'usage d'une fausse identité ou de faux documents (ou toute autre falsification) ;
•une domiciliation ou un acte fictif ou artificiel à l'étranger.
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telles amnisties plus récemment, notamment l’Italie et la Belgique. Dans d’autres cas, les
mécanismes de régularisation volontaire ou d’« auto-dénonciation » ont été simplement assortis
de pénalités minorées, comme au Royaume-Uni et aux États-Unis (cf. annexe n° 13), voire ont
été placés sous le régime commun (Espagne, Allemagne).
B -
Une expérience limitée de déclaration volontaire du côté français :
la cellule de régularisation de 2009
Dans le contexte d’alors, une expérience de régularisation volontaire a été lancée en 2009.
Il est utile de l’examiner dans la mesure où elle préfigure partiellement le STDR.
1 -
Des circonstances particulières
Cette initiative a pris naissance dans un environnement particulier. En 2008, les
administrations fiscales de plusieurs pays avaient porté, quasi simultanément, des coups au
secret bancaire : le fisc allemand contre la banque LGT au Liechtenstein, le fisc américain
contre la banque UBS. Ces actions avaient mis en évidence le rôle des banques spécialisées
dans la gestion de fortune dans la mise en place de schémas de fraude fiscale, en assurant le
transfert à l’étranger des fonds considérables d’origine dissimulée, y compris grâce à
l’interposition de structures établies dans les paradis fiscaux.
Dans l’affaire dite des « exilés fiscaux », un informaticien ex-employé de HSBC a fourni
à l’administration fiscale, en décembre 2008, une liste de 8 993 évadés fiscaux français en
Suisse, puis, en juillet 2009, une liste de 127 000 comptes bancaires appartenant à 79 000 clients
de HSBC à Genève dont 8 231 Français, à la justice française, via le procureur de Nice
3
qui l’a
transmise au ministère des finances. Le ministre du budget de l’époque a annoncé que le
gouvernement disposait des noms de 3000 fraudeurs.
Sur cette base, 800 contrôles fiscaux ont été engagés et 350 achevés d’après une note du
ministère du Budget de novembre 2011, permettant au fisc de recouvrer 160 M€. Côté
judiciaire, des enquêtes pour blanchiment ont été ouvertes concernant une trentaine de titulaires
de comptes. Des procédures judiciaires, toujours en cours, ont été ouvertes contre HSBC.
Parallèlement aux contrôles, une « cellule de régularisation » (désignée sous le nom de
« cellule Woerth », du nom du ministre du budget de l’époque) a été ouverte le 20 avril 2009
afin de permettre aux détenteurs d’avoirs non déclarés à l’étranger de se mettre en conformité
avec leurs obligations fiscales, sans pour autant bénéficier d’une amnistie.
3
Source : audition, 22 mai 2012, de l'ex-procureur de la République de Nice Eric de Montgolfier par la
Commission du Sénat sur l'évasion fiscale. En janvier 2011, celui-ci a été dessaisi du dossier, transféré au procureur
de la République de Paris, Jean-Claude Marin.
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
21
2 -
Les modalités retenues
a)
Le principe
Les contribuables concernés pouvaient procéder à la régularisation de leur situation en
bénéficiant de trois avantages :
* ils étaient exempts de poursuites pénales pour fraude fiscale.
* Ils devaient acquitter les impôts restant dus (notamment impôt sur le revenu,
impôt de solidarité sur la fortune et droits de mutation) mais sur une période réduite
4
.
* Ils pouvaient bénéficier d’atténuations des intérêts de retard
5
et pénalités
6
.
Les avoirs détenus à l’étranger provenant d’activités illégales (trafics d’armes, de
drogues, vols, etc.) étaient exclus de ce dispositif.
b)
La procédure
La cellule proprement dite constituait un « guichet unique » auquel pouvaient d’adresser
les contribuables. Le dispositif était modeste : un directeur départemental et quelques
inspecteurs de la DDFIP, installés dans des locaux de la DRFIP de Paris place Saint-Sulpice.
La procédure suivie s’est caractérisée par plusieurs traits.
La possibilité d’anonymat dans une première phase
Pour entamer une procédure de régularisation, le contribuable ou son conseil
7
pouvait
contacter de manière anonyme la cellule de régularisation afin d’exposer sa situation. Cette
prise de contact était formalisée par un courrier décrivant, toujours anonymement, la situation
du contribuable et le cas échéant présentant les axes de résolutions proposées.
Suite au dépôt du dossier, une négociation s’engageait avec l’administration fiscale. En
cas d’accord sur le schéma de règlement, l’anonymat était alors levé et le contribuable déposait
des déclarations rectificatives d’impôt sur le revenu et le cas échéant d’impôt sur la fortune et
de droits de mutation. Ces dossiers étaient transmis aux DDFIP territorialement compétentes
4
En matière d’ISF, le délai de prescription était de six ans plus l’année en cours. En pratique, pour un dossier
ouvert auprès de la cellule de régularisation, l’ISF devait être payé sur les années 2003 à 2009. Les avoirs étrangers
déclarés à cette occasion étaient ajoutés au patrimoine déclaré en France pour constituer la base de la régularisation
et déterminer la charge d’ISF à régler. En matière d’IR, le délai de prescription était de trois ans (reprise sur les
années 2006, 2007 et 2008). En matière de droits de mutation (DMTG et DMTO), le délai de prescription était de
six ans et ces droits devaient être perçus sur les successions ou donations effectuées au cours des années non
prescrites.
5
Le taux des intérêts de retard était de 0,75 % par mois, soit 9 % par an jusqu’au 31 décembre 2005, et de 0,4 %
par mois, soit 4,8 %, par an à compter du 1
er
janvier 2006.
6
Le taux des pénalités varie en principe de 10 % à 80 % en fonction du comportement du contribuable. Une
pénalité de 40 % est applicable en cas de manquement délibéré du contribuable (mauvaise foi) et une pénalité de
80 % en cas de manoeuvres frauduleuses.
7
Les contribuables concernés pouvaient avoir besoin d’un accompagnement juridique et fiscal afin de pourvoir à
l’évaluation des actifs localisés à l’étranger, à la collecte de l’ensemble des documents bancaires retraçant
l’évolution des avoirs à l’étranger, au calcul des revenus tirés de ces avoirs, mais aussi de déterminer les éventuelles
répercussions d’une régularisation sur d’autres personnes (par exemple des cohéritiers) et, dans les cas les plus
complexes, analyser les structures de droit étranger (trust, fondations, etc.) et leurs incidences.
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22
restés compétents pour le calcul des impôts, la motivation des pénalités, la conclusion d’un
contrat de transaction et le recouvrement de la créance fiscale. Aucune structure n’avait donc
été créée pour gérer l’ensemble des dossiers.
La distinction entre fraudeurs
passifs
et actifs
A été qualifié de fraudeur « passif » un contribuable dont les avoirs à l'étranger étaient
issus d'un héritage
ou d’une donation ou avaient été constitués lorsqu'il était expatrié et non
déclarés à son retour. Au contraire, un résident français qui avait délibérément ouvert ou
alimenté des comptes sans les déclarer a été qualifié de fraudeur « actif », présumé de mauvaise
foi.
Un régime d’atténuation discrétionnaire
Si le principe général était que les « passifs » bénéficiaient d’une atténuation des
majorations et intérêts plus forte que les « actifs », chaque dossier a fait l'objet d'un examen au
cas par cas, conduisant à une modulation des intérêts et pénalités de retard qui a pu varier en
fonction des circonstances particulières. La cellule n'a pas procédé à la publication des principes
retenus pour le traitement des dossiers. Il ressort toutefois que le traitement réservé aux
contribuables était globalement plus favorable que celui accordé ultérieurement par le STDR
(cf. annexe n° 3).
Une durée d’admissibilité des dossiers de facto prolongée
Il avait été indiqué initialement que les dossiers de régularisation devaient être déposés
impérativement avant le 31 décembre 2009 et la cellule de régularisation a été formellement
fermée à cette date, mais l’activité de régularisation s’est en réalité poursuivie bien après pour
deux raisons.
-
L’examen des dossiers déposés dans les temps a été plus long et complexe que prévu. 4 740
contribuables avaient déposé une demande de régularisation auprès de la cellule. Or au
printemps 2011, seulement 2 400 dossiers avaient été entièrement traités, alors que
l'examen de tous les dossiers était censé être achevé à l'été.
-
Des procédures entamées avant la fermeture n’avaient pas pu être conclues par le dépôt de
dossiers complets avant le terme fixé et les conseils avaient demandé des délais
supplémentaires. Des dossiers ont donc pu être déposés hors délai, voire de nouvelles
procédures engagées après la fermeture officielle de la cellule. Ces dossiers ont été traités
sous le nom de dossiers de « mise en conformité avec la loi fiscale » (aboutissant à des
déclarations rectificatives de même nature que celles faites auprès de la cellule de
régularisation). Les régularisations se sont poursuivies jusqu’en octobre 2012.
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
23
3 -
Le bilan
a)
La réponse des contribuables défaillants
Le dispositif a comporté deux facteurs incitatifs à l’égard des contribuables défaillants :
la dispense de poursuite pénale et la faculté de ne pas lever l’anonymat dans une première phase.
Le contexte de l’affaire HSBC a pu pousser les détenteurs d’avoirs non déclarés à
régulariser leur situation. Ce réflexe a pu jouer surtout parmi les contribuables les moins
engagés dans la fraude. En juillet 2011, le rapporteur général de la commission des finances de
l'Assemblée nationale a indiqué que seuls 15 % des contribuables ayant déposé une demande
de régularisation étaient des « fraudeurs actifs » qui avaient sciemment constitué des avoirs à
l’étranger. La majorité d'entre eux (85 %) étaient des « fraudeurs passifs », qui en avaient hérité.
En revanche, certains contribuables ont pu redouter que le fait de régulariser ne les expose
à d’autres contrôles du fisc. En pratique, il n’en a rien été et il n’y pas eu, de source
administrative, de « rétorsion à l’encontre des repentis ».
b)
Les résultats
La plupart des dossiers régularisés ont été des "petits dossiers", aux montants relativement
modestes. La cellule a permis au fisc de recouvrer environ 1,2 Md€ d'impôts, de pénalités et
d'intérêts de retard. Le montant des avoirs rapatriés à cette occasion est estimé à 7,3 Md€.
Les résultats, non négligeables mais limités de cette cellule, ont été conditionnés par les
circonstances de sa création et sa faible durée d’ouverture.
Cette expérience a néanmoins démontré qu’un mécanisme de régularisation pouvait
produire des résultats. Certains éléments seront repris dans le STDR (le recours à la transaction,
la distinction entre actifs et passifs) ; en revanche d’autres ont été considérés comme moins
satisfaisants (l’anonymat de première phase, le caractère relativement discrétionnaire du
traitement des cas individuels et les possibilités de variations d’un dossier à l’autre qu’il
comportait). Cette réflexion a conduit, dans le cas du STDR, à adopter un régime davantage
formalisé, fondé sur la publicité et l’uniformité des règles de traitement. La pratique de cette
première régularisation a aussi montré que des délais suffisants devaient être ouverts aux
déclarants et étaient requis pour la gestion des dossiers et qu’une procédure plus ambitieuse
dans sa portée nécessitait des outils de traitement davantage organisés que ceux, encore
artisanaux, déployés alors.
Dans les années qui ont suivi, la prise de conscience par les États de la gravité de la fraude
fiscale internationale et de ses conséquences a entraîné des progrès dans l’adaptation du
dispositif multilatéral. Les autorités françaises ont agi dans le même sens de leur côté.
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24
C -
Un environnement international désormais plus coopératif
1 -
Les limites de l’assistance administrative bilatérale
Jusqu’à une date récente, les échanges d’informations entre États en matière fiscale ont
reposé sur la coopération administrative encadrée par des conventions et accords bilatéraux,
ainsi que par des textes communautaires pour les États membres de l’Union européenne.
Ces échanges d’information sur demande ont eu tendance à se développer depuis le début
de la décennie 2010. Néanmoins, les procédures sont lourdes et lentes, les partenaires ne font
pas toujours preuve de bonne volonté, des règles contraignantes encadrent et limitent les
possibilités de communication comme d'utilisation des données. Certains instruments
juridiques sont particulièrement restrictifs à cet égard. En outre la législation de certains pays,
la Suisse au premier chef, a longtemps empêché la communication d'informations en réponse à
des demandes d'assistance administrative internationale adressées sur la base d'information
obtenues des lanceurs d'alerte.
Les États-Unis sont le seul pays à avoir obtenu des résultats significatifs par la voie
bilatérale. La loi FATCA impose aux banques implantées dans des États ayant passé un accord
avec les États-Unis de fournir à l’IRS (
Internal Revenue Service
) américain des informations
sur les avoirs et transactions de leurs clients imposables aux États-Unis sous peine de lourdes
sanctions financières. Ce système, voté en 2010, est en place depuis 2015
8
. Son efficacité tient
évidemment à la force de pression des États-Unis sur les établissements financiers d’autres pays
et à leur capacité à imposer leur droit national de manière extraterritoriale. Il est présenté en
détail dans l’annexe n° 10.
Ces difficultés persistent encore aujourd’hui. L’administration fiscale française, faisant
usage de l’instrument des demandes groupées mis à sa disposition par l’avenant du 25 juin 2014
à la convention fiscale entre la France et la Suisse, entré en vigueur le 30 mars 2016, a adressé
le 11 mai 2016, une demande d’assistance administrative à la Suisse afin de connaitre les noms
du titulaire de comptes et ayants droits économiques figurant sur une liste annexée de références
bancaires de comptes ouverts auprès de l’UBS et portant un code « domicile France ». Cette
liste est la compilation de deux listes établies par UBS SA en 2006 et 2008, qui auraient été
fournies à la France par l’Allemagne. Outre l’identité des détenteurs, la demande française porte
sur les soldes des comptes bancaires au 1
er
janvier des années 2010 à 2015. La demande ne
porte pas sur les comptes clos avant 2010. Or, le 29 mars 2017, l’administration fédérale des
contributions helvète a notifié à la DGFiP qu’elle suspendait l’entraide administrative avec la
France, sous le prétexte que la France aurait présenté non une demande groupée mais une
demande « en vrac » (sic), etc.
Par conséquent, l’existence de ce réseau d’assistance réciproque n’était guère de nature à
dissuader les fraudeurs.
La donne a changé avec l’orientation vers une systématisation des échanges
d’information dans un cadre multilatéral.
8
AEOI (
Automatic Exchange of Information
) selon le sigle anglais
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
25
2 -
Les nouvelles normes multilatérales
L’OCDE, soutenue par le G20 (85 % de l’économie mondiale), a élaboré, dans le cadre
du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale, un
dispositif d’échange automatique
9
entre États d’informations sur les comptes bancaires et les
contrats d'assurance-vie détenus au sein d’un pays, directement ou indirectement, par des
résidents fiscaux d'autres pays. Ce dispositif a fait l’objet d’un accord multilatéral, signé à
Berlin le 29 octobre 2014, la convention multilatérale concernant l’assistance administrative
mutuelle en matière fiscale (ou MCAA en anglais :
Mutual Competent Authority Agreement
).
Cet accord impose des obligations étendues. Les informations à échanger, chaque année,
portent non seulement sur tous les types de revenus (y compris les plus-values sur actions, les
gains sur produits dérivés, les contrats d’assurance-vie, etc.) mais également sur les capitaux
ou sommes déposés à l’étranger, quel qu’en soit le montant. Les institutions financières
chargées de collecter et de transmettre les renseignements sont définies de façon large et
incluent non seulement tous les types d’intermédiaires financiers (banques, sociétés de bourse,
compagnies
d’assurances,
etc.)
mais
également
les
entités
telles
que
les
fonds
d’investissements. Elles se voient imposer des règles dites de « diligence raisonnable » qui ont
pour effet de les enrôler dans la lutte active contre la fraude fiscale et de modifier de façon
profonde la relation qu’elles entretiennent avec leurs clients. En effet, elles sont tenues de
procéder à des vérifications approfondies
10
, notamment de rechercher les bénéficiaires
économiques réels des structures contractuelles ou sociétaires qui leur sont présentées (comme
elles le faisaient déjà dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent d’origine
criminelle), de déterminer le lieu de « résidence fiscale » de leurs clients et d’exercer une
vigilance constante sur la véracité des déclarations de leur client, notamment en matière de
résidence fiscale. Il leur incombe de faire une déclaration annuelle décrivant les comptes
détenus au 31 décembre de l’année précédente et les comptes clôturés au cours de la même
année. Les échanges entre États ont lieu avant le 30 septembre de chaque année.
101 membres du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements en
matière fiscale de l’OCDE se sont à ce jour engagés à appliquer cet accord, y compris tous les
grands centres financiers tels que définis par le G 20 (Singapour, Hong-Kong, Panama par
9
La norme oblige les institutions financières (banques, dépositaires, compagnies d’assurance-vie, etc.) implantées
dans des pays signataires à identifier les titulaires et bénéficiaires de comptes bancaires des résidents fiscaux de
pays avec lesquels un accord d’échange a été conclu et collecter un certain nombres d’informations (nom, prénom,
numéro de passeport et coordonnées du détenteur, numéro de compte, soldes du compte, intérêts perçus, produits
bruts de cession de valeurs mobilières, à les transmettre annuellement à leur administration fiscale qui doit les
échanger avec les autres juridictions signataires. La juridiction destinataire de l’échange est en principe celle du
pays de résidence du bénéficiaire du compte. Toutefois en cas de doute sur la résidence réelle, l’échange peut être
opéré avec plusieurs juridictions, ce qui vise à éviter les abus concernant les lieux de résidences et les
relocalisations intra-Européennes. Tous les comptes de particuliers sont concernés : contrairement à la directive
sur la fiscalité de l’épargne, aucune exemption n’est prévue en fonction d’un seuil d’investissement ou de date
d’acquisition ou d’émission des titres. Les juridictions peuvent ne pas échanger d’informations sur les compte de
personnes morales (sociétés, trusts, fondations, etc.) au-dessous d’un seuil de 250 000 USD. Elles peuvent aussi
le faire et ce seuil a vocation à être réduit voire supprimé à terme.
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exemple). Les États-Unis n’ont pas signé l’AEOI, et n’ont pas l’intention de le faire, considérant
que FATCA répond à leurs besoins.
Ce mécanisme doit entrer en vigueur en 2017 et 2018 selon les modalités détaillées dans
l’annexe n° 11.
Les institutions financières doivent depuis le 1
er
janvier 2016 classer tout nouveau client,
c’est-à-dire identifier les comptes devant faire l’objet d’un échange d’informations avec un pays
tiers. Cette classification repose essentiellement sur les auto-certifications remplies par les
personnes physiques et morales indiquant notamment le ou les pays dans lesquels elles sont
domiciliées fiscalement et les numéros d’identifiant fiscaux associés. L’exactitude de l’auto-
certification sera vérifiée en s’appuyant sur les renseignements collectés dans le cadre de
l’ouverture du compte, y compris les documents recueillis en application des procédures anti-
blanchiment (AML –
Anti-Money Laundering
) - et KYC
(« Know Your Custome
r »). Elles
doivent procéder à la classification des autres comptes préexistants, dont les comptes des
personnes morales, au plus tard le 31 décembre 2017.
C’est en 2017 que sera lancée la première vague d’échanges automatiques de données
informatisées entre 53 États de l’OCDE (dits «
early adopters
», dont tous ceux de l’UE
11
moins
l’Autriche). Une seconde vague (48 États) suivra en 2018. En ce qui concerne la Suisse, l’EAR
s’appliquera, en 2018, sur la base des informations collectées en 2017. Il n’aura pas d’effet
rétroactif. La date butoir d’entrée en service effective est le 30 septembre pour chacune de ces
deux années. À compter de 2019, le Forum de l’OCDE procédera à une évaluation
12
du
fonctionnement du système d’échange automatique.
L’Union européenne est pleinement engagée dans le renforcement des échanges
d’informations. Après la directive 2003/164 prévoyant un mécanisme d’échange automatisé
d’informations limité aux revenus perçus sous forme d’intérêts par les non-résidents, la
directive 2011/16/UE a renforcé la coopération administrative fiscale entre États membres,
notamment en prévoyant un échange automatique sur cinq catégories de revenus. Cette
directive a été complétée par la directive 2014/107/UE qui incorpore en droit européen les
mécanismes adoptés par l’OCDE, et fixe au 30 septembre 2017 le début des échanges
automatiques d’informations (détail dans l’annexe n°12).
La préparation, l’adoption et l’entrée en vigueur imminente de ce mécanisme multilatéral
ont modifié les attitudes des acteurs financiers et ont été perçus par les détenteurs d’avoirs non
déclarés comme augmentant sensiblement les risques encourus s’ils persistaient dans la fraude.
11
Afin d’assurer la mise en place d’un système d’échange automatique d’informations homogène au sein de
l’Union Européenne, la Commission a proposé de reprendre le projet de Norme Commune dans une directive
réformant l’actuelle directive 2011/16/UE sur la Coopération Administrative (dite « DAC ») datant de 2011. Cette
proposition a débouché sur la Directive 2014/107/CE du 9 décembre 2014 (publiée au Journal officiel du
16 décembre 2014) dite « DAC 2 ». Tous les États Membres sont tenus de la transposer dans leur droit interne
pour le 31 décembre 2015 au plus tard. En vue d’éviter que la mise en place de ce nouveau système entraine une
fuite de capitaux vers les paradis fiscaux les plus proches, la Commission a parallèlement entrepris de renégocier
les accords liant l’Union et les pays et territoires tiers dans le cadre de l’application de la Directive « sur la fiscalité
de l’épargne » (Monaco, Andorre, St Marin, Liechtenstein et Suisse notamment).
12
Un premier cycle d’évaluation sur les échanges sur demande a été achevé en 2016 (la France a été déclarée
conforme).
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
27
3 -
Le nouveau comportement des banques à l’égard des détenteurs d’avoirs
Compte tenu de la mise en place progressive des procédures d’échanges automatiques de
renseignements entre les pays, les banques européennes qui pratiquaient le secret fiscal, à
commencer par les banques suisses, ont annoncé dès 2014 leur intention d’y renoncer et modifié
leurs pratiques. Elles paraissent avoir mis fin au recrutement actif de nouveaux clients. UBS,
mise en examen en France à l’été 2016 pour « démarchage illicite » auprès de clients, aurait
ainsi interdit à des employés de se rendre en France « jusqu’à nouvel ordre », par crainte
d’éventuelles interpellations. Les banques ont commencé notamment à partir de 2013, à
conseiller aux résidents fiscaux français de déclarer leurs avoirs à l’administration fiscale
française, en faisant de cette déclaration la condition du maintien du compte. Certains
établissements sont même allés plus loin en interdisant des retraits d’argent estimés trop élevés
ou des transferts jugés douteux. La peur d’être accusé de blanchiment de fraude fiscale par un
pays étranger est devenue plus forte sur les places financières.
Même si ces pratiques ont surtout visé des clients d’envergure modeste ou moyenne,
d’autres solutions étant proposées aux plus importants, cette nouvelle attitude, parfois relayée
en France par les conseillers fiscaux et avocats fiscalistes, a constitué pour les détenteurs
d’avoirs non déclarés une incitation supplémentaire à sortir de l’illégalité.
D -
Une pression accrue sur les fraudeurs français
Du côté français, les pouvoirs publics ont parallèlement renforcé les moyens d’action des
services fiscaux et durci le régime des sanctions applicables en cas de non déclaration d’avoirs
à l’étranger.
1 -
Les suites de l’affaire HSBC
Le dépôt de plaintes au pénal par l’administration fiscale dans le cadre de l’affaire HSBC
a donné lieu à plusieurs condamnations pénales, à partir de décembre 2013, dont certaines ont
été très médiatisées. Ce fait a renforcé la crédibilité de l’action répressive et était de nature à
inquiéter les possesseurs d’avoirs non déclarés.
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La pression a été maintenue ensuite par la multiplication des révélations sur les pratiques
de certaines banques : après l’éclatement de l’affaire «
Swissleaks
» en 2015
13
, le Land de
Rhénanie Palatinat a transmis en août 2016 aux autorités de 19 pays européens, les noms de
160 000 personnes soupçonnées de fraude fiscale pour détenir des comptes non déclarés dans
des banques luxembourgeoises dont 42 540 Français (50 0000 Allemands, 49 022 Belges).
