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FINANCES ET COMPTES PUBLICS
LA SITUATION
ET LES PERSPECTIVES
DES FINANCES
PUBLIQUES
Synthèse
Juin 2016
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
La réponse du ministre des finances et des comptes publics et du
secrétaire d’État chargé du budget figure à la suite du rapport.
Sommaire
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
La situation en 2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
2
La situation en 2016
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11
3
Les perspectives pour les années 2017 à 2019 . . . . . . . . . . . . . . . . .15
4
La mesure des économies en dépenses entre 2015 et 2017 . . . . .17
5
Les nouvelles règles européennes relatives à la gouvernance
des finances publiques : un premier bilan
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .21
Conclusion
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .25
3
Le présent rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques est
établi, comme chaque année, en application de l’article 58-3° de la loi organique
relative aux lois de finances (LOLF).
Déposé conjointement au rapport du Gouvernement sur l’évolution de l’économie
nationale et l’orientation des finances publiques, il est destiné à nourrir le débat
que le Parlement doit tenir chaque année sur les orientations des finances
publiques (article 48 de la LOLF).
Le premier chapitre est consacré à la situation des finances publiques en 2015
et à son évolution par rapport aux années précédentes. La Cour y examine les
évolutions des dépenses, des recettes, du déficit et de la dette de l’ensemble des
administrations publiques. Elle analyse ensuite plus précisément les comptes de
chacune des grandes catégories d’administrations publiques : l’État, les adminis-
trations de sécurité sociale et les administrations publiques locales. Ce chapitre
compare également la situation de la France à celle des autres pays de l’Union
européenne.
Le deuxième chapitre porte sur l’exercice 2016. La Cour, sur la base des informations
disponibles à la mi-juin 2016, évalue les risques entourant la réalisation des
prévisions de recettes, de dépenses et de soldes du Programme de stabilité,
pour l’ensemble des administrations publiques.
Le troisième chapitre évalue les risques pesant sur la trajectoire des finances
publiques inscrite dans le Programme de stabilité pour 2017 à 2019. Il examine
également les mesures prévues pour réduire le déficit structurel à cet horizon.
Dans le quatrième chapitre, la Cour procède à une analyse critique des modalités
de chiffrage du plan d’économies du Gouvernement sur la période 2015-2017.
Elle compare pour 2015 les économies réalisées à celles affichées et mesure
l’effort réalisé.
Enfin, le dernier chapitre est consacré aux enseignements qui peuvent être
tirés de la mise en place des règles de gouvernance budgétaire instaurées à la
suite de la crise financière de 2008-2009 dans les États membres de l’Union
européenne (règles d’équilibre structurel des finances publiques, mécanisme
de correction automatique de la trajectoire de finances publiques, institutions
budgétaires indépendantes, etc.).
Introduction
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
5
1
La situation en 2015
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
7
Un déficit en réduction
Le
déficit
des
administrations
publiques en 2015 a été inférieur de
0,5 point à la prévision de la loi de
programmation
des
finances
publiques (LPFP) et de 0,4 point
aux résultats de 2014
1
. Bien qu’en
amélioration, il est resté à un
niveau élevé, à 3,6 points de PIB.
Le déficit de l’État, qui concentre
l’essentiel des déficits des administra-
tions publiques (3,3 points de PIB sur
un total de 3,6), n’a que légèrement
baissé. La croissance spontanée des
recettes a été proche de l’évolution du
PIB, pour la première fois depuis 2011,
et la charge d’intérêts a encore une fois
diminué. Les mesures d’allégement
des prélèvements obligatoires ont
légèrement amputé les recettes,
tandis que les dépenses au sein de la
« norme en valeur » (hors dette et
pensions)
ont
augmenté
(de
2,1
Md€) par rapport à la cible votée en
loi de finances initiale (LFI) pour 2015.
Pour la première fois depuis 2003, les
collectivités locales ont dégagé en
2015 une capacité de financement au
sens de la comptabilité nationale. Ce
solde positif résulte du ralentissement
des dépenses de fonctionnement
(+ 1,0 % en 2015 après + 2,7 % en 2014),
Source : Cour des comptes à partir de données
Insee et de la LPFP
Prévision de la LPFP du déficit public
et déficit constaté
Une réduction du déficit due
pour près des deux tiers
aux collectivités locales
La réduction du déficit public par rapport
à 2014 provient pour les deux tiers des
administrations publiques locales et pour
une part réduite des administrations
de sécurité sociale.
