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FINANCES ET COMPTES PUBLICS
LA SÉCURITÉ
SOCIALE
Rapport sur l’application des lois
de financement de la sécurité sociale
Synthèse
Septembre 2017
2
g
AVERTISSEMENT
Le présent document est destiné à faciliter la lecture du rapport de
la Cour des comptes qui, seul, engage la juridiction. Les réponses
des administrations et des organismes intéressés sont insérées
dans le rapport de la Cour
.
L’ordre des chapitres résumés correspond à celui du rapport.
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
3
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Sommaire
Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8
Première partie
Assurer un retour durable à l’équilibre financier
et mettre fin à l’endettement social
1
La situation et les perspectives financières de la sécurité
sociale : un retour à l’équilibre à accélérer
11
2
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie :
en 2016, un objectif atteint au prix de nombreux biais ;
en 2017 et au-delà, des économies effectives à rechercher
et à accentuer
17
3
Les tableaux d’équilibre et le tableau patrimonial de
la sécurité sociale relatifs à l’exercice 2016 :
avis sur la cohérence
23
4
Le pilotage de la trajectoire financière de la sécurité
sociale : créer les conditions d’un équilibre durable
27
Deuxième partie
Réorganiser l’offre de soins
5
La médecine libérale de spécialité : contenir la dynamique
des dépenses, améliorer l’accès aux soins
33
6
Les activités chirurgicales : restructurer l’offre de soins
pour mieux assurer la qualité des prises en charge .
39
4
Sommaire
7
La télémédecine : une stratégie cohérente à mettre
en œuvre .
43
Troisième partie
Renforcer la maîtrise des coûts du médicament
8
La fixation du prix des médicaments : des résultats significatifs,
des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité,
un cadre d’action à fortement rééquilibrer .
49
9
Le coût de distribution des médicaments : une dépense
importante, des gains d’efficience nécessaires .
53
Quatrième partie
Réformer les aides aux familles
10
Les soutiens fiscaux et sociaux aux familles en France :
une mise en perspective internationale .
61
11
Les réformes récentes des prestations familiales et de la
fiscalité des familles : des transferts massifs, des questions
en suspens .
65
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
5
Cinquième partie
Améliorer les performances de la gestion de la sécurité sociale
12
Les établissements de santé et médico-sociaux du régime
général d’assurance maladie : un impératif d’équilibre financier,
une stratégie à refonder
73
13
Les retraites versées à des résidents à l’étranger :
des risques spécifiques insuffisamment pris en compte,
des outils à adapter
77
Annexe
:
le
suivi
des
recommandations
formulées
par la Cour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Sommaire
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
7
Présentation
En 2016, le déficit de la sécurité sociale a poursuivi le mouvement de baisse
progressive engagé après le niveau historiquement élevé qu’il avait atteint en
2010 (29,8 Md€) dans le contexte de la crise économique : le déficit agrégé de
l’ensemble des régimes obligatoires de sécurité sociale et du Fonds de solidarité
vieillesse (FSV) s’est établi à 7 Md€, contre 10,3 Md€ en 2015, en revenant ainsi au
niveau d’avant la crise économique .
Mais ces résultats apparaissent encore fragiles et incomplets .
En effet, la situation financière de la sécurité sociale n’est pas encore assainie . Le
rééquilibrage de ses comptes reste lent . La diminution effective des déficits en
2016 s’avère moins importante qu’affiché du fait de la prise en compte, à tort,
d’une recette purement comptable . Leur composante structurelle en représente
encore plus de la moitié . Si le reflux de la dette sociale, amorcé en 2015, s’est
confirmé, celle-ci continue à s’inscrire à un niveau élevé (151,2 Md€ fin 2016,
contre 156,4 Md€ fin 2015) et demeure pour partie dangereusement exposée au
risque d’une remontée des taux d’intérêt .
Le décalage annoncé d’un an, à 2020 désormais, de l’objectif du retour de la
sécurité sociale à l’équilibre diffère une nouvelle fois cette échéance essentielle .
Dans le prolongement de l’audit des finances publiques, prises dans leur ensemble
(État, collectivités locales, administrations sociales), auquel elle a procédé en mai
dernier, comme de ses rapports des années antérieures sur la sécurité sociale, la
Cour s’est attachée à approfondir la trajectoire financière de celle-ci à l’horizon
2020 .
À cette fin, elle a analysé dans différents champs de dépenses les progrès
réalisés, mais aussi les voies et moyens possibles pour répondre à l’exigence d’un
rééquilibrage à la fois plus rapide et pérenne des comptes sociaux .
Après plus d’un quart de siècle de déficits continus - une génération entière -,
le retour à l’équilibre de l’assurance maladie (4,8 Md€ de déficit en 2016 sur
un plan purement comptable, mais 5,5 Md€ en réalité), constitue une priorité
majeure . L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), entaché
dans sa construction d’éléments d’insincérité, n’est respecté qu’au prix d’artifices
croissants qui risquent de le priver de sa signification . À court terme, les facteurs
de hausse de dépenses se cumulent .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
1
Cour des comptes,
La situation et les perspectives des finances publiques
, Audit, juin 2017, La
Documentation française, disponible sur www .ccomptes .fr
8
Présentation
Un effort accru de maîtrise des dépenses de santé est possible sans se traduire
par une érosion de leur prise en charge par l’assurance maladie . L’action conduite
en matière de fixation des prix de médicaments l’illustre, même si des marges
importantes demeurent encore . L’organisation des soins en ville et en établissement
et les modalités de fixation des prix et des tarifs des actes, prestations et biens de
santé recèlent d’importants leviers d’efficience encore insuffisamment mobilisés,
comme l’illustrent les analyses consacrées à la médecine de spécialité, à l’offre
de soins chirurgicaux ou encore à la distribution du médicament . Des
réformes
structurelles du système de soins s’imposent en particulier pour remédier à
des inégalités territoriales et financières qui se creusent et compromettent
l’égal accès à des soins de qualité pour tous . De ce point de vue, le développement
de la télémédecine apparaît comme un levier majeur de progrès, mais suppose de
mettre en œuvre une stratégie plus cohérente et ambitieuse que cela n’est le cas
aujourd’hui .
Comme pour les retraites, examinées dans le rapport de l’an dernier, l’analyse
des récentes réformes des aides aux familles, accompagnée d’une mise en
perspective internationale comparée des axes et des résultats de la politique
familiale de notre pays par rapport à ses principaux voisins, témoigne de sa
capacité à opérer des choix forts dans l’organisation de la protection sociale,
même s’ils appelleront nécessairement à leur tour d’autres évolutions . Tel est, à
échéance plus rapprochée que prévu, le cas des retraites, comme l’avait anticipé
la Cour, du fait de la dégradation des projections démographiques .
Des efforts immédiats d’économie sont ainsi à mettre en œuvre en matière
d’assurance maladie et de retraites, mais aussi de gestion plus efficiente des
organismes, comme en témoignent les problématiques posées par l’offre
de soins de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés
(CNAMTS), ou encore la mésestimation des risques et des enjeux liés au versement
de pensions à des résidents à l’étranger,
afin d’accélérer le retour effectif de
la sécurité sociale à l’équilibre .
Mais au-delà, c’est un nouveau cadre de responsabilité qu’il importe de
définir pour créer les conditions d’un équilibre pérenne, proscrire la formation
de nouveaux déficits structurels et la résurgence d’un endettement social dont
l’extinction reste pour partie à organiser . La Cour en propose les modalités, à
partir d’une analyse rétrospective des déterminants du déficit persistant de la
sécurité sociale depuis 2001, des limites des outils utilisés pour son redressement
et des difficultés qui demeurent .
C’est ainsi que pourra être durablement préservé le haut degré de protection
sociale que connaît notre pays .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Première partie
Assurer un retour durable
à l’équilibre financier et mettre fin
à l’endettement social
11
1
La situation et les perspectives
financières de la sécurité sociale :
un retour à l’équilibre à accélérer
En 2016, un déficit qui se réduit
à nouveau et se concentre
de plus en plus sur l’assurance
maladie
Le déficit des régimes obligatoires de
base de sécurité sociale et du fonds de
solidarité vieillesse (FSV) a poursuivi
le mouvement de baisse progressive
engagé après le niveau historique-
ment élevé qu’il avait atteint en 2010
(29,8 Md€) lors de la crise économique .
Il s’est ainsi établi à 7 Md€, contre
10,3 Md€ en 2015 .
Dans un contexte économique plus
favorable, le déficit du régime général
et du FSV, qui constitue l’essentiel des
enjeux financiers de la sécurité sociale,
a été ramené pour sa part à 7,8 Md€,
contre 10,8 Md€ en 2015, soit une
baisse de 3 Md€, plus forte en appa-
rence qu’en 2015 (2,4 Md€) .
Évolution du déficit agrégé des régimes
obligatoires de base et du FSV (2008-2016)
Source : Cour des comptes d’après les données
du rapport de la CCSS de juillet 2017.
Ces résultats traduisent des évolutions
positives :
- le déficit est devenu pour la première
fois inférieur à celui de l’avant-crise
financière (en 2008, il s’était élevé à
8,2 Md€) ;
- la baisse du déficit (-0,1 point de PIB)
a une origine structurelle, indépen-
dante de la conjoncture économique ;
- contrairement aux années précé-
dentes, la réduction du déficit a été
obtenue sans mesure d’augmentation
nette des recettes ;
- toutes les branches ainsi que le FSV
ont vu leur solde s’améliorer .
D’autres constats moins favorables
doivent néanmoins être soulignés :
- le déficit est minoré par un produit
exceptionnel de contribution sociale
généralisée (740  M€), dépourvu de
base juridique, qui n’aurait pas dû
être inscrit en recette de la branche
maladie . Corrigé de cette écriture,
il atteint en réalité 8,5 Md€, soit une
diminution de 2,3  Md€, du même
ordre en définitive qu’en 2015 ;
- le déficit conserve toujours une
importante composante structurelle :
il aurait fallu de l’ordre de 4 Md€ de
mesures supplémentaires de redres-
sement pour parvenir à l’équilibre
structurel en 2016 ;
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
12
- comme c’est le cas depuis 2014,
des recettes exceptionnelles, non
reconductibles, tiennent une place
importante dans la réduction du déficit .
Plus encore qu’en 2015, le déséquilibre
de la sécurité sociale se concentre sur
l’assurance maladie, dont le déficit
(5,5 Md€ hors produit exceptionnel
de CSG) représente à lui seul plus
que celui de l’ensemble du régime
général et près  des  deux tiers du déficit
agrégé du régime général et du FSV . Il ne
diminue pratiquement pas par rapport
à 2015 (5,8 Md€) .
Considérée
dans
l’ensemble
de
ses
composantes
de
financement,
l’assurance vieillesse des salariés du
secteur privé reste en déséquilibre
prononcé,
bien
qu’en
réduction
(-2,8 Md€ contre -4,2 Md€ en 2015) . En
effet, si la branche vieillesse apparaît
en excédent (de 0,9 Md€), ce dernier
s’accompagne de la persistance d’un
lourd déficit du FSV (3,6 Md€) .
Les dépenses totales ont augmenté à
périmètre constant au même rythme
que le PIB en valeur (+0,6 %), mais
sont inégalement tenues :
- celles de la branche famille ont stagné
à périmètre constant en raison non
seulement de l’absence de revalo-
risation
des
prestations familiales,
compte tenu de la faible inflation, mais
aussi des réformes en cours (effet
en année pleine de la modulation
au 1
er
  juillet 2015 des allocations
familiales en fonction des revenus,
réforme de la prestation d’accueil du
jeune enfant) ;
La situation et les perspectives financières
de la sécurité sociale : un retour à l’équilibre à accélérer
- compte tenu notamment de l’absence
de revalorisation des prestations, les
dépenses de la branche vieillesse ont
crû modérément (+2,2 %) ;
- le respect du taux de progression
de l’objectif national de dépenses
d’assurance maladie (ONDAM), soit
+1,75  % arrondis à +1,8 %, a été
assuré en cours d’année non seulement
par une régulation des dotations aux
établissements de santé et médico-
sociaux, mais aussi par des minorations
de dépenses, reportées sur des orga-
nismes tiers à l’assurance maladie (à
hauteur de 0,5 Md€) sans réduire le
déficit des administrations publiques
prises dans leur ensemble, ainsi que
sur l’année suivante . En réalité, la
hausse des dépenses relevant de
l’ONDAM a atteint +2,2 % .
En 2017, une baisse du déficit qui
se poursuit, mais qui pourrait être
plus lente qu’initialement prévu
La loi de financement pour 2017
a prévu une réduction du déficit du
régime général et du FSV à 4,1 Md€
en 2017, suivie d’un quasi-équilibre
en 2018 (-0,5 Md€), puis d’excédents
croissants en 2019 (+3,3 Md€) et en
2020 (+7,7 Md€) .
Cependant,
selon
les
projections
disponibles à l’été, établies sur la
base des hypothèses économiques
du programme de stabilité d’avril
2017, le déficit pour 2017, tout en
continuant à se réduire, se creu-
serait par rapport à la prévision
pour atteindre 5,5 Md€, au lieu de
4,1 Md€ .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
13
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
La situation et les perspectives financières
de la sécurité sociale : un retour à l’équilibre à accélérer
Le déficit de l’assurance maladie
augmenterait de 1,5 Md€ par rapport
à la prévision initiale, alors que cette
branche
bénéficie
d’importants
transferts de recettes depuis la
branche vieillesse . Sans ces derniers,
le déficit de l’assurance maladie ne
se réduirait pas par rapport à 2016
(de 0,7 Md€), mais augmenterait de
près de 1 Md€ .
La réduction du déficit de la sécurité
sociale moindre que prévu initialement
serait imputable aux recettes : effet base
2016 défavorable, progression spontanée
plus lente, effet net limité des mesures
nouvelles . Au regard des dernières
tendances, la croissance de la masse
salariale pourrait cependant être
meilleure
que
prévu
et
le
déficit
effectif être proche de la prévision
initiale (4,1 Md€) .
À nouveau, les recettes incorporent
un important volant de recettes
exceptionnelles,
non
reconductibles
(1,4 Md€), dont 876 M€ provenant
de réserves du FSV présentés à tort
comme devant constituer la dotation
initiale du nouveau fonds de finance-
ment de l’innovation pharmaceutique,
alors qu’ils sont en réalité affectés à
la réduction du déficit de l’assurance
maladie .
La progression des dépenses en 2017
(+1,8 % à périmètre constant) serait
pratiquement en ligne avec les prévi-
sions initiales et inférieure à celle du PIB
(+2,4 % en valeur), mais avec des
situations différenciées  : stagnation
pour les prestations familiales (comme
en 2016), ralentissement de la hausse
des prestations vieillesse (+1,7 % contre
+2,2 % en 2016, compte tenu de
l’impact croissant de la réforme des
retraites de 2010), mais accélération
pour les dépenses d’assurance maladie .
En effet, le taux de progression de
l’ONDAM a été relevé à +2,1 %, en
rupture par rapport à la baisse de
ce taux des années précédentes . En
outre, des biais de construction et
de présentation minorent la hausse
des dépenses entrant dans le champ
de l’ONDAM, qui atteint en réalité
+2,4 % . Les dépenses d’assurance
maladie sont notamment affectées
par la nouvelle convention médicale et
par les augmentations de rémunérations
hospitalières .
Un objectif de retour
à l’équilibre repoussé à 2020
sur lequel pèsent des risques
significatifs
Sur
la
base
des
hypothèses
du
programme de stabilité d’avril 2017, à
considérer avec prudence, la trajectoire
financière de la sécurité sociale pourrait
se dégrader à partir de 2018, sous l’effet
de la révision à la baisse des prévisions
de croissance de la masse salariale
(+2,9 % contre +3,6 %) .
La dynamique qui reste vive des
dépenses d’assurance maladie et la
reprise de la progression des dépenses
de retraite font peser des risques
supplémentaires
importants
sur
le retour à l’équilibre des comptes,
repoussé désormais de 2019 à 2020
par le Gouvernement .
14
La situation et les perspectives financières
de la sécurité sociale : un retour à l’équilibre à accélérer
La trajectoire pluriannuelle associée
à la loi de financement pour 2017
prévoit une progression de l’ONDAM
de +2 % en 2018 et les années suivantes .
500  M€ d’économies supplémentaires
seraient nécessaires en 2018 pour
garder le cap d’une hausse limitée à
+2 % . Si le taux de progression était
relevé à +2,3 % en 2018, le solde de
l’assurance maladie se dégraderait
de 1,7 Md€ en 2020 toutes choses
égales par ailleurs .
Le dernier rapport du Conseil d’orien-
tation des retraites (COR) indique que
l’augmentation des pensions de retraite
va s’accélérer à partir de 2018 (+2,1 %
en volume, contre +1,7 % en 2017) . Or, la
loi de financement de la sécurité sociale
pour 2017 occulte la dégradation
prévisible du solde de l’assurance
vieillesse qui en résulte, en intégrant à
la prévision des transferts implicites de
recettes des trois autres branches qui
n’ont pas été portés à la connaissance
du Parlement .
Une dette sociale qui a commencé
à refluer en 2015, mais dont
l’amortissement complet est à
organiser de manière pressante
En 2016, la dette sociale a confirmé
le mouvement de reflux entamé en
2015 : elle atteint 151,1 Md€ fin 2016
2
,
soit une baisse de 5,3 Md€ par rapport
à fin 2015 .
Pour
l’avenir,
la
détérioration des
soldes prévisionnels du régime général
et du FSV viendrait limiter l’ampleur
de la réduction de la dette sociale .
Fin 2019, l’Agence centrale des orga-
nismes de sécurité sociale (ACOSS)
pourrait ainsi porter, toutes choses
égales par ailleurs, de l’ordre de 25 Md€
de dette à court terme exposée à la
remontée prévisible des taux d’intérêt,
faute à ce stade de toute perspective
d’amortissement . En effet, le plafond
de reprise par la CADES est atteint
après le transfert intervenu en 2016
(pour 23,6 Md€) . Il importe ainsi de
réduire le plus possible l’accumulation
de nouveaux déficits à l’ACOSS au-delà
de 2017 en revenant plus rapidement
à l’équilibre par des économies
supplémentaires sur les dépenses
d’assurance maladie et d’assurance
vieillesse .
Il convient aussi d’organiser l’amortis-
sement de la dette sociale maintenue à
l’ACOSS, à l’échéance de 2024 aujourd’hui
prévue pour l’extinction de la CADES .
Dans le cadre organique en vigueur, cet
objectif nécessite soit d’accumuler des
excédents futurs, soit d’augmenter les
ressources affectées à la CADES . À titre
d’illustration, l’amortissement à fin 2024
des seules dettes maladie portées par
l’ACOSS fin 2017 nécessiterait de relever
de 0,5 % à 0,65 % le taux de la CRDS
dès 2018 . Les dettes de la branche
vieillesse et du FSV pourraient, quant
à elles, être amorties sur les réserves
libres d’affectation du Fonds de réserve
des retraites .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
2
Hors dettes de certains régimes de retraite (mines, exploitants agricoles) .
