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3, place des Grands-Hommes
CS 30059
33064 BORDEAUX CEDEX
Tél : 05 56 56 47 00
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Mél : crca@aquitaine-pc.ccomptes.fr
Jugement n° 2014-0019
Audience publique du 9 décembre 2014
Lecture publique du 15 janvier 2015
Communauté urbaine de Bordeaux
(033 017 999)
Poste comptable : Recette des finances publiques
de Bordeaux municipale
Exercice 2009
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire n° 2014-0027 du 27 juin 2014, par lequel le Procureur financier a saisi la
Chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
M. Jacky X... et de M. Daniel Y..., comptables de la communauté urbaine de Bordeaux
(CUB)
, au titre d’opérations relatives à l’exercice 20
09 ;
Vu
les
notifications
dudit
réquisitoire
à
M.
Jacky
X...
le
18
juillet
2014,
à M. Daniel Y... le 19 juillet 2014, et au président de la communauté urbaine,
le 16 juillet 2014 ;
Vu le compte
de l’exercice 2009 rendu en qualité de comptables
de la communauté urbaine
de Bordeaux par M. Jacky X..., du 1
er
janvier 2009 au 10 septembre 2009 et par M. Daniel
Y..., du 11 septembre 2009 au 31 décembre 2009 ;
Vu
l’article 60 de la loi de finances n° 63
-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité
publique en vigueur
au cours de l’exercice 2009 visé par le réquisitoire
;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du
VI de l’article 60
de la loi du 23 février 1963 susvisée ;
Vu la lettre du 23 juillet 2014 par laquelle le magistrat
chargé de l’instruction a
informé les
comptables et l’ordonnateur de la
possibilité d’adresser leurs observations écrites et
d’apporter toute justification dans un délai de cinq semaines à compter
de sa réception ;
Vu la notification de cette lettre à MM. Jacky X... le 25 juillet 2014, à M. Daniel Y... le 28
juillet 2014, et au président de la communauté urbaine, le 28 juillet 2014 ;
Vu
les pièces produites au cours de l’instruction, notamment l
es justifications en réponse
transmises par les comptable
s et l’ordonnateur
, enregistrées au greffe de la Chambre
les 1
er
et 12 septembre 2014 ;
Jugement n° 2014-0019 Communauté urbaine de Bordeaux -
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VU le rapport n° 2014-0335 déposé le 23 octobre 2014 par Mme Eliette GERME-TELLEZ,
première conseillère, magistrat
chargée de l’instruction
, ensemble les pièces jointes à
l’appui
;
VU la lettre du 3 novembre 2014 adressée aux comptables et
à l’ordonnateur,
portant
notification de la clôture de l’instruction et de la date de tenue de l’audience publique
, et dont
ils ont accusé réception le 5 novembre 2014 ;
VU les conclusions n° 2014-0335
du 1
er
décembre 2014 du Procureur financier ;
Entendu en audience publique Mme Eliette GERME-TELLEZ, première conseillère, et M.
Benoît BOUTIN, Procureur financier, les comptables et
l’ordonnateur n’étant
ni présents ni
représentés ;
Sur la présomption de charge n°
1, soulevée à l’encontre de M. Daniel
Y...