______________________
1
Le déficit public est également inférieur de 0,2 point de PIB à la prévision associée au projet de
loi de finances pour 2016 (- 3,8 points de PIB).
Source : Insee
Capacité (+) ou besoin (-) de financement
des administrations publiques
par sous-secteur (en Md€ et en % du PIB)
La situation en 2015
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
8
mais surtout de la diminution marquée
des dépenses d’investissement pour la
seconde année consécutive. Si la baisse
des dotations a exercé, pour la deuxième
année, une réelle contrainte sur les
finances locales, son impact a été en
partie atténué par le dynamisme de
leurs ressources fiscales.
Le solde des administrations de sécurité
sociale s’est également contracté en
2015 pour atteindre - 0,3 point de PIB.
Cette amélioration est notamment
imputable au régime général, à la Caisse
d’amortissement de la dette sociale
(CADES) et aux hôpitaux.
Un solde structurel
en amélioration
La réduction des déficits effectif (à
3,6 points de PIB) et structurel (à
1,9 point de PIB), de l’ordre de
0,4 point de PIB entre 2014 et 2015,
résulte essentiellement d’un « effort
structurel
2
» porté sur les dépenses :
leur croissance en volume est restée
proche de 1 % en 2015, alors qu’elles
croissaient de plus de 2 % au cours de
la décennie 2000. Tous les éléments
concourant à la modération des
dépenses ne seront toutefois pas
reconductibles, tels que la diminution
de l’investissement local et la nouvelle
baisse de la charge d’intérêts. Depuis
2012, la réduction du déficit public a
résulté pour près de la moitié de la
diminution de la charge d’intérêts : la
réduction du solde primaire, c’est-à-
dire hors charge d’intérêts, a ainsi été
près de deux fois plus faible que celle
du solde effectif (0,7 point contre
1,3 point).
Un décalage persistant
de la France par rapport
à ses voisins européens
Comparativement aux autres pays, la
France présente une situation de ses
finances publiques plus dégradée : seuls
quatre pays de l’Union européenne
conservent un déficit effectif plus
dégradé que celui de la France (Grèce,
Espagne, Portugal et Royaume-Uni)
et quatre ont un déficit structurel plus
élevé
(Royaume-Uni,
Espagne,
Slovénie et Belgique).
Entre 2010 et 2015, la dépense publique
en volume a continué d’augmenter
davantage en France que dans la
plupart des autres pays de l’Union
européenne (hormis l’Allemagne).
Évolution des dépenses publiques
entre 2000 et 2015 (en %, en volume)
Source : Cour des comptes à partir de données
Insee
______________________
2
L’effort structurel mesure la part discrétionnaire (mesures nouvelles en recette et efforts en
dépense) de l’évolution du solde structurel.
La situation en 2015
Source : Cour des comptes à partir de données
Eurostat
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
9
La trajectoire d’endettement de la
France diverge désormais non seule-
ment de celle de l’Allemagne, mais
aussi de celle de la moyenne des pays
de la zone euro : en proportion du
PIB, la dette publique a continué
d’augmenter en France en 2015
(+ 0,4 point) alors qu’elle baissait en
Allemagne (- 3,5 points) comme en
moyenne dans la zone euro (- 1,3 point
de PIB). À 96 points de PIB, elle dépasse
de
près
de
20
points
celle
de
l’Allemagne et de 5 points celle de la
moyenne de la zone euro.
Évolution des dépenses publiques
en volume (base 100 en 2010)
2
La situation en 2016
Source : Cour des comptes, à partir des données de l’Insee et du rapport économique, social et
financier des années 2003 à 2016
Croissance des prélèvements obligatoires et du PIB en valeur
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
11
Le Programme de stabilité d’avril
2016 retient une prévision de déficit
de 3,3 points de PIB pour 2016, en
baisse de seulement 0,3 point par
rapport au résultat de 2015, alors
même qu’une nouvelle amélioration
de la croissance est anticipée.
En dépit de risques accrus par rapport
à 2015 de dépassement des objectifs
de dépenses de l’État, la prévision de
déficit de 3,3 points de PIB en 2016
est atteignable. Mais cette réduction
du déficit, effectif comme structurel,
serait limitée et ne permettrait toujours
pas de faire baisser le poids de la dette
publique dans le PIB, qui resterait donc
supérieur à 95 points de PIB en 2016.