Les fraudeurs ont eu le sentiment que les avoirs dissimulés pouvaient être portés à la
connaissance de l’administration fiscale par la voie de ces dénonciations et ce facteur ne pouvait
que les pousser à régulariser
2 -
Le renforcement des outils du contrôle fiscal
Plusieurs mesures ont tendu à intensifier l’action des services fiscaux. Le fichier
EVAFISC a été créé par arrêté du 25 novembre 2009 après accord de la CNIL, avec l’objet de
réunir toutes les informations laissant présumer de la détention de comptes bancaires à
l’étranger par des personnes physiques ou morales. Il a été effectivement mis en service en
décembre 2010 et est géré par la direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF). Sa finalité
est de contribuer à orienter les contrôles fiscaux
14
. Le recours à des nouvelles techniques comme
le «
data mining
» peut aussi contribuer à la détection des fraudeurs.
Un autre volet a consisté à susciter la communication aux pouvoirs publics de
renseignement concernant les fraudes, en protégeant leurs auteurs, souvent qualifiés de
« lanceurs d’alerte », voire en utilisant des incitations matérielles. L'article 109 de la loi de
finances pour 2017 a instauré, à titre expérimental pour une durée de deux ans, un dispositif
d'indemnisation des personnes étrangères aux administrations publiques qui portent à la
connaissance de l'administration fiscale des informations révélant un manquement à certaines
règles et obligations déclaratives, utiles à la lutte contre la fraude fiscale internationale. Le
durcissement du cadre juridique.
13
À la suite de la transmission en février 2014 au journal
Le Monde
d’une clef USB contenant des archives
numérisées de la banque HSBC entre novembre 2006 et mars 2007, une enquête longue et approfondie a été
engagée par un consortium de médias, y compris helvétiques, et a abouti à la publication en en février 2015,
d'informations sur un système international de fraude fiscale et de blanchiment d'argent qui aurait été mis en place
par la filiale suisse de cette banque. À la suite de ces révélations, HSBC
Private Banking
(Suisse) a été mise en
examen par le parquet national financier pour avoir aidé des clients français à frauder le fisc. Elle a décidé de ne
pas s’acquitter d’une amende de 1,4 Md€ négociée dans le cadre d’une procédure de plaider-coupable. Le parquet
national financier a donc requis le 10 mars 2015 son renvoi devant le tribunal correctionnel de Paris pour
« blanchiment aggravé de fraude fiscale » et « démarchage illicite ». Le 8 avril 2015, la maison mère HSBC,
soupçonnée non seulement de défaut de surveillance de sa filiale, mais aussi d’avoir participé de manière active
aux agissements frauduleux, a été à son tour mise en examen pour « complicité de blanchiment de fraude fiscale »
et « complicité de démarchage illicite », et astreinte à verser une caution de 1 Md€, dont le montant correspond à
la moitié des sommes blanchies, soit 2,2 Md€ selon l'évaluation des juges. Cependant cette somme a été ramenée
à 100 M€ par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris. Le parquet national financier a confirmé dans
ses réquisitions du 18 octobre 2016, celles qu'il avait prises en mars 2015, et réitéré la demande de renvoi en
correctionnelle de la filiale suisse, pour « démarchage illicite » et « blanchiment de fraude fiscale » ainsi que celui
de quelques-uns de ses dirigeants ou anciens dirigeants.
14
La filiale suisse de la banque HSBC avait présenté un recours devant le Conseil d’État afin de faire annuler pour
excès de pouvoir le texte créant Evafisc : sa demande de référé a été rejetée le 19 avril 2010 et elle a été déboutée
sur le fond le 24 août 2011.
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29
3 -
Le durcissement du cadre juridique
La loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la
grande délinquance financière 2013 a allongé de trois à six ans le délai de prescription en
matière de fraude fiscale : les poursuites pénales peuvent donc être engagées pendant six ans à
partir de l'année qui suit l'infraction. Elle a alourdi les sanctions pénales
15
.
Les délais de reprise en matière d'impôts directs ont été ont été portés à dix ans en cas de
détention non déclarée d’avoirs à l’étranger par la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 -
art. 80 modifiant l’article L. 169 du livre des procédures fiscales ; il en est de même en cas
d'omission ou d'insuffisance d'imposition révélée par une procédure devant les tribunaux
(LPF, art. L. 188 C). Le même délai s’applique en matière de droits d'enregistrement et
assimilés (LPF, art. L. 181-0 A).
4 -
Les limites de l’action répressive et l’option prise en 2013
Dans ce contexte, il était
a priori
concevable d’intensifier dans l’immédiat l’action de
contrôle fiscal et d’attendre l’entrée en vigueur des échanges automatiques d’informations dans
l’espoir d’accéder alors aux données concernant les fraudeurs et de pouvoir leur appliquer les
sanctions prévues par la loi dans toute leur rigueur. Toutefois, il fallait alors prévoir d’engager
des procédures de contrôle fiscal à l’encontre des contribuables dont ces échanges auraient
montré qu’ils étaient détenteurs d’avoirs non déclarés.
Cependant, cette approche comportait des limites : les ressources humaines et techniques
du contrôle fiscal sont limitées ; les opérations de contrôle fiscal, indispensables pour prouver
le cas échéant la mauvaise foi d’un contribuable, sont lourdes et débouchent en règle générale
sur des contentieux longs, complexes, et consommateurs de moyens ; les moyens des
juridictions sont eux aussi contraints et elles auraient du mal à absorber le traitement de dossiers
en cas de généralisation et de multiplication des suites pénales ; les dénonciations susceptibles
de servir de base à des actions répressives présentent un caractère aléatoire et fragmentaire.
L’obtention de renseignements par des informateurs et des « lanceurs d’alerte » n’est pas dénuée
de fragilités juridiques, même si plusieurs pays en ont aménagé le régime. Enfin, l’hypothèse
de base de ce scénario alternatif était que les échanges automatiques produiraient dès le début
ou en tout cas rapidement des informations fiables, complètes et faciles à exploiter, alors qu’il
est plus réaliste de prévoir une période de montée en charge progressive et d’ajustement des
méthodes.
Le gouvernement a donc fait le choix en 2013 de privilégier la possibilité de recouvrer à
court terme pour l’État des recettes plus assurées dans des conditions compatibles avec les
moyens à sa disposition, en faisant le pari que l’évolution du contexte international et interne
15
Indépendamment des sanctions fiscales, l'auteur d'une fraude fiscale encourt 500 000 € d'amende et 5 ans
d'emprisonnement. Ces peines sont portées à 2 000 000 € d'amende et 7 ans d'emprisonnement lorsque les faits
ont été commis en bande organisée ou grâce à :
•l'ouverture de comptes ou à la souscription de contrats auprès d'organismes établis à l'étranger ;
•l'interposition de personnes ou d'organismes écran établis à l'étranger ;
•l'usage d'une fausse identité ou de faux documents (ou toute autre falsification) ;
•une domiciliation ou un acte fictif ou artificiel à l'étranger.
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contribuerait à accentuer la pression sur les détenteurs d’avoirs à l’étranger non déclarés et les
rendrait réceptifs à une offre de régularisation suffisamment attractive, à une échelle supérieure
à celle de la « cellule Woerth ». Il est apparu possible de mettre en place rapidement un
dispositif fondé sur les possibilités d’action déjà ouvertes à l’administration par le droit fiscal
en vigueur, sans modification législative.
II -
Une procédure administrative de régularisation fondée
sur le droit fiscal en vigueur
C’est dans cette optique que le ministère des Finances a publié la circulaire dite
« Cazeneuve » du 21 juin 2013 permettant aux détenteurs d’avoirs non déclarés français de
régulariser leur situation dans des conditions relativement clémentes. L’aménagement du
régime des sanctions
a été fondé sur les pouvoirs d’appréciation laissées à l’administration
fiscale par les textes en vigueur, notamment le CGI et le LPF.
A -
Les règles fixées par les circulaires
1 -
Les documents publiés par l’administration
La circulaire du ministre du budget en date du 21 juin 2013 intitulée « Traitement des
déclarations rectificatives des contribuables détenant des avoirs à l’étranger : transparence et
droit commun » a défini les bases du processus de régularisation.
Une circulaire du même ministre en date du 12 décembre 2013 est venue confirmer
l’application des dispositions de la circulaire du 21 juin 2013 pour les déclarations effectuées à
compter de la promulgation de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude
fiscale et la grande délinquance économique et financière ainsi que pour les déclarations
effectuées à compter du 1
er
janvier 2014.
Une autre circulaire publiée le 10 décembre 2014, visant à accélérer le dépôt des
dossiers
16
, a stipulé que « pour bénéficier du régime prévu » par les circulaires de juin et de
décembre 2013, les demandes incomplètes devaient comporter l’ensemble des déclarations
rectificatives avant le 31 mars 2015 pour les demandes déposées avant le 30 juin 2014. Pour
celles déposées entre le 1
er
juillet 2014 et le 10 décembre 2014, le complément devait être fourni
au 30 mai 2015. Enfin, les demandes déposées à compter du 10 décembre 2014 devaient être
complétées dans un délai de six mois.
Un formulaire n° 3911-SD dénommé dossier de mise en conformité d'avoirs détenus à
l'étranger a été mis en ligne. Les particuliers détenant des avoirs à l'étranger et souhaitant se
mettre en conformité dans le cadre de la circulaire du ministre délégué au budget du 21 juin
2013 sont tenus de joindre ce formulaire à leur demande de mise en conformité.
16
Cette accélération devait augmenter de 0,4 Md€ les recettes du STDR en 2015 et s’inscrivait dans un ensemble
de mesures permettant d’abaisser la prévision du déficit public 2015 de 4,3 % à 4,1 % du PIB.
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31
Si ces différents documents n’ont fait l’objet d’aucun commentaire détaillé au Bulletin
Officiel des Finances Publiques, en revanche une présentation rédigée sous la forme de
« questions-réponses » ayant vocation à répondre aux diverses interrogations sur ce dispositif a
été publiée sur le portail des ministères financiers (www.economie.gouv.fr, questions/
réponses). Elle a été mise à jour pour la dernière fois en décembre 2016 et peut être complétée
si d’autres questions apparaissent.
Ces documents sont les seuls textes relatifs aux modalités de régularisation.
2 -
Les principes généraux
Ils posent les principes suivants.
Les avoirs visés sont de toute nature : comptes bancaires, comptes titres, contrats
d’assurance vie, avoirs physiques (or, immobilier, etc.), avoirs détenus via des « structures
interposées » (trusts, fiducies, etc.)
17
.
Peuvent bénéficier de ce dispositif les contribuables personnes physiques détenant des
avoirs à l’étranger qui se font connaître spontanément auprès de l’administration fiscale en
demandant la régularisation de leur situation fiscale passée et en acquittant l’ensemble des
impositions éludées pour les périodes non prescrites.
Les contribuables qui font l’objet d’une procédure administrative antérieure ne sont pas
éligibles. Des dossiers admis peuvent être, après examen, privés du bénéfice de la régularisation
s’ils présentent certaines caractéristiques (soupçons de blanchiment) (cf.
infra
).
Les contribuables doivent communiquer immédiatement leurs nom et coordonnées ainsi
que les références des avoirs concernées. Cette procédure ne permet aucun anonymat à la
différence de la première phase de la précédente procédure de régularisation.
Cette procédure ne constitue pas une amnistie.
17
Ces structures interposées sont visées par l’article 123 bis du CGI, qui prévoit l’imposition en France des avoirs
détenus à l’étranger par une personne physique domiciliée fiscalement en France, par le biais d’une structure
juridique soumise à un régime fiscal privilégié, dont l’actif et les biens sont principalement financiers. La loi 2011-
900 du 29 juillet 2011 (LFR1 pour 2011) a créé l’obligation de déclarer la valeur vénale des actifs détenus via un
trust au 1
er
janvier de chaque année. La même loi instaure, en cas de non-déclaration, une amende de 10 000 € ou,
s'il est plus élevé, d'un montant égal à 5 % des biens ou droits placés dans le trust ainsi que des produits qui y sont
capitalisés. Dès lors que sa participation dans une telle entité s’élève à au moins 10 %, le contribuable est soumis
à l’IR et aux prélèvements sociaux à raison des bénéfices ou revenus positifs simplement réalisés par cette société
étrangère, qu’ils aient ou non été effectivement distribués. La base d’imposition est le plus élevé des montants
entre le résultat réel de l’entité interposée et une base forfaitaire, déterminée d’après le montant des avoirs,
multipliée par un taux forfaitaire compris selon les années entre 3,99 % et 6,21 %, le tout multiplié par 125 %. Il
est à noter que ce montant forfaitaire n’est pas applicable, si la structure interposée est établie dans un pays ayant
conclu avec la France une convention d’assistance administrative portant sur les données bancaires, si bien que les
structures établies à Panama, par exemple, ne voyaient plus leur résultat établi sur la base forfaitaire, à compter de
2012.
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S’il n’est pas explicitement garanti
18
aux déclarants qu’ils seront exonérés de poursuites
pénales, ce point ressort a contrario de la formulation employée sur le site de la DGFiP : «
Ne
pas le faire [déclarer] vous exposerait à des poursuites pénales en cas de découverte ultérieure
de ces avoirs.
» Des assurances sur l’absence de poursuites pénales ont été données oralement
par les ministres et l’administration.
En revanche, les contribuables faisant une déclaration rectificative doivent régler tous les
impôts dus dans les limites du délai de prescription, ainsi que les intérêts de retard légaux.
Seules les pénalités peuvent faire l’objet d’aménagements.
La mise en oeuvre de ce dispositif a été confiée à un service ad hoc, le service de traitement
des déclarations rectificatives (STDR), créé au sein de la direction nationale de vérification des
situations fiscales (DNVSF).
B -
Des principes de règlement qui se réfèrent au droit commun fiscal
Les deux éléments cardinaux du dispositif sont fondés sur les latitudes données à
l’administration par le droit fiscal en vigueur.
1 -
La dispense
a priori
de poursuites pénales
Les déclarants se sont vus dispensés de poursuites pénales. Cette disposition
particulièrement attractive a été rendue possible par le monopole de déclenchement des
poursuites pénales du chef de fraude fiscale détenu par l’administration fiscale, dit « verrou
fiscal ».
Le monopole de l’administration fiscale en matière de poursuites pénales pour fraude
fiscale
Si les sanctions pénales de l’article L 1741 du CGI ne peuvent être édictées que par le juge, les
poursuites pénales déclenchant l’action judiciaire ne peuvent être engagées qu'à l'initiative de
l'administration fiscale, qui dépend du ministre chargé du Budget
19
. L’administration et le ministre
n’ont pas à motiver leur décision d’engager ou de ne pas engager des poursuites pénales. Ni un
procureur, même en cas de flagrant délit de fraude fiscale, ni une partie civile ne peut déposer plainte
et enclencher ainsi la poursuite judiciaire.
Ce dispositif est dérogatoire au droit commun selon lequel c'est au ministère public d'apprécier
l'opportunité de poursuites.
18
L’administration ne peut pas prendre l’engagement de ne pas exercer un droit qui lui est donné par la loi.
19
Cette disposition, couramment désignée sous le nom de « verrou de Bercy », usitée depuis les années 1920,
trouve son fondement dans l’article L228 du livre des procédures fiscales : « Sous peine d'irrecevabilité, les
plaintes tendant à l'application de sanctions pénales en matière d'impôts directs, de taxe sur la valeur ajoutée et
autres taxes sur le chiffre d'affaires, de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière et de droits de timbre
sont déposées par l'administration sur avis conforme de la commission des infractions fiscales (CIF). »
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
33
Le Conseil constitutionnel, saisi d’une QPC
20
, tout en le qualifiant de construction
jurisprudentielle
21
, l’a déclaré en 2016 conforme à la Constitution. Il a jugé que la limitation qu’il
apporte au libre exercice de l’action publique par le procureur de la République n’était pas
disproportionnée.
Le ministre du budget a donc fait en l’occurrence usage d’une faculté qui lui appartient.
En termes pratiques, il peut être considéré que s’il n’avait pas pu prendre cet engagement (faute
de « verrou ») ou, le pouvant (grâce au « verrou »), ne l’avait pas pris, les contribuables
défaillants auraient pu hésiter à se dénoncer s’ils avaient couru le risque de s’exposer à des
poursuites pénales.
Il convient cependant de s’interroger sur les conditions dans lesquelles ce monopole des
poursuites a été utilisé. L’esprit de la loi est incontestablement que l’administration statue au
cas par cas et décide (sous réserve de l’avis de la CIF) si tel ou tel dossier doit ou non faire
l’objet d’une procédure judiciaire. En l’occurrence, la décision a été prise une fois pour toutes
et
erga omnes
, quelle qu’ait pu être par exemple le volume des avoirs non déclarés et des impôts
éludés. Or, dans le § 13 de sa décision sur la QPC susmentionnée, le Conseil constitutionnel a
estimé que «
Les infractions pour lesquelles une plainte de l’administration préalable aux
poursuites est exigée répriment des actes qui portent atteinte aux intérêts financiers de l’État
et causent un préjudice principalement au Trésor public. Ainsi, en l’absence de dépôt d’une
plainte de l’administration, à même d’apprécier la gravité des atteintes portées à ces intérêts
collectifs protégés par la loi fiscale, qui sont susceptibles de faire l’objet de sanctions
administratives, l’absence de mise en mouvement de l’action publique ne constitue pas un
trouble substantiel à l’ordre public.
» Il en résulte
a contrario
que l’administration doit
apprécier la gravité des atteintes portées aux intérêts du Trésor public quand elle statue sur
l’opportunité de la poursuite. En d’autres termes, elle doit, entre autres, tenir compte de
l’étendue de la fraude et du montant des impôts éludés. Dans le cas d’espèce, elle ne l’a pas fait
puisqu’il a été admis à l’avance qu’aucun fraudeur venant à résipiscence ne serait poursuivi,
eût-il lésé gravement les intérêts financiers de l’État. Une disparité s’est trouvée
de facto
introduite entre les contribuables défaillants du fait de la non déclaration d’avoirs à l’étranger,
bénéficiant indistinctement de cette disposition, et le « tout-venant » des fraudeurs, qui restaient
passibles de ces poursuites pénales, y compris dans des cas où le montant des impôts éludés par
eux était inférieur à celui des impôts éludés par les titulaires d’avoirs à l’étranger.
Il peut en outre être observé qu’à la différence du comité du contentieux fiscal
(cf. ci-dessous), la commission des infractions fiscales n’a pas été consultée sur cette
orientation. Certes, l’article L. 228 du livre des procédures fiscales dans sa version applicable
au 1
er
janvier 2010 subordonne les poursuites pour fraudes fiscales à une plainte préalable de
l’administration fiscale sur avis conforme de la commission des infractions fiscales (CIF), créée
en 1977. L’administration n’est par définition tenue de la consulter que pour recueillir son avis
dans le cas où elle entend engager des poursuites. Elle n’a donc commis aucune irrégularité en
ne sollicitant pas son avis puisqu’elle avait l’intention de ne pas en engager. Néanmoins, en
20
QPC 2016-555 du 22 juillet 2016
21
Dans le § 4 de sa décision, le Conseil a fait valoir que la Cour de cassation interprète de manière constante les
mots “Sous peine d’irrecevabilité”, figurant dans le premier alinéa de l’article L228 du LPF, comme subordonnant
la mise en mouvement de l’action publique au dépôt d’une plainte par l’administration.
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34
décidant de s’abstenir de poursuivre dans tous les cas, elle a retiré à la commission toute
occasion d’exercer son office.
2 -
Le recours à la transaction
Si les impôts éludés du fait des défaillances déclaratives antérieures doivent être
intégralement acquittés, ainsi que les intérêts de retard qui sont de droit, les déclarants se voient
proposer une réduction des majorations d’impôts et des amendes normalement exigibles. La
fixation du montant des pénalités prend la forme d’une transaction, au sens fiscal, entre le
contribuable et l’administration.
Prévue au 3° de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales (LPF), la transaction est
une convention entre l’administration fiscale et le contribuable qui, sans conduire à minorer les
droits en principal, peut comporter une atténuation des pénalités, subordonnée au paiement par
le contribuable des sommes laissées à sa charge et à son désistement de toute procédure
contentieuse ou à sa renonciation à tout recours contentieux. Une transaction est néanmoins
susceptible d’être révoquée par l’administration fiscale s’il s’avère ultérieurement que les
déclarations des contribuables n’étaient pas sincères. La finalité de la transaction de droit
commun est de protéger les intérêts de l’État, en évitant des contentieux longs, coûteux et
aléatoires, et de permettre un encaissement assuré et rapide d’une fraction de la dette fiscale
exigible.
Dans son rapport de 2013 (non publié) sur l’organisation de la régularisation des avoirs
détenus à l'étranger non déclarés, l’inspection générale des finances avait recommandé de
recourir en la matière à cette voie transactionnelle.
Le recours à la transaction appelle plusieurs observations.
a)
Le principe
La procédure de régularisation par voie de transaction épargne aux déclarants une partie
de la rigueur de la loi sur le terrain des pénalités fiscales. Or il n’est pas avéré que le seul
engagement de ne pas donner de suite pénale en cas de régularisation, sans amodiations de ces
pénalités, n’aurait pas suffi à inciter les contribuables à procéder à une déclaration. Il n’existe
évidemment pas de donnée contrefactuelle pour le prouver. En tout état de cause, l’objectif
poursuivi était bien de rendre le dispositif aussi attractif que possible afin de maximiser les
recettes, le raisonnement implicite étant que, dans cette perspective, il était préférable de
susciter le plus grand nombre de déclarations.
b)
La condition d’une demande du contribuable présumée satisfaite
La transaction telle qu’elle est définie par les dispositions législatives du livre des
procédures fiscales est conditionnée par une demande du contribuable et vise au règlement de
sa situation individuelle en tenant compte de tous les éléments de son dossier fiscal. Dans le
cadre de la procédure gérée par le STDR, si les contribuables ne font pas de demande explicite
(une telle demande n’a pas à figurer dans le dossier) il est loisible de considérer que le dépôt
d’une déclaration rectificative sous l’empire des circulaires susmentionnées vaut demande de
bénéficier du régime favorable qu’elles aménagent.
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35
c)
Un traitement de série
En revanche, les dossiers ne sont pas traités sur une base véritablement individuelle par
le STDR mais sont réglés par application d’un barème standard, ce qui ne permet pas de tenir
compte des particularités de chacun. En l’occurrence, le traitement des dossiers selon des
modalités véritablement individuelles n’aurait vraisemblablement pas conduit à estimer une
transaction optimale dans tous les cas ou aurait pu conduire à adopter des solutions différentes
d’un dossier à l’autre. Des considérations d’opportunité et d’efficacité ont conduit à établir ces
modalités spécifiques, en utilisant la procédure de la transaction individuelle telle que prévue
par la loi pour opérer un traitement de masse uniforme.
d)
Une procédure ad hoc
En vertu de l'article R*247-4 du LPF, l'autorité compétente pour statuer sur les demandes
gracieuses et accorder des transactions est soit le directeur chargé de la direction départementale
des finances publiques, de la direction spécialisée ou nationale concernée, lorsque les sommes
faisant l'objet de la demande n'excèdent pas 200 000 € (seuil fixé par le décret n° 2013-443 du
30 mai 2013)
22
, soit le ministre chargé du budget, après avis du comité du contentieux fiscal,
douanier et des changes (CCFDC), institué par l'article 20 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre
1977
23
, lorsque les sommes faisant l'objet de la demande excèdent ce seuil de 200 000 €.
La procédure instituée par les circulaires précitées et confiée au STDR n’est pas
dérogatoire en termes de compétences en deçà du seuil de 200 000 € puisque le STDR relève
de la DNVSF qui dispose d’une compétence nationale, y compris en matière de transaction. En
revanche, les transactions aboutissant à une remise de pénalités supérieure à 200 000 € étaient
censées, en régime normal, être décidées par le ministre après avis du Comité du contentieux
fiscal, douanier et des changes (CCFDC).
