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OUR DES
C
OMPTES
Synthèses
2011
C
es synthèses sont destinées à faciliter la lecture et l’uti-
lisation du rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations et autres organismes
intéressés sont insérées dans le rapport.
Avertissement
Le rapport public
annuel
1
La trajectoire 2010-2013
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9
2
Les dépenses fiscales : un enjeu budgétaire majeur . . . . . . . . . . . . . .12
3
Quelques dépenses fiscales consacrées au développement des
entreprises et de l’emploi
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .15
4
La prime pour l’emploi : une dépense fiscale aux objectifs
de plus en
plus confus
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18
5
Le Fonds de réserve des retraites : une ambition abandonnée, une
réorientation risquée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .21
6
Le système français d’indemnisation du chômage partiel :
un outil insuffisamment utilisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24
7
La campagne de
lutte contre la
grippe A(H1N1) : bilan et
enseignements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26
8
Le système de santé en Polynésie française et son financement . . . .28
9
Le soutien public aux entreprises exportatrices . . . . . . . . . . . . . . . .30
10
La compensation des charges du service public de l’électricité
. . .32
11
Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) :
un second souffle nécessaire…………………………………
....
…34
12
L’agence nationale de la recherche : premiers constats et
perspectives……………………………………………………….36
Synthèses du tome 1 :
Les observations des juridictions financières
3
sommaire
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
4
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Sommaire
13
Les flux migratoires irréguliers en Guyane, à Mayotte et à
Saint-Martin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .39
14
La gestion des risques naturels dans les départements
d’outre-mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42
15
La politique de soutien à l’agriculture des départements
d’outre-mer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .45
16
Un premier bilan des externalisations au ministère de la défense…48
17
La gestion du domaine skiable en Rhône-Alpes . . . . . . . . . . . . . . .51
18
La continuité territoriale avec la Corse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .53
19
Les ouvriers d’Etat du ministère chargé de l’équipement et de
l’aviation civile
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .55
20
Le “quart de place” des militaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .58
21
Les particularités des rémunérations des réservistes militaires . . . .61
22
La SOVAFIM : un intervenant sans utilité réelle . . . . . . . . . . . . . . .62
23
Le nouveau siège de l’Office Paris Habitat
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .63
24
Les exonérations des indemnités versées aux arbitres et juges
sportifs : un instrument inadapté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .65
25
Le musée national du sport : un projet mal suivi
. . . . . . . . . . . . . .68
5
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Sommaire
I - La Cour constate
26
Les services publics d’eau et d’assainissement : des évolutions
encourageantes…………………………………………………...72
27
Les organismes faisant appel à la générosité publique.……………74
28
La « décristallisation » des pensions des ressortissants des territoires
autrefois sous souveraineté française…………………..…………76
29
Les autorités de régulation financière………………………..……77
30
Les services centraux chargés de l’outre-mer……………………...78
31
Le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM)………80
32
Le personnel du contrôle de la navigation aérienne………………82
II - La Cour insiste
33
Le CNRS dans le nouveau paysage de la recherche…………….…83
34
La préparation et le suivi de l’exécution du budget de l’Etat…...…85
35
Les effets de la certification des comptes de l’Etat……………..…86
36
Les mesures législatives concernant la sécurité sociale et les
retraites…………………………………………………….……..88
Synthèses du tome 2 :
Suites données aux observations des
juridictions
financières
sommaire
37
La Coface
......
……………………………………………………..89
38
La réorganisation de la collecte de la taxe d’apprentissage dans le
secteur des transports et de la logistique …………………………90
39
Le GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les
sans-abri………………………… .………………………………92
40
L’Ecole nationale de la voile et des sports nautiques
..........................
93
III - La Cour alerte
41
Chorus et les systèmes d’information financière de l’Etat………
....
95
42
Le Centre national de la
fonction publique
territoriale (CNFPT)
..........
………………………………………...98
43
Le Grand port maritime de Marseille : blocage social et déclin…...99
44
Les agences comptables des lycées et collèges publics…………...102
45
L’Etablissement public d’insertion de la défense (EPIDe) ……
....
103
46
La participation de la France aux corps militaires européens
permanents…..…………………………………………….…
....
104
6
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
7
Synthèses du tome 1
Les observations
des juridictions financières
9
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
1
La trajectoire 2010-2013
Un redressement fort et rapide des
comptes publics est indispensable pour
retrouver une croissance durable, pré-
server la capacité d’intervention de
l’Etat et maintenir la confiance. Il doit
faire l’objet d’une programmation pré-
cise et crédible.
La Cour a examiné si les comptes
publics suivent la trajectoire décrite dans
les lois de programmation des finances
publiques et si les mesures retenues par
le Gouvernement pour ramener le défi-
cit public de 7,7 % du PIB en 2010 à
3,0 % du PIB en 2013 sont suffisantes.
Une aggravation du déficit
structurel en 2010
Le déficit public a fortement dévié
en 2010 de la trajectoire prévue par la
première loi de programmation, adoptée
début 2009 pour les années 2009 à 2012,
du fait de la crise, mais aussi parce que la
maîtrise des dépenses a été insuffisante
et parce que les règles instaurées par
cette loi de programmation n’ont pas été
respectées.
Hors effets de la crise, plan de
relance et autres opérations exception-
nelles, la croissance des dépenses
publiques a été de 1,4 % en volume en
2010. Elle a été
inférieure à la moyenne
des dix dernières années (2,3 %), mais
supérieure à l’objectif de moyen terme
de la première loi de programmation
(1,0 %) et trop forte pour contribuer à
réduire
le
déficit
structurel.
Au
contraire, celui-ci, qui atteignait déjà
5,0 % du PIB en 2009, a été aggravé par
des baisses durables des prélèvements
obligatoires, à hauteur de 0,3 % du PIB,
qui ne respectaient pas les règles de la loi
de programmation.
Des objectifs et des règles
plus ambitieux pour
la programmation
2011-2014
Comme la Cour l’avait recom-
mandé, les règles établies par la
deuxième loi de programmation, du
28 décembre 2010, pour les années 2011
à 2014 imposent désormais, chaque
année, un effort structurel de réduction
du déficit public en plafonnant les
dépenses et en fixant un rendement
minimal pour les hausses des prélève-
ments obligatoires.
La portée de ces règles présente tou-
tefois des limites : en particulier, des lois
de finances ou des lois ordinaires peu-
vent remettre en cause les dispositions
des lois de programmation, comme l’a
montré la baisse de la TVA sur la restau-
ration. De profondes réformes restent
nécessaires pour atteindre les objectifs
d’évolution des dépenses publiques.
Cour des comptes
La trajectoire 2010-2013
10
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Un effort structurel
insuffisant en 2011
La croissance des dépenses prévue
par le Gouvernement pour 2011 est
encore de 1,4 % en volume, hors fac-
teurs conjoncturels ou exceptionnels. Ce
ralentissement par rapport à la tendance
des dix dernières années suppose de réa-
liser environ 13 Md€ d’économies sur
les dépenses, hors charges d’intérêt de la
dette, mais celles qui ont été identifiées
par la Cour ne s’élèvent qu’à environ
5 Md€.
Même si la croissance des dépenses
est de 1,4 % en 2011, ce qui reste possi-
ble, elle sera supérieure à l’objectif de la
loi de programmation pour 2011-2014
(0,8 %) et encore trop forte pour contri-
buer à réduire significativement le déficit
structurel.
L’effort structurel de réduction du
déficit résultera seulement des mesures
de hausse des prélèvements obligatoires,
qui augmenteront les recettes de 10 Md€
en 2011 (0,5 % du PIB). Certaines n’ont
cependant qu’un effet temporaire et le
rendement des mesures pérennes est de
7,5 Md€.
Cet effort structurel marque une
nette inflexion de la politique budgé-
taire, mais il est encore loin de l’effort de
20 Md€ que la Cour avait recommandé
de réaliser chaque année à partir de
2011, dans son rapport de juin 2010 sur
la situation et les perspectives des
finances publiques, pour stabiliser puis
réduire rapidement la dette publique.
La diminution de 1,7 point de PIB
du déficit prévue par le gouvernement
pour 2011 tient, pour une plus grande
part, à la disparition de mesures excep-
tionnelles ou temporaires (plan de
relance, surcoût ponctuel en 2010 de la
réforme de la taxe professionnelle
notamment, Elle repose aussi sur une
hypothèse favorable (2,0 %) de crois-
sance du PIB.