15
Recommandations
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
1. 
présenter en annexe aux projets de
loi de financement de la sécurité sociale
les hypothèses détaillées sous-jacentes
à la trajectoire pluriannuelle de solde
des branches des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale et du fonds
de solidarité vieillesse et notamment
les transferts entre branches et entre
organismes ;
2. 
définir une trajectoire financière
des régimes de base de sécurité sociale
et du FSV qui permette d’assurer
leur équilibre effectif avant 2020,
à périmètre constant de recettes et
de dépenses ;
3. 
intensifier en conséquence l’effort
de maîtrise des dépenses d’assurance
maladie au moyen de mesures struc-
turelles telles que celles recomman-
dées dans les différents chapitres du
présent rapport, afin de réduire plus
fortement la progression effective des
dépenses de l’ONDAM, à périmètre
constant, sur les trois prochaines
années ;
4.
  au regard de la dégradation
tendancielle
des
soldes
de
la
branche vieillesse et du FSV, définir
rapidement les mesures de redres-
sement nécessaires à l’équilibre
financier du régime de retraite de
base des salariés du secteur privé,
FSV compris ;
5.
  définir sans délai dans le cadre
d’un schéma global pluriannuel les
modalités
permettant
d’assurer
l’amortissement complet d’ici à 2024
des déficits portés par l’ACOSS fin
2017 et de ceux qui s’accumuleront
d’ici fin 2019 .
La situation et les perspectives financières
de la sécurité sociale : un retour à l’équilibre à accélérer
17
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
L’objectif
national
de
dépenses
d’assurance maladie (ONDAM) couvre
près de 80 % des dépenses de santé .
Sans constituer un plafond au sens
juridique, il est le principal instrument
d’encadrement et de pilotage de ces
dépenses . Il est assorti de mécanismes
de régulation infra-annuelle visant à
en assurer le respect (mises en réserve
de certaines dépenses), et fait l’objet
d’un suivi régulier dans le cadre d’un
comité
d’alerte .
Son
resserrement
progressif depuis 2010 a traduit un
effort de maîtrise d’autant plus
marqué qu’il a toujours été respecté
depuis lors, contrairement à la période
précédente .
La Cour a toutefois constaté que
si l’ONDAM 2016 a été respecté, et
qu’il en irait probablement aussi de
l’ONDAM 2017, c’est au prix de biais
de construction et de présentation qui
en affectent la sincérité . Des économies
effectives sont à rechercher et à accentuer
afin de réduire le déficit de l’assurance
maladie (4,8 Md€ en 2016) .
La construction de l’ONDAM
2016 : une décélération
artificielle de la hausse des
dépenses par des biais de
construction et de présentation
Dans la loi de financement pour 2016, la
progression de l’ONDAM en 2016 était
affichée à un niveau inférieur à 2 %, soit
+1,75 %, ce qui semblait marquer une
inflexion significative . Toutefois, cette
progression
était
artificiellement
minorée par deux « économies  »
correspondant
en
réalité
à
des
réductions du périmètre des dépenses
prises en compte :
- réforme des modalités de prise en
charge des cotisations des praticiens
et auxiliaires médicaux, avec un impact
nul sur le solde de l’assurance maladie ;
-
prélèvements
sur
les
réserves
d’organismes
tiers
à
l’assurance
maladie,
notamment
la Caisse natio-
nale de solidarité pour l’autonomie
(CNSA), pour financer une part accrue
des
dotations
aux
établissements
médico-sociaux, avec un impact nul sur
le solde des administrations publiques .
L’objectif national de dépenses
d’assurance maladie : en 2016,
un objectif atteint au prix de nombreux
biais ; en 2017 et au-delà, des économies
effectives à rechercher et à accentuer
2
18
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : en 2016,
un objectif atteint au prix de nombreux biais ; en 2017 et au-delà,
des économies effectives à rechercher et à accentuer
Quand on neutralise ces deux éléments,
l’ONDAM augmentait en réalité de
+1,9  %, soit un niveau voisin de celui
de 2015 (+2  %) . Compte tenu d’un
tendanciel d’évolution des dépenses
moins dynamique qu’en 2015, l’effort
de maîtrise des dépenses s’est relâché .
Aucun
progrès
significatif
n’est
intervenu par ailleurs dans la méthode
de
construction
de
l’ONDAM .
Son
périmètre reste incomplet . L’évaluation
des tendanciels de dépenses et des
économies demeure affectée par de
fortes imprécisions .
L’exécution de l’ONDAM 2016 : un
objectif en apparence respecté
grâce à de nombreux biais
L’ONDAM a été respecté pour la
7
ème
  année consécutive : selon le
constat provisoire
3
de juin 2017, les
dépenses
ont
atteint
près
de
185,2 Md€, comme prévu par la loi de
financement pour 2016 et par la
prévision 2016 rectifiée de la loi
de financement pour 2017 .
L’écart négatif d’exécution (27 M€) par
rapport à la prévision est cependant le
plus faible depuis 2010 . L’exécution de
l’ONDAM connaît de fait une tension
croissante .
Les dépenses prises en compte au titre
de l’ONDAM 2016 ont augmenté de
+1,847 % par rapport à 2015, arrondi
à +1,8 %, au lieu de +1,75 % comme
prévu . L’application de ce taux au
montant définitif des dépenses 2015
a ménagé une marge d’augmentation
des dépenses proche de 0,2 Md€ .
Le respect de l’ONDAM a été obtenu
non seulement par des mesures de
régulation des dépenses (797 M€
contre 736 M€ en 2015), concentrées
sur les dotations aux établissements
publics de santé et aux établissements
médico-sociaux, mais aussi par quatre
procédés qui ont minoré les dépenses,
en les reportant sur d’autres financeurs
ou sur l’année suivante :
- mobilisation accrue des réserves de
la CNSA (200 M€ contre 160 M€ dans
l’ONDAM 2016 initial et 192  M€
en 2015) pour compenser une
partie des réductions de dotations aux
établissements médico-sociaux ;
-  prélèvements (300 M€) sur les
réserves de divers organismes
hospitaliers pour compenser la
quasi-suppression des dotations
de l’assurance maladie au fonds de
modernisation des établissements
de santé publics et privés ;
- absence de rattachement à 2016 de
certaines dépenses, ainsi reportées
sur 2017 (une partie des dotations
aux établissements de santé au
titre des molécules sous ou post
autorisation temporaire d’utilisation
pour 180 M€ contre 95 M€ en 2015) ;
-  réduction temporaire de la valeur
des actes de biologie médicale de
la mi-novembre à la fin décembre
2016, dont l’économie sur 2016
(35 M€) est compensée par des aug-
mentations futures de dépenses .
En réalité, les dépenses entrant dans
le champ de l’ONDAM ont ainsi
augmenté de +2,2 % .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
3
Dans l’attente du dénouement des provisions pour charges de prestations et de la fixation du
montant des remises sur le prix des médicaments versées par les entreprises pharmaceutiques .
19
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : en 2016,
un objectif atteint au prix de nombreux biais ; en 2017 et au-delà,
des économies effectives à rechercher et à accentuer
Des dépenses de soins de ville
qui excédent de plus en plus
l’objectif, une augmentation
sensible des dépenses relatives
aux établissements tarifés
à l’activité
À périmètre constant, la croissance
des dépenses de soins de ville s’est
fortement accélérée en 2016 (+2,8 %
contre +2,3 % en 2015) . Leur montant
a excédé de 0,8 Md€ (soit 0,9 %) la
prévision initiale .
À l’exception notable des médicaments,
dont la dépense nette de remises
conventionnelles a baissé (-0,4  %), la
plupart des postes de dépenses ont
vu leur croissance s’accélérer, ce qui
souligne les limites de la maîtrise
médicalisée des dépenses : +5,6 % pour
les dispositifs médicaux (contre +4,7  %
en 2015), +4,5 % pour les transports
(+4,4 %), +4,5 % pour les honoraires
des
masseurs-kinésithérapeutes
(+2,8 %), +4,2 % pour les honoraires
des
médecins
spécialistes
(+3
%),
+4,1 % pour les indemnités journalières
(+3,3 %) et +2,2 % pour les dépenses de
biologie, en principe encadrées par une
enveloppe convenue avec la profession
(+0,1 %) . Celles de soins infirmiers ont à
nouveau fortement augmenté (+4,3 %
après +5 % en 2015) .
À
champ
constant,
les
dépenses
relatives aux établissements de santé ont
augmenté à un rythme proche de celui
de 2015 (+1,9 % contre +2 %) et ont
excédé la prévision initiale de près
de
0,2
Md€ .
L’augmentation
des
dépenses a été tirée par la reprise des
séjours hospitaliers facturés par les
établissements privés à but lucratif
(+1,8 % après une baisse de -0,2 % en
2015) et par la hausse des dotations
de missions d’intérêt général (+4,9 %
contre +3,9 % pour les établissements
publics et privés non lucratifs) .
En 2017, un objectif rehaussé,
de nouveaux biais de construction
et des risques en exécution
La loi de financement pour 2017 a
fixé à 190,7 Md€ l’ONDAM 2017 . Le
taux de progression des dépenses
a été rehaussé à +2,1 %, ce qui
marque une rupture par rapport aux
années récentes : entre 2013 et 2016,
l’objectif
avait
été
graduellement
abaissé de +2,7 % à +1,75 % .
La
hausse
des
dépenses
est
notamment tirée par de nouvelles
mesures relatives aux soins de ville
(convention médicale d’août 2016)
et hospitaliers (hausse de la valeur
du point dans la fonction publique,
revalorisation des carrières des agents
hospitaliers,
mesures
d’attractivité
pour certains corps) .
Bien que relevé, l’ONDAM 2017 est en
réalité sous-estimé . Quand on corrige
ses biais de construction, l’augmentation
prévue des dépenses atteint +2,4  % .
Leur hausse réelle est minorée par
trois mesures de périmètre :
- poursuite de la réforme des prises en
charge de cotisations des praticiens
et auxiliaires médicaux (270 M€) ;
-  nouveaux prélèvements sur les
réserves de la CNSA (230 M€) et
de divers organismes hospitaliers
(220 M€) ;
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
20
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : en 2016,
un objectif atteint au prix de nombreux biais ; en 2017 et au-delà,
des économies effectives à rechercher et à accentuer
-  prélèvement sur les réserves du
fonds de financement de l’innovation
pharmaceutique (FFIP), créé par la loi
de financement pour 2017 (220 M€) .
Ce fonds a pour objet affiché de lisser
sur plusieurs années les dépenses de
médicaments innovants et coûteux,
mais constitue en réalité une sortie
de certaines dépenses du périmètre
de l’ONDAM, et non une économie .
En outre, il n’est pas effectivement
financé . Il est indispensable de
le supprimer et de réintégrer à
l’ONDAM la totalité des dépenses
pour en assurer un pilotage cohérent .
Ainsi artificiellement minoré, l’ONDAM
2017
serait
respecté
selon
les
dernières prévisions . La vive dynamique
des dépenses de soins de ville appelle
néanmoins une vigilance soutenue .
Une forte tension sur la construction
des ONDAM 2018 et suivants,
la nécessité d’objectifs rigoureux
de dépenses
Des
dépenses
supplémentaires,
pouvant être évaluées à au moins
0,9 Md€, pèsent sur la construction
et l’exécution de l’ONDAM 2018,
au titre des soins de ville (montée en
charge de la convention médicale,
avenant 11 à la convention avec les
pharmaciens, négociations en cours
avec les chirurgiens-dentistes et les
infirmiers)
et
des
établissements
de santé (mesures de revalorisation des
carrières) . Elles auront des conséquences
également les années suivantes .
Le respect effectif du taux de progres-
sion de +2 % retenu pour les années
2018 et suivantes dans le programme
de stabilité 2017-2020 nécessite de
rendre beaucoup plus rigoureuses,
stables et transparentes les moda-
lités de construction et d’exécution
de l’ONDAM .
Alors que le déficit de l’assurance
maladie demeure très lourd (4,8 Md€
en 2016), les efforts de maîtrise des
dépenses doivent être renforcés en
mobilisant les marges d’efficience
dont recèle l’organisation des soins
en ville et en établissement de santé .
Il est essentiel dans ce contexte de
mettre fin aux biais de construction
et de présentation qui affectent de
manière croissante la sincérité de
l’ONDAM .
En outre, des instruments de régulation
des dépenses plus diversifiés et au champ
plus large devraient être mis en œuvre .
Ainsi, le seuil d’alerte à partir duquel des
mesures supplémentaires d’économies
doivent être adoptées devrait être à
nouveau abaissé, le rôle du comité
d’alerte renforcé et des mesures de
régulation infra-annuelle des dépenses
être également appliquées aux soins
de ville en cas de dépassement de
l’enveloppe prévisionnelle de dépenses
(mise en réserve d’une partie des
hausses tarifaires, diminution de tarifs) .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
21
Recommandations
6.
 
formaliser
dans
l’annexe
du
projet de loi de financement relative
à l’ONDAM un cadre de référence
opposable
des
modalités
de
construction
et
de
révision
de
l’ONDAM, comportant notamment
une méthodologie de traitement
des
mesures
de
périmètre,
des
économies et des conditions de
recours
aux
arrêtés
tardifs
(recommandation réitérée) ;
7. 
 abaisser le seuil d’alerte à 0,2 % du
total des dépenses prévisionnelles,
saisir le comité d’alerte en cas de
risque d’insuffisance des mises en
réserve initiales et soumettre à son
avis les mesures envisagées au titre
des différents sous-objectifs ;
8. 
pour les soins de ville, instaurer une
réserve prudentielle permettant de
réduire les tarifs ou de suspendre les
augmentations tarifaires en cas de
non-respect de l’objectif prévisionnel
de dépenses ;
9. 
supprimer le Fonds de financement
de l’innovation pharmaceutique et
réintégrer dans l’ONDAM l’intégralité
de la dépense de médicaments ;
10.
  intégrer dans le périmètre de
l’ONDAM
les
charges
liées
aux
créances sur les prestations .
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : en 2016,
un objectif atteint au prix de nombreux biais ; en 2017 et au-delà,
des économies effectives à rechercher et à accentuer
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
23
Le législateur a confié à la Cour la
mission de vérifier la cohérence des
tableaux d’équilibre et du tableau
patrimonial de la sécurité sociale
relatifs au dernier exercice comptable
clos (2016), établis par le ministère
chargé de la sécurité sociale et soumis à
l’approbation du Parlement dans le cadre
du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2018 .
Après avoir examiné ces documents
et les projets d’annexes à leur appui,
la
Cour
estime
qu’ils
fournissent
une représentation cohérente d’une
part
des
recettes,
des
dépenses
et du solde de la sécurité sociale
(tableaux d’équilibre), d’autre part
de ses actifs et passifs (tableau
patrimonial) . Elle émet cependant
plusieurs observations .
Les tableaux d’équilibre :
une information dont le contenu
s’améliore, mais qui reste marquée
par des difficultés significatives
Trois tableaux d’équilibre distincts
retracent les produits (« recettes  »),
les charges (« dépenses ») et le
résultat (« solde ») de l’ensemble
des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale, du régime général et
du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) .
Ils constituent ensemble l’équivalent
d’un compte de résultat combiné des
régimes de base et du FSV .
Suivant les recommandations de longue
date de la Cour, des améliorations
importantes ont été apportées à
l’information procurée au Parlement
dans le cadre et à l’appui des tableaux
d’équilibre .
Ainsi, le FSV a été intégré aux
tableaux
d’équilibre
du
régime
général et de l’ensemble des régimes
obligatoires de sécurité sociale . Cela est
justifié par le fait que le déficit du FSV
(3,6 Md€ en 2016) conduit à priver de
financement effectif, dans le même
exercice, une partie des produits de la
branche vieillesse liés à ses concours .
En outre, l’information relative au
contenu des tableaux d’équilibre a été
améliorée : décomposition par nature
et par risque des principaux postes
de produits et de charges, analyse
des évolutions par rapport à l’année
précédente et des écarts par rapport
aux prévisions de la précédente loi de
financement .
En revanche, la fiabilité des données
intégrées aux tableaux d’équilibre est
affectée par plusieurs limites, nouvelles
ou récurrentes :
- le déficit de la branche maladie
(4,8 Md€) est minoré à tort par un
produit exceptionnel de CSG de
740 M€ qui n’aurait pas dû être
comptabilisé ;
Les tableaux d’équilibre et le tableau
patrimonial de la sécurité sociale
relatifs à l’exercice 2016 :
avis sur la cohérence
3
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
24
Les tableaux d’équilibre et le tableau patrimonial
de la sécurité sociale relatifs à l’exercice 2016 :
avis sur la cohérence
le
déficit
de
l’ensemble
des
régimes de sécurité sociale (7 Md€) est
susceptible d’être aggravé de 0,1 Md€
en raison du caractère incertain de la
couverture de cette partie du déficit
du régime spécial de retraite de la
SNCF par une subvention d’équilibre
de l’État ;
-  des contractions de produits et
de charges contraires aux règles
applicables à l’établissement des
comptes sociaux (principe général
de non-compensation) continuent
à altérer la présentation des recettes
et des dépenses dans les tableaux
d’équilibre par rapport aux comptes
des régimes et du FSV ;
- la qualité des données comptables
synthétisées
dans
les
tableaux
d’équilibre demeure perfectible en
raison de la persistance d’insuffisances
du contrôle interne et de difficultés
comptables qui sont à l’origine de
l’expression de réserves par la Cour
sur les états financiers des branches
du
régime
général
de
sécurité
sociale et par les commissaires aux
comptes sur ceux d’autres régimes,
notamment le régime social des
indépendants (RSI) et le régime
agricole .
Le tableau patrimonial :
une information appropriée
comportant encore certaines
incertitudes
Le tableau patrimonial est un bilan
d’ensemble qui couvre la totalité du
champ de la sécurité sociale, y compris
la Caisse d’amortissement de la dette
sociale (CADES) et le Fonds de réserve
des retraites (FRR) . Il constitue l’équivalent
d’un bilan combiné de ces différents
régimes et organismes .
Accompagné de son annexe, le tableau
patrimonial fournit au Parlement une
information pertinente et précise, sous
deux observations :
- la ventilation des actifs et des passifs
du RSI entre ses régimes de base
intégrés au tableau patrimonial et ses
régimes complémentaires qui n’en
relèvent pas reste imparfaitement
justifiée ;
- une partie des réserves exprimées
par la Cour et par les commissaires
aux comptes sur les états financiers
des régimes de sécurité sociale ont
une incidence sur la qualité des
données comptables intégrées au
tableau patrimonial .
Le tableau patrimonial 2016 fait
apparaître une nouvelle amélioration
de la situation patrimoniale de la sécurité
sociale :
- pour la troisième année consécutive,
la sécurité sociale prise globalement
(régime général, autres régimes,
FSV, FRR et CADES) dégage un
résultat positif (8,1 Md€ en 2016,
après 4,7  Md€ en 2015) . Depuis
2014, le déficit en réduction du
régime général et du FSV est moins
élevé que la somme des excédents
dégagés par la CADES et, dans une
moindre mesure, par le FRR et l’écart
correspondant s’accroît  ;
-  sous l’effet de ce résultat positif,
les capitaux propres négatifs se
réduisent à nouveau (-101,4 Md€ fin
2016 après -109,5 Md€ fin 2015) ;
-  à nouveau, l’endettement financier
net, qui correspond à la différence
entre le passif
4
et l’actif financiers,
diminue lui aussi légèrement (118 Md€
fin 2016 après 120,8 Md€ fin 2015) .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
4
Pour l’essentiel, endettement social porté par la CADES et par l’ACOSS . FRR, CADES (préfinancement
du remboursement d’emprunts) et retraites de la Banque de France .