22
Ce seuil s’apprécie par cote, exercice ou affaire, selon la nature des impôts. Lorsque la demande de remise
transactionnelle porte simultanément sur plusieurs exercices ou années d’imposition, le seuil s’apprécie
séparément par année ou exercice. En cas de dépassement du seuil pour une année ou un exercice, le ministre est
compétent pour se prononcer sur l’ensemble de la demande. En matière de droits de mutation et de publicité
foncière, le seuil s’apprécie par affaire. Est considérée comme une affaire chaque infraction ou série d’infractions
faisant l’objet d’une constatation unique à l’encontre d’un même redevable ou de plusieurs redevables solidaires.
Lorsque la demande porte à la fois sur les droits en principal et les pénalités, le seuil s’apprécie en fonction du
montant global des droits et des pénalités. En revanche, si la demande ne porte que sur les pénalités, seules celles-
ci sont prises en compte. En matière de taxe sur la valeur ajoutée et en matière de droits d’enregistrement et
assimilés, le seuil s’apprécie toujours en fonction des pénalités, dès lors que les droits ne peuvent pas faire l’objet
de remise. Lorsque la demande d’atténuation vise aussi bien les intérêts de retard que des majorations ou amendes,
le seuil s’apprécie en fonction du montant global des pénalités dont l’atténuation est demandée. De même, les
sommes à prendre en considération pour l'appréciation du seuil de compétence du comité du contentieux fiscal,
douanier et des changes comprennent non seulement les pénalités d’assiette mais aussi les pénalités de
recouvrement réclamées par le comptable public.
23
Loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédure aux contribuables en matière fiscale
et douanière, article 20, modifié par Loi n°92-125 du 6 février 1992 - art. 3 (V) JORF 8 février 1992 : « Il est
institué un comité du contentieux fiscal, douanier et des changes chargé d'émettre un avis sur les transactions ou
remises excédant les limites de compétence des services déconcentrés de la direction générale des impôts ou de la
direction générale des douanes et qui n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 16 ci-dessus (…).
Les dispositions du présent article s'appliquent aux transactions conclues et aux remises accordées à compter du
1
er
janvier 1978 »
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36
e)
Un aval global du Comité du contentieux fiscal, douanier et des changes (CCFDC)
L’application de cette règle aurait dû conduire à consulter le CCFDC sur toutes les
transactions effectuées par le STDR remplissant cette condition.
Or, le CCFDC n’a pris qu’une position de principe de caractère global, sans examiner les
transactions individuelles
Par une décision du 9 avril 2014, le CCFDC a en effet estimé que les propositions de
transaction strictement conformes au barème mentionné dans les circulaires précitées étaient
conformes à l’équité tant au niveau des conditions strictes auxquelles elles sont soumises que
des taux auxquels les pénalités sont ramenées. Il n’a donc pas jugé nécessaire d’être consulté
sur les dossiers individuels, y compris ceux des transactions dépassant le seuil à partir duquel
le LPF a prévu sa consultation. La décision du comité du 9 avril 2014 n’a pas été publiée.
Toutefois, la « foire aux questions » fait mention de cette décision en page 15. Conformément
à cet avis, aucune transaction liée à la procédure de régularisation des avoirs non déclarés
détenus à l'étranger n'a été soumise à l'avis du CCFDC.
Là encore les considérations de rapidité d’exécution, imposant un traitement non
différencié, ont primé.
3 -
La distinction entre fraudeurs actifs et passifs
Le barème transactionnel prévu par les circulaires relatives au STDR est le même pour
tous les déclarants, les seules modulations autorisées dépendant de la décision de
l’administration de considérer le contribuable comme un fraudeur « actif » ou « passif ».
La circulaire du 21 juin 2013 définit les contribuables qui ont reçu les avoirs qu’ils
détiennent à l’étranger dans le cadre d’une succession ou d’une donation ou qui les ont
constitués lorsqu’ils ne résidaient pas fiscalement en France sont des fraudeurs passifs. Les
autres contribuables, en particulier ceux qui ont constitué leurs avoirs à l’étranger alors qu’ils
résidaient en France, sont considérés comme des fraudeurs actifs. Les sanctions sont moins
lourdes pour les fraudeurs passifs que pour les actifs : le barème de transaction prévoit ainsi
pour les fraudeurs passifs un taux de majoration des droits inférieur et un plafonnement des
amendes à un niveau plus bas que pour les fraudeurs actifs.
Si l’admission à la transaction est censée permettre de tenir compte de la démarche
spontanée du contribuable, la distinction entre fraudeurs « actifs » et « passifs » est présentée
comme correspondant à des degrés d'implication inégaux du contribuable dans la fraude, le
fraudeur « passif » étant réputé moins coupable que le fraudeur « actif ».
Pour autant, la distinction entre fraudeurs « actifs » et « passifs » n’est fondée sur aucun
texte juridique et n’existe pas en droit fiscal, même si elle a été utilisée précédemment dans le
cadre de la « cellule Woerth ». Elle ne repose en l’espèce que sur la circulaire de juin 2013,
dont la publication sur le site du ministère rend cette distinction opposable à l’administration.
D’ailleurs ce texte n’emploie pas ces adjectifs mais se réfère à des situations concrètes (héritage,
constitution d’un avoir par un expatrié ou à l’inverse alimentation d’un compte par un résident
français).
Cette distinction pose deux séries de problèmes.
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37
a)
Un problème de méthode résolu : les « passifs-actifs »
Il peut arriver qu’un contribuable ayant par exemple hérité d’un avoir à l’étranger ou
l’ayant constitué alors qu’il était expatrié, et devant donc être considéré comme « passif », ait
en réalité continué à l’approvisionner et soit devenu « actif ». Dans ce cas, c’est la qualification
d’actif qui est retenue pour l'application du barème. Cette décision a été exposée lors de la
conférence de l'institut des avocats conseils fiscaux (IACF) du 18 novembre 2013. Les avocats
ont été informés qu’il ne saurait y avoir de fraudeurs actifs et passifs à la fois. Le fait d’avoir
alimenté même de manière modeste un compte d’origine successorale ou d’avoir ouvert un
compte distinct de celui sur lequel figurent les sommes recueillies d’un héritage confère le statut
d’actif pour l’ensemble des avoirs régularisés. Il s’agit là encore d’une construction prétorienne
de l’administration.
b)
Un problème de fond
Sur le fond, le manquement commis par les contribuables concernés n’était pas de détenir
des avoirs à l’étranger, indépendamment de leur origine, mais de s’être soustraits à l’obligation
déclarative qui s’impose en vertu du droit fiscal à tout détenteur d’avoir, quelle qu’en soit la
provenance : c’est bien la
dissimulation
d’avoirs à l’étranger et la soustraction aux impositions
afférentes à ces avoirs qui constituent une fraude fiscale telle qu’elle est définie par l’article
1741 du CGI
24
. Les fraudeurs dits passifs s’en sont
de facto
rendus tout autant coupables que
les fraudeurs dits « actifs ». Le préjudice causé au Trésor public en termes d’impôts éludés a
été le même que les fraudeurs aient été « actifs » ou « passifs ». Cette analyse aurait pu conduire
à ce que la sanction du manquement à cette obligation soit identique quelle que soit l’origine
des avoirs dissimulés, et que l’éventuelle atténuation de cette sanction en cas de déclaration
spontanée soit homogène dans les deux cas.
Pour autant il peut être considéré que la distinction entre ces deux catégories de fraudeurs
relevait du pouvoir d’appréciation des situations individuelles reconnu à l’administration
fiscale : c’est l’argument que celle-ci fait valoir pour justifier cette approche.
Les règles de traitement retenues reflètent les attentes et priorités de l’administration.
L’homogénéité des règles applicables, quel que soit le volume des avoirs non déclarés, peut
être présentée comme visant à l’égalité de traitement entre contribuables. Toutefois, dans la
mesure où le Trésor public a été d’autant plus lésé que les avoirs dissimulés étaient importants
et donc les impôts éludés élevés, il aurait été concevable d’introduire une sorte d’« échelle des
peines » dans la transaction portant sur les pénalités fiscales en fonction de ce paramètre, avec
des seuils. L’exemption généralisée de poursuites fiscales pourrait aussi être discutée au regard
du même argument : si cette exemption était concevable au titre d’avoirs d’un montant faible,
elle pouvait paraître aller moins de soi dans les cas de dissimulation massive. Cette option n’a
pas été retenue, afin de ne pas minorer l’incitation à déclarer des contribuables détenteurs des
24
Visant tout contribuable qui « s'est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à
l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu'il ait
volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu'il ait volontairement dissimulé une
part des sommes sujettes à l'impôt (…) »
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avoirs les plus conséquents, dont le « rendement » fiscal était le plus important. La distinction
entre fraudeurs actifs et passifs, reprise du mécanisme précédent, a été inspirée par le même
souci : il pouvait être supposé
a priori
, à partir de l’expérience de la cellule de régularisation de
2009, que les fraudeurs « passifs » seraient les plus enclins à venir à la régularisation que les
fraudeurs « volontaires » et qu’il pouvait être utile, pour pousser les fraudeurs passifs à
régulariser, de leur offrir une incitation supplémentaire
25
. Le succès rencontré par la procédure
et les résultats budgétaires du STDR ont prouvé que, mesurées à l’aune des recettes fiscales,
indépendamment d’autres considérations, ces choix ont eu l’effet recherché.
C -
L’application pratique
Le régime des sanctions et leurs modalités d’aménagement, moins favorable que celui
retenu pour la « cellule Woerth » (les différences sont détaillées dans l’annexe n° 3) a toutefois
varié dans le temps depuis la création du STDR.
1 -
La reconstitution et le paiement des impôts dus
Les impositions sont établies dans les conditions de droit commun et doivent être
calculées en faisant application de l’ensemble des dispositions fiscales en vigueur au titre de
chacune des années concernées.
Elles sont dues dans la limite de la prescription fiscale à la date de dépôt de la déclaration
rectificative en application des dispositions de droit commun du Livre des procédures fiscales
(LPF), avec application de la prescription allongée à l'impôt sur le revenu et à l'impôt de
solidarité sur la fortune en raison du délai spécial de reprise (cf. encadré) applicable aux avoirs
détenus à l'étranger non déclarés, porté à dix années en application de l’article L 169 du LPF
(en matière d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux) et de l’article L 181-0 A du LPF
(en matière d’ISF et de droits d’enregistrement).
26
Le délai spécial de reprise
-
Impôt sur le revenu
En matière d’impôt sur le revenu, la loi n°2008-1443 de finances rectificative du 30 décembre
2008 a porté de trois à dix ans le délai de reprise de l’administration lorsque les revenus proviennent
de comptes bancaires ou de contrats d’assurance vie non déclarés et situés dans des États non
coopératifs. Ce délai de dix ans ne s’applique qu’aux revenus pour lesquels la prescription n’était pas
acquise au 31 décembre 2008, donc la reprise remonte au plus tôt aux revenus de l’année 2006 (les
revenus de l’année 2005 ont bénéficié de la prescription au 31 décembre 2008 en vertu de la règle de
prescription triennale en matière d’impôt sur le revenu).
25
En sens inverse, dans la mesure où les déclarants « passifs » ont été plus nombreux que les déclarants « actifs »,
le traitement plus favorable des premiers a conduit à minorer les recettes fiscales.
26
La durée de ces prescriptions est donc supérieure à celle des prescriptions d’assiette de droit commun qui varient
selon l’impôt : six ans pour les droits d’enregistrement et l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), trois ans pour
l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, la TVA et la contribution économique territoriale (CET).
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La loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 (LFR4 2011) a
étendu le principe de la reprise sur dix ans aux revenus provenant de trusts détenus à l’étranger (dont
l’obligation de déclaration a été instaurée par la LFR1 2011), n’ayant pas été déclarés. Ce droit de
reprise s'exerce à compter de l'imposition due au titre de l'année 2011.
Cette même loi a également étendu l’application du délai de reprise de dix ans aux revenus
issus d’avoirs détenus dans des États coopératifs (États qui ont conclu avec la France au 1
er
janvier
2009 une convention fiscale permettant l'accès aux renseignements bancaires). Cette extension du
délai de reprise ne permet pas de remonter au-delà des revenus de l’année 2009 (les revenus de l’année
2008 bénéficiant de la prescription triennale au 31 décembre 2011).
Toutefois, pour les seuls comptes bancaires, l’extension du délai de reprise ne s'applique pas
lorsque le contribuable apporte la preuve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l'étranger
est inférieur à 50 000 € au 31 décembre de l'année au titre de laquelle la déclaration devait être faite.
Dans ce cas, la prescription triennale de droit commun en matière d’impôt sur le revenu s’applique.
Le tableau de la page suivante présente, en cas de non-déclaration de comptes bancaires
(obligation de l’article 1649A du CGI) ou de contrats d’assurance-vie (obligation de l’article 1649AA
du CGI), la première année de reprise des droits en matière d’impôt sur le revenu en fonction de
l’année de réalisation de la régularisation.
-
ISF et droits de mutation
En matière d’impôt de solidarité sur la fortune et de droits de mutation à titre gratuit, la loi
n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 a prévu un droit de reprise de
dix ans lorsque les comptes bancaires, contrats d’assurance vie ou trusts détenus à l’étranger n’ont
pas été déclarés.
L’entrée en vigueur de cette loi n’a pas remis en cause les prescriptions acquises au
31 décembre 2012. Or, la règle antérieure étant celle de la prescription sexennale (article L. 186 du
LPF, délai de reprise par défaut en matière d’impôt), l’ISF était à cette date prescrit jusqu’à l’année
2006 incluse. De même, les droits de mutation étaient prescrits pour les décès intervenus jusqu’au
31 décembre 2006. Il n’est donc pas possible de remonter au-delà de l’année 2007.
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40
Tableau n° 1 :
première année sur laquelle peut s’exercer le droit de reprise en matière
d’impôt sur le revenu en fonction de l’année de réalisation de la régularisation
Année de réalisation de la régularisation
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
L’obligation
déclarative non
respectée
concerne un État
n’ayant pas
conclu
avec la
France une
convention
d’assistance
administrative
permettant
l’accès aux
renseignements
bancaires
2006
(3 ans)
2006
(4 ans)
2006
(5 ans)
2006
(6 ans)
2006
(7 ans)
2006
(8 ans)
2006
(9 ans)
2006
(10ans)
2007
(10ans)
2008
(10ans)
2009
(10ans)
2010
(10ans)
L’obligation
déclarative non
respectée
concerne un État
ayant conclu
avec la France
une convention
d’assistance
administrative
permettant
l’accès aux
renseignements
bancaires
2006
(3 ans)
2007
(3 ans)
2008
(3 ans)
2009
(3 ans)
2009
(4 ans)
2009
(5 ans)
2009
(6 ans)
2009
(7 ans)
2009
(8 ans)
2009
(9 ans)
2009
(10 ans)
2010
(10 ans)
L’obligation
déclarative non
respectée
concerne un État
n’ayant pas
conclu
avec la
France une
convention
d’assistance
administrative
permettant
l’accès aux
renseignements
bancaires
2006
(3 ans)
2006
(4 ans)
2006
(5 ans)
2006
(6 ans)
2006
(7 ans)
2006
(8 ans)
2012
(3 ans)
2013
(3 ans)
2014
(3 ans)
2015
(3 ans)
2016
(3 ans)
2017
(3 ans)
L’obligation
déclarative non
respectée
concerne un État
ayant conclu
avec la France
une convention
d’assistance
administrative
permettant
l’accès aux
renseignements
bancaires
2006
(3 ans)
2007
(3 ans)
2008
(3 ans)
2009
(3 ans)
2010
(3 ans)
2011
(3 ans)
2012
(3 ans)
2013
(3 ans)
2014
(3 ans)
2015
(3 ans)
2016
(3 ans)
2017
(3 ans)
Source : BOFIP - BOI-ANNX-000468-20150915
ANNEXE - CF - Modalités d'exercice du droit de reprise applicables en cas de manquement aux obligations déclaratives
prévues à l'article 123 bis du CGI, l'article 209 B du CGI, l'article 1649 A du CGI et l'article 1649 AA du CGI
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41
Dans le calcul des impôts dus, les conséquences financières de la détention d’avoirs à
l’étranger sont prises en compte en plus et en moins. Ainsi au titre de l’IR, il est fait masse des
plus et moins-values françaises et étrangères et les moins-values sont imputables pendant dix
ans ; des contribuables peuvent parfois avoir un intérêt financier à faire une déclaration
rectificative par exemple s’ils ont subi des moins-values importantes à la suite de la crise
financière de 2008. Le coût de la régularisation vient en déduction de l’actif taxable à l’ISF.
Le cas des successions et donations
Lorsque les avoirs détenus à l’étranger proviennent d’une succession ou d’une donation
antérieure à 2007, aucune imposition n'est due au titre des droits de mutation à titre gratuit, en
raison de la prescription.
En cas de transferts d’actifs du compte non déclaré d’une personne décédée après 2007
au profit des héritiers, les droits de succession sont dus. Il y a lieu de procéder également à la
régularisation au titre de l’IR et de l’ISF de la situation du défunt pour la période antérieure au
décès et celles des héritiers pour la période postérieure.
Si l’examen des mouvements sur le compte régularisé fait apparaitre après 2007 des
retraits importants et que les bénéficiaires sont identifiés, ils doivent alors déclarer un don
manuel et payer les droits correspondants, mais sans pénalité ni intérêts de retard. À défaut de
bénéficiaires identifiés, les retraits doivent être intégrés aux déclarations rectificatives d’ISF du
titulaire du compte.
Pour les différents impôts susmentionnés, sont également exigibles les intérêts de retard,
dus jusqu’à la date du dépôt de la déclaration rectificative, intégralement décomptés au taux
légal prévu à l’article 1727 du CGI, sans plafonnement. Ils ne peuvent faire l’objet d’aucune
amodiation.
2 -
Les aménagements des pénalités dans le cadre transactionnel
Outre le paiement des impôts dus et des intérêts de retard, un contribuable qui régularise
des avoirs détenus à l’étranger
27
se voit infliger deux types de sanctions :
-
des majorations qui s’appliquent aux rappels d’impôts ;
-
des amendes qui sanctionnent l’absence de déclaration des avoirs à l’administration fiscale.
Les majorations d’impôts et les amendes fiscales sont aménagées dans le cadre
« transactionnel » qui permet aux contribuables d’acquitter des pénalités inférieures à celles de
droit commun.
27
Dans le cas où la démarche de régularisation est effectuée par les héritiers au nom du défunt, les droits
supplémentaires mis à la charge des héritiers, à l’exception des droits de succession, sont assortis des seuls intérêts
de retard. En revanche, les pénalités s’appliquent aux impositions supplémentaires dus par les héritiers au titre de
leur propre situation fiscale (période postérieure au décès).
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42
a)
Le droit commun
La circulaire du 21 juin 2013 a rappelé les dispositions de droit commun qui s’appliquent
en matière de majorations et d’amendes.
Les majorations des droits
La non-déclaration d’avoirs détenus à l’étranger et des revenus issus de ces avoirs étant
considérée comme un manquement délibéré, c’est la majoration de 40 % prévue par l’article
1729 du CGI
28
qui s’applique en principe aux impôts régularisés via le STDR
29
. Toutefois, pour
un primo-déclarant (essentiellement à l’ISF), il n’y a pas manquement délibéré mais défaut de
production d’une déclaration : le taux de la majoration est dans ce cas de 10 % (article 1728 du
CGI). La loi du 6 décembre 2013 a porté ce taux à 40 % pour les primo-déclarants, à partir de
l’ISF dû au titre de 2014, «
lorsque le dépôt fait suite à la révélation d'avoirs à l'étranger qui
n'ont pas fait l'objet des obligations déclaratives prévues aux articles 1649 A [comptes
bancaires], 1649 AA [assurance-vie] et 1649 AB [trusts]
».
Les amendes pour non-déclaration des avoirs
Le code général des impôts prévoit trois amendes différentes en cas de non-déclaration
d’un avoir à l’étranger, qui concernent respectivement les comptes bancaires (article 1736 IV),
les contrats d’assurance-vie (article 1766) et les trusts (article 1736 IV bis).
Ces amendes s’appliquent à chaque manquement déclaratif (c’est-à-dire pour chaque
compte non déclaré et pour chaque année), en cas de détention directe et en cas de détention
indirecte du compte (c’est-à-dire notamment pour les personnes dotées de procuration), dans la
limite de la prescription de l’article L. 188 alinéa 2 du LPF
30
: la prescription est atteinte à la
fin de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle les infractions ont été commises.
Les traitements par le STDR commençant au plus tôt en 2013, les amendes ne peuvent
s’appliquer qu’aux exercices 2009 et suivants, selon les dispositions en vigueur chaque année.
Si les trois amendes sont comparables dans leur principe, elles ont évolué dans le temps
selon des calendriers différents.
28
Article L.1729, tel que modifié par la loi n°2008-1443 du 30 décembre 2008 - art. 35 (V) : « Les inexactitudes
ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette
ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment
obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de :
a. 40 % en cas de manquement délibéré ;
b. 80 % en cas d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 %
lorsqu'il n'est pas établi que le contribuable a eu l'initiative principale du ou des actes constitutifs de l'abus de droit
ou en a été le principal bénéficiaire ;
c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en
cas d'application de l'article 792 bis. »
29
80 % en cas de découverte d’activité occulte
30
Article L188 : « Le délai de prescription applicable aux amendes fiscales concernant l'assiette et le paiement des
droits, taxes, redevances et autres impositions est le même que celui qui s'applique aux droits simples et
majorations correspondants.
Pour les autres amendes fiscales, la prescription est atteinte à la fin de la quatrième année suivant celle au cours
de laquelle les infractions ont été commises ».
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
43
L’amende pour non-déclaration d’un compte bancaire, prévue à l’article 1736 IV du CGI,
était en 2009 une amende forfaitaire de 1 500 € si le compte est détenu dans un État ou territoire
coopératif, ou de 10 000 € s’il s’agit d’un État ou territoire non coopératif. La loi 2012-354 de
finances rectificative du 14 mars 2012 a modifié la barème de l’amende en la rendant
proportionnelle lorsque le solde du compte dépasse un seuil : «
Si le total des soldes créditeurs
du ou des comptes à l’étranger non déclarés est égal ou supérieur à 50 000 € au 31 décembre
de l’année au titre de laquelle la déclaration devait être faite, l’amende par compte non déclaré
est égale à 5 % du solde créditeur de ce même compte, sans pouvoir être inférieure aux
montants [des deux amendes fixes de 1 500 € et 10 000 €]
».
En pratique, l’amende devient proportionnelle lorsque le solde du compte dépasse
50 000 € dans le cas d’un compte détenu dans un État coopératif, et 200 000 € si le compte est
détenu dans un État non coopératif
31
. Ce nouveau barème de l’amende, forfaitaire ou
proportionnelle, est entré en vigueur à compter du 16 mars 2012.
Graphique n° 1 :
montant de l’amende de droit commun en fonction du solde du compte
bancaire et du lieu de détention (État coopératif ou non coopératif)
État coopératif
État non coopératif
Source : Cour des comptes
Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une QPC relative à l’application de l’amende
proportionnelle en cas de non-déclaration d’un compte bancaire à l’étranger. Dans sa décision
n°2016-554 QPC du 22 juillet 2016, il a déclaré cette amende non conforme à la Constitution.
Il a considéré que l'application d’une amende proportionnelle, en sanctionnant le manquement
à une obligation déclarative quand bien même les sommes figurant sur ces comptes n'auraient
pas été soustraites frauduleusement à l'impôt, constituait une sanction manifestement
disproportionnée à la gravité des faits que le législateur avait entendu réprimer. À compter du
24 juillet 2016 (date de publication de la décision), seule l’amende forfaitaire, de 1500 € ou
10 000 € suivant l’État dans lequel le compte est détenu, peut être appliquée (y compris en cas
de régularisation sur des années antérieures à la décision du Conseil).
31
Le montant forfaitaire de 10 000 € reste supérieur à 5 % du solde du compte tant que ce dernier est inférieur à
200 000 €.