Au-delà de 2011, des
mesures de redressement
à définir
Les objectifs de dépenses et de
recettes retenus dans la loi de program-
mation à partir de 2012 représentent un
effort structurel de réduction du déficit
d’environ 0,65 point de PIB chaque
année, ce qui reste, à nouveau, inférieur
au montant d’un point de PIB recom-
mandé par la Cour.
De plus, il est très difficile d’identi-
fier, dans les documents accompagnant
la loi de programmation et les projets de
réforme du Gouvernement, les mesures
de hausse des prélèvements obligatoires
et de réduction des dépenses qui per-
mettraient de réaliser cet effort. Comme
dans les programmes de stabilité dépo-
sés par la France depuis 12 ans et
comme dans la loi de programmation
pour 2009-2012, les mesures de redres-
sement sont très peu documentées au-
delà de la première année de program-
mation.
La trajectoire 2010-2013
11
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Or, l’analyse de certains postes mon-
tre que l’évolution des dépenses prévue
par le gouvernement exige de mettre en
œuvre des réformes beaucoup plus
ambitieuses que celles déjà annoncées.
Dans un rapport de septembre 2010 sur
la masse salariale de l’Etat, la Cour a
ainsi souligné que sa seule stabilisation
en valeur, alors même que le budget
triennal prévoit une baisse de 2010 à
2013, supposerait de geler la valeur du
point de la fonction publique jusqu’à fin
2013 et de plafonner beaucoup plus
strictement les mesures catégorielles.
La croissance du PIB et des recettes
publiques pourrait enfin être inférieure
aux prévisions retenues dans la loi de
programmation, ce qui rendrait plus dif-
ficile de ramener le déficit à 3,0 % du
PIB en 2013. Pour que la trajectoire
décrite par la loi de programmation des
finances publiques soit totalement crédi-
ble, l’effort structurel doit être plus
ambitieux et les mesures nécessaires
pour le réaliser doivent être rapidement
précisées.
2
Les dépenses fiscales :
un enjeu budgétaire
majeur
L’expression « dépenses fiscales »
désigne des dispositions législatives
dérogatoires, par rapport à une norme
fiscale de référence, qui entraînent une
perte de recettes pour l’Etat. En pra-
tique, la frontière, pour un impôt ou une
taxe donné, entre ce qui doit être consi-
déré comme une dérogation et ce qui
peut être tenu pour une simple modalité
d’application de la règle donne souvent
lieu à discussion.
Un coût élevé et
fortement croissant
Après avoir été assez stable de 2000
à 2004, le nombre des dépenses fiscales
recensées en annexe des lois de finances
est passé d’environ 400 à 500 de 2004 à
2009 et leur coût total a augmenté de
43 %. Le coût des dépenses fiscales figu-
rant sur la liste officielle a ainsi atteint
68 Md€ en 2009, hors mesures de
relance, soit 30 % des recettes fiscales
nettes de l’Etat. Ce ratio était de 18 % en
2004, et, s’il avait été maintenu à ce
niveau, le déficit budgétaire aurait été
moindre de 27 Md€ en 2009. Par ail-
leurs, le coût en 2009 des dispositifs reti-
rés de la liste des dépenses fiscales
depuis 2004 s’élève à 75 Md€.
Cette forte croissance du coût des
dépenses fiscales à partir de 2004 coïn-
cide avec la mise en œuvre d’une norme
de croissance « zéro volume » des
dépenses budgétaires de l’Etat. En
outre, le coût des réductions et crédits
d’impôt, qui sont les dépenses fiscales
les plus substituables à des dépenses
budgétaires, s’est accru de 142 % de
2004 à 2009. La création et l’extension
de certaines dépenses fiscales ont per-
mis de contourner les règles budgétaires.
Une notion floue, des
coûts mal connus
Il n’existe pas de définition de la
« norme fiscale de référence » en France,
ni a fortiori des mesures qui peuvent
être considérées comme dérogatoires.
La liste des dépenses fiscales donnée en
annexe des projets de loi de finances
manque fortement de cohérence. Ainsi,
beaucoup de mesures de suppression ou
réduction de dépenses fiscales présen-
tées par le Gouvernement dans le projet
de loi de finances pour 2011 concernent
en réalité des dispositifs qui n’ont jamais
figuré sur cette liste ou qui en ont été
retirés récemment. La Cour souhaite
que les dépenses fiscales fassent l’objet
d’une définition précise et que leur liste
soit revue en conséquence.
Leur coût, tel qu’il est présenté dans
les documents budgétaires, doit être
interprété avec précaution, d’abord
parce qu’il est souvent supérieur aux
recettes qui seraient obtenues si elles
étaient supprimées. En effet, il est
estimé sans tenir compte des change-
ments
de
comportement,
souvent
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
12
13
Les dépenses fiscales :
un enjeu budgétaire majeur
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
impossibles à quantifier précisément,
qui pourraient résulter de cette suppres-
sion. Ensuite, les informations disponi-
bles peuvent être insuffisantes pour
chiffrer correctement ce coût. Il corres-
pond enfin à la perte de recettes par rap-
port à ce qui serait résulté de l’applica-
tion d’une norme de référence, mais
celle-ci n’est pas explicitée et peut varier
d’une année à l’autre.
La Cour souhaite que le chiffrage du
coût des dépenses fiscales soit amélioré.
Prévoir l’évolution de ce coût est certes
encore plus délicat mais le ministère des
finances sous-estime fortement sa crois-
sance en se contentant de reconduire le
dernier coût constaté pour plus de la
moitié des dépenses fiscales. Dans l’at-
tente qu’une méthode plus fiable puisse
être mise en œuvre, la Cour recom-
mande de faire évoluer le coût d’une
dépense fiscale comme le produit de
l’impôt concerné ou comme le PIB en
valeur.
Des règles encore peu
contraignantes
La loi de programmation pour les
années 2009 à 2012 avait prévu une règle
de gage selon laquelle les créations et
extensions de dépenses fiscales devaient
être compensées, pour chaque année,
par des réductions et suppressions d’un
montant global équivalent. Cette règle
n’a été respectée ni en 2009 ni en 2010,
et les mesures adoptées depuis le dépôt
de cette loi de programmation ont
contribué à augmenter de 1,9 Md€ le
coût des dépenses fiscales en 2010.
La nouvelle loi de programmation,
adoptée en décembre 2010 pour les
années 2011 à 2014, fixe, pour chaque
année, le rendement minimal des
mesures nouvelles de hausse des prélè-
vements obligatoires, qui peuvent pren-
dre la forme d’une réduction des
dépenses fiscales. Au surplus, elle enca-
dre plus particulièrement les dépenses
fiscales en prévoyant que leur coût total
en valeur ne doit pas augmenter.
Compte tenu du niveau déjà atteint et de
la situation des finances publiques, il
faudrait toutefois viser une forte baisse
de ce coût plutôt qu’une simple stabili-
sation. Dans son rapport de juin 2010
sur la situation et les perspectives des
finances publiques, la Cour avait recom-
mandé de le diminuer de 10 Md€, et
d’autant celui des niches sociales.
Les mesures adoptées en loi de
finances pour 2011 réduiront le coût des
dépenses fiscales de la liste officielle de
seulement 0,5 Md€ en 2011, et il restera
supérieur de 7 % au montant atteint en
2008. L’effet de certaines mesures sera
toutefois différé au-delà de 2011 et le
rendement attendu en 2012 est de
2,4 Md€.
En y ajoutant les mesures relatives
aux dispositifs qui ne figurent pas sur la
liste des dépenses fiscales, mais qui sont
très semblables, l’impact total sur les
comptes publics serait de 4,3 Md€ en
2011 et de 6,2 Md€ en 2012. Ce dernier
montant est encore assez éloigné de
l’objectif de 10 Md€ recommandé par la
Cour.
L’effort de réduction du coût des
dépenses fiscales doit donc être pour-
suivi.