25
Recommandations
11.
 
mettre
fin
aux
contractions
de produits et de charges dans les
tableaux d’équilibre, non conformes au
cadre normatif fixé par la loi organique
relative aux lois de financement de la
sécurité sociale pour l’établissement
des comptes des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale (recom-
mandation réitérée) ;
12.
 reclasser, dans les états financiers
des entités du périmètre du tableau
patrimonial, les titres de participation
à la rubrique des valeurs mobilières de
placement ;
13. 
faire valider la reconstitution du
bilan des régimes de base du RSI par
les commissaires aux comptes de ce
régime .
Les tableaux d’équilibre et le tableau patrimonial
de la sécurité sociale relatifs à l’exercice 2016 :
avis sur la cohérence
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
27
La sécurité sociale n’a plus été à
l’équilibre depuis 2001 . Sa trajectoire
de redressement s’avère plus lente
que prévu, avec un horizon de retour à
l’équilibre à nouveau décalé, en 2020
désormais selon les pouvoirs publics .
Compte tenu de la persistance des
déficits sociaux sur une durée aussi
longue, qui enjambe plusieurs cycles
économiques, le cadre du pilotage
financier de la sécurité sociale devrait
être redéfini afin de garantir la pérennité
du retour à l’équilibre, une fois celui-ci
atteint .
Des déficits persistants depuis
2002 du fait de la dynamique
des dépenses et qui se réduisent
tardivement grâce à des hausses
de prélèvements
En 2002-2003, le solde de la sécurité
sociale a connu une première dégrada-
tion, suivie d’une stabilisation jusqu’en
2008, mais avec un déficit très élevé
(supérieur à 10 Md€) . Puis la récession
économique de 2009 a entraîné un dé-
ficit historique en 2010 (29,8  Md€) .
Depuis 2011, ce dernier se réduit
progressivement (7 Md€ de déficit en
2016) .
Évolution des soldes des régimes de base
et du FSV (2000-2016)
Source : Cour des comptes d’après la LFSS
2017 et les rapports annuels de la CCSS.
De
2002
à
2016,
le
cumul
des
déficits nominaux de la sécurité sociale
a atteint près de 220 Md€ . Ils ont une
origine très majoritairement structu-
relle, indépendante des variations de
la conjoncture économique, pour un
total compris entre 170 Md€ et 215 Md€
selon les hypothèses .
Après un creusement des déficits
structurels jusqu’en 2008, la récession
qui a suivi la crise financière a engendré
des déficits conjoncturels qui ne sont pas
encore résorbés . Depuis 2011, la baisse
des déficits structurels explique à elle
seule l’amélioration des soldes nominaux .
4
Le pilotage de la trajectoire
financière de la sécurité
sociale : créer les conditions
d’un équilibre durable
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
28
Évolution estimée du solde structurel
des régimes de base et du FSV
(2000-2016)
Source : Cour des comptes d’après les séries d’écart
de production de la commission européenne
(printemps 2016) et de la direction générale du
Trésor (décembre 2016).
Le retour prochain à un quasi-équilibre
structurel s’est toutefois accompagné
d’un alourdissement des dépenses de
sécurité sociale et des prélèvements
obligatoires .
La dynamique des dépenses est en
effet à l’origine de la détérioration des
soldes structurels . Jusqu’en 2014 compris,
leur progression a été continûment plus
rapide que la croissance potentielle du
PIB, et donc des recettes .
L’effort de maîtrise des dépenses a
ainsi été trop limité jusqu’à récemment
pour prévenir une dégradation du solde
structurel de la sécurité sociale . Entre 2000
et 2005, les pouvoirs publics ont décidé
des augmentations nettes des dépenses
dans une période d’excédents conjonc-
turels . Depuis 2006, avec des incertitudes
quant à leur montant pour l’assurance
maladie, les économies dépassent le
dépenses nouvelles . Depuis 2011, l’effort
d’économies s’est renforcé (réforme
des retraites de 2010, resserrement
de l’ONDAM, réforme des prestations
familiales en 2012-2013) . Toutefois,
c’est
seulement
depuis
2015
que
l’augmentation des dépenses est
devenue inférieure à la croissance
potentielle des recettes, elle-même
affaiblie après la récession de 2009 .
Dans ces conditions, c’est la hausse
des prélèvements obligatoires qui a
permis de réduire le déficit structu-
rel de la sécurité sociale . Entre 2000
et 2016, 37 Md€ de prélèvements
suplémentaires, en cumul, ont été
affectés à la sécurité sociale, dont
27 Md€ depuis 2011 . En leur sein,
30 Md€ ont permis de réduire le
déficit de la sécurité sociale, le solde
servant pour la plus grande part à
amortir les dettes transférées à la
Caisse d’amortissement de la dette
sociale (CADES) .
Un rôle significatif des transferts
de l’État dans la réduction
du déficit de la sécurité sociale
En dehors de la hausse des prélève-
ments, le retour progressif à l’équilibre
structurel de la sécurité sociale a été
assuré par un effort financier de l’État .
Entre 2000 et 2016, la sécurité sociale a
ainsi bénéficié d’un gain net de 4 Md€ de
recettes de la part de l’État, dont 3 Md€
du fait d’une surcompensation des
allègements généraux de charges
sociales .
Les transferts de l’État contribuent
à
la
divergence
des
trajectoires
financières
de
la
sécurité
sociale
et de l’État : en 2016, le solde de la
sécurité sociale (CADES comprise) a
retrouvé son niveau du début des
années 2000 ; en revanche, celui du
budget de l’État s’est dégradé de
près de 40 Md€ (69,1 Md€ de déficit
en 2016 contre 32 Md€ en 2001) .
Le pilotage de la trajectoire financière de la sécurité
sociale : créer les conditions d’un équilibre durable
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
29
Des transferts entre branches au
bénéfice de l’assurance maladie
Bien que les branches de la sécurité
sociale soient distinctes sur le plan
financier depuis 1967, les lois de
financement annuelles organisent
des transferts de recettes et de
dépenses entre branches nombreux
et parfois opaques, soit directement,
soit à travers le financement de
l’amortissement de la dette sociale .
Ces transferts peuvent répondre à
des logiques d’affichage de soldes . Les
excédents tendanciels de la branche
famille ont longtemps été mobilisés
au profit des régimes de retraite .
Depuis 2015, les transferts de recettes les
plus importants bénéficient à l’assurance
maladie au détriment du risque vieil-
lesse . Ils expliquent la quasi-totalité de
l’amélioration du solde de l’assurance
maladie de 2014 à 2017 . Elle a reçu en
pratique l’équivalent de 65 % des hausses
de
cotisations vieillesse
intervenues
dans le cadre de la réforme des retraites
de 2014 . Les dépenses d’assurance
maladie sont ainsi solvabilisées dans des
conditions peu transparentes, alors que
l’assurance vieillesse reste confrontée à
d’importants enjeux de soutenabilité .
Donner à la sécurité sociale
un nouveau cadre de pilotage
pour éviter à l’avenir le creuse-
ment de déficits structurels
La
cohérence
entre
les
lois
de
financement de la sécurité sociale d’une
part et les lois de programmation
des finances publiques et les lois de
finances d’autre part, devrait être
renforcée .
À ce titre, il importe d’améliorer la
continuité entre les lois de program-
mation et les lois de financement,
en
mentionnant
dans
les
lois
de
financement
les
éléments
chiffrés
permettant
d’apprécier
le
respect
des objectifs fixés par les lois de
programmation .
Il conviendrait aussi de mieux articu-
ler les lois de financement avec les lois
de finances, afin d’éclairer au mieux le
vote du Parlement, en mentionnant
systématiquement dans les lois de
financement les impacts des mesures
qui y sont proposées sur le budget de
l’État, en organisant une discussion
commune des volets recettes des lois
de finances et des lois de financement
et en mentionnant dans les projets
de lois de financement les impacts de
leurs mesures sur le budget de l’État .
Afin de tenir durablement les dépenses
et proscrire l’endettement, le cadre de
pilotage financier de la sécurité sociale
devrait lui-même être rénové . Il devrait
garantir une contribution effective et
durable de la sécurité sociale, par la
maîtrise des dépenses, au redressement
des finances publiques prises dans leur
ensemble, notamment tant que n’aura
pas été atteint l’objectif d’équilibre
structurel de moyen terme de l’ensemble
des administrations publiques .
À cette fin, une approche de nature
structurelle permettrait de mettre en
évidence les risques de relâchement
des efforts d’économies en cas de
conjoncture favorable et de résurgence
d’une spirale de dette sociale . À ce titre,
le Parlement devrait être informé des
soldes structurels sous-jacents aux
soldes nominaux prévisionnels soumis
à son adoption .
Au-delà, l’interdiction d’un portage
par l’ACOSS de tout déficit d’origine
structurelle constituerait un levier
majeur pour prévenir l’installation de
déficits durables .
Le pilotage de la trajectoire financière de la sécurité
sociale : créer les conditions d’un équilibre durable
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
30
Le pilotage de la trajectoire financière de la sécurité
sociale : créer les conditions d’un équilibre durable
Il conviendrait par ailleurs de mettre
à l’étude des dispositifs spécifiques de
lissage des variations conjoncturelles
des recettes . Les missions du Fonds de
réserve des retraites (FRR) pourraient
être redéfinies en ce sens pour le risque
vieillesse, à partir des réserves aujourd’hui
sans affectation . La mise en place d’un
dispositif de cette nature pour le risque
maladie pourrait être facilitée par l’arri-
vée de la CADES au terme de sa mission
en 2024, ce qui conduira à laisser sans
affectation environ 12 Md€ de recettes
annuelles qui lui sont attribuées .
Afin
de
prévenir
les
risques
de
relâchement de l’effort de maîtrise des
dépenses, les transferts de recettes et
de dépenses entre branches et avec le
FSV devraient être rendus plus lisibles et
transparents . À cette fin, ces transferts
et leurs incidences sur les soldes des
branches et du FSV devraient figurer à
l’annexe B de la loi de financement et
être visés à l’article d’approbation de
ce document par le Parlement .
Ce même principe de neutralité finan-
cière aurait vocation à s’appliquer aux
transferts de recettes ou de dépenses
entre l’État et la sécurité sociale, en
dehors d’une stricte compensation
des réductions de charges sociales
à mettre en œuvre . Au-delà, dans un
scénario où la sécurité sociale serait
revenue à l’équilibre, mais non les
administrations
publiques
prises
dans leur ensemble, il pourrait être
envisagé de réexaminer le principe
même d’une compensation intégrale
des allègements généraux de cotisations
par l’État .
Recommandations
14. 
articuler plus étroitement l’examen
par le Parlement des lois financières,
notamment en organisant une discus-
sion commune des volets « recettes »
du projet de loi de finances et du projet
de loi de financement de la sécurité
sociale (recommandation réitérée) ;
15.
 présenter dans le projet de loi de
financement annuel, en des termes
comparables, les éléments chiffrés
correspondant au respect des enca-
drements nominaux et structurels
portés par les lois de programmation
des finances publiques ;
16.
  chiffrer précisément dans les
études d’impact présentées dans
les projets de loi de financement
les conséquences éventuelles des
mesures envisagées sur les recettes
ou les dépenses de l’État et des
autres administrations publiques ;
17.
  intégrer au rapport annexé aux
projets de loi de financement une
estimation des soldes structurels
sous-jacents aux soldes nominaux
soumis à l’approbation du Parlement  
18.
  réserver strictement les plafonds
d’avance votés en lois de financement
pour l’ACOSS à la seule couverture des
besoins infra-annuels de trésorerie
(recommandation réitérée) et mettre
à l’étude la création de dispositifs de
lissage des variations conjoncturelles
des recettes de la sécurité sociale ;
19.
  renforcer la transparence des
transferts de recettes et de dépenses
entre branches et avec le FSV par
l’insertion à l’annexe B du projet de
loi de financement de la sécurité sociale
d’une évaluation de leurs conséquences
sur les soldes annuels des branches et du
FSV pour chacune des années couvertes
par la trajectoire financière pluriannuelle
de la sécurité sociale .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Deuxième partie
Réorganiser l’offre de soins
33
En 2016, 61 500 médecins spécia-
listes libéraux exerçaient une activité
en ville ou en établissement de santé
privé . Près de 55 000 étaient installés en
cabinet : plus de 30 000 en secteur 1 et
plus de 24 000 en secteur 2 les autorisant
à dépasser les tarifs de l’assurance maladie .
En 2015, les dépenses liées aux actes des
spécialistes libéraux ont atteint 16,1 Md€,
soit 8,3 % de la consommation de soins et
de biens médicaux, dont 11,2 Md€ en ville
et 5 Md€ en établissements privés .
La médecine libérale de spécialité est
essentielle pour permettre une prise
en charge adaptée et éviter des recours
non justifiés et coûteux à l’hôpital .
Ainsi, elle présente non seulement des
enjeux financiers, mais aussi d’équité
dans l’accès aux soins . Ces enjeux sont
insuffisamment pris en compte par les
pouvoirs publics .
Des dépenses de médecine
libérale de spécialité en forte
progression et faiblement
régulées
Les dépenses liées aux actes des
spécialistes libéraux progressent de
manière forte et continue (+2,5 %
en moyenne annuelle entre 2009 et
2015) et nettement plus rapide que
celles des généralistes (+0,6 %) .
Elles
sont
tirées
par
les
actes
techniques (passés de 56 % à 61 %
des dépenses de ville remboursables
par l’assurance maladie entre 2006
et 2015) et par les dépassements
d’honoraires
au
titre
des
actes
techniques et cliniques par les praticiens
de secteur 2 (17,5 % des dépenses
remboursables en 2015 contre 16,1 %
en 2009) .
Compte tenu de la dynamique des
actes techniques, la progression des
dépenses remboursées par l’assurance
maladie s’accélère depuis 2014 (+4,2 %
en 2016), en contribuant ainsi au
dépassement croissant de l’objectif
annuel de dépenses de soins de ville .
Dispositif de régulation financière sans
contenu médical réel, l’orientation par
le médecin traitant vers un spécialiste
dans le cadre du parcours de soins
coordonné n’a pas infléchi la pro-
gression des dépenses . Les actes ne
sont pas toujours pertinents, comme
l’illustre le cas de l’imagerie médicale
pour laquelle des redondances sont
régulièrement observées .
Depuis 2005, la classification commune
des actes médicaux (CCAM) vise à décrire
de manière fine et médicalisée quelque
7 500 actes techniques .
5
La médecine libérale
de spécialité : contenir
la dynamique des dépenses,
améliorer l’accès aux soins
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
34
La médecine libérale de spécialité : contenir la dynamique
des dépenses, améliorer l’accès aux soins
Fondée sur une appréciation en principe
objectivée du coût de chaque pratique,
elle devait favoriser le recours aux actes les
plus pertinents et permettre une cotation
équitable entre spécialités, fondée sur des
tarifs cibles à atteindre . Sauf exception, les
partenaires conventionnels ont cependant
renoncé à réduire les tarifs surévalués
au regard des coûts et les écarts entre
spécialités, à difficulté ou durée équi-
valente des actes .
Les conventions médicales se bornent
à tenter de corriger à la marge les
situations moins favorables de certaines
spécialités et ne jouent pas de véritable
rôle de régulation des rémunérations
par spécialité . Les disparités de revenu
libéral entre spécialités (de 1 à 3 pour les
principales d’entre elles) sont durables
et s’accentuent .
Des inégalités territoriales
et financières dans l’accès
aux soins qui s’aggravent
Malgré l’augmentation globale des
effectifs de spécialistes libéraux (de
53  800 en 2005 à 61 500 en 2016),
des obstacles persistants tendent à
s’aggraver pour accéder aux soins de
spécialité en ville .
Un grand nombre de territoires,
urbains
et
ruraux,
ne
comptent
pas ou plus assez de spécialistes,
ce qui provoque un allongement
croissant
des
délais
d’obtention
de rendez-vous et un report de la
demande de soins vers l’hôpital et
notamment les services d’urgence .
La
concentration
géographique
tend à s’accroître . Les écarts de
densité médicale sont considérables
et des départements entiers sont
« désertés » par certaines spécialités
(cf . carte ci-contre) .
Imputables
aux
dépassements
de
tarifs conventionnels, les inégalités
financières dans l’accès aux soins sont
majeures et tendent à s’accroître,
avec là aussi des effets de report de la
demande de soins vers l’hôpital .
La proportion de médecins de secteur 2
autorisés à pratiquer des dépassements
est passée de 39,2 % en 2006 à 44,3 %
en 2015 (cf . cartes ci-contre) et va
encore augmenter : en 2015, 61  %
des nouvelles installations en cabinet
ont eu lieu en secteur 2 .
Compte tenu de la place réduite
du secteur 1 dans l’offre totale,
les dépassements sont la norme pour
certaines spécialités (84 % des gyné-
cologues, 69 % des ophtalmologues)
et dans les zones urbaines sur-dotées
en spécialistes, en permettant à ces
derniers de préserver leurs revenus
malgré une offre excédentaire . De plus,
le taux moyen de dépassement est
passé de 25,3 % des tarifs opposables
de l’assurance maladie en 1990 à
51,4 % en 2015 .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
35
Départements à faible densité de médecins spécialistes libéraux
(2016, pour 100 000 habitants)
Source : Cour des comptes d’après les données de la DREES.
La médecine libérale de spécialité : contenir la dynamique
des dépenses, améliorer l’accès aux soins
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Part des ophtalmologistes de secteur 1
Part des gynécologues de secteur 1
Source : Cour des comptes d’après les données communiquées par la CNAMTS.
36
La médecine libérale de spécialité : contenir la dynamique
des dépenses, améliorer l’accès aux soins
Un dispositif de modération
des dépassements d’honoraires
aux résultats limités et très
coûteux
Accompagné
paradoxalement
d’un
élargissement du nombre de médecins
autorisés à s’installer en secteur  2,
le contrat d’accès aux soins (CAS)
mis en œuvre en décembre 2013
consistait
en
un
engagement
des
praticiens
signataires
de
ne
pas
réduire la proportion de leurs actes à
tarif opposable et de stabiliser leur taux
moyen de dépassement .
Malgré
des
incitations
financières
importantes (183 M€ en 2015), le CAS
a des effets limités . Il a été souscrit
par moins d’un quart des spécialistes,
appartenant
essentiellement
aux
spécialités aux dépassements les moins
élevés . Pour une part, la hausse de la
proportion d’actes à tarif opposable
(de 32,9 % en 2012 à 36,2 % en 2015)
et le repli du taux de dépassement des
spécialistes de secteur 2 (de 54,6 %
en 2012 à 51,4 % en 2015) résultent
d’autres facteurs que l’application de
leurs engagements par les praticiens
ayant adhéré au CAS : l’élargissement
de la population de spécialistes de
secteur 1 autorisée à s’installer en
secteur 2 au titre du CAS, la hausse du
nombre de titulaires de la couverure
maladie universelle complémentaire
(CMU-C) qui bénéficient de tarifs
opposables et le plafonnement de la
couverture des dépassements des
praticiens non adhérents au CAS par
les « contrats responsables » des
assurances maladie complémentaires .
