La politique
de développement
des énergies
renouvelables
Rapport public thématique
Cour des comptes
La politique de développement des énergies renouvelables – juillet 2013
13 rue Cambon 75100 PARIS CEDEX 01 - tel : 01 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr
Sommaire
DÉLIBÉRÉ
.........................................................................................
9
INTRODUCTION
...........................................................................
11
CHAPITRE I - LES ÉNERGIES RENOUVELABLES
PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS FIXÉS
...........................................................................................................
15
III
- La place des énergies renouvelables dans le contexte énergétique
français
....................................................................................................
16
A - Présentation générale
.........................................................................
16
B - La chaleur renouvelable
......................................................................
19
C - L’électricité renouvelable
....................................................................
22
IV
- Des objectifs ambitieux
.....................................................................
26
A - Un engagement fort de l’Union européenne
.....................................
26
B - La France est un des pays européens les plus actifs
...........................
28
V
- Des résultats tangibles mais insuffisants à terme
...............................
32
A - La France est encore bien placée
........................................................
32
B - Des objectifs encore éloignés
.............................................................
35
CHAPITRE II - UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
.......
39
I
- Des coûts de production élevés
...........................................................
39
A - La méthodologie de calcul des coûts
..................................................
40
B - Des coûts de production très disparates
............................................
41
II
- Un système de soutien complexe et d’efficacité variable
...................
44
A - Les dispositifs de soutien communs à l’électricité et à la chaleur
......
44
B - Le dispositif de soutien à la production d’électricité renouvelable
....
50
C - Les dispositifs de soutien à la production de chaleur renouvelable ... 53
III
- Un cadre juridique instable et contesté
.............................................
55
A - Des réglementations parfois excessives
.............................................
56
B - Des réglementations instables
............................................................
60
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4
COUR DES COMPTES
C - Un contentieux abondant
...................................................................
61
IV
- Une organisation des pouvoirs publics
inadaptée
............................
62
A - Des compétences à préciser entre la DGEC et la CRE
.........................
63
B - Une expertise insuffisante
..................................................................
63
C - Des défaillances dans la prise de décision
..........................................
66
D - Un manque de contrôle
......................................................................
69
E - Un rôle mal défini pour les collectivités locales
..................................
71
V
- De fortes contraintes physiques
.........................................................
73
A - Un réseau à adapter
...........................................................................
73
B - Une intermittence à gérer
..................................................................
74
C - Un
potentiel parfois limité
.................................................................
81
CHAPITRE III - LE BESOIN DE CHOIX DE LONG TERME
SOUTENABLES
..............................................................................
85
I
- Les coûts financiers pour la collectivité
................................................
86
A - Le coût des mesures de soutien
..........................................................
86
B - Le coût de l’intégration aux réseaux électriques
................................
96
C - La France est cependant en meilleure position que ses partenaires
européens
................................................................................................
98
II
- Les impacts socio-économiques
..........................................................
99
A - La déstabilisation du marché électrique
.............................................
99
B - Des filières industrielles encore fragiles
...........................................
100
C - Un impact encore modeste sur l’emploi
...........................................
104
III
- Les conditions de la cohérence
........................................................
106
A - Tenir compte des impacts environnementaux
.................................
107
B - Renforcer le rôle du marché de l’électricité
.....................................
110
C - Adapter les réseaux et la consommation
..........................................
111
IV
- Des arbitrages nécessaires
..............................................................
114
A - Arbitrer entre les filières
...................................................................
114
B - Adapter les dispositifs de soutien
.....................................................
118
C - Arbitrer entre des impératifs d’intérêt général contradictoires
.......
119
D - Mieux intégrer les enjeux économiques
...........................................
119
E - Investir dans la recherche
.................................................................
120
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SOMMAIRE
5
CONCLUSION GÉNÉRALE
........................................................
125
RÉCAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
...................
129
ANNEXES
.....................................................................................
131
Annexe n° 1 : table des sigles
.................................................................
132
Annexe n° 2 : liste des personnalités auditionnées
................................
135
Annexe n° 3 : liste des experts composant le comité d’appui
...............
139
Annexe n° 4 : vocabulaire de l’énergie - national et européen
..............
140
Annexe n° 5 : glossaire « énergies renouvelables»
................................
144
Annexe n° 6 : les différentes filières
.......................................................
148
Annexe n° 7 : liste des dispositifs incitatifs pour le développement des
énergies renouvelables dans la production d’électricité et de chaleur . 167
Annexe n° 8 : les méthodes de calcul des coûts de production
.............
171
Annexe n° 9 : coûts de production des énergies renouvelables
............
174
Annexe n° 10 : les dépenses de recherche et développement par filières
................................................................................................................
178
Annexe n° 11 : coût public d’abattement des productions d’électricité
renouvelable et valeur tutélaire du carbone
.........................................
180
Annexe n° 13 : les certificats verts et les primes additionnelles aux tarifs,
les exemples anglais et espagnol
...........................................................
184
Annexe n° 14 : les énergies renouvelables dans plusieurs pays de l’Union
européenne
............................................................................................
186
RÉPONSES DES
ADMINISTRATIONS ET DES
ORGANISMES CONCERNÉS
....................................................
199
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Les rapports publics de la Cour des comptes
- élaboration et publication -
La Cour publie, chaque année, un rapport public annuel et des
rapports publics thématiques.
Le présent rapport est un rapport public thématique.
Les rapports publics de la Cour s’appuient sur les contrôles et les
enquêtes conduits par la Cour des comptes ou les chambres régionales des
comptes et, pour certains, conjointement entre la Cour et les chambres
régionales ou entre les chambres. En tant que de besoin, il est fait appel au
concours d’experts extérieurs, et des consultations et des auditions sont
organisées pour bénéficier d’éclairages larges et variés.
Au sein de la Cour, ces travaux et leurs suites, notamment la
préparation des projets de texte destinés à un rapport public, sont réalisés par
l’une des sept chambres que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour des comptes, ainsi que des chambres régionales des comptes, et
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L
’indépendance
institutionnelle
des
juridictions
financières
et
statutaire de leurs membres garantit que les contrôles effectués et les
conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique
que
toutes
les
constatations
et
appréciations ressortant d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ;
elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La publication d’un rapport public est nécessairement précédée par la
communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la Cour.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication.
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COUR DES COMPTES
Tout contrôle ou enquête est confié à un ou plusieurs rapporteurs.
Leur rapport d’instruction, comme leurs projets ultérieurs d’observations et
de recommandations, provisoires et définitives, sont examinés et délibérés de
façon collégiale, par une chambre ou une autre formation comprenant au
moins trois magistrats, dont l’un assure le rôle de contre-rapporteur, chargé
notamment de veiller à la qualité des contrôles. Il en va de même pour les
projets de rapport public.
Le contenu des projets de rapport public est défini, et leur élaboration
est suivie, par le comité du rapport public et des programmes, constitué du
premier président, du procureur général et des présidents de chambre de la
Cour, dont l’un exerce la fonction de rapporteur général.
Enfin, les projets de rapport public sont soumis, pour adoption, à la
chambre du conseil où siègent en formation plénière ou ordinaire, sous la
présidence du premier président et en présence du procureur général, les
présidents de chambre de la Cour, les conseillers maîtres et les conseillers
maîtres en service extraordinaire.
Ne prennent pas part aux délibérations des formations collégiales,
quelles qu’elles soient, les magistrats tenus de s’abstenir en raison des
fonctions qu’ils exercent ou ont exercées, ou pour tout autre motif
déontologique.
*
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour des comptes et des chambres régionales et
territoriales des comptes :
www.ccomptes.fr
. Ils sont diffusés par
La
documentation Française
.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil réunie en
formation ordinaire, a adopté le présent rapport intitulé
La politique de
développement des énergies renouvelables
.
Le rapport a été arrêté au vu du projet communiqué au préalable
aux administrations et aux organismes concernés et des réponses
adressées en retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent la
seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont
participé
au
délibéré :
M. Migaud,
Premier
président,
MM.
Bayle, Bertrand, Mme
Froment-Meurice, MM. Durrleman, Lévy,
Lefas, Briet, Mme
Ratte,
présidents de chambre,
MM.
Babusiaux,
Descheemaeker, Hespel, présidents de chambre maintenus en activité,
MM. Devaux, Ganser, Cazala, Braunstein, Mmes Saliou (Françoise),
Darragon, MM. Bonin, Vachia, Vivet, Ténier, Mme Froment-Védrine,
MM. Ravier, Sépulchre, Mmes Malgorn, Vergnet,
Latare, Pittet,
MM. Cahuzac, Dors, Ortiz, Cotis, conseillers maîtres.
Ont été entendus :
-
en sa présentation, M. Levy, président de la chambre chargée des
travaux sur lesquels le rapport est fondé et de la préparation du
projet de rapport ;
-
en son rapport, M. Bertrand
,
rapporteur du projet devant la
chambre du conseil, assisté de MM. Babeau et Tronco, conseillers
référendaires, rapporteurs devant la chambre chargée de le
préparer, et de M. Paul, conseiller maître, contre-rapporteur devant
cette même chambre ;
-
en ses conclusions, sans avoir pris part au délibéré, M. Johanet,
Procureur général.
***
M. Gérard Terrien, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 23 juillet 2013.
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10
COUR DES COMPTES
Le projet de rapport soumis à la chambre du conseil a été préparé,
puis délibéré le 13 mars 2013, par la deuxième chambre, présidée par
M. Levy, président de chambre, et composée de MM. Descheemaeker,
président de chambre, Devaux, de Gaulle, Vialla, Mousson, Monteils,
Colcombet, conseillers maîtres, et Gros, conseiller maître en service
extraordinaire,
ainsi que, en tant que rapporteurs, MM. Babeau, Tronco,
conseillers référendaires, et Lafon, rapporteur extérieur, et, en tant que
contre-rapporteur, M. Paul, conseiller maître.
Ont contribué aux travaux en tant que rapporteurs des différentes
enquêtes sur lesquelles la synthèse s’est appuyée, Mme Pappalardo,
MM. Cossin, de Gaulle, Vialla, conseillers maîtres, Fourrier, Imbert,
conseillers référendaires, Picard, auditeur, Mme Baille,
MM. Jannin,
Lafon, Pinon et Mme Puig, rapporteurs extérieurs
Le projet de rapport a été examiné et approuvé, le 4 juin 2013, par
le comité du rapport public et des programmes de la Cour des comptes,
composé de MM. Migaud, Premier président, Bayle, Bertrand, rapporteur
général du comité, Mme Froment-Meurice, MM. Durrleman, Levy,
Lefas, Briet et Mme Ratte, présidents de chambre, et M. Johanet,
procureur général, entendu en ses avis.
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Introduction
I
-
Objet du rapport
Le marché de l’énergie connaît depuis deux ans des évolutions
profondes :
l’irruption
des
hydrocarbures
non
conventionnels,
l’aggravation de la crise économique et l’accident de Fukushima
bouleversent la donne. La politique énergétique française se situe donc en
pleine transition. Historiquement dotée
d’une énergie moins carbonée et
d’une électricité moins chère que la plupart des autres grandes puissances
industrielles, notamment en raison de son parc nucléaire, la France s’est
fixé dès la fin des années 90 l’objectif de réduire ses émissions de gaz à
effet de serre et d’augmenter la part d’énergie renouvelable.
Elle a fait le choix d’objectifs plus ambitieux que la grande
majorité des pays européens et a engagé une politique volontariste. Sa
mise en oeuvre a conduit à augmenter la part des énergies renouvelables
dans le
mix
ou « bouquet » énergétique français à un niveau qui reste
encore, à ce jour, limité par rapport à l’ensemble des énergies
consommées en France. En 2011, sur une consommation totale d’énergie
primaire de 266,4 Mtep
1
, la consommation d’énergies renouvelables n’en
représentait en effet que 7,4 %. S’agissant plus spécifiquement de
l’électricité, sur une production totale de 543 TWh, les sources
renouvelables en ont représenté 13 %, soit 70,4 TWh
2
.
Le contexte dans lequel cette politique intervient a cependant
changé. Les contraintes sur les finances publiques se sont alourdies, la
volonté des grandes puissances de lutter contre le changement climatique
s’émousse. Enfin, la baisse annoncée de la part du nucléaire dans la
production d’électricité de 78,5 % en 2011 à 50 % en 2025 implique
logiquement plus d’efficacité énergétique et un surcroît d’énergies
renouvelables.
L’enquête menée par la Cour sur la politique de développement
des énergies renouvelables s’inscrit dans ce cadre. La Cour a entrepris
une série de contrôles qui ont notamment abouti, en 2012, à la publication
de deux rapports thématiques relatifs, d’une part, à « la politique d’aide
aux biocarburants » qui constituent une des formes d’utilisation d’une
énergie renouvelable, la biomasse et, d’autre part, aux coûts de la filière
électronucléaire. Elle a également, en 2012, contribué à l’information de
1
Millions de tonnes équivalent pétrole (voir glossaire, annexe n° 5).
2
Production nette d’électricité-Bilan électrique 2012 de RTE.
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12
COUR DES COMPTES
la commission d’enquête du Sénat sur le coût réel de l’électricité en
actualisant les propres travaux de la Cour relatifs à la contribution au
service public de l’électricité (CSPE).
Le présent rapport intervient au moment où vient de s’achever le
débat sur la transition énergétique qu’avait lancé le Gouvernement et où
va être préparé un projet de loi sur ce sujet. La Cour a souhaité, dans les
domaines de sa compétence, apporter sa contribution en mettant en
évidence que les objectifs de la France pour 2020 en matière d’énergies
renouvelables seront difficiles à atteindre (chapitre I) et en identifiant les
difficultés rencontrées (chapitre II). Elle en déduit des propositions
d’ajustements et d’arbitrage (chapitre III).
II
-
Présentation des énergies renouvelables
A - Les filières
Aux termes de la directive européenne de 2009, les énergies
renouvelables
sont
produites
à
partir
de
sources
non
fossiles
renouvelables. Elles peuvent servir à la production d’électricité et/ou de
chaleur
(biomasse,
biogaz,
pompes
à
chaleur
aérothermique
et
géothermique, énergies solaire et géothermique) ou seulement à la
production
d’électricité
(énergies
éolienne,
hydraulique,
marémotrice/houlomotrice
3
).
En 2011, la production de chaleur représentait 59,4 % de la
production totale d’énergie renouvelable
4
en France devant la production
d’électricité (40,6 %). Ces proportions ne devraient pas évoluer de façon
significative à l’horizon 2020. En revanche, pour la totalité des énergies
renouvelables (électricité + chaleur), la part de l’éolien passerait de 6,2 %
à 15,2 % entre 2011 et 2020 et celle de l’hydroélectricité baisserait de
30,2 % à 16,9 %.
B - Les acteurs
La politique publique en faveur des énergies renouvelables relève,
à titre principal, du ministre chargé de l’énergie, mais aussi des ministres
chargés de l’économie, du redressement productif et de la recherche.
L’administration principalement concernée est la direction générale de
l’énergie et du climat (DGEC), placée sous l’autorité du ministre chargé
3
Leurs principales caractéristiques sont précisées en annexe n° 6.
4
Hors biocarburants.
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INTRODUCTION
13
de l’énergie.
De nombreux volets de cette politique dépendent aussi
d’opérateurs publics particulièrement impliqués. Ainsi, l’Agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) soutient
directement les investissements et la recherche dans des installations de
production de chaleur renouvelable. La Commission de régulation de
l’énergie intervient dans les procédures de soutien et le Commissariat
général au développement durable réalise, avec son service de
l’observation et des statistiques (SOeS), la mesure des capacités et des
productions d’énergies renouvelables.
S’agissant des acteurs industriels, hormis l’électricité hydraulique,
pour laquelle EDF et GDF-Suez exploitent plus de 90 % de la puissance
installée, les producteurs d’électricité ou de chaleur à base d’énergies
renouvelables sont des sociétés de droit privé de toutes tailles mais aussi
de
simples
particuliers,
propriétaires
d’installations
individuelles,
notamment photovoltaïques. Il en résulte un paysage fragmenté,
particulièrement diversifié et pas toujours structuré. Pour la seule région
Haute-Normandie, par exemple, pas moins de cinquante-neuf sociétés de
droit privé exploitent les parcs éoliens existants.
Enfin, les programmes publics de recherche sont, pour l’essentiel,
portés par des opérateurs publics, auxquels des acteurs privés peuvent
s’associer. Le premier groupe d’opérateurs est composé d’OSEO et des
agences qui distribuent des subventions ou aides diverses, l’Agence
nationale de la recherche (ANR), l’Agence de l'environnement et de la
maîtrise de l'énergie (ADEME). Le second groupe est composé
d’établissements publics dont l’activité de recherche est entièrement
consacrée à l’énergie, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies
alternatives (CEA), Institut français du pétrole – énergies nouvelles
(IFPEN), Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs
(ANDRA), ou en partie (Centre national de la recherche scientifique
(CNRS), Institut national de recherche en sciences et technologies pour
l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), Institut français de recherche
pour l’exploitation de la mer (IFREMER), Institut national de la
recherche agronomique (INRA), Institut français des sciences et
technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR),
bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et Centre
scientifique et technique du bâtiment (CSTB).
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14
COUR DES COMPTES
Précisions méthodologiques
L’enquête porte uniquement sur le soutien aux énergies renouvelables
et exclut les mesures en faveur de l’efficacité énergétique et des économies
d’énergie ainsi que l’aide aux biocarburants qui a fait l’objet d’un rapport
public thématique de la Cour en 2012. Compte tenu de la diversité des sujets
à traiter, le rapport constitue une synthèse d’une série de contrôles que la
Cour a menés en 2012 auprès des principaux acteurs publics concernés.
La référence officielle de mesure des objectifs français dans le cadre
européen est la part des sources d’énergies renouvelables dans la
« consommation finale brute » d’énergie. Il serait toutefois plus juste de
parler de production en raison de la méthodologie retenue officiellement
5
.
Afin de faciliter la lecture du rapport, l’expression « production » sera
retenue en lieu et place de « consommation finale brute » d’électricité et/ou
de chaleur renouvelables et la « part des énergies renouvelables dans la
consommation finale brute totale d’énergie » sera désignée par l’expression
« proportion des énergies renouvelables ».
Un comité d’appui, composé d’experts dont la liste figure en annexe
3, a été constitué afin d’éclairer, sur le plan technique, les travaux de la Cour.
Sur un certain nombre de points, en raison de leur complexité, des
précisions méthodologiques ou techniques sont données en annexes. Elles
approfondissent notamment les développements concernant les différentes
filières, la méthodologie de calcul des coûts et les éléments de comparaison
internationale.
5
La description détaillée des notions et conventions retenues est présentée en
annexe n° 4. Et d’ailleurs, le plan d’action nationale retient le terme « production
brute d’électricité » pour évoquer la consommation finale brute d’électricité.
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Chapitre I
Les énergies renouvelables progressent
sans atteindre les objectifs fixés
L’intérêt de la France pour le développement des énergies
renouvelables n’est pas nouveau.
Certaines initiatives ont été prises dans
les années 1960, comme par exemple, les réalisations de l’usine
marémotrice de La Rance et du four solaire d’Odeillo. Les chocs
pétroliers de 1973 et 1979 ont poussé à la définition d’une politique plus
globale, notamment dans les domaines de l’énergie solaire et de la
géothermie, avec la création du comité de géothermie en 1974, du
Commissariat à l’énergie solaire (COMES) en 1978
6
et de la mission
nationale pour la valorisation de la chaleur. Dans ce contexte, plusieurs
études de faisabilité, de programmes de recherche et de construction
d’installations expérimentales ont été conduites.
C’est en 2005 qu’une véritable politique a été mise en place dans le
cadre d’engagements internationaux et européens forts en matière de
réduction des gaz à effet de serre. Cette politique a permis aux énergies
renouvelables de s’intégrer dans le
mix
énergétique français, à un niveau
qui reste cependant limité aujourd’hui. À moyen terme, leur place
6
Établissement public industriel et commercial doté d’un conseil scientifique, le
COMES était chargé de la conception, animation et coordination de l’ensemble des
initiatives concernant l’énergie solaire, dans tous les domaines (recherche,
développement, industrialisation en particulier). En 1982, le COMES a fusionné avec
l’agence pour les économies d’énergie, le comité géothermie et la mission nationale
pour la valorisation de la chaleur, pour finalement devenir l’ADEME en 1992.
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16
COUR DES COMPTES
pourrait être plus importante si les objectifs fixés par la France sont
atteints, mais ces derniers paraissent, aujourd’hui, encore éloignés.
III
-
La place des énergies renouvelables dans le
contexte énergétique français
A - Présentation générale
La consommation française d’énergie est caractérisée depuis les
années 1970 par la prédominance de l’électricité nucléaire et du pétrole
comme le montre le tableau suivant.
Tableau n° 1 :
consommation primaire d’énergies en France en 2011
par filières
Filières
Mtep
%
Énergies
fossiles et
nucléaires
Charbon
9,8
3,7 %
Pétrole
82,6
31,0 %
Gaz naturel
40
15,0 %
Electricité non renouvelable (essentiellement nucléaire)
111,7
41,9 %
Déchets non renouvelables
1,3
0,5 %
Sous total énergies fossiles et nucléaires
245,4
92,1 %
Énergies
renouvelables
Energie hydraulique
3,92
1,5 %
Bois énergie
8,87
3,3 %
Pompes à chaleur
1,30
0,5 %
Energie éolienne
1,05
0,4 %
Energie solaire thermique et photovoltaïque
0,23
0,1 %
Géothermie
0,09
0,03 %
Biogaz
0,35
0,1 %
Biocarburants
2,05
0,8 %
(Import-Export biocarburants)
0,37
0,1 %
Déchets urbains renouvelables
1,25
0,5 %
Résidus agricoles
0,35
0,1 %
Corrections climatiques
1,18
0,4 %
Sous total énergies renouvelables
21,01
7,9%
Total
266,41
Source : Cour des comptes- Données Commissariat général au développement durable / Service
de l’observation et des statistiques (CGDD/SOeS)- « Chiffres clés de l’énergie- Edition 2013 »
Les filières d’énergies renouvelables arrivent loin derrière ces
sources d’énergie puisqu’elles ne représentaient, en 2011, que 7,9 % de la
consommation d’énergie primaire en France, alors que les seules énergies
fossiles en représentaient 49,7 % et l’électricité nucléaire environ 42 %.
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
17
Ainsi, malgré le bois consommé à des fins énergétiques et l’électricité
hydraulique, dont les parts ne sont pas négligeables au sein des filières
renouvelables, ces dernières sont encore marginales.
Par ailleurs, la consommation française se caractérise aussi, pour
sa part électrique, par un faible taux d’émission de CO
2
.