14
Recommandations
Les dépenses fiscales :
un enjeu budgétaire majeur
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
préciser la définition des
dépenses fiscales donnée en annexe
des projets de loi de finances et en
revoir la liste en conséquence ; en éten-
dre le champ aux impôts affectés à
d’autres organismes publics ;
améliorer le chiffrage de leur
coût et, quand aucune méthode de pré-
vision n’est fiable, ne plus le recon-
duire d’une année à l’autre, mais le faire
évoluer comme le produit de l’impôt
concerné ou comme le PIB ;
remplacer, dans la prochaine loi
de programmation, le gel du coût total
des dépenses fiscales par une disposi-
tion imposant de prendre des mesures
de suppression ou de réduction de
dépenses fiscales dont le rendement
total soit supérieur à un montant mini-
mum ;
étendre le « coup de rabot » au
moins à l’ensemble des réductions et
crédits d’impôt sur le revenu ;
mener à bien l’évaluation systé-
matique des dépenses fiscales prévue
par la précédente loi de programma-
tion et en tirer les conséquences dans
le projet de loi de finances pour 2012 ;
appuyer
cette
révision
des
dépenses fiscales sur les travaux de la
Cour, qui en ont souvent montré l’in-
cohérence et le coût disproportionné
au regard des résultats obtenus.
15
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
3
Quelques dépenses
fiscales consacrées au
développement des
entreprises et de l’emploi
Les dépenses fiscales profitant aux
entreprises et à l’emploi ont un impact
économique difficile à mesurer, d’autant
qu’elles s’inscrivent dans un mouvement
de profondes réformes de la fiscalité des
entreprises, qui ont contribué à amélio-
rer l’environnement dans lequel ces der-
nières évoluent.
Elles doivent être d’autant plus sui-
vies que les entreprises savent les utiliser
rapidement et de manière optimale.
Leur coût en est accru et les effets d’au-
baine sont importants.
Une attention toute particulière
devrait être portée au suivi de l’évolu-
tion des coûts de certains dispositifs, ce
qui
pourrait conduire à la remise en
cause, totale ou partielle, de certains
d’entre eux, sans
que cela nuise à l’équi-
libre de l’imposition des entreprises en
France.
Un coût réel des dépenses
fiscales souvent plus élevé
que son évaluation initiale
L’évaluation des dépenses fiscales
qui concernent les entreprises ainsi que
des mesures considérées comme des
modalités de calcul de l’impôt
(pro-
gramme 134 de la loi de finances) n’est
pas satisfaisante. De manière générale,
les premières évaluations du coût des
dépenses fiscales propres aux entre-
prises se révèlent inférieures au coût réel
résultant de leur mise en œuvre effec-
tive.
Les évaluations des principales
dépenses fiscales mises en place dans la
période récente illustrent la difficulté de
fournir au Parlement une information
fiable sur laquelle il sera possible de
s’appuyer pour décider de leur instaura-
tion, tellement les différences constatées
peuvent être grandes.
Ces différences peuvent s’expliquer
par l’application de règles d’évaluation
conventionnelles, par une sous-estima-
tion du nombre des bénéficiaires et par
la réactivité des entreprises, qui mettent
en œuvre rapidement les mesures nou-
velles, à des fins d’optimisation fiscale.
Des enjeux budgétaires
des dépenses fiscales
propres aux grands
groupes insuffisamment
pris en compte
Le régime de l’intégration fiscale,
dont le coût budgétaire est évalué à près
de 20 Md€, est particulièrement attractif.
Il offre de compenser les résultats défi-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Quelques dépenses fiscales
consacrées au développement
des entreprises et de l’emploi
citaires et bénéficiaires des sociétés
membres ou de déduire les frais finan-
ciers sans réelle limitation. Les condi-
tions d’application sont très favorables.
Il permet de nombreuses possibilités de
neutralisation d’opérations internes au
groupe. Les neutralisations conduisent,
année après année, à des diminutions
des bénéfices imposables des groupes
par rapport à ceux qui résulteraient de la
simple compensation des résultats défi-
citaires et bénéficiaires, représentant à
elles seules un coût de plus de 2,3 Md€.
Certaines voies pourraient être
explorées pour limiter le coût de ce
régime, sans remettre en cause le prin-
cipe fondamental de compensation des
résultats bénéficiaires et déficitaires des
sociétés d’un même groupe.
Le régime du bénéfice consolidé au
plan mondial permet à un groupe inter-
national de déterminer son résultat
imposable en France, en compensant les
résultats bénéficiaires et déficitaires des
sociétés filiales détenues à au moins
50 % et des établissements implantés à
l’étranger.
Ce régime optionnel peut être très
favorable. S’il a eu, sans aucun doute,
son utilité pour aider le développement
international des plus grands groupes
industriels français, ce n’est plus le cas
aujourd’hui, dans un environnement où
les entreprises réalisent une part signifi-
cative de leurs bénéfices à l’étranger. Sa
suppression pourrait être examinée.
Un recours au PEA
permettant de soustraire
d’importantes plus-values
à l’impôt
Le régime fiscal du plan d’épargne
en actions (PEA) a été institué pour inci-
ter les contribuables à investir, de
manière durable, leur épargne dans des
titres de sociétés, en leur permettant de
bénéficier d’une exonération d’impôt
sur le revenu sur les dividendes et d'im-
pôt sur les plus-values réalisées.
L’élargissement des PEA aux titres
de sociétés non cotées a conduit à des
pratiques d’optimisation importantes et
même à des abus. Le procédé consiste à
inclure dans un PEA des titres de socié-
tés non cotées pour des valeurs unitaires
inférieures à leur véritable valeur, afin de
porter sur le plan, pour la même somme
plafonnée, le plus grand nombre possi-
ble de titres, pour bénéficier d’une exo-
nération de plus-values, dont les mon-
tants sont
sans commune mesure avec
ceux qu’il est possible de constater
lorsque ces plus-values sont réalisées
dans le cadre d’une épargne domestique.
Un dispositif anti-abus pourrait être mis
en place pour limiter l’exonération des
plus-values.
16
17
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Quelques dépenses fiscales
consacrées au développement
des entreprises et de l’emploi
Recommandations
ne pas requalifier trop rapide-
ment une dépense fiscale en modalités
de calcul de l’impôt, de façon à ne pas
s’interdire à l’avenir de s’interroger sur
la pertinence de la mesure et la néces-
sité de son maintien ;
anticiper, lors de l’élaboration
des lois de finances, la forte réactivité
des entreprises aux nouvelles mesures,
afin de mieux évaluer leurs coûts et de
limiter leur application effective aux
seules situations répondant aux objec-
tifs définis par la loi ;
évaluer les dépenses fiscales qui
correspondent
aux
neutralisations
d’opérations intra-groupes, prévues par
le régime fiscal de groupe ;
étudier les conséquences de la
suppression du régime du bénéfice
consolidé au plan mondial, qui semble
ne plus répondre à une exigence éco-
nomique ;
instaurer un mécanisme anti-
abus, pour limiter le montant des exo-
nérations de plus-values réalisées lors
de la cession de titres de sociétés non
cotées inscrits sur un PEA, comme
cela est le cas pour limiter l’exonération
des dividendes.
4
La prime pour l’emploi :
une dépense fiscale aux
objectifs de plus en plus
confus
La prime pour l’emploi (PPE) ins-
taurée par la loi du 30 mai 2001 vise,
selon les termes du code général des
impôts, à inciter à la reprise ou à la pour-
suite d’une activité professionnelle. Elle
est calculée sur les seuls revenus du tra-
vail et est attribuée au foyer fiscal pour
chaque personne exerçant une activité
professionnelle. Son montant est crois-
sant pour un revenu compris entre 0,3 et
1 SMIC, puis décroissant jusqu'à
1,4 SMIC.
Sa diffusion est large : près d’un
foyer fiscal sur quatre en bénéficie
(8,2 millions de bénéficiaires en 2009)
pour un montant moyen d’environ
500 € par an. Le coût de la mesure pour
l’Etat a presque doublé entre 2001 et
2009, passant de 2,5 à plus de 4 Md€
Une mesure ambiguë
poursuivant plusieurs
objectifs
La PPE poursuit une pluralité d’ob-
jectifs (retour à l’activité, complément
de revenu, rééquilibrage de la fiscalité
des revenus, accompagnement de la
modération du SMIC). Les nombreux
aménagements introduits année après
année, ajoutés à la multiplication des
autres dispositifs d’incitation à la reprise
d’activité, l’ont brouillé davantage.
La PPE peut être versée à des
ménages dont les revenus se situent net-
tement au-dessus de la moyenne, mais, à
l’inverse, elle exclut les personnes en
situation précaire au regard de l’emploi.
Cette absence de ciblage ne lui per-
met pas d’avoir un véritable effet incita-
tif au retour à l’emploi, son montant res-
tant insuffisant, malgré le doublement
de son coût global. Créé en décembre
2008 avec des objectifs a priori simi-
laires, le RSA « activité », tant par son
montant que par le nombre de ses béné-
ficiaires, ne remet pas en cause ce
constat.