Malgré ses effets limités, le CAS a
cependant un coût considérable  :
pour éviter 1  € de dépassement,
l’assurance maladie a dépensé 10 € en
2015 . Son application est au surplus
peu contrôlée . Cependant, la nouvelle
convention médicale d’août 2016 a
reconduit
ce
dispositif
sous
une
nouvelle dénomination - option de pra-
tique tarifaire maîtrisée (OPTAM) -, avec
des incitations financières renforcées .
De nouveaux instruments
pour contenir l’évolution
des dépenses et lutter contre
les inégalités dans l’accès
aux soins
Alors
que
la
nouvelle
convention
médicale d’août 2016 a prévu 438 M€
de revalorisations d’actes en faveur des
spécialistes, pour l’essentiel incondition-
nelles, il convient de ralentir la hausse
des dépenses, d’améliorer leur efficience
médico-économique et de réduire les
inégalités dans l’accès aux soins .
Pour la prise en charge des patients
souffrant de pathologies chroniques,
une enveloppe annuelle individualisée
par patient et modulable en fonction
des besoins et de l’état de santé de ce
dernier devrait être substituée à la
tarification individuelle des actes,
qui a un caractère inflationniste .
Alors
que
son
adaptation
suit
aujourd’hui un rythme très lent, il
convient de réviser beaucoup plus
activement la définition et la cotation
des actes inscrits à la nomenclature
des actes techniques afin d’améliorer
la pertinence des actes effectués et
d’assurer un partage des gains de
productivité entre les praticiens et les
financeurs .
Synthèse du rapport sécurité
sociale 2017
37
Recommandations
20.
 
expérimenter
un
mécanisme
d’enveloppe globale et modulable de
dépenses de soins de spécialité par
patient, notamment pour la prise en
charge de pathologies chroniques ;
21.
  actualiser de manière régulière
la classification commune des actes
médicaux, en objectivant notamment
la durée des actes techniques et le coût
des pratiques médicales et en définissant
un coût cible par acte ;
22.
  instaurer un conventionnement
sélectif des médecins spécialistes : dans
les zones sur-dotées en spécialistes
de secteur 2, autoriser uniquement des
conventionnements en secteur 1 et
imposer un plancher d’actes à tarifs
opposables aux spécialistes déjà installés
en secteur 2 ; dans les zones sous-dotées,
rendre obligatoire l’adhésion des
médecins s’installant en secteur 2 à
l’option de pratique tarifaire maîtrisée ;
23. 
réorienter l’option de pratique tari-
faire maîtrisée vers les spécialités dont
les taux moyens de dépassement sont
les plus élevés et appliquer strictement
les clauses de résiliation dès lors que
les engagements contractuels ne sont
pas respectés ;
24.
  en cas de constat de pratiques
tarifaires
excessives,
allonger
les
durées de suspension temporaire du
droit à dépassement et rendre, quand
il y a lieu, les déconventionnements
effectifs ;
25.
  recentrer les aides territoriales
de l’État et de l’assurance maladie
sur un nombre réduit de dispositifs
en privilégiant un exercice permanent,
ou intermittent sous forme de consul-
tations avancées, au sein de structures
pluriprofessionnelles .
La médecine libérale de spécialité : contenir la dynamique
des dépenses, améliorer l’accès aux soins
Nombreuses, dispersées et porteuses
d’effets d’aubaine excessifs, les aides
financières de l’État et de l’assurance
maladie à l’installation de spécialistes
dans les zones sous-dotées devraient
être rationalisées et réorientées vers
le soutien à l’exercice dans un cadre
pluri-professionnel,
permanent
ou
intermittent
sous
la
forme
de
consultations avancées .
Au-delà, il importe d’améliorer l’accès
aux soins en instaurant un conven-
tionnement sélectif des spécialistes .
À ce titre, le conventionnement de
nouveaux spécialistes dans les zones
sur-dotées devrait être subordonné à leur
installation en secteur 1 afin de permettre
d’y recrééer une offre financièrement
abordable et le maintien du conven-
tionnement
des
spécialistes
déjà
installés en secteur 2 être fonction d’un
objectif de progression de leurs actes
à tarifs opposables . Inversement, les
spécialistes conserveraient la liberté
de s’installer en secteur  2 dans les
zones sous-denses, mais devraient
alors intégrer obligatoirement le
dispositif de modération tarifaire
(OPTAM) .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
39
Les activités chirurgicales sont prati-
quées par près de 20 800 chirurgiens qui
effectuent leurs interventions dans des
établissements de santé publics et privés à
but lucratif ou non .
Les 5,9 millions de séjours de chirurgie
effectués en 2015 ont représenté 15,6 Md€
de dépenses d’assurance maladie, en
hausse de +6,1 % en euros constants par
rapport à 2008 . Ils concentrent 20,4 %
des dépenses liées aux établissements
de santé et 8,6 % des dépenses totales
d’assurance maladie .
La chirurgie est une pratique d’excellence
en pleine évolution (techniques mini-
invasives, reconstitution d’organes en
3D) . À la confluence de la médecine
hospitalière et d’une activité effectuée
très majoritairement par des spécialistes
libéraux, elle illustre la nécessité d’une
meilleure organisation des soins afin
d’améliorer la qualité et l’efficience
des prises en charge et de renforcer
l’attractivité compromise de la pratique
chirurgicale à l’hôpital public .
Une activité croissante, marquée
par de fortes disparités territoriales
et toujours très dispersée malgré
des capacités en recul
Le nombre de séjours en chirurgie croît
rapidement (+10,1 % entre 2008 et 2015)
en raison non seulement de la hausse
et du vieillissement de la population et
de la réalisation d’opérations à des
âges de plus en plus avancés, mais
aussi des effets inflationnistes de
la tarification à l’activité (T2A) des
établissements de santé .
Le taux de recours à la chirurgie est
très hétérogène sur le territoire . Alors
qu’il y a là un levier majeur d’efficience,
les déterminants de ces disparités
ne sont pas précisément analysés .
L’augmentation de la densité globale
des chirurgiens (de 30,6 à 31,4 pour
100 000 habitants entre 2000 et 2016)
s’accompagne de fortes disparités
en fonction des territoires et des
spécialités .
Malgré la réduction de ses capacités
(- 36 700 lits entre 1996 et 2015, soit
-28,3 % pour les établissements privés
lucratifs et -16,5 % pour les établisse-
ments publics et privés non lucratifs), la
chirurgie conventionnelle conserve des
surcapacités importantes (de l’ordre de
12 800 lits en 2015, soit 18 %) .
Les
activités
chirurgicales
restent
éclatées entre un grand nombre
d’établissements, qui ne se réduit
pas : en 2015, 869 établissements (tous
statuts confondus) avaient une activité
de chirurgie conventionnelle, contre 885
en 2010 (-1,8 %) et 883 une activité
de chirurgie ambulatoire, contre  861 en
2010 (+2,6 %) . Le nombre d’établissements
à très faible activité globale (moins de
1 500 séjours), présents dans toutes les
régions
et
principalement
publics
(70 %), est stable (72 en 2015, 71 en 2010) .
Les activités chirurgicales :
restructurer l’offre de soins
pour mieux assurer la qualité
des prises en charge
6
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
40
Les activités chirurgicales : restructurer l’offre
de soins pour mieux assurer la qualité des prises en charge
Malgré
le
renforcement
des
contraintes liées à la permanence des
soins, de nombreux établissements
continuent à pratiquer un large éventail
d’interventions, tout en peinant à disposer
des ressources appropriées en chirurgiens,
en anesthésistes-réanimateurs et en
infirmières spécialisées .
En effet, une capacité d’intervention
24 heures sur 24 sur la gamme d’actes
opératoires la plus large demeure
toujours le modèle principal de l’offre
chirurgicale, y compris dans les éta-
blissements de petite ou de moyenne
taille
confrontés
à
des
difficultés
de recrutement et à des vacances
persistantes de postes .
Une offre chirurgicale
insuffisamment adaptée
aux enjeux de sécurité,
d’efficience et d’innovation
Malgré un lien de causalité démontré
entre faible activité et risque accru
pour les patients, l’activité chirurgicale
soumise à un seuil d’autorisation est très
minoritaire : en 2015, elle couvrait
uniquement 5,6 % des séjours . En effet,
des seuils d’activité n’ont été fixés que
pour trois spécialités : la chirurgie
cardiaque, la neurochirurgie et une
partie de la chirurgie carcinologique .
Encore sont-ils trop faibles et partiel-
lement respectés . En 2010, les pouvoirs
publics ont renoncé à fixer un seuil de
1 500 séjours en chirurgie par établissement,
qui aurait alors entraîné 134 fermetures de
services, principalement dans les hôpitaux
publics .
La chirurgie ambulatoire se développe
(46,6 % des interventions en 2015,
soit +18,3 points par rapport à 2003),
notamment sur la dernière période
dans les établissements publics et
privés non lucratif, mais connaît toujours
un retard important par rapport aux pays
comparables . L’objectif de 62,3  % des
interventions en ambulatoire en 2020
fixé par les pouvoirs publics apparaît
peu atteignable . La politique tarifaire
soutient insuffisamment leur diffusion .
De manière générale, la dispersion
et, souvent, l’instabilité des équipes
sont de moins en moins compatibles
avec
les
innovations
techniques
considérables
et
l’évolution
des
conditions d’exercice de la chirurgie,
qui imposent la présence d’équipes
plus étoffées et qualifiées et davantage
pluridisciplinaires .
Une amplification et une accélération
de la restructuration de l’offre
de soins chirurgicaux nécessaires
à une qualité accrue des prises
en charge
Les enjeux de qualité et de sécurité des
soins exigent que les pouvoirs publics
se départissent de leur attentisme, en
engageant les évolutions réglementaires
nécessaires à une concentration accrue
de l’offre de soins .
Ainsi, il convient de redéfinir les
conditions d’exercice de l’ensemble
des activités chirurgicales, d’accorder
aux établissements des autorisations
d’activité non plus globales mais
définies par spécialité, de fixer des
seuils d’activité par site géographique
d’établissement,
et
à
terme,
par
chirurgien, et de les faire appliquer
rigoureusement . La mise en place
dans le cadre des groupement hospi-
taliers de territoire d’une offre de soins
graduée à trois niveaux, en fonction
de la complexité des interventions
à
effectuer,
apparaît
hautement
nécessaire . Enfin, la permanence des
soins chirurgicaux, encore éclatée entre
un nombre excessif d’établissements,
devrait être plus fortement concentrée .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
41
Les activités chirurgicales : restructurer l’offre
de soins pour mieux assurer la qualité des prises en charge
L’outil tarifaire est à mobiliser
plus activement afin de favoriser
la pertinence des interventions
chirurgicales et le développement
de la chirurgie ambulatoire .
L’offre chirurgicale devrait être pilotée
en fonction d’objectifs de qualité des
soins . À cette fin, la formation initiale
des chirurgiens devrait être enrichie
et leur formation continue renforcée
en instaurant à terme une obligation
de re-certification périodique . Afin de
responsabiliser les chirurgiens quant
à la pertinence des interventions,
il conviendrait d’individualiser à leur
niveau, et non à celui de l’établissement,
a procédure de mise sous accord préalable
de ces dernières .
Enfin la recherche d’une accélération
de la diminution du temps de séjour
hospitalier suppose de développer la
télémédecine et de faciliter la mise
en place des « hôtels hospitaliers », qui
hébergent des patients sans réalisation de
soins avant et à la suite d’interventions
chirurgicales .  La question pourrait
également être posée d’ouvrir une
réflexion sur la mise en place à terme de
structures de chirurgie ambulatoire
autonomes .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Recommandations
26.
  concentrer l’offre de soins
chirurgicaux en réformant le régime
des autorisations par établissement
afin de les faire porter sur chaque
spécialité et en fixant par la voie
réglementaire des seuils d’activité
par site géographique d’établissement
puis, à terme, par chirurgien et contrôler
rigoureusement leur strict respect ;
27.
  dans cette logique, définir une
prise en charge graduée des patients
dans le cadre territorial, y compris
pour la permanence des soins, selon
trois niveaux, en inscrivant cette
évolution dans la dynamique de
création des groupements hospitaliers
de territoire et les futurs schémas
régionaux de santé ;
28.
  amplifier le « virage ambulatoire  »
de la chirurgie en alignant les tarifs de
l’hospitalisation complète sur les
coûts ambulatoires des établis-
sements les plus efficients et en
examinant l’opportunité de créer des
centres
indépendants
de
chirurgie
ambulatoire ;
29.
  impliquer individuellement les
chirurgiens dans la qualité et la
pertinence des soins en développant
les référentiels de bonnes pratiques,
en modernisant la formation initiale
et continue, notamment par le déve-
loppement d’écoles de chirurgie et de
centres de simulation et en définissant
les modalités d’une obligation périodique
de certification à terme ;
30.
  réduire la durée moyenne des
séjours de chirurgie conventionnelle, en
recourant aux nouvelles technologies,
en particulier la télémédecine, et en
expérimentant les « hôtels hospitaliers
» en vue de recentrer l’hôpital sur ses
missions de soins .
43
Selon le code de la santé publique,
la
télémédecine
est
une
forme
de pratique médicale à distance
qui recouvre cinq types d’actes :
la
téléconsultation
(consultation
à distance d’un médecin), la télé-
expertise (sollicitation à distance de
l’avis d’un autre médecin), la télésur-
veillance (surveillance médicale et
interprétation des données du suivi
médical du patient à distance), la
téléassistance (assistance à distance
d’un médecin à un autre professionnel
de santé pendant la réalisation d’un
acte), ainsi que la réponse apportée
dans le cadre de la régulation médicale
des appels au SAMU .
Plus d’un quart de siècle après la
première téléconsultation médicale,
la télémédecine demeure en France
une pratique marginale, sans réel
impact sur l’organisation du système
de santé . Le manque de direction et
de continuité des pouvoirs publics
concourt à expliquer cet état de fait .
Une
stratégie,
allant
au-delà
d’expérimentations locales souvent
non généralisables et de la création
ponctuelle de nouveaux actes dans
la nomenclature, s’impose désormais
afin de concrétiser les progrès que
la télémédecine peut permettre à
notre système de santé de réaliser .
Une contribution potentiellement
majeure à la modernisation
du système de santé
Comme le montrent des expériences
étrangères, la télémédecine permet
des progrès avérés pour l’efficience du
système de santé .
Ainsi,
elle
peut
contribuer
à
la
couverture sanitaire de populations
localisées dans des territoires périphé-
riques ou peu accessibles ou présentant
des
caractéristiques
spécifiques,
en
faisant ainsi l’économie de structures
sous-utilisées et de transports onéreux .
De toute les formes de télémédecine,
la surveillance à distance des patients
qui relèvent de pathologies chroniques,
lourdes et parfois invalidantes (soit
11 millions de personnes en affection
de longue durée, à l’origine de 60 % des
dépenses
d’assurance
maladie
en
France) apparaît la plus prometteuse .
Une partie de ces patients pourraient
bénéficier
d’une
télésurveillance
de leurs paramètres de santé à un
moment ou l’autre de leur parcours
de soins, en évitant ainsi certains
séjours hospitaliers . Une étude récente
indique que la télésurveillance pourrait
permettre une économie de 2,6 Md€
au titre de trois pathologies (diabète
traité
par
insuline,
insuffisance
cardiaque, insuffisance rénale) et
d’un facteur de risque (hypertension
artérielle) .
La télémédecine : une stratégie
cohérente à mettre en œuvre
7
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
44
La télémédecine : une stratégie cohérente
à mettre en œuvre
Enfin, la télémédecine peut favoriser
l’amélioration des conditions de prise en
charge des patients : suivi en temps réel
de leur état de santé, formalisation,
traçabilité et partage de l’information
entre les différents intervenants . Elle
permet par ailleurs des transferts de
connaissances et de savoir-faire
internes aux équipes de soins et un
recentrage des praticiens médicaux
sur les actes à plus forte valeur
ajoutée médicale .
Une action publique dispersée
aux résultats modestes
Depuis 2010, les initiatives des pouvoirs
publics se sont succédé sans ligne
directrice claire ni continuité, marquées
par leur caractère expérimental et leur
défaut d’évaluation .
Un plan national censé rassembler
et dépasser les initiatives antérieures
a
été
lancé
puis
immédiatement
abandonné
en
2011,
seules
les
dépenses
d’investissement
étant
financées, à l’exclusion de celles de
fonctionnement courant .
Sans
cadrage
national
précis,
les
agences régionales de santé (ARS)
subventionnent
des
expérimentations
locales centrées autour des établis-
sements
hospitaliers .
Si
certaines
présentent un réel intérêt, le volume
des
actes
de
télémédecine
corres-
pondants reste insignifiant : en 2015,
un peu moins de 258 000 actes, soit
l’équivalent de 0,3 % des actes et
consultations externes, ont été effectués
par les établissements de santé .
De
plus,
ces
expérimentations
présentent des faiblesses majeures :
suivi national défaillant, dépendance
à l’égard de l’investissement person-
nel des médecins porteurs de pro-
jet, hétérogénéité des périmètres des
niveaux de soutien et caractère en
principe non pérenne des aides . Elles
gagneraient à être recentrées sur les seuls
dispositifs à même d’être généralisés .
Depuis 2014, le ministère de la santé
s’est engagé dans la voie de nouvelles
expérimentations
tournées
vers
la
médecine de ville et les établissements
médico-sociaux .
À
l’automne
2016,
elles n’avaient cependant pas démarré .
La loi de financement pour 2017 a
néanmoins prévu leur extension à
l’ensemble du territoire . En principe,
un rapport d’évaluation doit être
adressé au Parlement fin septembre
2017 .
À
côté
des
expérimentations
du
ministère de la santé et des ARS,
l’assurance maladie développe une
action autonome, en négociant avec
les professionnels libéraux de santé la
définition d’actes de télémédecine dans
un cadre national et pérenne de droit
commun  : celui de l’inscription de
nouveaux actes à la nomenclature .
À ce jour, quatre actes ont ainsi été
inscrits . Deux autres sont en cours de
discussion . Si elle élargit les possibilités
de développement de la télémédecine,
cette série d’actes couvre un champ
encore étroit .
Une stratégie rapide, forte
et cohérente à engager afin
de réaliser les gains d’efficience
permis par la télémédecine
sans inflation des dépenses
L’attentisme
des
pouvoirs
publics,
leurs actions dispersées, leur incapacité
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
45
La télémédecine : une stratégie cohérente
à mettre en œuvre
à définir un cadre clair pour la diffusion
de la télémédecine, doivent faire place
rapidement à une stratégie d’ensemble
cohérente, continue et méthodique .
Cette stratégie devrait s’inscrire dans
le champ de l’« e-santé », plus large
que la définition légale de la télémé-
decine et en évolution accélérée, en
intégrant la dimension européenne
sous trois aspects : protection des
données de santé, régime juridique
des dispositifs médicaux et des objets
connectés et cadre juridique des activités
de plateforme de télémédecine .