Une prévision de recettes
publiques plausible
La prévision de recettes repose sur
un scénario de croissance du PIB et
d’inflation jugé réaliste par le Haut
Conseil des finances publiques, et ne
comporte pas de risque important de
surévaluation.
______________________
3
Ce tableau présente les dépassements de crédits par rapport à la LFI pour 2016, après dégel
de la réserve de précaution.
La situation en 2016
Des risques importants concentrés
sur les dépenses de l’État
et celles de l’Unédic
Le respect de la norme de dépenses en
valeur de l’État paraît en revanche
d’ores et déjà compromis. Les tensions
sur les crédits ouverts sont plus élevées
qu’elles ne l’étaient en 2015 à la même
époque : par rapport aux crédits de la
LFI pour 2016, le risque de dépassement
est ainsi estimé entre 3,2 et 6,4 Md€,
soit des montants sensiblement plus
élevés que ceux estimés par la Cour
l’an dernier à la même époque (entre
1,8 Md€ et 4,3 Md€). Même si la
réserve de précaution se situe à un
niveau élevé (avec notamment le gel
des reports de crédits), seule une
partie des crédits ainsi mis en réserve
pourra
in fine
être annulée : en 2015,
seuls 4 Md€ des 11 Md€ de crédits mis
en réserve en début ou en cours d’année
avaient été annulés et la mise au point
en juin 2016 du premier des trois
décrets d’avance prévus dans l’année
a déjà donné lieu à des arbitrages
difficiles, le Gouvernement ayant
renoncé à certaines des annulations
prévues initialement.
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
12
Risques en dépenses sur le périmètre de la norme en valeur,
en écart par rapport à la LFI pour 20162 (en Md€)
3
* Il est fait hypothèse, comme les années précédentes, d’une marge statistique de sous-
consommation des crédits, estimée à 0,8 Md€ en 2016, qui permet de gager spontanément une
partie des dépassements constatés en cours de gestion.
Source : Cour des comptes
La situation en 2016
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
13
Les dépenses nouvelles décidées et
annoncées depuis le début de 2016
représentent la source d’écart la plus
importante par rapport à la LFI
2016, à hauteur de près de 2,5 Md€
de risques pour les dépenses de
l’État pour le seul exercice 2016.
Elles correspondent principalement
au plan d’urgence pour l’emploi et
aux mesures destinées aux éleveurs
et aux agriculteurs. Les hausses
d’effectifs, du point d’indice et les
mesures catégorielles en faveur des
agents
des
missions
Sécurités
et
Enseignement scolaire
vont également
pousser à la hausse la masse salariale,
dont la croissance totale devrait excéder
1,0 % à champ constant (après +0,5 % en
2015), pour la première fois depuis 2009.
Les sous-budgétisations représentent
de l’ordre de 2,0 Md€, soit un niveau
proche de celui de l’année 2015, et les
reports de charges de l’année 2015
vers 2016 de l’ordre de 0,6 Md€. Les
aléas de gestion et les mauvaises
surprises
enregistrées
depuis
le
début de l’année ne représentent
qu’une part marginale des risques
recensés (de l’ordre de 0,6 Md€)
4
.
Des risques de moindre ampleur
pèsent également sur les dépenses des
administrations de sécurité sociale.
L’économie de 800 M€ attendue en
2016 de la renégociation de la
convention de l’Unédic ne sera pas
réalisée, car cette négociation a
échoué.
Au total, le respect de l’objectif de
déficit exigera une gestion très stricte
des dépenses et ne laisse aucune place
à des décisions nouvelles conduisant à
des hausses de dépenses. Si les
recettes
publiques
apparaissent
correctement calibrées et devraient
progresser en 2016 au rythme
d’une croissance économique en
amélioration par rapport à 2015, les
annonces successives de nouvelles
dépenses publiques, qui ne sont ni
financées ni gagées par des économies
pérennes, font peser un risque sur les
finances publiques en 2016 mais plus
encore sur les années suivantes.
Parmi les dépenses supplémentaires
annoncées au cours de l’année 2016,
celles concernant la masse salariale
pèseront en effet essentiellement sur
2017 et continueront de monter en
charge les années ultérieures.
______________________
4
En pratique, il s’agit essentiellement des missions
Agriculture, alimentation, forêt et affaires
rurales
(AAFAR) et
Écologie, développement et mobilité durables
.