Les défaillances du
pilotage stratégique et
budgétaire
La PPE n’est pilotée ni par les direc-
tions des ministères chargées du budget
et des finances, ni par la délégation
générale à l’emploi et à la formation pro-
fessionnelle (DGEFP). Une lourde
incertitude, représentant depuis trois
années un quart du montant annoncé,
affecte l’estimation de son coût pour le
budget de l’Etat.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
18
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Des améliorations ont pourtant été
apportées à la gestion des déclarations
de revenu, facilitée par de nombreuses
innovations (déclarations pré-remplies,
processus
de
relance,
certification
des contribuables). Connue des contri-
buables, la PPE est une prestation sim-
ple à obtenir. La procédure fiscale per-
met de toucher la plupart des ayants-
droit qui n’ont aucune démarche spéci-
fique à accomplir.
Néanmoins, des fraudes persistantes
rendent indispensable un
contrôle fiscal
adapté au nombre élevé des bénéfi-
ciaires et à la faiblesse des montants de
chaque prime.
La nécessité d’un choix
politique quant à l’objectif
de la mesure et à son
articulation avec le RSA
« activité »
Si l’objectif réaffirmé pour la PPE
est celui du retour à l’emploi, il est
nécessaire de majorer son montant de
façon à le rendre véritablement incitatif
et d’en déplacer la cible vers les bénéfi-
ciaires dont le revenu d’activité est insuf-
fisant pour les inciter naturellement à
reprendre un emploi. La réduction du
nombre de bénéficiaires qui en résulte-
rait permettrait d’accroître le montant
de la prime, sans augmenter la dépense
globale.
Il conviendrait alors d’absorber le
RSA « activité » dans la PPE, dont la
simplicité de versement lui donne un
caractère
plus
nettement
incitatif
que le RSA, dont
l’administration est
complexe à administrer.
Si la transformation de la PPE aux
dépens du RSA « activité » n’est pas rete-
nue, deux autres voies peuvent être envi-
sagées :
- la suppression de la PPE : le RSA
« activité » resterait alors la mesure
unique assurant un revenu aux travail-
leurs modestes pour les inciter à repren-
dre une activité ;
- le maintien des deux mesures : il
conviendrait alors que leurs objectifs
soient clairement différenciés. Le RSA
« activité » serait la mesure d’incitation à
la reprise d’activité, la PPE devenant un
revenu complémentaire pour les actifs
aux ressources modestes. Dans ce cas, la
PPE devrait être aménagée de façon à
tenir compte davantage de la situation
familiale des bénéficiaires.
La prime pour l’emploi : une
dépense fiscale aux objectifs
de plus en plus confus
19
La prime pour l’emploi :
une dépense fiscale aux objectifs
de plus en plus confus
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
20
Recommandations
Dans l’hypothèse d’un maintien
de la PPE :
désigner un véritable chef de
file assurant le pilotage stratégique,
choisi en fonction de l’objectif retenu,
revenu ou activité ;
sécuriser le mode d’enregistre-
ment de l’ensemble des dépenses fis-
claes liées à l’impôt sur le revenu, étape
indispensable à la mise en place d’une
mesure de la performance ;
présenter de manière cohérente
le coût total de la dépense fiscale, le
montant des déductions d’impôt et
celui des restitutions sous la forme de
prime ;
mettre en place un contrôle a
priori et sélectif de certaines déclara-
tions choisies pour les anomalies
qu’elles présentent ;
faire figurer sur les déclarations
pré-remplies les horaires travaillés,
dans l’hypothèse où la mesure reste
une incitation à l’activité ;
améliorer les procédures de
relance des contribuables potentielle-
ment éligibles à la PPE ;
mettre un terme aux paiements
par
lettres chèques et aux versements
en numéraire et ainsi aller vers la géné-
ralisation du paiement par virement
bancaire.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
5
Le Fonds de réserve des
retraites (FRR) :
une ambition abandonnée,
une réorientation risquée
Le Fonds de réserve des retraites
(FRR) a été créé en 1999 afin de consti-
tuer une réserve, conçue, à l’origine,
pour atteindre 150 Md€ et destinée à
contribuer, à partir de 2020, au finance-
ment des régimes de retraite des travail-
leurs salariés et des professions artisa-
nales, industrielles et commerciales. Le
Fonds représentait un instrument nou-
veau en France, incarnant la volonté de
l’Etat de se fixer des ambitions de long
terme. Il devait être alimenté annuelle-
ment par des abondements divers (excé-
dents de la Caisse nationale d’assurance
vieillesse ou du Fonds de solidarité vieil-
lesse, produits des privatisations, taxes,
notamment, et produits financiers des
investissements réalisés par l’établisse-
ment sur les marchés.
Une ambition abandonnée
En juin 2010, les missions du FRR
ont été profondément modifiées, le
Gouvernement ayant annoncé qu’il
entendait utiliser ses ressources pendant
la période de montée en charge de la
réforme des retraites. Le Fonds, dont
l’actif se montait, au 1er novembre
2010, à 36,2 Md€, devra désormais ver-
ser annuellement, dès 2011 et jusqu’en
2024, un montant de 2,1 Md€ courants
à la Caisse d’amortissement de la dette
sociale (CADES), cette dernière rece-
vant, en outre, les dotations et transferts
de taxes précédemment attribuées à
l’établissement.
Des résultats inférieurs
aux attentes après six ans
La performance annualisée (3,1 %)
de juin 2004 à fin 1010 se situe en deçà
du coût des emprunts de l’Etat (3,45 %)
sur la même période, ce qui signifie que,
pour la période considérée, il en est
résulté une augmentation de la dette
publique. Il est vrai que cette perfor-
mance médiocre ne porte que sur les six
premières années d’un fonds conçu et
géré comme un investisseur de long
terme, après une crise des marchés
financiers de très grande ampleur. La
Cour a, toutefois, constaté que la crise
n’était pas le seul facteur susceptible
d’expliquer le résultat constaté. Elle a
relevé que l’Etat n’avait donné aucune
orientation stratégique au FRR lui per-
mettant d’être guidé par des objectifs
stables et précis ; il a, au contraire,
contribué à placer le Fonds dans un
environnement instable en envisageant à
plusieurs reprises de prélever tout ou
partie des ressources de l’établissement,
21
Le Fonds de réserve des retraites :
une ambition abandonnée, une
réorientation risquée
et en diminuant régulièrement le mon-
tant annuel des dotations versées
(5,5 Md€ en 2002, 1,5 Md€ en 2010). De
plus, la politique d’investissement du
Fonds n’a pas été totalement adaptée :
les placements sur les marchés finan-
ciers ont été réalisés en période de cours
élevés, avec une forte proportion d’ac-
tions. Sa réactivité à la crise financière a
été insuffisante.
Une réorientation risquée
Le changement de nature du FRR
présente des risques sérieux. Il avait, en
effet, bâti sa stratégie financière sur le
fait qu’il était un investisseur de long
terme et pouvait donc prendre des
risques, les pertes éventuelles se lissant
sur la durée. Les conditions nouvelles de
raccourcissement de dix ans de l’hori-
zon de son passif réduisent les chances
du Fonds de retrouver une performance
annualisée satisfaisante, faute de pouvoir
pratiquer sur le long terme, une poli-
tique d’investissement lui permettant de
saisir les opportunités offertes par les
marchés financiers. Le choix de court
terme qui a été opéré présente un
risque : les réserves constituées par le
FRR manqueront si les déficits des
régimes de retraite persistent au-delà de
2020.