Dans le cadre de cette stratégie, les
pouvoirs publics devraient définir
et appliquer l’ensemble des cadres
juridiques et techniques nécessaires
à la réalisation d’actes de télémédecine .
Ainsi, il convient de généraliser selon le
calendrier prévu (2018) le dossier médi-
cal personnel, récemment relancé à la
suite d’un échec coûteux, et de veiller
à son alimentation exhaustive et en
temps réel par les acteurs du système de
santé pour assurer la traçabilité de leurs
interventions . Dans les établisse-
ments hospitaliers, l’authentification
individuelle
des
professionnels
de
santé doit cesser d’être l’exception
pour
devenir
la
norme,
conformé-
ment aux textes . Le retard pris dans la
dématérialisation des prescriptions de
médicaments et de dispositifs médicaux
est à combler .
Surtout, il convient de définir un cadre
tarifaire simple et lisible, à même
de stimuler le développement de la
télémédecine, tout en prévenant tout
risque d’inflation des dépenses liée à
l’intervention de plusieurs profession-
nels ou établissements de santé lors
des actes de télémédecine . Un partage
et une forfaitisation des rémunérations
entre les différents intervenants doivent
ainsi être organisés à coût global du
même ordre pour l’assurance maladie
que pour une prise en charge classique
en présence du patient .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
46
Recommandations
31.
 
fixer
des
objectifs
précis
et
mesurables de déploiement de la
télémédecine
aux
professionnels
libéraux, aux établissements de santé
et à l’assurance maladie, notamment
au titre de la télésurveillance des
pathologies chroniques, à l’instar de
ce qui a été fait pour la chirurgie
ambulatoire ;
32.
  généraliser à court terme un
dossier médical partagé commun à
l’ensemble des acteurs du système
de santé, alimenté de manière
exhaustive et en temps réel par ces
derniers et assurant la traçabilité de
l’ensemble de leurs interventions ;
33.
  mettre en place une tarifica-
tion de droit commun des actes de
télémédecine fondée, selon le type
d’actes, sur l’application de montants
forfaitaires, de plafonds de nombre
d’actes ou de partages de rémunéra-
tions entre les intervenants en santé
(professionnels libéraux et établisse-
ments), à coût global pour l’assurance
maladie du même ordre que celui lié à
des interventions classiques ;
34.
  réviser à la baisse les tarifs des
prises en charge en hospitalisation
classique afin de favoriser la substi-
tution de la télésurveillance à ces
dernières chaque fois que cela est
pertinent sur le plan médical ;
35.
  recentrer en tout état de cause
les expérimentations sur les projets
les plus à même de déboucher sur
des dispositifs généralisables dans
un cadre de droit commun à coût
maîtrisé pour l’assurance maladie .
La télémédecine : une stratégie cohérente
à mettre en œuvre
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Troisième partie
Renforcer la maîtrise des coûts
du médicament
49
8
En 2015, les dépenses de médicaments
se sont élevées à 38,3 Md€, dont
4,3 Md€ à l’hôpital, intégralement pris
en charge par l’assurance maladie, et
34 Md€ en ville . Ces dernières dépenses
étaient remboursables par l’assurance
maladie à hauteur de 29,8  Md€  ;
23,4  Md€ ont été effectivement
remboursés par cette dernière (soit
28 % de l’enveloppe « soins de ville
» de l’ONDAM) .
La négociation des prix a apporté,
conjointement avec notamment la
diffusion accrue des médicaments
génériques, une contribution majeure à la
maîtrise des dépenses de médicaments .
Leur très vive dynamique entre 2001
et 2010 a fait place désormais à
une stabilité globale . Cependant,
de nombreuses marges d’efficience
demeurent encore largement inexploi-
tées . Alors que les enjeux financiers se
renforcent avec l’arrivée de médicaments
innovants et coûteux, la position des
pouvoirs publics est à renforcer face
à des entreprises mondialisées .
Un régime de prix négociés
mieux encadré sur le plan
financier comme juridique
À la suite de leur autorisation de mise sur
le marché par les agences européenne
ou nationale du médicament, la fixation
du prix des médicaments repose sur la
négociation par une instance intermi-
nistérielle, le Comité économique des
produits de santé (CEPS), de conven-
tions bilatérales avec les entreprises
pharmaceutiques .
Ces
conventions
prennent place dans un environne-
ment juridique complexe, constitué
par des dispositions législatives et
par un accord cadre du CEPS avec
l’organisation
professionnelle
des
entreprises
du
médicament
(le
LEEM) . En cas de désaccord, le CEPS
peut fixer unilatéralement le prix,
mais il n’utilise que très rarement
cette faculté .
La loi prévoit que la fixation du prix des
médicaments tient compte principalement
de l’amélioration du service médical rendu
(ASMR), le cas échéant des résultats de
l‘évaluation
médico-économique,
des
prix des médicaments à même visée
thérapeutique, des volumes de vente
prévus ou constatés et des conditions
prévisibles et réelles d’utilisation .
Au cours des années récentes, la
loi a complété ou précisé le cadre
juridique de la fixation du prix des
médicaments sur trois points impor-
tants  : l’ASMR appréciée par la Haute
Autorité de santé (HAS) lie désormais
les négociateurs, un critère d’efficience
médico-économique apprécié par la
HAS a été introduit et une base légale a
été donnée aux critères de fixation des
prix révisés jusque-là appliqués .
L
a fixation du prix des médicaments :
des résultats significatifs, des enjeux
toujours majeurs d’efficience
et de soutenabilité, un cadre
d’action à fortement rééquilibrer
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
50
La fixation du prix des médicaments : des résultats significatifs,
des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité,
un cadre d’action à fortement rééquilibrer
Les accords-cadres pluriannuels avec
le LEEM favorisent cependant le
maintien de prix fabricant (faciaux)
élevés
accompagnés
de
remises
confidentielles
qui
abaissent
le
prix net des médicaments . Ainsi, ils
reconduisent
systématiquement
la garantie de prix européen, selon
laquelle le prix facial de certains
médicaments ne peut être inférieur
à celui pratiqué par quatre autres
pays (Allemagne, Espagne, Italie et
Royaume-Uni) .
En outre, l’accord de 2015 a introduit
de nouveaux dispositifs qui permettent
à certains médicaments d’obtenir des
avantages tarifaires conditionnels plus
élevés que ceux qui résulteraient de
leur ASMR (contrats de performance
pour certains médicaments innovants,
dont les résultats sont peu probants) et
de prendre en compte d’autres critères
que l’intérêt thérapeutique (garantie
de stabilité des prix pendant 5 ans au
motif de la réalisation d’investissements
dans l’Union européenne) .
Les ministres concernés adressent
cependant
au
CEPS
des
lettres
d’orientation qui fixent des objectifs
de plus en plus exigeants pour la négo-
ciation du prix des médicaments . Ainsi,
les orientations de 2016 prévoient que la
baisse du prix d’un produit doit entraîner
celle de l’ensemble des produits compa-
rables et que les médicaments non-inscrits
au répertoire doivent engendrer le même
niveau d’économies que les génériques . En
outre, les ministres prescrivent au CEPS
la réalisation d’objectifs d’économies
dont le montant a doublé depuis 2012 .
Les actions des pouvoirs publics visant
à peser sur le prix des médicaments ou à
en limiter les effets (clause de sauvegarde
plafonnant la dépense totale de médi-
caments et contribution spécifique
aux médicaments très onéreux de lutte
contre l’hépatite C, dont les entreprises
peuvent s’exonérer en versant des
remises) ont connu des résultats
significatifs . Depuis 2012, les dépenses
de médicaments remboursables en ville
sont orientées à la baisse . En 2015, elles
ont ainsi retrouvé leur niveau de 2008
(29,8 Md€) . Parmi les dépenses de soins
de ville, les médicaments apparaissent
comme le seul poste maîtrisé .
Des marges d’efficience
médico-économique
importantes mais encore
largement inexploitées
Malgré ces résultats, les prix d’un
grand nombre de médicaments sont
décorrélés de leur apport thérapeutique
véritable, entraînant des coûts induits
élevés pour l’assurance maladie et les
assurés .
La
garantie
de
prix
européens
conduit à la fixation durable de
prix élevés, désormais même pour
certains médicaments présentant
une ASMR faible .
À l’instar des autres pays de l’OCDE, les
remises accordées par les entreprises
sur le prix fabricant permettent de
réduire le prix net des médicaments .
Si elles procurent des recettes crois-
santes à l’assurance maladie (1 Md€ en
2015 contre 460 M€ en 2012), elles sont
cependant moins favorables à cette
dernière et aux assurés sociaux que
des baisses de prix fabricant : c’est
sur la base des prix fabricants que
s’appliquent les décotes de prix propres
aux génériques, les rémunérations
réglementées de la distribution des
médicaments et les taux de rembour-
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
51
La fixation du prix des médicaments : des résultats significatifs,
des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité,
un cadre d’action à fortement rééquilibrer
sement des dépenses par l’assurance
maladie . Même quand les conventions
avec les
entreprises le prévoient, les
remises ne sont pas systématiquement
transformées en des baisses de prix
fabricant passé un certain délai . Enfin,
elles sont pour partie compensées
par des avoirs dont bénéficient les
laboratoires .
Les prix des médicaments ne sont
pas révisés de manière suffisamment
fréquente . La loi ne définit pas de
critères en fonction desquels des
révisions
devraient
être
opérées .
L’accord cadre avec le LEEM reconnaît
au CEPS des possibilités de révision,
mais les révisions doivent toujours avoir
l’accord des entreprises concernées .
Beaucoup
d’extensions
d’indications
thérapeutiques - et donc de prescription
par les médecins - à des populations plus
larges que celles dont l’étroitesse a
favorisé l’obtention de prix élevés ne
sont pas suivies de révisions .
Enfin, des interventions des pouvoirs
publics conduisent parfois à fixer ou à
maintenir des prix anormalement élevés
au titre notamment de considérations
industrielles .
Renforcer l’instance
de négociation des prix
Le CEPS peine à réaliser les objectifs
de plus en plus ambitieux qui lui sont
assignés . Afin de réduire l’asymétrie
d’information par rapport aux entreprises
et permettre de déclencher des révisions
de prix plus systématiques sur le stock
de médicaments anciens, il est urgent de
renforcer substantiellement ses moyens,
qui sont très insuffisants sur le plan
humain (13 emplois) comme informa-
tique (des fonctionnalités essentielles
font défaut à ses applications) .
Au-delà, les missions du CEPS devraient
être élargies à la fixation du prix de
l’ensemble des médicaments achetés
par
les
établissements
hospitaliers,
qui sont aujourd’hui en grande partie
négociés par ces derniers dans une
situation
d’asymétrie
d’information
préjudiciable aux finances publiques
(les
hôpitaux
connaissent
les
prix
fabricant qui sont publics, mais pas ceux
nets de remises) .
Enfin, le positionnement institutionnel
du CEPS devrait être renforcé pour être
mieux en conformité avec l’importance
et la complexité de ses missions . À cette
fin, sa transformation en un établissement
public ou en une autorité administrative
indépendante mériterait d’être envisagée .
Rééquilibrer le cadre
de négociation des prix
Le cadre législatif devrait être rendu
plus complet et rigoureux, en donnant
un caractère limitatif aux critères de
fixation des prix et en prévoyant par la
loi des critères (limitatifs) de révision
automatique des prix fixés dans un
certain délai (de 3 ou de 5 ans) .
La négociation du prochain accord-cadre
avec le LEEM, qui doit entrer en vigueur
en
2018,
procure
l’occasion
d’une
redéfinition des relations des pouvoirs
publics avec les entreprises pharma-
ceutiques . Le mécanisme de garantie
de prix européen devrait être élargi à
d’autres pays, sa durée raccourcie et
son champ d’application restreint aux
médicaments ayant une ASMR majeure,
importante ou modérée . Le prix fabri-
cant devrait être aligné sur le prix net
de remises pour les médicaments ayant
une ASMR faible ou nulle . Les avoirs sur
remises devraient être supprimés .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
52
Le prix des médicaments est à fixer au
plus près de leur valeur thérapeutique
et de leur usage . L’évaluation médico-
économique, dont la portée reste limitée,
devrait être renforcée en en étendant le
champ aux médicaments à ASMR faible
et en redéfinissant la nature des
données attendues des entreprises
pharmaceutiques par la Haute Autorité
de santé, afin que ses avis d’efficience
soient plus opérants pour la négociation
des prix . Par ailleurs, la tarification à
l’indication devrait être expérimentée
pour les médicaments innovants et
coûteux de la « liste en sus » à l’hôpital .
Plus largement, la France (qui reste
le premier pays de référencement des
prix dans l’OCDE) doit favoriser des
convergences entre États en vue
de desserrer la contrainte liée à la
confidentialité des remises sur les
prix et de constituer des groupements
d’acheteurs publics au niveau européen,
notamment pour les médicaments
innovants et très coûteux .
La fixation du prix des médicaments : des résultats significatifs,
des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité,
un cadre d’action à fortement rééquilibrer
Recommandations
36.
 
augmenter
significativement,
par redéploiement au sein de l’État,
les effectifs et le budget du CEPS,
examiner les conditions d’un élar-
gissement de son rôle en matière
de fixation du prix des médicaments
hospitaliers et ouvrir une réflexion
sur une transformation de son statut
visant à renforcer son indépendance ;
37.
 donner un caractère limitatif aux
critères de fixation du prix des médi-
caments de l’article L . 162-16-4 du
code de la sécurité sociale ;
38. 
fixer par la loi des obligations de
révision du prix des médicaments, au
bout de cinq ans pour les médicaments
les plus innovants, au bout de trois ans
pour les autres médicaments et en cas
d’extension d’indication ayant un effet
significatif sur le nombre de patients
ou le volume des ventes ;
39.
  à l’occasion de la prochaine
renégociation
de
l’accord-cadre
entre le CEPS et le LEEM, réfor-
mer la garantie de prix européen,
notamment en élargissant le panel
des pays pris en compte, en raccour-
cissant sa durée et en réduisant son
périmètre, encadrer le recours aux
remises conventionnelles liées aux
volumes de ventes pour les médica-
ments d’ASMR IV et V et mettre fin à
l’attribution d’« avoirs sur remises » ;
40. 
pour la fixation du prix des médi-
caments génériques et biosimilaires,
prévoir dans le prochain accord-cadre
l’application de décotes au prix net
de remises du médicament princeps
ou du biomédicament d’origine ;
41.
 renforcer la prise en compte de
l’efficience des spécialités pharma-
ceutiques en élargissant le périmètre
des avis d’efficience de la HAS aux
médicaments d’ASMR IV, en y inté-
grant, pour les primo-inscriptions,
différents
scénarios
de
ratios
coût-efficacité et, à l’occasion des
révisions de prix, une réévaluation
sur la base du prix net de remises ;
42.
  expérimenter la tarification à
l’indication des médicaments de la
« liste en sus » ;
43.
  favoriser la constitution de
groupements d’acheteurs publics
dans le cadre européen, en vue
notamment de maîtriser le prix des
médicaments innovants à fort enjeu
sanitaire et financier .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
53
La chaîne de distribution des médicaments
fait intervenir trois acteurs : les entreprises
pharmaceutiques qui les produisent et
les livrent, 42 grossistes- répartiteurs
qui approvisionnent
22 000 pharmacies
d’officine et ces dernières qui les vendent
au public . En 2015, les médicaments
remboursables par l’assurance maladie
ont représenté 73,2 % du chiffre d’affaires
des officines (contre 77 % en 2009) .
Les dépenses de distribution constituent
une part importante, mais largement
méconnue, du coût des médicaments .
Aux rémunérations réglementées versées
par l’assurance maladie aux grossistes-
répartiteurs et aux officines, s’ajoutent en
effet des rétributions supplémentaires
versées par les entreprises pharmaceu-
tiques et les grossistes aux pharmacies,
en particulier au titre de la distribution
des génériques .
La Cour a pour la première fois procédé
à une estimation du coût complet de
la distribution en ville des médica-
ments remboursables par l’assurance
maladie . Selon elle, ce coût a atteint
près de 8,3 Md€ en 2015, soit près
d’un tiers (30,7 %) de la dépense de
médicaments remboursables délivrés
par les pharmacies en ville (27 Md€ )
5
En
maintenant
des
modes
de
rémunération et un environnement
réglementaire très protecteurs, les
pouvoirs publics font obstacle à une
indispensable
rationalisation
d’un
réseau officinal surdimensionné . Si ce
réseau rend un service apprécié tant
dans
son
activité
de
dispensation
que dans son rôle de conseil, c’est
au prix de coûts élevés et sous-
estimés .
Des
gains
d’efficience
apparaissent
indispensables,
tout
en veillant à préserver un maillage
territorial qui garantisse un accès de
proximité au médicament .
Un secteur fortement réglementé
caractérisé par un réseau officinal
surdimensionné
Les pharmaciens d’officine détiennent
un double monopole  : celui de la
distribution des médicaments dans
leurs officines et celui de la détention
de ces dernières . Sauf exception, leur
installation est conditionnée par des
critères populationnels .
La
taille
du
réseau
officinal
français a un caractère exceptionnel
au regard des pays comparables . Après
l’Espagne, la France est ainsi le pays
9
Le coût de distribution
des médicaments : une dépense
importante, des gains d’efficience
nécessaires
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
5
Par ailleurs, 2,8 Md€ de médicaments sont rétrocédés par les pharmacies hospitalières .
54
Le coût de distribution des médicaments :
une dépense importante, des gains d’efficience nécessaires
où chaque pharmacie dessert en
moyenne le plus faible nombre
d’habitants : 3 000 contre 3 400 en
Italie, 4  000 en Allemagne, 4  500
au Royaume-Uni (sans même évoquer
les pays nordiques de grande taille et
peu peuplés : 6 600 en Finlande et 7 100
en Suède) .
Au regard des critères encadrant en
principe la répartition démo-géogra-
phique des pharmacies, le nombre
d’officines est près de deux fois supérieur
au plafond règlementaire (10 400 offi-
cines en surnombre en France métropo-
litaine) . Au rythme actuel, très lent, de sa
réduction, un siècle serait nécessaire pour
que cet excédent se résorbe .
Pour sa part, le secteur de la répartition
a connu des restructurations importantes,
mais reste moins concentré que dans la
plupart des autres pays européens, en
raison
pour
partie
du
nombre
d’officines à desservir .
Le prix public des médicaments (pris
en charge en moyenne à 75 % par
l’assurance
maladie)
comprend,
en
plus du prix négocié avec le fabricant,
une marge rémunérant la distribu-
tion en gros et une rémunération de la
dispensation par les pharmaciens . Si la
rémunération de la distribution en gros
reste intégralement assise sur le prix
des médicaments, celle des officines
combine depuis 2015 un forfait de
rémunération à la boîte avec une
marge sur les prix qui se réduit .
Des rémunérations élevées
et peu transparentes
Sans
méconnaître
la
fragilité
économique d’environ 10 % d’entre
elles (situées surtout dans de très
grandes agglomérations où elles sont
souvent en surnombre), la plupart des
pharmacies d’officine affichent une
rentabilité élevée et croissante : leur
excédent brut d’exploitation est passé
en moyenne de 8 % en 2009 à 8,8 % en
2015 du chiffre d’affaires .