En effet, les
productions nucléaire et hydraulique, peu émettrices, sont depuis
longtemps très largement majoritaires en France
7
qui dispose ainsi
historiquement d’une énergie électrique peu carbonée
8
.
Tableau n° 2 :
production nette d’électricité en France en 2011 et
2012 par filières
Source : RTE-Bilan électrique 2012
Cette spécificité permet à la France de se classer parmi les pays
industrialisés les moins émetteurs en gaz à effet de serre (GES), tant en
termes d’émissions par habitant que d’émissions par unité de PIB.
Au niveau mondial, la France représente 1,1 % des émissions de
gaz à effet de serre (GES), alors qu’elle contribue pour 5,5 % au PIB
mondial
9
.
En ce qui concerne les seules émissions de CO
2
, principal gaz à
effet de serre, la France se situe dans les pays les moins émetteurs en
Europe, en-dessous de la moyenne.
7
Sur les dix dernières années, les centrales recourant à ces sources d’énergie
produisent respectivement environ 78 % et 12 % de l’électricité française.
8
En 2012, la part de la production d’électricité à partir de sources fossiles n’est que de
8,8 %. En 2010, cette proportion était de 10 % pour la France et de 51,5 % pour
l’Union européenne des 27 (26 % pour le charbon et 22,9 % pour le gaz). À titre
d’illustration, une centrale à charbon produit jusqu’à 500 fois plus de CO
2
qu’une
centrale nucléaire.
9
Source : Enerdata, 2011, cité dans le rapport « énergies 2050 ».
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18
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Graphique n° 1
:
émissions de CO
2
par habitant en Europe
(kg CO
2
/habitant)
Source : EU Energy in figures, 2012
Dans ce cadre, les sources d’énergies renouvelables confortent
l’avantage du
mix
électrique français en termes d’émissions de CO
2
, dont,
par ailleurs, l’autre grand avantage est un prix de l’électricité modéré
pour les consommateurs.
Graphique n° 2 : prix de l’électricité pour les ménages
en €TTC/MWH dans différents pays européens
Source : EU Energy in figures, 2012
0
5000
10000
15000
1995
2000
2005
2008
2009
0
50
100
150
200
250
300
350
2007
2008
2009
2010
2011
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FIXES
19
Graphique n° 3 : prix de l’électricité pour les industriels
en €TTC/MWH dans différents pays européens
Source : EU Energy in figures, 2012
Le dispositif français actuel procure ainsi aux consommateurs et
aux industriels une électricité dont le prix est inférieur à la moyenne de
l’Europe des vingt-huit,
et qui place la France au premier rang par
rapport à ses voisins immédiats.
B - La chaleur renouvelable
Longtemps moins encouragée que l’électricité au niveau européen
et français, la production de chaleur constitue néanmoins le premier usage
des ressources renouvelables, devant l’électricité. Elle est essentiellement
le résultat de l’exploitation de la biomasse, loin devant les autres sources.
0
50
100
150
200
250
2007
2008
2009
2010
2011
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20
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Graphique n° 4 : évolution de la production de chaleur renouvelable
de 2005 à 2011
Source : Cour des comptes- Données Commissariat général au développement durable / Service
de l’observation et des statistiques (CGDD/SOeS)
L’évolution de la production de chaleur depuis 2005 n’est pas
linéaire. En effet, d’une part, contrairement aux données relatives à
l’éolien ou à l’hydraulique qui sont normalisées
10
, la production à base de
biomasse n’est pas corrigée du climat. Or, lors d’hivers rigoureux comme
en 2010, la production de chaleur augmente naturellement, sans pour
autant marquer un développement pérenne de cette source d’énergie
renouvelable. D’autre part, l’estimation du volume de bois réellement
brûlé est
approximative.
1 -
La biomasse
La biomasse reste la ressource la plus utilisée pour la production
de chaleur renouvelable (87,4 %
11
), très loin devant l’énergie solaire
thermique, la géothermie et les pompes à chaleur, ou encore le biogaz
dont la production reste symbolique.
10
Selon le vocabulaire officiel retenu, « normaliser » signifie « lisser dans le temps »
selon des modalités précisées en annexe n° 4.
11
Sur une production totale de chaleur de 10,6 Mtep en 2011.
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21
Graphique n° 5 : évolution de la production de chaleur à partir de la
biomasse depuis 2005 jusqu’en 2011
Source : Cour des comptes- Données Commissariat général au développement durable / service
de l’observation et des statistiques (CGDD –SOeS)
Le bois-énergie est la principale source de la biomasse pour la
production de chaleur (8,2 Mtep) et, dans cette catégorie, celui brûlé par
les particuliers arrive largement en tête avec 6,1 Mtep en 2011.
2 -
Les pompes à chaleur aérothermiques
Les pompes à chaleur aérothermiques, installations essentiellement
domestiques, qui participent à l’amélioration de l’efficacité énergétique
des bâtiments, arrivent au deuxième rang pour la production de chaleur,
avec 0,9 Mtep en 2011 et représentent 8,6 % de celle-ci.
3 -
La géothermie
La production géothermique représentait, en 2011, 3 % de la
production de chaleur renouvelable, loin derrière les autres sources. En
effet, seulement 0,32 Mtep ont été produits en recourant essentiellement à
des pompes à chaleur pour l’exploitation de la très basse énergie
12
. Le
12
Les pompes à chaleur géothermiques représentent avec 0,23 Mtep, 71,8 % de la
production de chaleur géothermique en 2011. On peut estimer à 5 % le nombre de
résidences individuelles neuves équipées de pompes à chaleur géothermiques et à
moins de 1 % celui des immeubles collectifs et tertiaires.
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011 e
Ktep
Bois-énergie
dont brûlé par les ménages
Déchets urbains incinérés
Résidus agricoles et
agroalimentaires
Biogaz
Total biomasse
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22
COUR DES COMPTES
solde de la production a été réalisé par des installations exploitant l’eau
chaude présente en grande profondeur
13
.
4 -
L’énergie solaire thermique.
L’énergie solaire thermique est marginale, à l’instar de la
géothermie. Elle ne représentait que 0,9 % de la production de chaleur
renouvelable en 2011, avec 96 Ktep. Cette filière, dont l’avenir reste
considéré par l’État comme prometteur, peine néanmoins à se développer.
Les ventes de panneaux solaires thermiques ont baissé de 2008 à 2011,
passant de 310 000 m
2
à 250 000 m
2
.
C - L’électricité renouvelable
La production électrique renouvelable est à la hausse depuis 2005
et atteint 84 TWh
14
en 2011. Elle reste caractérisée par la place
prépondérante de l’hydroélectricité, même si l’énergie éolienne progresse
régulièrement. En revanche, la production à base de biomasse évolue
dans de moindres proportions, alors que la production photovoltaïque a
fortement augmenté à partir de 2009 sans toutefois atteindre un niveau
qui la rende significative dans le
mix
énergétique renouvelable français.
La production électrique géothermique reste pour sa part extrêmement
faible
15
.
13
La production a été limitée à 94 Ktep en 2011. La principale activité réside
aujourd’hui dans la rénovation des installations existantes (nouveaux forages,
extensions) avec seulement trois à cinq opérations nouvelles par an. Par ailleurs, les
réseaux de chaleur associés à la géothermie profonde représentent environ le 5
ème
de
la puissance installée des pompes à chaleur géothermique en 2011. Généralement liée
à la présence de nappes souterraines, cette technologie a surtout été développée en Île-
de-France en raison de la présence de la nappe Le Dogger, située entre 1500 et 2000
mètres de profondeur, qui atteint des températures de 65 et 85 °C.
14
Production normalisée, c’est-à-dire lissée sur les quinze dernières années pour
l’électricité hydraulique et les cinq dernières pour l’électricité éolienne.
15
56 GWh en 2011.
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23
Graphique n° 6 : évolution de la production d’électricité
renouvelable de 2005 à 2011
Source : Cour des comptes- Données Commissariat général au développement durable /Sservice
de l’observation et des statistiques (CGDD/SOeS)
1 -
L’hydroélectricité
L’hydroélectricité, première source d’électricité renouvelable en
France (75,6 % en 2011), représente environ 30 % de la production
d’énergie renouvelable hors biocarburants
16
. La puissance installée a très
faiblement progressé depuis 1990 (2 %) et atteint 25,5
GW. Avec une
production équivalente à celle de neuf réacteurs nucléaires
17
, elle est la
deuxième source d’électricité (12 %) après l’énergie nucléaire.
La production hydroélectrique dispose de précieux atouts. Elle
peut être plus flexible que les autres et peut être modulée précisément et
en temps réel pour répondre aux pointes de consommation lorsqu’elle est
produite par un réservoir de barrage. Les centrales hydroélectriques
disposant, en outre, d’une station d’élévation de l’eau par pompage
(STEP), peuvent également stocker l’énergie et la restituer à la demande.
16
En raison des conditions météorologiques, la production hydroélectrique peut
fortement fluctuer. Sur près de trente ans, les variations ont ainsi pu atteindre moins
30 % à plus 10 % autour de la valeur moyenne de 66 TWh.
17
Production nucléaire nette en 2011 (423,5 TWh)/capacité nucléaire installée
(63 GW)
=
6,7 TWh
par
GW
nucléaire
installé.
La
production
annuelle
d’hydroélectricité normalisée, c’est-à-dire lissée sur les quinze dernière années au
sens de la directive européenne de 2009, est de 63,2 TWh, soit la production
équivalente à 9,4 GW nucléaire (63,2 TWh / 6,7 TWh).
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24
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2 -
L’énergie éolienne
Avec un essor important dès le début des années 2000, la puissance
éolienne installée sur terre et en mer atteignait 281 GW dans le monde à
fin 2012.
Comparativement, les capacités françaises sont faibles mais leur
progression a été significative entre 2005 et 2012, passant de 0,87 GW à
7,5 GW, pour 1 127 installations éoliennes terrestres
18
. Avec un facteur
de charge
19
moyen de 23 %, ces installations permettent de produire
14,3 TWh
20.
La filière éolienne occupe ainsi la deuxième place (15,3 %
en 2011) derrière l’hydraulique pour la production d’électricité
renouvelable mais elle représente seulement 2,2 % de la production
électrique nationale.
Cependant, l’éolien terrestre dispose encore d’un important
potentiel de progression. En effet, d’une part, 504 installations étaient en
attente de raccordement au réseau à fin 2012, soit, avec 7,7 GW, une
capacité similaire au parc installé et, d’autre part, le potentiel terrestre est
aujourd’hui estimé entre 32 à 34 GW
21
.
S’agissant
de
l’énergie
éolienne
en
mer,
si
le
potentiel
métropolitain est estimé à 12 GW
22
, éoliennes flottantes incluses, aucune
éolienne n’est aujourd’hui raccordée au réseau électrique français.
18
La majorité des éoliennes raccordées au réseau électrique est constituée de parcs
d’éoliennes dont la puissance unitaire est de 2 ou 3 MW.
26,6 % des installations
raccordées affichent une puissance unitaire inférieure à 36 kW et sont dites de « petit
éolien » pour des hauteurs d’installations inférieures à 50 mètres (voire 12 mètres
pour l’éolien de proximité).
19
Le facteur de charge est le rapport entre l’énergie électrique effectivement produite
sur une période donnée et l’énergie produite par un fonctionnement à la puissance
maximale durant la même période (source RTE).
20
Production normalisée (lissée sur les cinq dernières années) afin de limiter les effets
des aléas climatiques. À titre de comparaison, en 2011, l’Allemagne produisait
47 TWh, l’Espagne 42,1 TWh, le Danemark 9,7 TWh et le Royaume-Uni 15,7 TWh.
21
Source : ADEME, note sur le potentiel éolien (14 septembre 2012). Il s’agit du
potentiel éolien réellement exploitable. Il dépend non seulement du vent, mais
également des contraintes réglementaires et juridiques, d’intégration au réseau et de
l’acceptabilité sociale. Sans ces contraintes, le potentiel terrestre est estimé entre 60 et
70 GW.
22
Sur 30 à 35 GW ancrés qui pourraient théoriquement être installés selon l’ADEME-
Note sur le potentiel éolien (14 septembre 2012). Outre-mer, l’évaluation du potentiel
n’a pas fait l’objet d’études publiques. Il pourrait être estimé à 0,4 GW
(Source : Société Vergnet (producteur d’éoliennes)).
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25
L’État a lancé, en juillet 2011, un appel d’offres pour la
construction et l'exploitation de cinq parcs d’une puissance totale de
3 GW. Quatre projets ont été retenus pour une puissance prévue de
1,9 GW. Éolien Maritime France (EMF), qui regroupe EDF Énergies
Nouvelles (60 %) et Dong Energy Power (40 %), énergéticien danois, à
remporté trois zones et propose des éoliennes de forte puissance (6 MW)
fournies par Alstom. Le quatrième site est revenu à la société Ailes
marines SAS (Iberdrola et Éole-Res) avec des turbines de 5 MW
produites par AREVA. En janvier 2013, un deuxième appel d’offres a été
engagé pour deux parcs d’une puissance totale de 1 GW, dont celui pour
lequel l’appel d’offres précédent avait été déclaré infructueux.
3 -
L’électricité à base de biomasse
L’électricité ne constitue pas l’usage prioritaire de la biomasse qui
reste très largement utilisée pour la production de chaleur. En effet,
lorsque l’électricité est la production principale des installations, leur
rendement est inférieur à 40 %. En revanche, si elle est produite en
cogénération avec de la chaleur, les rendements sont plus élevés, de
l’ordre de 70 %.
Avec 5,2 TWh, dont 1,1 TWh à partir de biogaz fin 2011, la
production électrique à base de biomasse a atteint le troisième rang de la
production d’électricité renouvelable (6,3 %) derrière l’énergie éolienne
et hydraulique.
4 -
L’électricité solaire
Depuis 2000 et particulièrement depuis 2009, les moyens de
soutien public ont alimenté une progression importante de la puissance
photovoltaïque installée, passant de 0,35 GW en 2009 à 4 GW fin 2012.
Dans le même temps, la production est passée de 0,22 TWh à 4,4 TWh
mais continue de ne représenter qu’une faible part dans la production
d’électricité renouvelable (2,7 % en 2011), loin derrière l’hydraulique,
l’éolien et la biomasse.
La production photovoltaïque est très éclatée. En effet, 86 % des
installations raccordées fin 2012 (281 724) étaient de petites installations,
d’une puissance inférieure à 3 kW
23
, alors qu’elles ne représentaient que
16 % de la puissance totale installée (645 MW en puissance cumulée).
23
L'ordre de grandeur de la production d'une unité de 3kW est comparable à celui de
la consommation strictement électrique (hors chauffage et eau chaude sanitaire) d'un
foyer de quatre personnes.
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26
COUR DES COMPTES
IV
-
Des objectifs ambitieux
A - Un engagement fort de l’Union européenne
Les premières avancées en faveur des énergies renouvelables
reposent sur une série d’engagements de niveau international. Dès 1986,
une résolution du Conseil des communautés européennes
24
invitait les
États
membres
au
développement
des
énergies
nouvelles
et
renouvelables, afin qu’elles puissent jouer un rôle significatif dans le
bilan
énergétique
total,
notamment
en
limitant
le
recours
aux
combustibles traditionnels.
Peu de temps après, en écho aux interrogations croissantes sur le
réchauffement climatique, le sommet de la Terre de Rio de Janeiro (1992)
a adopté une convention-cadre visant à limiter les émissions de gaz à effet
de serre. Les États signataires se sont ensuite engagés dans le Protocole
de Kyoto, adopté en 1997 et entré en vigueur en février 2005, sur des
objectifs contraignants et un calendrier de réduction de leurs émissions.
Dans la même période, une série de résolutions du Conseil de
l’Union européenne ont encouragé le développement des énergies
renouvelables, en lien avec l’amélioration de l’efficacité énergétique, la
réduction des nuisances sur l’environnement, l’indépendance énergétique,
mais aussi la croissance économique et l’emploi. Elles se sont traduites en
2001 dans une première directive
25
relative à la promotion de l’électricité
de source renouvelable. Dans ce cadre, un objectif de 21 % d’électricité
renouvelable dans la consommation finale brute d’électricité avait été fixé
de manière indicative à la France à l’horizon 2010
26
. Il correspondait à
une proportion de 12 % d’énergie renouvelable dans la consommation
finale brute d’énergie, toutes sources comprises (chaleur, électricité et
transport).
24
Résolution du 16 septembre 1986 concernant de nouveaux objectifs de politique
énergétique communautaires pour 1995 et la convergence des politiques des États
membres - 86/C 241/01 et recommandation n° 88/349/CEE du Conseil du 9 juin 1988
concernant le développement de l'exploitation des énergies renouvelables dans la
Communauté -Journal officiel n° L 160 du 28/06/1988 p. 0046 – 0048.
25
Directive
n° 2001/77/CE
du
Parlement
européen
et
du
Conseil
du
27 septembre 2001 relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources
d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité.
26
La proportion d’électricité renouvelable s’élevait à 15 % en 1997.
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FIXES
27
Dès 2004 cependant, la Commission européenne constatait un
retard dans l’atteinte de l’objectif. Lors de la préparation du paquet
énergie climat, finalement adopté par l’ensemble des institutions
européennes début 2009, la proportion d'énergie renouvelable a été portée
à 20 % en 2020, au lieu de 12 % en 2010.
Une directive européenne de 2009
27
a ensuite assigné aux États
membres des objectifs relatifs à l’ensemble de la production d’énergie de
source renouvelable, sans préciser la répartition entre électricité, chaleur
et biocarburants. Le Parlement et le Conseil de l’Union européenne
considéraient en effet que « les situations de départ, les possibilités de
développer l’énergie provenant de sources renouvelables et les bouquets
énergétiques différaient d’un État membre à l’autre ». Le choix de répartir
l’effort a été laissé aux États membres, pour plus de souplesse.
Nouveauté de la directive, ces objectifs sont contraignants et non
plus seulement indicatifs et un nouveau mode de calcul a été adopté. Sur
cette base, l’objectif de proportion d’énergies renouvelables de la France
s’élève désormais à 23 % à l’horizon 2020, soit un niveau au-dessus de
ses voisins européens immédiats.
Graphique n° 7 : objectifs fixés par la directive 2009/28CE de la
proportion des énergies renouvelables en 2020
Source : Cour des comptes
27
Directive n° 2009-28 CE du 23 avril 2009 du Parlement européen et du Conseil du
23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de
sources renouvelables.
0
10
20
30
40
50
60
%
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28
COUR DES COMPTES
La Commission européenne a publié
28
son appréciation de l’état
d’avancement des énergies renouvelables en Europe en 2012 et de leurs
perspectives pour l’après 2020. Elle considère que ces énergies devraient
assurer la plus grande part de l'approvisionnement énergétique en 2050
mais qu’en raison de leurs coûts élevés et des obstacles qu’elles
rencontrent par rapport aux énergies fossiles, leur croissance pourrait
ralentir fortement après 2020 si un encadrement, aussi structurant que la
directive de 2009, n’est pas mis en place.
C’est la raison pour laquelle, en avance par rapport au calendrier
initialement fixé
29
, la Commission a d’ores et déjà engagé les travaux
devant aboutir à définir les axes et les moyens de soutenir les énergies
renouvelables après 2020. Les options possibles, selon elle, s’articulent
autour d’un dosage différent entre soutien aux énergies renouvelables et
réduction des émissions de gaz à effet de serre avec, selon les cas, des
objectifs contraignants ou non. Elle n’a cependant pas arrêté son choix
même si elle exclut de maintenir le
statu quo
actuel
30
.
B - La France est un des pays européens les plus actifs
1 -
Un engagement inscrit dans la loi
La loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la
politique énergétique française, dite loi POPE, adoptée après la directive
européenne de 2001, a arrêté plusieurs objectifs afin de maîtriser la
demande d'énergie, diversifier le bouquet énergétique français et
contribuer ainsi à la sécurité d’approvisionnement et à la lutte contre
l’effet de serre.
Dans cette loi, la France se fixait notamment l’objectif de
satisfaire, à l'horizon 2010, 10 % de ses besoins énergétiques et 21 % de
sa consommation intérieure d’électricité à partir de sources renouvelables,
28
Communication de la Commission au Parlement Européen, au Conseil, au Comité
économique et social européen et au comité des régions n° 271 du 6 juin 2012
«
Énergies renouvelables: un acteur de premier plan sur le marché européen de
l'énergie
» et le résumé de l’analyse d’impact l’accompagnant n° 163 de la même date
et rapport de la Commission aux mêmes destinataires sur les progrès accomplis dans
le secteur des énergies renouvelables n° 175 du 27 mars 2013.
29
La directive de 2009 prévoyait un examen technique de certaines mesures en 2014
et surtout une nouvelle feuille de route sur les énergies renouvelables en 2018.
30
La Commission européenne a lancé une grande consultation publique sur le «
cadre
pour les politiques en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030
», appelé «
Livre
vert
» - COM (2013) 169 du 27 mars 2013. Consultation ouverte du 28 mars au
2 juillet 2013.
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
29
conformément à ses engagements européens, tout en visant une hausse de
50 % de la production de chaleur d’origine renouvelable
31
.
Marquant véritablement le début de l’engagement officiel de la
France dans une politique déclarée de soutien aux énergies renouvelables,
la loi POPE a été suivie par la concertation nationale dite «
Grenelle de
l’environnement
» de juillet à novembre 2007. Elle a servi de base à la
rédaction des programmations pluriannuelles des investissements de
production d'énergie (PPI) qui ont notamment fixé les objectifs à atteindre
suivants en matière de développement des énergies renouvelables
32
:
Tableau n° 3 : objectifs de croissance de la production d’énergies
renouvelables (plan d’action national 2009-2020)
2005
Potentiel 2020
Objectifs de croissance
en Mtep
Chaleur
9,4
19,7
+
10,3
Electricité
6,1
12,7
+
6,6
Biocarburants
0,5
4
+
3,4
Total
+ 20,4*
Source : Plan d’action national en faveur des énergies renouvelables 2009-2020
*L’objectif total attendu est de + 20 Mtep. En application de la directive 2009/28/CE, le gaz,
l'électricité et l'hydrogène provenant de sources d'énergies renouvelables sont comptabilisés
dans plusieurs secteurs, mais ne sont pris en considération qu'une seule fois dans le total.
La loi de finances pour 2009 et surtout les lois du 3 août 2009 et du
10 juillet 2010
33
ont servi de cadre à la mise en oeuvre des orientations du
Grenelle de l’environnement. Elles ont ainsi mis au premier rang des
priorités françaises la lutte contre le changement climatique avec
l’engagement renouvelé de diviser par quatre les émissions de gaz à effet
de serre entre 1990 et 2050.