Une gestion à améliorer
La situation du FRR requiert, en
tout état de cause, une amélioration de
sa gouvernance et de sa gestion. La
Cour recommande une clarification des
rôles entre le conseil de surveillance et le
directoire, et un rôle plus actif du
comité d’audit de l’établissement. Elle
souligne, de plus, que des progrès sont
nécessaires en matière de gestion admi-
nistrative qui, confiée par la loi à la
Caisse des dépôts et consignations, est
perfectible tant du point de vue des
coûts que des prestations. La Cour
recommande aussi que le FRR examine
les conséquences à tirer des transforma-
tions en cours sur le degré d’externalisa-
tion de ses activités. La loi dispose que
les placements financiers s’effectuent à
travers des sociétés financières manda-
taires dont le coût a été élevé et dont
l’utilité apparait moins pertinente avec la
forte diminution du portefeuille d’ac-
tions. Cette obligation d’externalisation
pourrait être totalement ou partielle-
ment remise en cause. Le FRR devrait
alors examiner les conséquences de
cette réorganisation sur son statut et ses
modes de gouvernance.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
22
23
Le Fonds de réserve des retraites :
une ambition abandonnée, une
réorientation risquée
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
préserver, s’agissant de l’Etat, un
cadre permettant au FRR de gérer son
portefeuille avec un horizon de passif
stabilisé ;
mettre à l’étude la possibilité,
pour le FRR, de remettre en cause
l’obligation d’externaliser la gestion
financière de son portefeuille et celle
visant à confier à la Caisse des dépôts
tout ou partie de la gestion financière
des actifs concernés ;
examiner les conséquences à
tirer de cette réorganisation sur le sta-
tut de l’établissement et sur ses modes
de gouvernance ;
poursuivre l’amélioration de la
gestion interne, notamment en matière
comptable.
Recommandations
6
Le système français
d’indemnisation du
chômage partiel : un outil
insuffisamment utilisé
Le chômage partiel a été l’un des
principaux outils mobilisés en Europe
pour faire face à la crise économique.
Cette mesure d’aménagement du temps
de travail permet à un employeur de
réduire le temps de travail de ses salariés
en cas de baisse temporaire de son acti-
vité sans rompre son contrat de travail.
Durant les périodes non travaillées, la
rémunération des salariés est prise en
charge, partiellement ou totalement, par
les pouvoirs publics (l’Etat en France,
l’assurance chômage en Allemagne). Le
chômage partiel est ainsi
pour les sala-
riés un outil de sécurisation de leur
situation professionnelle et, pour les
entreprises,
un instrument de préserva-
tion de leurs capacités productives.
La réactivation limitée
d’un système tombé en
désuétude
Au cours des deux dernières années,
le dispositif français de chômage partiel
a connu une forte montée en puissance.
Largement tombé en désuétude dans les
années 2000, il a été
réactivé quand la
crise est survenue. Toutefois, la compa-
raison européenne à laquelle la Cour a
procédé, notamment avec l’Allemagne,
l’Italie et la Belgique, révèle que l’inten-
sité de sa mobilisation a été nettement
moins importante que dans certains
pays voisins. Ainsi, l’Allemagne a
compté jusqu’à 1,53 million de salariés
en chômage partiel au plus fort de la
crise (2
ème
semestre 2009), alors que la
France n’en comptait à la même date
que 275 000. Les sommes consacrées au
chômage partiel dans les deux pays ren-
dent compte de cette différence : alors
que le coût de ce dispositif pour les
finances publiques s’est élevé à 610 M€
en France pour 2009, il est estimé à
6 Md€ en Allemagne au cours de la
même année. De même, la part de la
population salariée concernée par le
chômage partiel a été nettement plus fai-
ble en France qu’en Belgique ou en
Italie.
L’économie française a ainsi moins
tiré partie du chômage partiel que d’au-
tres comme l’Allemagne ou l’Italie. Les
retombées en termes de maintien dans
l’emploi apparaissent de fait modestes :
selon une étude de l’OCDE, le chômage
partiel a contribué à la sauvegarde de
251 000 emplois en Allemagne durant la
crise, pour 124 000 en Italie et seule-
ment 18 000 en France. Par ailleurs, l’uti-
lisation des périodes de chômage partiel
à des fins de formation des salariés, dif-
ficile à mettre en œuvre, est restée mar-
ginale.
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
24
25
Le système français d’indemnisation
du chômage partiel :
un outil insuffisamment utilisé
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les raisons d’une sous-
utilisation en France du
régime du chômage par-
tiel
La relative sous-utilisation en France
du régime du chômage partiel apparaît
tenir à plusieurs causes :
-
l’obsolescence
du
dispositif
lorsque la crise a éclaté : les principaux
paramètres du système (notamment les
taux des aides aux entreprises et le
niveau de rémunération garanti aux sala-
riés) n’avaient plus été revus, pour cer-
tains, depuis la précédente crise en 1993.
Le dispositif a
dû être rénové dans l’ur-
gence à la fin de 2008, avec dans un pre-
mier temps la mise à jour de l’existant,
puis la création en 2009 d’un nouveau
système, dit d’ « activité partielle de
longue durée ». Ce dernier comporte
une hausse des rémunérations de rem-
placement versées aux salariés ainsi
qu’une augmentation de l’aide aux entre-
prises, grâce notamment à l’intervention
de l’assurance chômage qui s’est enga-
gée à participer à son financement. Mais
l’ « activité partielle de longue durée » n’a
pu entrer en vigueur qu’une fois passé le
pic de la crise, ce qui peut expliquer,
dans une certaine mesure, la faiblesse de
la mobilisation du chômage partiel en
France ;
-
des facteurs structurels liés à cer-
taines spécificités de l’économie et du
marché du travail : le chômage partiel
concerne pour plus de 80% des emplois
industriels. La part de ces derniers étant
plus
faible
en
France
(20 % de la population active) qu’en
Allemagne (25 %) ou en Italie (28 %), le
chômage partiel y a logiquement
concerné un public moins vaste.
L’évolution de la législation applicable
au marché du travail en France à partir
de la fin des années 1990 a renforcé les
instruments
de
flexibilité
externe
(contrats à durée déterminée ou travail
temporaire) et introduit de nouvelles
modalités d’aménagement du temps de
travail, notamment la possibilité de l’an-
nualiser pour adapter le rythme de tra-
vail à l’activité ; ces souplesses d’organi-
sation ont pu éviter, au moins dans un
premier temps, un recours au chômage
partiel ;
- l’insuffisance des incitations pour
les entreprises : en effet, si l’indemnisa-
tion des salariés en chômage partiel est
plutôt plus favorable en France qu’à
l’étranger, notre système est en revanche
moins favorable qu’ailleurs pour les
employeurs qui gardent à leur charge,
dans les cas les plus courants, un quart
et potentiellement jusqu’à la moitié de
l’indemnisation des salariés, soit un
niveau significativement supérieur à
celui observé chez nos voisins, notam-
ment en Allemagne ou en Italie.
améliorer l’attractivité du dispo-
sitif ;
simplifier son cadre juridique ;
renforcer des incitations visant à
combiner chômage partiel et forma-
tion.
Recommandations
7
La campagne de lutte
contre l’épidémie de
grippe A(H1N1) :
bilan et enseignements
Dans le but de contribuer à une
meilleure
réponse
des
autorités
publiques en cas de nouvelle crise sani-
taire nationale, la Cour présente ici les
principales observations qu’elle a for-
mulées à la suite de deux enquêtes
conduites à la demande des commis-
sions compétentes, du Sénat sur l’utilisa-
tion des moyens publics dans la cam-
pagne antigrippale de 2009, et de
l’Assemblée Nationale sur le rôle
imparti à l’Etablissement de préparation
et de réponse aux urgences sanitaires
(EPRUS) créé en 2007.
Un dispositif nouveau de
gestion de crise décevant
Cette campagne a constitué la pre-
mière mise à l’épreuve, face à un risque
pandémique, de nouveaux dispositifs
publics de gestion de crise. Malgré la
bonne concertation des administrations
et la mobilisation des acteurs concernés,
son bilan se traduit par une dispropor-
tion majeure entre l’ampleur des moyens
financiers et de l’organisation déployés à
cet effet, et la faiblesse de la couverture
vaccinale obtenue, qui n’aura touché
qu’un peu plus de 5 millions de per-
sonnes, soit 8,5 % de la population.
Le coût réel pour les finances
publiques de la politique suivie atteint
ainsi quelque 60 euros par vaccin utilisé
et plus de 110 euros par personne vacci-
née.