Source : Cour des comptes. Ce graphique,
effectué sur la base de la moyenne des deux
hypothèses basse et haute de dépassements
de crédits, ne prend pas en compte la marge liée
à la sous-consommation des crédits ou
abattement statistique (de 0,8 Md€). Il s’agit
donc ici des dépassements bruts.
Répartition des risques de dépassement
des dépenses de l’État en 2016
par catégorie, en écart par rapport
à la LFI 2016
3
Les perspectives pour les années
2017 à 2019
Source : Loi de programmation des finances publiques de décembre 2014, Programmes de
stabilité d'avril 2015 et d'avril 2016
Prévisions successives de solde public effectif pour les années 2015 à 2019
(en % du PIB)
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
15
Le Gouvernement s’était engagé dans
la loi de programmation des finances
publiques de décembre 2014 à revenir
en 2019 à l’équilibre structurel et à un
déficit public inférieur à un point de
PIB. La trajectoire de solde public
retenue pour les années 2017 à 2019
dans le Programme de stabilité d’avril
2016 est moins ambitieuse, alors
même que le déficit de 2015 est d’un
demi-point inférieur à la prévision de
la LPFP : le résultat meilleur que
prévu n’a pas été mis à profit pour
réduire plus rapidement le déficit public
et infléchir nettement la trajectoire
de dette.
Une trajectoire de finances
publiques n’assurant pas un
retour à l’équilibre structurel
Le
Gouvernement
a,
dès
le
Programme de stabilité d’avril 2015,
révisé à la hausse la croissance
potentielle. Elle se situe désormais à
un niveau sensiblement supérieur à
celui retenu par les organisations
internationales. Elle permet ainsi au
Gouvernement d’afficher un solde
structurel à l'équilibre en 2019 malgré
un déficit effectif s’élevant encore à
1,2 point de PIB. Cependant, avec les
estimations de PIB potentiel des
organisations internationales, un tel
déficit laisserait encore un déficit
structurel supérieur à 1 point de PIB.
Une trajectoire plus ambitieuse de
finances publiques serait nécessaire
pour respecter, en 2019, l’objectif de
moyen terme de solde structurel
fixé à 0,4 point de PIB par la loi de
programmation, et à 0 dans le
Programme de stabilité d’avril 2016.
Les perspectives pour les années
2017 à 2019
Source : Cour des comptes à partir des
comptes
nationaux
de
l’Insee
et
du
Programme de stabilité d’avril 2016
Croissance des dépenses publiques (en %)
Une trajectoire qui suppose de
plus une baisse sans précédent
de la dépense publique
L’analyse du Programme de stabilité
montre par ailleurs que l’atteinte
d’une cible de déficit de 1,2 point de
PIB en 2019 suppose une maîtrise
sans
précédent
des
dépenses
publiques : avec le scénario macroéco-
nomique du Programme de stabilité et
la poursuite d'une baisse du taux de
prélèvements obligatoires de 0,2 point
par an, il faudrait une réduction de la
dépense publique en volume, hors
charge d'intérêts, entre 2016 et 2019,
alors qu’elle a progressé de 1,1 % en
moyenne entre 2010 et 2015 et de
2,6 % entre 2000 et 2009.
et les politiques mises en œuvre ces
dernières années ne sont guère
porteuses d'économies à moyen terme.
Au contraire, la hausse programmée
des dépenses militaires, les mesures
annoncées en début d'année concernant
l'emploi, celles en faveur des jeunes,
l’atténuation de l’effort demandé aux
communes et intercommunalités, et,
surtout, la progression de la masse
salariale de la fonction publique
vont pousser les dépenses à la
hausse, à hauteur d’environ 0,3 point
de PIB en 2017.
La masse salariale des administrations,
qui représente près du quart des
dépenses publiques, augmentera, dès
2017, à un rythme marquant une
rupture forte avec les évolutions
constatées depuis 10 ans : aucun des
trois leviers – stabilité des effectifs,
gel du point d’indice et limitation des
mesures catégorielles – qui avaient
permis de maîtriser l’évolution de la
masse salariale publique au cours
des dix dernières années ne sera plus
à l’œuvre. La masse salariale pourrait
sur la seule année 2017 progresser à
un rythme supérieur à celui enregistré
sur l’ensemble de la période 2009-
2015. Le protocole sur les parcours
professionnels, carrières et rémunéra-
tions, qui commencera à entrer en
vigueur en 2017, devrait de plus
monter en charge les années suivantes.