Considérant que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur financier a saisi la chambre
régionale des comptes d’Aquitain
e, Poitou-Charentes de la responsabilité
susceptible d’être
encourue par M. Daniel Y..., en raison du paiement sans pièce justificative, au vu du mandat
n° 030 060 du 17 décembre 2009,
du salaire d’un agent contractuel
occupant les fonctions
de directeur artistique de la direction de la communication pour le mois de décembre 2009,
pour un montant total de 4 200,80
;
Considérant que le Procureur financier fonde cette présomption de charge
sur l’absence à
la fois
d’un contrat de travail couvrant le mois de décembre 2009 et d’une délibération
créant le poste confié à l’intéressé
;
Considérant
qu’
en effet, sur le premier point, le P
rocureur financier relève qu’
au moment du
paiement, le 17 décembre 2009,
n’était plus applicable
un premier contrat, qui ne couvrait
que la période du 1
er
septembre 2009 au 30 novembre 2009, alors que le nouveau contrat
de travail, stipulant
une prise d’
effet au 1
er
décembre 2009,
n’a été
signé que le 14 janvier
2010, postérieurement à la prise en charge et au paiement du mandat de paie de décembre
2009 ;
Considérant que, par ailleurs, comme le souligne le Procureur financier, il ressort de
l’annexe à l’article D.1617
-
19 du code général des collectivités territoriales qu’en matière de
dépenses de personnel les comptables publics doivent notamment
disposer à l’appui du
premier paiement de la rémunération d’un «
acte d’engagement mentionnan
t la référence à
la délibération créant l’emploi
»
, alors qu’une telle délibération n’a été prise que le 19 février
2010 ; que si cette délibération est visée par le contrat passé avec le même agent le 1
er
avril
2010, elle ne concernait pas les deux contrats précédents ;
Considérant que, dans leurs réponses, le comptable
et l’ordonnateur
indiquent que le
premier contrat de
l’intéressé
, conclu pour répondre à un besoin occasionnel puis
renouvelé, a pris la forme d
’un
contrat à durée déterminée, signé sur le fondement du
deuxi
ème alinéa de l’article 3 de la loi n°84
-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique territoriale, puis renouvelé, et que la communauté
urbaine n’a délibéré sur la création du poste occupé
que
lorsqu’il s’est agi de le
pérenniser,
le conseil communautaire approuvant à cette occasion le recours à un agent contractuel
pour occuper l’emploi
;
Considérant que,
aux termes de l’article 34 de la loi précitée n°84
-53, les emplois de chaque
collectivité
ou établissement sont créés par l’organe délibérant,
qui précise alors si l’emploi
peut être pourvu par un agent contractuel ; que cette délibération créant préalablement
l’emploi est requise même s’il s’agit d’emplois non permanents, notamment pour les e
mplois
correspondant à des besoins occasionnels ; que le comptable a manqué à ses obligations
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de contrôle telles que prévues par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant
règlement général sur la comptabilité publique applicable aux moments des faits, faute à la
fois de la production à l’appui du mandat d’un contrat conclu préalablement au paiement et
d’une délibération créant l’emploi occupé par l’agent concerné
;
Considérant en effet qu'en matière de dépenses, en application des articles 12 et 13 de ce
décret, les comptables sont tenus d'exercer le contrôle de la validité de la créance, qui porte
notamment sur la production des justifications ;
Considérant que
l’article D.1617
-19 du code général des collectivités territoriales prévoit,
que pour payer le
premier salaire d’un agent non titulaire
, le comptable doit disposer, à
l’appui des mandats
, de son contrat de travail et de la référence à la délibération créant
l’emploi
;
Considérant qu’en
procédant au paiement
du salaire de l’intéressé
sans disposer ni du
contrat, conclu le 14 janvier 2010, ni de la référence à la délibération créant l’emploi
, le
comptable a commis un manquement à ses obligations de contrôle ;
Considérant qu
e
n l’espèce,
le manquement du comptable ne résulte pas de circonstances
constitutives de la force majeure, qui ne sont au demeurant pas invoquées par le
comptable ; qu'en application du troisième alinéa du I de l'article 60 de la loi du 23 février
1963 susvisée, la responsabilité personnelle et pécuniaire d
un comptable se trouve
engagée dès lors qu'une dépense a été irrégulièrement payée ;
Considérant que le comptable allègue, dans sa réponse,
que le manquement n’a pas causé
de préjudice financier au motif
que l’ordonnateur a
signé le bordereau de mandat et donc
attesté le service fait
; qu’il soutient par ailleurs que
les juridictions financières ont jugé que
le seul manque formel d’une pièce ne cré
ait pas de préjudice financier ;
Considérant que la réalité du service fait ne suffit pas à retirer à des paiements litigieux leur
caractère indu ; que le jugement de premier ressort invoqué par le comptable
, outre qu’il