Une stratégie de vaccina-
tion qui a manqué de sou-
plesse
La stratégie destinée à offrir à l’en-
semble de la population la possibilité de
se faire vacciner dans des centres créés à
cet effet s’est révélée d’une excessive
rigidité, au regard des rapides adapta-
tions qu’aurait appelées un risque sani-
taire plus modéré qu’il n’était prévu. Le
constat du défaut de réactivité et de sou-
plesse touche aussi la communication
publique développée à l’appui de la cam-
pagne, les contrats d’acquisition de vac-
cins signés sans clauses conditionnelles
comme le mode d’organisation trop
exclusivement fondé sur des centres de
vaccination ad hoc.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
26
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
réviser le plan national pandé-
mie grippale pour l'adapter davantage
aux besoins de la gestion de crise et à
la gravité de la menace sur le territoire
national ;
introduire dans ce même plan
un volet financier et budgétaire ;
mieux estimer la réalité du tra-
vail et des délais de réaction des ser-
vices déconcentrés impliqués dans
l’organisation locale de la gestion de
crise ;
n’exclure a priori de l’organisa-
tion de la campagne de vaccination ni
les hôpitaux, ni les médecins libéraux,
compte tenu du rôle de conseil de
proximité qu'ils doivent jouer en
matière de santé publique ;
repenser
la
communication
gouvernementale sur la campagne de
vaccination ;
en dehors même de toute crise
sanitaire, engager une mobilisation en
faveur de la politique de vaccination
pour permettre une appréciation plus
objective des avantages de celle-ci ;
organiser
une
coordination
européenne pour renforcer la position
des Etats dans la négociation des
contrats d'achats de vaccins.
Recommandations
27
La campagne de lutte contre
l’épidémie de grippe A(H1N1) :
bilan et enseignements
8
Le système de santé en
Polynésie française
et son financement
La Polynésie française (260 000
habitants) dispose d’un système de santé
spécifique, dont elle assure elle-même
l’organisation, le pilotage et la gestion,
dans le cadre de son régime particulier
d’autonomie politique et administrative.
Un système globalement
performant
L’organisation sanitaire mise en
place, accessible au plus grand nombre,
couvre l’ensemble du territoire et asso-
cie la prévention aux soins. Pour les acti-
vités non assurées localement, les
patients bénéficient d’évacuations sani-
taires leur permettant de recevoir les
soins appropriés en métropole ou en
Nouvelle-Zélande.
Les performances du système de
santé
présentent
d’incontestables
aspects positifs, surtout lorsqu’elles sont
comparées à celles des pays qui parta-
gent avec cette collectivité d’outre-mer
les handicaps de l’insularité et de l’isole-
ment. L’évolution et le niveau de l’espé-
rance de vie ou du taux de mortalité pla-
cent la Polynésie française dans une
position favorable. Les indicateurs de
moyens, comme la densité médicale,
sont équivalents, voire supérieurs à ceux
des pays les plus développés du
Pacifique Sud.
Un pilotage défaillant
L’instabilité politique que connaît la
collectivité d’outre-mer depuis 2004 et
le manque de permanence des cadres
chargés de la conception des normes
expliquent largement cette défaillance.
La réglementation laisse subsister de
nombreuses lacunes, notamment en
matière de sécurité sanitaire. Il n’existe
plus de véritable politique de la santé
depuis 2005. Le schéma d’organisation
sanitaire de la Polynésie française est
ancien. L’ouverture du nouvel hôpital de
référence en 2010 aurait offert l’occa-
sion de le réviser en profondeur. Ce
schéma n’a d’ailleurs jamais été consi-
déré comme l’outil de régulation de l’of-
fre de soins hospitalière et de répartition
optimale des ressources qu’il aurait dû
être.
Enfin, l’information l’état sanitaire
dont dispose la collectivité de la
Polynésie française est incomplète et
ancienne. Les résultats des enquêtes
générales les plus récentes sur l’état de
santé des polynésiens remontent à 1995.
Le programme de médicalisation des
systèmes d’information (PMSI) est
insuffisamment développé et peu utilisé.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
28
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Le coût du système de
santé de la Polynésie fran-
çaise est élevé
La dépense courante de santé,
jamais évaluée depuis qu’a été instaurée
la protection sociale généralisée en 1994,
représentait en 2008 plus de 72 MdF
CFP (604 M€), soit l’équivalent de
48,7 % du budget de la Polynésie fran-
çaise et 13 % de son PIB. Son rythme de
croissance, très supérieur à celui observé
en métropole, est environ deux fois plus
élevé que celui du PIB. Or, cette ten-
dance semble difficile à infléchir tant en
raison des caractéristiques de morbidité
de la population, combinées à son vieil-
lissement, que du fait des conséquences
de la rénovation de l’appareil hospitalier.
Dans ces conditions, les deux princi-
paux financeurs de la santé, la CPS
(caisse de prévoyance sociale) et la
Polynésie française, qui doivent faire
face à des difficultés budgétaires crois-
santes liées à une crise économique sans
précédent, ne paraissent plus être en
mesure d’assurer, en l’état, l’équilibre du
système.
Une réforme de grande
ampleur s’impose pour
garantir la pérennité du
système
Des mesures drastiques d’économie
apparaissent indispensables. Une ratio-
nalisation des structures de soins,
notamment hospitalières et une gestion
plus efficace des moyens humains doi-
vent être envisagées.
Mais une refonte des principes et
mécanismes de financement du système
de santé doit également être entreprise.
La collectivité d’outre-mer devrait ainsi
être en mesure de fixer des objectifs et
définir leurs indicateurs de réalisation,
de mettre à disposition des données
annuelles tirées des comptes de la santé.
Ces moyens qu’elle opposera aux moda-
lités habituelles d’allocation des res-
sources,
devrait
lui permettre de déter-
miner un objectif annuel de dépenses de
santé, ou d’élaborer des conventions
d’objectifs et de moyens, afin d’assurer
un pilotage, à la fois transparent et chif-
fré, des politiques publiques dans ce sec-
teur.
définir et hiérarchiser les objec-
tifs
de santé ;
optimiser l’offre de soins ;
entreprendre la refonte des
principes et mécanismes de finance-
ment de la santé ;
affirmer la prééminence de la
Polynésie française dans les processus
de décision.
Recommandations
29
Le système de santé en Polynésie
française et son financement
9
Le soutien public aux
entreprises exportatrices
Comme ses principaux concurrents,
dans le respect des règles de la concur-
rence posées par le droit communau-
taire, l’OCDE (Organisation de coopé-
ration et de développement écono-
miques) et l’Organisation mondiale du
commerce (OMC), la France conserve
des dispositifs nombreux destinés à
favoriser l’accès de ses entreprises aux
marchés extérieurs. Le soutien public a
toutefois vocation à être subsidiaire par
rapport au marché.
Ce sont 6,9 % des exportations fran-
çaises et de l’ordre de 10 à 15 % des
entreprises exportatrices qui ont fait
l’objet d’un soutien en 2009.
Une réorganisation encore
inachevée
La grande variété des acteurs du
commerce extérieur au sein de la sphère
publique a conduit l’Etat à chercher à
mieux les organiser. Il a créé une com-
mission interministérielle d’appui aux
contrats internationaux, chargée de
coordonner les moyens destinés aux
plus grands projets. Il a constitué un éta-
blissement public industriel et commer-
cial, Ubifrance, qui dispose désormais
d’un réseau de missions économiques
présentes dans 44 pays.
Cette rationalisation positive des
leviers de soutien public est toutefois
encore inachevée. La clarification des
rôles entre Ubifrance, dont l’action s’est
modernisée, d’une part, et les autres
acteurs – Oséo, Coface, chambres de
commerce en France et à l’étranger,
opérateurs privés spécialisés dans le
commerce international, régions - n’ap-
parait pas encore suffisante. Dans le
cadre de la renégociation, en 2011, de la
convention d’objectifs et de moyens
d’Ubifrance, il conviendrait que l’Etat
définisse de manière plus précise la mis-
sion de service public de l’établissement,
dans une logique de subsidiarité par rap-
port aux acteurs privés de l’export.
Un ciblage du soutien
contestable
Les dispositifs sont faiblement
orientés vers les zones géographiques
où les entreprises accèdent le moins
facilement aux marchés. Par ailleurs, les
aides pourraient être attribuées de
manière plus sélective vers les entre-
prises susceptibles d’exporter dans la
durée. La politique de ciblage actuelle
peut être coûteuse pour les finances
publiques, car elle conduit à exposer
l’Etat à un taux d’échec élevé qu’il prend
en charge dans le cadre de sa garantie à
la Coface. De manière générale, les
risques budgétaires associés à la garantie
de l’Etat doivent être mieux encadrés et
pilotés. Le Parlement doit en être davan-
tage informé.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
30
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
définir
une
politique
« d’internationalisation
des
entre-
prises » tenant compte de ses consé-
quences en termes d’emploi national ;
améliorer le pilotage de cette
politique par :
- une définition précise de la mis-
sion de service public d’Ubifrance
dans le cadre de la prochaine conven-
tion d’objectifs et de moyens signée
par l’État ;
- le suivi des conventions croisées
signées entre les différents acteurs du
commerce extérieur et une rationalisa-
tion de leur rôle respectif ;
- la mise en place de dispositifs
d’évaluation des instruments de sou-
tien ;
- l’amélioration du dispositif de
veille sur les différents systèmes de
financement et de soutien, y compris
en dehors des pays de l’OCDE ;
mieux cibler le soutien par :
- une orientation plus sélective des
aides vers les entreprises susceptibles
d’exporter sur la durée ;
- la limitation des effets d’aubaine à
travers la suppression des aides à la
prospection que sont le SIDEX et le
crédit d’impôt ;
- une meilleure maîtrise des risques
budgétaires par une amélioration du
suivi
budgétaire
des
garanties
publiques octroyées à la Coface grâce à
une
meilleure
information
du
Parlement, une meilleure appréhension
des risques, en particulier non souve-
rains, et une utilisation effective de la
comptabilité d’engagement.