Les risques qui pèsent sur la réalisation
de la trajectoire de dépenses et de
solde du Programme de stabilité sont
donc très importants, alors même
que cette trajectoire ne suffirait pas à
restaurer à l’horizon du Programme
de stabilité la situation des finances
publiques.
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
16
Un risque significatif
de non-respect des objectifs
de déficit dès 2017
Le Programme de stabilité ne présente
pas les réformes nécessaires pour
atteindre l’objectif de déficit public et
de maîtrise des dépenses pour 2017
4
La mesure des économies
en dépenses entre 2015 et 2017
Source : Cour des comptes à partir du rapport d’information de la Commission des finances
de l’Assemblée nationale sur le Programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le
programme national de réforme
Cadencement du plan de 50 Md€ d’économies
(en Md€)
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
17
Le Gouvernement a annoncé un
programme d’économies de 50 Md€
sur les trois années 2015 à 2017,
dont 21 Md€ d’économies en 2015,
puis 14,5 Md€ d’économies en 2016 et
2017. Cette répartition a été modifiée
lors du Programme de stabilité d’avril
2016 (cf. graphique ci-dessous) : le
montant d’économies a été révisé à la
baisse, à 18,1 Md€ pour 2015 et
13,2 Md€ pour 2016, l’effort le plus
important étant reporté à 2017
(18,7 Md€).
La mesure des économies en dépenses
entre 2015 et 2017
Un montant d’économies
sensiblement inférieur
en 2015 au montant affiché
par le Gouvernement
Le calcul de ces économies repose
sur l’évaluation d’une croissance
tendancielle des dépenses, c’est-à-dire
« à politique inchangée ».
L’évaluation de la croissance tendan-
cielle des dépenses publiques repose
sur des méthodes diverses et parfois
contestables. En effet, si la croissance
à politique inchangée peut être défi-
nie assez naturellement pour des
dépenses comme les prestations
sociales, qui sont très largement
déterminées par la législation, cette
définition ne peut pas être appliquée
à d’autres postes de dépense dont les
pouvoirs publics ont plus directement
la maîtrise, comme les investissements
ou les dépenses de fonctionnement.
L’examen des hypothèses retenues
par le Gouvernement révèle qu’elles
conduisent à une évaluation plutôt
élevée de la croissance tendancielle et
donc à majorer d’autant les économies
affichées, qui sont calculées à partir de
cette tendance.
Même avec les hypothèses retenues
par le Gouvernement, la Cour estime
que l’effort d’économies réalisé en 2015
(12 Md€) est réel, mais sensiblement
inférieur
à
celui
affiché
dans
le
Programme de stabilité (18,1 Md€), du
fait essentiellement de l’État.
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
18
Examen par la Cour des mesures d’économies pour 2015 du plan de 50 Md€
présenté par le Gouvernement (en Md€)
Source : Cour des comptes à partir des tableaux et données présentés auparavant et du
Programme de stabilité (P. Stab.) d’avril 2016
La mesure des économies en dépenses
entre 2015 et 2017
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
19
Un effort structurel
en dépenses inférieur
à 0,5 point de PIB
Si la construction d’une tendance
portant sur les dépenses est utile
pour aider à la prise de décision et à
la formalisation d'une stratégie de
consolidation budgétaire sous la
forme d’un plan d’économies, sa
réalisation ne permet pas de juger du
caractère soutenable pour les finances
publiques de la politique menée. C’est
l’effort structurel en dépenses, bâti sur
l’écart entre la croissance de la
dépense publique et la croissance
potentielle de l’économie, qui le permet.
En
2015,
l’effort
structurel
en
dépenses réalisé est inférieur de 6 Md€
environ à l’effort minimal d’ajustement
de 0,5 point de PIB qui est demandé
par les règles européennes à un pays
qui, comme la France, n’a pas atteint
son objectif d’équilibre structurel à
moyen
terme.
Cette
différence
équivaut à l’écart entre le montant
d’économies effectivement réalisées en
2015
et
l’objectif
visé
par
le
Gouvernement
dans
son
plan
d’économies.
L’effort
d’économies
réalisé
en
2015 est donc inférieur à l’ambition
affichée par le Gouvernement et
inférieur à celui qui aurait été
nécessaire pour assurer sur le
moyen terme la soutenabilité de la
politique budgétaire.