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000
20 000
0
50 000 100 000 150 000 200 000 250 000 300 000 350 000
400
barème forfaitaire (1 500 €)
barème proportionnel (5 % des avoirs)
montant de l'amende
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000
20 000
0
50 000 100 000 150 000 200 000 250 000 300 000 350 000
400
barème forfaitaire (10 000 €)
barème proportionnel (5 % des avoirs)
montant de l'amende
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44
S’agissant des contrats d’assurance-vie, l’amende pour non-déclaration prévue à l’article
1766 du CGI était en 2009 exclusivement forfaitaire, de 1 500 € quel que soit l’État de détention
du contrat. La loi 2012-354 de finances rectificative du 14 mars 2012 (LFR1 2012) a d’une part
augmenté le montant de l’amende à 10 000 € lorsque le contrat est détenu dans État non
coopératif et d’autre part, dans les mêmes conditions que pour les comptes bancaires, rendu
l’amende proportionnelle lorsque le solde du contrat dépasse un certain seuil. Ces nouvelles
dispositions ont été applicables à compter des déclarations au titre de l’année 2013. Comme
pour les comptes bancaires en 2016, le Conseil constitutionnel a été saisi en 2017 d’une QPC
sur la composante proportionnelle de l’amende sur les contrats d’assurance-vie. Il n’a toutefois
pas encore rendu sa décision.
Enfin, en ce qui concerne les trusts, la loi 2011-900 du 29 juillet 2011 (LFR1 pour 2011)
a institué une obligation de déclarer la valeur vénale des actifs détenus via de telles structures
au 1
er
janvier de chaque année. La même loi a instauré, en cas de non-déclaration, une amende
de 10 000 € ou, s'il est plus élevé, d'un montant égal à 5 % des biens ou droits placés dans le
trust ainsi que des produits qui y sont capitalisés. Ces dispositions sont entrées en vigueur le
31 juillet 2011, l’amende étant susceptible d’être prononcée pour la première fois en cas de non
déclaration des actifs au 1
er
janvier 2012. La loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 a porté, à
compter du 8 décembre 2013 le montant de l’amende fixe à 20 000 € et le taux de l’amende
proportionnelle à 12,5 %.
Comme pour les comptes bancaires, le Conseil constitutionnel, saisi d’une QPC, a
censuré la composante proportionnelle de l’amende pour les trusts, dans une décision du
16 mars 2017. À compter du 17 mars 2017, seule l’amende forfaitaire peut donc être appliquée
(y compris en cas de régularisation sur des années antérieures à la décision du Conseil)
32
.
Consécutivement à la première décision du Conseil constitutionnel, le barème des
sanctions applicables a été modifié en profondeur par la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016
de finances rectificative pour 2016, qui a supprimé la composante proportionnelle des amendes
mais augmenté le taux de la majoration qui s’applique aux rappels d’impôt (cf. encadré). Ces
nouvelles dispositions ne s’appliquent toutefois qu’à compter du 1
er
janvier 2017, donc
uniquement aux déclarations sur l’IR 2016 déposées mi-2017, aux déclarations d’ISF 2017
déposées en juin 2017 et aux déclarations postérieures. En cas de non-déclarations lors
d’exercices antérieurs à 2017, c’est toujours le barème de sanctions en vigueur avant la LFR
2016 (hors amende proportionnelle) qui s’applique.
32
Depuis une autre décision du Conseil constitutionnel du 1
er
mars 2017 (QPC 2016-614), tout contribuable est
désormais admis à démontrer que la constitution d’une telle structure n’était pas constitutive d’un montage
artificiel visant à contourner la législation fiscale française pour échapper à l’imposition des revenus présumés
distribués, faculté qui était jusqu’alors réservée aux personnes détentrices de participations dans des entités situées
dans un État de l’UE. De cette même décision, il ressort que le contribuable pourra échapper à l’application du
revenu forfaitaire s’il apporte la preuve que le revenu réellement perçu par l’intermédiaire de la structure interposée
y est inférieur. La décision du Conseil constitutionnel sera sur le premier point sans conséquence pour les
régularisations car ces sociétés ont, dans la majorité des cas, été constituées pour échapper à l’impôt, sauf peut-
être dans des cas limités où elles ont également pour objet de répartir un actif successoral. En revanche, sur le
deuxième point, les contribuables qui régularisent des revenus provenant d’une structure interposée pourraient être
imposés sur leurs revenus réels, ce qui pourra réduire sensiblement le coût de la procédure.
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45
La révision des sanctions prévue par la LFR 2016
Le Conseil constitutionnel a répondu initialement, en juillet 2016, à une QPC portant sur les
seules amendes proportionnelles relatives aux comptes bancaires. Cependant il est apparu
vraisemblable que s’il avait à se prononcer sur la question de l’amende proportionnelle portant sur
les trusts comme sur les contrats d’assurance-vie, il se prononcerait dans le même sens. Le
gouvernement a donc décidé de régler ce problème par la voie législative.
La loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 (art. 110) a
supprimé les amendes proportionnelles prévues par les articles 1766 (contrats d’assurance-vie) et
1736 VI bis (trusts). S’agissant des comptes bancaires, que la LFR 2016 n’évoque pas, le décret
n° 2017-698 du 2 mai 2017 «
portant incorporation au code général des impôts de divers textes
modifiant et complétant certaines dispositions de ce code
» a supprimé l’alinéa de l’article 1736 relatif
à l’amende proportionnelle sur les comptes en banque. Pour tous les types d’avoirs, les amendes ont
donc désormais une valeur forfaitaire
33
quel que soit le montant de l’avoir détenu à l’étranger.
En contrepartie de la suppression des amendes proportionnelles, la loi du 29 décembre 2016 a
introduit dans le CGI un nouvel article 1729-0 A
34
qui instaure, à compter du 1
er
janvier 2017, un
régime unique de majoration de 80 % de tous les rappels d’impôts (impôt sur le revenu, impôt de
solidarité sur la fortune ou droits de mutations à titre gratuit)
35
lorsque ces droits résultent de la
régularisation d’avoirs détenus à l’étranger (comptes bancaires, contrats d’assurance-vie, trusts).
Cette majoration est alors exclusive de toute autre majoration (majoration de 40 % pour manquement
délibéré, article 1729 du CGI, et majoration de 10 % ou 40 % pour défaut de déclaration, article 1728
du CGI). L’application de la majoration de 80 % des droits exclut également l’application de l'amende
forfaitaire pour non-déclaration des avoirs, mais elle ne peut pas lui être inférieure.
33
Pour les comptes bancaires et les contrats d’assurance-vie, 1 500 € dans un État coopératif et 10 000 € dans un
État non coopératif ; pour un trust, 20 000 € dans tous les cas.
34
Article 1729-0 A.
I. - Une majoration de 80 % s'applique aux droits dus en cas de rectification du fait :
a) Des sommes figurant ou ayant figuré sur un ou plusieurs comptes qui auraient dû être déclarés en application
du deuxième alinéa de l'article 1649 A.
Le montant de cette majoration ne peut être inférieur au montant de l'amende prévue au 2 du IV de l'article 1736 ;
b) Des sommes figurant ou ayant figuré sur un ou plusieurs contrats de capitalisation ou placement de même nature
qui auraient dû être déclarés en application de l'article 1649 AA.
Le montant de cette majoration ne peut être inférieur au montant de l'amende prévue à l'article 1766 ;
c) Des biens, droits ou produits mentionnés aux 1° et 2° du III de l'article 990 J qui auraient dû être déclarés en
application de l'article 1649 AB.
Le montant de cette majoration ne peut être inférieur au montant de l'amende prévue au IV bis de l'article 1736.
II. - L'application de la majoration prévue au I exclut celle des majorations prévues aux articles 1728,1729 et 1758
à raison des mêmes droits, ainsi que l'application des amendes prévues au 2 du IV ou au IV bis de l'article 1736
ou à l'article 1766.
III. - La majoration prévue au I ne s'applique pas aux droits dus en application de l'article 755.
35
La majoration ainsi prévue s'applique à tous les rappels d'impôts, à l'exclusion de ceux résultant de la mise en
oeuvre de l'article 755 du CGI qui prévoit de retenir le taux le plus élevé du barème des droits de mutation à titre
gratuit (60 %) en cas d'absence de réponse aux demandes d'informations ou de justifications de l'administration.
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46
L’amende forfaitaire pour non-déclaration d’un avoir s’applique désormais uniquement lorsque
les revenus et les valeurs des avoirs ont été pris en compte dans les déclarations relatives aux différents
impôts (IR, ISF, etc.). Dans ce cas, puisque les impôts ont été acquittés, la régularisation des avoirs
n’entraîne pas de rappels d’impôts et la majoration des droits (prévue par le nouvel article 1729-0 A
du CGI) ne trouve pas à s’appliquer. En revanche, dès lors que l’obligation de déclaration des avoirs
n’a pas été respectée, les amendes prévues en cas de non-déclaration s’appliquent (IV et IV bis de
l’article 1736, article 1766).
36
b)
La modulation des pénalités dans le cadre de la transaction :
un régime qui a évolué au cours du temps
Le barème transactionnel prévu par les circulaires relatives au STDR est le même pour
tous les déclarants, les seules modulations autorisées dépendant de la décision de
l’administration de considérer le contribuable comme un fraudeur « actif » ou « passif »
(cf.
supra
). Les sommes restant dues (en sus de celles payées au moment du dépôt de la
déclaration rectificative) doivent être réglées au moment de la signature de la transaction.
Le régime initial des amendes dans la procédure de transaction
En vertu de la première circulaire du 21 juin 2013, dans le cadre de la procédure de
transaction, le taux de la majoration des droits (pour manquement délibéré) est ramené de 40 %
à 15 % pour les fraudeurs passifs et à 30 % pour les fraudeurs actifs. La majoration de 10 %
pour les primo-déclarants à l’ISF (qui s’applique jusqu’à l’année 2013) ne fait l’objet d’aucune
remise.
Les amendes sont, quant à elles, soumises à un plafonnement. Pour un fraudeur passif,
l’amende ne peut pas dépasser 1,5 % du solde créditeur des avoirs au 31 décembre de l’année
concernée. Pour des fraudeurs actifs, cette proportion est de 3 %. Ces plafonds étant toujours,
quel que soit le montant des avoirs, inférieurs à l’amende de droit commun, ils déterminent le
montant de l’amende après transaction, qui est donc proportionnelle aux avoirs (au taux de
1,5 % ou de 3 % suivant la qualification du contribuable) et identique que les avoirs soient
détenus dans un État coopératif ou non.
36
C’est certes une application stricte du droit qui prévoit une sanction séparée pour la simple non déclaration de
l’existence d’un compte y compris en cas de déclaration aux impôts dus au titre de cet avoir. Il est toutefois loisible
de se demander dans quelle mesure les contribuables se trouvant dans cette situation peuvent véritablement être
qualifiés de fraudeurs puisqu’ils n’ont pas cherché à éluder l’impôt mais ont simplement méconnu une obligation
dont ils n’avaient pas conscience, sans but délictueux.
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47
Graphique n° 2 :
montant de l’amende après transaction en fonction du solde du compte
bancaire et du lieu de détention (État coopératif ou non coopératif)
État coopératif
État non coopératif
Source : Cour des comptes
Le barème initial de transaction a été légèrement modifié dans une nouvelle circulaire
publiée le 12 décembre 2013, afin de tenir compte de deux modifications apportées par la loi
n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 :
-
d’une part, le taux de la majoration appliquée aux primo-déclarants à l’ISF a été portée de
10 % à 40 % à compter de l’impôt dû au titre de l’année 2014 : la transaction prévue dans
la nouvelle circulaire ramène le taux de cette majoration à 15 % pour un fraudeur passif et
30 % pour un fraudeur actif (comme dans le cas de la majoration de 40 % pour manquement
délibéré) ;
-
d’autre part, la loi de décembre 2013 a porté le taux de l’amende proportionnelle sur les
trusts de 5 % à 12,5 % : selon le barème de transaction de la nouvelle circulaire, l’amende
sur les trusts est plafonnée à 3,75 % des avoirs pour un fraudeur passif et 7,5 % pour un
fraudeur actif. Comme précédemment, le plafond est systématiquement inférieur au
montant de l’amende de droit commun et conduit l’amende après transaction à être
proportionnelle aux avoirs, et identique que les avoirs soient détenus dans un État coopératif
ou non. Le barème de transaction était donc le suivant fin 2013 :
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000
20 000
0
50 000
100 000 150 000 200 000 250 000 300 000 350 000 400 000
amende de droit commun
Amende STDR fraudeur passif
Amende STDR fraudeur actif
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000
20 000
0
50 000
100 000 150 000 200 000 250 000 300 000 350 000 400 000
amende de droit commun
Amende STDR fraudeur passif
Amende STDR fraudeur actif
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48
Tableau n° 2 :
régime de pénalités au moment de la création du STDR
(1) pour les défauts déclaratifs à l’ISF dû à compter de l’année 2014.
Source : circulaire du 12 décembre 2013
Le régime de transaction consécutif à la déclaration d’inconstitutionnalité de l’amende
proportionnelle : la circulaire du 14 septembre 2016
La décision du Conseil constitutionnel n°2016-554 QPC du 22 juillet 2016, qui a censuré
l'amende proportionnelle relative aux comptes bancaires, a pris effet à compter du 24 juillet
2016, date de la publication de la décision. Le Conseil a décidé que sa décision était applicable
aux amendes prononcées antérieurement qui n’avaient pas donné lieu à un jugement devenu
définitif ou pour lesquelles une réclamation pouvait encore être formée. Elle s’appliquait donc
aux dossiers de régularisation en cours de traitement par le STDR pour lesquels le contribuable
n’avait pas encore signé la transaction à cette date, et
a fortiori
aux dossiers qui seraient déposés
ultérieurement. Les transactions déjà signées par les contribuables n’étaient en revanche pas
susceptibles d’être remises en cause.
Dans un premier temps, l’administration centrale de la DGFiP a envoyé un courriel
demandant aux services de surseoir à statuer sur les dossiers en cours d’examen et d’attendre la
circulaire devant fixer un nouveau barème de transaction. Cette circulaire, publiée le
14 septembre 2016, a tenu compte de la suppression de l’amende proportionnelle portant sur
les comptes bancaires non déclarés, seule censurée par le Conseil constitutionnel. Celui-ci ne
s’étant pas explicitement prononcé sur les amendes proportionnelles applicables respectivement
aux contrats d’assurance vie et aux trusts non déclarés, dont il n’avait pas été saisi à l’époque,
ces dernières ont en revanche été maintenues. En contrepartie de la suppression de l’amende
proportionnelle sur les comptes bancaires, le barème des majorations appliquées aux rappels
d’impôts a été révisé à la hausse : la majoration de 40 % (pour manquement délibéré ou défaut
de déclaration d’ISF) est ramenée à 25 % (au lieu de 15 %) pour les contribuables « passifs »
et à 35 % (au lieu de 30 %) pour les contribuables « actifs ».
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49
Tableau n° 3 :
régime de pénalités institué par la circulaire du 14 septembre 2016
(1) pour les défauts déclaratifs à l’ISF dû à compter de l’année 2014.
Source : circulaire du 14 décembre 2016
La suppression de l’amende proportionnelle a réduit l’avantage présenté pour les
contribuables par la solution transactionnelle et a donc réduit dans une certaine mesure
l’attractivité de la procédure de régularisation.
En l’absence de décision du Conseil constitutionnel jusqu’à présent, il est en principe
encore possible d’appliquer l’amende proportionnelle pour sanctionner la non-déclaration d’un
contrat d’assurance-vie jusqu’à l’année 2016. Toutefois, par application du principe
constitutionnel de rétroactivité de la loi pénale plus douce, la nouvelle majoration de 80 %
(Art. 1 729 0 A du CGI) s’applique de plein droit aux manquements constatés sur des périodes
antérieures au 1
er
janvier 2017, en lieu est place de l’amende de 5 %, si cette solution est plus
favorable au contribuable.
Le tableau ci-après décrit le régime des amendes de droit commun et après transaction
pour les années 2009 à 2016.
Taux de la majoration pour
manquement délibéré ou
défaut déclaratif ISF (1)
Amende plafonnée chaque année et pour
chaque manquement déclaratif
Avoirs reçus dans le
cadre d’une succession
ou d’une donation
Avoirs constitués par le
contribuable lorsqu’il ne
résidait pas fiscalement
en France
Autres origines (ex :
avoirs constitués par le
contribuable lorsqu’il
résidait fiscalement en
France)
35%
comptes bancaires
: amende fixe plafonnée
à
3 %
de la valeur des avoirs au 31 décembre
de l'année concernée
contrat d'assurance-vie
: amende fixe ou
proportionnelle plafonnée à
3 %
de la valeur
des avoirs au 31 décembre de l'année
concernée
trust
: amende fixe ou proportionnelle
plafonnée à
7,5 %
de la valeur des biens ou
droits placés dans un trust ainsi que des
produits qui y sont capitalisés
25%
comptes bancaires
: amende fixe plafonnée
à
1,5 %
de la valeur des avoirs au 31
décembre de l'année concernée
contrat d'assurance-vie
: amende fixe ou
proportionnelle plafonnée à
1,5 %
de la
valeur des avoirs au 31 décembre de l'année
concernée
trust
: amende fixe ou proportionnelle
plafonnée à
3,75 %
de la valeur des biens ou
droits placés dans un trust ainsi que des
produits qui y sont capitalisés
Barème appliqué
Origine des avoirs
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50
Tableau n° 4 :
régime des amendes en cas de non-déclaration au titre des années
jusqu’en 2016
Source : Cour des comptes
Les pénalités effectivement appliquées ont donc sensiblement varié dans le temps. Elles
ont été en fait plus élevées pour les contribuables dont les dossiers ont été réglés avant la censure
de l’amende proportionnelle. L’administration estime que la suppression de cette amende a
minoré les recettes du STDR de 200 M€.
Les défauts de déclarations à partir de l’année 2017 seront sanctionnés selon les modalités
prévues par la LFR 2016. Pour ce nouveau régime de sanction, aucun barème transactionnel
n’est actuellement prévu.
D -
Une articulation organisée entre régularisation et contrôle fiscal
Le dépôt d’une déclaration rectificative n’est pas le résultat d’une activité de contrôle
fiscal mais l’expression d’une demande de mise en conformité à l’initiative du contribuable. Le
contribuable ne peut bénéficier de cette procédure que s’il y recourt de manière volontaire et
remplit toutes les conditions mises à ce recours.
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
amende de "droit commun"
amende STDR
amende de "droit commun"
amende STDR
amende STDR
année de non-déclaration de l'avoir
compte
bancaire
contrat
d'assurance-
vie
trust
1500 €ou 10 000 €
1500 € ou 10 000€, 5 % des avoirs si > 50 000 €
à compter de la publication de la décision du CC (JO du
24/07/16), l'amende proportionnelle ne peut plus être
appliquée si la transaction n'a pas été signée
plafond à 1,5 % (passif) ou 3 % (actif)
1 500 €
1500 € ou 10 000 €, 5 % des avoirs si > 50 000 €
plafond à 1,5 % (passif) ou 3 % (actif)
amende de "droit commun"
plafond à 1,5 % (passif)
ou 3 % (actif)
plafond à 3,75% (passif) ou 7,5 %
(actif)
10000 € ou 5 % des
avoirs si c'est supérieur
20 000 € ou 12,5 % des avoirs si c'est
supérieur
à compter de la publication de la décision du CC (JO du
17/03/17), l'amende proportionnelle ne peut plus être
appliquée si la transaction n'a pas été signée
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
51
1 -
L’inéligibilité à la procédure de régularisation en cas de procédure
administrative en cours
Lorsqu’un contribuable fait l’objet d’une procédure administrative, contrôle fiscal,
examen de situation fiscale personnelle (ESFP)
37
, contrôle relatif aux droits d’enregistrement,
procédure pour manquement à l’obligation déclarative du code des douanes, demande
d'informations d'un service fiscal portant sur les actifs et comptes non déclarés à l’étranger, il
n’est pas admis à déposer de dossier de régularisation. S’il le fait, les pièces transmises sont
renvoyées selon le cas aux brigades de la DNVSF
38
ou aux services des DIRCOFI et DDFIP et
le traitement du cas de ce contribuable continue à relever de la compétence du service à l'origine
du contrôle ou de la demande d'informations. Dans cette situation, les pénalités et amendes pour
non déclaration de ces avoirs ne font
a priori
l'objet d'aucune remise transactionnelle. En outre,
pour les affaires les plus significatives, des poursuites correctionnelles peuvent être engagées.
2 -
L’exclusion d’un contrôle fiscal sur la seule base du dépôt
d’une déclaration rectificative
Même si un contribuable ne fait pas l’objet d’un contrôle ou d’une demande d’information
et est donc éligible à la procédure de régularisation, il pourrait être dissuadé d’entreprendre
cette démarche par la crainte d’« attirer l’attention du fisc » en déposant une déclaration
rectificative et donc de provoquer des contrôles fiscaux. Il était donc nécessaire d’expliciter
l’articulation entre le traitement d’une déclaration par le STDR et les contrôles fiscaux sur
pièces et externes susceptibles de viser le déclarant.
L’existence de la procédure suivie par le STDR ne fait évidemment pas obstacle à la
poursuite de l’activité normale des services chargés du contrôle fiscal. La démarche de
régularisation de la part d'un contribuable ne doit pas avoir pour effet d'exclure tout contrôle à
l'encontre de celui-ci, dès lors que le motif de l'engagement du contrôle ne trouve pas son
origine dans la révélation par le contribuable d'avoirs à l'étranger. En revanche la démarche de
régularisation ne constitue pas en soi un motif d’engagement d’un contrôle.
Dans cet esprit, l’instruction du service du contrôle fiscal du 31 juillet 2013
39
a disposé
que le contrôle des dossiers des contribuables ayant procédé à une régularisation de leur
situation devait veiller à respecter un équilibre entre :
37
Sont concernés non seulement les contribuables faisant l’objet d’un ESFP en cours, mais aussi ceux ayant fait
l’objet d’un ESFP achevé portant sur des années non antérieures à 2007. En effet, l’administration considère que
ces contribuables ne peuvent bénéficier de la circulaire, faute d’avoir déclaré leurs comptes à l’étranger alors qu’il
leur était demandé de déclarer l’ensemble de leurs comptes et que par définition les comptes étrangers sont
présumés n’avoir pas été déclarés à cette occasion.
38
En cas de découverte, en cours de contrôle, de dissimulations de revenus et/ou de patrimoine, par l’intermédiaire
de comptes à l’étranger, et donnant lieu à l’application de pénalités fiscales, le contribuable est alors susceptible
d’être poursuivi pour délit de fraude fiscale sur le fondement de l’article 1741 du CGI. Une plainte au pénal peut
être déposée, après avis favorable de la Commission des infractions fiscales, conformément à l’article L 228 du
Livre des procédures fiscales (LPF). Les poursuites pénales peuvent également porter le cas échéant sur les faits
de blanchiment, d’abus de biens sociaux, etc., connexes de la fraude fiscale.
39
Dispositions rappelées dans la note du service fiscal du 9 juin 2015 concernant la mise en place des pôles
déconcentrés.
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COUR DES COMPTES
52
-
d'une part, l'absence d'utilisation des demandes de régularisation comme un axe de contrôle,
dont l'effet serait de décourager les contribuables de se mettre en conformité ;
-
d'autre part, l'exercice normal, par l'administration fiscale, de son pouvoir de contrôle et de
sa capacité à rectifier les anomalies significatives dont elle pourrait avoir connaissance.
De même il est proscrit de constituer des listes de ces dossiers (avec recherche
multicritères) à des fins de programmation.
Cependant, ces textes sont des documents interne à la DGFiP et n’ont pas fait l’objet de
publication. Ils constituent donc des dispositions d’organisation non opposables à
l’administration, le contribuable éventuellement contrôlé postérieurement au dépôt d’une
demande de régularisation disposant par ailleurs de toutes les voies de recours de droit commun.
Néanmoins, la « foire aux questions » relative à la procédure de régularisation, publiée
aux-questions) précise l'articulation entre le dépôt des déclarations rectificatives et le contrôle
fiscal.
Il y est ainsi mentionné en page 16 que «
La régularisation de vos comptes à l’étranger
dans le cadre de la circulaire ministérielle du 21 juin 2013 et du 14 septembre 2016 ne conduira
pas à un contrôle systématique de votre situation fiscale, par un autre service de
l’administration fiscale, sur des points autres que ceux portant sur les avoirs à l’étranger.
Toutefois, si l’administration fiscale l’estime nécessaire, elle pourra, dans l’exercice de son
pouvoir de contrôle, procéder à un examen de votre dossier fiscal
. » Cette doctrine, publiée,
peut donc être considérée comme opposable.
Au cours de la conférence organisée avec l’IACF le 10 février 2015, l’administration a
précisé aux avocats que lorsqu’un contrôle ISF était engagé postérieurement à la demande de
régularisation, et que le questionnement du service de contrôle portait sur les avoirs régularisés,
il convenait d’informer le service local et lui demander de se rapprocher du STDR pour une
meilleure coordination des opérations.
3 -
Les relations entre les services de contrôle fiscal et le STDR
La circulaire exclut du dispositif de régularisation les dossiers comportant des avoirs
provenant d’une activité illicite ou occulte
40
(le terme de soupçon de blanchiment n’est toutefois
pas cité). Si l’origine des fonds ne peut pas être établie de façon suffisamment probante (fût-ce
à l’aide d’un faisceau de présomptions) le dossier n’est pas admis à la procédure de
régularisation volontaire mais transmis à la DNVSF. Lorsque le motif de transfert est renseigné
dans l’outil de suivi du STDR, 17 cas de renvoi d’attribution sont recensés pour activité occulte
et 43 dossiers visés par une procédure judiciaire préalable à la démarche de régularisation n'ont
pas été traités par le STDR et ont été renvoyés à un service de contrôle.
40
Le fait de percevoir des commissions à l’étranger, deux au minimum, est constitutif d'une activité occulte. La
régularisation est possible uniquement si la dernière commission perçue est antérieure à 2007. En revanche, le fait
pour un chef d’entreprise d’avoir minoré ses recettes et d’en avoir encaissé la fraction non déclarée à l’étranger
n’est pas considéré comme une activité occulte. Dans ce cas, les recettes dissimulées depuis 2007 seront
naturellement imposables.
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53
En cours d’examen de déclarations rectificatives, si les contribuables ne répondent pas ou
incomplètement aux demandes d’information qui leur sont adressées, le dossier ne peut pas être
régularisé et est renvoyé aux services de contrôle fiscal.
Il en va de même en fin d’instruction si le contribuable rejette les conditions de la
régularisation ou refuse de signer la transaction : une vingtaine de cas de ce type ont été
rencontrés à ce jour.
Enfin, si l’examen d’un dossier de régularisation révèle qu’un avoir a plusieurs titulaires
mais que certains d’entre eux n’ont pas fait de déclaration et, une fois informés, persistent à
s’abstenir d’en faire, alors le STDR fait un signalement à la DNVSF.
Les contribuables régularisant spontanément leur situation fiscale à raison d'avoirs à
l'étranger sont identifiables dans l'application Alpage
41
CSP (contrôle sur pièces). En effet, un
dossier « CSP particulier » est ouvert au nom de ces contribuables et la mention « STDR » dans
le cadre « complément motif » permet de les identifier comme effectuant ou ayant effectué une
démarche spontanée de régularisation auprès du STDR ou d'un pôle de régularisation. Les
services de contrôle fiscal en sont donc informés.
Si un service envisage d'engager un contrôle à l'égard d'un contribuable qui régularise sa
situation auprès du STDR ou d'un pôle, il est tenu de prendre l'attache de ces derniers afin de
déterminer, de concert, l'articulation entre la procédure de régularisation et la procédure de
contrôle.
En tout état de cause, l’existence de la procédure gérée par le STDR n’a pas eu pour effet
de réduire les résultats du contrôle fiscal sur les particuliers comme l'indique le tableau en
annexe n° 5. De 2012 à 2016, les résultats financiers de la DNVSF (redressements) sont en nette
augmentation passant ainsi de 580 M€ à 1 Md€ (droits nets et pénalités) sur la période
considérée. Certes, le nombre de dossiers examinés en contrôle fiscal externe (CFE) diminue
sur la période, mais en contrepartie la DNVSF a intensifié le contrôle sur pièces. Enfin, la
médiane des droits en contrôle fiscal externe est en augmentation constante sur la période. De
même, le taux d'opérations conformes et à faible rendement est en nette diminution.
E -
Une information
ex post
du Parlement
L’instauration de la procédure de régularisation, fondée sur l’application du droit fiscal
en vigueur et l’utilisation des prérogatives qu’il confère à l’administration fiscale n’a pas
nécessité de mesure législative pour en définir les principes : seules les modifications des
sanctions de droit commun consécutives aux décisions du Conseil constitutionnel ont dû être
intégrées dans la loi.
Le Parlement est tenu régulièrement informé de l’application et des résultats de ce
dispositif à l’occasion de l’examen des lois de finances et est destinataire chaque année d’un
rapport spécifique sur ce sujet. Le rapport pour 2016 a été publié en avril 2017. Ces rapports
décrivent dans une première partie l’organisation administrative en place, les modalités de
traitement des déclarations rectificatives et la procédure de mise en conformité. Leur seconde
41
ALPAGE Aide logicielle à la programmation, à l’analyse, et à la gestion du CFE.
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partie présente une analyse des demandes de mise en conformité reçues dans l’année (nombre
de dossiers, montant, localisation et origine des avoirs déclaré) ainsi que les résultats de
l’activité du STDR durant l’exercice (volume des dossiers traités, droits et pénalités encaissés).
III -
Un régime uniforme dans ses principes,
des variations dans l’application
L’exécutif et l’administration ont souligné que le dispositif mis en place en juin 2013
n’était en rien dérogatoire aux règles du droit fiscal. De fait, les contribuables doivent s'acquitter
du paiement intégral des impositions éludées et non prescrites dans les conditions de droit
commun calculées par application objective du droit fiscal en vigueur au moment de
l’exigibilité, ainsi que des pénalités et amendes correspondantes, modulables dans les limites
permises dans le cadre d’une transaction dont les principes sont homogènes et transparents. Les
modalités de traitement sont rendues publiques par la mise en ligne des différentes circulaires.
Un rapport annuel est remis au Parlement
42
. Ce dispositif présente donc une amélioration par
rapport au système antérieur (Woerth). Le fait qu’il soit normé facilite le travail des agents du
fisc qui s’inscrit dans le cadre de règles claires ainsi que les relations avec les contribuables.
A -
Des disparités objectives entre contribuables
1 -
Détenteurs d’avoirs à l’étranger et détenteurs d’autres avoirs
La possibilité de régulariser leur situation dans des conditions relativement favorables
constitue une mesure de clémence spécifique à l’endroit des détenteurs d’avoirs non déclarés à
l’étranger dont ne bénéficient pas d’autres contribuables ayant commis des fraudes d’effet
équivalent qui peuvent certes bénéficier d’une transaction mais sans que les termes en soient
connus à l’avance et restent exposés à des poursuites pénales.
2 -
Des effets inégaux entre contribuables venant à la régularisation
Les contribuables souscrivant des déclarations rectificatives n’ont pas eu, de fait, le même
traitement dans le temps en raison de l’évolution du droit. En effet les pénalités applicables ont
varié selon les dates de dépôt des dossiers et de signature des transactions : cet état de fait
résultant de changements législatifs et de décisions du Conseil constitutionnel ne saurait être
imputé à l’administration, d’autant que le régime avait été établi sur la base de dispositions
législatives récentes (2011 pour les trusts et 2012 pour les amendes) et que la jurisprudence du
Conseil constitutionnel dans la période précédant immédiatement la création du STDR avait
admis le principe de sanctions proportionnelles. Il n’en reste pas moins qu’il a objectivement
abouti à une absence d’égalité de traitement sur un court laps de temps.
42
Le dernier en date, sur l’année 2016, en avril 2017
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DES CONDITIONS PROPICES À LA MISE EN PLACE DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION
55
D’autre part, les remises de pénalités, de par leur caractère proportionnel, représentaient
un avantage d’autant plus grand en valeur absolue que les impôts éludés avaient été importants,
et donc le montant des avoirs dissimulés élevé. On peut donc soutenir que les fraudeurs
disposant des avoirs les plus considérables ont tiré un bénéfice supérieur de l’application de ce
dispositif.
B -
Un mécanisme de régularisation qui se différencie
des pratiques étrangères
De manière globale, il n’est pas aisé de comparer la procédure introduite en France en
2013 avec celles qui ont eu cours ou ont encore cours dans d’autres pays, ne serait-ce qu’à cause
des différences dans les systèmes fiscaux.
A priori
les amnisties assorties du paiement d’une
taxe proportionnelle aux capitaux rapatriés sont plus favorables aux contribuables dès lors que
le taux de cette taxe n’est pas trop élevé ; l’inconvénient pour le contribuable est qu’il ne
bénéficie pas alors de la prescription du recouvrement des impôts dus. Sans recourir à
l’amnistie, plusieurs pays ont mis en place des mécanismes de divulgation volontaire assortis
d’une modération des sanctions légales (cf. annexe n° 13). Il peut être relevé que la plupart de
ces mécanismes sont moins avantageux pour les fraudeurs repentis : en Allemagne il n’est
ouvert qu’en deçà d’un seuil de montant de droits éludés, ramené de 50 000 € à 25 000 € en
2014 : la plupart des dossiers déposés au STDR se situent au-delà de ce seuil. L’Espagne n’a
jamais accordé de réduction des pénalités. Les modulations accordées en Italie dans le dispositif
entré en vigueur au 1
er
janvier 2015 sont d’ampleur modeste.
_______________________________ CONCLUSION ______________________________
L’existence d’un régime de sanction des manquements à l’obligation de déclarer les
avoirs détenus à l’étranger n’a, pendant longtemps, pas été suffisamment dissuasive pour
amener les détenteurs d’avoirs dissimulés à les révéler au fisc. Face à ces contournements et
aux difficultés rencontrées pour appréhender les avoirs dissimulés, des États ont mis en place
des mécanismes de régularisation ; une expérience d’incitation à la déclaration volontaire a
été menée en France pendant quelques mois en 2009 (« cellule Woerth ») mais avec des
résultats limités. Dans les années qui ont suivi, les progrès en matière de levée du secret
bancaire et de généralisation des échanges d’information entre pays ont modifié le contexte :
cette évolution tend à rendre la dissimulation d’avoirs de plus en plus compliquée, sauf à les
placer dans des pays politiquement peu sûrs ou à recourir à une ingénierie financière complexe,
qui fait présumer une volonté de fraude délibérée. Les conditions se sont donc trouvées réunies
pour rendre attractive une nouvelle offre de régularisation dont l’instauration a été guidée par
une approche pragmatique.
Le dispositif proposé aux contribuables détenteurs d’avoirs non déclarés repose, d’une
part, sur la dispense a priori de poursuites pénales pour fraude fiscale et des assurances en
matière de contrôle fiscal, d’autre part sur l’atténuation des pénalités (amendes et
majorations), les impôts éludés devant en revanche être réglés avec les intérêts de retard. Ce
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régime est adossé au mécanisme de la transaction fiscale, consacré en droit, mais s’en distingue
sous deux aspects : la transaction a usuellement vocation à traiter un cas individuel en fonction
de ses caractéristiques propres alors que la dispositif mis en oeuvre a consisté à appliquer les
mêmes modalités de règlement à tous les dossiers ; un mécanisme de gestion ad hoc est institué
qui se substitue aux procédures de droit commun prévues par le LPF. Enfin, l’égalité de
traitement entre contribuables, affirmée en principe, n’a pas été toujours vérifiée,
principalement du fait de l’évolution du régime de pénalités. Cette expérience doit inciter, dans
l’hypothèse de création de nouveaux dispositifs de ce type, à procéder dans toute la mesure du
possible à la stabilisation ex ante du cadre juridique applicable.
La procédure de régularisation qui repose sur l’utilisation étendue des pouvoirs de
transaction et d’appréciation dévolus à l’administration fiscale a pu être mise en place par
l’exécutif seul, dans le cadre des lois en vigueur, sans entorse à la régularité. Le Parlement est
tenu régulièrement informé de son application et de ses résultats.
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Chapitre II
Un fonctionnement ordonné,
des recettes budgétaires significatives
La DGFiP a mis en place par étapes les structures et la chaîne de traitement permettant
de faire face à l’afflux des demandes de régularisation.
I -
Un dispositif administratif réactif
A -
Les structures et moyens
1 -
Des structures qui se sont adaptées à l’afflux des demandes
L’objectif retenu depuis le début a été de centraliser le traitement de bout en bout, y
compris le recouvrement, auprès d’un service spécialisé, en évitant la dispersion au sein des
services locaux qui auraient pu ne pas être en mesure de traiter les dossiers de manière
homogène.
a)
Les débuts du STDR
La circulaire du ministre du budget du 21 juin 2013 qui met en place la procédure de
régularisation des avoirs non déclarés détenus à l’étranger indique que les dossiers sont traités
par la Direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF) qui assure un
contrôle centralisé des demandes. Ce choix s’est imposé de lui-même car cette direction chargée
du contrôle des particuliers à forts enjeux dispose d'une solide expertise en la matière. La
DNVSF a assuré la réception des déclarations du 21 juin au 1
er
septembre 2013 puis un service
spécialisé, le STDR, créé en son sein le 1
er
juillet 2013, a pris le relais.
La création d'un service spécialisé au sein d'une direction de contrôle a répondu à des
objectifs d'efficacité mais aussi de transparence. La spécialisation du STDR permet aussi de
suivre précisément son activité et ses résultats.
Pour autant, le STDR n'est pas un service de contrôle. Sa mission consiste à traiter en
masse les dossiers déposés par les contribuables qui souhaitent mettre leur situation en
conformité avec la loi.
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Le STDR a été constitué initialement d’une seule structure à Paris, (17, place de
l'Argonne) avec à l’origine avec 1 AFIPA (administrateur des finances publiques), 1 IDIV
(inspecteur divisionnaire), et une dizaine d’inspecteurs arrivés jusqu’en septembre 2013, les
agents étant mis à disposition par la DNVSF et les locaux par la DRFIP d’Île-de-France.
Le traitement des déclarations rectificatives a fait l’objet d’un rapport d’audit
(n° 2014-18 de juillet 2014) de la mission risques et audits, mandatée par le DGFiP (lettre de
mission du 28 mai 2014), dont la finalité était d’identifier les moyens d’accélérer le traitement
des dossiers sans fragiliser la différence de traitement entre fraudeurs actifs et passifs. Au
26 juin 2014, 16 000 lettres d’intention et 7 000 déclarations rectificatives avaient été reçues,
l’effectif atteignant 40 personnes. Différents problèmes ont été identifiés par cet audit :
-
le secrétariat n’arrivait pas à gérer les flux entrants : 2702 lettres d’intention et 505
déclarations n’étaient pas encore enregistrées au 26 juin 2014 ;
-
le délai d’instruction était élevé : le ratio des dossiers traités aux dossiers enregistrés n’était
que de 20 %, avec une augmentation continue des dossiers à traiter ;
-
les outils de pilotage et de suivi étaient inadaptés et insuffisants (au départ, un simple fichier
Excel) et ne garantissaient pas l’intégrité et la sécurité des données.
Les pistes identifiées étaient l’amélioration de l’enregistrement des dossiers, une plus
grande formalisation de l’instruction, avec déconcentration d’une partie des dossiers (en
dessous d’un seuil à fixer) auprès du réseau, une sécurisation de la gestion et du suivi des flux
Le STDR est progressivement monté en puissance. En septembre 2014, il comptait
2 AFIPA, 5 IDIV, 63 inspecteurs, 8 personnels de secrétariat, le secrétariat avait été réorganisé
en deux pôles (flux entrants : enregistrement) et flux sortants (transmission au PRS, archivage,
scannage). Ces effectifs ont été ensuite stabilisés puis réduits au fur et à mesure de la mise en
place des pôles déconcentrés. Au 31 décembre 2016, le STDR était composé de 6 cadres
supérieurs, 33 inspecteurs et 5 agents administratifs, soit 44 agents au total.
b)
La création des pôles déconcentrés
Officieusement, l’administration fiscale avait tablé sur le dépôt d’une dizaine de milliers
de dossiers. Cette prévision a été vite dépassée. Au cours de l’année 2014 et au début de l’année
2015, les délais de traitement des demandes par le STDR ont tendu à s’allonger compte tenu du
nombre important de dossiers déposés.
Face à l'afflux des demandes de régularisation et compte tenu des enjeux budgétaires, une
nouvelle organisation a été décidée pour accélérer les délais de traitement des demandes de
régularisation : sept pôles de régularisation déconcentrés (PRD) interdépartementaux ont été
mis en place le 1
er
juin 2015, pour renforcer les équipes du STDR et accélérer le traitement des
demandes :
-
trois pôles localisés en Île-de-France : Paris (compétent sur Paris intra-muros
exclusivement) Saint-Germain-en-Laye (77, 78, 91, 95) et Vanves (92, 93, 94) ;
-
quatre en province : Lyon (Centre et Auvergne-Rhône-Alpes), Marseille (Sud et Sud -Est),
Bordeaux (grand Ouest) et Strasbourg (Nord et Est).
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
59
La création de ces nouveaux pôles a nécessité, au préalable, l'adoption de plusieurs
textes : deux arrêtés basés sur le modèle de l'arrêté du contrôle sur pièces à distance, afin que
les agents des pôles soient compétents pour traiter les dossiers des autres directions ; un décret
et deux arrêtés pour élargir la compétence du PRS
43
.
Ces pôles traitent les dossiers qui relèvent de leur ressort géographique et dont le montant
est inférieur à 600 000 € d’avoirs détenus directement par une seule personne physique.
L'examen des dossiers « complexes » (y compris ceux impliquant des fratries) a continué à
relever du STDR. Compte tenu du montant des avoirs, les pôles traitent davantage de questions
relatives aux droits d’enregistrement qu’à l’ISF.
La création de ces pôles a permis d’apurer le retard au STDR : en août 2015 tous les
dossiers en provenance du STDR y avaient été enregistrés et classés. Elle a été accompagnée
d’une décrue des effectifs (moins 9 vérificateurs en septembre 2015).
En juin 2016, compte tenu à la fois de la poursuite des dépôts de dossiers et des objectifs
de recettes budgétaires fixés au STDR, le dispositif a de nouveau été étoffé.
Trois nouveaux pôles ont été mis en place le 1
er
juin 2016, à Lille, Nantes et Ermont. Ces
trois pôles disposent d’une compétence nationale et traitent des dossiers dont les enjeux ne sont
pas les plus élevés, principalement les petits dossiers liés aux fratries.
Les charges de travail des pôles interrégionaux sont inégales (Lyon est particulièrement
chargé, puis Marseille et Paris, alors que celui de Bordeaux a une activité moindre) : certains
se délestent sur les pôles à compétence nationale (cette solution est jugée préférable au
renforcement des effectifs dans les pôles interrégionaux). Les pôles régionaux vont bientôt se
voir attribuer une compétence nationale (arrêté en attente).
Le format de ces pôles est homogène. Ils sont chacun composés d’une dizaine d’agents
possédant des compétences en matière de fiscalité patrimoniale dirigés par un chef de service
A+. Par exemple le pôle de Paris créé au 1
er
juin 2015 a compté constamment 13 agents depuis
septembre 2015 : outre son responsable, 10 cadres A, inspecteurs, chargés du traitement des
dossiers, un agent B s’occupant de petits dossiers (sans ISF) et un agent C de secrétariat.
Au 31 décembre 2016, les pôles déconcentrés à compétence régionale comptaient
92 agents : 8 cadres supérieurs, 75 inspecteurs traitant les dossiers et 9 agents administratifs. A
la même date, les pôles à compétence nationale comptaient 36 agents : 3 cadres supérieurs,
29 inspecteurs et 4 agents administratifs.
c)
Le pilotage
Le pilotage resserré de l’ensemble du dispositif est assuré en administration centrale par
le service du contrôle fiscal. Il prend notamment la forme de réunions régulières d'un comité de
pilotage (COPIL) rassemblant tous les acteurs.
43
Cf. notamment l’arrêté du 29 mai 2015 fixant la liste des DDFIP pouvant exercer dans le ressort territorial d’une
autre direction, le décret du 3 juin 2015 relatif à l’établissement des avis de mise en recouvrement des impositions
résultant d’actes ou de déclarations liées à la détention d’avoirs à l’étranger non déclarés, l’arrêté du 3 juin 2015
relatif au recouvrement des impositions dues à raison du traitement d’actes ou de déclarations liés à la détention
d’avoirs à l’étranger.
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COUR DES COMPTES
60
Les responsables du STDR ont une grande proximité avec leur hiérarchie de la DNVSF.
Une réunion a lieu tous les quinze jours où peuvent être examinés les dossiers posant problème.
Un site de mutualisation du STDR a été créée sur le site intranet ULYSSE de la DNVSF.
Le STDR anime et supervise les PRD.
Il veille à travers la formation des responsables et agents de PRD à l’uniformité des
méthodes de traitement. Les responsables des PRD ont été formés pendant une semaine au
STDR. Un inspecteur du STDR s’est déplacé dans chaque PRD pendant trois jours pour former
les vérificateurs des PRD. Chaque pôle comporte un inspecteur expert qui assure localement la
formation des inspecteurs du pôle.
Le STDR maintient des liens fonctionnels étroits avec chacun des pôles et reste gardien
de l’orthodoxie des processus mis en oeuvre et de la doctrine appliquée. Le STDR compte
7 inspecteurs référents des pôles. Il existe une liaison informelle entre un agent A+ du STDR
et le responsable A+ du pôle sur les décisions qui posent des problèmes de principe. Une
réunion annuelle des PRD a lieu au STDR (la dernière fin 2016) et les responsables du STDR
assurent une permanence téléphonique auprès des responsables des PRD.
Les outils et les procédures utilisés (informatique, méthode de rédaction des transactions,
procédures de mise en recouvrement, etc.) sont identiques au STDR et dans les pôles
déconcentrés. Les pôles instruisent donc les dossiers exactement de la même façon que le
STDR. Les modalités de paiement des droits et pénalités dus ne sont pas modifiées par cette
nouvelle organisation.
En revanche, le STDR ne pilote pas les pôles en termes d’objectifs (ni en termes de
nombre de dossiers traités ni de recettes). Les résultats sont suivis par le service du contrôle
fiscal.
L’examen de dossiers par les rapporteurs de la Cour au STDR et dans les pôles a montré
que les principes de règlement édictés dans les circulaires étaient bien appliqués de manière
uniforme.
2 -
Des moyens bien calibrés
a)
La gestion des ressources humaines
Le STDR constitue une sorte d’administration de mission, travaillant en « mode projet »
au sein des structures permanentes de la DGFiP. Les règles d’affectation du personnel y sont
plus souples que dans les services déconcentrés classiques de la DGFiP. Des postes ont été
créés en surnombre. Les agents peuvent y être affectés par détachement ou selon les
mouvements. Les personnes travaillant au sein du STDR et des PRD ont été recrutées sur la
base du volontariat suite à appel à candidatures. Les compétences requises étaient de posséder
de bonnes connaissances techniques en fiscalité, particulièrement en fiscalité des revenus et du
patrimoine. La plupart des agents recrutés avaient une expérience du contrôle fiscal (par
exemple au pôle de Paris, la plupart des agents sont originaires de la division fiscale de la
DRFIP de Paris). Il est estimé qu’il faut six mois de pratique à un agent affecté au STDR pour
y être pleinement opérationnel. Les agents perçoivent une prime modeste (inférieure à une
centaine d’euros) ; leur motivation pour venir au STDR n’est donc pas financière mais tient au
caractère même de cette activité et à l’intérêt qu’ils y portent dans leur parcours professionnel.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
61
Au total, fin 2016, le STDR et les pôles employaient 172 personnes, très majoritairement
des cadres A, auxquelles il convient d’ajouter les 18 personnes du PRS spécialisés dans le
recouvrement (cf.
infra
). Cette activité mobilisait donc au total 190 agents de la DGFiP.
Ce dispositif était alors considéré comme stabilisé. Cependant, les agents en poste depuis
deux ou trois ans commençaient à se préoccuper de leur affectation suivante. L’annonce de la
clôture de la procédure et de la fermeture consécutive du STDR doit amener à programmer la
réduction de ses effectifs.
Tableau n° 5 :
effectifs du STDR et des pôles de régularisation déconcentrés
44
2013
2014
2015
2016
STDR
25
62
70
44
Pôles
71
128
Total
25
62
141
172
Source : DGFiP, rapports annuels au Parlement sur l’application de la circulaire du 21 juin 2013
b)
Les outils
Le premier outil de suivi est un outil de publipostage qui génère les pièces de procédure
jusqu’à la proposition de transaction et permet aux vérificateurs de remplir automatiquement
les documents de procédure sans risques et inclut un contrôle de cohérence entre les éléments
du dossier et les éléments envoyés au PRS (fiche 39-50 de mise en recouvrement). Cet outil n’a
pas été développé par les services informatiques de la DGFiP mais par un agent du STDR, à
partir d’un tableur Excel et de documents Word.
Le STDR dispose également d’une base dite RADAR, développée par la Direction des
vérifications nationales et internationales (DVNI). Chaque dossier est enregistré dans cette base
de données, qui fournit son état d’avancement. Cette base recense des informations détaillées
sur chaque dossier, par exemple la catégorie des avoirs ou la banque dans laquelle les comptes
sont détenus. Les informations figurant dans la base RADAR ne permettent toutefois pas de
retrouver les dossiers relevant d’une même fratrie.
Enfin, à l’issue du traitement des dossiers, les pièces principales sont scannées et intégrées
dans une base dénommée GED, créée pour le STDR par le service de documentation nationale
du cadastre (SNDC) : les pièces de procédure, les déclarations rectificatives, les demandes de
renseignements (imprimés n° 751), la proposition de transaction et la transaction, le cas échéant
les déclarations de succession ou de donation. Les services ont ultérieurement accès aux
données scannées. Les éléments contenus dans la base GED sont accessibles aux n° 1 et n° 2
des DDFIP par numéro de dossier, par nom de contribuable, par numéro dans la base alpage du
contrôle fiscal.
44
NB : effectifs constatés (sans retraitement) au 31 décembre de l’année
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62
Les dossiers papier complets sont archivés au moins quinze ans (sur le site de
Saint-Florentin dans l’Yonne) aux fins de contrôle et de réponse aux réquisitions judiciaires.
Les agents du STDR ont également accès aux outils classiques de la DGFiP : le compte
des particuliers, l’application de contrôle du patrimoine, l’application Consfi (conséquences
financières du contrôle).
Un numéro alpage est ouvert dès qu’un dossier est traité par le STDR.
Les données statistiques sont produites par le bureau CF1A à partir de la base RADAR et
des données du PSR.
c)
Le coût du dispositif
Le coût du dispositif consiste presque exclusivement en coûts de personnel (le STDR et
ses pôles sont installés dans des locaux existants de la DGFiP où il existait de la place, les
dotations en matériel sont standards). Il a atteint, en année pleine, 15,3 M€ en 2016, dont 4,6 M€
pour le STDR central, 9,4 M€ pour les pôles déconcentrés et 1,3 M€ pour le PRS. Le détail
pour les années 2013 à 2016 est présenté dans l’annexe n° 14.
B -
Un processus industrialisé de traitement des dossiers
1 -
Le dépôt à l’initiative du contribuable et les paiements spontanés
a)
Le lieu du dépôt
Les dossiers peuvent être déposés auprès de services fiscaux dont dépend le contribuable
(SIP ou SIE de rattachement). Quand un dossier est déposé auprès d’un SIP ou SIE, le SIP ou
SIE réceptionnaire doit transmettre le dossier à la division du contrôle fiscal de sa direction.
Cette dernière se charge d'adresser le dossier de régularisation au pôle de régularisation
compétent ou au STDR si elle identifie que ce dossier relève de sa compétence. Cette
centralisation est destinée à éviter tout risque de traitement parallèle et hétérogène.
b)
Les lettres d’intention
Les délais nécessaires à la constitution d’un dossier complet de mise en conformité
peuvent être longs suivant l’ancienneté des avoirs déclarés ou leur origine, ou lorsque les avoirs
à l’étranger sont détenus indirectement (interposition d’une ou plusieurs structures étrangères).
C’est pourquoi, à la suite de la publication de la circulaire du 21 juin 2013, la plupart des
contribuables ont révélé au STDR la détention d’avoirs à l’étranger, préalablement au dépôt
d’un dossier complet comportant leurs déclarations rectificatives et les pièces justificatives. Ces
demandes incomplètes appelées « lettres d'intention » donnent lieu à un décompte spécifique
de la part du STDR ou des pôles de régularisation déconcentrés.
Toutefois, pour inciter les contribuables à finaliser leur dossier dans un délai raisonnable,
la circulaire du 10 décembre 2014 a prévu que ces demandes devaient être complétées par le
dépôt des déclarations rectificatives dans un délai maximum de six mois.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
63
Des courriers de relance ont été adressés en novembre 2015 et en octobre 2016 aux
contribuables n’ayant pas déposé leur dossier complet de régularisation dans ces délais.
Le suivi des déclarations d’intention relève des secrétariats du STDR et des pôles, en
amont du traitement proprement dit des dossiers.
45
c)
Les déclarations rectificatives
Les contribuables souhaitant se mettre en conformité doivent déposer des déclarations
rectificatives au titre de l’impôt sur le revenu, des déclarations rectificatives ou initiales d’ISF
sur toute la période non prescrite et, suivant l’origine des avoirs et sous réserve des règles de
prescription, une déclaration de succession rectificative ou initiale (si le décès est intervenu
récemment) ou une déclaration de donation.
Ces déclarations rectificatives sont accompagnées de pièces justificatives permettant au
STDR et aux pôles de régularisation déconcentrés de :
-
vérifier le montant des avoirs détenus, directement ou indirectement, à l’étranger et les
revenus déclarés et, par suite la sincérité des déclarations rectificatives déposées ;
-
s’assurer de l’origine des avoirs à l’étranger notamment à partir d’attestations bancaires.
Le dossier doit comprendre :
1) un écrit exposant de manière précise et circonstanciée l’origine des avoirs détenus à
l’étranger, accompagné de documents justifiant de cette origine ou constituant un faisceau
d’éléments de nature à l’établir ;
2) les justificatifs relatifs aux montants des avoirs détenus directement ou indirectement
à l’étranger et des revenus de ces avoirs sur la période régularisée ; les documents bancaires
doivent être joints (avoirs, revenus, y compris plus- et moins- values, relevés bancaires) ;
3) lorsque les avoirs ont pour origine une succession ou une donation, une attestation de
l’établissement financier étranger précisant l’absence d’alimentation du compte par le
contribuable ou tout autre justificatif permettant de constater que le compte n’a pas été alimenté
par le contribuable postérieurement à la succession ou à la donation ;
4) une attestation du contribuable selon laquelle son dossier est sincère et porte sur
l’intégralité des comptes et avoirs non déclarés détenus à l’étranger qu’il possède ou dont il est
l’ayant droit ou le bénéficiaire économique.
La constitution de ce dossier complet de mise en conformité nécessite pour les
contribuables de se rapprocher des banques et des institutions financières au sein desquelles
sont gérés les avoirs. En effet, les contribuables ne détiennent généralement aucun document
ou relevé bancaire sur leurs avoirs détenus à l’étranger afin d’assurer la discrétion résultant du
secret bancaire. Les justificatifs sont en principe fournis par les établissements teneurs de
comptes. Les contribuables doivent fournir les éléments attestant la titularité du compte pour
les comptes anonymes à numéro et les informations permettant de retracer l’origine des fonds
45
En guise d’illustration, fin mars 2017, le pôle de Paris avait 2900 demandes de régularisation en stock, dont 400
lettres d’intention et 2500 déclarations rectificatives. Il avait traité 1223 dossiers depuis sa création.
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et d’assurer la traçabilité des flux. Dans les cas où les documents sont partiels, il peut être
recouru à un faisceau d’indices pour établir l’origine des avoirs.
d)
Le paiement des impôts dus concomitant du dépôt des déclarations rectificatives
Les contribuables doivent, au moment du dépôt des déclarations rectificatives, payer
spontanément le montant des impositions éludées et non prescrites au titre des impôts auto-
liquidés, soit l’ISF et les droits d’enregistrement (en cas de succession ou de donation). Ils
peuvent également, de manière facultative, effectuer un paiement au titre de l’IR éludé, mais ce
paiement ne fait l’objet que d’une imputation comptable provisoire.
Toutes les sommes acquittées au titre de la régularisation des avoirs non déclarés à
l'étranger sont affectées budgétairement par le seul PRS de Paris Sud-Ouest. Dès lors toute
somme versée auprès d'un autre poste comptable doit être transférée au PRS de Paris Sud-Ouest
2 -
Une fixation normée des conditions de la transaction
a)
Le processus
Les déclarations rectificatives déposées sont enregistrées puis affectées pour traitement à
un vérificateur. La cheffe du STDR répartit les dossiers aux enjeux les plus forts entre
vérificateurs intuitu personae. Les autres dossiers sont répartis par les chefs de section. Il en va
de même au sein des pôles déconcentrés. Les critères d’attribution sont multiples : équilibre
dans la répartition de la charge, compétence d’un vérificateur dans un domaine de la fiscalité
utile pour le traitement d’un dossier (DMTG par exemple), disponibilité, diligence… ; les
agents récemment affectés au STDR ou dans un pôle reçoivent des premiers dossiers
relativement simples pour leur permettre de se familiariser avec la procédure.
Quand un vérificateur reçoit un dossier, il procède à un premier examen sommaire qui
consiste seulement à vérifier la présence des pièces obligatoires. Cet examen est en général
positif. Sinon, les lacunes sont signalées au contribuable via son conseil. Les vérificateurs
s’assurent aussi qu’un contrôle fiscal, par les services locaux (brigade de patrimoine et de
revenus) ou des services spécialisés, n’est pas en cours ou récemment achevé. Le contrôle fiscal
a le pas sur la procédure de régularisation. Le dossier admis à l’examen par le STDR fait l’objet
d’une saisine dans la base Alpage, pour informer les autres services de l’existence d’une
procédure de régularisation. Le dialogue en la matière entre services de la DGFiP est fluide.
Les dossiers ainsi validés sont mis en attente par le vérificateur pour être ouverts
ultérieurement. Un agent a en moyenne un portefeuille de 120 à 140 dossiers affectés, ce qui
couvre à la fois les dossiers « ouverts » en cours de traitement (une trentaine à une quarantaine)
et les dossiers qui lui ont été affectés et qu’il n’a pas encore ouverts dits « en attente ».
Les vérificateurs disposent d’une certaine latitude dans leurs méthodes : certains préfèrent
se concentrer sur un nombre restreint de dossiers en cours de traitement, d’autres ouvrir un plus
grand nombre de dossiers pour tenir compte des délais de réponse des contribuables et de leurs
conseils aux questions posées par le service. Il n’est pas fixé
a priori
de délai de traitement pour
un dossier car ce délai dépend de ses particularités et des vicissitudes du dialogue avec les
déposants. Il est attendu d’un agent qu’il finalise une centaine de transactions par an.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
65
b)
L’examen au fond
Les modalités générales
Le STDR et les pôles de régularisation déconcentrés procèdent à un examen des
déclarations et des pièces justificatives, conduisant le cas échéant à de nouveaux échanges avec
le contribuable ou son conseil notamment lorsque les pièces fournies ne permettent pas d’avoir
une assurance raisonnable sur l’origine des avoirs et la sincérité des déclarations. Les
inspecteurs estiment que les déclarations sont plus ou moins insuffisantes dans 90 à 95 % des
cas, même si les contribuables les ont établies de bonne foi et ont été bien conseillés.
La difficulté principale est d’établir les données, de rassembler des éléments de preuve,
notamment sur l’origine des avoirs, pour corroborer les dires des déclarants qui ne disposent
pas toujours de documents. L’administration est, dans les faits, pragmatique compte tenu de la
difficulté à établir l’origine des fonds pour les comptes anciens, mais sans pour autant se
contenter d’une seule attestation sur l’honneur. Le fait que la banque indique que compte tenu
de l’ancienneté, elle ne peut communiquer des pièces justificatives, est pris en compte.
Le STDR s’attache à reconstituer les mouvements de fonds sur période non prescrite. Il
interroge les contribuables sur les retraits des comptes pour s’assurer qu’il s’agit bien de
dépenses de train de vie car des retraits d’un montant élevé peuvent dissimuler des donations.
Si les investigations font apparaître des donations non déclarées, une déclaration rectificative
est alors demandée à chaque donataire. Dans le cas des contribuables actifs, des éléments
justificatifs sont indispensables pour les alimentations récentes du compte bancaire, car
l’administration entend éviter tout blanchiment de fonds à l’origine indéterminée. En cas de
retraits fréquents, le STDR procède à des vérifications auprès de la Douane.
La facilité et la rapidité du dialogue dépendent des avocats, plus ou moins diligents
Certains avocats estiment que leur prestation est achevée avec le dépôt de la déclaration, les
avocats spécialisés sont plus réactifs. Certains éléments doivent être fournis par les
contribuables eux-mêmes mais il n’est pas rare qu’ils soient âgés et aient du mal à répondre. Il
arrive également que des déclarants âgés décèdent en cours de procédure. Dans ce cas elle est
poursuivie avec les héritiers
46
. La facilité du traitement dépend aussi des établissements teneurs
de compte : il est plus malaisé d’obtenir des informations d’établissements israéliens que
d’établissements suisses.
Un délai de 60 jours est accordé pour la réponse à une demande d’information. Si ce délai
n’est pas respecté, il est demandé aux agents de faire ensuite des rappels tous les quinze jours.
Les montants dus au titre des impôts auto-liquidés sont vérifiés par le STDR et souvent
rectifiés à un niveau supérieur à celui du paiement effectué au moment du dépôt des déclarations
rectificatives. C’est ensuite le STDR qui procède au calcul de l’impact de la déclaration sur les
autres impôts dus par le contribuable (par exemple, l’IR est affecté par la prise en compte des
revenus d’actifs non déclarés ainsi que par des plus et moins-values mobilières). Comme l’IR
vient au passif de l’ISF, si l’IR augmente, l’ISF diminue.
46
Si la personne décédée était juridiquement seule titulaire du compte, il n’est pas appliqué de pénalité ni
d’amende ; si en revanche le compte faisait partie des biens détenus en communauté, le membre survivant de cette
communauté doit régler les pénalités et amendes.
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66
Les cas de pluralité de détenteurs d’avoirs
Il arrive qu’un même dossier concerne plusieurs contribuables, le plus souvent une
« fratrie », le cas type étant celui d’avoirs reçus par succession. En général les avocats préparant
les dossiers incitent tous les membres d’une même famille à déclarer ensemble. Deux situations
peuvent se présenter : si la succession n’est pas prescrite, tous les héritiers se trouvent tenus par
la solidarité civile ; si elle est prescrite et que seule une partie des héritiers a procédé à une
déclaration d’avoirs à l’étranger, alors le fisc sait que les autres sont aussi titulaires d’avoirs
mais se sont abstenus de les déclarer. Dans ce cas, le STDR informe le ou les avocats du ou des
déclarants, mais ne s’adresse pas directement aux co-titulaires non déclarants. Si ces derniers
ne font pas de déclaration, l’inspecteur du STDR établit une fiche d’instruction et fait un
signalement à la DNVSF.
c)
La priorité donnée aux dossiers à fort enjeu budgétaire
L’ordre de traitement est déterminé par la priorité budgétaire. Les dossiers à fort enjeu
sont traités les premiers, le plus rapidement possible après leur dépôt. Les dossiers à faible enjeu
sont traités dans les interstices laissés par les dossiers à fort enjeu (dans l’intervalle entre une
demande de renseignement complémentaire et la réponse). Cette situation vaut surtout pour le
STDR central. La création des pôles a tendu à améliorer le délai de traitement des petits
dossiers, l’ordre retenu consistant à traiter en premier les dossiers les plus anciennement
déposés
47
. Cependant des dossiers déposés à date ancienne et déjà ouverts au STDR n’étaient
pas transférables aux pôles ; ils ont pu rester longtemps en souffrance. Les contribuables dont
les dossiers sont à faible enjeu sont satisfaits de s’être mis en règle par leurs déclarations et ne
sont pas pressés de parvenir à une transaction définitive. Le délai peut leur procurer un avantage
de trésorerie, dans la mesure où il leur reste à payer les impôts calculés par l’administration –
IR – et fréquemment un complément sur les impôts auto-liquidés dont ils se sont acquittés lors
du dépôt de leur dossier : au fur et à mesure de la gestion de la procédure, on constate une
tendance à la hausse du montant des droits rappelés par rapport aux droits autoliquidés.
Les disparités de durée de traitement des dossiers et de délais de conclusion de la
transaction sont la seule différence de traitement entre contribuables.
d)
La garantie de l’homogénéité
La circulaire du 21 juin 2013 et les documents subséquents ont tendu à fixer des principes
d'application clairs permettant d'harmoniser le traitement des dossiers et de garantir l'égalité de
traitement. Par ailleurs, le traitement centralisé des dossiers en un point unique d’expertise
disposant d’une compétence nationale et centralisant les paiements auprès d’un comptable
unique participe à l'égalité de traitement entre les contribuables.
L’organisation interne au sein du STDR et des pôles vise également à assurer la cohérence
de la doctrine et l’homogénéité des pratiques. Les dossiers sont traités par les inspecteurs puis
47
À titre d’exemple, au pôle de Paris, fin mars 2017, 3 dossiers déposés en 2013 n’étaient pas soldés ; tous les
dossiers déposés en 3204 avaient été ouverts, mais pas tous finalisés.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
67
visés par les chefs de section (inspecteurs divisionnaires – IDIV), sans double visa ; il arrive
que les AFIPA se substituent aux IDIV pour viser les dossiers quand ceux-ci sont trop chargés.
Le visa des dossiers à fort enjeu ou présentant des problématiques complexes relève,
d’une manière générale, de la compétence des deux AFIPA responsables du STDR. Lorsque
les chefs de section reçoivent un dossier de ce type, un échange s’instaure avec l’AFIPA de
rattachement et les difficultés susceptibles d’être rencontrées sont évoquées. Des échanges ont
lieu régulièrement entre les deux AFIPA sur les cas rencontrés afin d’assurer une unicité dans
le traitement des dossiers.
Les décisions retenues sont systématiquement mutualisées au sein du STDR. Des fiches
de mutualisation sont mises en ligne sur le réseau du STDR et des courriels de mutualisation
régulièrement envoyés aux inspecteurs. Les questions posées lors de la permanence
téléphonique du STDR sont mutualisées lorsqu’elles posent des difficultés. Les réunions de
section et de division sont également un lieu de mutualisation des prises de position pour assurer
l’unicité de traitement des dossiers.
Certaines situations font l’objet d’un échange avec la direction de la DNVSF lorsqu’elles
appellent des prises de position de principe ou lorsque les faits exposés ne relèvent pas
explicitement de la circulaire (activité occulte, contrôle douanier…).
Des demandes de solution portant sur les modalités de traitement des dossiers sont
également adressées le cas échéant au Service du contrôle fiscal (Bureau CF-1A et avant le
1
er
septembre 2016 à la mission pilotage) en cas de difficultés rencontrées dans le traitement
des dossiers (demande de solution sur des points de droit, sur le caractère spontané de la
démarche ou pour désigner le service compétent en cas de conflit avec un service de contrôle).
e)
Les relations avec les avocats et contribuables
Le ministère d’avocats n’est ni obligatoire ni exclusif. Un contribuable peut passer par un
autre professionnel du chiffre ou du droit (notaire, expert-comptable). En pratique seulement
10 % des contribuables gèrent seuls la procédure. La majeure partie d’entre eux ont recours à
un avocat. Une vingtaine de cabinets se sont plus ou moins spécialisés à Paris
La DGFiP a pris le parti de s’appuyer sur les avocats pour faciliter le déroulement de la
procédure en obtenant des dossiers mieux construits. Plusieurs réunions et conférences ont été
organisées entre le Service du contrôle fiscal, le STDR et l'institut des avocats conseils fiscaux
(IACF) principale organisation représentative des avocats spécialisés en droit fiscal. Ces
réunions ont eu pour but de faire le point sur le déroulement de la procédure et d'apporter
certaines précisions techniques. Le dialogue avec les avocats est devenu plus facile avec le
temps. Les problèmes se rencontrent davantage avec les avocats non spécialisés voire les
avocats étrangers qu’avec les grands cabinets de la place.
3 -
Une transaction facteur de sécurité juridique pour l’État
À l’issue de l’examen du dossier, le STDR et les pôles de régularisation déconcentrés
informent le contribuable des conséquences du dépôt des déclarations rectificatives, par l’envoi
d’un courrier précisant notamment le montant des pénalités et amendes, et lui adressent une
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COUR DES COMPTES
68
proposition de transaction (lettre 751) dans les termes fixés par les circulaires des 21 juin 2013,
12 décembre 2013 et 14 septembre 2016, précitées.
Le contribuable dispose d’un délai maximum de 30 jours après réception pour accepter
et signer la proposition de transaction. En cas de refus des conditions de la régularisation, le
dossier est transféré en interne à une brigade de contrôle de la DNVSF. Un tel refus est
cependant exceptionnel.
La transaction ne porte en tout état de cause que sur les exercices au titre desquels des
déclarations rectificatives ont été présentées au STDR. Les déclarations pour les exercices
ultérieurs doivent être faites auprès des services fiscaux de droit commun.
Une fois la transaction acceptée par le contribuable, tout risque de contentieux est écarté.
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69
Schéma n° 1 :
étapes suivies par un dossier de régularisation
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COUR DES COMPTES
70
4 -
Les dossiers sensibles
a)
Les remontées au niveau de l’administration centrale
L’administration centrale (service du contrôle fiscal) peut être amenée à se prononcer sur
des questions de doctrine, à l’initiative soit des services soit d’acteurs extérieurs (avocats par
exemple) : il est arrivé dans certains cas, que les contribuables saisissent directement le ministre
sur les conditions d'application de la circulaire (par exemple, sur le taux du barème applicable
aux travailleurs frontaliers).
Certains dossiers font l’objet de demande d’informations à l’administration centrale voire
sont évoqués à son niveau. C’est le bureau CF-2A qui traite les dossiers de personnalités
relevant de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique par exemple.
Ces remontées ne sont pas encadrées par une instruction particulière. Les demandes sont
instruites en lien avec le service et dans le strict respect des conditions de droit commun.
b)
Les interventions au niveau de la DNVSF
Si un dossier sensible est déposé au STDR, le directeur de la DNVSF est avisé par le
service. Dans quelques cas exceptionnels, les avocats saisissent directement le directeur de la
DNVSF afin de pouvoir lui exposer en direct le dossier de leur client. Dans cette situation, un
représentant du STDR assiste à l’entretien.
Les dossiers comprenant des avoirs supérieurs à 5 millions d'euros font l’objet d’un suivi
particulier. Ils sont attribués, par les deux administrateurs des finances publiques adjoints
(AFiPA) pilotant le STDR, aux vérificateurs les plus expérimentés disposant de connaissances
élargies en matière de fiscalité internationale et patrimoniale. Les deux AFIPA valident la
solution proposée et la soumettent à la DNVSF.
C -
Un recouvrement centralisé et rapide des créances fiscales
1 -
Un processus concentré
Un des motifs du choix de placer le STDR dans l’orbite de la DNVSF a été que cette
direction disposait d’un outil de recouvrement. Le comptable chargé du pôle de recouvrement
spécialisé (PRS) de Paris Sud-Ouest avait en effet reçu compétence en 2011 pour recouvrer les
créances fiscales établies par la DNVSF
48
. Le décret n° 2013-1193 du 19 décembre 2013 a
étendu cette compétence à l’émission des AMR des impositions résultant du traitement par la
48
Le décret 2011-303 du 21 mars 2011 a donné compétence au préfet du département de Paris compétence pour
homologuer les rôles d’imposition résultant de l’engagement par la DNVSF d’une procédure de rectification ou
d’une procédure d’imposition d’office et au comptable chargé du pôle de recouvrement spécialisé de Paris Sud-
Ouest compétence pour établir les avis de mise en recouvrement résultant de l’engagement par la DNVSF de ces
mêmes procédures. Un arrêté du 4 avril 2011 a rendu le même comptable compétent pour engager ou poursuivre
toute procédure visant au recouvrement de l’ensemble des impositions résultant de l’engagement par la DNVSF
d’une procédure de rectification ou d’une procédure d’imposition d’office.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
71
DNVSF des vérifications de situations fiscales d’actes ou de déclarations liés à la détention
d’avoirs à l’étranger. L’arrêté du 19 décembre 2013 lui a donné compétence pour
l’encaissement des sommes dues à ce titre et l’engagement ou la poursuite des procédures visant
au recouvrement. Enfin, par décret n° 2015-607 du 3 juin 2015, il a reçu compétence pour
recouvrer toutes les impositions établies à partir des déclarations rectificatives, y compris donc
celles émanant des pôles déconcentrés.
Par conséquent le recouvrement de toutes les créances résultant du traitement des dossiers
et de la conclusion des transactions par le STDR a pu être centralisé auprès de cet unique poste
comptable. 18 agents y sont affectés à cette tâche.
La mission départementale risques et audit de la DRFiP de Paris a été saisie en avril 2015
par l'administration centrale afin de sécuriser le dispositif de recouvrement dans la perspective
de la mise en place des nouveaux pôles.
Un dispositif spécifique de traitement du recouvrement des dossiers de régularisation a
été mis en place.
Le recouvrement de ces créances s'opère selon les modalités suivantes :
-
les paiements effectués à l'appui du dépôt des déclarations rectificatives sont pris en charge
par le PRS de la DNVSF soit directement soit par transfert (par virement) à partir des postes
comptables (SIP/SIE) ou des pôles comptables de référence des pôles déconcentrés,
lesquels ont reçu des instructions précises sur le processus à suivre. Ils sont ensuite saisis
directement dans MEDOC, affectés en comptabilité s'agissant des impôts auto-liquidés
(déclarations d'ISF et de droits d'enregistrement) ou en compte d'imputation provisoire pour
les autres impôts (impôt sur le revenu, etc.) ;
-
une fois le dossier instruit par le STDR, et la proposition de transaction envoyée au
contribuable, avec dans la généralité des cas un solde à payer (impositions supplémentaires,
au titre de l’impôt sur le revenu, des pénalités et des amendes) deux cas peuvent se
présenter.
Le contribuable procède directement au paiement en renvoyant la transaction signée par lui ;
dans ce cas le PRS ou les autres pôles comptables procèdent à l’encaissement.
Si la transaction est renvoyée sans paiement, des consignes ont été données aux vérificateurs
afin de relancer les contribuables et le STDR établit un dossier de taxation (fiche 3950) qu’il
adresse au PRS, lequel émet un l'avis de mise en recouvrement (AMR).
Les paiements versés au moment de la signature du contrat de transaction ou sur AMR
sont affectés lors de l'opération de prise en charge dans MEDOC. Toutefois, si le contribuable
a déjà versé des fonds (au moment du dépôt des déclarations rectificatives), ils sont extraits lors
de la prise en charge, font l’objet d’un appariement pour être affectés sur le dossier concerné.
Une fois la transaction signée, quasiment tous les contribuables concernés s’acquittent
des paiements mis à leur charge. Seuls quelques dossiers anciens restent non soldés à la fin de
2016 (38 au titre de l'année 2014 qui seront prescriptibles en 2018 et 175 au titre de l'année
2015). Pour ces dossiers, une procédure de recouvrement forcé va être engagée par le PRS.
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72
2 -
Le suivi des recettes
Les recettes provenant de la régularisation pour un exercice sont la somme des acomptes
payés au moment du dépôt des déclarations rectificatives et des paiements faits à l’issue des
transactions soit spontanément soit après mise en recouvrement.
Les statistiques de recettes ne sont pas élaborées à partir des outils de gestion du STDR :
la base RADAR ne recense pas les remises transactionnelles. Leur élaboration est le fruit d’une
collaboration entre le service du contrôle fiscal dont dépend le STDR, le PRS et le service de
la gestion fiscale (GF 2) qui établit les statistiques en particulier de recettes budgétaires.
La centralisation des encaissements au titre du STDR est réalisée par les services centraux
(GF2B) de la façon suivante : toutes les deux semaines (par « batch » depuis MEDOC), le
bureau GF-2B extrait les données comptables de MEDOC et MIRIAM pour élaborer un état
recensant les données suivantes : montant des prises en charge cumulé depuis le 1
er
janvier,
montant des encaissements sur prise en charge, montant des restes à recouvrer et montant du
compte d'imputation provisoire. Ces données sont complétées par un envoi du PRS qui recense
chaque semaine le montant des encaissements effectués à titre spontané sur les déclarations
d'ISF et de droits d’enregistrement.
II -
Des régularisations nombreuses,
un rendement budgétaire significatif
A -
Un nombre élevé de demandes de régularisation
Autant qu’on puisse l’appréhender, la principale motivation des déclarants pour recourir
à cette procédure a été d’échapper à d’éventuelles poursuites pénales et de bénéficier de
conditions de règlement modérées. Beaucoup des détenteurs passifs, les plus nombreux à
déposer des dossiers de régularisation, ont vu dans l’ouverture du STDR l’opportunité de régler
un problème dont ils ne savaient pas comment sortir.
1 -
La volumétrie
Le STDR a dû faire face à un afflux massif et ininterrompu de demandes de régularisation
depuis sa création. Au 31 décembre 2016, le nombre de demandes de régularisation reçues par
le STDR depuis sa création s’élevait à 49 000. Il dépasse 51 000 à ce jour.
Le flux de demandes de régularisation (y compris les lettres d’intention) a culminé en
2014. La montée en charge du volume des dossiers complets a donc été légèrement décalée
dans le temps par rapport à celle des demandes de régularisation, et a culminé en 2015. Au
31 décembre 2016, 43 182 dossiers complets avaient été reçus par le STDR.
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
73
Tableau n° 6 :
évolution des dépôts
Dépôts dans
l’année
2013
2014
2015
2016
Demandes de
régularisation
(dont lettres
d’intention)
pendant l’année
10 600
25 410
8 884
4 294
Nombre cumulé
de demandes en
fin d’année
10 600
36010
44 894
49 188
Dossiers complets
déposés en fin
d’année
1 432
16 915
36 886
43 182
Source : DGFiP
Le flux de dossiers n’est pas tari. L’échéance de l'échange automatique d'informations
(EAI), qui doit entrer en vigueur dès 2017, comme l’instauration d’une rémunération des
aviseurs maintiennent la pression sur les détenteurs d’avoirs encore non déclarés. Toutefois,
après un afflux de lettres d’intention en décembre 2016 faisant suite à la rumeur d’une prochaine
fermeture du STDR, le nombre de nouveaux dossiers reçus a sensiblement diminué puisque le
service n’en a recensé que 1000 du 1
er
janvier au 31 mai 2017 (lettres d’intention et déclarations
rectificatives confondues).
Graphique n° 3 :
demandes de régularisation et dossiers complets,
cumul depuis l’origine du STDR
Source : DGFiP
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
fin 2013
fin 2014
fin 2015
fin 2016
au 30/06/17
demandes y.c. lettres d'intention
dossiers complets déposés
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74
Graphique n° 4 :
demandes de régularisation et dossiers complets, flux annuels
Source : DGFiP
2 -
Un profil type bien caractérisé
a)
La prépondérance des comptes bancaires
Sur l’ensemble des 27 634 dossiers traités au 26 avril 2017, le montant des avoirs déclarés
au STDR s'élève à 25,6 Md€, soit un montant moyen par dossier de 928 073 €. Dans la mesure
où ce sont les dossiers à fort enjeu qui sont traités les premiers, le montant moyen pour
l’ensemble des dossiers est inférieur, de l’ordre de 500 000 €.
Les avoirs régularisés sont de différentes natures, essentiellement des comptes bancaires,
des contrats d’assurance-vie, des biens immobiliers ou de l’or.
Dans 92,5 % des cas, les dossiers ne contiennent qu’un seul type d’avoir. Ce sont
essentiellement des dossiers ne comportant que des comptes bancaires, qui représentent 91,0 %
de l’ensemble des dossiers traités, pour un montant moyen par dossier de 836 912 €. Les
dossiers mono-avoir comportant un bien immobilier ou de l’or sont d’un montant moyen plus
élevé, respectivement 1,16 M€ et 1,21 M€, mais ils sont peu nombreux.
Les dossiers multi-avoirs ont un montant moyen de 2,06 M€, soit presque 2,5 fois celui
des dossiers mono-avoir. Ainsi, alors qu’ils ne représentent que 7,46 % des dossiers, ils
rassemblent 16,55 % des avoirs régularisés.
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
30 000
2013
2014
2015
2016
au 30/06/17
demandes y.c. lettres d'intention
dossiers complets déposés
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75
Tableau n° 7 :
répartition des dossiers traités au 26/04/17 par nature des avoirs
Nombre de
dossiers traités
Part dans le stock
de dossiers traités
Montant
moyen des
dossiers
Part dans le stock
des avoirs
régularisés
Dossiers mono-avoir
25 572
92,54 %
836 912
83,45 %
dont :
Comptes bancaires
25 158
91,04 %
841 542
82,55 %
Assurances vie
213
0,77 %
385 605
0,32 %
Biens immobiliers
45
0,16 %
1 159 222
0,20 %
Or
4
0,01 %
1 212 501
0,02 %
Autre nature
152
0,55 %
597 766
0,35 %
Dossiers multi-avoirs
2 062
7,46 %
2 058 603
16,55 %
Total
27 634
100,00 %
928 073
100,00 %
Source : DGFiP
La répartition par montant des dossiers traités depuis 2013 (jusqu’en avril 2017), tous
types de composition des avoirs confondus, figure dans le tableau ci-dessous
Tableau n° 8 :
répartition des dossiers traités par montant
Nombre de
dossiers traités
% du nombre de
dossiers traités
Montant des
avoirs (€)
% des avoirs
Avoirs à zéro €
(défunts)
1522
5,62 %
0
0 %
Avoirs compris
entre 0 et 0,6 M€
16708
60,46 %
3 929 709 827
15,32 %
Avoirs compris
entre 0,6 et 1 M€
3333
12,06 %
2 584 190 185
10,08 %
Avoirs compris
entre
1 et 5 M€
5330
19,29 %
10 582 326 185
41,26 %
Avoirs de plus de
5 M€
711
2,57 %
8 550 131 682
33,34 %
Total
27 634
100 %
25 646 357 579
100 %
Source : DGFiP
Le tableau n° 16 de l’annexe n° 4 précise la corrélation entre la composition et le montant
des avoirs.
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76
b)
Une majorité de fraudeurs passifs détenant des avoirs en Suisse
Le STDR ne dispose pas d’outil de requêtage permettant de déterminer la typologie des
montants déclarés selon la nature et la provenance des avoirs. Un examen de la base permet
néanmoins de répartir les dossiers traités par origine des avoirs (cf. annexe n° 4, tableau n° 13)
et de rattacher les enjeux financiers s’y rapportant par type d’impôt.
Ainsi, 80 % de dossiers traités ne comportant strictement qu’une seule origine d’avoirs,
font apparaître les résultats suivants :
-
65 % des avoirs ont pour origine une succession ou une donation, les droits de mutation à
titre gratuit (donations et successions) représentent 14,24 % des droits et majorations,
l’impôt de solidarité sur la fortune 31,47 % et l’impôt sur le revenu 43,62 % ;
-
13 % des dossiers ont strictement pour origine une épargne exportée ou des revenus non
déclarés, les DMTG représentent 11,5 % des droits et majorations, l’ISF 31,93 % et l’IR
38,58 % ;
-
5 % des dossiers ont strictement pour origine des opérations réalisées par des
impatriés/expatriés, les droits se répartissent à hauteur de 4 % pour les DMTG, 34,68 %
pour l’ISF et 44,36 % pour l’IR.
Dans la première phase d’existence du STDR, la plupart des dossiers étaient déposés par
des contribuables « passifs ». Au fil du temps, la proportion de dossiers provenant de
contribuables actifs ou présentant des montages structurés est devenue plus importante, avec
des changements de pays de détention des avoirs.
Les dossiers concernent très majoritairement des comptes bancaires en Suisse (80 %) et
à un moindre degré au Luxembourg (8 %). Selon le STDR, la palette des pays concernés s’est
progressivement élargie mais dans des proportions limitées.
Graphique n° 5 :
répartition des comptes déclarés par pays de localisation
Source : DGFiP, rapport au Parlement au titre de l’année 2016 sur l’application de la circulaire du 21 juin 2013
Accessoirement, les caractéristiques des déclarants ont mis en évidence que l’offre de
secret bancaire avait bien été développée par la Suisse au fil des décennies à l’échelle quasi-
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
77
industrielle (compte tenu du fait que les comptes de résidents français ne représentaient qu’une
partie des comptes abrités en Suisse).
Le profil des déclarants montre aussi que la procédure a surtout permis de « solder le
passé » en réglant le problème des « héritiers », même s’il est probable que tous n’ont pas
procédé à la régularisation.
La procédure n’a pas permis en revanche de véritablement s’attaquer à la fraude
internationale organisée reposant sur les montages les plus sophistiqués.
c)
Un devenir des avoirs régularisés mal connu
Le montant total des avoirs déclarés au 31 décembre 2016, y compris au stade de la lettre
d’intention, s’élevait à environ 30 Md€
49
. Il a atteint 31 Md€ au 31 mai 2017 et 32 Md€ fin août.
Malgré l’absence de données précises sur le comportement des contribuables procédant
à la régularisation, qui n’ont aucune obligation en la matière, l’administration estime que la
plupart des avoirs régularisés sont rapatriés dans des établissements financiers français. La
Fédération bancaire française (FBF) ne dispose pas d’informations en la matière, aucune
recension particulière n’étant effectuée par les établissements bancaires.
B -
Des délais de règlement inégaux et parfois longs
Le succès même rencontré par la procédure a conduit à l’allongement des délais, en raison
du rapport entre les effectifs du STDR et le nombre et dans certains cas la complexité des
dossiers. La priorité accordée au traitement des dossiers présentant les plus forts enjeux
budgétaires fait que l’amplitude des délais est large.
1 -
Des délais de règlement élevés
Le point de départ de la computation des délais est dans tous les cas le dépôt par le
contribuable ou en son nom par un tiers d’un dossier complet, incluant les déclarations
rectificatives accompagnées du paiement des impôts auto-liquidés. À partir de ce moment, il
convient de distinguer :
-
la durée totale de règlement qui correspond à la période écoulée entre le dépôt du dossier
complet et sa clôture (par signature de la transaction et envoi au PRS du document de
taxation) ;
-
le délai de traitement par le STDR, qui est l’intervalle de temps entre le moment de
l’ouverture du dossier par le vérificateur et sa clôture.
Seuls sont analysés les délais de règlement, à partir des données fournies par l'application
Alpage et la base RADAR (base interne de gestion du STDR). Ce service ne dispose pas en
49
À titre de comparaison, les avoirs régularisés dans le cadre de la cellule Woerth se sont élevés à 7 Md€.
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78
revanche d’outils permettant de calculer le délai moyen de traitement des dossiers à partir du
début des travaux.
Les dossiers ne sont pas mis en traitement dans leur ordre d’arrivée car les objectifs de
rendement budgétaire fixés au STDR par les lois de finances conduisent à traiter en premier les
dossiers les plus importants en termes d’avoirs régularisés. Ceux-ci sont prioritaires pour « tenir
le budget », donc ouverts peu de temps après avoir été déposés et confiés aux meilleurs agents ;
en revanche leur traitement après ouverture peut être plus long dans la mesure où ils sont
a
priori
plus complexes. Inversement les dossiers à enjeux moindres sont ouverts plus tard mais
leur traitement peut être plus rapide s’ils sont simples ; toutefois certains dossiers à faible enjeu
budgétaire peuvent être également complexes (cas de fratries, de successions, etc.). En tout état
de cause,
in fine
, le délai moyen de règlement des dossiers portant sur des avoirs supérieurs à
1 M€ est inférieur à celui des dossiers de montants moindres.
Pour l’ensemble des dossiers traités au 31 décembre 2016, le délai moyen de règlement a
été de 247 jours pour les dossiers portant sur des avoirs supérieurs à 1 M€, de 360 jours pour
les avoirs compris entre 0,6 et 1 M€ et de 416 jours pour ceux inférieurs à 0,6 M€.
Les durées constatées sont plus significatives sur les dossiers déposés en 2013 et 2014
dans la mesure où ils ont aujourd’hui été traités dans leur grande majorité (92 % pour 2013,
80 % pour 2014) :
-
pour les seuls dossiers déposés en 2013 et traités avant le 31 décembre 2016, le délai de
règlement moyen a été de 379 jours, mais seulement de 325 jours pour les dossiers portant
sur plus de 1 M€ d’avoirs, contre 391 jours pour des avoirs compris entre 0,6 M€ et 1 M€,
et 400 jours en-deçà de 0,6 M€ ;
-
pour les dossiers déposés en 2014, le délai moyen a été de 410 jours et, pour les différentes
tranches d’avoirs par ordre décroissant, de 292, 372 et 467 jours.
Pour les dossiers déposés en 2015 et 2016, dont moins de la moitié ont été traités au
31 décembre 2016, les durées de règlements mesurées à cette date ne sont pas significatives.
Tableau n° 9 :
part des dossiers réglés au 31/12/16 par année de dépôt
2013
2014
2015
2016
dossiers complets
déposés durant
l’année (1)
1 432
15 483
19 971
6 296
nombre de ces
dossiers réglés fin
2016 (2)
1 314
12 287
8 667
1 253
soit en % des
dossiers déposés
(2)/(1)
91,8 %
79,4 %
43,4 %
19,9 %
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
79
Graphique n° 6 :
délai moyen (en jours) de règlement des dossiers par année de dépôt
et par tranche d’avoirs pour l’ensemble des dossiers traités au 31/12/16
Source : DGFiP
La priorité donnée aux dossiers à fort enjeu s’est traduite par des délais de traitement
particulièrement longs pour certains « petits » dossiers, notamment ceux confiés aux pôles de
régularisation déconcentrés à partir du mois de juin 2015. À la fin de l’année 2016, les PRD
avaient ainsi réglé 154 dossiers déposés en 2013, le délai de règlement de ces dossiers non
prioritaires ressortant en moyenne à 797 jours (soit plus de deux ans). De même, parmi les
dossiers déposés en 2014, 4 268 avaient été réglés par les PRD à la fin de l’année 2016, avec
un délai moyen de 612 jours. Il peut arriver que le délai de règlement d’un dossier simple
atteigne trois ans.
Seule la déconcentration a permis le traitement des dossiers de plus faible montant. Les
pôles de régularisation ont été orientés vers le traitement des dossiers les plus anciens.
2 -
Les facteurs susceptibles d’affecter la durée de traitement
Les délais d’examen ne sauraient être imputables aux seuls agents en poste au STDR.
Plusieurs facteurs contribuent en effet à allonger les délais.
La durée de traitement dépend de la qualité des dossiers déposés. Celle-ci est en règle
générale moins bonne lorsque les dossiers sont déposés en l’absence d’avocats ou par des
professionnels du droit non habitués à traiter ce type de dossiers (notaires ou experts comptables
par exemple). Toutefois certains cabinets déposent, quasi systématiquement, des dossiers
incomplets, souvent auprès des services locaux, alors même que la DGFiP rappelle
régulièrement qu’il est préférable de déposer les dossiers directement auprès du STDR. Pour
autant, la qualité moyenne des dossiers a eu tendance à s’améliorer dans le temps avec un effet
d’apprentissage et la spécialisation de certains cabinets d’avocats.
0
50
100
150
200
250
300
350
400
450
500
2013
2014
2015
2016
année de dépôt du dossier complet
avoirs compris entre 0 et 0,6 M€
avoirs compris entre 0,6 M€ et 1 M€
avoirs supérieurs à 1 M€
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80
Bien que l’administration vérifie dès leur réception que les dossiers sont complets,
l’examen détaillé du dossier amène fréquemment le STDR à demander des explications,
précisions, pièces complémentaires. La circulaire prévoit un délai de 60 jours pour répondre à
une demande de pièces complémentaires. Le respect de ce délai dépend de l'attitude et de la
réactivité des parties, au premier chef de leurs avocats. Cependant, même si leur bonne volonté
est acquise, ils sont eux-mêmes tributaires des pratiques des organismes financiers, parfois peu
enclins à satisfaire des demandes de documents ou peu diligents ; ils produisent parfois des
documents difficiles à exploiter, nécessitant au minimum une traduction. Les relances que
peuvent faire les agents du STDR n’aboutissent souvent qu’avec retard.
Certains dossiers sont intrinsèquement plus complexes : dossiers avec plusieurs
déclarants, impliquant plusieurs contribuables dont certains peuvent être déclarants et d’autres
non, par exemple dans une fratrie ou du fait d’une succession ; en cas de désaccord entre
héritiers, certaines successions sont bloquées et le dossier ne peut pas être finalisé.
Des désaccords peuvent surgir entre le contribuable et la position de l’administration sur
des points de droit et indirectement sur le coût de la régularisation (demande de dépôt de
déclaration de droit de mutation à titre gratuit par exemple).
Enfin, certains événements exogènes peuvent peser sur le délai de traitement des dossiers.
Ainsi, après la décision du Conseil constitutionnel du 22 juillet 2016, près de 1 500 dossiers ont
dû être modifiés au cours des mois de juillet, août et septembre 2016, ce qui a prolongé leur
délai de traitement.
Ces facteurs ne disparaîtraient pas si les agents du STDR étaient plus nombreux. Des
effectifs renforcés auraient permis d’aller plus vite, surtout dans le traitement de masse.
Toutefois, l’arbitrage fait par l’administration, avec l’aval de l’autorité politique, a été de ne pas
dégarnir le reste des services de contrôle fiscal et de procéder à un arbitrage entre les coûts en
termes de personnel et l’efficacité en termes de recettes budgétaires : la concentration sur les
dossiers à fort enjeu a permis de les maximiser à effectifs donnés.
3 -
Les risques liés à la longueur des délais de règlement
La longueur des délais fait courir le risque de voir une partie des amendes susceptibles
d’être infligées se prescrire par application de l’article L 188-2 du LPF (cf.
supra
).
Par exemple, si un dossier a été déposé en 2015, l’amende peut être infligée pour les
exercices courant de 2011 à 2014. Si le dossier n’a pas fait l’objet d’une mise en recouvrement
en 2016, et si la prescription n’a pas été interrompue à l’initiative soit du contribuable (par un
acte recognitif) soit par le fisc, l’exercice 2011 ne peut plus faire l’objet d’amendes.
Pour éviter cette prescription, le STDR effectue chaque année une extraction à partir de
la base Radar pour dresser la liste des dossiers exposés à cette prescription et effectue un acte
interruptif de prescription en fin d’exercice, par envoi d’une lettre aux contribuables concernés.
4 -
Un stock encore important de dossiers en attente de traitement
Le volume de dossiers complets déposés s’est révélé très supérieur à ce qui avait été
anticipé. Jusqu’en 2015, le nombre des dossiers traités par le STDR a ainsi été sensiblement
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
81
inférieur au nombre des dossiers déposés. Il s’en est suivi la constitution d’un stock important
de dossiers en attente de traitement, dont le nombre est passé de 12 878 fin 2014 à 25 017 fin
2015. L’ouverture des pôles de régularisation déconcentrés, sept en juin 2015 puis trois
supplémentaires en juin 2016, a permis d’accélérer le traitement des dossiers. Ainsi en 2016, le
nombre de dossiers traités (12 000) a pour la première fois été supérieur au nombre de nouveaux
dossiers déposés, ce dernier étant par ailleurs sensiblement en baisse par rapport à 2015. Le
stock de dossiers complets en attente de traitement a ainsi été ramené à 19 570 à la fin de l’année
2016 et à 15 029 au 31 août 2017.
Tableau n° 10 :
nombre de dossiers complets déposés et nombre de dossiers réglés
par année
2013
2014
2015
2016
dossiers complets déposés au
cours de l’année
1 432
15 483
19 971
6 296
dossiers réglés au cours de
l’année
97
3 940
7 832
11 743
stock de dossiers restant à
traiter en fin d’année
1 335
12 878
25 017
19 570
Source : DGFiP
Graphique n° 7 :
ventilation des dossiers déposés depuis l’origine entre dossiers traités
et dossiers en attente de traitement
Source : DGFiP
Pour l’avenir, même en tenant compte de la décroissance « naturelle » du flux de
nouveaux dossiers et de son tarissement définitif à compter de la clôture de la procédure au
31 décembre 2017, il faudra au moins un an pour traiter à la fois les dossiers non traités à
l’annonce de la clôture et ceux qui seront déposés entre cette annonce et la clôture effective.
4 037
11 869
23 612
12 878
25 017
19 570
0
5 000
10 000
15 000
20 000
25 000
30 000
35 000
40 000
45 000
50 000
fin 2014
fin 2015
fin 2016
au 30/06/17
dossiers traités
dossiers en attente de traitement
16 915
36 886
43 182
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82
C -
Plus de 7 Md€ encaissés à la fin de l’année 2016
1 -
Les recettes encaissées
a)
Le montant global
Les recettes encaissées par le STDR au cours des années 2014 à 2016 se sont élevées au
total à 7,04 Md€
50
. Ce total correspond à la somme de 2,36 Md€ d’encaissements spontanés et
de 4,7 Md€ d’encaissements sur prise en charge par le PRS de la DNVSF.
Le rendement du STDR a rapidement augmenté et a été supérieur aux prévisions initiales
en 2014 et en 2015, et encore légèrement en 2016.
L’objectif de recettes fixé pour 2017 en LFI a été de 2,4 Md€ alors même que de l’avis
des praticiens cet objectif était optimiste, les dossiers en cours de traitement ne devant pas
permettre d’atteindre ce montant. D’après une information reçue par la Cour dans le cadre de
la préparation de l’audit des finances publiques, la prévision de rendement pour 2017 a
d’ailleurs été revue à la baisse au printemps 2017 et ramenée à 1 Md€
51
. Les recettes pourraient
atteindre 1,2 Md€, selon l’évaluation donnée à la Cour en septembre. Les recettes pour 2018
n’ont pas fait encore l’objet d’une prévision formelle mais devraient se situer en dessous de
celles de 2017, autour d’1 Md€ au mieux.
Tableau n° 11 :
prévision et exécution du rendement du STDR de 2014 à 2017 (Md€)
2014
2015
2016
2017
Prévision LFI
1,1
2,2
2,4
2,4
Résultat
1,9
2,7
2,5
1 à 1,2
(prévision)
Source : Cour des comptes
b)
La ventilation des recettes
Sur l’ensemble de la période, les encaissements au titre de l’ISF ont été les plus
importants, avec 2,28 Md€ (32,4 % du total). Viennent ensuite l’impôt sur le revenu avec
1,80 Md€ (25,5 %) et les droits de mutation (donations et successions) pour 1,40 Md€ (19,9 %).
Les montants encaissés au titre de ces trois impôts incluent des pénalités (intérêts de retard et
majorations des droits) pour un montant total de 1,14 Md€, soit 16,2 % de l’ensemble des
encaissements.
Les prélèvement sociaux, reversés aux organismes de sécurité sociale, ont représenté
816 M€ (11,6 %). Enfin, les amendes pour non-déclaration des avoirs détenus à l’étranger se
sont élevées sur les trois années à 747 M€ (10,6 %).
50
Le STDR a également encaissé 116 M€ en 2013.
51
Cf. Cour des comptes,
Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
. La Documentation
française, juin 2017, 253 p., disponible sur www.ccomptes.fr
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
83
Tableau n° 12 :
recettes encaissées par le STDR de 2014 à 2016 (en M€)
Nature de l'impôt
Recettes
2014
Recettes
2015
Recettes
2016
Total
en %
Droits de mutation à titre gratuit
(donation et succession)
473
536
391
1 400
19,9 %
Impôt de solidarité sur la fortune
900
848
535
2 283
32,4 %
Impôt sur le revenu
296
671
831
1 797
25,5 %
Prélèvements sociaux
127
301
388
816
11,6 %
Amendes
118
298
331
747
10,6 %
Divers (taxe sur les métaux précieux, TVA ...)
-
0,2
0,2
0,4
0,0 %
Total
1 914
2 654
2 476
7 044
100,0 %
Note : les montants relatifs à chaque impôt incluent les droits, les intérêts de retard et les majorations
Source : DGFiP
La ventilation par impôts des recettes s’est modifiée au cours de la période : alors qu’en
2014, l’ISF représentait 47 % des encaissements, il n’en représente plus que 22 % en 2016.
Inversement, la part de l’impôt sur le revenu dans le total des recettes est passée de 15 % en
2014 à 34 % en 2016.
c)
La part croissante des sommes payées à l’issue de la transaction
Cette évolution est notamment liée à la procédure de régularisation qui comporte deux
paiements distincts : lors du dépôt du dossier, le contribuable doit payer les impôts auto-liquidés
(ISF, droits de mutations) ; après le traitement du dossier, le contribuable acquitte les impôts
liquidés par l’administration (principalement l’impôt sur le revenu, mais aussi les prélèvements
sociaux et les pénalités). En 2014, de nombreux dossiers ont été déposés mais peu de dossiers
avaient déjà été traités, d’où la part importante des encaissements liés aux dépôts de dossiers
(donc aux impôts auto-liquidés, ISF et droits de mutations). Les années suivantes, les
encaissements spontanés ont diminué fortement.
Corrélativement, avec l’augmentation du nombre de dossiers traités, la part dans le total
des encaissements des sommes réclamées par l’administration à l’issue du traitement des
dossiers – en particulier les recettes d’impôt sur le revenu et de pénalités – a progressé
52
. Cette
évolution a été accentuée en 2016 par la réduction du nombre de nouveaux dossiers déposés.
Globalement, la part des encaissements liés au dépôt des dossiers est passée de 53,5 % en 2014
à 36,4 % en 2015 puis à 14,0 % en 2016.
52
Les sommes réclamées par l’administration peuvent également inclure des droits au titre d’impôts auto-liquidés,
s’il convient de corriger et compléter les calculs des contribuables.
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84
Tableau n° 13 :
encaissements au dépôt des déclarations et après traitement des dossiers
(M€)
2014
2015
2016
au dépôt des
dossiers
1 023
53,5 %
965
36,4 %
348
14,0 %
après
traitement
des dossiers
891
46,5 %
1 688
63,6 %
2 128
86,0 %
Total
1 914
100,0 %
2 654
100,0%
2 476
100,0 %
Source
:
DGFiP
d)
L’augmentation de la part des pénalités
Pour la même raison, la part des encaissements relatifs à des pénalités (intérêts de retard,
majorations des impôts) et à des amendes, qui sont liquidées par l’administration, a augmenté
au cours du temps. Ainsi, en 2016, les pénalités représentaient 35,3 % des encaissements contre
seulement 14,5 % en 2014.
Tableau n° 14 :
part des pénalités et amendes dans le total des encaissements
2014
2015
2016
Total
14,5 %
27,9 %
35,3 %
Intérêts de retard et majorations des droits
8,3 %
16,7 %
21,9 %
Amendes
6,2 %
11,2 %
13,4 %
Source : DGFiP
2 -
Les remises transactionnelles
Les majorations de droits et les amendes infligées aux contribuables dans le cadre des
régularisations font l’objet d’une remise transactionnelle, selon les règles prévues par les
circulaires. Sur la période 2014-2016, les remises accordées ont représenté presque la moitié
(49,4 %) du montant initial des majorations et amendes. Sur les seules amendes, les remises
s’élèvent à 63,2 % du montant initial. Sur les majorations de droits, les remises représentent
entre 30 et 40 % des montants initiaux suivant les impôts (IR, ISF, droits de mutation).
Le taux moyen de 49,4 % est proche du taux des remises accordées dans le cadre de
contrôles fiscaux, qui est en moyenne légèrement supérieur à 50 % dans les transactions avant
mise en recouvrement, à l’issue des contrôles fiscaux externes et des contrôles sur pièces, et
plus faible que celui accordé pour les transactions après mise en recouvrement (autour de 70 %).
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UN FONCTIONNEMENT ORDONNÉ, DES RECETTES BUDGÉTAIRES SIGNIFICATIVES
85
Tableau n° 15 :
montant total des pénalités sur les années 2014-2016
avant et après transaction (M€)
53
NATURE DE
L'IMPOSITION
Majorations et
amendes avant
transaction
(1)
Remise accordée
dans le cadre de
la transaction
(2)
Majorations
et amendes
restant dues
(1)-(2)
Taux de
remise (%)
(2)/(1)
Mutations à titre
gratuit
278,3
110,7
167,7
39,8 %
ISF
726,6
221,7
504,9
30,5 %
Impôt sur le revenu
726,5
238,2
488,2
32,8 %
Amendes comptes
bancaires et trusts
2 047,1
1 294,7
752,4
63,2 %
Autres
0,2
0,1
0,1
40,8 %
Total
3 778,6
1 865,3
1 913,3
49,4 %
Source : DGFiP
En moyenne, après transaction, le montant des prélèvements fiscaux a représenté entre
25 et 28 % du montant des avoirs déclarés.
3 -
Un potentiel fiscal reconstitué non mesurable
Dans la mesure où les avoirs déclarés sont désormais connus, et où l’on peut supposer
qu’ils seront ultérieurement inclus, ainsi que les revenus qui en sont issus, dans les déclarations
des contribuables concernés, il est raisonnable de faire l’hypothèse que la régularisation des
avoirs, au-delà des recettes perçues immédiatement, engendre des recettes supplémentaires
futures à caractère pérenne. Il est toutefois impossible d’en approcher le montant, dans la
mesure où ces avoirs peuvent recevoir après régularisation des emplois variés : consommation,
investissement, placement selon divers canaux, donations, etc. Dès lors, aucune estimation
documentée ne peut être réalisée.
53
Les pénalités sur les prélèvements sociaux ne sont pas identifiées dans la comptabilité ; les remises sur les
pénalités ne concernent que les majorations des droits ; les montants présentés dans ce tableau portent sur les
sommes « prises en charge » par le comptable public, qui diffèrent légèrement des sommes encaissées.
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86
___________________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________________
La gestion de la procédure par le STDR est organisée de manière précise et fiabilisée,
sur les plans administratif et comptable. Les méthodes appliquées semblent de nature à garantir
l’homogénéité de traitement entre dossiers. Elles ont accordé une priorité au traitement des
dossiers à forts enjeux afin d’accélérer les rentrées fiscales dans un contexte de fortes
contraintes budgétaires.
Les données chiffrées disponibles attestent du succès de la procédure auprès des
contribuables, mesuré à l’aune du nombre de demandes déposées et du montant des avoirs
révélés.
La principale difficulté est le délai de traitement, surtout pour les dossiers à faible enjeu,
mais c’est la rançon de la priorité accordée au rendement budgétaire de la procédure. Elle ne
pourrait être palliée que par une hausse des effectifs du STDR difficile à réaliser dans un
contexte budgétaire contraint et qui risquerait de se faire au détriment des tâches de contrôle
fiscal. En tout état de cause ce retard dans le traitement des dossiers à faible enjeu ne suscite
aucune revendication de la part des contribuables concernés et n’a pas une incidence
significative sur le montant des recettes encaissées.
Les transactions conclues ont permis à l’État d’encaisser près de 8 Md€ à ce jour. Les
recettes budgétaires ont certes été minorées du montant des mesures transactionnelles.
Cependant ces atténuations ont été accordées à un taux qui n’est pas significativement différent
de celui constaté dans le cadre des transactions suite à contrôle fiscal. Leur montant peut être
analysé comme le prix du succès du dispositif et il peut être considéré qu’en l’absence de
procédure de régularisation l’engagement de procédures contentieuses, par définition plus
aléatoires et plus longues, n’aurait pas forcément permis de recueillir des recettes effectives
supérieures. Il est par définition impossible de disposer d’éléments contrefactuels pour
déterminer si un simple engagement d’exemption des éventuelles conséquences pénales liées à
la fraude fiscale, sans aménagement des pénalités, aurait eu un effet incitatif suffisant pour
amener les fraudeurs à révéler les avoirs non déclarés.
Les informations communiquées spontanément par les contribuables désireux de
bénéficier de cette possibilité de régularisation ne permettent cependant pas d’appréhender
l’ampleur ni les caractéristiques des avoirs qui restent dissimulés dont on peut soupçonner
qu’ils sont liés aux schémas de fraude les plus complexes.
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Chapitre III
Le STDR, une structure temporaire
dont la mission s’achève
La procédure de régularisation des avoirs non déclarés détenus à l'étranger n'a jamais eu
vocation à être pérenne, même si aucun terme n’avait été fixé initialement à la période pendant
laquelle les contribuables pourraient demander la régularisation de leur situation. Le
gouvernement en fonction jusqu’au 15 mai 2017 a préféré laisser au gouvernement suivant le
choix de décider de la clôture de la procédure. Le ministre chargé du budget a annoncé le
15 septembre que sa date était fixée au 31 décembre 2017. Ce calendrier va déterminer le
devenir du STDR, en fonction de considérations de gestion. Ces orientations s’inscrivent dans
le contexte de l’entrée en vigueur prochaine du mécanisme multilatéral d’échanges automatique
de données.
I -
Les orientations au terme de quatre années
de fonctionnement
A -
Un dispositif qui tend à s’éteindre de lui-même
La procédure de régularisation est un dispositif d’exception, par nature temporaire. Les
contribuables ont eu plus de quatre ans pour régulariser leur situation ce qui parait amplement
suffisant. Le dispositif s’essouffle : le nombre de nouveaux dossiers déposés est en nette
diminution, accentuée depuis le début de cette année. Les recettes budgétaires attendues sont
également fortement décroissantes comme le montrent les prévisions de l’administration
fiscale. Le fait que la part des recettes encaissées au dépôt des dossiers soit de plus en plus
réduite par rapport à celle encaissée lors du règlement est également symptomatique de la baisse
de régime du dispositif.
Qualitativement, même s’il est intrinsèquement impossible de le démontrer, il semble que
cette procédure ait été maintenant utilisée par les contribuables qui constituaient sa cible
implicite, majoritairement des fraudeurs passifs, soucieux de sortir d’une situation qui les
embarrassait ou les empêchait d’utiliser les fonds dont ils disposaient, et les fraudeurs actifs de
faible envergure, qui ont jugé les inconvénients de la fraude globalement supérieurs à ses
avantages. Il n’était pas attendu des fraudeurs invétérés, à grande échelle, recourant à des
montages sophistiqués, qu’ils aient recours à cette procédure ; ils ne paraissent pas l’avoir fait.
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COUR DES COMPTES
88
B -
L’impératif de ne pas nuire à la crédibilité
du nouveau mécanisme multilatéral
La généralisation prochaine des échanges automatiques s’accompagne d’une suppression
des possibilités de régularisation dans plusieurs pays. Les possibilités de régularisation sont
limitées en Allemagne depuis 2014. En Italie, le décret-loi n° 193/2016 n’autorise la réception
des demandes de régularisation que jusqu’au 31 juillet 2017. Au Royaume-Uni le dispositif
« Worldwide Disclosure Facility » doit expirer au 30 septembre 2018.
Le STDR n’a pas été formellement présenté comme un « dispositif de la dernière chance »
mais il doit bien être considéré et géré comme tel. À compter de la mise en oeuvre de l'échange
automatique d'information, rien ne justifierait que l'administration fiscale accepte de nouvelles
demandes de régularisation. Ce serait décrédibiliser le nouveau dispositif.
Le secrétaire d'État au Budget d’alors, M. Christian Eckert, a d’ailleurs déclaré le
21 juillet 2016 que le service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) n'avait pas
vocation à durer éternellement en précisant : « Une fois que nous aurons engagé l'échange
automatique avec 101 pays, c'est-à-dire au plus tard en 2018, je ne vois pas pourquoi nous
continuerions à accepter des nouveaux dossiers. Ceux qui ne seront pas venus avant et qui seront
rattrapés par la patrouille de l'échange automatique seront sanctionnés plus fortement. »
Le ministre de l’action et des comptes publics, en annonçant la suppression du dispositif
le 15 septembre 2017, l’a également justifiée par cet élément, qui « permettra à la France d’avoir
des moyens puissants pour détecter les fraudeurs ».
C -
La clôture de la procédure
Il était devenu d’autant plus urgent de prendre et de rendre publique une décision dans ce
sens qu’elle ne saurait avoir un effet immédiat sur le flux de nouveaux dossiers. Il convenait
d’abord de laisser un ultime délai aux contribuables, ainsi mis en mesure de choisir en
connaissance de cause de recourir ou non à ce dispositif, sans plus de possibilité de procrastiner.
Ensuite la clôture, même devenue définitive, aura par la force des choses un effet différé : les
contribuables peuvent formaliser leur volonté de régularisation par une simple lettre d’intention
qui doit être suivie dans les six mois du dépôt des déclarations rectificatives, à partir desquelles
peut être instruite la demande de régularisation. Il en résulte que des lettres d’intention pourront
être déposées jusqu’au 31 décembre et, compte tenu du délai de six mois, les dernières
déclarations rectificatives jusqu’au 30 juin 2018. Il est d’autant plus indispensable que cette
décision soit définitive et appliquée sans exception pour éviter toute acceptation tardive de
dossiers comme cela a été le cas après la fermeture officielle de la « cellule Woerth ».
La clôture de cette procédure ne privera naturellement pas les contribuables de la
possibilité de déposer à tout moment une déclaration rectificative. Cependant, ils ne
bénéficieront plus alors des conditions offertes dans le cadre de cette procédure et devraient
notamment se voir appliquer la pénalité de mauvaise foi de 40 %, sans préjudice d’éventuelles
poursuites pénales à l’initiative de l’administration fiscale.
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LE STDR, UNE STRUCTURE TEMPORAIRE DONT LA MISSION S’ACHÈVE
89
D -
L’extinction du STDR après traitement du stock de dossiers
Le STDR est loin d’avoir traité les dossiers déposés. Il avait traité au 31 décembre 2016
23 612 dossiers sur 43 182 dossiers complets et près de 50 000 demandes au total
(soit respectivement 55 % et 47 %).
Si le stock de dossiers complets restants à traiter, après un pic fin 2015 (25 017 au
31 décembre 2015 contre 12 878 au 31 décembre 2014) est redescendu à 19 570 au 31 décembre
2016 et à 15 029 au 31 août 2017, il reste important et n’inclut ni les déclarations d’intention
restant à convertir en dossiers complets, ni les demandes de régularisation à venir, qu’il est par
nature, impossible de prévoir de manière fiable.
Le traitement définitif de l'ensemble des dossiers actuellement en stock ne pourra pas
intervenir avant la fin de 2018. Ce stock devrait être accru du fait des dépôts « de la dernière
chance » lors du quatrième trimestre 2017. L’expérience acquise par le STDR dans le traitement
de ces dossiers fait qu’il sera plus expédient de lui confier jusqu’à son terme le règlement
définitif des dossiers en instance et à venir plutôt que de le renvoyer aux services classiques de
la DGFiP, quitte à moduler progressivement son format
Pour que cette opération se déroule en bon ordre et le plus rapidement possible, il faut
mettre en place un schéma d’extinction, avec un repli cadencé sur le STDR central et fermeture
échelonnée des pôles déconcentrés.
II -
La préparation à l’échange automatique d’informations
Tout en procédant à l’extinction de la procédure de régularisation, les services fiscaux
doivent d’ores et déjà planifier l’exploitation des données qu’ils vont recevoir via l’échange
automatique. Cette tâche s’impose d’autant plus que ce mécanisme ne sera pas d’emblée
pleinement opérationnel et que les données « brutes » reçues par ce moyen devront faire l’objet
d’actions de contrôle fiscal.
A -
Les limites du mécanisme et les difficultés à prévoir
1 -
Un dispositif non universel
Même si une centaine d’États sont désormais partie à l’accord multilatéral, les autres ne
participeront pas à l’échange automatique notamment ceux pour lesquels la législation ne
permet pas d'obtenir les informations bancaires. Aucun calendrier contraignant n’a été fixé pour
les pays en développement. Certains centres financiers ont subordonné leur adhésion à
l’adhésion des autres centres financiers. Certains pays préfèrent signer des accords bilatéraux.
Le fait de ne pas avoir adhéré au système multilatéral pourra néanmoins être un critère
d’inscription sur les listes des juridictions non coopératives publiées par le G 20 et l’OCDE.
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COUR DES COMPTES
90
2 -
Des disparités entre systèmes financiers et administrations fiscales
d’un État à l’autre
Les pays adhérents se trouvent dans des situations de départ très différentes. Par exemple,
les établissements financiers ne sont pas partout déjà collecteurs d’informations pour le fisc,
comme le sont, par exemple, les établissements français pour l’IFU
54
. En outre les systèmes
financiers sont inégalement concentrés d’un pays à l’autre : il l’est fortement en France où les
grands établissements ont déjà pris les dispositions nécessaires pour remplir leurs obligations ;
il l’est beaucoup moins dans d’autres pays y compris européens où de petits établissements
auront du mal à s’organiser et à réaliser les investissements notamment informatiques
nécessaires pour se mettre en conformité (
a fortiori
dans les pays dont le système financier
connait des difficultés).
Les administrations fiscales elles-mêmes doivent s’adapter. La DGFiP a reporté début
mai les tests prévus avec les établissements français.
3 -
Des incertitudes sur le contenu des informations
Même en laissant de côté la question de la bonne foi et de la bonne volonté effective des
acteurs du système, son fonctionnement peut se heurter à des obstacles pratiques.
a)
Un manque d’uniformité dans la présentation des données
Les informations en provenance de chaque pays seront structurées en fonction de la
législation du pays où elles sont récoltées, ce qui pourra les rendre plus difficilement lisibles
par les destinataires.
Il peut en résulter des erreurs : transmissions d’informations à plusieurs pays (avec le
risque d’impositions multiples), incompréhension des types de revenus mentionnés, apparences
de fraudes nées d’erreurs de présentation ou d’interprétation des informations, « multi-
reporting » contradictoires (diverses institutions financières d’un même pays rapportant la
même situation mais de façons divergentes), etc.
54
L'imprimé fiscal unique (IFU) sert à récapituler l'ensemble des revenus de capitaux mobiliers versés et
l'ensemble des opérations sur valeur mobilières effectuées par les établissements payeurs sur l'année civile.
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LE STDR, UNE STRUCTURE TEMPORAIRE DONT LA MISSION S’ACHÈVE
91
b)
Les problèmes d’identification du bénéficiaire effectif
L’identification du bénéficiaire effectif des avoirs déclarés à travers ce système est perçue
par les praticiens comme le problème le plus ardu auquel il pourra se heurter. Certes les titulaires
d’avoirs sont désormais tenus de déclarer outre leur identité et leur date de naissance, le numéro
d'identification fiscale attribué par l'État de résidence fiscale. Des dispositifs ont été mis en
place à l’échelle européenne pour permettre la vérification de ces identifiants fiscaux
55
mais ils
comportent des limites. Cette obligation ne présente donc pas en l’état de garantie absolue.
Surtout les difficultés les plus grandes portent sur les personnes morales et leurs ayants-droit.
c)
Des risques de mauvaise volonté
Alors même que le système multilatéral doit commencer à fonctionner, des résistances et
manoeuvres d’obstruction se font jour. Ainsi les banques suisses, représentées par l’ABPS
(Association des banques privées suisses), tout en affirmant qu’elles sont « pleinement
déterminées » à mettre en oeuvre ce mécanisme, plaident pour l’introduction d’une clause de
déclenchement, qui subordonnerait la transmission des informations à la satisfaction de deux
critères, la « réciprocité » et la « confidentialité ». Au cas où les autorités suisses jugeraient que
ces critères ne sont pas remplis, elles pourraient utiliser les dispositions de l’accord permettant
la suspension de l’échange.
B -
Les mesures à prendre par l’administration fiscale
Il n’est donc pas avéré que ce mécanisme produise immédiatement tous les résultats qui
en sont attendus. Même si la procédure de régularisation a contribué à