Le soutien public aux entreprises
exportatrices
31
Les conséquences de la
politique de soutien au
développement
international
La politique de soutien aux exporta-
tions se réoriente de manière incertaine
vers le soutien à l’internationalisation
des entreprises, qui conduit à des offres
françaises intégrant la production de
filiales ou de fournisseurs à l’étranger, en
Europe ou ailleurs. Le financement sur
garanties publiques de tels contrats d’ex-
portation, qui obéit à des conditions
souples, peut conduire à accompagner
des stratégies de délocalisation des
entreprises.
10
La compensation des
charges du service public
de l’électricité
La contribution aux
charges de service public
de l’électricité (CSPE) :
un montant substantiel
(1,7 Md€ en 2009) pour-
tant méconnu
Cette contribution, que les consom-
mateurs acquittent directement en
réglant leurs factures d’électricité, sert à
compenser des charges inhérentes au
service public de l’électricité supportées
par divers opérateurs du marché de
l’électricité : essentiellement, le soutien
aux énergies renouvelables et à la cogé-
nération, la péréquation tarifaire dans les
départements d’outre-mer et en Corse et
les tarifs sociaux de l’électricité.
Depuis sa création par l’article 38 de
la loi du 3 janvier 2003, les charges que
la CSPE est censée compenser ont aug-
menté rapidement et de façon
incontrô-
lée, tandis que le taux de la contribution
est, lui, resté inchangé, à 4,5 €/MWh
jusqu’à fin 2010, le ministre chargé de
l’énergie s’abstenant de le modifier.
Entre 2004 et 2009, le
total des charges de ser-
vice public est passé de
1,53 Md€ à 2,66 Md€
Au sein de ces charges :
- les tarifs sociaux, bien qu’en forte
croissance, n’occupent encore qu’une
place marginale (3,2 % en 2008) ;
- la péréquation tarifaire, dans les
départements d’outre mer et en Corse
est passée de 23 % en 2004 à plus de
45 % en 2009 ;
- les achats d’énergie, qui résultent
du soutien aux énergies renouvelables et
à la cogénération, occupent une place
prépondérante, de près des deux-tiers
du montant des charges.
En leur sein, les filières éolienne et
photovoltaïque prennent une impor-
tance
grandissante.
Rapportée
au
volume total de l’électricité achetée,
cette filière ne passerait que de 0,07 %
en 2008 à 0,8 % en 2010, mais son poids
relatif dans les charges compensées par
la CSPE augmenterait dans le même
temps de 0,9 % à 10,3 %.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
32
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
L’assiette de la CSPE a
progressé
moins vite que
les charges
Il en résulte un déséquilibre crois-
sant du mécanisme de compensation,
essentiellement supporté par EDF qui
assume plus de 95 % des charges du ser-
vice public de l’électricité. L’entreprise
chiffre le déficit cumulé de recouvre-
ment de CSPE à 2,6 Md€ fin 2010.
Pour 2011, la Commission de régu-
lation de l’énergie (CRE) estime les
charges prévisionnelles à 3,47 Md€. Elle
évalue à 12,90 €/MWh, la contribution
qui serait nécessaire pour les compenser.
Des mesures correctrices viennent
certes d’être prises. La loi de finances
pour 2011 permet l’augmentation de
3 €/MWh de la CSPE, dont le montant
total est ainsi porté à 7,5 €/MWh. Par
ailleurs, le Gouvernement a, par un
décret du 9 décembre 2010, suspendu
pour trois mois le mécanisme d'obliga-
tion d'achat de l'électricité produite par
certaines installations utilisant l'énergie
radiative du soleil.
La Cour estime cependant que ces
correctifs n’apportent pas de véritable
remède à la dérive structurelle du sys-
tème actuel
maîtriser les facteurs de crois-
sance des charges du service public de
l’électricité, au premier rang desquelles
figure le système de l’obligation
d’achat, à des tarifs trop attractifs,
fonctionnant « à guichet ouvert » ;
s’interroger sur l’opportunité de
continuer à soutenir des filières qui ne
figurent pas parmi les priorités gouver-
nementales en matière de politique
énergétique, comme la cogénération ;
remettre à plat le dispositif
d’ensemble afin d’en rendre le fonc-
tionnement plus lisible et d’en clarifier
le statut fiscal ;
réexaminer le financement du
soutien au développement des énergies
renouvelables par le consommateur
d’énergie.
Recommandations
La compensation des charges
du service public de l’électricité
33
11
Les pôles de recherche et
d’enseignement supérieur
(PRES) : un second
souffle nécessaire
Une nouvelle dynamique
depuis 2006
La loi de programme pour la
recherche de 2006 a créé les pôles de
recherche et d’enseignement supérieur
(PRES), qui devaient être le lieu privilé-
gié de mutualisations structurantes entre
établissements.
Au 1
er
janvier 2011, 21 PRES ont
été créés. Une réelle dynamique a été
lancée. Le ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche a favorisé
l’émergence de projets sous la forme de
nouveaux établissements publics de
coopération scientifique (EPCS).
L’opération Campus, de nature
immobilière et dotée d’un capital de
5 milliards d’euros, est venue conforter
ce mouvement, les PRES étant le plus
souvent porteurs des projets retenus.
Des résultats modestes
Toutefois, le développement des
PRES a été contrarié, pour plusieurs rai-
sons : la priorité donnée, dès 2007, à la
mise en œuvre de la loi relative aux liber-
tés et responsabilités des universités (loi
LRU), qui a relégué au second plan les
logiques coopératives ; un accompagne-
ment ministériel insuffisant, une fois
passée la vague de création ; une attitude
en retrait des grands organismes de
recherche ; enfin, l’empilement de dis-
positifs multiples de différentes natures
au fil des années sans articulation entre
eux.
De fait, les résultats sont très en
deçà des attentes suscitées. Les PRES
ont encore un impact modeste sur la
formation. Des politiques de site pei-
nent à émerger pour la recherche. La
gouvernance des PRES est souvent ina-
daptée à leurs ambitions.
Une nécessaire clarifica-
tion
Les moyens financiers nouveaux,
notamment, les « investissements d’ave-
nir » lancés dans le cadre du grand
emprunt, sont de nature à favoriser les
démarches de regroupement ou leur
consolidation,
et à affermir le rôle des
PRES.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
34
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
renforcer l’accompagnement de
l’Etat par la contractualisation avec les
PRES,
l’objectif devant être à terme la
signature d’un contrat unique de site et
la définition
d’une vision partagée des
politiques de site entre l’Etat, les col-
lectivités territoriales, les établisse-
ments d’enseignement supérieur et les
organismes de recherche ;
orienter le devenir des PRES
dans deux directions par le soutien
apporté, dans les cas où l’intégration
est la formule la plus adaptée, à la créa-
tion d’un nouvel établissement public
dans lequel fusionneraient leurs mem-
bres ; ou quand la fusion ne semble
pas pertinente, la constitution d’en-
sembles confédéraux pérennes à la
forte identité et aux compétences et
responsabilités renforcées.
Les pôles de recherche et
d’enseignement supérieur (PRES) :
un second souffle nécessaire
35
Cependant, le contexte budgétaire
général difficile impose l’obligation
d’œuvrer à l’utilisation efficiente des
nouveaux moyens octroyés.
Dans cette perspective, il y a urgence
à préciser clairement ce qui est attendu
des PRES. Si ces structures sont appe-
lées à être des acteurs majeurs de la
recomposition en cours, il convient
alors d’en faire des lieux d’impulsion et
de portage des politiques de site ainsi
que de réels éléments fédérateurs, en
matière de carte des formations, de poli-
tique de recherche et de valorisation.