5
Les nouvelles règles européennes
relatives à la gouvernance
des finances publiques :
un premier bilan
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
21
La crise financière de 2008, puis celle
des dettes souveraines, a conduit les
États membres de l’Union européenne,
et en particulier ceux de la zone euro, à
renforcer leur gouvernance budgétaire.
Plusieurs textes ont été adoptés dans
ce sens entre 2012 et 2013 : le Traité
sur la stabilité, la coordination et la
gouvernance (TSCG), le « paquet de
six » (
« six-pack »
) et le « paquet de
deux » (
« two-pack »
), qui désignent
un ensemble de directives et de
règlements visant à renforcer les règles
du Pacte de stabilité et de croissance
(PSC). Ces textes prévoient trois
innovations principales : une règle
d’équilibre structurel ; l’instauration
d’un mécanisme de correction automa-
tique ; la création d’institutions budgé-
taires indépendantes.
La règle d’équilibre structurel :
une contrainte de procédure
plus qu’une contrainte juridique
Les textes européens imposent désor-
mais la fixation d’un objectif de
moyen
terme
(OMT),
défini
en
termes structurels. En vertu du
TSCG, le déficit structurel correspondant
ne peut être supérieur à 0,5 point de PIB.
Le pilotage de la politique budgétaire à
partir d’un objectif de solde structurel,
plutôt que nominal, est économi-
quement souhaitable : il permet de
limiter le risque d’une politique
budgétaire trop relâchée en période
de croissance forte ou trop rigoureuse
en période de récession.
Le TSCG impose que l’OMT soit
transcrit au moyen de dispositions
« permanentes et contraignantes ».
Seuls quelques États parmi lesquels
l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne ont
choisi de se doter de « règles d’or »
constitutionnelles, souvent avant
même la signature du TSCG. La plupart
des autres pays a transposé cette
règle dans des lois de niveau ordinaire.
La France a transposé cette obligation
dans la loi organique du 17 décembre
2012 relative à la programmation et
à
la
gouvernance
des
finances
publiques. Les dispositions organiques
renvoient aux lois de programmation
pluriannuelles des finances publiques
(LPFP) le soin de fixer l’OMT et de
définir
la
trajectoire
budgétaire.
L’objectif de solde structurel doit être
inscrit dans l’article liminaire des lois de
finances. Son respect est évalué en loi
de règlement. La LPFP actuellement
en vigueur a été votée en décembre
2014 et fixe l’OMT à - 0,4 point de PIB.
Les nouvelles règles européennes relatives
à la gouvernance des finances publiques :
un premier bilan
Source : Cour des comptes
Conformité avec les dispositions
du TSCG
La loi organique impose cependant
seulement une contrainte de procédure
et non une contrainte juridique, dans
la mesure où les LPFP sont révisables
à tout moment et ne lient pas le
législateur financier.
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
22
Le « mécanisme de correction » :
une fonction d’alerte plus
qu’un mécanisme automatique
Le mécanisme de correction auto-
matique
accompagne
la
règle
d’équilibre structurel en imposant
une correction en cas de déviation
significative de la trajectoire (soit
un écart entre les déficits réalisé et
prévu de 0,25 point de PIB deux ans
de suite ou 0,5 point en un an).
La plupart des pays ont traduit
cette règle en prévoyant une simple
obligation de s’expliquer sur les
écarts à la trajectoire en vertu du
principe « se conformer ou s’expliquer »
comply or explain
»).
En France, la loi organique prévoit
que, lorsque le Haut Conseil des
finances publiques (HCFP) déclenche
le mécanisme de correction, le
Gouvernement est contraint de
s’expliquer sur les raisons de la
déviation
dans
un
rapport
au
Parlement
qui
expose,
le
cas
échéant, les mesures de correction
envisagées. Ce mécanisme a été
déclenché au printemps 2014, lors
de l’examen par le HCFP de la loi
de règlement pour 2013, suite à
une
dégradation
de
plus
de
1,5 point de PIB du déficit
5
. Le
Gouvernement, plutôt que de revenir
à la LPFP en vigueur, a choisi de
modifier la trajectoire de finances
publiques en présentant une nouvelle
programmation pluriannuelle
6
.