n’engage pas la juridiction
,
se rapporte à un cas différent dans lequel, malgré l’absence
d’une délibération, le paiement a été justifié par un contrat régulièrement établi, l’absence de
préjudice financier ayant par ailleurs également été motivée par la faiblesse du montant en
jeu ;
Considérant
qu’au moment des faits, le comptable ne disposait
ni du contrat ni
d’aucun
document attestant de la volonté de l’établissement de renouveler le contrat de l’intéressé
et
qu’en conséquence, la dépense s’est traduite par un appauvrissement patrimonial non
recherché, constitutif d’un
préjudice financier ;
Considérant que ce préjudice est bien imputable à M. Daniel Y... qui a assuré la prise en
charge du mandat considéré le 17 décembre 2009 et en a assuré le paiement au cours du
même mois, avant la fin de son intérim ;
Considérant par suite qu’en application du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi
n° 63-156, la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Daniel Y... est engagée pour
l’exercice 20
09, à hauteur de 4 200,80
;
Considérant que l’article 60 de la loi n°
63-156 prévoit en son paragraphe IX que les
comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans
les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé
du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge notamment lorsque,
sous l'appréciation du juge des comptes, ils ont respecté les règles de contrôle sélectif des
dépenses ;
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Considérant
en l’espèce
que le dispositif sélectif de contrôle approuvé en 2008 prévoyait un
contrôle exhaustif des paiements de salaires des « entrants/sortants »
; qu’en l’espèce,
s’agissant du paiement du premier mois de salaire d’un nouveau contrat,
cette obligation de
contrôle n’a pas été
respectée ;
Considérant que dans ce cas l’article 60 de la loi n°
63-156 prévoit en son paragraphe IX
que la somme laissée à la charge du comptable en cas de remise gracieuse par le ministre
chargé du budget doit être calculée par référence au cautionnement prévu pour le poste
comptable considéré et non par référence au cautionnement effectif du comptable ; que la
circonstance invoquée par M. Y... de sa situation de comptable intérimaire, non assujetti à
ce cautionnement, est donc
sans incidence sur l’application de ces dispositions, le
comptable intérimaire étant
investi des mêmes droits et obligations qu’un comptable titulaire
;
Considérant qu'aux termes du paragraphe VIII de l'article 60 de la loi précitée du 23 février
1963, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; que cet acte est le
réquisitoire du Procureur financier, et la date à retenir celle de sa notification, soit le 19 juillet
2014 ;
Sur la présomption de charge n° 2
, soulevée à l’encontre de M. Daniel
Y...
Considérant que le réquisitoire du 27 juin 2014 a soulevé une deuxième présomption de
charge à l’encontre de M. Daniel
Y..., en raison du paiement des salaires
d’un deuxième
agent contractuel occupant les fonctions de chargé de mission « urbanité » au titre des mois
de septembre à décembre 2009, pour un montant total de 24
776,27 €, au
vu des mandats
n° 021840 du 17 septembre 2009, n° 024351 du 15 octobre 2009, n° 027020 du 13
novembre 2009 et n° 030360 du 17 décembre 2009 ;
Considérant que cette présomption de charge est justifiée
par l’absence de délibération
créant l’emploi correspondant
,
l’article D.1617
-19 du code général des collectivités
territoriales imposant aux comptables publics en matière de dépenses de personnel de
disposer à l’appui du premier paiement de la rémunération d’un «
acte d’engagement
men
tionnant la référence à la délibération créant l’emploi
» ; que les contrats successifs de
trois mois prenant effet à partir du 1
er
septembre 2009 n’ont pas fait l’objet d’une telle
délibération, une délibération n’intervenant le 28 mai 2010
que pour autoriser la passation
d’un contrat de 3 ans à compter du 1
er
septembre 2010 ;
Considérant que dans leurs réponses, le comptable et l’ordonnateur indiquent que le
s
contrats
de l’intéressé
pour la période en cause, conclus pour répondre à un besoin
occasionnel, ont pris la forme de contrats à durée déterminée, signés sur le fondement du
deuxième alinéa de l’article 3 de la loi n°
84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique territoriale; qu’ils signalent aussi que la
communauté urbaine n’a délibéré sur la création du poste occupé qu’au moment de le
pérenniser ; que le comptable souligne
qu’il disposait dans
le cas soulevé par cette
deuxième charge
, à la différence de la première, d’un contrat
;
Considérant que selon
l’article 34 de la loi précitée n°
84-53, les emplois de chaque
collectivité ou établissement sont créé
s par l’organe délibérant, qui précise alors si l’emploi
peut être pourvu par un agent contractuel ; que cette délibération créant préalablement
l’emploi
est requise même s’il s’agit d’emplois non permanents, notamment pour les emplois
correspondant à des besoins occasionnels ; que le comptable a manqué à ses obligations