L’amélioration
de
leur
performance
économique ne s’explique pas seulement
par la diversification de leur activité
au-delà des médicaments remboursables
(produits de parapharmacie à forte marge) .
Malgré la baisse des dépenses de
médicaments remboursables qu’elles
délivrent
(-2,1
Md€,
soit
-7,1
%
entre 2011 et 2015), la rémunération
réglementée des pharmacies d’officine
(5,4 Md€ en 2015) est restée quasiment
stable en valeur absolue depuis 2007 . En
effet, l’introduction de la rémunération
sur objectifs de santé publique (ROSP)
au titre de la dispensation des géné-
riques (2013), puis celle des honoraires
de dispensation (2015), l’ont préservée
de la plupart des conséquences des
baisses de prix obtenues par les pouvoirs
publics, de la diffusion croissante des
génériques, de la baisse du nombre
de boîtes délivrées et du déplacement
d’une partie de la dispensation vers
les pharmacies hospitalières .
Au-delà
de
leur
rémunération
réglementée, les pharmacies d’officine
bénéficient de surcroît de rémuné-
rations complémentaires de la part
des entreprises pharmaceutiques et
des grossistes-répartiteurs, qui, sur
la base des seuls éléments connus,
peuvent être évaluées à 2 Md€ en
2015 :
- les officines perçoivent la rémunération
réglementée de la répartition quand les
entreprises pharmaceutiques nefontpas
appel aux grossistes-répartiteurs pour
les approvisionner et pratiquent
des ventes directes (293 M€ de
rémunérations en 2015) ;
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
55
Le coût de distribution des médicaments :
une dépense importante, des gains d’efficience nécessaires
- afin de contrer les ventes directes, les
grossistes-répartiteurs
reversent
aux officines la totalité de leur marge
réglementée
sur
les
génériques
(223 M€ en 2015) ;
- les entreprises pharmaceutiques
accordent aux officines d’importants
avantages
commerciaux
(remises,
marges arrière…), tout particuliè-
rement pour les génériques pour le
placement desquels elles sont en vive
concurrence (1,1 Md€ déclarés pour
les génériques pour 2015 ; 350  M€
évalués pour les
princeps
, pour
lesquels il n’existe pas d’obligation
similaire de déclaration à la charge
des entreprises) . Les contrôles effec-
tués par les services du ministère
de l’économie font apparaître la
persistance de pratiques illégales de
dépassement des plafonds autorisés
de remises .
Le coût total de la distribution des
médicaments
remboursables
par
l’assurance maladie a ainsi atteint près
de 8,3 Md€ en 2015, dont 7,4 Md€ pour
les pharmacies d’officine et 0,9 Md€
pour les grossistes-répartiteurs .
Le coût de la distribution des génériques
apparaît en particulier considérable .
Près de 50 % de la dépense (2,2 Md€)
revient
aux
pharmacies
d’officine
qui bénéficient du cumul de quatre
dispositifs de rémunération : marge
réglementée
égale
à
celle
des
princeps
, honoraires de dispensation
favorables aux médicaments à bas
prix, avantages commerciaux des
entreprises pharmaceutiques (soit
34 % de leur chiffre d’affaires sur la
vente des génériques) dans la limite
de 40  % du prix des génériques et
rétrocession de la marge réglementée
de la répartition . Fondée sur le droit de
substitution des pharmaciens à ceux
prescrits, plutôt que sur leur prescrip-
tion par les médecins, la diffusion
des génériques repose ainsi sur des
mécanismes très onéreux . Ils sont
pour partie à l’origine de l’écart de
prix sur les génériques qui peut être
constaté entre la France et ses voisins .
Estimation de la rémunération complète - réglementée
et non réglementée - des pharmacies d’officine (2015)
Source : Cour des comptes d’après les données de la CSRP et du CEPS
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
56
Le coût de distribution des médicaments :
une dépense importante, des gains d’efficience nécessaires
Baisser le coût de la distribution
en révisant les modes
de rémunération des acteurs
L’écart
considérable
entre
la
rémunération
réglementée
des
pharmacies d’officine sur les médica-
ments remboursables (5,4 Md€ en 2015)
et leur rémunération réelle (7,4 Md€
estimés
pour
cette
même
année,
soit un surcroît de 38 %) apparaît
méconnu des pouvoirs publics comme
de l’assurance maladie .
L’avenant n° 11 à la convention natio-
nale des pharmacies signé à l’été 2017
dessine un schéma de financement très
protecteur des officines . Il poursuit la
désensibilisation de leur rémunération
réglementée au prix (les honoraires de
dispensation en représentent désormais
75 %), instaure une garantie individuelle
de non réduction de leur rémunération
réglementée du fait de cette réforme
et prévoit de nouveaux instruments de
rémunération ainsi que des revalorisa-
tions de ceux existants . Il engendre des
coûts supplémentaires de distribution de
280 M€, étalés entre 2018 et 2020
(dont
161
M€
pour
l’assurance
maladie et 119 M€ pour les assurances
complémentaires) .
Positive dans son principe, la désen-
sibilisation aux prix de la rémunéra-
tion réglementée des officines devrait
être menée à son terme, tout en étant
accompagnée de mesures visant à en
réduire le montant :
-  la rémunération réglementée de
la dispensation devrait avoir pour
assiette le nombre de patients
auxquels des médicaments sont
délivrés, et non plus le nombre de
boîtes, qui a un effet inflationniste ;
-  l’assurance maladie devrait bénéficier
d’une réduction du coût extrêmement
élevé de distribution des génériques,
par la remise en cause de la règle de
l’égalité de rémunération entre
princeps
et génériques pour la marge régle-
mentée restante, initialement conçue
comme temporaire, et par un relève-
ment significatif du taux de la décote
appliquée sur le prix de la spécialité
de référence, aujourd’hui fixé à 60  %
par l’accord-cadre passé par l’État
avec les représentants des entreprises
pharmaceutiques ;
- le taux de la part de la taxe sur les
ventes en gros, créée spécifiquement
pour permettre à l’assurance maladie
de récupérer une partie des marges
de distribution de gros perçues par les
officines, devrait être relevé .
De
même,
la
rémunération
des
grossistes-répartiteurs devrait être assise
sur les volumes, et non plus sur les prix
des boîtes livrées .
Rationaliser le réseau officinal
Plus largement, la rationalisation du
réseau officinal pourrait passer par une
révision des règles d’implantation et de
possession des pharmacies d’officine,
tout en étant attentive au maintien d’un
maillage de proximité suffisant par des
aides spécifiques aux pharmacies, en
nombre limité (400 à 500), qui jouent un
rôle stratégique en matière d’accès aux
médicaments dans certains territoires
ruraux et péri-urbains,
afin d’accélérer les
regroupements .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
57
Le coût de distribution des médicaments :
une dépense importante, des gains d’efficience nécessaires
Pourraient aussi se développer des formes
nouvelles de distribution, qui supposent
notamment de substituer au monopole
de distribution officinal un monopole
de dispensation du pharmacien, le cas
échéant salarié, dans le respect des
principes déontologiques visant à garantir
les conditions de qualité et de sécurité de
dispensation du médicament auxquels est
soumise cette profession de santé .
Dans le cadre même du monopole de
distribution officinal, la rationalisation
du réseau officinal pourrait être accélé-
rée en favorisant une concurrence accrue .
Ainsi, le monopole officinal pour-
rait
être
limité
aux
médicaments
délivrés
sur
ordonnance
médicale .
En
outre,
les
règles
relatives
aux
ventes sur internet de médicaments à
prescription facultative pourraient être
assouplies .
Afin de prévenir une déstabilisation de
ce maillon, la réglementation relative
à la distribution en gros devrait être
mieux appliquée afin de lutter contre
les pratiques illégales de contournement
(grossistes-répartiteurs
ne
proposant
qu’une gamme partielle de médicaments,
revente de médicaments à d’autres
officines par certaines pharmacies
ou par des centrales d’achats) .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
58
Le coût de distribution des médicaments :
une dépense importante, des gains d’efficience nécessaires
44.
  désensibiliser la rémunération
des acteurs de la distribution au
prix des médicaments en fondant
celle des pharmacies d’officine sur
l’acte de dispensation au patient,
indépendamment
du
nombre
de
boîtes vendues, et celle des grossistes
répartiteurs sur le nombre de boîtes
livrées aux officines ;
45.
  dans cette perspective, supprimer
la règle relative à l’égalité des marges
officinales entre médicaments princeps
et médicaments génériques ;
46.
  prendre en compte dans la
tarifiction des médicaments géné-
riques les marges supplémentaires
de baisse de prix que font apparaître
les avantages commerciaux de toute
nature accordés par les entreprises aux
officines pharmaceutiques, en relevant
significativement le taux de décote
appliqué
au
moment
de
la
commercialisation d’un générique ;
47. 
augmenter le taux de la troisième
part de la contribution sur les ventes
en gros de médicaments prévue à
l’article L . 138-1 du code de la sécurité
sociale ;
48. 
rendre obligatoire la déclaration
au Comité économique des produits
de santé des remises, ristournes et
avantages commerciaux et financiers
assimilés de toute nature accordés
par les entreprises du secteur pharma-
ceutique aux pharmacies d’officine au
titre des médicaments
princeps
, à l’instar
des médicaments génériques ;
49. 
substituer au monopole officinal
un monopole du pharmacien, en
renforçant
sous
le
contrôle
de
l’Ordre des pharmaciens les garanties
d’indépendance professionnelle en
cas d’emploi salarié ;
50.
  simplifier la réglementation
relative aux ventes en ligne afin
de favoriser l’essor des ventes
en
ligne
de
médicaments
à
prescription médicale facultative ;
51.
 mettre en place une aide finan-
cière spécifiquement destinée aux
pharmacies
d’officine
identifiées
comme remplissant une fonction
de desserte de populations isolées
et qui connaîtraient des difficultés
économiques à la suite des réformes
engagées ;
52.
 
renforcer
les
contrôles
visant
à
faire
respecter
les
dispositions
réglementaires relatives à la sécurité et
à la logistique des approvisionnements
en matière de ventes en gros .
Recommandations
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Quatrième partie
Réformer les aides aux familles
61
10
Les soutiens fiscaux et sociaux
aux familles en France :
une mise en perspective
internationale
La France est généralement créditée
d’une politique originale, forte et efficace
de soutien financier aux familles, par la
voie de prestations familiales monétaires
et ennature et d’avantages fiscaux
(59,4 Md€ au total, soit 2,7 % du PIB
en 2015), qui favoriserait notamment
la permanence d’un taux de natalité
relativement élevé (près de deux
naissances par femme) .
La Cour a comparé le système
français d’aides aux familles à ceux
d’un
échantillon
d’une
dizaine
de
pays
européens .
Cette
mise
en perspective permet d’enrichir
la réflexion sur les voies d’évolution
possibles
de
notre
système
d’aides
aux
familles
en
mettant
en
lumière
la
manière
dont
des
pays
comparables
ont
cherché
à
répondre aux enjeux et aux objectifs
explicitement assignés aux aides aux
familles dans notre pays : la prise en
charge du coût de l’enfant, la lutte contre
la pauvreté des familles et la conciliation
de la vie familiale et professionnelle .
Plusieurs pays ont effectué des choix
plus clairs en concentrant leurs efforts
sur un nombre plus réduit d’objectifs
sur lesquels ils obtiennent de meilleurs
résultats, notamment en matière de
réduction de la pauvreté .
Un soutien aux familles
en France à l’originalité
moins marquée
En prenant pour référence les données
de l’OCDE (qui intègrent notamment
le coût de l’école maternelle), la France
était le pays qui consacrait en 2014
la part la plus élevée de sa richesse
nationale au soutien aux familles
(3,7 %), derrière le Royaume-Uni (4 %),
l’Allemagne se situant derrière (3,1 %)
en dépit d’un effort important dans la
période récente . Cette part est stable
depuis le début des années 2000 .
Soutien aux familles ventilé
par modalité d’intervention (en % du PIB,
2013 ou dernière année disponible)
Source : OCDE – base de données sur la famille,
présentation Cour des comptes.
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
62
Les soutiens fiscaux et sociaux aux familles en France :
une mise en perspective internationale
La France s’inscrit dans le groupe des
pays qui consacrent les montants les
plus importants par enfant : elle se situe
en tête pour les aides fiscales, dépassée
seulement par l’Allemagne, et est placée
dans la moyenne pour les prestations
monétaires et en nature .
Sous l’effet des réformes intervenues
de part et d’autre, les systèmes nationaux
se sont rapprochés : renforcement de
l’effort consacré à l’accueil du jeune
enfant, modulation croissante des
prestations en fonction des ressources
et extension du partage du congé familial
au sein des couples .
Au-delà de l’incidence d’un plus grand
nombre d’enfants, en raison d’une
fécondité plus élevée que dans la
plupart
des
autres
pays
comparables, la position relative de
la France quant au montant moyen
des aides par enfant s’est érodée
sous l’effet du renforcement de leur
effort financier par d’autres pays
(Allemagne notamment) .
Le
système
français
conserve
néanmoins des singularités fortes,
tant par la diversité des aides que par
la multiplicité de celles consacrées à
l’accueil du jeune enfant .
De bons résultats d’ensemble
des soutiens aux familles
en France, à nuancer
pour certains publics
En France, la contribution des aides
aux familles à la prise en charge du
coût de l’enfant est importante à tous
les niveaux de revenus, y compris
élevés, même après les réformes de
2012-2015
Niveau de soutien selon l’âge de l’enfant
pour un couple élevant trois enfants
et ayant un revenu égal à 300 %
du salaire moyen (2014)
(en % du salaire moyen)
Source : Cour des comptes d’après les données
OCDE 2014 actualisées.
Les aides aux familles jouent un rôle
important dans la réduction de la
pauvreté des familles avec enfants .
Taux de pauvreté des familles
avec enfant(s) avant et après transferts
sociaux (2015)
Les revalorisations de prestations programmées
en France après 2015 ne sont pas prises en
compte ici.
Source : Eurostat
35 %
30 %
25 %
20 %
15 %
10 %
5 %
0 %
3 4 5 6 7 8
9 10
13141516
1112
17
20212223
1819
25262728
24
Allemagne
Royaume-Uni
France avant réforme
France après réforme
Suède
Espagne
Danemark
Italie
0 %
5 %
10 %
15 %
20 %
25 %
30 %
35 %
40 %
45 %
50 %
Espagne
Italie
Royaume-Uni
France
Belgique
Autriche
Allemagne
Pays-Bas
Suède
Danemark
Avant transferts sociaux
Après transferts sociaux
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
63
Les soutiens fiscaux et sociaux aux familles en France :
une mise en perspective internationale
Cependant,
les
transferts
sociaux
n’annulent pas l’écart de taux de
pauvreté des familles avec enfants
par rapport à celles sans enfant, contrai-
rement à d’autres pays . Si la plupart
des autres pays obtiennent de moins
bons résultats sur ce point, près de 15 %
des enfants vivent en France dans une
famille monoparentale connaissant des
privations matérielles sévères .
Taux de pauvreté des familles de deux
adultes en fonction du nombre d’enfants
(2014, sans enfant = base 100)
Les revalorisations de prestations programmées
en France après 2015 ne sont pas prises en
compte ici.
Source : Cour des comptes d’après données
Eurostat.
À l’exception des pays nordiques, la conci-
liation vie familiale - vie professionnelle
est relativement aisée en France par
rapport aux autres pays comparables .
L’offre d’accueil du jeune enfant est
diversifiée (prestations monétaires
avec la PAJE, prestations en nature
sous la forme de subventions à la garde
par des assistantes maternelles ou en
établissement), étendue, financièrement
accessible (faible reste à charge pour
les parents) et comporte une forte
contribution
du
système
éducatif
(école maternelle avant 6 ans généralisée,
plage étendue d’horaires scolaires) .
Toutefois, si le taux d’emploi des
femmes en France est relativement
élevé, celui des mères de familles
nombreuses se situe davantage dans
la moyenne . Il est particulièrement
faible quand elles ont un enfant
de moins de 6 ans . Malgré un coût
relativement modeste, les modes de
garde touchent comparativement
peu les familles dont les revenus sont
faibles et les difficultés d’insertion sont
les plus fortes .
Mode de garde principal des enfants
de moins de 3 ans selon le niveau
de revenus (2013, par quintile)
Source : Direction de la recherche, de l’évaluation
et des études statistiques (DREES).
Des problématiques à approfondir
En France, si le reste à charge au
titre des modes de garde formalisés
est réduit, l’inactivité d’un parent
et la garde de l’enfant tendent à se
renforcer mutuellement . Au-delà des
pays nordiques, pour lesquels l’accueil
en établissement est généralisé à partir
d’un an, d’autres pays mettent en œuvre
des actions incitatives visant à contrer
le faible taux de recours aux services
de garde des familles les plus précaires,
nombreuses ou éloignées de l’emploi .
0 %
50 %
100 %
150 %
200 %
250 %
300 %
350 %
Espagne
France
Royaume-Uni
Autriche
Italie
Pays-Bas
Suède
Irlande
Danemark
Belgique
Allemagne
Deux adultes
Deux adultes, un enfant
Deux adultes, deux enfants
Deux adultes, trois enfants et plus
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
89%
80%
67%
46%
32%
11%
20%
33%
54%
68%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
Q1
Q2
Q3
Q4
Q5
Famille
Mode de garde formalisé
64
Les soutiens fiscaux et sociaux aux familles en France :
une mise en perspective internationale
En France, les soutiens aux familles
sont moins ciblés sur les familles
pauvres que dans beaucoup d’autres
pays européens . Bien que l’écart se
soit atténué sous l’effet des réformes
récentes, notre pays offre la politique
familiale la plus favorable aux revenus
intermédiaires et élevés . Dans d’autres
pays (Royaume-Uni notamment), un
ciblage accru des aides est à l’origine
de meilleurs résultats en matière de
réduction de la pauvreté des familles .
En France, les soutiens aux familles
sont
croissants
avec
le
rang
de
l’enfant, en privilégiant ainsi les familles
nombreuses . Pour autant, la situation
des familles avec un enfant n’est pas
particulièrement favorable . Par ailleurs,
d’autres pays apportant un soutien
dès le premier enfant obtiennent des
résultats proches de ceux de la France
en matière de fécondité globale, voire
de naissances de rang 3 .
En France, les aides fiscales relevant du
budget de l’État tiennent une place
importante
dans
l’ensemble
des
aides aux familles, à la différence
de la plupart des autres pays compa-
rables . Contrairement à d’autres pays
(Allemagne), les aides fiscales et sociales
sont des dispositifs indépendants, non
coordonnés et dont l’interaction suscite
des ressauts pour les familles ayant des
revenus élevés .
Cette mise en perspective internationale
met ainsi en lumière des questions
essentielles pour notre propre politique
familiale : place respective des prestations
en nature et des prestations monétaires
pour l’accueil du jeune enfant, degré de
ciblage et de redistribution des prestations,
calibrage du niveau de soutien en fonction
du rang de l’enfant et bien-fondé de
la dualité de la gestion des aides sociales
et fiscales par une branche de la sécurité
sociale et au sein du budget de l’État .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
65
La Cour dresse un premier bilan des
réformes
des
soutiens
fiscaux
et
sociaux aux familles qui ont été mises
en œuvre entre 2012 et 2015 . À partir
d’études pour la plupart inédites, elle
éclaire de manière détaillée leurs effets
sur la situation des familles en fonction
de leur revenu et de leur configuration .