La mise en place d’organismes
budgétaires indépendants :
une avancée réelle
Les nouvelles règles de gouvernance
ont imposé la création d’organismes
budgétaires indépendants dont la
mission est double : s’assurer du
caractère non biaisé et réaliste des
prévisions macroéconomiques et
de finances publiques et constater
ex post
le respect de la trajectoire
de financière. Les gouvernements
doivent se conformer à leurs avis
ou s’expliquer publiquement s’ils
décident de s’en écarter.
______________________
5
Cette déviation est constatée par rapport à la trajectoire prévue dans la loi du 31 décembre
2012 de programmation pluriannuelle des finances publiques pour 2012-2017.
6
Cf. loi du 29 décembre 2014 de programmation pluriannuelle des finances publiques pour
2014-2019.
Les nouvelles règles européennes relatives
à la gouvernance des finances publiques :
un premier bilan
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques
23
L’ensemble des États membres s’est
doté de tels organismes, le plus souvent
en
créant des structures
ad hoc
.
Leurs mandats sont assez variables :
certains réalisent eux-mêmes les
prévisions
macroéconomiques
(Autriche,
Belgique,
Pays-Bas,
Royaume-Uni)
ou
de
finances
publiques (Autriche, Royaume-Uni),
d’autres font des recommandations
de politique budgétaire (Portugal)
ou bien encore donnent un avis sur
les réformes structurelles (Italie).
En France, le Haut Conseil des
finances publiques, adossé à la Cour
des comptes, est chargé de donner
un avis public au moment du dépôt
des lois financières.
Des évolutions envisageables
Sans revenir sur le choix opéré en
2012
de
ne
pas
modifier
la
Constitution, il paraît possible de
renforcer
la
gouvernance
des
finances publiques dans le cadre
institutionnel actuel.
D’abord, l’objectivation de l’hypothèse
de
croissance
potentielle
paraît
nécessaire pour ne pas biaiser les
cibles de solde structurel. Comme
pour les prévisions macroéconomiques,
il semble souhaitable de prévoir qu’un
organisme indépendant et transparent
se prononce sur les hypothèses de
croissance potentielle, en particulier
à l’occasion de la présentation du
Programme de stabilité, qui constitue
la première référence publique du
processus d’élaboration des lois de
finances de l’année. Le contrôle du
Parlement devrait également être
renforcé, préalablement à la transmis-
sion du Programme de stabilité à la
Commission européenne.
Ensuite, le débat en faveur d’une
simplification de la gouvernance
budgétaire émerge aujourd’hui dans
les instances européennes. Si la
référence au solde structurel, qui
permet d’assurer la soutenabilité de
long terme de la politique budgétaire,
doit être conservée dans son principe,
elle gagnerait à être complétée par
une règle de dépenses, plus facile à
expliciter
ex ante
et à vérifier
ex post
.
Elle pourrait prendre la forme d’un
objectif
de
dépenses
décliné
annuellement pour l’ensemble des
administrations publiques (APU),
fixé en euros courants, en fonction
d’une cible de solde structurel com-
patible avec le respect de l’objectif
structurel de moyen terme. Un tel
schéma impose de réfléchir à un
mode de gouvernance associant, à
sa définition et à son suivi, l’État, les
administrations de sécurité sociale
et les collectivités locales.
Conclusion
Bien qu’en amélioration par rapport à 2014, le déficit des administrations
publiques est resté élevé en 2015 à 3,6 points de PIB et la France présente une
situation de ses finances publiques moins bonne que ses partenaires européens.
La trajectoire de solde public retenue pour les années 2016 à 2019 dans le
Programme de stabilité d’avril 2016, moins ambitieuse que celle affichée dans la
loi de programmation de décembre 2014, prévoit un retour à l’équilibre structurel
des finances publiques en 2019. Cette perspective est très fragile car elle repose
sur des hypothèses surévaluées de croissance potentielle et très ambitieuses de
maîtrise des dépenses publiques. Or, alors même que l’ambition affichée de
maîtrise des dépenses n’a jamais été aussi forte, des décisions prises depuis le
début de l’année conduisent au contraire à un accroissement des dépenses,
amorcé en 2016, mais qui devrait s’amplifier nettement en 2017 et les années
suivantes.
La politique de maîtrise de la dépense menée jusqu’à présent a davantage visé à
la contenir qu’à améliorer son efficacité. L’action à mener doit désormais reposer
sur des choix explicites, s’attaquer aux principales sources d’inefficacité de la
dépense, réexaminer les missions des administrations publiques prises dans leur
ensemble et mieux cibler les dépenses d’intervention.
25
Synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques