Chapitre IX
La diffusion des médicaments
génériques
: des résultats trop modestes,
des coûts élevés
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L
A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
259
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les médicaments génériques sont des médicaments équivalents aux
médicaments de référence (princeps) dont le brevet a expiré
270
. Ils sont
commercialisés à un prix moindre car ils n’ont pas nécessité un
investissement initial dans la recherche. Ces médicaments peuvent
contribuer à promouvoir la même qualité et la même sécurité de soins, tout
en limitant les dépenses d’assurance maladie et constituent ainsi un enjeu
majeur pour leur maîtrise.
Les médicaments génériques achetés en pharmacie ne représentent,
malgré leur développement au cours de la dernière décennie, que 21,5 %
des remboursements de médicaments vendus en ville, soit 4,3
Md€ sur
20
Md€
271
. La consommation de ces médicaments à l’hôpital est faible
mais n’est pas précisément connue
272
. Notre pays connaît de fait en ce
domaine un retard considérable par rapport à ses voisins, au détriment de
ses finances sociales. En France, moins d’une boîte remboursable sur trois
est générique, alors que cette proportion s’élève à plus de trois boîtes sur
quatre dans d’autres pays européens, comme l’Allemagne et le Royaume
-
Uni
273
.
Dans la continuité de l’enquête qu’elle a menée en 2011 sur la
maîtrise de la dépense de médicaments
274
et dans le contexte d’une
stagnation préoccupante du marché des génériques
275
, la Cour a souhaité
dresser un bilan de la politique de diffusion des médicaments génériques
conduite par les pouvoirs publics.
Il lui est apparu que celle-
ci a manqué d’ambition et que les
résultats obtenus sont trop modestes (I). Le dispositif de développement
initialement mis en place, centré quasi-exclusivement sur les pharmaciens,
a de fait atteint ses limites (II). Afin de favoriser une diffusion beaucoup
270. Un médicament générique peut être commercialisé entre 10 et 15 ans après la
première autorisation de mise sur le marché du médicament de référence.
271. 20
Md€
: hors rétrocession hospitalière (1,6
Md€)
272.
Le chiffre d’affaires HT du médicament générique à l’hôpital était évalué à
150
M€ en 2012
273. OCDE,
Panorama de la santé 2013
, chiffres 2011 ou année la plus proche.
274. Cour des comptes
, Rapport sur l’application des lois de financement de la
sécurité sociale pour 2011
, chapitre IV : la maîtrise des dépenses de médicaments,
septembre
2011,
p. 111-145,
La
Documentation
française,
disponibles
sur
www.ccomptes.fr
.
275. Xpr-
SO®, panel en temps réel de Celtipharm. Le taux d’évolution en
chiffre
d’affaires toutes taxes comprises est nul en cumul annuel mobile entre mai 2013 et
mai 2014.
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260
plus large des médicaments génériques et de rattraper le niveau de nos
voisins européens, il est nécessaire désormais d’adopter une nouvelle
stratégie, plus vigoureuse et axée principalement sur les médecins (III).
I
-
Une politique peu ambitieuse, des résultats trop
modestes
La politique des génériques telle qu’elle existe actuellement a été
définie pour l’essentiel à la fin des années 1990. Ainsi que l’ont fait
l’ensemble des pays développés, la France a cherché à développer son
marché des génériques, mais elle s’est appuyée sur une démarche
spécifique, qui a produit des résultats peu satisfaisants.
A - Une démarche spécifique et tardive
1 -
Un périmètre étroitement circonscrit
a)
Une définition initialement limitée
Jusqu’à l’ordonnance «
Juppé
» du 24 avril 1996, il n’existait pas
en France de définition légale du médicament générique. L’article
L. 5121-1 du code de la santé publique lui confère trois caractéristiques :
la même composition en principe actif que le médicament de référence dit
« princeps », la même forme pharmaceutique et une bioéquivalence
276
avec
le
médicament
princeps,
démontrée
par
des
études
de
biodisponibilité. Le générique n’est donc pas une copie confor
me du
médicament princeps, il peut en différer par certaines de ces
caractéristiques, encadrées et limitativement énumérées dans le code de la
santé publique. Cette définition a connu trois modifications visant à
transposer la définition européenne élargie du médicament générique
mais qui n’en n’ont pas changé substantiellement la nature.
b)
Un « répertoire des groupes génériques » restrictif
La définition juridique a servi de support à la mise en place en
1998 d’un «
répertoire des groupes génériques » où sont inscrites par
l’Agence nationale de la sécurité du médicament (ANSM) les spécialités
princeps et génériques substituables entre elles par les pharmaciens.
Conçu comme un outil de sécurisation de la substitution du médicament
276.
C’est
-à-
dire une même diffusion dans l’organisme que la spécialité de référence.
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MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
261
générique
au
médicament
princeps,
le
répertoire
comporte
des
informations relatives à la substitution de certaines spécialités ainsi que la
mention des excipients à effet notoire
277
. La France a retenu une
définition restrictive du « répertoire des groupes génériques ». La
définition d
e l’équivalence entre les molécules peut être fondée sur des
équivalences
chimiques,
pharmacologiques
ou
thérapeutiques
et
l’équivalence chimique, principe retenu en France, est la plus limitée
:
elle permet de constituer des groupes homogènes avec les seules
spécialités comprenant les mêmes principes actifs, au même dosage
278
.
Ainsi, en France, seuls les génériques appartenant à un « groupe
générique », comprenant les mêmes principes actifs et figurant au
répertoire, sont substituables
Si le principe d’une
liste des médicaments substituables a quelques
équivalents en Europe, notamment en Belgique, de nombreux pays
autorisent la substitution sans se fonder sur un répertoire des groupes
génériques, comme c’est le cas par exemple en Angleterre ou en
Allemagne.
2 -
Une politique fondée par défaut sur la substitution par le
pharmacien
Contrairement à l’approche retenue par la plupart des pays
européens, qui mobilisent, parfois de manière contraignante, les
médecins, le développement en France des médicaments génériques a été
fondé quasi-exclusivement sur un acteur, le pharmacien et sur un outil, le
droit de substitution. Ainsi, depuis 1999
279
, les pharmaciens d’officine
peuvent proposer au patient de prendre un médicament générique plutôt
qu’un médicament princeps au sei
n des seuls groupes génériques du
répertoire. Dans le cadre de la politique conventionnelle que la CNAMTS
mène avec cette profession, sont ainsi notamment fixés des objectifs de
277. Un excipient à effet notoire est une substance sans activité pharmacologique,
incorporée au médicament générique ou princeps, qui peut nécessiter des précautions
particulières pour certaines catégories de médicaments.
278 .
L’équivalence pharmacologique concerne les produits d’une même classe
thérapeutique et l’équivalence th
érapeutique, la plus large, permet de regrouper tous
les médicaments indiqués dans la même pathologie. Ainsi l’Allemagne
, a retenu ce
dernier principe pour fixer ses forfaits de remboursement, ce qui permet de regrouper
tous les médicaments indiqués dans la même pathologie.
279. Loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour
1999.
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262
taux de substitution entre médicaments princeps et médicaments
génériques
280
.
Il
s’agit en fait d’une stratégie de second rang, en retrait des
ambitions initiales
: à l’origine le dispositif de diffusion des génériques
n’entendait pas contourner les prescripteurs, mais l’échec des tentatives
de régulation des pratiques de prescription et la forte réticence des
syndicats de médecins ont conduit les pouvoirs publics à renoncer à leurs
ambitions initiales. Dans le même temps, une politique de prix élevés
pour les médicaments présentés comme innovants a été consentie aux
fabricants, qu’il
avait été envisagé de financer en partie par le
développement du marché des génériques
281
.
B - Une contribution limitée à la maîtrise des dépenses
de médicaments
1 -
Une progression poussive
Le marché des génériques en France a été quasiment inexistant
pendant longtemps : au début des années 90, il ne constituait que 2 % du
marché total des médicaments en volume
282
. Si en 2002, il en atteignait
10
%, sa part de marché en Allemagne s’élevait à la même époque à
40 %
283
.
Entre 2002 et 2012, le nombre de boîtes de génériques vendues a
été cependant multiplié par trois, en passant de 225 millions en 2002 (soit
une boîte sur dix), à 689 millions en 2012 (un peu plus d’une boîte sur
quatre). En 2013, le marché des génériques remboursables représente
ainsi 30 % du marché en volume et 15,5 % en valeur en prix fabricant. Le
taux de substitution - calculé au sein du seul répertoire - a lui aussi
progressé sur l’ensemble de la période. Il s’élevait à 35
% en 2002 et
atteint désormais 82 %
284
.
280.
L’accord national du 6 janvier 2006, relatif à la fixation d’objectifs de délivrance
de spécialités génériques prévoyait que des mesures incitatives pourraient être mises
en place dans le cadre d’une convention nationale, ce qui a été fait en 2012.