En outre, conformément aux engagements européens, l'objectif
d’améliorer l'efficacité énergétique a été fixé à 20 %. Egalement fixé à
20 % initialement, l’objectif de la part des énergies renouvelables dans la
production d'énergie a été porté, lors des débats parlementaires, à 23 % en
31
S’y ajoutait une priorité accordée aux biocarburants, qui devraient représenter, en
2010, 5,75 % des carburants mis en vente sur le marché national pour le transport.
32
Ces objectifs sont conditionnés par la réalisation d’une diminution de 38 % de la
consommation d’énergie dans les bâtiments résidentiels et tertiaires à l’horizon 2020.
Cette économie nécessite 400 000 rénovations lourdes à engager par an de 2013 à
2020 et 9 millions de rénovations intermédiaires.
33
Respectivement les lois n° 2009-967 de programmation relative à la mise en oeuvre
du Grenelle de l'environnement dite Grenelle I et n° 2010-788 portant engagement
national pour l'environnement, dite Grenelle II.
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30
COUR DES COMPTES
2020
34
pour répondre aux nouvelles modalités de calcul retenues par la
Commission européenne. Si la proportion des énergies renouvelables a
été augmentée de trois points, les objectifs de production sont restés les
mêmes
35
. Dans l’avenir, si le volume de production reste effectivement
inchangé, un effort supplémentaire en matière d’efficacité énergétique
sera nécessaire.
Enfin, la loi Grenelle I a précisé que l’État devait favoriser le
développement de l'ensemble des filières d'énergies renouvelables dans
des conditions économiquement et écologiquement soutenables, ce qui,
comme la Cour a pu le constater, n’est pas toujours le cas.
Les objectifs du Grenelle de l’environnement ont été confirmés par
le Président de la République à l’issue de la conférence environnementale
de septembre 2012. Deux principes ont été retenus, l'efficacité et la
sobriété énergétiques, d'une part, et la priorité donnée aux énergies
renouvelables, d'autre part. Le Président de la République a également
annoncé que la part du nucléaire dans la production d’électricité passerait
de 78,5 % de la production brute d’électricité en 2012 à 50 % en 2025.
Un processus de concertation a ensuite été engagé par le gouvernement et
devrait aboutir à un projet de loi de programmation sur la transition
énergétique en 2013.
2 -
Des objectifs parmi les plus élevés de l’Union européenne
En faisant le choix de porter à 23 % sa proportion d’énergies
renouvelables en 2020, la France s’est située parmi les quatre États
européens ayant les efforts les plus importants à accomplir.
34
L’objectif de 23 % a été réparti entre chaleur et refroidissement (33 %), électricité
(27 %), et transport (10,5 %) dans le plan national en faveur des énergies
renouvelables, pris en application de l'article 4 de la directive 2009/28/CE de l'Union
européenne. Des trajectoires pour la période 2009 à 2020 ont été établies pour
chacune des filières de production. Le plan recense également les mesures de soutien
à mettre en oeuvre pour développer les énergies renouvelables Elles sont reprises de
façon détaillée en annexe n° 7.
35
À hauteur de 37 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) en 2020.
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
31
Tableau n° 4 : proportion des énergies renouvelables en 2005
et 2020 en Europe
Proportion en 2005
Objectifs 2020
Effort à
accomplir
Suède
40,0 %
49,0 %
9,0
Finlande
28,5 %
38,0 %
9,5
Luxembourg
0,9%
11,0 %
10,1
Portugal
20,5 %
31,0 %
10,5
Autriche
23,3 %
34,0 %
10,7
Belgique
2,2 %
13,0 %
10,8
Grèce
6,9 %
18,0 %
11,1
Espagne
8,7 %
20,0 %
11,3
Pays-Bas
2,4 %
14,0 %
11,6
Italie
5,2 %
17,0 %
11,8
Allemagne
5,8 %
18,0 %
12,2
France
10,3
%
23,0
%
12,7
Irlande
3,1 %
16,0 %
12,9
Danemark
17,0 %
30,0 %
13,0
Royaume-Uni
1,3 %
15,0 %
13,7
Union européenne
8,5
%
20,0
%
11,5
Source : Cour des comptes – Données de la feuille de route pour les sources d’énergies
renouvelables 2007 de la Commission européenne (Communication au Conseil et au Parlement
européen)
Ces objectifs s’inscrivent dans une perspective de long terme plus
ambitieuse encore puisque l’Union européenne a fixé en 2009
36
un
objectif d’ensemble de réduction de ces émissions de 80 à 95 % d'ici à
2050
37
.
Ainsi, compte tenu de son contexte énergétique qui constitue un
véritable atout par rapport aux autres pays de l’Union européenne,
notamment en termes d’émission de CO
2
et de prix de l’électricité, les
objectifs retenus par la France pour 2020 peuvent être considérés comme
très ambitieux.
36
Conseil européen d’octobre 2009.
37
Par rapport aux niveaux de 1990 et dans le cadre des réductions à réaliser
collectivement par les pays développés.
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32
COUR DES COMPTES
V
-
Des résultats tangibles mais insuffisants à
terme
A - La France est encore bien placée
1 -
Par rapport à ses objectifs globaux
Les objectifs de la France ont d’ores et déjà connu un début de
réalisation, davantage marqué pour l’électricité que pour la chaleur.
Globalement, la proportion des énergies renouvelables a progressé en
France depuis 2005, passant de 9,6 % à 13,1 %, comme le montre le
graphique suivant.
Graphique n° 8 : proportions d’énergies renouvelables par secteur
en France et objectifs à 2020
Source : Cour des comptes d’après les données du CGDD et de la DGEC
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
33
En 2011 et tous secteurs confondus, la France était cependant
légèrement en retrait par rapport à sa trajectoire cible (13,1 % au lieu de
13,5 %) en raison, notamment, des retards dans les secteurs de la chaleur
et des transports. En revanche, en matière d’électricité, la cible a été
dépassée.
Tableau n° 5 : proportion des énergies renouvelables en 2011
Part d’énergies renouvelables par secteur
Cibles
2011
Réalisations
2011
Chaleur et refroidissement
18 %
16,5 %
Electricité
16 %
16,3 %
Transport (essentiellement biocarburants)
6,9 %
6,7 %
Total
13,5 %
13,1 %
Source : Commissariat général au développement durable / Service de l’observation et des
statistiques (CGDD / SOeS)
Les
productions
d’électricité
et
de
chaleur
de
sources
renouvelables affichaient un niveau de 20,6 Mtep au lieu de 22 Mtep
38
par
rapport aux objectifs pour 2011.
Néanmoins, avec un niveau de 13,1 % en 2011, la France dispose
d’une proportion d’énergies renouvelables supérieure à celle de ses
voisins frontaliers et de l’ensemble des pays de l’Union européenne, à
l’exception de l’Espagne, en faisant l’un des pays les plus producteurs
d’énergies renouvelables en Europe au regard de sa consommation.
38
17,8 Mtep au lieu de 19,2 Mtep hors biocarburants.
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34
COUR DES COMPTES
Graphique n° 9 : progression de la proportion d’énergies
renouvelables en Europe de l’ouest - 2011
Source : Cour des comptes - Commissariat général au développement
durable /
Service de l’observation et des statistiques (CGDD SoeS) pour la France /
Commission européenne Eurostat pour les autres pays (communiqué 26 avril 2013)
2 -
L’électricité renouvelable
La proportion d’électricité renouvelable a légèrement dépassé les
objectifs fixés pour 2011 : 16,3 % au lieu de 16 %.
En revanche, les objectifs de production en valeur absolue n’ont
pas été atteints : 7,2 Mtep au lieu de 7,5 Mtep
39
. Cette situation s’explique
par les résultats insuffisants de l’ensemble des filières à l’exception de la
filière photovoltaïque dont l’objectif a été plus que doublé
40
. En effet,
depuis 2000 et particulièrement depuis 2009, les moyens de soutien
public à l'énergie photovoltaïque ont alimenté une progression importante
de la puissance installée. L’objectif français de puissance photovoltaïque
installée en 2020 se situe à 5,4 GW. Or, en raison de cette progression
depuis 2009, la puissance installée devrait se situer entre 7,7 GW et
8,6 GW en 2020.
S’agissant
de
l’énergie
hydraulique,
avec
une
production
normalisée de 5,4 Mtep au lieu de 5,5 MtepP
41
, les objectifs n’ont pas été
atteints en 2011.
39
Source : Bilan de l’énergie 2011 - Service de l’observation et des statistiques
(SOeS) (83,7 GWh au lieu de 87,2 GWh).
40
196 Ktep (2,2 GWh) au lieu de 81 Ktep (0,9 GWh).
41
63,2 GWh (source Service de l’observation et des statistiques) au lieu de 63,9 GWh
(conversion des objectifs du plan d'action national en faveur des énergies
renouvelables exprimés en Mtep).
11%
15%
13%
17%
18%
23%
20%
20%
0%
5%
10%
15%
20%
25%
2011
Objectifs 2020
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
35
De même, si les objectifs fixés pour la filière éolienne ont été
dépassés jusqu’en 2010, ils n’ont pas été atteints en 2011 et 2012
(1,1 Mtep au lieu de 1,2 Mtep
42
) en raison de la contraction importante du
nombre des installations raccordées au réseau électrique (790 MW en
moyenne) c'est-à-dire à un niveau très en deçà de celui des trois années
précédentes (entre 1000 MW et 1 200 MW).
Enfin, la production d’électricité à partir de la biomasse est
légèrement inférieure en 2011 aux objectifs affichés, 453 Ktep pour une
cible de 513 Ktep
43
.
3 -
La chaleur renouvelable
Contrairement
à
l’électricité,
la
proportion
des
sources
renouvelables dans la production de chaleur n’a pas atteint l’objectif fixé
pour 2011 (16,5 % au lieu de 18 %) en raison d’une insuffisance de
production des différentes sources d’énergies (10,6 Mtep au lieu de
11,6 Mtep).
À l’exception du biogaz, marginal, et des pompes à chaleur,
aérothermiques et géothermiques, aucune filière renouvelable produisant
de la chaleur n’a, en effet, atteint les objectifs de production attendus pour
2011. La production de chaleur produite en 2011 à partir de biomasse
s’est ainsi élevée à 9,3 Mtep
44
pour une cible fixée à 10,2 Mtep avec un
retard significatif du bois-énergie individuel
45
(6,1 Mtep au lieu de
6,9 Mtep). En revanche, les pompes à chaleur ont légèrement dépassé les
objectifs attendus (1,1 Mtep au lieu de 1 Mtep). Après avoir plus que
doublé entre 2003 et 2008, le rythme des installations nouvelles a
toutefois fortement ralenti. Ainsi, s’agissant des pompes à chaleur
géothermique, le rythme a été presque divisé par trois depuis 2008.
B - Des objectifs encore éloignés
La France se situe ainsi à un peu plus de la moitié de ses objectifs
globaux à 2020, légèrement en dessous de l’Italie, l’Espagne et
l’Allemagne et de la moyenne des États de l’Union européenne.
42
12,8 GWh (Id.) au lieu de 14,3 GWh (Id.).
43
5,3 GWh (Id.) au lieu de 5,9 GWh – (Id.).
44
Biomasse solide et biogaz.
45
C’est-à-dire hors usages collectifs, tertiaires et industriels.
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36
COUR DES COMPTES
Graphique n° 10 : taux de réalisation en 2011 des objectifs 2020
Source : Cour des comptes - Commissariat général au développement durable / Service de
l’observation et des statistiques (CGDD SoeS) pour la France/Commission européenne Eurostat
pour les autres pays (communiqué 26 avril 2013)
– le graphique représente le taux de
réalisation de la proportion d’énergies renouvelables en 2011 par rapport aux objectifs 2020
25%
26%
32%
57%
68%
68%
76%
65%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
Royaume-Uni
Luxembourg
Belgique
France
Italie
Allemagne
Espagne
Union Européenne 27
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LES ENERGIES RENOUVELABLES PROGRESSENT SANS ATTEINDRE LES OBJECTIFS
FIXES
37
Le tableau suivant met en évidence l’effort à fournir par filières
pour atteindre les objectifs de production que
la France a retenus.
Tableau n° 6 : supplément d’énergies renouvelables à produire entre
2011 et 2020 (en Ktep)
2011
2020
Supplément à réaliser
2011-2020
Hydraulique
5 400
5 541
141
Eolien
1 104
4 979
3 875
Biomasse
453
1 477
1 024
Solaire photovoltaïque
196
592
396
Géothermie électrique
48
409
361
Autres (marines)
41
99
58
Electricité renouvelable
7 242
13 097
5 855
Biomasse solide
9 188
15 900
6 712
Pompes à chaleur
1 143
1 850
707
Solaire thermique
96
927
831
Biogaz
94
555
461
Géothermie profonde
94
500
406
Chaleur renouvelable
10 615
19 732
9 117
Total électricité et chaleur renouvelables
17 857
32 829
14 972
Source : Cour des comptes- Données Commissariat général au développement durable / Service
de l’observation et des statistiques (CGDD/SOeS) -Bilan de l’énergie 2011
À
l’exception
de
l’hydroélectricité,
les
productions
supplémentaires à réaliser dans la plupart des filières sont très
importantes. Or, des retards ont déjà été enregistrés en 2011. Le
prolongement de cette tendance rend donc les objectifs globaux à 2020
difficiles à atteindre.
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38
COUR DES COMPTES
______________________
CONCLUSION
_____________________
Depuis la fin des années 1980, l’Union européenne s’est engagée
sur la voie du développement des énergies renouvelables afin de réduire
les impacts de sa consommation énergétique sur l’environnement,
d’accroître son indépendance énergétique mais aussi d’ouvrir de
nouvelles perspectives de croissance économique et d’emploi.
Pour les États membres, les directives européennes de 2001 et
2009 ont servi de cadres au déploiement de leur propre politique. Les
objectifs fixés par la première n’ont pu être tenus. À la suite de l’adoption
du paquet « énergie–climat en 2009 » les États se sont donc fixé des
objectifs non seulement plus élevés mais aussi plus contraignants.
De son côté, la France a choisi de retenir, à l’horizon 2020, une
amélioration de 20 % de son efficacité énergétique et une baisse de 20 %
de ses émissions de gaz à effet de serre. Elle a aussi fixé un objectif
volontariste
et
particulièrement
ambitieux
de
23 %
d’énergies
renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie alors qu’elle
disposait déjà d’une électricité parmi les moins chères d’Europe et
largement décarbonée.
La mise en oeuvre de sa politique a permis à la France de figurer
aujourd’hui en bonne position par rapport à ses voisins européens. Pour
autant, les premiers retards enregistrés dès 2011 dans la production
d’énergies de sources renouvelables et le niveau des efforts à fournir
pour atteindre les objectifs fixés en 2020 éloignent la perspective de les
atteindre. En effet, les suppléments de productions à réaliser dans les
secteurs de l’électricité et de la chaleur renouvelables entre 2011 et 2020
représentent six et sept fois ce qui a été respectivement réalisé entre 2005
et 2011.
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Chapitre II
Une conjonction de difficultés
Plusieurs raisons expliquent les difficultés que rencontre le
développement des énergies renouvelables.
S’ils sont très variables entre les filières et si certaines d’entre elles
sont moins coûteuses que d’autres, les coûts de production des énergies
renouvelables restent élevés par rapport au prix de l’énergie. Pour pallier
les difficultés à rentabiliser les projets, l’État met donc en oeuvre des
moyens de soutien aux multiples formes, qu’il s’agisse d’aides à
l’investissement, de garantie des prix d’achat de la production, de
mesures fiscales favorables ou encore de financement de programmes de
recherche. Ils ont tous, selon des modalités différentes, connu des
difficultés ou des dérives dans leur application.
Enfin, plusieurs limites physiques et sociétales compliquent encore
la mise en oeuvre des engagements de la France.
I
-
Des coûts de production élevés
Bien que très variables d’une filière à l’autre, les coûts de
production des énergies renouvelables restent encore supérieurs au prix
de marché de l’énergie.
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40
COUR DES COMPTES
A - La méthodologie de calcul des coûts
Développée par l’OCDE, l’Agence Internationale de l’énergie
(AIE) et l’Agence de l’énergie nucléaire, la méthode retenue au niveau
international pour évaluer et comparer les coûts de production des
installations
est
celle
du
coût
de
production
moyen
actualisé,
communément identifiée par l’acronyme anglais LCOE pour «
levelized
cost of electricity
»
46
.
Elle correspond au coût de production moyen supporté par un
investisseur sur toute la durée de vie économique de son installation et
repose sur le rapport entre la valeur présente de la somme des coûts
actualisés et la valeur présente de la somme des productions actualisées.
Le calcul repose sur certains paramètres déterminants :
-
les coûts d’investissement, hors raccordement, qui incluent le
coût des matériels, du génie civil, de l’installation et des
diverses études, l’évaluation des aléas par les industriels et les
coûts de démantèlement ;
-
les coûts d’exploitation et de maintenance, qui comprennent, le
cas échéant, les coûts d’achat de combustible ;
-
le niveau de production, qui peut varier, pour une même filière,
en fonction de la disponibilité du productible (vent, soleil, etc.)
mais aussi des technologies utilisées ;
-
le taux d’actualisation ; il correspond, en général, au coût
moyen pondéré du capital qui rémunère l’ensemble des
financements apportés initialement, que ce soit sous forme de
fonds propres (capital social et éventuellement prêt des
actionnaires) ou de prêts à long terme. Les taux retenus dans les
analyses et calculs diffèrent logiquement d’un projet à l’autre,
entre deux filières différentes ou entre deux projets aux profils
spécifiques au sein d’une même filière ;
-
la durée de vie économique de l’exploitation qui est, en général,
celle du contrat d’achat au tarif réglementé. Les installations
peuvent avoir une durée de vie supérieure et permettre aux
producteurs,
même
hors
tarifs
d’achat,
d’augmenter
la
rentabilité interne du projet.
Ces différents paramètres créent des disparités importantes des
coûts de production entre les filières mais également au sein de celles-ci,
d’une installation à l’autre.
46
Cf. annexe n° 8.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
41
En outre, les calculs sont réalisés avec des hypothèses de facteurs
de charge qui se situent systématiquement à la limite supérieure de ce qui
est techniquement possible pour les installations. En revanche, pour
faciliter les comparaisons internationales, ils ne tiennent pas compte des
coûts fiscaux, des coûts de recherche, ou encore des coûts induits par
l’adaptation des réseaux de transport et de distribution.
Une méthode de calcul alternative
47
La Cour a cherché à évaluer les coûts de production au moyen d’une
méthode alternative, construite et validée sur la base d’un cas précis, et
appliquée ensuite à l’ensemble des projets réels pour lesquels des données
financières suffisantes étaient disponibles auprès des acteurs publics
nationaux, en l’occurrence la Commission de régulation de l’énergie (CRE)
et l’ADEME.
Son principe repose sur la modélisation d’un coût courant économique
couvrant, d’une part, un loyer économique constant pour les charges
d’investissements et de démantèlement lissées sur la durée d’exploitation, et,
d’autre part, les charges d’exploitation et de maintenance. Les résultats
obtenus à partir de projets réels ont pu ainsi être comparés aux fourchettes
théoriques obtenues par la méthode
Levelized cost of electricity
(LCOE) et
aboutissent à des résultats voisins.
B - Des coûts de production très disparates
1 -
Les données rassemblées par l’ADEME
L’ADEME a évalué, selon la méthode LCOE
48
, les coûts de
production des énergies renouvelables à partir de données rassemblées en
France mais aussi dans d’autres pays. Les chiffres obtenus, présentés dans
le tableau figurant en annexe n° 9, selon différentes hypothèses, ne
s’appliquent donc pas automatiquement aux différentes filières françaises.
Les données résumées ci-dessous sont celles correspondant au taux
d’actualisation intermédiaire de l’ADEME, soit 8 % afin de comparer au
mieux les filières dont les risques
49
et les durées de vie sont très
différentes les unes des autres. Les fourchettes obtenues reflètent
également la grande sensibilité des calculs pour une même filière, à la
puissance et à la productivité des installations.
47
Id. note n° 46.
48
Donc comme indiqué ci-dessus, hors fiscalité, recherche et bien sûr coûts de
transports et distribution.
49
Compte tenu notamment de la maturité très variable des technologies employées.
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42
COUR DES COMPTES
Tableau n° 7 : fourchettes des coûts moyens actualisés de
production par filière
Filières
Coûts de production en €/MWh
(actualisation 8 %)
Solaire thermique
195-689
Solaire photovoltaïque
114-547
Solaire thermodynamique
94-194
Eolien en mer
87-116
Eolien terrestre
62-102
Méthanisation
61-241
Biomasse
56-223
Géothermie
50-127
Hydroélectricité
43-188
Source : Cour des comptes- Données ADEME
L’énergie solaire est, globalement, très largement plus coûteuse
que les autres sources d’énergie avec, en outre, un large éventail de coûts
de production (94 à 689 €/MWh). Cependant, le solaire photovoltaïque
connait une baisse constante des prix des composants, liée notamment à
l’existence d’importantes surcapacités de production de panneaux ces
dernières années. La capacité de production mondiale a, en effet, atteint
50 GW par an à la fin 2011, essentiellement en raison des investissements
chinois dans la production des cellules et modules, pour une demande
limitée à 26 GW
50
. Les prix des modules sont ainsi passés d’un peu plus
de 2 € en 2009 à un peu moins de 1 € en 2011 et cette baisse s’inscrit
dans une tendance de long terme, confirmée par toutes les études
internationales
51
.
La filière éolienne terrestre apparait, selon les chiffres de
l’ADEME, dans une position intermédiaire, avec des coûts compris entre
62 € et 102 €/MWh, ce qui en fait une énergie sur le point d’être
compétitive.
Enfin, tout en présentant des exceptions liées à la nature des
installations (biomasse individuelle, méthanisation, hydroélectricité de
petites et moyennes capacités par exemple), les coûts de production
50
Journal du photovoltaïque, HS N°7 Avril 2012.
51
Selon l’agence IRENA (International Renewable Energy Agency- Agence
internationale dont la France est membre – Source : « Renewable energy
technologies : cost analysis series ». Volume 1 – Solar photovoltaïcs. Juin 2012) le
coût de production de l'électricité d'origine photovoltaïque devrait encore baisser d’ici
2030 en passant de près de 250 USD/MWh aux alentours de 50 USD/MWh d’ici
2030.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
43
d’énergie à partir de la biomasse, de la géothermie ou de la puissance
hydraulique sont globalement les moins élevés.
À titre de comparaison, le coût de production de l’électricité
nucléaire a été estimé par la Cour à 49,5 € le MWh en 2011 pour le parc
de centrales actuelles
52
. Dans le cas du futur EPR, la Cour soulignait qu’il
était trop tôt pour valider un coût de production. À titre indicatif, elle
rappelait que la fourchette la plus souvent citée était de 70 à 90 €/MWh
tout en marquant qu’elle s’appliquait à l’EPR de Flamanville, ce dernier
n’étant pas un exemplaire de série.