de contrôle telles que prévues par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant
règlement général sur la comptabilité publique, faute
de s’être assuré de la référence à u
ne
délibération créant l’emploi occupé par l’agent concerné
;
Jugement n° 2014-0019 Communauté urbaine de Bordeaux -
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Considérant en effet qu'en matière de dépenses, en application des articles 12 et 13 de ce
décret, les comptables sont tenus d'exercer le contrôle de la validité de la créance, qui porte
notamment sur la production des justifications ;
Considérant que l’article D.1617
-19 du code général des collectivités territoriales prévoit,
que pour payer le premier sala
ire d’un agent non titulaire, le comptable doit disposer, à
l’appui des mandats, d’un «
acte d’engagement mentionnant la référence à la délibération
créant l’emploi
»
; qu’en procédant au paiement du salaire de l’intéressé sans disposer d’
un
document faisant référence à une telle
délibération créant l’emploi,
tant pour le contrat
prenant effet au 1
er
décembre 2009 que pour celui prenant effet au 1
er
septembre 2009, le
comptable a commis un manquement à ses obligations de contrôle ;
Considérant qu’en l’esp
èce, le manquement ne résulte pas de circonstances constitutives
de la force majeure, qui ne sont au demeurant pas invoquées par le comptable ; qu'en
application du troisième alinéa du I de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, la
responsabil
ité personnelle et pécuniaire d’un comptable se trouve engagée dès lors qu'une
dépense a été irrégulièrement payée ;
Considérant que le comptable allègue, dans sa réponse, que le manquement n’a pas causé
de préjudice financier au motif que l’ordonnateur a
signé le bordereau de mandat et donc
attesté le service fait
; qu’il soutient par ailleurs que les juridictions financières ont jugé que
le seul manque formel d’une pièce ne créait pas de préjudice financier
;
Considérant que la réalité du service fait ne suffit pas à retirer à des paiements litigieux leur
caractère indu
; que le jugement de premier ressort invoqué par le comptable, outre qu’il
n’engage pas la juridiction, se rapporte à un cas différent dans lequel, malgré l’absence
d’une délibération, le paiement a été justifié par un contrat régulièrement établi, l’absence de
préjudice financier ayant par ailleurs également été motivée par la faiblesse du montant en
jeu ;
Considérant qu’au moment des faits, le comptable ne disposait d’aucun document a
ttestant
de la volonté de l’établissement d’autoriser la passation ou le renouvellement du contrat de
l’intéressé et qu’en conséquence, la dépense s’est traduite par un appauvrissement
patrimonial non recherché, constitutif d’un préjudice financier
;
Considérant que ce préjudice est bien imputable à M. Daniel Y... qui a assuré la prise en
charge des mandats considérés et en a assuré le paiement avant la fin de son intérim ;
Considérant par suite qu’en application du troisième alinéa du VI de l’article 60
de la loi
n°63-156, la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Daniel Y... est engagée pour
l’exercice 2009, à hauteur de
24 776,29
;
Considérant que l’article 60 de la loi n°
63-156 prévoit en son paragraphe IX que les
comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans
les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé
du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge notamment lorsque,
sous l'appréciation du juge des comptes, ils ont respecté les règles du contrôle sélectif des
dépenses ;
Considérant en l’espèce que le dispositif sélectif de contrôle approuvé en 2008 prévoyait un
contrôle exhaustif des paiements de salaires des « entrants/sortants »
; qu’en l’espèce,
s’agissant du paiement d
u premier mois de salaire des deux contrats successifs, en
septembre et décembre 2009
,
cette obligation de contrôle n’a pas été respectée
;
Jugement n° 2014-0019 Communauté urbaine de Bordeaux -
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Considérant que dans ce cas l’article 60 de la loi n°
63-156 prévoit en son paragraphe IX
que la somme laissée à la charge du comptable en cas de remise gracieuse par le ministre
chargé du budget doit être calculée par référence au cautionnement prévu pour le poste
comptable considéré et non par référence au cautionnement du comptable ; que la
circonstance invoquée par M. Y... de sa situation de comptable intérimaire, non assujetti à
ce cautionnement, est sans incidence sur l’application de ces dispositions, le comptable
intérimaire étant investi des mêmes droits et obligatio
ns qu’un comptable titulaire
;
Considérant qu'aux termes du paragraphe VIII de l'article 60 de la loi précitée du 23 février
1963, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; que cet acte est le
réquisitoire du procureur financier, et la date à retenir celle de sa notification, soit le 19 juillet
2014 ;
Sur la présomption de charge n° 3
, soulevée à l’encontre de M.
Jacky X...
Considérant que dans son réquisitoire, le Procureur financier a soulevé une troisième
présomption de
charge à l’encontre de
M. Jacky X..., en raison du paiement à des agents
de la communauté urbaine au vu des mandats n° 17 143 et n° 17 145 du 17 juillet 2009 des
trois indemnités particulières suivantes
d’un montant total de 16 448,54 €
: indemnité pour
conduite de véhicules spéciaux (4
118,58 €)
, indemnité de conduite « 13 F » (4
486,68 €)
et
indemnité de polyvalence (7
843,28 €
) ;
Considérant que cette présomption de charge est fondée sur
l’absence des pièces
justificatives fixées à l'annexe I de l'article D.1617-19 du code général des collectivités
territoriales, alors que le paiement des primes et indemnités des agents territoriaux doit
notamment être justifié
, d’une
part par une décision de l'assemblée délibérante fixant la
nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités, et d’autre part, par une
décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à chaque
agent ; q
u’il a également constaté l’absence de toute indication permettant d’
établir une
correspondance entre ces trois primes et des indemnités versées aux
agents de l’Etat
;
Considérant que dans leurs réponses, le comptable et l’ordonnateur rappellent les motif
s qui
ont conduit à la création de ces indemnités maintenant anciennes en produisant plusieurs
documents à l’appui de leurs affirmations
;
Considérant que l’analyse de ces documents fait apparaître que le versement de l’indemnité
de conduite « 13 F » trouverait son fondement dans une « décision » de la commission de
l’administration générale du personnel et des services de sécurité en date du 8 mars 1982,
incompétente pour créer un tel élément de rémunération
; que l’indemnité de polyvalence
aurait été in
stituée antérieurement à l’indemnité de conduite
« 13 F » et probablement avant
la création de la CUB ;
qu’aucun document écrit ne corrobore
cependant cette hypothèse ;
qu’en conséquence, le comptable ne disposait d’aucune délibération générale
pour
procéder au règlement des deux indemnités dites de polyvalence et de conduite « 13 F » ;
Considérant
que si la création de l’indemnité pour conduite de véhicules spéciaux a été
décidée par délibération du 24 septembre 1976, cette dernière mentionne que cette prime a
vocation à disparaître après le reclassement indiciaire prévu des agents bénéficiaires ; que
ce reclassement a eu lieu le 24 octobre 1980
; qu’en conséquence, la délibération précitée
ne peut plus servir, depuis cette date, à justifier son paiement ; q
u’une simple lecture de la
délibération permet d’aboutir à cette déduction sans porter d’appréciation sur sa légalité
interne ;
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Considérant qu’au surplus, pour aucune de ces trois indemnités, le comptable ne disposait
d’une décision de l’autorité inve
stie du pouvoir de nomination fixant le taux applicable à
chaque agent ;
Considérant qu’en procédant au paiement de ces trois primes, en juillet 2009, le comptable
a commis un manquement ;
Considérant qu’en l’espèce, le manquement du comptable ne résult
e pas de circonstances
constitutives de la force majeure ; qu'en application du troisième alinéa du I de l'article 60 de
la loi du 23 février 1963 susvisée, la responsabilité personnelle et pécuniaire d’un comptable
se trouve engagée dès lors qu'une dépense a été irrégulièrement payée ;
Considérant que le comptable a indiqué, dans son courrier, que les éléments de réponse de
l’ordonnateur ne font aucune mention d’un éventuel préjudice financier pour la communauté
urbaine de Bordeaux ; que toutefois, au moment des faits, le comptable ne disposait
d’aucun
e délibération
attestant de la volonté de l’assemblée délibérante de
procéder au
versement de ces trois indemnités ;
qu’en conséquence, rien ne permet de soutenir que le
manquement n’aurait pas occasionné de
préjudice financier ;
Considérant par suite qu’en application du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi n°
63-156, la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. Jacky X... est engagée pour
l’exercice 2009, à hauteur de
16
448,54 €
;
Considérant que l’article 60 de la loi n°63
-156 prévoit en son paragraphe IX que les
comptables publics dont la responsabilité personnelle et pécuniaire a été mise en jeu dans
les cas mentionnés au troisième alinéa du paragraphe VI peuvent obtenir du ministre chargé
du budget la remise gracieuse totale des sommes mises à leur charge notamment lorsque,
sous l'appréciation du juge des comptes, ils ont respecté les règles du contrôle sélectif des
dépenses ;
Considérant que le dispositif sélectif de contrôle approuvé en 2008 prévoyait un contrôle
exhaustif des seuls paiements de salaires des «
entrants/sortants
»
; qu’en l’espèce
la
détection, parmi les 500 bulletins de salaire joints au dossier-liasses-rapport, du paiement
des indemnités en cause à un agent sortant de fonctions ne suffit pas à établir,
contrairement à l’appréciation du
Procureur financier, une mauvaise application du dispositif
sélectif de contrôle de la dépense ; que le ministre chargé du budget pourra
donc, s’il le
souhaite, faire une remise gracieuse totale de la somme mise à la charge du comptable ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe VIII de l'article 60 de la loi précitée du 23 février
1963, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en jeu
de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; que cet acte est le
réquisitoire du Procureur financier, et la date à retenir celle de sa notification, soit le 18 juillet
2014 ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1
er
:
au titre de la première charge, M. Daniel Y... est constitué débiteur de la
communauté urbaine de Bordeaux à hauteur de 4 200,80
€, ce
tte somme portant intérêt à
compter du 19 juillet 2014 ; les règles du contrôle sélectif applicables aux dépenses en
cause n’ont pas été respectées.
Article 2
: au titre de la deuxième charge, M. Daniel Y... est constitué débiteur de la
communauté urbaine de Bordeaux à hauteur de 24
776,29 €, cette somme portant intérêt à
Jugement n° 2014-0019 Communauté urbaine de Bordeaux -
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compter du 19 juillet 2014; les règles du contrôle sélectif applicables aux dépenses en
cause n’ont pas été respectées
.
Article 3 :
au titre de la troisième charge, M. Jacky X... est constitué débiteur de la
communauté urbaine de Bordeaux à hauteur de 16
448,54 €
, cette somme portant intérêt à
compter du 18 juillet 2014 ; les règles du contrôle sélectif applicables aux dépenses en
cause ont été respectées.
Article 4 :
La décharge de M. Daniel Y... et M. Jacky X... ne pourra être donnée, au titre de
l’exercice 20
09
, qu’après apurement des sommes à acquitter, fixées ci
-dessus
.
Fait et jugé à la Chambre régionale des compte
s d’A
quitaine, Poitou-Charentes, hors la
présence du magistrat-instructeur et du Procureur financier, le neuf décembre deux mille
quatorze,
par
M.
Franc-Gilbert
BANQUEY,
Président
de
séance,
MM. Jean-Claude WATHELET, Gilles KOVARCIK, Stéphane LUCIEN-BRUN et Philippe
HONOR, présidents de section, et MM. Philippe ALBRAND, Gérard MATAMALA, premiers
conseillers.
En présence de M. Manuel DAVIAUD, greffier de séance.
Le Président de séance
Franc-Gilbert BANQUEY
Le Greffier de séance
Manuel DAVIAUD
En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre les dispositions définitives dudit jugement à exécution, aux procureurs
généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir
la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils
en seront légalement requis.