281.
Cf. article 13 de l’accord
-cadre du 19 juillet 1999 entre le comité économique du
médicament et le syndicat national de l’industrie pharmaceutique.
282.
La diffusion des génériques s’apprécie mieux en volume, car la part de marché
en valeur minore le taux de pénétration, compte tenu des prix inférieurs aux
médicaments de référence.
283. Présentation du plan médicament 2001.
284. CNAMTS, mai 2014.
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DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
263
évolution de la part des génériques dans le marché
Graphique n° 12 :
des spécialités remboursables
Source :
Analyse des ventes de médicaments en France en 2013 - Agence nationale
de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) Juin 2014. Pour l’égalité
des marges (2000), voir infra
Près d’un tiers de l’ensembl
e des classes thérapeutiques bénéficie
d’une offre de médicaments génériques
: alors que celle-ci ne portait que
sur 64 classes en 2002, elle en concernait 109 en 2012
285
.
Cette croissance doit cependant beaucoup à des facteurs extérieurs,
comme la tombée de nombreux brevets dans le domaine public. Ainsi, la
forte hausse du volume des génériques en 2012 et 2013 provient pour une
part importante de l’effet mécanique de ce phénomène (qui a concerné
notamment le Tahor®
286
).
Comme le montre le précédent graphique, les pouvoirs publics
ont dû intervenir à plusieurs reprises pour soutenir le marché des
médicaments génériques. Par exemple, la baisse de la consommation des
génériques constatée à partir de 2009, en partie liée à la faiblesse du taux
de substitution, a pu être enrayée grâce à deux mesures : la généralisation
285. DREES, C
omptes nationaux de la santé 2012
.
286 . Le Tahor® est un médicament destiné faire baisser la cholestérolémie,
appartenant à la classe des statines. Au moment de la tombée de son brevet, les
remboursements de cette molécule par l’assurance maladie sont passé
s de 340
M€
(2011) à 177
M€ (2012). Source
: Medic’AM.
3,4%
4,4%
6,0%
8,0%
10,6%
12,5%
14,9%
17,5%
19,5%
21,7%
23,6%
24,3%
23,0%
26,4%
30,2%
1,8%
2,2%
2,9%
3,9%
5,1%
6,4%
7,4%
8,3%
9,3%
9,4%
10,5%
11,4%
10,9%
13,9%
15,5%
0%
5%
10%
15%
20%
25%
30%
35%
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
En quantité
En valeur
2000 :
égalité des
marges
2008 :
majoration
des remises
2012 : tiers payant
contre générique ;
rémunération à la
performance
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264
du « tiers payant contre génériques »
287
, qui a constitué une forte
incitation pour les patients à accepter la substitution proposée par le
pharmacien pour pouvoir bénéficier du tiers-payant et
la création d’une
rémunération à la performance pour les pharmaciens ont permis de faire
progresser la part de marché en volume des médicaments génériques
remboursables de près de sept points en deux ans.
2 -
Des économies difficiles à apprécier
La réalisation des objectifs d’économies liés aux génériques, bien
qu’ils soient affichés de plus en plus clairement, notamment dans les lois
de financement de la sécurité sociale
288
, n’a pas fait l’objet par les
pouvoirs publics, au cours d
es dix dernières années, d’un suivi cohérent,
fondé sur des méthodes rigoureuses d’évaluation.
Les économies sont calculées en fonction de ce qu’aurait dépensé
l’assurance maladie si les patients n’avaient consommé que des
médicaments princeps et correspondent en fait aux coûts qui auraient été
supportés en l’absence de commercialisation des génériques
289
. Ainsi,
selon les estimations de la CNAMTS, la moindre dépense cumulée liée
aux génériques depuis 2002 serait de 12,1
Md€, principalement du fait de
la progression de la substitution dans le répertoire (8,5
Md€ entre 2002 et
2012). Ces économies sont allées croissant. Sur la seule année 2013, la
CNAMTS estime que les génériques lui ont permis d’économiser
1,6
Md€ en remboursement de médicaments (contre 1,46
M
d€ en
2012)
290
.
L’«
effet
générique »
contribue
ainsi
au
ralentissement
de
l’évolution des dépenses totales de médicaments. Isolé par la CNAMTS
depuis 2008, il apparaît particulièrement élevé en 2012 (-1,8 point) et en
2013 (-2,2 points).
287. Avenant n°
6 du 4 mai 2012 à l’accord national sur les génériques conclu entre
l’UNCAM et les représentants des pharmaciens.
288. Ainsi la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité
sociale pour 2014 fixe à plus de 600
M€
les baisses de prix liées aux génériques, au
travers de la baisse de prix de médicaments ayant perdu leur brevet (245
M€), de
l’optimisation de la tarification des génériques (165
M€), des opérations de
convergences de prix dans le répertoire selon les orientations ministérielles (200
M€).
289.
Elles s’obtiennent en valorisant le nombre de boîtes de
génériques par les
différences entre le PPTTC des princeps et celui des génériques, pondéré par le taux
de remboursement.
290. CNAMTS,
point d’information médias,
10 avril 2014.
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MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
265
Tableau n° 65 :
décomposition sel
on la CNAMTS de l’évolution du
remboursement des médicaments en ville
En %
2008
2009
2010
2011
2012
2013
Effet prix
- 1,9
- 2,2
- 2,2
- 2,2
- 3,5
-3,8
Effet génériques
- 1,1
- 0,9
- 1,4
- 0,7
- 1,8
-2,2
Effet boîtes
- 3,3
2,2
- 0,1
- 0,6
- 1,3
1,2
Effet structure
291
9
3
6,2
3,5
5,3
4,3
Taux de croissance
global
2,8
2
2,5
0
- 1,1
-0,4
Source :
données CNAMTS, dépenses remboursées par l’assurance maladie, en date
de remboursement, données y compris rétrocession hospitalière, PQE maladie 2014,
p. 126, indicateur 4.1 et Point information médias avril 2014.
Le montant de ces économies doit cependant être relativisé. La
méthode adoptée conduit à majorer, dans une proportion difficile à
déterminer, leur montant, car le calcul adopté est fait « toutes choses
égales par ailleurs
», c’est
-à-dire sans prendre en compte les baisses du
prix des princeps qui
seraient vraisemblablement survenues en l’absence
d’offre de génériques. Par ailleurs, il s’agit pour partie d’un montant brut.
Ce dernier ne prend en compte en effet que certaines mesures destinées à
élargir le marché des génériques (par exemple, l’égali
té des marges des
pharmaciens entre génériques et princeps) et non le coût de l’ensemble
des incitations financières versées par la CNAMTS aux professionnels de
santé (pharmaciens ou médecins) pour promouvoir la diffusion du
générique.
Surtout, le dévelop
pement des génériques s’est inscrit également
dans une politique conventionnelle plus large entre les pouvoirs publics et
les laboratoires pharmaceutiques, qui s’est accompagnée notamment, en
contrepartie des actions conduites pour élargir leur part de mar
ché, d’un
renchérissement du prix des médicaments protégés par des brevets, ce qui
a conduit à un accroissement des dépenses de médicaments, réel mais
difficile à isoler.
291.
L’effet structure correspond à la différence entre les effets prix, générique
s et
boîtes et le taux de croissance global. Il résulte en partie de la déformation de la
consommation de médicaments vers des produits innovants et donc coûteux et de
l’augmentation de la prise en charge par l’assurance maladie au titre des affections de
longue durée.
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266
C - Un considérable retard français au regard des
comparaisons internationales
Les résultats de la politique de diffusion des génériques
apparaissent médiocres si on les rapproche des résultats obtenus par des
pays voisins.
Bien
qu’il
soit
nécessaire
de
manier
avec
prudence
les
comparaisons internationales, le dernier panorama de santé de l’O
CDE
met en évidence des situations très contrastées : en 2011, les génériques
représentaient environ trois quarts du volume du marché des médicaments
remboursés en Allemagne, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et au
Danemark, alors qu’ils représentaient u
n quart de ce marché en
France
292
. Alors que le retard de la France à s’engager dans cette
politique est souvent invoqué comme une explication des résultats
obtenus, des pays comme le Portugal ou l’Espagne, qui affichaient de
faibles niveaux en 2000, ont sensiblement accru la part de marché des
génériques en intensifiant leurs efforts dans le cadre de plans de réduction
des déficits publics et ont désormais rattrapé ou dépassé la France - les
génériques représentent 34 % des parts de marché en volume en Espagne
et 30 % au Portugal.
part des génériques dans le marché pharmaceutique
Graphique n° 13 :
total, 2011 (ou année la plus proche)
1. Marché des médicaments remboursés. 2. Marché des médicaments de ville
Source :
OCDE 2013.
292.
Panorama de santé 2013
, les indicateurs de l’OCDE.
35
29
28
24
44
36
17
19
15
18
17
15
23
6
12
9
16
9
8
3
76
75
73
72
70
51
42
41
36
35
34
34
30
29
25
23
21
18
16
9
0
10
20
30
40
50
60
70
80
Allemagne 1
Royaume-Uni 1
Nouvelle-…
Danemark 1
Rép. Slovaque
Turquie
Norvège
OCDE 19
Finlande
Estonie
Rép. Tchèque
Espagne 1
Portugal 1
Chili 2
France 1
Japon
Suisse 1
Irlande 1
Italie
Luxembourg 1
Valeur (%)
Volume (%)
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DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
267
Selon l’OCDE «
certaines disparités dans la part des génériques
entre les pays peuvent s’expliquer par les structures des marchés,
notamment le nombre de médicaments non protégés par un brevet ou les
préférences des médecins pour les médicaments sous breve
t, mais l’essor
des génériques dépend largement des politiques mises en œuvre
». Une
comparaison avec les structures de consommation des principaux pays
voisins montre que l’assurance maladie aurait pu réaliser des économies
bien plus considérables si le niveau de pénétration des génériques avait
progressé plus rapidement au cours de la dernière décennie en France.
De surcroît et
bien qu’il soit très difficile de comparer les prix des
médicaments génériques d’un pays à l’autre
293
, la CNAMTS constatait
en 2012
294
que le coût moyen d’une unité standard de générique en
France qui s’élevait à 0,15
€, était le plus élevé parmi les huit pays
européens à économies comparable étudiés. Les coûts les plus bas étaient
observés au Royaume-Uni et aux Pays-Bas (0,07
€), l’Al
lemagne étant
dans une situation intermédiaire (0,12
€).
Il ressort ainsi des comparaisons internationales qu’il est possible
d’atteindre des résultats beaucoup plus élevés, en levant les freins à la
diffusion des génériques.
II
-
Un modèle à bout de souffle
A -
Des outils d’une efficacité déclinante
1 -
Un répertoire obsolète
a)
Un périmètre trop restreint
Des médicaments qui pourraient être substituables ne figurent pas
au répertoire. Ainsi en 2013, selon les données du comité économique des
produits de santé (CEPS), les médicaments qui ne sont pas inscrits au
répertoire et non protégés par des brevets représenteraient plus de 47 %
du volume des médicaments de ville remboursables et près de 22 % de
leur valeur.
293.
Le champ couvert par les génériques n’est pas le même, les dosages et les
conditionnements peuvent également varier et enfin les systèmes de régulation
économique du médicament peuvent fausser les comparaisons.
294. Points de repère, novembre 2012, n° 39.
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268
cartographie du marché des médicaments
Graphique n° 14 :
remboursables
Source :
CEPS
C’est le cas par exemple des médicaments sans princeps de
référence, c’est à dire ceux pour lesquels le brevet de référence n’existe
plus.
La question du paracétamol
Bien que cela soit juridiquement possible depuis 2003
295
, le
répertoire n’inclut toujours pas le paracétamol, qui représente pourtant
près de 500 millions de boîtes vendues et près de 400
M€ de
remboursement pour la CNAMTS. Ainsi si un médecin prescrit du
Doliprane®
296
, le pharmacien n’a pas le droit de substituer ce produit,
alors même que des copies de ce médicament existent.
La possibilité de substituer le paracétamol, évoquée dès 2002 et à
nouveau proposée par l’ANSM fin décembre 2013, pourrait pourtant
contribuer à de nouvelles économies en instaurant une concurrence par les
prix entre les producteurs sur un marché dominé aujourd’hui par deux
entreprises.
Les
pouvoirs
publics
ont
pour
le
moment
fait
le
295. Loi de financement de la sécurité sociale n°2002-1487 du 20 décembre 2002 de
financement de la sécurité sociale pour 2003, article 43.
296. Le Doliprane® est le 4
ème
médicament le plus
remboursé par l’assurance maladie
en 2013, à hauteur de 315
M€, en hausse de 14,1
% par rapport à 2012.
6,02
32,6%
8,38
45,5%
4,03
21,9%
Cartographie en valeur, 2013
Médicaments inscrits au répertoire (Md
€
; %)
Médicaments princeps protégés par un brevet (Md
€
; %)
Médicaments hors répertoire et non protégés (Md
€
; %)
1,15
46,1%
0,16
6,4%
1,19
47,5%
Cartographie en volume, 2013
Médicaments inscrits au répertoire (Md
€
; %)
Médicaments princeps protégés par un brevet (Md
€
; %)
Médicaments hors répertoire et non protégés (Md
€
; %)
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
269
choix d’une baisse du prix de cette molécule
297
, ce qui devrait permettre à
l’assurance maladie de faire des économies à hauteur de 38
M€ par an.
D’autres baisses pourraient être envisagées, s’il s’avère que le prix
de production est encore largement inférieur au prix fixé par le CEPS. Par
ailleurs, le déremboursement de
cette molécule, à l’instar du choix effectué
par d’autres pays, susciterait des économies autrement plus importantes.
Dans le même temps, la mise sur le marché de formes génériques du
paracétamol permettrait d’aviver la concurrence entre producteurs, de
ma
nière à éviter qu’une augmentation des prix ne pèse sur les patients.
En outre, quelques produits ne sont pas non plus inscrits au
répertoire soit parce qu’il s’agit de produits «
de niche » dont la
rentabilité est trop faible pour que des génériques soient commercialisés
au prix actuellement proposés pour ceux-ci, soit parce que ces produits
ont un mode de production particulier de la substance active.
298
.
Enfin, pour des raisons liées autant à des motifs de sécurité
sanitaire qu’au droit des brevets sur le
s dispositifs médicaux utilisés, seuls
quelques traitements par voie inhalée (c’est
-à-dire faisant appel à un
dispositif médical d’administration par voie respiratoire) de l’asthme
chronique et de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO)
sont i
nscrits au répertoire. D’autres pays, comme la Grande
-Bretagne ou
les États-
Unis, ont bénéficié de l’existence de génériques pour ces
médicaments et
ont autorisé la substitution pour une partie d’entre eux au
début du traitement.
b)
Un répertoire en érosion
Plus d’une boîte sur deux prescrite par les médecins n’est pas
substituable. Cela signifie que même avec un taux de substitution à
100 %, le répertoire ne dépasserait pas 40 % de part de marché. La
préférence des prescripteurs pour les médicaments nouveaux constitue
une spécificité française. Les prescriptions s’orientent vers les produits
plus récents, donc plus chers, toujours sous brevet, sans souvent qu’ils
apportent une amélioration du service médical par rapport à des
molécules
substituables.
La
classe
thérapeutique
des
statines
(médicaments contre le cholestérol, très largement utilisés) fournit une
bonne illustration de ce phénomène : en 2011, 39 % seulement des
statines prescrites en France étaient des génériques, contre 96 % en
297. Le CEPS envisage de diminuer de 14 %
le prix du comprimé à l’unité, en passant
de 0,86
€ à 0,76
€ en PFHT
.
298. Par exemple
: Pyostacine®, Kardegic®, Pivalone®, Dexeryl®, Stagid®… Ils
représentent un chiffre
d’affaires hors taxe de l’ordre de 1
Md€.
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OUR DES COMPTES
270
Allemagne, 73 % en Finlande et au Royaume Uni-et 72 % en
Norvège
299
.
Certains laboratoires pharmaceutiques ont en outre développé des
stratégies visant à limiter le développement des génériques pour préserver
leurs parts de marché. Ils produisent ainsi des médicaments nouveaux
mais très voisins des molécules originales - appelés « contre-génériques »
ou « me too » - pour lesquels ils obtiennent des prix plus élevés, ce qui
contribue à restreindre la place du répertoire et donc à conserver leurs
parts de marché. Des actions de dénigrement des génériques notamment
auprès des prescripteurs ont fait l’objet de sanctions à l’encontre de
laboratoires par l’Autorité de la concurrence
300
. Des entraves à la
concurrence ont pu également été relevées notamment en France, lorsque
des
laborato
ires
s’entendent
avec
leurs
concurrents,
moyennant
rétribution, pour retarder l’entrée des génériques sur le marché («
pay for
delay »)
301
.
2 -
Une politique des prix insuffisamment active
a)
Une fixation quasi-automatique des prix
Le comité économique des produits de santé (CEPS) est chargé de
la fixation du prix des médicaments, une fois l’autorisation de mise sur le
marché délivrée et le niveau de remboursement déterminé
302
. Le
dispositif de fixation du prix des génériques a été dès le départ conçu de
manière plus automatique que pour les médicaments protégés par un
brevet, par le biais principalement de l’application de «
décotes »
appliquées par le comité sur le prix fabricant hors taxe du princeps, au
moment de l’arrivée des génériques sur le marché et dans les
mois qui
suivent.
299. CNAMTS,
Rapport Charges et Produits pour 2013
.
300. Décision n° 13-D-11 du 14 mai 2013. Décision n° 13-D-21 du 18 décembre
2013. Ces décisions font l’objet d’appels.
301. Commission européenne,
Rapport d’enquête sur le secteur pharmaceutique
,
publié le 8 juillet 2009 et
quatrième rapport de suivi
, publié le 9 décembre 2013.
302. Sauf exception, les dossiers des médicaments génériques ne sont pas transmis à
l’avis de la commission de la transparence de la Haute autorité de santé. Le même
niveau de service médical rendu que le princeps est attribué aux génériques, avec une
amélioration de service médical rendu nulle (ASMR V).
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
271
Les règles de fixation des prix
Au moment de leur commercialisation, les génériques se voient
attribuer une première décote par rapport au prix fabricant hors taxe du
princeps
303
. Les médicaments princeps se voient aussi appliquer une
décote de 20 %
304
. La décote appliquée aux médicaments génériques a
doublé au cours des dix dernières années, en passant de 30 % à 60 %
305
.
Cependant, d’une part elle ne s’est appliquée qu’au flux des nouveaux
médicaments génériques et non au stock
306
et
d’autre
part elle est
appliquée sur le prix initial du médicament princeps et non sur son prix
soumis à décote - ce qui revient en fait à une décote de 50 % par rapport
au nouveau prix du princeps.
Après 18 mois de commercialisation, le comité de suivi des
généri
ques est, au sein du CEPS, chargé d’appliquer de nouvelles baisses
de prix aux médicaments princeps et génériques. Ces nouvelles décotes
s’élèvent à 12,5
% du prix fabricant hors taxe pour les princeps et à 7 %
pour les génériques
307
.
Outre les décotes, d’a
utres outils de régulation des prix peuvent
être utilisés.
En cas de substitution insuffisante (inférieure à 65%), les
médicaments
peuvent
se
voir
appliquer
un
tarif
forfaitaire
de
responsabilité. Cet outil, instauré en 2003, permet au CEPS de fixer un
mo
ntant identique de remboursement en valeur absolue (au lieu d’un taux
exprimé en pourcentage) pour l’ensemble des médicaments figurant dans
un même groupe générique. Dans ce cas, l’assuré bénéficie toujours du
même montant forfaitaire de remboursement, quel que soit le prix auquel
le princeps ou le générique sont vendus, ce qui signifie que dans
l’éventualité d’un surcoût, la différence reste à sa charge.
Enfin, depuis 2012, le comité a engagé, pour le cas de classes
pharmaco-thérapeutiques homogènes et dis
posant d’un niveau de
substitution générique important une politique de « convergence de prix »
avec pour objet d’aligner le prix des génériques d’un côté et ceux des
303. Ce prix est fixé sur la base du « dossier de prix » fourni par le laboratoire qui
relève d’un modèle simplifié mettant en regard le prix résultant d’une décote normale
avec le prix proposé par l’entreprise.
304. 15
% jusqu’en 2012.
305. Ces décotes étaient de 30
% jusqu’en novembre 2001, puis de 40
% jusqu’en
2002, puis de 50
% jusqu’en 2008, de 55
% en septembre 2008 et à partir de 2012 de
60 %.
306. Nombre de génériques ont ainsi des niveaux de décote bien inférieurs à ceux
aujourd’hui en vigueur.
307.
C’est
-à-dire un prix du médicament générique inférieur de 53 % au prix fabricant
hors taxe du princeps avant la tombée du brevet.
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OUR DES COMPTES
272
princeps de l’autre vers les prix les plus bas. Cette règle, qui contribue à
limiter l’au
tomaticité de la fixation des prix, a été appliquée à la classe
des inhibiteurs de pompes à protons (anti-ulcéreux) en 2013 et en 2014 à
celle des statines (anti-cholestérol) avec des nouvelles et importantes
baisses en moyenne de 32 % pour les princeps et de 28 % pour les
génériques. Il reste néanmoins que le prix des génériques demeure fixé
sans lien avec le coût de production de ces médicaments.
b)
Des incohérences coûteuses dans l’application des règles
Le caractère plus automatique de la fixation du prix des génériques
n’empêche pas que des incohérences coûteuses dans l’application des
règles aient été constatées. Ainsi, en principe, des médicaments nouveaux
mais n’apportant pas d’amélioration de service médical rendu ne peuvent
être remboursés que s’ils apportent une économie à l’assurance
maladie
308
. Lors de leur introduction sur le marché des médicaments
remboursables, leur prix est donc fixé afin de ne pas être supérieur aux
autres molécules comparables. Mais lorsque ces dernières perdent leur
brevet et que leur prix baisse, les alignements de tarifs ne sont pas
systématiquement effectués, comme le montre l’exemple ci
-dessous.
Le Crestor®
: un retard d’ajustement onéreux
Il existe en France cinq statines dont quatre ont des génériques
(atorvastatine, simvastatine, pravastatine et fluvastatine). La seule
molécule encore sous brevet, la rosuvastatine (Crestor®, Astra Zeneca) a
obtenu une amélioration de service médical rendu inexistante (ASMR V)
au moment de sa mise sur le marché. Dès lors, sa commercialisation
devrait en théorie permettre à l’assurance maladie de réaliser des
économies.
Lors de sa commercialisation, le prix du Crestor® a bien été fixé
pour ne pas être supérieur à celui des autres statines, conformément à cette
règle. Cependant, ce prix est resté stable alors que le prix des autres
statines a été réduit lors de l’apparition de leurs génériques. La
rosuvastatine, molécule aujourd’hui la plus chère, est beaucoup plus
prescrite en France qu’à l’étranger (soit 30
% des statines prescrites, contre
0,5 % en Allemagne et 3,9 % au Royaume-Uni). Cette situation explique
pour partie le niveau plus élevé en France qu’en Allemagne des prix
fabricant hors taxes des statines par unité standard (0,4
€ contre 0,13
€), Il
308. Article R. 163-5 du code de la sécurité sociale.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
273
en résulte que pa
r rapport à l’Allemagne, la structure de prescription des
statines en France a induit un surcoût total pour l’assurance maladie estimé
à 500
M€ en 2012
309
.
Certes, le CEPS a prévu de baisser le prix du Crestor® d’ici sa
perte de brevet en 2017 mais à un rythme très lent (7 % par an) induisant
un surcoût de 400
M€ d’ici là.
c)
Des injonctions contradictoires
L’action du CEPS est souvent limitée par des consignes imprécises
ou parfois contradictoires. Ainsi les orientations ministérielles qui lui ont
été adressées en avril 2013 lui demandent de poursuivre des objectifs
d’efficience et de maîtrise de la dépense de médicaments tout en veillant,
par ailleurs, au « dynamisme des industries de santé, qui sont un secteur
d’avenir prioritaire
et
au développement de l’emp
loi ». Ces objectifs
apparaissent difficilement conciliables. Alors que d’autres administrations
et dispositifs ont pour mission de soutenir l’emploi et l’innovation, son
action devrait porter uniquement sur la maîtrise des dépenses et la prise
en charge des améliorations thérapeutiques, en procédant, en priorité, à un
ciblage de ses efforts sur les prix de quelques classes thérapeutiques, qui
représentent les plus forts enjeux de régulation, notamment les
traitements de l’hypertension artérielle, les hypol
ipémiants, les anti-
douleurs et les antidiabétiques oraux.
En tout état de cause, l’action du CEPS est largement tributaire des
moyens dont il dispose : une dizaine de personnes pour le médicament
dont une seule chargée à temps plein du suivi des génériques, - pour des
enjeux de tarification et de maîtrise de dépenses majeurs -
et alors qu’il
négocie avec des entreprises particulièrement puissantes.
B -
Le choix contestable d’un acteur unique
1 -
Une économie officinale devenue dépendante des génériques
a)
Un cumul d
’incitations financières
En contrepartie de leur implication dans la diffusion des
génériques, les pharmaciens d’officine ont bénéficié de cinq incitations
financières.
309. CNAMTS
, R
apport sur les charges et produits pour l’année 2014
, p. 140.
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274
La première soutient depuis 2000 le droit de substitution : le
pharmacien dispose de la même marge en valeur absolue que le
médicament de référence lorsqu’il délivre un générique, bien que le prix
fabricant hors taxe de ce médicament soit jusqu’à deux fois
moins cher.
La CNAMTS estime le montant global de cette marge incitative à
450
M€ en 2013.
Par
ailleurs,
les
pharmaciens
bénéficient
d’une
deuxième
incitation, la captation de la marge du grossiste, grâce à la possibilité
d’achats directs de médicaments
auprès des dépositaires des firmes
pharmaceutiques
310
. La rémunération supplémentaire à ce titre s’élève à
environ 120
M€ en 2013
311
.
Les pharmaciens peuvent aussi bénéficier de deux autres formes de
rémunération de la part des fabricants de médicaments génériques.
Depuis 2008, une « remise commerciale » plafonnée à 17 % du prix
fabricant hors taxe leur a été accordée (cette remise commerciale ne peut
dépasser 2,5 % pour les médicaments princeps). Les fabricants de
médicaments ont aussi développé, pour accéder au marché des officines
de
ville,
des
pratiques
de
« coopération
commerciale »
ou
de
« rémunération de services » qui constituent des marges arrière
déguisées
312
. Le montant cumulé de ces deux avantages s’élèverait à plus
de 1
Md€ en 2013
313
. Selon les représentants des pharmaciens, ces deux
catégories de remises consenties par les fabricants représentent plus de
40 % du prix fabricant hors taxes des médicaments génériques, ce qui, au
demeurant, démontre qu’il existe encore des marges substantielles pour
des baisses de prix.
La CNAMTS a, enfin, mis en place depuis 2012 une cinquième
incitation par le biais de la rémunération sur objectifs de santé publique
310. Arrêté de marge du 3 mars 2008.
311. La « marge grossiste
» s’élève selon la CNAMTS à 340
M€ en 2013 et le
mode
de distribution en achat direct en constitue environ 40 %. .
312 . La dernière enquête menée par les réseaux de la direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en 2013
a confirmé l’ampleur prise par les pratiques de contournement des règles du code de
la sécurité sociale et a permis de montrer que certains contrats de coopération
commerciale ne constit
uent qu’un catalogue de prestations susceptibles d’être rendues
par les officines pour les médicaments en accès libre, sans précision de date, de durée
ou des produits concernés.
313. Estimation de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de
la répression des fraudes et de la CNAMTS
: 467M€ de remises plafonnées et environ
700
M€ de dépassement de plafond dans le cadre des contrats de coopération
commerciale.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
275
pour les pharmaciens, qui porte entre autres
314
sur un niveau de
substitution pour une trentaine de molécules. Cette rémunération
supplémentaire contribue ainsi à améliorer les revenus des pharmaciens
lorsqu’ils délivrent des génériques et atteignent les objectifs fixés. Leur
rémunération à ce titre a représenté 135,3
M€ en 2013 selon la caisse
nationale (soit un montant moyen de 5 705
€ par officine). En cas de non
atteinte des objectifs fixés, des sanctions peuvent être prononcées par les
commissions paritaires locales.
b)
Un coût de distribution qui ampute considérablement les économies
liées au développement des génériques
Le choix du pharmacien comme acteur principal de la diffusion des
génériques, a contribué à augmenter le coût de distribution des génériques
du fait du cumul des incitations financières mises en place par les
pouvoirs publics ou obtenues des producteurs.
Tableau n° 66 :
coût de la rémunération des pharmaciens liée aux
génériques
En
M€
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
Total
Égalité marges
203
248
271
339
351
368
451
2 331
Marge arrière
315
n.d.
291
314
351
361
410
467
2 194
Prestations commerciale
(estimations)
n.d.
n.d.
n.d.
n.d.
n.d.
600
700
1 300
ROSP
-
-
-
-
-
73
135
208
Total
203
539
585
690
712
1 451
1 753
5 933
Source :
CNAMTS
Les résultats obtenus doivent être mis en regard des économies
réalisées par l’assurance maladie grâce à la diffusion de ces médicaments.
Ainsi, en 2013, les pharmaciens ont bénéficié au titre des principaux
dispositifs décrits ci-
dessus d’incitations financières d’un montant estimé
à 1,7
Md€, c’est
-à-dire un montant du même ordre que les économies
nettes calculées par la CNAMTS la même année (1,6
Md€). Autrement
dit sur deux euros d’économies potentielles, un euro est accordé aux
pharmaciens.
314. Les autres champs de la rémunération concernent la promotion de la qualité de la
dispensation et la modernisation et la qualité de service de l’officine.
315.
Calculs sous l’hypothèse que 80
% des officines saturent le plafond de 17 % du
CAHT des génériques.
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c)
Un dispositif qui atteint ses limites
L’économie officinale est confrontée depuis plusieurs années à des
difficultés liées à la fois aux modifications de comportement des patients
et au ralentissement du marché du médicament. Alors que leur activité
était globalement décroissante en 2012 (-0,5 % de CA hors taxes), la
rentabilité des pharmacies est préservée par le médicament générique qui
contribue fortement à l’amélioration de la marge commerciale. Ces
médicaments représentent en 2013 plus de 33 % de la marge légale
perçue sur les médicaments présentés au remboursement
316
.
Le cumul d’incitations consenti a permis d’assurer la survie de
nombre d’entre elles devenues aujourd’hui dépendantes de la diffusion
des génériques.
Les choix faits contribuent aussi à limi
ter les marges de manœuvre
des pouvoirs publics pour faire évoluer leur stratégie, les pharmaciens
d’officine faisant valoir qu’une réallocation des avantages financiers dont
ils bénéficient risque de mettre en danger la survie de nombreuses
officines et, par ailleurs, de faire chuter le taux de substitution et donc le
niveau d’économies obtenues.
2 -
Un rôle très marginal des médecins
a)
Des incitations peu suivies d’effet
Contrairement à d’autres pays, les pouvoirs publics n’ont su ou pu
que très faiblement mobiliser les médecins pour favoriser une diffusion
plus large des médicaments génériques.
En 1997, l’option conventionnelle «
médecins référents » contenait
déjà un engagement à prescrire des médicaments génériques. Par la suite,
de nouveaux engagements ont été pris par les médecins libéraux dans le
cadre de la politique conventionnelle en 2002 (avenant n° 10 du 5 juin
2002) et en 2005 (avenant n° 12 à la convention du 12 janvier 2002). Il
s’agissait de les inciter à prescrire davantage dans le répertoire, pa
r
exemple en réalisant un « effort additionnel » sur certaines classes
thérapeutiques. Mais ces dispositions coûteuses ont été très peu suivies
d’effets.
Plus récemment de nouvelles mesures, elles aussi uniquement
incitatives, ont été mises en place. À la fin des années 2000, une
rémunération des prescripteurs à la performance a été instaurée par
316. Le Cahier Fidutial du Pharmacien 2013, p. 10.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
277
l’assurance maladie sous la forme du contrat individuel d’amélioration
des pratiques individuelles (CAPI)
317
, auquel a succédé depuis 2012 un
dispositif de rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP). Ce
dernier permet notamment à chaque médecin de percevoir une
rémunération supplémentaire si sont atteints les objectifs de prescription
de
génériques
pour
cinq
grandes
classes
thérapeutiques.
Cette
rémunération supplémentaire liée aux génériques, qui a représenté un
coût de 75
M€ en 2013 pour l’assurance maladie, ne constitue qu’un
bonus et
l’absence de respect des objectifs ne vient pas moduler ou
diminuer la rémunération du médecin
318
. Il n’est accompagné, contra
ire-
ment à ce qui est prévu conventionnellement pour les pharmaciens,
d’aucune forme de sanction. Il s’agit en outre d’une démarche cloisonnée
et segmentée, qui ne concerne qu’une toute petite partie de l’offre
générique. Comme la Cour l’a montré, ce dispo
sitif conventionnel ne
contribue que très imparfaitement à l’efficience du système de soins
319
.
C’est ainsi une démarche assez différente de celle, globale et
contraignante, qui a été adoptée en Allemagne.
Le dispositif d’incitation et de responsabilisation
des médecins en
Allemagne
En Allemagne, les prescripteurs ont été financièrement incités à
prescrire des médicaments moins chers durant les années 1990 avec la
mise en place de budgets limités de prescription (réforme Seehofer). En
cas de dépassement d’un
plafond fixé par un accord entre l’union des
caisses
d’assurance
maladie
et
l’union
régionale
des
médecins
conventionnés, les médecins étaient susceptibles de devoir reverser une
partie des honoraires perçus.
317. Lancé en juillet 2009
sur la base des dispositions de l’article L.
162-12-21 du
code de la sécurité sociale, le dispositif est resté applicable jusqu’en 2011.
318.
Un des indicateurs de prescription soumis à rémunération porte d’ailleurs sur une
classe totalement génériquées, les Inhibiteurs de pompes à protons (anti-ulcéreux), ce
qui fait qu’il est atteint par 100
% des médecins.
319 . Cf. chapitre VIII du présent rapport : les conventions avec les professions
libérales de santé
: répondre aux besoins des patients, mieux assurer l’
efficience de la
dépense.
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278
Ce système a fait rapidement et durablement évoluer les
comportements de prescription et a été remplacé par la mise en place
d’objectifs quantifiés de prescription, accompagnés d’un système de
bonus-malus. Des objectifs de prescriptions de médicaments génériquables
par les médecins généralistes ont été fixés (90,5 %). Les ventes des
médicaments ainsi ciblés ont connu une croissance spectaculaire alors que
les ventes de leurs concurrents diminuaient. Entre 2010 et 2013, la part des
génériques dans les médicaments remboursables a progressé de 50 à 75 %
en Allemagne, alors qu’elle n’augmentait que de 24 à 31
% en France, en
volume.
b)
Le retard dans l’utilisation de la dénomination commune des
médicaments
La prescription en dénomination commune internationale (DCI),
c’est
-à-dire la dés
ignation du médicament sur l’ordonnance non par son
nom de marque mais par le nom pharmacologique de la molécule (par
exemple paracétamol plutôt que doliprane®) est encore très peu répandue
chez les prescripteurs en France. Elle permet pourtant d’identifie
r les
fausses innovations thérapeutiques, de sécuriser les prescriptions et
facilite l’utilisation des médicaments génériques. Le patient fait ainsi plus
facilement le lien entre le médicament qui lui est prescrit et la boîte qui
lui est délivrée par le pharmacien.
Les médecins ont ainsi été incités à prescrire en dénomination
commune dès 2002
320
. Dix ans plus tard et alors que cette pratique est
très répandue dans certains pays - par exemple plus de 80 % en Grande-
Bretagne et plus de 35 % en Allemagne -
l’o
bjectif alors fixé, assorti de
contreparties en termes de rémunération pour les prescripteurs, n’est
toujours pas atteint : le niveau de prescription en dénomination commune
par nombre de lignes prescrites s’élève à 12
% en 2013. Il s’agit pourtant
depuis
2009 d’une obligation législative
-
qui n’est donc pas respectée par
les médecins - pour les molécules figurant dans le répertoire. Elle est
élargie désormais à l’ensemble des médicaments à partir du 1
er
janvier
2015
321
. Rien n’a été toutefois fait par ni par les pouvoirs publics ni par
320. Avenant n°
10 à l’accord conventionnel du 5 juin 2002 qui fixe aux médecins
généralistes signataires un objectif moyen national de 25 % de lignes de prescriptions
médicamenteuses rédigées en DCI ou en génériques et au moins 12,5 % dans le
répertoire des génériques, en contrepartie d’une revalorisation de la consultation de
18,5 à 20
€. Cet accord a représenté un coût de 250
M€ pour les régimes de base, sans
que les économies attendues, d’un montant estimé à 260
M€ ne soient réal
isées.
321. Loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité
sanitaire du médicament et des produits de santé.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
279
les organisations professionnelles pour rappeler ces obligations, il est
vrai, assorties d’aucune sanction, alors que l’enjeu est majeur.
c)
Un recours non contrôlé à la mention « non substituable »
Le recours par les médecins à la mention « non substituable »
322
n’est pas contrôlé. L’utilisation de cette mention limite pourtant la
diffusion des génériques car elle permet au prescripteur d’interdire au
pharmacien d’exercer son droit de substitution «
pour des raisons tenant
au patient
» en l’inscrivant à la main s
ur sa prescription. Or cette mention
coûterait plus de 100
M€ par an à l’assurance maladie
323
. Son mésusage,
vraisemblable lorsque cette mention est systématiquement apposée, n’a
été jusqu’à présent jamais sanctionné
324
.
Le flou autour de l’utilisation de cette mention est d’autant plus
étonnant que l’informatisation des médecins a fortement progressé et
qu’il est désormais possible de suivre son usage via l’utilisation, par les
pharmaciens, de la nouvelle version du système de facturation par
télétransmission SESAM-Vitale. La CNAMTS a annoncé toutefois
récemment qu’elle entendait mener une action de contrôle à l’encontre
des quelques centaines de prescripteurs qui abusent systématiquement de
cette pratique.
3 -
Une faible sensibilisation des patients
Le développem
ent des génériques s’est en France faiblement
appuyé sur les patients.
L’écart de reste à charge pour l’assuré en faveur des médicaments
génériques aurait pu théoriquement jouer un effet incitatif, le patient se
tournant de préférence vers le médicament le moins cher et qui lui laisse
le plus faible reste à charge, Cet effet ne joue cependant pas, car le
développement de la couverture complémentaire, du tiers payant y
compris pour la partie complémentaire et l’augmentation des affections
de longue durée, prises en charge à 100 %, limitent les restes à charge
pour l’assuré et donc l’intérêt financier à se tourner vers les génériques.
322. Article R. 5125-23 du code de la santé publique.
323. CNAMTS.
324. Les différentes études disponibles, réalisées par le groupement des fabricants de
génériques (GEMME) et la CNAMTS
pour évaluer l’ampleur du phénomène, sont
assez divergentes et indiquent des proportions variant de 4 à 22 % des lignes de
prescription dans le répertoire.
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OUR DES COMPTES
280
Des actions de communication publique n’ont été mises en œuvre
que dans un premier temps, jusqu’en 2005. Au fil des années, des
doutes
sur l’équivalence des génériques se sont pourtant manifestés, amplifiés
par la faible implication des prescripteurs et certaines campagnes de
dénigrement. Elles ont pu prendre de l’importance du fait notamment de
leur prix, inférieur à celui du princeps, qui a pu être perçu comme lié à
une moindre qualité.
*
*
*
Les exemples étrangers montrent que le succès d’une politique en
faveur des médicaments génériques repose sur l’engagement et la
responsabilisation
des
médecins,
« prescripteurs
»,
l’adhé
sion
des
patients,
« utilisateurs »
et
le
concours
actifs
des
pharmaciens,
« diffuseurs ». Or le modèle mis en place en France a conduit - devant les
réticences des organisations de médecins -
à s’appuyer exclusivement sur
les pharmaciens, en les mobilisant par des incitations financières qui ont
aujourd’hui un coût exorbitant et conditionnent désormais la pérennité
d’une partie du réseau officinal. Les choix ainsi faits rendent plus difficile
l’évolution d’un dispositif aujourd’hui à bout de souffle.
III
-
Se do
ter d’une nouvelle stratégie de
développement des génériques
Un changement de stratégie des pouvoirs publics est d’autant plus
impératif que l’évolution mécanique du répertoire touche à son terme
:
l’impact de chutes de brevet d’ici 2017 devrait être nette
ment moins
important que celui constaté ces dernières années
325
. La politique des
génériques doit désormais s’exercer dans un cadre substantiellement
modifié pour engager la France dans une trajectoire vigoureuse de
rattrapage des pays voisins qui génèrera de nouvelles économies,
autoentretenues.
325. Sur la base des données de la CNAMTS et des éléments généralement retenus
pour le calcul des économies liées aux chutes de brevet, sur les années 2014 à 2016, le
rythme annuel est nettement moindre que sur les années précédentes, notamment les
années 2012 et 2013 qui avaient vu des économies à hauteur respectivement de plus
de 400
M€
et de 500
M€.
Les prévisions actuelles aboutissent à environ 100
M€
par
an de 2014 à 2016.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
281
A - Généraliser le recours aux génériques
1 -
Impliquer et responsabiliser les médecins
a)
Donner aux médecins le rôle central qu’ils auraient dû occuper
L’implication plus importante des médecins dans le dispositif de
diffusion des médicaments génériques est le principal levier qui permettra
de donner un second souffle au développement du marché des génériques,
car les marges de progression les plus importantes ne se situent plus du
côté de l’augmentation de la substitution ou
de la politique des prix.
Le médecin peut en effet avoir une influence décisive dans cette
politique, par exemple en contribuant à rassurer les patients sur la qualité
et l’efficacité de ces médicaments. C’est particulièrement vrai pour le
médecin général
iste qui est à l’origine en France de 75
% de la
prescription de médicaments
326
.
Cette implication renforcée est compatible avec le respect de leur
liberté de prescription. Ce principe fondamental, lié à l’indépendance
professionnelle et à la responsabilisat
ion des médecins, ne s’oppose pas à
une régulation plus importante de l’acte de prescription. La jurisprudence
européenne a ainsi confirmé que les autorités nationales chargées de la
santé publique pouvaient favoriser la prescription par les médecins de
médicaments génériques
327
. Le code de la sécurité sociale dispose en
outre que « les médecins sont tenus, dans tous leurs actes et prescriptions,
d’observer (…) la plus stricte économie compatible avec la qualité, la
sécurité et l’efficacité des soins
»
328
.
De ce point de vue, la généralisation à compter du 1
er
janvier 2015
de la prescription en dénomination commune internationale doit
constituer un objectif prioritaire. Tout nouveau report de cette obligation
légale serait préjudiciable à la réaffirmation nécessaire du rôle du
médecin dans la diffusion des génériques. Il importe à cet égard que la
certification des logiciels d’aide à la prescription soit fortement accélérée,
au regard des retards constatés, pour permettre aux médecins de
systématiser cette pratique et de ne plus faire référence au nom de marque
dans leurs ordonnances.
326. Commissariat général à la stratégie et à la prospective,
note d’analyse n°
9, mars
2014.
327.
Cour de justice de l’Union
européenne CJCE, 22 avril 2010,
Association of the
British Pharmaceutical Industry
, C-62/09.
328. Article L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale.
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282
b)
Les leviers de responsabilisation
Pour améliorer l’efficience des prescriptions des médecins, les
pouvoirs publics disposent de plusieurs leviers.
Souvent préconisées mais jamais mis
es en œuvre bien que
nécessaires, les mesures d’accompagnement visant à favoriser la diffusion
des génériques, telles que le renforcement de la formation en économie de
la santé et en pharmacologie, au cours du cursus initial et de la formation
continue, n
’auront des effets que sur le moyen ou long terme. Des actions
à portée plus immédiate sont nécessaires.
Une première approche constituerait dans un renforcement du
dispositif conventionnel actuel, en élargissant la rémunération à la
performance à un péri
mètre plus large, concernant d’autres classes
thérapeutiques et en fixant des objectifs plus significatifs. Elle resterait
cependant d’une efficacité aléatoire si la question des conséquences à
tirer du non-respect des objectifs définis en matière de prescription des
génériques n’était pas clairement posée. Une solidarité entre les différents
indicateurs qui composent la rémunération sur objectifs de santé publique
devrait être mise en œuvre, en appliquant des pénalisations, c’est
-à-dire
des modulations à la baisse de la rémunération en cas de non-atteinte des
objectifs liés à la diffusion des génériques. Le dispositif de rémunération
à la performance pourrait également être élargi dans les mêmes
conditions à des objectifs relatifs à la prescription en dénomination
commune, à laquelle les médecins devraient être très fortement incités.
Cependant,
cette
démarche
centrée
sur
une
politique
conventionnelle qui n’a produit que peu d’effets, risque de peiner à
assurer une dynamique réelle et auto-entretenue de développement des
génériques.
Une approche plus forte pourrait être de mettre en œuvre, à terme,
des mécanismes s’inspirant de ce que l’Allemagne a réalisé au début des
années 2000 avec un certain succès. Dans le cadre de l’information que
l’assurance maladie
fournit aux médecins sur leurs prescriptions, une
analyse systématique et périodique de celles concernant les médicaments
(répartition, coûts), ajustés en fonction des caractéristiques moyennes de
leur patientèle (moyenne d’âge, pathologies…) permettrait d
e déterminer
les économies potentielles liées à une optimisation des prescriptions
(prescription de médicaments dans des classes substituables, prescription
directe de génériques, limitation des mentions « non substituable »...) .
Un tel dispositif facilit
erait l’acquisition d’une vision d’ensemble de son
comportement de prescription par chaque médecin et inciterait à des
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
283
comparaisons utiles de pratiques entre pairs
329
ou par rapport à des
référentiels, prenant en compte les coûts et les potentiels d’économie
s.
Cette information rendrait plus aisée la mise en œuvre d’objectifs ciblés
de progression des prescriptions en génériques dont l’enjeu en termes de
maîtrise des dépenses d’assurance maladie est considérable, dans le cadre
d’une
rémunération
sur
objectifs
repensée
pour
être
plus
responsabilisante.
La CNAMTS a tenté d’évaluer les gains qui pourraient être liés à
une prescription plus importante de médicaments substituables, en se
fondant sur une analyse de neuf classes thérapeutiques disposant de
marges de progression pour une prescription plus importante de
génériques
330
et représentant en 2013 près de 70 % des remboursements
au titre des médicaments de « médecine générale
» sur lesquels l’offre de
générique se concentre à ce jour. Sur ces neuf classes, un t
ransfert d’un
point des prescriptions hors répertoire vers des produits génériques
induirait une économie voisine de 14
M€. Une extrapolation raisonnable
aux autres classes thérapeutiques conduit à une économie de 25
M€ par
point de prescription. Sachant que les médicaments substituables
représentent à ce jour 40 % des volumes dans le marché global, le gain
potentiel
procurée par
une
prescription
accrue
de
médicaments
substituables serait de 500
M€ si leur part était portée à 60
%. Une cible
plus ambitieuse de 85 % engendrerait une économie de 1,125
Md€.
2 -
Supprimer à terme le répertoire
La question du maintien du répertoire tel qu’il est actuellement
conçu est posée car cet outil s’avère historiquement daté et ses
actualisations par l’ANSM sont très lentes
331
.
329. Cette démarche est en cours actuellement en France au sein de quelques groupes
de travail « qualité » réunissant des médecins volontaires en Bretagne. En Suède, cette
confrontation des pratiques de prescription a abouti à une « liste de référence » en
matière de prescription qui est très suivie, avec un « taux de conformité » de près de
90 %.
330 . Une analyse p
ar classe thérapeutique permet d’évaluer l’impact d’une
prescription plus efficiente et de tenir compte de la substituabilité des molécules entre
elles.
Il s’agit dans le cas présent des traitements de l’hypertension artérielle, des
hypolipémiants, du traitement de l’asthme et de la BPCO, des anti
-douleurs, des
antidiabétiques oraux, des antibiotiques, des anti-ulcéreux, des antidépresseurs et de
l’urolog
ie.
331. Cette lenteur résulte en partie des délais de publication des décisions modifiant le
répertoire des groupes génériques.
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284
La suppression du répertoire pourrait permettre de traiter dans un
cadre global l’ensemble des médicaments non protégés par un brevet,
c’est
-à-dire près de 93 % du volume du marché des médicaments
remboursables et 55 % de sa valeur (en 2013 les médicaments
substituables représentent 45 % du volume et 35 % en valeur du marché
des médicaments remboursables). Il s’agirait ainsi d’inverser le principe
actuel qui limite a priori le champ des médicaments substituables en
élargissant les possibilités de substitu
tion potentiellement à l’ensemble de
ces médicaments, hormis ceux pour lesquels des précautions particulières
sont nécessaires pour des impératifs sanitaires.
Dans une première étape, le répertoire pourrait être rénové et élargi
à d’autres molécules. Il pourrait, ainsi que le recommande l’Agence
nationale de la sécurité du médicament, être remplacé par une « base de
données administratives et scientifiques »
332
qui listerait, dans des
conditions
de
procédure
assouplies,
les
médicaments
génériques
commercialisés et qui fournirait aux prescripteurs et aux dispensateurs
des indications et des recommandations pour guider l’acte de substitution.
Son périmètre devrait être élargi à certaines catégories de sprays, mais
aussi aux autres produits qui n’ont pas actuelle
ment de génériques,
notamment ceux qui ne le sont pas pour des raisons économiques
333
, afin
d’atteindre un périmètre des médicaments substituables équivalent à celui
des autres pays.
3 -
Informer les assurés sociaux
Ce changement de stratégie visant à développer le marché des
médicaments génériques n’a de chance de réussir que si le patient en
comprend les objectifs et la démarche et s’il a confiance dans le
médicament générique.
Il importe à cet égard d’engager des campagnes régulières de
communication institutionnelle qui ne soient pas ciblées sur des aspects
médico-économiques mais plutôt sur la qualité et la sécurité du
médicament générique. Ces actions de communications ne devraient ainsi
pas être menées par l’assurance maladie mais par des institutions
publ
iques, comme l’Institut national de prévention et d’éducation en
santé.
332. Article L. 161-40-1 du code de la sécurité sociale.
333.
Il s’agit m
édicaments de niche. La possibilité de permettre leur substitution à des
prix dérogatoires pourrait, selon le groupement des fabricants de génériques
(GEMME) représenter des économies d’un montant d’environ 200
M€.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
:
DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
285
Renforcer l’acceptation du générique suppose aussi d’étendre
rapidement les obligations de continuité de délivrance des mêmes
génériques par les pharmaciens à l’ensemble des assurés
et non seulement
pour les patients les plus âgé comme c’est le cas actuellement, afin que
les assurés ne soient plus confrontés à des changements qui peuvent
induire des doutes sur la continuité de traitement et entretenir de la
méfiance envers les génériques.
B - Partager équitablement les efforts
Le développement du marché des génériques permis grâce à une
plus grande responsabilisation des prescripteurs, la suppression du
répertoire et l’information renforcée des patients devrait conduire les
pouvoirs publics à faire partager les efforts équitablement entre tous les
acteurs, qu’ils s’agissent des pharmaciens par l’intermédiaire d’une
diminution des coûts de distribution ou des fabricants par l’intermédiaire
d’une baisse des prix.
1 -
Réduire la dépendance financière des officines aux génériques
Si le coût de la distribution des génériques est particulièrement
élevé en France en raison de l’importance des incitations accordées aux
pharmaciens, leur réduction, nécessaire ainsi que la Cour l’a déjà
recommandé
334
, ne saurait être que progressive, sauf à risquer de
fragiliser de nombreuses officines et
de remettre en cause l’implication
d’une profession qui a jusqu’à présent été le principal artisan de la
diffusion des génériques, avec des incidences sur le taux de substitution.
Les discussions en cours entre l’assurance maladie et les syndicats
de pharmaciens sur l’évolution de la structure de la rémunération des
pharmaciens offrent l’opportunité d’examiner la manière dont une
réduction programmée dans le temps des marges de distribution sur les
génériques pourrait notamment permettre des redéploiements à même de
financer de nouveaux modes de rémunération des officines, moins
dépendants, notamment du volume de médicaments dispensés et
davantage tournés vers des rémunérations forfaitaires. Dans une pareille
démarche, il pourrait notamment être utile de s’interroger sur le
maintien
de l’actuelle rémunération à la performance liée à la vente de
génériques, qui se surajoute aux autres incitations financières.
334. Cf.
Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour
2008,
Chapitre VI
: les pharmacies d’officine et leurs titulaires libéraux, septembre
2008, p. 195-221, disponible sur
www.ccomptes.fr
.
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286
2 -
Rénover la politique de fixation des prix
a)
Renforcer la cohérence de la politique de prix
Deux mesures pourraient renforcer la cohérence de la politique des
prix des médicaments génériques.
Les enjeux principaux du mode de fixation des prix portent
désormais sur les médicaments déjà substituables et moins sur le flux des
nouveaux médicaments génériqués dans un contexte de faible chute de
brevets. En effet, l’augmentation de dix points de la décote sur le flux de
nouveaux médicaments génériques (passage de 60 % à 70 %) ne
repré
senterait qu’un impact financier assez faible, de l’ordre d’une
dizaine de millions d’euros. En revanche, il convient de répercuter
l’augmentation des baisses et décotes de prix intervenues sur les
médicaments déjà existants et sur les quelques classes thérapeutiques les
plus utilisées. Les économies qui pourraient en résulter pour l’assurance
maladie peuvent être évaluées en année pleine à près de 400
M€
335
.
Le prix des nouveaux médicaments n’apportant pas d’amélioration
de service médical rendu devrait par ailleurs être immédiatement aligné
sur celui des médicaments analogues lorsqu’il fait l’objet de décotes.
b)
Permettre la conclusion d’accords prix/volume
À terme, le développement de la diffusion des génériques
permettrait d’engager des baisses de prix coh
érentes et généralisées,
portant sur l’ensemble des médicaments substituables.
Pour cela, des accords prix/volume pourraient être conclus avec les
fabricants de génériques car l’augmentation des volumes vendus devrait
permettre de rendre supportables, à termes, des baisses de prix plus fortes,
une fois atteint un certain développement du marché, à l’instar de ce qui a
été pratiqué en Allemagne.
c)
Identifier les baisses possibles de prix par la transparence sur les
négociations commerciales
Un nouveau dispositif a été mis en place dans la loi de financement
de la sécurité sociale pour 2014. Les remises légales accordées aux
pharmaciens pourront s’élever désormais à 40
% du prix fabricant hors
335. CNAMTS,
Propositions de l’assurance maladie sur les charges et produits pour
l’année 2013
, p. 99.
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DES RÉSULTATS TROP
MODESTES
,
DES COÛTS ÉLEVÉS
287
taxes. Leur déclaration par les laboratoires au CEPS
336
est parallèlement
rendue obligatoire dans un souci de transparence. La connaissance des
remises consenties par les fabricants aux pharmaciens est également
supposée permettre de réviser rapidement les prix à la baisse, à l’image de
la pratique britannique.
La mise en
œuvre concrète de cette réforme suppose toutefois que
les laboratoires producteurs de génériques ne réduisent pas tout ou partie
des remises consenties aux pharmaciens d’officine pour maintenir le
niveau de leur prix et que le CEPS soit doté de moyens d’an
alyse et de
contrôle plus conséquents que ceux dont il dispose actuellement.
*
*
*
L’ampleur des économies à attendre de cette nouvelle stratégie,
mobilisant l’ensemble des acteurs est considérable à l’aune des résultats
atteints par certains de nos voisins européens
Le principal levier en est la progression de la prescription de
médicaments substituables par les médecins. L’analyse menée par la
CNAMTS montre qu’à l’échelle de quelques années, le montant de la
dépense remboursée pourrait diminuer de 1,125
Md€ par an. Ces
économies pourraient être majorées d’une part si le répertoire est
supprimé, car alors le champ des médicaments génériques sera
notablement élargi et
d’autre part dans l’hypothèse où le taux de
substitution augmenterait de 80 % à 90 %, niveau déjà atteint dans
certains départements.
Au total, dans le cadre d’une politique ainsi redéfinie et conduite
méthodiquement et vigoureusement, les économies liées à une forte
progression de la prescription des médicaments substituables, à un
élargissement de leur champ, à une augmentation du taux de substitution,
à la réallocation au bénéfice de l’assurance maladie d’une partie de la
rémunération du circuit de distribution peuvent être estimées à environ
2
Md€ en année pleine.
336. Article L. 189-1 du code de la sécurité sociale.
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288
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
____________
La diffusion des médicaments génériques est un levier très puissant
de maîtrise de la dépense d’assurance maladie à qualité de soins
strictement équivalente. Alors que la plupart des grands pays européens
affichent des taux de pénétration des génériques en volume très élevés, la
France a des résultats encore médiocres.
Loin de rattraper son retard, elle s’est ainsi fait dépasser au cours
des dix dernières années par des pays voisins partis de plus bas.
La progression poussive de la diffusion des génériques, malgré la
multiplication de mesures financières incitatives, a empêché notre pays de
réaliser des économies bien plus considérables que celles obtenues, au
montant au demeurant incertain.
Contrairement à d’autres, la France n’a pas mobilisé l’ensemble des
acteurs, notamment les prescripteurs et a mis en place un dispositif
uniquement incitatif reposant principalement sur la substitution par le
pharmacien dans un périmètre, le répertoire des classes thérapeutiques, de
sur
croît limité. Ce dispositif se révèle aujourd’hui d’une efficacité limitée
et extrêmement coûteux puisque pour deux euros d’économies potentielles,
un euro va en rémunération supplémentaire des pharmaciens.
Ce modèle peu efficace apparaît à bout de souffle. Il est temps ainsi
désormais de changer de stratégie et de privilégier, à l’instar de nos
voisins européens, une approche plus vigoureuse et plus volontariste
envers l’ensemble des acteurs, pour donner une nouvelle ampleur aux
économies et rejoindre enfin le niveau de pénétration des génériques
constaté chez eux.
Cette nouvelle approche suppose de mobiliser désormais tous les
leviers disponibles.
Il convient ainsi, d’abord, de supprimer
à terme le répertoire afin
d’élargir significativement le périmètre
des médicaments substituables. Il
importe surtout de mettre enfin au cœur du dispositif les prescripteurs, qui
doivent être plus fortement responsabilisés à leurs modalités de
prescription au regard en particulier des enjeux que représentent les
médicament
s génériques en termes d’économies pour l’assurance maladie.
Ce recentrage doit permettre de redéfinir les modalités de rémunération
des pharmaciens de telle manière que le circuit de distribution ne capte pas
une part toujours accrue de ces dernières. Enfin, il convient de
communiquer envers les assurés sociaux dont la bonne information
représente une condition déterminante pour le succès des actions à
engager.
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A DIFFUSION DES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES
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DES RÉSULTATS TROP
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,
DES COÛTS ÉLEVÉS
289
La Cour formule les recommandations suivantes :
38.
responsabiliser les médecins en les informant sur le volume et le
coût de leur prescription en fonction des caractéristiques de leur
patientèle et sur les économies rendues possibles par une évolution de
leurs comportements de prescription ;
39.
élargir les objectifs de prescriptions en génériques liées à la
rémunération sur objectifs de performance, les compléter par des
objectifs
de
taux
de
prescription
en
dénomination
commune
internationale et moduler à la baisse le montant de cette rémunération en
cas de non-atteinte de ces objectifs ;
40.
Supprimer à terme le répertoire des médicaments génériques ;
41.
redéfinir les modalités de rémunération des pharmaciens en
révisant progressivement à la baisse les incitations en faveur des
génériques et en allant vers une rémunération davantage forfaitaire et
moins dépendante du volume des ventes; dans ce cadre, réformer
notamment la rémunération sur objectifs de santé publique liée aux
génériques;
42.
conclure des accords prix-volume avec les producteurs de
génériques dans le cadre d’un plan de développement de ces
médicaments ;
43.
mettre en œuvre des baisses des prix ciblées sur les classes
thérapeutiques les plus coûteuses pour l’assurance maladie et un
alignement automatique de prix pour les médicaments sans amélioration
du service médical rendu ;
44.
développer des campagnes
régulières d’information des assurés
sociaux sur les médicaments génériques.
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