1 -
Le cas particulier des parcs éoliens en France
La Cour a pu examiner des calculs de rentabilité de parcs éoliens
terrestres français réalisés par un exploitant dont les éoliennes bénéficient
d’implantations géographiques favorables. L'ordre de grandeur des coûts
de production calculés par la Cour se situe entre 60 €/MWh avec un taux
d'actualisation réel
53
de 5 % et 68 €/MWh avec un taux réel de 7 %
54
. Ces
résultats se situent donc dans la fourchette basse des coûts présentés dans
le tableau précédent et démontrent que les estimations par l’État peuvent
être légèrement surévaluées, au moins dans ce cas.
S’agissant du développement inédit de parcs éoliens en mer sur les
côtes françaises, tous les acteurs s'accordent à considérer que les
incertitudes techniques des projets sont élevées. En effet, les technologies
sont moins matures et se caractérisent par un niveau de risque moins
maîtrisé, notamment en raison de la diversité des fonds marins et des
contraintes liées à ce milieu. Le coût d’investissement potentiel des parcs
à construire s’échelonne ainsi entre 1,8 et 2,4 Mds d’euros par parc, hors
le coût de raccordement qui avoisine le milliard d’euro pour l’ensemble
des projets. La Cour a estimé le coût de production des parcs éoliens en
mer entre 105 et 164 €/MWh
55
.
52
Le taux d’actualisation retenu était de 7,8 % pour la méthode du coût courant
économique et de 8,4 % pour la méthode Champsaur.
53
Hors inflation.
54
En appliquant la méthode LCOE. De 61 €/MWh à 70 €/MWh en appliquant la
méthode alternative.
55
À des fins de comparaison, aucun impôt n’a été pris en compte. La fourchette
s’étend de 123 à 190 €/MWh en incluant l’impôt sur les sociétés.
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44
COUR DES COMPTES
II
-
Un système de soutien complexe et d’efficacité
variable
L’atteinte des objectifs européens, déclinés au niveau national, a
suscité la mise en place d’instruments de soutien nombreux et variés,
certains communs ou spécifiques à l’électricité et à la chaleur.
A - Les dispositifs de soutien communs à l’électricité et
à la chaleur
1 -
Les dispositifs fiscaux
a)
Le taux réduit de TVA
Certains types de travaux d’amélioration de la performance
énergétique et d’équipement de chauffage performants bénéficient d’une
TVA à taux réduit de 5,5 % depuis 1999. Le dispositif s’applique à
l'ensemble des travaux effectués dans les logements anciens (planchers,
huisseries, etc.) y compris ceux associés au développement des énergies
renouvelables. Le dispositif concerne les personnes physiques ou morales
pour des locaux affectés en totalité ou principalement à l’habitation et
achevés depuis plus de deux ans. À partir du 1
er
janvier 2012, le taux a été
porté à 7 % (contre 5,5 % auparavant), ce qui devrait réduire la dépense
fiscale.
Aucune statistique ne mesure spécifiquement le coût de ce
dispositif fiscal pour le développement des énergies renouvelables. Pour
autant, sur la base des investissements correspondants aux équipements
de production d’énergie renouvelable dans les logements anciens, la
direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) a évalué la dépense
fiscale brute qui peut être rattachée au développement des énergies
renouvelables à 1,8 Md€ sur l’ensemble de la période 2005 à 2011.
Parallèlement, de 2006 à 2011, les abonnements relatifs aux
livraisons d'électricité d'une puissance maximale inférieure ou égale à
36 kilovoltampères et d'énergie calorifique, distribués par réseaux, ainsi
que la fourniture de chaleur lorsqu'elle est produite au moins à 50 % à
partir de la biomasse, de la géothermie, des déchets et d'énergie de
récupération, ont aussi bénéficié d’un taux réduit de TVA de 5,5 % pour
un coût d’environ 120 M€.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
45
b)
Le crédit d’impôt développement durable
Un crédit d’impôt développement durable (CIDD) destiné à
favoriser
l’efficacité
énergétique
et
la
production
d’énergies
renouvelables a été mis en place en 2005. Le taux, fixé entre 10 et 40 %
(avec majoration pour bouquets de travaux), s’applique au prix des
équipements éligibles
56
, installation comprise. L’assiette du crédit
d’impôt a été réduite progressivement et ce dernier a été réorienté, à
compter de 2010, vers le soutien aux travaux de maîtrise de l’énergie.
Avec un coût estimé à près de 8 Md€ pour les seules énergies
renouvelables depuis 2005
57
, le CIDD est l’outil fiscal de soutien au
développement des énergies renouvelables le plus important.
L’évaluation conduite pour le comité d’évaluation des dépenses
fiscales et des niches sociales en 2011
58
a néanmoins mis en évidence
d’importantes disparités du coût public du carbone évité
59
entre les
différents équipements éligibles, sans justification particulière. Mis à jour
en 2012, ces coûts diffèrent beaucoup d’une filière à l’autre comme le
montre le tableau suivant.
56
Les appareils de régulation de chauffage et de programmation des équipements de
chauffage, les matériaux d'isolation thermique, les moyens de chauffage et de
production d’eau chaude sanitaire à partir d’énergies renouvelables, les équipements
de récupération et traitement des eaux pluviales et les moyens de production
d'électricité renouvelable, dès lors qu’ils répondent à certains critères de performance
et que leur marché n’est pas arrivé à maturité.
57
Sur un coût total pour les finances publiques du CIDD de près de 14 Md€.
58
Rapport d’avril 2011.
59
Le coût public du carbone évité correspond au rapport entre la dépense publique
totale engagée pour financer un équipement permettant de réduire les émissions et la
somme des gains d’émissions sur la durée de vie de cet équipement.
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COUR DES COMPTES
Tableau n° 8 : coûts publics de la tonne de CO
2
évitée des différentes
technologies aidées par le crédit d’impôt développement durable
pour 2012
Filières
Coût public en
€/t CO
2
évitée
Solaire thermique
448
Isolation des parois vitrées
139
Photovoltaïque
112
Pompes à chaleur
53
Chaudières à condensation*
33
Isolation des parois opaques (toits et murs)
21
Appareil indépendant de chauffage au bois*
20
Source : direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
* Permettent également la réduction des émissions de particules fines
La filière solaire thermique et photovoltaïque représente ainsi trois
fois le soutien reçu pour des travaux d’isolation des parois vitrées, eux-
mêmes déjà plus aidés que d’autres dispositifs, comme le solaire
photovoltaïque, les chaudières à condensation ou les appareils de
chauffage à bois.
En outre, le dispositif du CIDD n’est pas suffisamment contrôlé en
raison de sa complexité technique et des moyens des services fiscaux.
Reposant sur un système déclaratif, il fait essentiellement l’objet de
contrôles sur pièces
60
.
Enfin, si le CIDD a permis de soutenir l’emploi dans les filières
concernées, il n’a pas réussi à favoriser la constitution de champions
industriels nationaux compétitifs à l’export. Il s’est, en outre, parfois
heurté à une insuffisante qualification des installateurs. Il apparaît donc
coûteux et parfois affecté au soutien d’équipements matures. Une plus
grande sélectivité des équipements éligibles pourrait réduire la dépense
publique correspondante, sans menacer le développement des énergies
renouvelables.
60
Les moyens consacrés au contrôle sur pièces de l’éligibilité des équipements sont
déjà estimés à une centaine d’emplois équivalents temps plein par an par
l’administration fiscale.
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c)
L’éco-prêt à taux zéro
L’éco-prêt à taux zéro permet aux propriétaires de logements de
financer des travaux de rénovation
61
à l’aide d’une avance remboursable
sans aucun intérêt obtenu auprès de leur banque. En contrepartie, celle-ci
bénéficie d’un crédit d’impôt
62
.
Le dispositif n’a pas atteint les objectifs quantitatifs initialement
fixés
63
. Si la montée en puissance a, en effet, été très rapide en 2009, avec
plus de 70 100 éco-prêts émis (pour un objectif de 50 000), le rythme
s’est ensuite nettement ralenti à partir de 2010 et continue de baisser en
2011, avec 40 755 prêts émis pour un objectif de 240 000 et en 2012 avec
34 000 prêts émis pour un objectif de 320 000. De fait, la perspective de
400 000 éco-prêts par an à compter de 2013 apparaît fortement
compromise.
d)
D’autres dispositifs fiscaux ne sont pas évalués
En parallèle du crédit d'impôt développement durable, il est
possible sous certaines conditions de bénéficier d'exonérations fiscales et
d'abattements
spécifiques.
Ainsi,
les
propriétaires
d'installations
photovoltaïques d'une puissance inférieure à 3 kW sont exonérés d’impôt
sur le revenu et de TVA pour la vente de l'électricité produite. De même,
les exploitants agricoles bénéficient de régimes fiscaux leur permettant de
ne pas payer en totalité l'impôt sur le revenu associé à la revente
d'électricité produite par une centrale à biomasse ou une installation
photovoltaïque. La dépense fiscale correspondante est inférieure à 0,5 M€
par an.
Par ailleurs, certains équipements de production d’énergies
renouvelables peuvent faire l'objet d'un amortissement dégressif et
exceptionnel sur douze mois
64
. La dépense fiscale correspondante,
constatée jusqu’en 2011, est de 4 M€ par an, pour un nombre inconnu de
bénéficiaires.
61
Bouquets de travaux pour l’amélioration de l’efficacité énergétique et l’installation
de dispositifs d’énergies renouvelables.
62
D’une valeur égale à la différence entre la somme actualisée des mensualités dues
au titre de l'avance remboursable et la somme actualisée des montants perçus au titre
d'un prêt de même montant et durée de remboursement, consenti à des conditions
normales de taux à la date d'émission de l'offre.
63
Selon les informations figurant en annexe des lois de finances pour 2012 et 2013.
64
Pompes à chaleur géothermiques ou air/eau, turbine à condensation pour la
production d'électricité à partir de vapeur provenant principalement de l'incinération
de déchets industriels ou ménagers, matériel permettant la récupération d'énergie
solaire, etc.
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48
COUR DES COMPTES
Ces dispositifs n’ont pas fait l’objet de véritable évaluation et leur
efficacité en faveur des énergies renouvelables n’est pas connue. Ils
devraient donc être réexaminés, d’autant plus qu’ils sont parfois
cumulables entre eux et avec les autres mesures publiques de soutien,
comme le bénéfice des tarifs d’achat par exemple.
2 -
Le soutien à la recherche et à l’innovation
a)
Une diversité de programmes et d’acteurs
Les programmes publics de recherche et innovation sont pour
l’essentiel portés par des opérateurs publics, auxquels peuvent s’associer
des acteurs privés. Le premier groupe d’opérateurs est composé d’OSEO
et des agences qui distribuent des subventions ou aides diverses :
l’Agence nationale de la recherche (ANR), l’Agence de l'environnement
et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Certains programmes sont
financés par l’Union européenne, à travers le PCRDT (Programme cadre
de recherche et développement technologique).
Le deuxième groupe d’opérateurs est composé d’établissements
publics dont l’activité de recherche est, en partie ou non, consacrée à
l’énergie
65
.
Ces organismes publics sont financés par des dotations de l’État, à
travers les programmes budgétaires qui financent la recherche dans le
domaine de l’énergie. Les crédits publics peuvent aussi contribuer à des
fonds destinés à des financements spécifiques, comme le Fonds unique
interministériel (FUI), destiné au financement des projets portés par les
pôles de compétitivité, le fonds de compétitivité des entreprises (FCE) qui
finance des aides directes aux entreprises, ou encore les « Investissements
d’avenir ».
Participent également au soutien public de la recherche et
développement dans le domaine des énergies renouvelables, les
65
Recherches entièrement consacrées à l’énergie : Commissariat à l’énergie atomique
(CEA), Institut français du pétrole–Énergies nouvelles (IFPEN), Agence nationale
pour la gestion des déchets radioactifs, (ANDRA) /recherches consacrées en partie à
l’énergie : Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Institut national de
recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA),
Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER), Institut
national de la recherche agronomique (INRA), Institut français des sciences et
technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR), Bureau de
recherches géologiques et minières (BRGM) et Centre Scientifique et Technique du
Bâtiment (CSTB).
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
49
dispositifs fiscaux comme le crédit d’impôt recherche (CIR) et le statut de
jeune entreprise innovante (JEI).
Compte tenu des enjeux liés à la recherche dans les domaines de
l’énergie, le gouvernement a créé en juillet 2009, l’Alliance nationale de
coordination de la recherche pour l'énergie (ANCRE) afin de coordonner
la programmation des projets de recherche et de développer les
partenariats entre les acteurs publics et privés (organismes de recherche,
universités et entreprises).
b)
La nécessité de corréler la stratégie de recherche à la politique de
soutien.
Les programmes de recherche se développent fortement depuis
2008, notamment sous l’effet de la mise en oeuvre du programme
« Investissements d’avenir » et ont pour ambition de lever l’ensemble des
verrous technologiques identifiés par la communauté scientifique.
Cependant, l’absence d’une stratégie clairement identifiée à ce
jour
66
sur l’organisation du système électrique du futur, qui conditionne le
développement d’un grand nombre de technologies, ne facilite pas
aujourd’hui l’identification des domaines de recherche stratégiques. En
effet, tant les contraintes d’adaptation des réseaux électriques que le coût
croissant des tarifs d’achat pour la collectivité pourraient justifier
l’émergence de nouvelles technologies ou de nouvelles pratiques de
consommation. Le système électrique et plus spécifiquement les réseaux
électriques actuels ne devraient donc pas seulement être optimisés sur la
base des recherches en cours mais, au contraire, les recherches ont
vocation à s’adapter à une nouvelle vision de cette organisation
électrique.
Il est donc important d’en tenir compte dans les décisions de
financement des programmes, afin de ne pas soutenir des technologies qui
deviendraient inutiles avec un changement d’organisation du système
électrique, au détriment d’autres qui deviendraient indispensables.
66
Le ministère chargé de la recherche entend profiter de l’adoption d’une nouvelle
stratégie nationale de recherche dans le domaine de l'énergie (SNRE) à l’issue du
débat sur la transition énergétique, pour réaliser le rapprochement, aujourd’hui
insuffisant, entre la recherche française et les perspectives de l’économie et de
l’industrie.
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50
COUR DES COMPTES
B - Le dispositif de soutien à la production d’électricité
renouvelable
L’obligation d’achat est le principal outil de la politique de soutien
à la production d’électricité renouvelable.
En application de l’article L.314-1 du code de l’énergie, les
fournisseurs historiques d’électricité (EDF et les entreprises locales de
distribution) sont tenus d’acheter aux producteurs l’électricité produite à
partir de sources d’énergies renouvelables. L’achat est réalisé au tarif
arrêté par le ministre chargé de l’énergie après avis de la Commission de
régulation de l’énergie (CRE), ou au tarif fixé dans le contrat d’achat dans
le cas des appels d’offre. La charge résultant de cette obligation leur est
remboursée grâce à une partie de la contribution au service public de
l'électricité
(CSPE),
payée
par
l'ensemble
des
consommateurs
d'électricité.
L'obligation d'achat est contractée pour une durée de 15 à 20 ans
selon les technologies et leur degré de maturité. Selon la politique du
ministère chargé de l’énergie, les tarifs d’achat réglementaires, qui
répondent à une logique de guichet puisque tout producteur peut en
bénéficier, devraient plutôt être réservés aux filières matures (éolien
terrestre), tandis que les appels d’offres, qui assurent à l’administration
une plus grande maîtrise sur le développement des filières, devraient
plutôt être réservés aux technologies moins matures ou aux projets de
grande capacité (éolien en mer par exemple).
1 -
Des tarifs d’achat fixés par arrêté : un calcul en décalage avec
le cadre légal
La méthode de fixation des tarifs est légalement encadrée. Elle doit
tenir compte du coût évité pour l’acheteur (prix de l’électricité sur le
marché), auquel peut s’ajouter une prime qui reflète la participation de la
source d’énergie aux objectifs de la politique énergétique de la France :
indépendance,
sécurité
des
approvisionnements,
compétitivité
économique et lutte contre les gaz à effet de serre, mais qui ne peut
conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés excède une
rémunération normale.
L’application de ces dispositions s’est toutefois révélée impossible
pour les sources d’énergies renouvelables, dans la mesure où la
contribution aux objectifs de la loi ne suffisait pas à assurer la rentabilité
des projets. Aussi, le critère aujourd’hui retenu pour fixer le bon niveau
de tarif est celui de la rentabilité des capitaux investis, dont l’appréciation
par les services de l’État n’est pas toujours suffisamment actualisée. Des
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
51
déséquilibres peuvent alors se créer, comme celui constaté avec les tarifs
d’achat photovoltaïque entre 2009 et 2011.
2 -
Les appels d’offres : une procédure parfois non justifiée, pas
toujours efficace et aux effets déstabilisants
Les appels d’offres ont pour finalité de soutenir les filières en
retard de capacité.
a)
Une procédure pas toujours justifiée
L’article L. 311-10 du code de l’énergie prévoit que le ministre
chargé du secteur peut lancer des appels d’offres afin d’atteindre les
objectifs
définis
dans
la
programmation
pluriannuelle
des
investissements. Ils sont instruits par la Commission de régulation de
l’énergie (CRE) sur la base de critères définis par le ministre. Dès lors,
EDF et les entreprises locales de distribution sont tenues de conclure un
contrat d’achat de l’électricité avec les producteurs lauréats selon les
conditions définies dans leurs offres.
Cette procédure est cependant parfois utilisée pour développer des
filières qui sont d’ores et déjà en avance sur leurs objectifs. C’est le cas
de la filière photovoltaïque. Ainsi, des appels d’offre ont été lancés en
2011 et 2013 pour développer des installations photovoltaïques
67
, alors
que la capacité déjà installée et celle en file d’attente de raccordement
dépassent déjà les objectifs fixés pour 2020.
b)
Une procédure pas toujours efficace pour atteindre les capacités
attendues
Certains appels d’offres n’ont pas atteint les objectifs de puissance
attendus (cahier des charges insuffisamment respecté par les projets, tarifs
proposés trop élevés, nombre insuffisant de projets candidats, etc.). Ainsi,
celui de 2004 pour installer 500 MW d’éolien terrestre n’a retenu que
278 MW au total, soit 56 % de l’objectif. Celui de 2010, portant sur
95 MW, n’a retenu que 66 MW, soit 70 % de l’objectif. De même, la
première tranche de l’appel d’offres de 2011 portant sur des projets
photovoltaïques de puissance comprise entre 100 et 250 kW n’a permis
de retenir que 37,5 % de la puissance attendue.
D’autres appels d’offres retiennent des projets dont une faible part
sera finalement réalisée. C’est le cas des projets de cogénération à base de
67
Un appel d’offres pour développer des capacités comprises entre 100 et 250 kW et
deux appels d’offres pour des capacités supérieures à 250 kW.
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COUR DES COMPTES
biomasse, pour lesquels la CRE estime à seulement 30 % le taux de
réalisation effective.
c)
Une procédure pas toujours efficace pour obtenir le meilleur prix
De nombreux appels d’offres n’ont pas permis de limiter les prix
proposés par les porteurs de projet, soit par manque de concurrence, soit
par mauvaise articulation avec les tarifs d’achat.
Ainsi, l’appel d’offres lancé en 2011 pour développer les parcs
éoliens en mer n’a pas réuni les meilleures conditions pour limiter les
prix. Le délai de six mois laissé aux candidats pour déposer une offre a
donné un avantage comparatif au seul candidat bénéficiant d’études de
vents antérieures sur les zones concernées. En outre, le prix de
référence
68
, publié dans l’appel d’offres, n’a pas été respecté pour trois
des quatre sites concernés. Les différences entre les tarifs d’achat et les
coûts de production correspondent à la prime de risque exigée par les
industriels.
De même, la mauvaise articulation des appels d’offre avec les
tarifs d’achat, notamment en matière photovoltaïque, ne favorise pas la
formation du prix au mieux des intérêts de la collectivité. La politique de
l’État est de réserver la procédure des appels d’offres pour les
installations supérieures à 100 kWc et les tarifs d’achat pour les
puissances inférieures. Or le tarif d’achat « T5
69
» peut aussi bénéficier
aux installations dépassant 100 kWc. Il a été diminué de 20 % au
1
er
octobre 2012 mais, si cette baisse réduit la rentabilité des projets, elle
ne met pas fin à la situation de chevauchement des procédures.
Dans son avis du 20 décembre 2012 sur le projet de nouvel arrêté
tarifaire photovoltaïque, la Commission de régulation de l’énergie
(CRE) rappelait que ce tarif avait été fixé de manière à le rendre non
rentable dès lors que les installations susceptibles d’en bénéficier
relevaient de la procédure d’appel d’offres
70
. Toutefois, avec la baisse des
coûts d’investissements des grosses installations, le tarif « T5 » est
devenu rentable et les demandes de raccordement à ce tarif ont fortement
68
Prix à partir duquel les projets obtenaient une note nulle sur ce critère dans le calcul
des notes de sélection des candidats. Le prix d'achat et le volet industriel avaient une
même pondération de 40 %, l'influence sur les activités existantes et sur
l'environnement était fixée à 20 %.
69
Le tarif T5 est le tarif applicable à toute installation d’une puissance inférieure à
12 MW qui respecte les critères de l’arrêté du 4 mars 2011 et ne peut bénéficier des
tarifs T1 à T4. Il concerne en fait essentiellement des installations de plus de
100 kWc.
70
Conformément à l’exposé des motifs de l’arrêté du 4 mars 2011.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
53
progressé (+ 434 MW au 3
ème
trimestre 2012), dont 98 % ont concerné de
grosses installations de plus de 250 kWc.
Comme le constatait la CRE au sujet du tarif « T5 », les porteurs
de projets peuvent donc utiliser les deux dispositifs et proposer lors des
appels d’offres des prix parfois très supérieurs audit tarif, qui devient dès
lors, un « prix plancher » et un recours en cas d’éviction de la procédure
d’appel d’offres. La CRE recommandait donc de réserver le dispositif
d’obligation d’achat aux installations inférieures à 100 kWc.
d)
Des conséquences parfois mal mesurées
Les appels d’offres instruits par la CRE pour la construction
d’installations produisant de l’électricité à base de biomasse présentent,
outre leur faible taux de réalisation, l’inconvénient majeur de déstabiliser
les marchés locaux qui ne disposent pas d’un potentiel de biomasse
suffisant, notamment en ressources forestières. Les « gros » projets
entrent ainsi en concurrence avec des projets plus petits qui pourraient
bénéficier de cette ressource et qui sont mieux adaptés à son potentiel.
Dans sa réponse à la Cour, le ministre a d’ailleurs précisé que le
gouvernement n’envisageait pas de lancer de nouveaux appels d’offres
pour cette catégorie d’installations.
C - Les dispositifs de soutien à la production de chaleur
renouvelable
Les engagements de la France pour le développement des énergies
renouvelables reposent sur une augmentation de la production de chaleur
de 10,3 Mtep entre 2005 et 2020, soit plus de la moitié de la progression
totale envisagée pour les énergies renouvelables
Deux moyens principaux sont utilisés par l’État pour développer ce
secteur.
Le
crédit
d’impôt
développement
durable,
examiné
précédemment, et le fonds chaleur devant lequel il arrive très largement
en tête en termes d’engagements financiers. Un autre dispositif reposant
sur deux fonds de garantie a une application très limitée aujourd’hui
puisqu’il ne concerne que la seule géothermie.
1 -
Le « fonds chaleur »
Le fonds de soutien au développement de la production et de la
distribution de chaleur d’origine renouvelable ou « fonds chaleur » a été
conçu comme un des moyens principaux d’atteindre les objectifs du
Grenelle de l’environnement.
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54
COUR DES COMPTES
Géré par l’ADEME, il ne peut être utilisé que pour le soutien des
filières de production thermique renouvelable dans les secteurs de
l’habitat collectif, le tertiaire, l’agriculture et l’industrie, à l’exception des
particuliers (contrairement au CIDD). Le fonds chaleur intervient par des
subventions à l’investissement par l’intermédiaire d’appels à projet de
niveau national et d’aides délivrées au niveau régional
71
. Ils peuvent être
cumulés avec d’autres subventions publiques
72
.
D’un montant de 179 M€ en 2009, les dotations au « fonds
chaleur »
auraient dû augmenter pour progressivement atteindre 500 M€
en 2012, puis 800 M€ en 2020 selon le plan arrêté à la création du fonds.
Or, les décisions budgétaires successives ont limité l’enveloppe à
1,2 Md€ sur la période 2009-2013, soit 240 M€ seulement en moyenne
annuelle, un niveau très inférieur aux intentions initiales.
Plus de la moitié (5,5 Mtep) de l’objectif de progression d’énergie
renouvelable thermique entre 2006 et 2020 (10,3 Mtep) doit être financée
par le fonds chaleur. L’ADEME considère que les résultats atteints sont
en ligne avec les objectifs attendus pour 2012. Or, sur la base des coûts
observés jusqu’ici, les capacités financières actuelles du fonds ne
permettraient de ne financer que 3,1 Mtep. Sans modification de la
dotation, 1,4 Md€ supplémentaires seraient nécessaires jusqu’en 2020
pour atteindre l’objectif de 5,5 Mtep.
2 -
Les systèmes de garantie
L'investissement dans les installations de géothermie profonde
nécessite, dans la plupart des cas, une ou plusieurs opérations de forage,
qui représentent souvent plus de la moitié du total des coûts, et plusieurs
millions d'euros dans les cas de forage profond.
Le
risque
financier
encouru
est
important
parce
que
la
connaissance partielle du sous-sol peut conduire à des résultats négatifs.
71
Les appels à projets nationaux concernent les installations produisant de la chaleur à
partir de la biomasse pour un volume supérieur à 1 000 tep/an dans les secteurs
industriel, agricole et tertiaire. Depuis 2009, les appels à projets prennent le nom
« Biomasse Chaleur Industrie Agriculture Tertiaire » (BCIAT) et un appel à projets
est lancé chaque année. Pour les autres filières, quel que soit le secteur, et pour les
installations biomasse ne relevant pas des appels à projets, le « fonds chaleur » est
géré par l’ADEME au niveau régional. Les projets sont portés soit par les collectivités
et les gestionnaires d’habitat collectif, soit par des entreprises des secteurs de
l’industrie, de l’agriculture et du tertiaire privé.
72
Aides des collectivités locales dans le cadre des contrats de projets États-régions
(CPER), du Fonds européen de développement économique régional (FEDER), du
Plan de performance énergétique des exploitations agricoles, du Plan de soutien à la
politique des déchets.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
55
Pour cette raison, dès le début des années 1980, deux fonds, le fonds de
garantie et le fonds Aquapac, ont soutenu le développement du secteur et
en particulier les grands réseaux de chaleur de la région parisienne.
Le premier
73
couvre les risques des professionnels de ne pas
obtenir, lors d’un forage, la ressource géothermale recherchée (débit et/ou
température
74
), de perdre les bénéfices de l’exploitation après la
diminution ou l’arrêt de la ressource ou encore de subir un sinistre sur les
installations. Le second, mis en place après le succès du premier, est voué
à la couverture des risques de même nature, supportés par les projets avec
pompes à chaleur sur aquifère de faible profondeur (moins de 100m)
75
.
III
-
Un cadre juridique instable et contesté
Selon les dispositions de la directive de 2009, les mesures prises en
faveur du développement des énergies renouvelables doivent être
« proportionnées et nécessaires » et les « procédures administratives […]
simplifiées et accélérées au niveau administratif approprié ».
Or, les énergies renouvelables sont soumises à de multiples
réglementations et leur application pose parfois des difficultés. Que ce
soit
en
matière
d’urbanisme,
d’environnement,
ou
de
cadres
réglementaires
propres
à
certaines
filières,
l’écheveau
des
réglementations constitue un obstacle pour les porteurs de projets et
même pour l’administration.
Par ailleurs, elles évoluent parfois très rapidement et ne facilitent
pas
le
développement
des
capacités
de
production
d’énergies
renouvelables.
73
Sa gestion est confiée à une filiale de la Caisse des dépôts et consignations, SAF-
Environnement, et est pilotée par un comité technique présidé par l'ADEME et
associant le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et des
représentants des maîtres d'ouvrage publics et privés, ainsi que des établissements
financiers. Un versement initial par l'État de 15 M€ a permis d'amorcer le fond, suivi
de plusieurs abondements ultérieurs par l'ADEME, le dernier en 2011 de 6,4 M€. Les
bénéficiaires versent des cotisations.
74
La couverture de ce risque peut aller jusqu'à 65 % des coûts assurés, voire 90 %
grâce à une couverture additionnelle de 25 % financée par les régions (exemple en Île-
de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA).
75
Ayant mobilisé des ressources de 5,6 M€ (dotations initiales, cotisations et produits
financiers), le fond disposait fin 2012 de près de 3 M€.
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56
COUR DES COMPTES
A - Des réglementations parfois excessives
L’encadrement juridique des énergies renouvelables est multiple et
l’articulation des diverses dispositions est complexe. En outre, les enjeux
politiques et économiques qui s’affrontent se traduisent par des évolutions
juridiques parfois chaotiques.
1 -
La filière éolienne terrestre : un développement freiné par son
cadre juridique
Fruit d’une évolution marquée par un volontarisme en faveur du
développement des énergies décarbonées et par des oppositions très
structurées,
le
cadre
juridique
qui
règlemente
l’installation
et
l’exploitation
des
éoliennes
est
particulièrement
complexe
et
contraignant. Il a été assoupli par l’adoption de la loi du 15 avril 2013
76
.
L’accumulation
de
règles
depuis
plusieurs
années
a
considérablement ralenti le développement de l’éolien terrestre en France.
1 100 MW de projets ont été installés en France en 2010, 875 MW en
2011 et seulement 753 MW en 2012 et la capacité cumulée des projets en
attente de raccordement équivaut à celle déjà raccordée.
Le temps qui s’écoule entre le dépôt d’un projet de construction
d’éolienne terrestre et sa mise en service est estimé entre six et huit ans,
contre deux ans et demie en moyenne en Allemagne selon l’association
de professionnels France énergie éolienne. En effet, au-delà des délais
d’instruction par les services administratifs concernés, l’empilement de
règlementations multiplie les motifs de recours, déposés par les opposants
à l’implantation d’éoliennes dans près d’un projet sur trois.
a)
Les instruments de planification
La planification des zones d’implantation des parcs éoliens
s’appuie depuis la loi de 2013 sur le volet éolien des schémas régionaux
climat air et énergie (SRCAE). Jusqu’à son adoption, le bénéfice de
l’obligation d’achat pour un producteur d’énergie éolienne était
conditionné par l’implantation du parc en zone de développement de
l’éolien (ZDE). Ces zones étaient définies par le préfet en tenant compte
du potentiel éolien, des possibilités de raccordement au réseau électrique,
de l’impact paysager, de l’impact sur les sites remarquables et sur la
76
Loi n° 2013-312 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et
portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes, dite loi
Brottes.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
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biodiversité. La disparition des ZDE assouplit donc les règles
d’implantation des éoliennes.
b)
Les règles d’urbanisme
Les projets de parcs éoliens terrestres sont soumis à des règles
d’urbanisme contraignantes qui apparaissent contradictoires. En effet, les
éoliennes terrestres peuvent, en tant qu’équipement d’intérêt collectif,
être construites
77
en dehors des zones constructibles
78
, que ce soit en zone
agricole ou en zone naturelle
79
.
Toutefois, le cadre juridique est plus strict s’agissant des zones de
montagne et des zones littorales. Le code de l’urbanisme
80
prévoit que les
extensions d’urbanisation doivent être réalisées en continuité avec les
agglomérations et villages existants. En montagne, une dérogation est
prévue au profit des éoliennes en tant qu’équipements publics
81
. Ce n’est
pas le cas en zones littorales, où, de fait, les parcs d’éoliennes doivent être
construits en continuité des villes et villages existants. Or, les éoliennes
d’une hauteur supérieure à 50 mètres ne peuvent être construites à moins
de 500 mètres des habitations
82
. Les autorités préfectorales ne peuvent
donc délivrer des permis de construire pour des éoliennes situées dans les
zones littorales, qui sont précisément celles où soufflent des vents
favorables. La loi de 2013 permet une dérogation au principe
d'urbanisation en continuité de la loi littoral en Guadeloupe, Guyane,
Martinique, à La Réunion et à Mayotte.
La loi Grenelle II avait également institué l’interdiction de la
construction de parcs inférieurs à cinq mâts, afin de lutter contre le mitage
des paysages. Les services instructeurs considéraient en général que cette
mesure était efficace sur ce point, mais que, « jointe à d'autres règles
environnementales ou de protection du patrimoine, cette règle risqu[ait]
de compromettre bon nombre de projets en cours »
83
, notamment dans les
77
En application de l’article R 421-2 du code de l’urbanisme, les éoliennes terrestres
d’une hauteur inférieure à douze mètres sont dispensées de permis de construire.
78
Article L. 111-1 et R. 124-3 du code de l’urbanisme.
79
Sous réserve d’un zonage spécifique et restreint et du respect du caractère naturel
de la zone.
80
Art. L.145-1 à 13 pour la montagne et art. L.146-1 à 9 pour le littoral. Une
commune littorale est une commune du rivage de la mer, de l’océan, ou d’un lac
d’une superficie supérieure à 1000 ha.
81
Les parcs éoliens terrestres ont été qualifiés par le Conseil d’État (Arrêt Leloustre
du 16 juin 2010) « d’équipements publics » et d’opération d’urbanisation.
82
Article L. 553-1 du code de l’environnement.
83
Conseil général de l’environnement et du développement durable, Instruction
administrative des projets éoliens (rapport mai 2011).
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COUR DES COMPTES
régions d’habitat dispersé, comme la Bretagne. Cette règle a été
supprimée par la loi de 2013.
c)
La procédure ICPE
La loi Grenelle de 2010 a imposé le régime des « installations
classées pour la protection de l’environnement (ICPE) » aux éoliennes
terrestres de plus de 50 mètres de hauteur ainsi qu’à celles comprenant
des aérogénérateurs d’une hauteur comprise entre 12 et 50 mètres et
d’une puissance supérieure ou égale à 20 MW.
Le nouveau régime, qui s’accompagne de règlementations
nationales en matière de bruit, d’impact sur les radars et d’éloignement
vis-à-vis des tiers, fixe une doctrine homogène sur l’ensemble du
territoire national, là où les différentes autorités locales fixaient autant de
prescriptions différentes. Ainsi, l'établissement par voie réglementaire de
règles techniques et la possibilité d'en vérifier concrètement l'application
après la procédure d'autorisation ou de déclaration sont censés limiter les
contentieux.
Toutefois, même si l’enquête publique et l’étude d’impact ont été
« mutualisées » entre la procédure de délivrance du permis de construire
et celle relative au régime d’autorisation des installations classées, les
procédures ont été alourdies. Les projets doivent désormais, en effet, faire
l’objet d’une étude de dangers, d’un avis des conseils municipaux
concernés, d’un avis de la commission départementale des sites, d’un avis
de l’INAO (dans les zones de production de vins d’appellation d’origine),
se soumettre à d’éventuelles prescriptions particulières et faire l’objet de
contrôles de la part de l’inspection des installations classées.
L’élaboration de cette nouvelle doctrine homogène s’est donc faite
au prix d’un empilement de dispositions réglementaires diverses qui,
même avec l’adoption de la loi de 2013, caractérise encore l’encadrement
juridique de l’éolien à terre et alourdit l’ensemble des démarches à
accomplir pour un porteur de projet. Quant à l’effet souhaité sur la
limitation
des
contentieux
et
l’harmonisation
de
la
doctrine
administrative,
il
n’existe
pas,
à
l’échelle
nationale,
de
retour
d’expérience permettant de le confirmer ou de l’infirmer.
2 -
La géothermie : des exigences réglementaires trop rigoureuses
et inadaptées
S'agissant de l'exploitation d'une ressource du sous-sol, la
géothermie relève du code minier. Toutefois, celui-ci est conçu
prioritairement en fonction du modèle des industries extractives et de
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
59
leurs contraintes propres qui ne s’appliquent pas totalement à la
géothermie, de dimension plus modeste et moins invasive.
Aujourd’hui,
les
conditions
physiques
de
la
ressource
géothermique dimensionnent l’étendue des obligations administratives :
(permis de recherche, enquête publique, concession pour l’exploitation).
S’ajoutent à ces dispositions celles du code de l'environnement qui
réglementent également les forages, ainsi que les prélèvements et
réinjections et le code de la santé publique quand la consommation
humaine est concernée.
La réglementation est à la fois excessivement complexe, peu
lisible, et inadaptée aux évolutions techniques. Les procédures peuvent
nécessiter en moyenne de dix-huit à vingt-quatre mois de délais
d'instruction et peuvent dissuader des porteurs de projets.
C’est pourquoi, partant du constat de la disproportion entre ces
réglementations et les enjeux de la géothermie, la loi du 22 mars 2012
relative à la simplification du droit et à l'allègement des procédures
administratives (dite loi Warsman II) permet de redéfinir, par décret, le
régime juridique applicable à la géothermie à basse température et
simplifie largement les procédures concernée.
Le décret d’application est
cependant toujours en préparation.
3 -
L’hydroélectricité : un potentiel réduit par le volume des
contraintes réglementaires
Les
contraintes
environnementales
réduisent
fortement
les
opportunités de développement de la production hydroélectrique. Si
l’impact de la réglementation sur les débits réservés paraît modeste
84
, il
n’en est pas de même pour les conséquences de la directive cadre sur
l’eau de 2000 et de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (loi
« LEMA ») du 30 décembre 2006.
Aux termes de ces dispositions, les cours d’eau seront classés à
partir de 2014 selon deux listes en fonction de leur qualité écologique. Le
classement sera de nature à modifier le champ d’application des
anciennes
règles,
a
priori
dans
un
sens
plus
protecteur
de
l’environnement et plus restrictif pour la production hydroélectrique.
En effet, les cours d’eau classés en liste 1 seront protégés contre
tout ouvrage nouveau constituant un « obstacle à la continuité
écologique »,
c’est-à-dire
la
circulation
de
la
faune
(poissons
84
Ils sont estimés à 1 TWh en 2014 et 2 TWh en 2020 sur une production totale de
72 TWh.
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COUR DES COMPTES
principalement) et des sédiments. Enfin, le renouvellement de la
concession ou de l'autorisation des ouvrages existants est rendu plus
contraignant que dans le dispositif antérieur.
D’après une étude d’octobre 2012 de l’Union française de
l’électricité (UFE)
85
, les projets actuels de classement en liste 1 rendent
impossible
la
réalisation
de
76 %
du
potentiel
hydroélectrique
supplémentaire identifié par l’UFE dans son étude de novembre 2011,
soit 10,6 TWh par an
86
. Selon EDF, cette perte de production potentielle
pourrait être récupérée si seulement 2 à 4 % des linéaires de rivière
proposés en liste 1 en étaient sortis.
B - Des réglementations instables
Si la règlementation concernant l’éolien terrestre a fortement
évolué ces deux dernières années, allant d’un durcissement (dispositions
introduites par la loi du 12 juillet 2010) à un assouplissement avec la loi
Brottes, un contentieux tarifaire actuellement pendant devant la Cour de
justice de l’Union européenne laisse planer une grande incertitude sur le
dispositif de soutien à la filière éolienne. Il a, d’ores et déjà, pour effet de
bloquer le financement par les banques des nouveaux projets.
Le Conseil d'État a en effet renvoyé, le 15 mai 2012, à la Cour de
justice de l’Union européenne (CJUE) une « question préjudicielle
relative au mode de financement du surcoût de l'électricité éolienne ». La
Cour européenne devra juger si le tarif d'achat de l'électricité d'origine
éolienne est, ou non, une aide d'État
87
. C'est seulement lorsqu’elle aura
rendu son arrêt que le Conseil d'État rendra une décision définitive sur
une demande d'annulation des arrêtés tarifaires sur l'éolien pris fin 2008.
En matière solaire photovoltaïque, la succession des arrêtés
tarifaires publiés depuis 2006, et notamment entre 2010 et 2011, ainsi que
le moratoire de décembre 2010 ont introduit une grande instabilité
dénoncée
par
les
professionnels.
D’abord
très
favorable
au
développement des installations, le cadre juridique s’est ensuite durci,
pour freiner le rythme de développement des capacités. D’autres pays
européens, notamment l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie ont également
suivi la même tendance. Après une première série de mesures de soutien
85
Étude Union française de de l’électricité (UFE) du 26 octobre 2012, Quel potentiel
hydroélectrique pour les régions françaises ? (2
e
partie).
86
Étude de l’UFE du 29 novembre 2011, Quel potentiel hydroélectrique pour les
régions françaises.
87
Le motif de la saisine du Conseil d’État est que la France n’a pas notifié,
préalablement à sa mise en oeuvre, l’arrêté tarifaire éolien de 2008 à la Commission
européenne en tant qu’aide d’État.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
61
favorables aux producteurs, les autorités ont pris des mesures plus
restrictives, destinées à limiter le coût pour la collectivité. Cette politique
de l’urgence, développée en réaction aux évènements, va à l’encontre de
la nécessaire stabilité à long terme du cadre juridique pour engager des
projets sur quinze à vingt ans.
C - Un contentieux abondant
Que ce soit en raison de l’abondance des réglementations ou des
problèmes de voisinage, les énergies renouvelables suscitent un abondant
contentieux. La filière éolienne est très largement la plus concernée.
Ainsi, la plupart des schémas régionaux climat air énergie sont attaqués
par recours gracieux ou contentieux sur leur volet éolien, de même
qu’une proportion importante des zones de développement de l’éolien
(ZDE) et des décisions de permis de construire. La question de
l’acceptation sociale des énergies renouvelables est donc posée.
Les décisions de l’administration font l’objet d’un nombre de
recours significatif mais ne sont pas systématiquement contestées. Les
recours des investisseurs contre les décisions de refus de construire sont
plus fréquents que ceux des opposants contre les autorisations, dont le
succès est en outre plus limité.
1 -
Les contentieux sur les refus d’autorisation de construire un
parc éolien
Une estimation, réalisée par le Conseil général de l’environnement
et du développement durable (CGEDD) en 2011 à partir d’une enquête
auprès d’une soixantaine de départements, évaluait le taux de refus par les
préfets à 47 % des demandes de permis de construire des parcs éoliens.
Les principaux motifs de refus sont l’atteinte aux sites et aux
paysages, la covisibilité avec les secteurs et monuments protégés et
l’atteinte à l’environnement. Compte tenu du caractère parfois subjectif
de ces motifs, 41 % des décisions de refus font l’objet de recours en
première instance de la part des porteurs de projets. La moitié aboutit,
signe de la fragilité des positions de l’administration. Enfin, seulement
56 %
des
dossiers
jugés
font
l’objet
d’un
recours
en
appel,
essentiellement déposés par des porteurs de projet.
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COUR DES COMPTES
2 -
Les contentieux sur les autorisations de construire un parc
éolien
Les autorisations de construire font également l’objet de nombreux
recours de la part d’associations nationales ou de riverains, en général sur
la base des mêmes moyens que ceux invoqués par les préfets pour les
refus, principalement l’atteinte aux sites et aux paysages, ainsi que
l’atteinte à la salubrité et à la sécurité publique.
L’étude
du
CGEDD
a
ainsi
constaté
que
31 %
des
696 autorisations de construire recensées avaient fait l’objet de recours de
tiers devant le juge administratif. Le taux de réussite est relativement
faible : 78 % des autorisations accordées par les préfets et faisant l’objet
d’un recours sont confirmées par le tribunal administratif. Dans certains
départements, le taux de confirmation atteint 95 % comme en Seine-
Maritime. 88 % des décisions des tribunaux administratifs font elles-
mêmes l’objet d’un recours en appel, allongeant d’autant plus les
procédures.
3 -
La nécessaire harmonisation de la position de l’État
Les notions d’atteinte aux sites et aux paysages et de mitage, non
définies par les textes, laissent une large place à l’interprétation
subjective. Sans aller jusqu’à la définition réglementaire, qui pourrait
contrevenir à la simplification recherchée, une harmonisation des
positions des services déconcentrés de l’État s’impose.
IV
-
Une organisation des pouvoirs publics
inadaptée
Grâce à un volontarisme politique qui s’est exprimé dans la
fixation d’objectifs ambitieux, les énergies renouvelables ont connu un
réel essor ces dernières années en s’appuyant sur des dispositifs
nombreux et variés. Ce foisonnement a aussi développé incohérences et
instabilité, alors que l’État s’est insuffisamment organisé pour piloter
cette politique complexe. Il s’en est suivi un découplage entre le niveau
national et local, ainsi qu’un certain nombre de contradictions dans
l’action de l’État.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
63
A - Des compétences à préciser entre la DGEC et la
CRE
La mise en oeuvre de la politique de soutien aux énergies
renouvelables dépend au niveau central de la Direction générale de
l’énergie et du climat (DGEC) qui relève du ministère de l’écologie, du
développement durable et de l’énergie.
Or, en application du décret du 4 décembre 2002, les cahiers des
charges des appels d’offres lancés dans les différentes filières sont établis
par la commission de régulation de l’énergie (CRE), sur la base des
différents critères fixés par le ministre (caractéristiques techniques des
installations, lieux d’implantation, conditions économiques, etc.). Le
ministre arrête ensuite les cahiers des charges après les avoir modifiés, le
cas échéant. En pratique, elle est saisie directement d’un projet déjà
rédigé. La marge de manoeuvre de la CRE en est réduite y compris dans
l’exercice de ses compétences d’évaluation des candidats.
Le Gouvernement n’est pas lié non plus par les avis de la CRE sur
les tarifs de l’obligation d’achat, ce dont il use régulièrement.
Ce partage des compétences et la façon dont il est mis en oeuvre
entre les services ministériels, gestionnaires des politiques, et la CRE,
entretiennent une confusion sur leurs rôles respectifs.
B - Une expertise insuffisante
L’État n’a pas développé toute l’expertise nécessaire à la mise en
oeuvre de la politique de soutien aux énergies renouvelables. Cette
faiblesse est particulièrement visible en ce qui concerne la connaissance
des coûts et l’impact socio-économique des mesures prises.
1 -
Une mauvaise connaissance des coûts
Alors qu’il engage la collectivité sur des sujets financièrement très
lourds, l’État s’est insuffisamment organisé pour disposer des données de
base indispensables à la conduite de la politique en faveur des énergies
renouvelables.
En effet, l’État ne dispose que d’informations lacunaires et
dispersées sur les coûts de production. La DGEC a réalisé la dernière
étude sur les coûts de production en 2008 et s’en remet désormais à la
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COUR DES COMPTES
CRE qui dispose d’une multitude de sources
88
. L’ADEME fournit
également des informations
89
et est le seul organisme public qui a pu
établir
des
fourchettes
des
coûts
de
production
des
énergies
renouvelables.
Ce déficit d’expertise place l’État dans une situation d’asymétrie
d’informations vis-à-vis des industriels, qui peut être source de dérive des
dépenses et de situation de rente pour certains investisseurs. Ainsi, dans le
cas du photovoltaïque, ces faiblesses organisationnelles ont entraîné un
manque de cohérence de la politique de soutien, conduite dans l’urgence
et au coup par coup. L’État s’est aussi révélé dans l’incapacité de définir
des tarifs à la mesure des coûts de production. Toutefois, l’administration
fait valoir que l’arrêté du 4 mars 2011 a pour objectif d’ajuster
progressivement le tarif en fonction du coût de production sans nécessiter
de connaissance approfondie de celui-ci.
Il appartient aux services ministériels de se doter de l’organisation
nécessaire à l’élaboration de bases de données fiables et partagées qui
leur permettent de dimensionner au mieux les dispositifs de soutien. À
défaut, les pouvoirs publics courent le risque d’offrir des rémunérations
excessives aux producteurs et de déséquilibrer les marchés par des tarifs
administrés déconnectés des coûts.
2 -
L’absence d’un suivi statistique d’ensemble des emplois
Le suivi statistique des effets de la politique de soutien aux
énergies renouvelables souffre d’un déficit de coordination. Le seul
recensement des emplois directs s’avère problématique. Les acteurs
publics
concernés,
notamment
l’INSEE,
le
CGDD
90
,
l’ADEME,
participent à l’élaboration des statistiques mais sans même partager une
définition unique des emplois à décompter. Par ailleurs, ces sources sont
souvent croisées entre elles ou avec celles non validées des organisations
professionnelles, ce qui multiplie les incertitudes et les risques de
propagation des erreurs d’estimation.
88
Dossiers d’appels d’offres s’ils sont récents, autres régulateurs européens, ADEME,
associations de professionnels, internet, etc.
89
L’ADEME s’appuie sur des informations internes, des études qu’elle pilote, des
études d’organisations internationales et nationales (AIE, IRENA, EEA, NREL), de
différents syndicats et associations et de cabinets de conseil.
90
Le service de l’observation et des statistiques (SOeS) assure, au sein du
Commissariat général au développement durable, le recueil de données statistiques sur
les thèmes du logement, de la construction, des transports, de l'énergie et du climat, de
l’environnement et du développement durable.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
65
L’appréciation des impacts économiques réels par la seule prise en
compte des emplois directs et indirects est insuffisante et nécessite
également celle des emplois induits.
3 -
Un impact socio-économique insuffisamment évalué
La faiblesse d’expertise de l’État se retrouve également dans sa
capacité à connaître l’impact socio-économique des décisions prises. Cela
peut le conduire à lancer des projets très coûteux pour la collectivité ou
les consommateurs sans que les bénéfices attendus ne se produisent.
La prise de risque est consubstantielle aux grands projets
industriels destinés à développer des filières d’avenir non encore matures,
et est nécessaire. Cependant, le risque peut être évalué et mis en balance
avec d’autres choix. Or, ces évaluations économiques ne sont aujourd’hui
pas réalisées et ne peuvent donc éclairer la décision politique.
Ainsi, par exemple, la décision de développer une filière éolienne
en mer a été justifiée par les perspectives en termes d’exportations et de
créations d’emplois. Or, à l’exception d’une étude demandée à un cabinet
de conseil, elle ne s’est appuyée sur aucune évaluation économique
approfondie portant sur l’emploi induit, le développement industriel à
long terme, sur les marchés français mais aussi britanniques, pourtant
présentés comme complémentaires. Le coût pour le consommateur des
projets attribués à l’issue du premier appel d’offres, est pourtant estimé
par la CRE à 1,1 Md€ par an, pendant vingt ans à partir de 2020.
De même, le choix stratégique de développer les panneaux
photovoltaïques intégrés au bâti a été pris sans mesurer la capacité de la
filière à répondre correctement à la demande. Motivé par l’idée que
l’industrie française serait plus compétitive face à ses concurrents,
notamment chinois, sur des produits à plus forte valeur ajoutée, ce choix
s’est révélé décevant. Outre son coût croissant pour la collectivité
91
, la
filière n’a pas pour l’instant réussi à s’imposer à l’international et reste
handicapée par une mauvaise organisation de la profession
92
.
Par ailleurs, initialement conçu pour des habitations neuves, le
concept a été étendu aux bâtiments existants, ce qui supposait de
91
La prime d’intégration au bâti s’élevait ainsi dans l’arrêté tarifaire de 2006 à
250 €/MWh, soit 83 % du tarif de base. En 2011, 99 % des contrats d’achat relatifs à
des installations photovoltaïques concernaient des installations intégrées au bâti.
92
Le développement de l’intégré au bâti doit, en effet, s’appuyer sur des compétences
spécifiques et nouvelles dans les métiers du bâtiment. Or la formation des
professionnels n’a pas été à la hauteur des besoins. Ainsi, des électriciens se sont
improvisés couvreurs et inversement et des défauts d’étanchéité ont pu être constatés,
outre le seul renchérissement des coûts en raison de l’installation.
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66
COUR DES COMPTES
remplacer tout ou partie de la toiture par des panneaux. Ainsi, outre le
renchérissement des coûts d’installation, des défauts d’étanchéité ont pu
être constatés.
C - Des défaillances dans la prise de décision
1 -
Une mauvaise utilisation de la procédure d’appel d’offres
La procédure d’appels d’offres respecte un cadre réglementaire
garantissant la stricte égalité de traitement des candidats. Ainsi, les offres
retenues sont celles qui sont les mieux notées à partir de critères
transparents, objectifs et s’appliquant à chacune d’elles. Dans la pratique,
ces principes n’ont pas toujours été appliqués.
Ainsi, en 2004, à l’occasion d’un premier appel d’offres pour
développer des projets éoliens en mer, le choix envisagé par le ministre
ne respectait pas le classement des offres établi par la Commission de
régulation de l’énergie (CRE) en application des critères de notation.
Malgré l’avis négatif de cette dernière, qui préconisait notamment de
déclarer l’appel d’offres sans suite, le ministre a tout de même retenu un
projet mais ce dernier n’a finalement jamais été réalisé.
Plus récemment, dans le cadre de l’appel d’offres de juillet 2011
relatif à l’éolien en mer, le site de Saint-Brieuc a été attribué à la société
Ailes marines SAS recourant aux turbines d’AREVA alors que la société
EMF était mieux classée par la CRE. La DGEC proposait pour sa part
une solution de remise en jeu du lot de Saint-Brieuc avec celui du
Tréport, qui n’avait pas été attribué, mais elle n’a pas été suivie non plus
par le ministre. L’option retenue visait à donner la possibilité à AREVA
de maintenir un programme industriel autour du Havre, avec l’espoir de
se repositionner sur un deuxième appel d’offres étendu au Tréport. Elle a
abouti à privilégier un candidat en dépit d’un prix plus élevé que celui
proposé par EMF.
Dans la filière biomasse, un appel d’offres lancé en 2010 avait fixé
un objectif de 200 MW de puissance mais le ministre est allé au-delà.
Tous les dossiers jugés recevables par la CRE ont été sélectionnés par
arbitrage ministériel, soit 420 MW au total, y compris des offres qui
avaient obtenu la plus mauvaise note et qui n’auraient pas été retenues si
le seuil de 200 MW n’avait pas été dépassé. Ainsi, sur les quinze projets,
six ont obtenu une « note prix » quasiment nulle et trois ne produiront
quasiment que de l’électricité.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
67
Le cas spécifique du projet n° 20 d’E.ON Provence Biomasse
Une tranche de production d’une ancienne centrale thermique utilisant
des combustibles fossiles doit être reconvertie en une installation de
cogénération biomasse. Cette unité produira principalement de l’électricité,
ce qui la conduit à afficher un taux d’efficacité énergétique modeste par
rapport aux projets de cogénération. Elle importera 48 % de granulés de bois
du Canada, des États-Unis et d’Amérique du Sud.
Le projet était classé par la CRE, en dernière position à l’issue de
l’appel d’offres de 2010. Il a néanmoins été retenu par décision ministérielle
et, avec d’autres projets également mal notés, a conduit au dépassement du
plafond de puissance initialement fixé pour l’ensemble de l’appel d’offres.
2 -
Des décisions tardives
La situation qu’a connue la filière solaire photovoltaïque durant la
période 2010 à 2011 a été qualifiée par certains de « bulle »
photovoltaïque, provoquée par une déconnexion entre les tarifs d’achat et
la réalité des coûts. Ce phénomène n’est toutefois pas propre à la France ;
il est observé également dans la plupart des pays européens, notamment
en Espagne, en République Tchèque, au Royaume-Uni et en Allemagne.
Or, en France, cette situation avait été anticipée dès 2006 par la CRE dans
ses avis sur les différents projets d’arrêté tarifaire photovoltaïque. Une
première baisse des tarifs n’est intervenue qu’en janvier 2010. Elles s’est
révélée insuffisante. Une mission conjointe inspection générale des
finances – conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et
des technologies (IGF-CGIET) diligentée par le ministre le 26 mars 2010
a également constaté que la déconnexion entre les tarifs d’achat et la
baisse du prix des panneaux expliquait l’envolée des demandes de
contrats fin 2009. La DGEC, pour sa part, alertait le cabinet ministériel
par trois notes rédigées entre mai et juillet 2010.
Les premiers signes précurseurs de la bulle à venir étaient donc
identifiés mais les décisions ont tardé à être prises. Un deuxième arrêté
tarifaire a dû être pris en août 2010, mais n’a pas permis d’endiguer la
hausse des demandes de raccordement qui ont atteint 6,4 GW fin 2010,
soit six fois la puissance photovoltaïque déjà installée. Aussi, une
suspension de l’obligation d’achat pour une durée de trois mois a dû être
décidée en décembre 2010
93
et enfin un nouvel arrêté a été adopté le
4 mars 2011. Ce n’est qu’à partir de là que le phénomène de « bulle » a
pu être circonscrit.
93
Décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l’obligation d’achat de
l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil.
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68
COUR DES COMPTES
3 -
Des retards dans la production d’électricité géothermique
Plus favorablement dotée que la France, l'Italie dispose d'une
capacité de production électrique d’origine géothermique de plus de
800 MW, sur un total en Europe de 1 600 MW. Il n'existe en France que
deux installations, dont une de recherche, avec une puissance totale
installée particulièrement limitée (17,2 MW). À l’horizon 2020, les
ambitions affichées dans le plan d'action national en faveur des énergies
renouvelables sont d’augmenter de 65 MW la puissance géothermique à
des fins électriques par rapport à 2010 pour la porter à 80 MW. À titre de
comparaison, cette augmentation représente moins de 3 % des capacités
hydroélectriques supplémentaires devant être installées d’ici 2020.
Le
gouvernement
a
donc
développé
une
série
d’actions,
notamment une augmentation des tarifs d’achat et des mesures de soutien
à la recherche et à l’innovation à travers les Investissements d’Avenir.
Les objectifs à 2020 pour l’Outre-mer étaient néanmoins
ambitieux. Ils prévoyaient en effet 30 % d'énergies renouvelables dans la
consommation de Mayotte et 50 % dans les autres collectivités locales
d'outre-mer. La géothermie devait largement contribuer à cet objectif, en
particulier dans les îles volcaniques des Antilles et de La Réunion.
La situation concrète en est toutefois très éloignée. En effet, les
moyens de l’État mobilisés pour la géothermie ont été essentiellement
concentrés sur la seule installation de production d’électricité d'origine
géothermique située en Guadeloupe au lieu-dit Bouillante qui a connu de
multiples déboires. Cette usine est aujourd’hui exploitée par le bureau de
recherches géologiques et minières (BRGM), dont ce n’est pas le métier.
Le gouvernement souhaite en confier l’exploitation à un industriel, mais
les besoins en investissement de 138 M€ ont dissuadé jusqu’ici les
investisseurs, dont EDF.
Finalement,
l’usine
de
Bouillante
produit
aujourd’hui
de
l’électricité mais les interruptions d’activité pour panne ou grève comme
les choix technologiques conduisent à renchérir les coûts de production.
Ces derniers n’ont pas été communiqués à la Cour.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
69
Ainsi, après des années d’activités géothermiques en Guadeloupe
et alors que la production d'électricité géothermique se développe dans le
monde, les industriels français de la filière ne disposent d'aucune
référence sur leur propre marché et aucun autre projet n’a pu être
développé
94
.
Soultz-Sous-Forêts: électricité géothermique, recherche et
fracturation hydraulique
L'unique unité de production d'électricité géothermique en métropole
est située à Soultz-Sous-Forêts (Bas-Rhin en Alsace). La chaleur géothermale
est extraite d’une eau pompée à 5000 mètres de profondeur à plus de 200 °C
après fracturation hydraulique. Cette dernière est exploitée en surface pour
produire de l'électricité avant d’être réinjectée.
L’installation est un centre de recherche sur les techniques
d’exploitation de la géothermie profonde fonctionnant depuis 1986. Une
unité de production de 1,5 MW a été mise en service en 2008. L'étape,
désormais envisagée, consiste à développer un prototype à dimension
industrielle dans le cadre des Investissements d'avenir. Ces travaux n'ont de
sens que s'ils peuvent déboucher sur un mode de production d'électricité ou
de chaleur dont les coûts de production seraient acceptables pour la
collectivité. Ces coûts n’ont pu être produits à la Cour, malgré ses demandes.
En outre, des interrogations demeurent sur la soutenabilité de la
technique de fracturation hydraulique utilisée au regard de ses impacts
possibles sur l’environnement
95
.
D - Un manque de contrôle
1 -
Des dérives observées dans le solaire photovoltaïque
Le système de l’obligation d’achat relève d’une logique de
« guichet ouvert » dans lequel toute personne remplissant les conditions
(sur une base déclarative) peut signer un contrat d’achat avec EDF ou une
entreprise locale de distribution.
94
La Martinique présente pourtant un profil volcanique aussi favorable que la
Guadeloupe. La situation n’y a pas dépassé le stade des études et, au mieux, des
forages d’exploration. Quant à La Réunion, le potentiel serait très réduit en raison de
la localisation des sources géothermiques au coeur du parc naturel classé au
patrimoine mondial de l’UNESCO.
95
Les techniques de fracturation hydraulique sont différentes de celles mises en
oeuvre pour l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels.
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COUR DES COMPTES
L’enjeu du contrôle est donc essentiel compte tenu du poids du
solaire photovoltaïque dans le montant de la contribution au service
public de l’électricité (CSPE) (estimé à 35,8 % par la CRE
96
et 41 % des
charges au titre de 2013 soit 2,1 Md€), d’autant plus que plusieurs cas de
fraudes sont d’ores et déjà constatés par la CRE. Ainsi peuvent être
constatées de fausses déclarations pour bénéficier abusivement de la
prime de l’intégré au bâti, des découpages en tranches d’une installation
afin de bénéficier d’un tarif plus élevé que si l’on considérait l’installation
dans son ensemble et un gonflement de la production annuelle déclarée.
Un quatrième cas, qui ne constitue pas une fraude à proprement
parler mais plutôt un abus du système, consiste à réaliser une installation
tout à fait conforme, mais sur le toit d’un bâtiment agricole de
circonstance, plus ou moins surdimensionné par rapport aux besoins de
stockage de l’exploitation.
Or, le dispositif réglementaire en vigueur ne prévoit aucun
dispositif de contrôle des installations a priori, mais seulement une
possibilité de contrôle qui est donnée à l’acheteur, EDF essentiellement,
si la production annuelle déclarée par le producteur dépasse 90 % d’un
plafond théorique. De fait, cette possibilité n’est quasiment pas utilisée.
Les agents d’EDF n’y ont pas véritablement vocation, d’autant plus que
les contrôles doivent être faits sur des propriétés privées et, pour ce qui
concerne les installations sur toiture, dans des conditions particulières.
Sur place, au-delà de l’instruction classique du permis de construire, les
services déconcentrés de l’État n’ont pas non plus les moyens, ni
juridiques ni humains, de réaliser des vérifications. Enfin, les critères
permettant de caractériser une installation (intégré au bâti, intégré
simplifié ou simple surimposition sur un toit existant) nécessitent des
compétences techniques qui ne sont guère réunies en l’espèce. Seule la
CRE effectue quelques contrôles, très sommairement, compte tenu de ses
moyens et de ses missions principales.
Dans sa réponse à la Cour, le ministre indique que des contrôles
systématiques ont d’ores et déjà été introduits dans le cahier des charges
du dernier appel d’offres solaire.
2 -
Les difficultés à contrôler la provenance de la biomasse
En raison des tensions créées sur les ressources locales en
biomasse, les projets doivent prévoir des plans d’approvisionnement
viables sur lesquels les préfets de région donnent leur avis.
96
CRE, rapport d’activité 2011.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
71
Or, les services déconcentrés ne peuvent pratiquement pas
contrôler la provenance de la ressource en raison de l’organisation de la
filière mais aussi des volumes concernés. Il peut s’ensuivre des difficultés
locales d’approvisionnement constatées en phase d’exploitation.
E - Un rôle mal défini pour les collectivités locales
L’État a développé deux instruments principaux pour associer les
collectivités locales au développement des énergies renouvelables : les
schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE) et les
plans climats énergie territoriaux. Si la démarche va dans le bons sens,
elle est restée limitée en raison de la portée insuffisante des premiers et de
la relative implication des acteurs locaux dans les seconds.
1 -
Les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie
(SRCAE)
L’article L. 222-1 du code de l’environnement, tel que modifié par
la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, prévoit que le préfet de région et le
président du conseil régional élaborent conjointement un projet de
schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie
97
. Il fixe, à l'échelon du
territoire régional et à l'horizon 2020 et 2050, les orientations permettant
d'atténuer les effets du changement climatique et d’atteindre l’objectif
national de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre
1990 et 2050. Ces schémas comprennent un volet éolien définissant les
parties du territoire favorables au développement de cette forme
d’énergie.
Si ces schémas ont permis d’établir un état des lieux et de
sensibiliser les acteurs locaux, ils restent en pratique d’une portée limitée
pour assurer le développement des énergies renouvelables.
D’une part, en effet, le processus a pris plus de temps que prévu.
Initialement fixée au 11 juillet 2011, l’échéance pour l’achèvement des
schémas a été repoussée à la fin 2011 et le décret d’application n’a été
signé que le 16 juin 2011. Début 2013, seuls quatorze schémas sur vingt-
six ont donc été achevés. D’autre part, l’absence de méthodologie
commune, malgré la diffusion d’un guide par le ministère chargé de
l’environnement
98
, rendra difficile l’agrégation nationale des schémas.
97
Le décret n° 2011-678 du 16 juin 2011 précise le contenu et la démarche
d’élaboration des schémas.
98
Instruction du Gouvernement du 29 juillet 2011 relative aux schémas régionaux du
climat, de l’air et de l’énergie.
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72
COUR DES COMPTES
Par ailleurs, l’exercice n’a pas su trouver de point d’équilibre entre
respect des objectifs nationaux et respect du principe de libre
administration des collectivités locales. Si l’article L. 222-1 du code de
l’environnement dispose que les schémas régionaux doivent être établis
« conformément aux objectifs issus de la législation européenne relative à
l'énergie et au climat », c'est-à-dire, conformément aux 23 % nationaux,
aucun objectif régional ne pouvait être fixé par le niveau central en raison
de la méconnaissance des potentiels régionaux et du souci de ne pas
court-circuiter la discussion locale
99
.
Enfin, alors que ces schémas doivent notamment servir de base aux
estimations des besoins d’investissement sur les réseaux électriques, dans
le cadre des schémas régionaux de raccordement, ils ne se révèlent
souvent pas assez précis pour cela.
2 -
Les plans climats-énergie territoriaux (PCET)
Parallèlement aux schémas régionaux du climat, de l'air et de
l'énergie, les régions, les départements, les communes et leurs
groupements de plus de 50 000 habitants devaient avoir adopté un « plan
climat-énergie territorial » pour le 31 décembre 2012 qui définit, dans le
cadre des orientations du schéma régional du climat, de l’air et de
l’énergie (SRCAE), des mesures opérationnelles pour assurer la maîtrise
de l’énergie et développer les énergies renouvelables. Fin octobre 2012,
les plans n’avaient été adoptés que par 6,6 % des collectivités concernées
(15 % si l’on prend en compte les plans adoptés sur la base de textes plus
anciens) en raison notamment du retard pris dans l’élaboration du décret
d’application
100
, intervenu plus d’un an et demi après l’adoption des
dispositions législatives
101
.
99
Les difficultés des énergies renouvelables sont souvent liées, notamment pour les
éoliennes, à l’acceptation des populations.
100
Décret n° 2011-829 du 11 juillet 2011 relatif au bilan des émissions de gaz à effet
de serre et au plan climat-énergie territorial.
101
Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 - art. 17.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
73
La place des collectivités locales chez nos principaux partenaires
européens en matière d’énergie renouvelable
Certains pays européens ont mis en place une organisation plus ou moins
décentralisée du système électrique. Plusieurs ont accordé des compétences en matière
d’énergie aux collectivités territoriales, en général les régions.
Du fait de sa structure fédérale, l’Allemagne dispose sans doute à cet égard,
du système électrique le moins centralisé, puisque les gouvernements des
Länder
sont
chargés de mettre en oeuvre la politique de développement des énergies renouvelables
sur le plan régional.
En Espagne, les dix-sept communautés autonomes (régions) ont, au sein de
leurs gouvernements respectifs (souvent dans le cadre d’une Agence régionale de
l’énergie), un responsable de l’énergie, notamment pour la mise en oeuvre des plans
nationaux et régionaux en matière d’économies d’énergie et de développement des
énergies renouvelables.
En Italie également, les autorités locales, régions et provinces, ont un rôle
important dans la mise en oeuvre de la politique énergétique italienne.
V
-
De fortes contraintes physiques
A - Un réseau à adapter
Le système électrique est conçu pour acheminer l’électricité
produite par les centrales de production jusqu’au consommateur final.
Elle est transportée par des lignes à haute tension qui constituent le réseau
de transport, jusqu’aux réseaux de distribution (réseaux moyenne et basse
tension) qui desservent les clients.
L’électricité ne pouvant se stocker facilement, les gestionnaires de
réseau doivent en permanence ajuster le niveau de production à celui de
consommation. Afin d’assurer l’équilibre entre l’offre et la demande, les
groupes de production sont appelés dans l’ordre croissant de leur coût de
production (interclassement ou «
merit order
»), jusqu’à satisfaction de la
demande. Ainsi, en cas de pic de consommation, si les moyens en base
102
102
La demande régulière et constante d’électricité correspond à la demande de base.
Les consommations au-delà de la cette demande de base constitue la demande de
pointe. Les moyens de production en base sont ceux qui répondent à cette demande de
base. Dans un parc de production optimal, les moyens à forts coûts fixes et faibles
coûts variables (nucléaire, hydraulique « au cours de l’eau ») couvrent la base. Les
moyens de production à faibles coûts fixes mais à fort coût variable (turbines à
combustion) interviennent quelques centaines d’heures par an lors des pics de
demande. Entre les deux, des moyens en « semi-base » (gaz, charbon, nucléaire)
couvrent les besoins de quelques milliers d’heures par an.
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74
COUR DES COMPTES
ne suffisent pas, le gestionnaire, RTE, fait appel, dans l’ordre, à la
production hydraulique des lacs de barrage, puis aux centrales de
cogénération, puis aux centrales à charbon, les moyens les plus chers
étant les groupes au fuel et au gaz.
L’émergence
des
installations
de
production
d’énergies
renouvelables dans le
mix
électrique a des conséquences sur cet équilibre.
Bénéficiant d’une garantie d’achat et de raccordement au réseau, elles
écoulent leur production quel que soit l’état de la demande. Les
gestionnaires de réseau doivent donc assurer la gestion de leur
intermittence. En cas d’insuffisance de production, ils doivent faire appel
à des capacités de soutien (
back up
) ou à des importations et, en cas
d’excédent, ils doivent arrêter la production d’autres groupes ou évacuer
l’électricité sur des réseaux voisins. Par conséquent, l’arrivée des énergies
renouvelables
sur
le
réseau
bouleverse
l’ordre
traditionnel
de
l’interclassement.
B - Une intermittence à gérer
Plusieurs filières d’énergies renouvelables (solaire, éolienne,
marémotrice et hydraulique « au fil de l’eau ») présentent la
caractéristique
d’être
intermittentes :
les
périodes
de
production
dépendent de la disponibilité des productibles (vent, soleil notamment) et
ne correspondent donc pas toujours aux périodes de consommation.
Cette déconnexion entre production et consommation peut se
traduire par des variations de tension et de fréquence sur les réseaux de
transport et de distribution et en endommager les composantes. Dans le
cas de l’éolien, les variations peuvent d’ailleurs être très brutales en cas
d’arrêt forcé
103
et du fait des concentrations d’éoliennes en parcs.
Faute de stockage, la gestion de l’intermittence est donc
indispensable.
1 -
Un système électrique historiquement centralisé
Le système électrique français, à l’instar de celui des pays
industrialisés, s’est développé selon une logique centralisée. De grosses
unités de production, nucléaires ou localisées à proximité de la ressource
primaire (bassins hydraulique, terminal méthanier, etc.), sont connectées
aux réseaux de transport à des niveaux de tension élevés pour délivrer
leur
production
aux
centres
de
consommation.
Il
offre
aux
103
En cas de vent trop fort, les systèmes de sécurité stoppent les éoliennes et la
production passe brutalement du maximum à zéro.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
75
consommateurs la garantie de fourniture d’électricité de qualité constante
sans considération de la disponibilité locale d’une quelconque production.
Or, le développement des installations à base d’énergies renouvelables
répond à une logique plus décentralisée et pose ainsi des difficultés
d’adaptation des réseaux.
a)
Les raccordements au réseau de moyenne tension
Les unités de production concernées, l’éolien et un tiers du
photovoltaïque, sont de tailles modestes mais sont assemblées en
« fermes » dépassant souvent plusieurs dizaines de mégawatt. Elles
nécessitent donc, en général, des ouvrages de raccordement au réseau
affectés à leur usage exclusif et leur production est en général consommée
ailleurs.
b)
Les raccordements au réseau de basse tension
Les installations raccordées en basse tension sont aujourd’hui
presque exclusivement de nature photovoltaïque. La production des
installations domestiques de faible puissance (3 kW) qui représentent un
tiers de la production aujourd’hui, peut, dès lors qu’aucun effet de grappe
n’est constaté, être absorbée sur place sans nécessiter de renforcement de
réseau au-delà du raccordement lui-même.
Les unités de plus forte puissance (un tiers de la production
également) posent plus de difficultés. Lorsque leur production est
consommée sur place (cas d’une ombrière de parking dans une zone
commerciale pendant les jours ouvrables), ce qui est assez rare, elles ne
posent pas de difficultés particulières. Elles constituent cependant en
général de simples centres de production d’électricité sans lien avec un
centre de consommation local (ex. hangar agricole isolé). Elles ne
présentent alors aucun avantage pour le système électrique. En effet, trop
peu importantes pour bénéficier d’économies d’échelle, elles nécessitent
quand même des adaptations importantes et le plus souvent des créations
d’éléments de réseaux.
c)
Des effets possibles sur le réseau de transport
Le développement d’une production en basse tension sur un
ensemble de sites de petite taille, même dispersés, peut nécessiter, à partir
d’un certain point, des besoins de renforcements sur le réseau de transport
lui-même.
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76
COUR DES COMPTES
Les échanges électriques franco-allemands mesurés en 2011 sont, à
ce titre, particulièrement illustratifs. Lorsque les productions éoliennes et
photovoltaïques allemandes doivent être évacuées, elles font appel aux
infrastructures du réseau de transport et aux interconnexions. Ainsi, les
importations françaises d’électricité correspondent exactement aux pics
de productions de ces deux énergies.
Graphique n° 11 : évolution du solde des échanges d’électricité avec
l’Allemagne et de sa production éolienne et photovoltaïque
d)
La sécurité de l’exploitation
L'exploitant d'un réseau est légalement responsable de la sécurité
de son exploitation sur les personnes et les biens. Il doit s'assurer en
particulier qu'en cas de défaut, le réseau soit automatiquement mis hors
tension. Pour cela, les distributeurs ont déployé depuis des années des
automatismes de protection, qui, d'une façon plus complexe, remplissent
la fonction des disjoncteurs et interrupteurs automatiques de l’amont
(haute tension) vers l’aval (basse tension). Avec le développement de
capacités de production décentralisées et la circulation de l’électricité de
l’aval vers l’amont, ces automatismes ne suffisent plus. Les dispositifs de
sécurité doivent donc également être révisés.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
77
2 -
Une gestion de l’intermittence à mettre au point
Certains dispositifs existent aujourd’hui pour faciliter l’intégration
des énergies renouvelables sur le réseau électrique, mais ils ne sont pas
toujours opérationnels et restent coûteux.
a)
Les installations de back-up
Quand la production des énergies intermittentes est insuffisante,
les gestionnaires de réseaux doivent pouvoir compter sur des unités de
production, dites de
back-up
, pouvant démarrer quasi-instantanément ou
avec un court préavis. Aujourd’hui, seules les centrales hydrauliques avec
stockage ou les centrales au fioul sont en mesure de répondre à la
demande (« réserves à chaud » c'est-à-dire avec un court préavis). Les
centrales au charbon ou au gaz peuvent, quant à elles, intervenir en
quelques heures (« réserves à froid »). Ces moyens font appel, pour la
plupart, à des énergies fossiles, émettrices de CO
2
.
Dans son bilan prévisionnel 2012, le réseau de transport
d’électricité (RTE) prévoit à l’horizon 2030 dans son scénario de
référence, 16 GW de moyens de pointe (fioul, TAC et effacements de
consommation),
contre
10,2
GW
en
2012.
Pour
autant,
selon
RTE, aucune étude sérieuse sur les besoins de développement des
réserves « à chaud » ou « à froid » n’a encore été menée permettant
d’estimer, pour France, le coût des unités de
back-up
induites par le
développement des énergies renouvelables.
b)
Le stockage de l'énergie
En permettant d'absorber les excédents de production pour les
restituer dans les périodes de forte consommation, le stockage peut
apporter une contribution à la gestion technique des problèmes liés à
l'intermittence. Il peut également être un outil d'optimisation économique
en permettant des arbitrages entre des périodes présentant des coûts
différenciés pour les opérateurs opérant sur le marché.
Les techniques de stockage sont très variées et peuvent se diviser
en cinq grandes familles
104
:
-
l’énergie
mécanique
potentielle
(barrage
hydroélectrique,
Station de Transfert d’Energie par Pompage ou STEP, STEP en
façade maritime, stockage d’énergie par air comprimé ;
-
l’énergie mécanique cinétique (volants d’inertie) ;
104
Source : rapport énergies 2050.
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78
COUR DES COMPTES
-
l’énergie électrochimique (piles, batteries, condensateurs,
vecteur hydrogène, supercapacités) ;
-
l’énergie magnétique (stockage d’énergie magnétique par
bobine supraconductrice) ;
-
l’énergie thermique (chaleur latente ou sensible).
En
considérant
le
coût
d’investissement
des
différentes
technologies, rapporté à leur capacité de stockage (€/kWh) en 2011, les
stockages par eau (STEP) et air comprimé en caverne apparaissent les
moins coûteux (moins de 200 €/KWh alors que les batteries classiques
ont un coût estimé entre 500 et 1 500 €/KWh et les batteries Nickel Métal
Hybride (NiMH) par exemple, atteignent entre 400 et 1500 €/KWh).
c)
Les « réseaux intelligents » ou « smart grids »
La gestion des tensions entre offre et demande peut également
passer par une modulation de la consommation, qui peut aller de sa
programmation à des moments favorables, jusqu’à son effacement avec
ou sans substitution par d’autres énergies (ex. chauffage bois, etc.).
Plusieurs mécanismes incitatifs ont depuis longtemps été mis en place
(options tarifaires heures creuses/heures pleines
105
, effacement jour de
pointe (EJP), TEMPO, contrats bilatéraux entre consommateur et
fournisseur). L’ajustement peut aussi se faire en intervenant sur la
production d’électricité renouvelable, dont les variations peuvent être
brutales.
Or, les responsables de réseaux ne disposent pas aujourd’hui de
dispositifs
permettant
de
commander
les
installations
d’énergies
renouvelables.
Les
réseaux
intelligents
doivent
donc
permettre
d’améliorer la gestion des flux en agissant à la fois sur la consommation
et sur la production. Ils reposent sur le principe de la mise en réseau
d’outils relevant des nouvelles technologies de l’information et de la
communication (capteurs, calculateurs, etc.), capables de communiquer
entre eux en permanence.
105
Selon RTE, la réduction de consommation des consommateurs raccordés aux
réseaux de distribution générée par les options EJP et Tempo s’élève globalement à
2 800 MW (effet complémentaire de réduction des pertes inclus). Les clauses
d’effacement contractuel hors tarifs réglementés, qui concernent aujourd’hui surtout
des établissements industriels très gros consommateurs offrent un potentiel
d’effacements supplémentaires estimé à 1 000 MW. Enfin, le dernier appel d’offres
lancé par RTE sur le mécanisme d’ajustement, lancé fin 2010, a permis de
contractualiser des offres pour un volume total de 230 MW.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
79
Ces outils sont encore en phase expérimentale. Quatre appels à
manifestation d’intérêt ont été lancés par l’ADEME, financés dans le
cadre des investissements d’avenir. À ce jour, seize projets ont été retenus
pour un engagement financier public de 88 M€.
d)
L’interconnexion des réseaux
L’interconnexion
des
réseaux
renforce
la
garantie
d’approvisionnement et permet d’évacuer l’excédent de production. À cet
égard, elle facilite l’intégration des énergies renouvelables. Elle rend
aussi les États plus solidaires les uns des autres.
Au niveau européen, le besoin en lignes supplémentaires très haute
tension (THT) pour accueillir les énergies renouvelables est estimé à
20 000 km d'ici 2020. En ce qui concerne la France, plusieurs projets de
création, renforcement ou mise à niveau d’interconnexions
106
sont à
l’étude,
mais
elles
ne
sont
toutefois
pas
liées
uniquement
à
l’augmentation de la part d’énergies renouvelables dans le
mix
énergétique.
Outre leur financement, qui repose
in fine
sur le consommateur,
ces
besoins
de
lignes
nouvelles
se
heurtent
à
des
difficultés
d’acceptabilité sociale. RTE estime ainsi entre 8 et 10 ans la durée
moyenne nécessaire pour construire une ligne à haute tension, dès lors
que la décision est prise. L’anticipation des besoins de développement
d’infrastructures le plus tôt possible est donc nécessaire.
3 -
Des difficultés maitrisées jusqu’à présent
Pour les gestionnaires de réseaux, responsables de l’équilibre entre
la production et la consommation, la gestion de l’intermittence ne pose
pas encore de difficultés majeures
107
. En effet, les énergies concernées
108
ne représentent encore qu’environ 8 % de la production électrique
française et la réalisation des objectifs fixés pour 2020, portant la part de
la production des énergies intermittentes à 10,3 %, ne devrait pas
modifier la situation. En revanche, la gestion des pointes de
consommation pourrait être plus difficile.
106
France avec Espagne, Italie et Belgique.
107
Dans certains cas, un seuil de « tolérance » a quand même été fixé pour
l’intégration d’énergies renouvelables dans le réseau, par exemple 30 % dans les
zones dites interconnectées.
108
Énergies éoliennes, solaires et hydraulique « au fil de l’eau », ce dernier dépendant
des variations des débits des cours d’eau.
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COUR DES COMPTES
Par ailleurs, en France, la diversité du régime des vents et
d’ensoleillement permet souvent de compenser la faiblesse de la
ressource dans une zone par sa disponibilité dans une autre. Cette
complémentarité est également saisonnière. L’hiver favorise plutôt la
production éolienne, le printemps et l’été la production photovoltaïque et
le printemps la production hydraulique.
En revanche sur les périodes de froid exceptionnellement intenses,
il subsiste des doutes sur la disponibilité réelle de la puissance éolienne.
RTE a toutefois constaté que la production d’énergie éolienne n’est pas
plus faible durant ces périodes, qui correspondent à des pics de
consommation, avec un facteur de charge moyen national proche de 25 %
(contre 23 % en temps normal) avec cependant une atténuation nettement
plus marquée dans la moitié Nord de la France. Le graphique ci-dessous
illustre les facteurs de charge enregistrés lors de la vague de froid de
février 2012 et souligne l’existence de plusieurs zones de vents en France
ce qui peut favoriser l’insertion éolienne dans le système électrique
français.
Graphique n° 12 : le foisonnement des vents entre le Nord et le Sud
au mois de février 2012
Source : réseau de transport d’électricité (RTE)
Enfin, Météo France développe des outils de prévision à une
journée qui laissent au gestionnaire du réseau RTE, responsable de
l’équilibre entre la production et la consommation, un délai suffisant,
selon le gestionnaire, pour mobiliser les moyens de production
nécessaires.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
81
C - Un
potentiel parfois limité
Considérées généralement comme illimitées, les sources d’énergies
renouvelables, à l’instar de la biomasse, de l’hydroélectricité ou l’énergie
solaire, peuvent néanmoins avoir une disponibilité limitée, être difficiles à
évaluer ou du moins soumises à la loi des rendements décroissants, les
gisements les plus productibles étant en général exploités en premier.
Enfin, elles peuvent parfois être mal adaptées au profil de consommation.
1 -
La biomasse : une ressource difficile à mobiliser et à évaluer
L’exploitation de la forêt est la principale source de biomasse
utilisée à des fins énergétiques. Celle-ci couvre 16,1 millions d’hectares
en France métropolitaine dont 67 % exploitables
109
. Elle fait pourtant
l’objet d’une sous-exploitation, constatée depuis trente ans de façon
récurrente
110
et consécutive aux difficultés d’organiser une filière bois
efficace
111
.
Le potentiel réellement disponible pour un usage énergétique est
très difficile à évaluer même si, selon les statistiques officielles, il serait
suffisant pour atteindre les objectifs de production d’énergies à partir de
sources biomasse à l’horizon 2020.
Enfin, le bois énergie ne représente qu’environ 7 % de la valeur
produite par la filière bois en France
112
. La forêt reste, en effet,
prioritairement exploitée pour alimenter les filières du bois d’oeuvre
(78 %) et d’industrie (15 %) et peut donc faire l’objet de conflits d’usage.
109
Selon l’Inventaire forestier national, cette proportion de la surface forestière est
considérée comme facile ou moyennement facile à exploiter. Seules la Corse,
Provence-Alpes-Côtes d’Azur (PACA) et Rhône-Alpes ont plus de 10 % de leurs
forêts non destinés à la production de bois (forêt de protection en montagne ou zones
forestières très difficiles d’accès).
110
Le premier rapport sur le sujet date de 1978 (rapport Meo-Bétolaud). Il a été suivi
par les rapports Duroure en 1982, Bianco en 1998, Juillot en 2003 puis Puech en
2009.
111
La forêt française est extrêmement morcelée. Les parcelles privées en représentent
75 %, dont le quart d’une surface inférieure à quatre hectares; la forêt domaniale 10 %
et les autres forêts publiques 15 %. Les propriétaires privés sont traditionnellement
peu enclins à exploiter leurs parcelles, soit pour des raisons des conditions
économiques, soit pour des raisons culturelles (utilisation pour la chasse notamment).
112
Sur la base de l’activité des entreprises de plus de vingt salariés (hors commerce),
soit 75 % des effectifs et 83 % du chiffre d’affaires de la filière.
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82
COUR DES COMPTES
2 -
L’hydroélectricité : un potentiel limité
Les dernières évaluations publiques du potentiel hydroélectrique
inexploité datent de 2006
113
et le situaient entre 25 et 30 TWh. Une étude
de l’Union Française de l’électricité l’estimait pour sa part à 10,6 TWh en
2011, dont près de 90 % produits par de nouveaux ouvrages.
De nombreux paramètres n’ont cependant pas été pris en compte,
notamment la faisabilité économique, l’amélioration technique des
centrales existantes et surtout la loi sur l’eau et les milieux aquatiques
(LEMA) de 2006, dont les effets ne pourront être réellement mesurés
avant janvier 2014
114
. Parallèlement, l’augmentation des débits réservés
115
sur cours d’eau pourrait réduire la production actuelle de 2 TWh d’ici
2020.
Après révision, le potentiel hydroélectrique théorique restant à
exploiter atteindrait donc seulement 2,5 TWh par an
116
.
3 -
L’énergie solaire : un meilleur rendement dans les régions du
Sud
La production solaire photovoltaïque, fortement dépendante des
conditions d’ensoleillement, n’est que partiellement adaptée aux courbes
de consommations de l’électricité en métropole. En été, la production est
corrélée à la courbe de consommation lors des pics méridiens mais ne
l’est plus lors du pic de dix-neuf heures. En hiver, avec un ensoleillement
six à sept fois inférieur, la production est faible le matin et peut être nulle
le soir, partiellement en décalage, là encore, avec la consommation.
Par ailleurs, les technologies photovoltaïques à concentration, non
matures, et thermodynamiques
117
sont prometteuses mais nécessitent un
fort ensoleillement qui n’est pas disponible partout.
113
Rapport sur
les perspectives de développement de la production hydroélectrique en
France de 2006
- DAMBRINE Fabrice - Ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie ; ADEME et agences de l’eau.
114
Date de mise en oeuvre des dispositions de la loi sur le classement des cours d’eau.
115
Article L. 214-18 du code de l'environnement - Tout ouvrage transversal dans un
cours d’eau, notamment les 2 000 ouvrages dévolus à la production hydroélectrique,
doit laisser à l’aval de ce cours d’eau un
« débit minimal garantissant en permanence
la vie, la circulation et la reproduction des espèces »
présentes.
116
Évaluation de l’UFE d’octobre 2012.
117
Elles permettent de convertir le rayonnement solaire direct en chaleur utilisée
directement ou dans une centrale thermique pour produire de l’électricité.
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UNE CONJONCTION DE DIFFICULTÉS
83
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
La
politique de développement des énergies renouvelables peine à
maintenir la trajectoire fixée dans le plan national d’action 2009 – 2011
et destinée à atteindre les objectifs que la France s’est fixés pour 2020.
Cette situation s’explique par les spécificités propres aux énergies
renouvelables, par des difficultés de mise en oeuvre de la politique, ainsi
que par un certain nombre de limites « physiques ».
La production d’énergie à base de sources renouvelables se heurte
encore à des coûts de production élevés, notamment en regard du prix de
l’énergie. Même si les variations peuvent être importantes d’une filière à
l’autre et au sein même d’une filière, les pouvoirs publics doivent
soutenir le développement des énergies renouvelables par des dispositifs
financiers (fiscalité, garantie d’achat, subventions à l’investissement) afin
de rentabiliser leur production. Or, la mise en oeuvre de ces dispositifs de
soutien est complexe et, lorsqu’ils sont évalués, d’efficacité variable.
Sur le plan réglementaire, les objectifs parfois contradictoires des
politiques de l’énergie, de la protection de l’environnement et de
l’urbanisme
compliquent
et
fragilisent
le
droit
encadrant
le
développement des énergies renouvelables, ce qui favorise les contentieux
et freine les projets.
L’État n’a pas su adapter son organisation, ce qui nuit à la
visibilité et au pilotage d’ensemble. Ce manque d’organisation est
particulièrement notable en ce qui concerne les dispositifs de contrôle,
alors que des cas de fraude au système de rachat ont d’ores et déjà été
constatés dans la filière solaire photovoltaïque.
Enfin, le développement des énergies renouvelables se heurte à
plusieurs limites physiques, dont l’organisation actuelle du système
électrique, mal adapté pour accueillir une part importante de sources
intermittentes, même si aucune difficulté majeure n’a été constatée
jusqu’ici. De même, la disponibilité des ressources reste limitée pour
certaines filières.
Compte tenu de ces difficultés, il convient d’évaluer plus
précisément les impacts de cette politique afin d’apporter, le cas échéant
les ajustements qui s’imposent.
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84
COUR DES COMPTES
En conséquence, la Cour émet les recommandations suivantes :
1.
mettre en place un dispositif centralisé de suivi statistique
permettant de donner toute la visibilité requise pour éclairer
les décisions, notamment en matière de connaissance des coûts
de production par filière, des emplois et des marchés ;
2.
simplifier le régime juridique applicable à la production
d’énergies renouvelables (géothermie, éolien terrestre) ;
3.
mettre en oeuvre une planification et une cartographie des
énergies renouvelables en tenant compte des contraintes de
raccordement aux réseaux électriques ;
4.
réserver les appels d’offres aux filières les plus en retard dans
la réalisation de leurs objectifs de capacité et aux installations
qui ne bénéficient pas d’un tarif d’achat fixé par arrêté, afin
d’éviter les effets d’aubaine
;
5.
organiser un dispositif de contrôle efficace des installations
bénéficiant d’un soutien public, notamment dans les filières
solaires et biomasse.
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Chapitre III
Le besoin de choix de long terme
soutenables
À l’heure où le Gouvernement recueille les conclusions du débat
sur la transition énergétique, la Cour souhaite appeler l’attention sur le
coût pour l’ensemble de la collectivité du soutien au développement des
énergies nouvelles. Ce coût doit être d’abord apprécié au regard du
bénéfice considérable que représentent une moindre émission de carbone
pour l’environnement et une plus grande indépendance énergétique pour
notre pays. Par ailleurs, les coûts doivent être également mesurés à l’aune
de l’impact de cette politique sur le marché de l’électricité, sur la
construction de filières industrielles et sur l’emploi.
Une telle politique ne peut donc que s’inscrire dans le long terme.
Afin d’en limiter la charge, et de faciliter les arbitrages nécessaires, dans
une période où l’accent doit être mis avant tout sur les économies
budgétaires, et sur la compétitivité de notre économie, cette politique doit
faire une place au marché, afin de limiter les risques de distorsion et les
effets de rente, et valoriser à son juste prix l’ensemble des externalités
induites, qui doivent être justement réparties entre les différentes parties
prenantes, producteurs et consommateurs.
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86
COUR DES COMPTES
I
-
Les coûts financiers pour la collectivité
A - Le coût des mesures de soutien
La charge du soutien aux énergies renouvelables est supportée par
la collectivité. Les mesures fiscales, les subventions à l’investissement,
les aides à la recherche et au développement le sont par les contribuables
alors que la compensation de la charge liée à l’obligation d’achat de
l’électricité et une partie des investissements sur les réseaux est payée
directement par les consommateurs sur leurs factures d’électricité.
1 -
Le financement par l’impôt
Le crédit d’impôt développement durable (CIDD) et la TVA à taux
réduit pour les logements anciens et les réseaux de chaleur urbains
118
,
constituent les outils de soutien au développement des énergies
renouvelables les plus coûteux, avec un coût cumulé de 9,1 Md€ entre
2005 et 2011. Le tableau suivant met en évidence la part prépondérante
du crédit d’impôt développement durable dans ce cumul.
118
Réseaux utilisant plus de 50 % d’énergies renouvelables. Cette disposition a été
abrogée à partir du 1
er
janvier 2012.
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LE BESOIN DE CHOIX DE LONG TERME SOUTENABLES
87
Tableau n° 9 : coût des principaux dispositifs fiscaux en faveur des
énergies renouvelables de 2005 à 2011
Cumul
M€
(1)
Coût moyen
annuel M€
Crédit d'impôt développement
durable
7 200
1 029
TVA à taux réduit pour les
travaux dans les logements de
plus de deux ans
1 800
(2)
257
TVA à taux réduit pour les
réseaux de chaleur urbains
utilisant
plus
de
50
%
d'énergies renouvelables
120
(3)
20
Source : Rapport à la commission de suivi du plan national d’action 2009 – 2020 et Cour
des comptes- N/A : non apprécié.
(1)
Euros courants.
(2)
Estimation
de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) sur la base des
investissements correspondants aux équipements de production d’énergie renouvelable
dans les logements anciens.
(3)
De 2006 à 2011.
D’autres dispositifs ont été utilisés (éco-prêt à taux zéro,
amortissement dégressif et exceptionnel, exonération des revenus tirés de
la vente d’électricité d’origine solaire, etc.) mais pour des sommes plus
modestes
119
.
2 -
Le financement du fonds chaleur par le budget de l’État
Entre 2009 et 2011, le fonds chaleur a engagé près de 628 M€ en
faveur du soutien aux énergies renouvelables
120
à travers des subventions
d’investissement allouées aux porteurs de projet. Le soutien aux
installations utilisant du bois, d’une part et aux réseaux de chaleur,
d’autre part, a représenté l’essentiel des crédits.
119
Respectivement 25 M€, 4 M€ et 0,5 M€ par an en moyenne ;
200 M€ pour la
période 2009 à 2012.
120
Dans des proportions très inférieures, le fonds chaleur finance également les
actions d’accompagnement (promotion, communication) (9 M€ en 2011) et
l’abondement du fonds de garantie géothermie (6,4 M€ en 2011).
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88
COUR DES COMPTES
Graphique n° 13 : les engagements du fonds chaleur entre 2009 et
2011- M€
Source : Cour des comptes -
Données ADEME Juin 2012
Sur la base des engagements constatés entre 2009 et 2011, le coût
du soutien par le fonds chaleur, rapporté à la tonne équivalent pétrole
(tep) produite, est très disparate entre les filières. Le coût du soutien au
solaire thermique atteint ainsi 10 941 €/TEP, très largement au-delà des
coûts du soutien à la géothermie (1 100 €/tep), la biomasse solide
(485 €/tep) ou encore le biogaz (240 €/tep).
3 -
Le coût de la recherche
Sur la période 2002 à 2011, les dépenses totales de recherche et
développement peuvent être estimées au moins à 1,7 Md€
121
. Elles
incluent des dépenses afférentes à des programmes qui ne concernent pas
spécifiquement les énergies renouvelables mais ont un lien avec leur
développement
122
. Sur la même période, les coûts de recherche
strictement limités aux énergies renouvelables sont estimés à environ
840 M€.
121
Cette estimation est une fourchette basse. En effet, d’une part, de 2002 à 2008, en
raison de l’indisponibilité des données, les dépenses de développement industriel
d’OSEO n’étaient pas incluses ; d’autre part, la variété des modes de financement des
dispositifs ne permet pas un suivi précis des montants alloués sans effectuer de
retraitements et donc impliquer des marges d’erreurs.
Cf.
tableau en annexe n° 10.
122
Notamment les recherches sur des technologies de stockage.
315,9
2,1
51,3
46,9
211,6
Bois
Méthanisation
Géothermie
Solaire
Réseaux de chaleur
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89
Depuis 2009 et sous l’effet de la mise en oeuvre du programme
« Investissements d’avenir », les montants alloués à la recherche et au
développement de la totalité des domaines atteignent annuellement
environ 300 M€, en augmentation continue et, entre 125 M€ en 2010 et
200 M€ en 2012, pour les domaines strictement relatifs aux énergies
renouvelables.
Comparé à d’autres pays, l’effort de recherche français occupe une
place médiane mais la France reste distancée en valeur absolue par
d’autres grandes puissances économiques (Allemagne, Japon, États-
Unis).
Tableau n° 10 : montant des dépenses de R&D de 2002 à 2010 de
plusieurs pays – Euros constants (base €/$ 2010)
En M€ (valeur et taux de
change €/$ de 2010)
Royaume-
Uni
Corée
France
Italie
Allemagne
Japon
États-
Unis
Energies renouvelables
623,1
458,6
628
528,8
994,5
1 636,7
4 476,9
dont solaire
103
201,5
280,3
427
469,3
760,7
1 143
dont éolien
174,5
107
16,8
14,4
176,7
80,3
400,3
Hydrogène
et
piles
à
combustible
73,5
226,8
399,7
98,6
181,8
1 213,9
1 677,4
Autres technologies énergie
et stockage
84,5
261
106,7
643,8
146,9
794,6
1 727,5
Autres
recherches
de
rupture technologique
81,4
74,1
147,6
201,1
727,1
598,4
6 728,8
Total général
1 140
1 329
1 579
1 913,6
2 696,4
5 084,7
16 154
Source : Agence internationale de l’énergie (AIE)
4 -
Le coût des appels d’offre pour la construction d’installations
produisant de l’électricité à base de biomasse
Selon le taux d’actualisation retenu
123
, la fourchette des coûts des
trois appels d’offres de 2006, 2009 et 2010 est très large et se situe entre
117 €/tep et 199 €/tep pour un cumul de charges de contribution au
service public de l’électricité (CSPE) correspondantes qui peut être
évalué à 4,2 Md€ sur la période 2007 à 2020 selon le scénario le plus
favorable
124
.
123
5,1 %, 8 % et 11 % - Valorisation sur 20 ans.
124
Il ne s’agit que d’une estimation. En effet, les installations réalisées d’ici 2020,
d’une durée de 20 ans, continueront de bénéficier des contrats d’achat au-delà de 2020
et, en revanche, d’autres contrats d’achat prendront fin dans cette période. En outre,
avec un taux de réalisation de 30 % des projets, l’estimation des charges de CSPE
globales associées aux installations mises en service entre 2009 et 2020 ne peut être
précisément évaluée.
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5 -
Les charges de service public de l’électricité relatives aux
énergies renouvelables
La part des énergies renouvelables dans la contribution au service
public de l’électricité (CSPE)
125
est élevée et est estimée en 2013 par la
Commission de régulation de l’énergie (CRE) à 3 Md€, soit près de 60 %
de la CSPE totale. Elle a rapidement augmenté depuis 2009.
Tableau n° 11 : charges pour contribution de service public –
énergies renouvelables – métropole et zones non interconnectées
En M€
2009
2010
2011
2012 (1)
2013 (1)
Total CSPE
2 686,5
2 654,5
3 569,2
4 260,8
5 123,5
Dont électricité renouvelable
582,2
758,3
1 464
2 223
3 014,7
Photovoltaïque
66,1
250
901,1
1 527
2 107
Eolien
323,9
350
404,5
500,9
567,2
Hydraulique
117,7
83
65,3
65,1
117
Biomasse
73
75
90,1
123,5
219,4
dont biomasse solide
20,9
30
47,6
82,7
118,8
dont biogaz
25,6
31
37
42,3
85,1
dont incinération d’ordures ménagères
26,5
14
5,5
- 1,5
15,5
Géothermie
1,6
0,3
3,1
6,4
4,1
Source : délibérations de la Commission de régulation de l’énergie (CRE)
(1) Estimations CRE
Les filières solaire, éolienne et biomasse sont les trois filières qui
bénéficient le plus de la CSPE ; pour autant, elles n’ont pas le même
poids dans la production.
125
La contribution au service public de l’électricité (CSPE) vise à compenser, depuis
2003, les charges de service public supportées par les fournisseurs historiques
d’électricité
c'est-à-dire :
les
surcoûts
de
production
dans
les
zones
non
interconnectées (ZNI) dus à la péréquation tarifaire, les coûts dus aux dispositifs
sociaux institués en faveur des personnes en situation de précarité et les surcoûts dus
au soutien à la cogénération et aux énergies renouvelables. Pour une analyse détaillée
du mécanisme de la CSPE, lire, sur son site Internet, le rapport de la Cour des
comptes de juillet 2012 réalisé à la demande de la commission d’enquête du Sénat sur
le coût réel de l’électricité.
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91
Tableau n° 12 : estimation de la part des filières solaire, éolienne et
biomasse dans la CSPE et dans la production d’électricité
renouvelable en 2011
Solaire
Eolien
Biomasse
Montant
CSPE
énergies
renouvelables (M€)
901,1
404,5
90,1
Production (GW/h)
1 803
11 762
4 522
CSPE énergies renouvelables
500 €/MWh
34 €/MWh
20 € MW/h
Part
dans
la
CSPE
énergies
renouvelables
62 %
28 %
6,10 %
Part dans le
mix
électrique à base
d’énergies renouvelables*
2,70 %
15,30 %
6,30 %
Source : Cour des comptes
* Pour la biomasse seule la production électrique est prise en compte
Ainsi, comme le montre le tableau précédent, la filière solaire a,
jusqu’à présent et en dépit de sa contribution modeste à la production
d’électricité, capté une part prépondérante de la CSPE, loin devant la
filière éolienne. En revanche, la biomasse représente une part
relativement limitée si on la compare aux deux autres filières.
L’engagement
de l’État à l’égard d’EDF
Malgré l’augmentation de la charge réelle supportée par les
fournisseurs historiques, le montant de la CSPE n’a pas été réévalué de 2004
à 2010. La dernière valeur arrêtée (4,5 €/MWh en 2005) a, en effet, été
reconduite de façon automatique d’une année sur l’autre. À partir de 2009,
elle n’a pas permis de couvrir l’intégralité des charges supportées par EDF
alors que les autres opérateurs ont été intégralement compensés.
À partir de 2011, sur la base d’une nouvelle disposition légale
126
, le
montant unitaire de la CSPE acquittée par les consommateurs a pu être
augmenté. Il a ainsi été porté à 7,5 €/MWh en 2011, 10,5 €/MWh en 2012 et
13,5 €/MWh en 2013. Ces montants ont encore été insuffisants pour
rembourser la charge effectivement supportée par les fournisseurs.
126
Article L.121-13 du code de l’énergie relatif à la fixation de la contribution unitaire
de CSPE : « Le ministre chargé de l’énergie fixe chaque année ce montant par un
arrêté pris sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie.
L’augmentation du montant de la contribution peut être échelonnée sur un an. À
défaut d’arrêté fixant le montant de la contribution due pour une année donnée avant
le 31 décembre de l’année précédente, le montant proposé par la Commission de
régulation de l’énergie en application de l’alinéa précédent entre en vigueur le
1er janvier, dans la limite toutefois d’une augmentation de 0,003 €/kWh par rapport
au montant applicable avant cette date ».
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Un arriéré de 4,9 Md€ s’est ainsi constitué. Selon les termes d’un
accord conclu début 2013 entre EDF et l’État, il sera compensé avant le
31 décembre 2018 par une augmentation de la CSPE.
Le montant de la CSPE est appelé à augmenter à moyen terme
pour couvrir les arriérés de paiement à l’égard d’EDF mais aussi les
charges nouvelles.
Le niveau de la CSPE constaté à ce jour est la conséquence des
dérives
passées,
notamment
dans
la
filière
photovoltaïque.
Les
conséquences de la bulle de 2009-2010
créée dans cette filière, seront
lissées par la prise en compte des contrats d’achat conclus sous les
nouvelles modalités tarifaires de 2011. La part du solaire photovoltaïque
restera toutefois très élevée au regard de sa participation à la production
d’électricité renouvelable.
Finalement, à l’horizon 2020, le montant de la CSPE nécessaire
pour compenser le surcoût de l’électricité renouvelable devrait atteindre
entre 7 et 8,6 Md€ par an selon la CRE, EDF et la DGEC, soit, entre
45,1 € et 55,4 € par MW/h d’électricité renouvelable, sur la base des
objectifs de production d’électricité prévus en 2020 dans le plan d’action
national (155 TW/h). Pour les consommateurs, cela représente une charge
comprise entre 18,42 €/MWh et 22,63 €/MWh en 2020
127
.
À
qui faire supporter la CSPE ?
L’intégralité
de
la
CSPE
est
aujourd’hui
supportée
par
les
consommateurs d’électricité, au prorata de leur consommation. En 2013,
selon la CRE, la charge de CSPE globale représentait 16 % de la facture
annuelle moyenne TTC d’un client résidentiel
128
.
Les consommateurs d’électricité assurent donc le financement des
énergies renouvelables dont le développement vise, entre autres, à réduire les
émissions de gaz à effet de serre. Or, la production d’électricité en France
aujourd’hui est peu carbonée en raison de la part du nucléaire dans cette
dernière.
Une
réflexion
concernant
l’élargissement
de
l’assiette
de
financement
intégrant la consommation des énergies polluantes pourrait être
envisagée.
127
Estimations DGEC sur la base d’une charge de CSPE pour le soutien des énergies
renouvelables de 7 Md€ et d’une assiette de contribution de 380 TW/h.
128
Source : délibération de la CRE 9 octobre 2012 portant proposition relative aux
charges de service public de l’électricité et à la contribution unitaire pour 2013. Le
montant de CSPE pris en compte est global : énergies renouvelables, cogénération,
péréquation tarifaire et dispositions sociales, et inclut les régularisations de charges
2011 (2,1 Md€ sur 7,2 Md€).
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93
Dans son rapport public annuel de 2011, la Cour formulait déjà une
recommandation visant à réexaminer le principe du financement des charges
de CSPE sur le consommateur d’électricité
129
. Elle n’a pas été appliquée à ce
jour.
6 -
Les coûts complets du soutien aux énergies renouvelables
Selon les estimations effectuées par la Cour, les dépenses
supportées par la collectivité pour le développement des filières
d’énergies renouvelables dans la production d’électricité et de chaleur,
s’élèvent au total à 19,5 Md€ depuis 2005, en incluant les prévisions de la
part
2013
de
la
CSPE
relative
aux
énergies
renouvelables,
particulièrement élevée.
Comme le précise le tableau suivant, la contribution au service
public de l’électricité (CSPE) le crédit d’impôt développement durable
(CIDD) et la TVA à taux réduits pour les travaux d’amélioration des
logements anciens sont les trois sources de coûts les plus élevées pour la
collectivité
130
.
129
Cour des comptes,
Rapport public annuel 2011
. Tome I. La compensation des
charges du service public de l’électricité, p. 279. La documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr
130
L’hydroélectricité présente pour sa part une particularité. L’absence de mise en
concurrence des concessions a pour conséquence la non application de la redevance
instaurée par la loi de finances rectificative pour 2006, avec une perte nette pour les
finances publiques d’autant plus grande que le retard s’accroit. À ce jour et en raison
des prévisions de renouvellement, la perte cumulée pourrait atteindre 350 M€ voire
600 M€ à l’horizon 2020.
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COUR DES COMPTES
Tableau n° 13 :
coût total de la politique de soutien aux énergies
renouvelables pour la période 2005 à 2011
En M€
Soutien aux
énergies
renouvelables
non réparti
Hydraulique
Eolien
Biomasse
Géothermie
Solaire
Total
CSPE
116
391
1 318
265
5
1 226
3 321
CIDD
2 394
1 425
1 476
1 866
7 161
TVA taux réduit pour les
travaux d’amélioration des
logements anciens
1 800
1 800
Recherche et développement
162
16
302
31
274
785
Fonds chaleur
530
51
47
628
CPER
25
1
2
146
13
140
327
TVA taux réduit pour la
construction
de
réseau
d'alimentation
en
énergie
renouvelable
120
120
FEDER
9
1
61
65
136
Programme ADEME Bois–
énergie 2000-2006
29
29
Total
4 617
402
1 338
2 757
1 576
3 617
14 307
Source : Cour des comptes
-La CSPE « toutes énergies » correspond aux montants des années 2005 et 2006 qu’il n’a pas été
possible de ventiler totalement.
-S’agissant des incitations fiscales, seuls le CIDD et la TVA ont été ici retenues en raison du
rapport direct qui a pu être réalisé entre leur coût et
le soutien aux énergies renouvelables, ce qui
n’a pas été le cas pour les autres moyens fiscaux de soutien.
-Le CIDD soutenait également les pompes à chaleur aérothermiques jusqu’en 2008 inclus. Le
montant estimé correspondant a été inscrit dans la colonne « toutes énergies ».
-Seules des dépenses de recherche relatives aux énergies renouvelables et au stockage de
l’énergie ont été ici retenues.
Une mauvaise connaissance du coût du soutien par les collectivités
locales
Les collectivités locales ont la possibilité d’intervenir en faveur des
énergies
renouvelables,
soit
directement,
en
devenant
elles-mêmes
producteurs de chaleur ou d’électricité, soit par des mesures de soutien
variées, telles que des subventions à l’investissement, des prêts et avances. Il
n’existe cependant aucun suivi centralisé des actions menées au niveau local
en faveur des énergies renouvelables, ni de leur coût. Le recensement de
toutes les actions et dépenses publiques des collectivités locales dans ce
domaine n’est pas possible sauf à en faire l’inventaire exhaustif.
Aujourd’hui, seule une estimation du soutien des collectivités locales
est disponible par le suivi des contrats de projet État-régions (près de 200 M€
sur la période 2007 à 2011). Elle n’inclut toutefois pas toutes les dépenses
affectées
aux
énergies
renouvelables
dont
certaines
ne
sont
pas
contractualisées.
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95
Sur la période 2005 à 2011, le soutien aux filières renouvelables a
connu une augmentation progressive et significative, essentiellement en
raison de la hausse de la CSPE liée aux énergies renouvelables. Il dépasse
14 Md€ au total.
Tableau n° 14 : évolution du coût des principaux dispositifs de
soutien aux énergies renouvelables de 2005 à 2011
En M€
2005
2007
2011
Contribution au service public de l’électricité
89
323
1 464
Crédit d’impôt Développement durable
339
1 092
659
TVA
taux
réduit
pour
les
travaux
d’amélioration des logements anciens*
257
257
257
Fonds chaleur
-
-
231
Recherche et développement
43
80
200
Total
728
1 752
2 811
Source : Cour des comptes
*Estimation de la valeur moyenne annuelle sur un total de 1800 M€.
Mais cette progression du soutien apparait encore limitée au regard
de celle enregistrée pour la seule CSPE en 2012 et en 2013 selon la
Commission de régulation de l’énergie (CRE). En effet, le montant de la
CSPE,
pour
chacune
de
ces
deux
années,
pourrait
atteindre
respectivement 2,2 Md€ et 3 Md€, dont 2,1 Md€ pour la filière solaire
photovoltaïque.
A l’horizon 2020, à partir des estimations recueillies par la Cour
131
,
sans bouleversement de la politique de soutien menée jusqu’à présent, le
volume global de la CSPE liée aux énergies renouvelables peut être
esti