De grande ampleur, ces réformes ont
atteint une partie de leurs objectifs .
Elles laissent en suspens des enjeux
relatifs aux priorités et aux outils de la
politique familiale et au cadre financier
des prestations familiales .
Des prestations profondément
réformées à coût globalement
constant, voire réduit
Entre 2012 et 2015, la politique
familiale a été reconfigurée dans le
sens d’une redistribution nettement
accrue entre les familles :
- diminution en deux étapes du plafond
de la réduction d’impôt sur le revenu
par demi-part procurée par le quotient
familial (de 2 336 € à 1 500 €) ;
- revalorisations de prestations sous
conditions de ressources : +25 %
pour l’allocation de rentrée scolaire
(2012), +25 % pour l’allocation de
soutien familial, +50 % pour le
complément familial et +10 %
pour le RSA (étalées entre 2014
et 2018) ;
-  sélectivité accrue de la prestation
d’accueil du jeune enfant (PAJE) en
fonction des ressources : abaissement
du plafond de ressources pour béné-
ficier de la prestation, création d’un
seuil intermédiaire à partir duquel
elle est réduite de moitié, suppression
de la majoration du complément de
libre choix d’activité (CLCA) pour
les familles qui ne percevaient pas
l’allocation de base du fait de revenus
élevés, abaissement des plafonds et
des seuils intermédiaires de perception
du complément de mode de garde
(CMG) ;
- division par deux ou par quatre du
montant des allocations familiales
au-delà de certains seuils de revenus
(depuis la mi-2015) .
Désormais la presque totalité des
prestations
familiales
sont
attri-
buées ou modulées en fonction des
ressources,
ce
qui
constitue
une
mutation historique de la politique
familiale française, en ligne avec
les dispositifs mis en œuvre dans la
plupart des pays comparables .
Les réformes récentes
des prestations familiales
et de la fiscalité des familles :
des transferts massifs,
des questions en suspens
11
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
66
Les réformes récentes des prestations familiales
et de la fiscalité des familles : des transferts massifs,
des questions en suspens
Compte tenu d’une montée en charge
plus lente que prévu de l’augmentation
des dépenses de la branche famille en
faveur de l’accueil collectif des enfants
en bas âge, les réformes des aides aux
familles, qui devaient être équilibrées
sur le moyen terme, améliorent les
soldes de la branche famille et de
l’État . En 2016, elles contribuent
ainsi à hauteur de 0,6 Md€ annuel
au retour à l’équilibre de la branche
famille, prévu pour 2017 .
Des transferts massifs entre
familles aux deux extrémités
de la distribution des revenus
À la suite des réformes, les familles
vulnérables bénéficient d’un soutien
accru, tandis que les charges des
familles aisées sont moins compensées .
Les familles du dernier quintile de
revenus ont d’autant plus contribué
aux réformes qu’elles ont davantage
d’enfants, tandis que celles du pre-
mier quintile en ont été les principales
bénéficiaires, notamment les familles
monoparentales avec deux enfants et
plus et les couples avec trois enfants
et plus, avec des effets très sensibles
au début du premier et à la fin du dernier
quintile .
Les familles aux revenus intermédiaires
ont été globalement peu affectées, sauf
la minorité qui a perdu tout ou partie
du bénéfice de l’allocation de base de la
PAJE .
Au total, 136 000 familles ont « perdu »
plus de 5 000 € par an, dont 89 000 de
3 enfants et 29 000 de 4 enfants et plus .
À l’inverse, 395  000 familles ont
«  gagné  » plus de 2  000  € par an,
dont 125 000 de 3 enfants et 118 000
de 4 enfants et plus .
Incidence des réformes à l’issue de leur montée en charge sur le niveau de vie
des familles selon leur composition et leur niveau de vie (par quintile)
Note de lecture : Pour chaque configuration familiale, les ménages sont répartis par quintiles
de niveau de vie croissants.
Source : direction du Trésor, modèle Saphir, hors impacts du gel de l’allocation logement en 2014
et du remplacement du RSA activité et de la prime pour l’emploi par la prime d’activité en 2016
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
67
Les réformes récentes des prestations familiales
et de la fiscalité des familles : des transferts massifs,
des questions en suspens
À la suite des réformes, les aides
aux familles n’ont plus un caractère
globalement croissant avec les revenus .
La « courbe en U », qui reflétait aupa-
ravant l’augmentation des aides avec
celle du revenu, principalement par le
jeu du quotient familial, est désormais
aplanie, sans être pour autant parfai-
tement linéaire .
Montant moyen des prestations monétaires
et de l’effet du quotient familial par enfant
avant et suite aux réformes à l’issue
de leur montée en charge
(par décile de niveau de vie initial)
Source : CNAF, hors gel de l’allocation logement
en 2014.
Des objectifs non atteints
en matière de conciliation
de la vie familiale et de la vie
professionnelle
En 2014, l’accueil des jeunes enfants
de moins de 3 ans était assuré pour
41 % d’entre eux par un mode de
garde formalisé externe à la famille
(321 000 assistantes maternelles, qui
constituent le premier mode de garde,
13 700 établissements d’accueil et
40 000 gardes à domicile) .
Les pouvoirs publics ont programmé la
création de 275 000 places supplémen-
taires d’accueil entre 2013 et 2017  :
hausse du nombre de places en
établissement
(par
création
ou
occupation accrue) et d’enfants
gardés par les assistantes maternelles,
extension de la scolarisation à deux
ans . Compte tenu de la non réalisation
de ceux relatifs à la garde par des
assistantes maternelles et à la scola-
risation à deux ans, cet objectif ne sera
pas atteint  : en prolongeant sur 2016
et 2017 le rythme de création observé
entre 2013 et 2015, seules 50 000 places
seraient créées .
Le remplacement du CLCA de la PAJE
par la prestation partagée d’éducation
de l’enfant (PREPARE), qui partage
entre les parents la durée de versement
de la prestation et incite les mères à
revenir plus rapidement sur le marché
du travail à la suite d’une naissance, se
traduit à ce stade par une forte réduction
du recours à cette prestation .
Des choix à réinterroger
Les enjeux de la politique familiale
devraient être mieux éclairés . Afin
d’améliorer le pilotage des soutiens
aux familles, le Haut Conseil de la
famille,
de
l’enfance
et
de
l’âge
(HCFEA) devrait avoir pour mission
d’actualiser régulièrement les projections
démographiques et financières (comme
c’est le cas du conseil d’orientation des re-
traites - COR) .
Une partie des résultats des réformes
et la mise en perspective internationale
des soutiens aux familles en France
(recours réduit des familles pauvres
aux modes de garde formalisés, au
détriment de l’insertion professionnelle
des mères, étendue des situations de
pauvreté pour les familles nombreuses
et monoparentales ayant un ou plusieurs
Avant réformes
En € par enfant
et par mois
1
200
225
250
275
300
325
350
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Déciles de niveau de vie
Après réformes
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
68
Les réformes récentes des prestations familiales
et de la fiscalité des familles : des transferts massifs,
des questions en suspens
enfants et maintien de niveaux élevés et
non linéaires de soutien pour les familles
à revenus élevés) soulèvent des interro-
gations quant au degré d’adaptation
des priorités et des instruments de
la politique familiale .
La Cour identifie plusieurs voies
d’évolution des soutiens aux familles
pour favoriser, le cas échéant, une
participation accrue des mères de
famille au marché du travail, apporter
un soutien plus affirmé aux familles
pauvres monoparentales ou nombreuses
et mieux prendre en compte les charges
liées au premier enfant, ainsi que
des redéploiements de dépenses
et d’avantages fiscaux de nature à
permettre de financer ces évolutions à
coût constant .
Selon le cas, ces voies d’évolution
mettraient en jeu des ajustements ci-
blés (majoration de la prime d’activité
pour les ménages ayant des enfants
de moins de 3 ans, revalorisation du
complément familial et de l’ allocation
de soutien familial (ASF), majoration de
la prime de naissance ou de la PAJE pour
les familles à un enfant) ou des réformes
de grande ampleur (développement
des structures d’accueil portant le taux
de garde au niveau suédois, attribution
des allocations familiales dès le premier
enfant) .
La portée des redéploiements néces-
saires au financement des mesures
envisageables varie ainsi fortement
en fonction de leur degré d’ambition .
En tout état de cause, il importe que
soient effectués des choix clairs quant
aux orientations de la politique familiale
afin d’en renforcer les effets sur les
objectifs qui seront privilégiés .
Un cadre financier à mettre
en débat
En dehors d’une moindre volatilité des
impôts et taxes qui lui sont affectés et
des effets des réformes de la politique
familiale, l’équilibre de la branche
famille est favorisé par une dynamique
structurellement plus rapide de ses
recettes (en grande partie assises sur
les salaires) que celle des dépenses
de prestations (dont les montants et
plafonds d’attribution sont indexés
sur les prix) . Les excédents attendus
à partir de 2018 devraient servir en
priorité à amortir la dette liée aux
déficits 2015 et 2016 qui n’a pas été
transférée à la CADES (2,5 Md€) .
Au-delà,
les
évolutions
récentes
apportées aux recettes (baisse des
taux des cotisations famille, taux effectif
de cotisation réduit par les allègements
généraux de cotisations et le CICE) et
aux dépenses de la branche famille
(financement
désormais
intégral
des aides au logement par le budget
de l’État) interrogent la pertinence
même du rattachement des prestations
familiales à la sécurité sociale . Dans
l’ensemble des prestations versées
par les CAF, celles de la branche famille
sont désormais minoritaires par rapport
à celles de l’État (aides au logement,
AAH, prime d’activité) .
Sans remettre en cause le rôle des CAF
dans leur versement, un financement
intégral des prestations familiales par
le budget de l’État et l’intégration à
un même cadre financier - la loi de
finances - qui en résulterait mériteraient
d’être examinés afin de favoriser une
mise en perspective globale des enjeux
de la politique familiale et une meilleure
articulation de ses instruments fiscaux
et sociaux, qui fait aujourd’hui défaut .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
69
Recommandation
53.
  confier au Haut Conseil de la
famille, de l’enfance et de l’âge la
mission d’analyser les perspectives
à moyen et long terme des soutiens
fiscaux et sociaux aux familles au
regard des évolutions économiques,
sociales et démographiques .
La Cour propose par ailleurs les deux
orientations suivantes :
-  établir les priorités des aides
aux familles et clarifier les choix
relatifs à plusieurs enjeux majeurs :
équilibre entre prestations en nature
et prestations monétaires pour
l’accueil du jeune enfant, degré
de ciblage et de redistribution
des prestations et calibrage du
niveau de soutien en fonction du
rang de l’enfant ;
- examiner la question d’une budgéti-
sation du financement des prestations
familiales afin notamment de mieux
articuler entre eux les outils fiscaux et
sociaux qui participent au soutien des
familles .
Les réformes récentes des prestations familiales
et de la fiscalité des familles : des transferts massifs,
des questions en suspens
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
Cinquième partie
Améliorer les performances
de la gestion de la sécurité sociale
73
12
Les établissements de santé
et médico-sociaux du régime
général d’assurance maladie :
un impératif d’équilibre
financier, une stratégie
à refonder
Depuis
2000,
les
établissements
sanitaires et médico-sociaux de la
branche maladie du régime général
sont regroupés au sein de 13 unions
de gestion des caisses d’assurance
maladie
(UGECAM),
dotées
de
la
personnalité morale et suivies par
une direction de la Caisse nationale
d’assurance maladie des travailleurs
salariés (CNAMTS) .
En
2016,
les
UGECAM
géraient
238 établissements, dont 82 à caractère
sanitaire, principalement dans le secteur
des soins de suite et de réadaptation
(SSR) et 156 à caractère médico-social,
surtout tournés vers la prise en charge
du handicap et des troubles du compor-
tement des enfants et adolescents . Elles
réalisaient 1 Md€ de recettes d’activité
avec près de 14 000 salariés .
Au-delà de la nécessaire résorption
de
déséquilibres
financiers
plus
prononcés qu’affiché, le bien-fondé
de la gestion directe de structures
de soins par l’assurance maladie doit
être réexaminé .
Une offre dispersée dont le volet
sanitaire se réduit et le volet
médico-social se développe
Fruit de l’histoire, le maillage territorial
des UGECAM est très inégal et présente
de grandes disparités . Dans certaines
régions, les UGECAM jouent un rôle
important
dans
l’offre
de
soins
(17 % de part de marché en SSR dans
la région Grand Est, par exemple) . Dans
d’autres régions, leur présence est plus
réduite .
Dans le champ sanitaire, 540 lits,
soit 7 % des capacités, ont été fermés
entre 2006 et 2015 . Cette réduction
s’est accompagnée d’une poursuite du
recentrage de l’activité des établisse-
ments sanitaires sur les SSR, avec
des expertises reconnues dans la
prise en charge de pathologies sévères
(amputés, grands brûlés, blessés
médullaires) . Cependant, la restructu-
ration des établissements sanitaires est
incomplète . Beaucoup sont trop petits
(65  % ont moins de 100 lits, 25 % moins
de 50), mal situés et insuffisamment
spécialisés, sans expertise particulière
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
74
Les établissements de santé et médico-sociaux du régime
général d’assurance maladie : un impératif d’équilibre
financier, une stratégie à
refonder
Dans le même temps, le nombre
de places dans les établissements
médico-sociaux a augmenté de 26 %,
par l’ouverture de nouvelles capacités
et la reprise de structures existantes .
Cette croissance s’est effectuée au gré
des opportunités, en réponse à des
appels à projet des ARS, sans stratégie
d’ensemble .
Bien que le « groupe UGECAM » soit
un acteur important du secteur privé
non lucratif dans les champs sanitaire
et médico-social, son positionnement
et
son
développement
souffrent
ainsi d’un défaut de planification
stratégique de moyen terme, très
préjudiciable au regard des déficits
récurrents de la plupart des unions .
Des déficits persistants
et pour partie masqués
Depuis
trois
ans,
le
«
groupe
UGECAM  » dégage chaque année
un déficit compris entre 10 et 20 M€
(11,5  M€ en 2014, 20,1 M€ en 2015,
10,3 M€ en 2016) .
Sauf exception, toutes les UGECAM
sont déficitaires . L’objectif fixé par la
convention d’objectifs et de gestion
de l’assurance maladie avec l’État
(COG) pour 2014 à 2017 d’un retour
à l’équilibre de toutes les unions d’ici
2017 ne sera pas atteint .
Les
déficits
d’exploitation
sont
partiellement
compensés
par
des produits financiers liés à une
trésorerie excédentaire et par des
recettes exceptionnelles liées à
des cessions d’immeubles . Ils sont
encore plus prononcés que les
déficits globaux . Ils proviennent
des
établissements
sanitaires,
dont huit d’entre eux, souvent de
grande taille, en concentrent les
deux tiers .
Les
déficits
des
UGECAM
sont
eux-mêmes minorés par des concours
financiers directs et indirects de la
CNAMTS : financement d’une partie du
coût de l’intéressement des personnels
et des charges liées aux restructura-
tions, non facturation des charges de la
direction nationale du « groupe UGE-
CAM » et d’intérêts au titre des avances
de la CNAMTS pour financer une part
prépondérante des investissements des
unions (730 M€ d’encours à fin 2016) .
La convention d’objectifs et de gestion
(COG) de la branche maladie avec l’État
pour 2010-2013 prévoyait d’y mettre fin,
mais elle n’a pas été appliquée sur ce
point .
Après déduction des concours de
la CNAMTS, les déficits d’exploi-
tation des UGECAM entre 2012 et
2016 sont plus du double de ceux
comptabilisés  : 165,5 M€ en cumul
contre 73,1 M€ . Sans même prendre
en compte la non rémunération des
avances de la CNAMTS au titre des
investissements, les déficits globaux
sont quant à eux près de quatre fois
plus élevés : 129,6 € contre 37,2 M€ .
Au-delà
du
manque
de
taille
critique de certains établissements
et unions, les efforts de redressement
se heurtent à un important surcoût
salarial
par
rapport
aux
autres
établissements de droit privé à caractère
non lucratif (jusqu’à 45  % après trente
années d’exercice pour les infirmiers,
aides-soignants et agents de service), sous
l’effet des dispositions de la convention
collective des agents du régime général de
sécurité sociale .
Un retour à l’équilibre
et une réorganisation
à mettre en œuvre sans délai
Alors
que
les
conditions
de
financement de droit commun par
l’assurance maladie sont appelées à
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
75
Les établissements de santé et médico-sociaux du régime
général d’assurance maladie : un impératif d’équilibre
financier, une stratégie à
refonder
se resserrer, le retour à l’équilibre des
UGECAM doit constituer une priorité
de premier rang de la prochaine COG
2018-2021 de l’assurance maladie .
Dans le même temps, il importe de
normaliser les relations financières
des UGECAM avec la CNAMTS en
mettant fin à la plupart de ses aides
financières .
Ainsi, les efforts de redressement
doivent
être
accentués
par
le
renforcement
du
pilotage
de
la
direction nationale de la CNAMTS, par
la mobilisation des marges d’efficience
encore inexploitées au niveau des
établissements,
notamment
en
matière d’organisation du temps
de travail, et par le développement
des
mutualisations
d’activités
entre unions et en leur sein .
Au-delà, le bien-fondé de la stratégie
de développement de l’offre de soins
de l’assurance maladie par création de
nouvelles capacités médico-sociales
poursuivie par les UGECAM devrait être
réexaminé . En effet, elle est structurelle-
ment coûteuse pour les finances sociales
du fait de l’application de la convention
collective des agents du régime général
et n’a pas de synergies véritables avec la
mission centrale de gestion du risque de
l’assurance maladie .
Plus fondamentalement, comme la
Cour l’a déjà recommandé pour l’offre
de soins du régime des mines, la
période
de
la
prochaine
COG
devrait être mise à profit pour faire
évoluer le cadre de la gestion de ces
établissements vers le droit commun,
sans remettre en cause les droits
des personnels . À cette fin, plusieurs
modalités non exclusives les unes
des autres pourraient être examinées :
prise d’autonomie de certains établis-
sements, transferts à d’autres acteurs
privés
non-lucratifs,
voire
création
d’une fondation d’utilité publique .
Recommandations
54.
 
normaliser
les
conditions
de
financement
des
UGECAM
en
mettant fin aux concours dérogatoires
au droit commun de la CNAMTS ;
55.
 organiser un retour rapide des
UGECAM à un équilibre financier
durable, en accentuant la réorganisation
des établissements sanitaires, en
optimisant l’organisation du travail
et en renforçant le pilotage national
ainsi que les mutualisations d’activités ;
56.
  mettre un terme à l’expansion
de l’offre de soins de l’assurance
maladie et engager la transformation
du cadre de sa gestion vers le droit
commun .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
77
Des enjeux significatifs,
mais imparfaitement suivis
Sauf exception (minimum vieillesse),
les prestations de retraite de base et
complémentaires, de droit propre et
de droit dérivé (réversion), peuvent
être versées à des assurés et à des
ayants droit résidant à l’étranger (de
nationalité française ou étrangère) .
Les prestations versées à des résidents
à l’étranger représentent un enjeu
significatif, mais imparfaitement cerné
car les données disponibles manquent
de fiabilité . En particulier, le nombre
de prestations versées par la branche
vieillesse du régime général est
affecté par une incertitude à hauteur
de 50 000 versements, soit près de
200 M€ de dépenses annuelles .
Sous
réserve
de
ce
manque
de
fiabilité,
1,65
million
de
retraites
de base et 1,12 million de retraites
complémentaires ont été versés à
l’étranger pour 6,5 Md€ au total en
2015 (soit 2,2 % du total des prestations
de retraite) . Cinq pays - Algérie, Portugal,
Espagne, Maroc et Italie - concentrent
70 % des prestations . Ces dépenses sont
très dynamiques : elles ont augmenté de
+1,7 Md€, soit +35 % entre 2006 et 2015 .
Des risques spécifiques
de fraude insuffisamment
pris en compte
Les prestations de retraite versées à
des résidents à l’étranger présentent
des risques spécifiques de fraude,
principalement liés à l’absence de
manifestation en temps voulu de
leurs
proches
pour
signaler
leur
décès aux régimes de retraite .
Afin de s’assurer du maintien en vie
des titulaires de prestations, la plupart
des régimes de retraite adressent une
fois par an aux résidents à l’étranger
un formulaire de certificat d’existence
que ces retraités doivent retourner
visé par une autorité administrative
compétente de leur pays de résidence .
À
défaut
de
retour
du
certificat
d’existence dans le délai fixé, le versement
de la prestation est interrompu .
Cependant, chaque régime de retraite
(et l’assurance maladie pour les rentes
d’accident du travail et de maladies
professionnelles) adresse son propre
formulaire de certificat d’existence à
des échéances non coordonnées, ce
qui affecte la qualité du service rendu
aux titulaires de prestations comme
la maîtrise des risques de fraude .
Les retraites versées à des résidents
à l’étranger : des risques spécifiques
insuffisamment pris en compte,
des outils à adapter
13
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
78
Les retraites versées à des résidents à l’étranger :
des risques spécifiques insuffisamment pris en compte,
des outils à adapter
Un même assuré ou ayant droit doit
adresser au moins deux certificats
par an (retraite de base et retraite
complémentaire),
davantage
s’il
perçoit plusieurs pensions de plusieurs
régimes de base .
En outre, la production annuelle du
certificat d’existence ne garantit pas
en soi que le titulaire de la prestation
est toujours en vie . En effet, le certificat
est susceptible d’avoir été falsifié par des
tiers y ayant intérêt .
Les données de la branche vieillesse
du régime général et des régimes de
retraites complémentaires des salariés
font apparaître des versements à des
assurés particulièrement âgés (jusqu’à
117 ans) . Des divergences importantes
et inexpliquées peuvent être observées
entre les effectifs de titulaires de
retraites de base et complémentaires,
notamment parmi les plus âgés .
Les régimes de retraite mettent en
œuvre des actions de lutte contre
les fraudes de portée limitée . Ainsi,
ils n’effectuent aucun contrôle sur
les certificats qui leur sont retournés
ou portent un regard succinct sur ces
derniers .
Avec le concours du ministère des
affaires étrangères, la branche vieillesse
du régime général a conduit des actions
de contrôle ciblées sur place, qui font
apparaître des taux élevés d’anomalie .
Mais ces contrôles sont très ponctuels
(quelques centaines de dossiers en
2012 et en 2016) et limités à un seul
pays (Algérie) . En outre, l’absence de
coopération entre les régimes a
limité leur portée : les régimes
complémentaires AGIRC-ARRCO n’ont
pas été informés de leurs résultats . Ils
ont continué de ce fait à verser des
pensions à des bénéficiaires radiés
par la CNAVTS .
Des processus de gestion
à décloisonner et à fiabiliser
Les logiques d’organisation propres
aux régimes affectent l’efficience glo-
bale de la gestion des retraites ver-
sées à des résidents à l’étranger . Pour
améliorer l’efficacité des contrôles,
des mutualisations internes et entre
régimes devraient être mises en place
ou renforcées .
Alors que le cadre légal nécessaire à la
mutualisation de la gestion des certi-
ficats d’existence entre les régimes de
retraite a été posé en 2013, un projet
de certificat commun a été suspendu
par les membres du GIP Union Re-
traite qui regroupe les régimes de re-
traites, et n’a repris que récemment . Il
convient de le mener à terme, en met-
tant en place un formulaire unique
pour l’ensemble des régimes, traduit
dans les langues des principaux pays
de destination, adressé et réception-
né en un seul point et dont les re-
tours donnent lieu à des contrôles
sur
échantillons .
Cela
permettrait
d’améliorer la qualité de service et de
réduire l’intervention de tiers non qua-
lifiés dans le retour des certificats .
Il importe aussi, à cette occasion, de
mettre fin aux distorsions qui peuvent
être constatées dans le maintien ou
l’interruption des prestations entre les
régimes de base et complémentaires .
En outre, les contrôles sur pièces
a
posteriori
de l’existence des assurés et
ayants droit devraient être renforcés,
les contrôles réguliers d’existence sur
place dans les pays qui concentrent
les principaux enjeux financiers être
reconduits
ou
mis
en
place
et
l’information sur les résultats de ces
contrôles être mutualisée entre les
régimes .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
79
Les retraites versées à des résidents à l’étranger :
des risques spécifiques insuffisamment pris en compte,
des outils à adapter
Par ailleurs, les régimes de retraite
devraient s’appuyer plus fortement
sur les établissements bancaires afin
de maîtriser les risques liés aux paie-
ments à l’étranger . En effet, les marchés
passés par les différents régimes pour
assurer le versement des prestations
ne prévoient pas systématiquement
la délégation aux banques - via leurs
correspondants locaux - de certaines
tâches qui concourent à cette maîtrise
(contrôle de l’existence, recouvrement
des versements indus de prestations
après décès) .
Des coopérations internationales
à développer, en priorité avec
les pays à forts enjeux
Au-delà,
le
déploiement
rapide
d’échanges dématérialisés de données
avec les organismes de protection
sociale étrangers est indispensable
afin de fiabiliser le versement des
prestations aux résidents à l’étranger,
en permettant aux régimes de retraite
de se dispenser des certificats d’existence
sous forme papier pour un grand nombre
de titulaires de prestations .
À
l’heure
actuelle,
des
échanges
informatisés ont été mis en place,
à l’initiative de la seule branche
vieillesse
du
régime
général,
avec
des
pays
comportant
des
enjeux limités (Allemagne, Belgique et
Luxembourg) . Au contraire, l’Espagne et
l’Allemagne ont développé des échanges
informatisés avec un grand nombre de
pays, dont plusieurs importants pour la
France (Espagne et Italie notamment) .
La récente inscription de cette question
à l’ordre du jour de la commission mixte
annuelle franco-algérienne (avril 2017)
marque une première étape dans cette
voie pour le premier pays de destination
des prestations versées à des résidents à
l’étranger (un quart du total) .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
80
Recommandations
57.
 fixer des objectifs et un échéancier
de dématérialisation des échanges
d’informations d’état civil avec les
organismes étrangers de sécurité
sociale en privilégiant les pays avec
lesquels la France a les plus importants
flux financiers (Algérie, Portugal,
Espagne, Maroc et Italie) ;
58.
  mettre rapidement en place un
certificat d’existence sur support
papier
commun
aux
différents
régimes de retraite, traduit dans les
langues des principaux pays de des-
tination, analyser à cette occasion
les écarts entre les droits ouverts
au titre des retraites de base et des
retraites complémentaires en vue
d’ouvrir les droits manquants et de
clore ceux dépourvus de justification
et effectuer des contrôles ciblés sur
les certificats retournés ;
59.
 renforcer les contrôles sur pièces
a posteriori
de l’existence des assurés
et ayants droit, mettre en place ou
reconduire des contrôles réguliers
d’existence sur place dans les pays
qui concentrent les principaux enjeux
financiers et mutualiser l’information
sur les résultats de ces contrôles entre
régimes de base et complémentaires ;
60.
  mettre en œuvre un marché
mutualisé de prestations bancaires
entre les principaux régimes, en
prévoyant des clauses relatives à
la vérification de l’existence des
titulaires de prestations et à la
récupération des sommes indûment
versées après décès .
Les retraites versées à des résidents à l’étranger :
des risques spécifiques insuffisamment pris en compte,
des outils à adapter
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
81
Un suivi permanent par la Cour
des suites données
à ses recommandations
Les recommandations intéressant la
sécurité sociale que formule la Cour
dans ses rapports annuels sur la
sécurité sociale et dans ses autres publi-
cations (rapport public annuel, rapports
publics thématiques, communications
au Parlement et référés aux ministres)
dessinent autant de pistes possibles de
réflexion et d’action pour le Parlement,
le Gouvernement et les organismes de
sécurité sociale .
Dans ses rapports annuels sur la
sécurité sociale, la Cour examine les
suites qui leur ont été données :
- en réexaminant systématiquement
trois sujets : la situation et les
perspectives financières de la
sécurité
sociale,
les tableaux
d’équilibre et le tableau patrimonial
et l’objectif national de dépenses
d’assurance maladie (ONDAM) ;
- en revenant à rythme régulier sur
d’autres sujets déjà traités dans
de précédents rapports . Dans le
présent rapport 2017, c’est le cas
du cadre normatif des lois de
financement de la sécurité sociale,
des soutiens fiscaux et sociaux
aux familles, de la fixation du prix
et du coût de la distribution des
médicaments,
de
la
médecine
libérale de spécialité, des activités
chirurgicales, des établissements
sanitaires et médico-sociaux de
l’assurance maladie et des pres-
tations de retraite versées à des
résidents à l’étranger ;
- en analysant les suites données aux
recommandations contenues dans
ses trois derniers rapports (2014,
2015 et 2016 dans le rapport 2017) .
La prise en considération
d’une majorité de recommandations,
à des degrés toutefois très variables
Sur
les
195
recommandations
formulées par la Cour dans ses rapports
2013, 2014 et 2015 sur la sécurité
sociale, 57  % comportent à ce jour
une mise en œuvre, proportion
identique à celle du rapport 2016 et qui
augmente avec leur ancienneté .
Le degré de mise en œuvre des
recommandations
diffère
selon
les
domaines : mise en œuvre d’une nette
majorité de recommandations (prise en
charge des dépenses de santé et pilotage
du système de soins, organisation et
gestion interne de la sécurité sociale),
d’une majorité plus réduite (dépenses
d’assurance maladie en établissements
de santé et en ville, retraites) ou d’une
minorité
de
recommandations
(ressources et financement de la
sécurité sociale) .
Annexe :
le suivi des recommandations
formulées par la Cour
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
82
Annexe :
le suivi des recommandations formulées par la Cour
La
plupart
des
recommandations
mises en œuvre le sont de manière
incomplète (28 % du total) ou sont en
cours de mise en œuvre (20 %) . Les
recommandations totalement mises
en œuvre sont minoritaires (9 %) .
En effet, une partie des évolutions
recommandées par la Cour rencontre
des difficultés d’acceptation . En outre,
ces évolutions appellent généralement
des textes nécessitant des concertations
approfondies, sinon des négociations avec
les acteurs concernés ou prennent place
dans le cadre d’une nouvelle convention
d’objectifs et de gestion avec l’État .
Pour
autant,
la
proportion
de
recommandations totalement mises
en œuvre a doublé par rapport à
2016 et elles portent souvent sur des
enjeux importants : information du
Parlement sur les soldes des régimes
de sécurité sociale, lutte contre la
fraude
aux
prélèvements
sociaux,
définition des orientations de la politique
conventionnelle de l’assurance maladie
avec les professions libérales de santé,
coût des médicaments, organisation in-
terne du régime social des indépen-
dants et conditions de l’intégration
de son régime de base de retraite au
régime général…
Des progrès, mais aussi des points
de blocage sur des enjeux sensibles
Les
pouvoirs
publics
ont
adopté
des dispositions qui répondent en
partie
aux
recommandations
de
la Cour tendant à faire baisser les
prix ou les tarifs : renforcement des
moyens juridiques permettant de
réduire le prix des dispositifs médicaux ;
baisse des tarifs des séances de dialyse
rénale, plus forte pour les centres
lourds - mais pas pour les unités de
dialyse médicalisée - que pour les
autres modes de dialyse .
Une minorité de recommandations
(14, soit 7 % du total), qui présentent
une sensibilité particulière, n’est pas
partagée par les pouvoirs publics :
donner aux directeurs des organismes
nationaux de sécurité sociale une
responsabilité d’employeur sur les
agents de direction des organismes
locaux, ouvrir plus généralement une
réflexion sur le transfert du pouvoir
d’employeur sur les personnels de ces
derniers aux organismes nationaux,
renégocier l’accord relatif aux garanties
applicables lors du regroupement
d’organismes
locaux
(qui
exclut
toute mobilité imposée)…
Une prise en compte inégale en
perspective des recommandations
de la Cour : le pilotage financier
de la sécurité sociale
Dans son rapport de 2014, la Cour a
recommandé de transformer la loi de
financement de la sécurité sociale en
une loi de financement de la protection
sociale obligatoire élargie aux régimes
sociaux conventionnels (retraites com-
plémentaires,
assurance
chômage) .
Cette recommandation a pour objet
de permettre que la contribution de
ces régimes aux engagements par
la France au niveau européen, dans
le cadre du programme de stabilité,
soit définie de manière transparente
et concertée . Elle n’a pas été suivie
d’effet .
Les pouvoirs publics ont expressément
écarté la recommandation de la Cour
d’instaurer une loi de résultats présentée
selon un calendrier convergent avec celui
de la loi de règlement du budget de l’État .
Cela permettrait pourtant au Parlement
d’être mieux informé de la situation
financière de la sécurité sociale avant
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
83
Annexe :
le suivi des recommandations formulées par la Cour
d’examiner le projet de loi de finance-
ment pour l’année suivante déposé par
le Gouvernement à l’automne .
En revanche, le nouveau Gouvernement
a fait état de son intention de prendre
en considération la recommandation
de la Cour d’organiser une discussion
conjointe
au
Parlement
des volets
« recettes » des projets annuels de loi de
finances et de loi de financement de la
sécurité sociale, afin d’éclairer au mieux
le vote du Parlement .
Un cas de mise en œuvre en
cours : les soins bucco-dentaires
Dans son rapport de 2016, la Cour a
porté un regard critique sur l’orga-
nisation des soins bucco-dentaires
(10,7 Md€ de dépenses en 2015), en
relevant la poursuite du désengage-
ment de l’assurance maladie de leur
financement, la progression continue
des dépenses de soins prothétiques
et des dépassements d’honoraires,
source d’un important renoncement
aux soins, le déséquilibre des relations
conventionnelles
entre
l’assurance
maladie et les chirurgiens-dentistes
et l’attentisme des pouvoirs publics
devant une situation sanitaire dégradée .
Plusieurs évolutions en cours s’inscrivent
dans le sens des recommandations de
la Cour tendant à améliorer l’accès aux
soins et à la santé bucco-dentaires .
La ministre de la santé a repris à son
compte
l’orientation
générale
du
règlement arbitral pris en mars 2017,
en fixant pour lignes directrices aux
nouvelles
négociations
convention-
nelles
qui
s’ouvrent
en
septembre
un
plafonnement
progressif
des
tarifs
des
soins
prothétiques,
afin
d’améliorer
l’accès
à
ces
derniers,
accompagné d’une revalorisation des
soins
conservateurs
et
chirurgicaux
visant à réduire le recours ultérieur à des
soins prothétiques . En outre, les mesures
de revalorisation des actes dispensés
aux titulaires de la couverture maladie
universelle complémentaire (CMU-C)
et de l’aide au paiement d’une assu-
rance complémentaire santé (ACS)
prévues par le règlement arbitral
seront appliquées dès octobre 2017 .
Par ailleurs, la loi de financement
pour 2017 a étendu aux jeunes de 21
et 24 ans l’examen bucco-dentaire pris
en charge à 100 % par l’assurance ma-
ladie, jusque-là réservé aux moins de
18 ans afin d’assurer une continuité
dans le suivi des jeunes adultes . Une
stratégie de santé publique couvrant
les autres groupes ayant une san-
bucco-dentaire
dégradée
et,
au-delà, la population prise dans son
ensemble, reste néanmoins à définir .
Une situation de mise en œuvre
incomplète : l’accès aux soins
des ménages défavorisés
Dans son rapport de 2015, la Cour a
constaté que la CMU-C et, dans une
moindre mesure, l’ACS avaient fortement
atténué les difficultés d’accès aux soins
pour des raisons financières éprouvées
par les ménages défavorisés .
Malgré des effectifs importants et
en augmentation (5,5 millions de
titulaires de la CMU-C et 1,5 million
de l’ACS fin 2016), une part importante
des personnes qui remplissent les condi-
tions pour bénéficier de ces aides n’en
demandent pas l’attribution . Dès lors,
la Cour a recommandé d’intensifier les
actions des organismes sociaux visant à
favoriser leur recours .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017
84
Annexe :
le suivi des recommandations formulées par la Cour
Les organismes sociaux ont élargi et
diversifié leurs démarches . Cependant,
la promotion de la CMU-C et de l’ACS
devrait porter davantage sur les
personnes titulaires depuis longtemps
du RSA et du minimum vieillesse . En
outre, l’estimation du non recours
(de 1,6 à 2,4 millions de personnes
pour la CMU-C et de 2,2 à 2,8 millions
pour l’ACS en 2015 pour la France
métropolitaine) devrait être affinée
en neutralisant les personnes couvertes
par
des
complémentaires
santé
d’entreprise, obligatoires depuis 2016 .
Une illustration de mise en œuvre
totale : les prévisions financières
relatives aux retraites des salariés
du secteur privé
Tout
en
soulignant
la
portée
des
réformes effectuées depuis la fin des
années 1980, la Cour avait relevé dans
son rapport de 2016 que de nouveaux
ajustements
s’avéreraient
selon toute
probabilité nécessaires et à une échéance
plus rapprochée que les prévisions du
Conseil d’orientation des retraites (COR)
ne le faisaient apparaître .
Dans son rapport annuel de juin 2017,
le COR a pris en compte la recom-
mandation de la Cour de mettre fin
aux biais d’optimisme affectant ses
prévisions, en resserrant l’éventail
des hypothèses retenues (+1 % à
+1,8 % par an de hausse des revenus
d’activité en termes réels au titre
des gains de productivité du travail
au lieu de +1 % à +2 %), en renonçant
à un scénario central trop optimiste
(+1,5 % dans le rapport de 2016) et en
mettant l’accent sur les prévisions à
2030 et à 2040 .
Sous l’effet de la dégradation des
hypothèses
économiques
et
des
facteurs démographiques, le COR
fait désormais état d’une détério-
ration des perspectives financières
du système de retraite pris dans son
ensemble
et,
spécifiquement,
des
régimes de retraite des salariés du
secteur privé, qui appelle des mesures
de redressement rapides .
Synthèse du rapport sécurité sociale 2017