12
L’Agence nationale
de la recherche (ANR) :
premiers constats et
perspectives
Créée en 2005, l’Agence nationale
de la recherche (ANR), pour l’essentiel
de son activité, lance des appels à projets
auprès des équipes de recherche et sélec-
tionne les projets retenus sur la base de
critères d’excellence scientifique. Elle
dispose pour ce faire depuis 2006 d’un
budget d’intervention annuel d’environ
800 M€. La Cour a souhaité dresser un
premier bilan de l’action de cette agence
à un moment où trois décisions
majeures ont été prises : en juin 2009, la
ministre de l’enseignement supérieur et
de la recherche a annoncé le passage de
25 % à 50 % de la part des crédits consa-
crée à des appels à projets non-théma-
tiques, et la prise en charge par l’ANR de
la totalité des missions jusqu’alors assu-
rées pour son compte par des « unités
supports » abritées par différents établis-
sements de recherche et d’enseignement
supérieur.
Enfin,
l’ANR
gèrera
18,9 Md€ des « investissements d’avenir
», décidés dans le cadre du Grand
Emprunt. Ces décisions sont appelées à
changer la nature de l’agence, initiale-
ment conçue par le législateur comme
une structure légère.
Une montée en puissance
réussie
Créée en 2005, l’Agence nationale
de la recherche a su très rapidement
trouver sa place dans la politique
publique de la recherche. Son action,
tournée vers le financement de projets,
consacre une évolution importante du
paysage français de la recherche, conver-
gente avec les pratiques de nos princi-
paux partenaires étrangers. L’ANR a
apporté dans ce cadre des processus de
sélection formalisés, reposant sur l’éva-
luation par les pairs.
Par delà les débats parfois vifs qui
ont entouré sa création, la communauté
des chercheurs s’est mobilisée pour
répondre aux appels à projets de
l’ANR
: dès 2005, l’agence a reçu 5 500
projets au titre de la trentaine d’appels à
projets lancés, elle en a sélectionné 1 462
et engagé près de 540 M€ de crédits. Au
total, entre 2005 et 2009, l’agence aura
été destinataire d’environ 25 000 projets
de recherche et en aura financé 5 800
pour un montant total de plus de
3 Md€.
Des modes d’intervention
à consolider
Les règles qui gouvernent l’attribu-
tion des aides de l’ANR sont héritées de
dispositifs anciens, perfectibles et exer-
cent des effets qu’il convient de corriger.
Tout d’abord, les aides, en général
délivrées pour trois ans, peuvent s’avérer
trop courtes dans certains domaines
comme les sciences humaines et sociales
et les mathématiques, et le taux de sélec-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
36
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
37
tion des projets, assez rigoureux, peut
aboutir à écarter les dossiers les plus
innovants.
Ensuite, l’ANR intervient de façon
différenciée dans les laboratoires publics
et les laboratoires privés, en raison en
particulier du fait que les laboratoires
publics disposent de financements issus
du budget de l’Etat pour leur fonction-
nement récurrent. Sans remettre en
cause la justification de modes différents
de calcul pour ces deux catégories de
bénéficiaires, l’enquête de la Cour l’a
amenée à constater sur la base d’un
échantillon que les taux de concours qui
en résultent sont très différents : de l’or-
dre d’environ 25 % du coût total d’un
projet pour un laboratoire public contre
près de 50 % pour un laboratoire privé
en 2009.
Enfin, la différence principale entre
les aides aux laboratoires publics et pri-
vés tient au fait que les rémunérations
des personnels permanents sont logi-
quement exclues de l’assiette des
dépenses éligibles aux aides de l’ANR
dans les structures publiques. L’agence
intervient dès lors essentiellement en
finançant des personnels occasionnels :
elle finançait en 2008 plus de 15 000
contrats à durée déterminée. Cette situa-
tion suppose que l’ANR procède à un
suivi régulier du devenir de ces person-
nels et invite à réfléchir à un élargisse-
ment de l’assiette des dépenses de per-
sonnels éligibles aux aides de l’ANR,
qu’il
s’agisse
du
financement
de
décharges partielles d’enseignements ou
de primes pour les porteurs de projets.
Des fragilités en matière
financière et de gestion
En matière financière, budgétaire et
comptable, le contrôle de la Cour a mis
en évidence des faiblesses qui devront
être surmontées avant que l’ANR n’as-
sure la gestion pour compte de tiers des
18,9 Md€ d’investissements d’avenir
qu’il est prévu de lui confier.
Ainsi, l’agence ne retraçait pas dans
ses comptes ses engagements plurian-
nuels jusqu’en 2009 et a dû procéder à
l’occasion du contrôle de la Cour à la
comptabilisation d’une provision de
plus de 1 Md€ à ce titre. Ses besoins en
crédits de paiement budgétaires sont
calculés sans tenir compte du calendrier
effectif de versement des aides : il en
résulte un excédent de 400 M€ de verse-
ment de la part du budget de l’Etat.
Dans ce contexte, la décision d’arrê-
ter en trois ans l’activité des unités sup-
ports représente un pari : jusqu’en 2009,
ces unités abritées par une douzaine
d’établissements d’enseignement supé-
rieur et de recherche géraient 80 % des
appels à projets de l’agence. Ce pari est
d’autant plus risqué que cette décision
n’est pas mise en application dans des
conditions satisfaisantes et écarte l’ANR
des orientations tracées par le législateur
qui en faisait une structure légère.
Un positionnement straté-
gique à clarifier
Plusieurs dispositifs prévus par la loi
ne sont pas appliqués. Il en va en parti-
L’Agence nationale de la recherche :
premiers constats et perspectives
L’Agence nationale de la recherche :
premiers constats et perspectives
culier du contrat pluriannuel avec l’Etat.
La négociation et la conclusion d’un tel
contrat apparaissent aujourd’hui néces-
saires et urgentes. Ce contrat devra en
particulier hiérarchiser les objectifs de
l’agence et préciser les conditions dans
lesquelles la programmation de l’agence
s’articule avec les priorités stratégiques
de l’Etat.
Six ans après sa création, le position-
nement des aides de l’agence et les résul-
tats obtenus méritent de faire l’objet
d’une évaluation, à partir de la mise au
point d’indicateurs permettant d’appré-
cier l’efficacité et l’efficience spécifiques
de l’agence.
Il est d’autant plus important de pla-
cer l’action de l’ANR dans un cadre plu-
riannuel que le projet de loi de finances
pour 2011 prévoit de lui accorder des
dotations en baisse, posant la question
de la place finalement réservée aux
financements sur projets dans la poli-
tique publique de la recherche.
S’agissant de la stratégie
:
établir et signer rapidement le
contrat pluriannuel prévu par la loi
entre l’Etat et l’ANR qui devra en par-
ticulier clarifier les objectifs assignés à
l’agence et l’articulation entre les prio-
rités stratégiques de l’Etat et le choix
des programmes donnant lieu à appel à
projets ;
construire des indicateurs d’im-
pact de l’action de l’agence permettant
de mesurer sa valeur ajoutée ;
S’agissant de la gestion
:
maîtriser la croissance des effec-
tifs de l’agence, en prévoyant un enca-
drement de gestion d’un niveau suffi-
sant ;
établir les dotations annuelles de
l’ANR en crédits de paiement à partir
d’un calendrier précis des besoins liés
aux engagements ;
S’agissant des aides délivrées
par l’agence
:
mesurer les taux d’aide effectifs
pour les laboratoires publics et privés
de façon à justifier les écarts constatés
ou à les résorber ;
préciser les frontières entre cer-
taines actions des investissements
d’avenir et la programmation propre
de l’ANR ;
veiller à la mise en œuvre du dis-
positif spécifique de valorisation des
résultats des recherches publiques
aidées par l’ANR.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
38
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
39
13
Les flux migratoires
irréguliers en Guyane,
à Mayotte et
à Saint-Martin
L’importance des flux
migratoires irréguliers est
un phénomène majeur en
Guyane, à Mayotte et à
Saint-Martin
Les frontières de ces territoires sont
particulièrement difficiles à surveiller du
fait de l’insularité ou, pour la Guyane,
d’une forêt amazonienne immense et
peu peuplée, ainsi que d’une attractivité
d'autant plus grande que le niveau de vie
des habitants des pays voisins, culturel-
lement et linguistiquement proches, est
considérablement inférieur.
31 000 reconduites à la
frontière d’étrangers en
situation irrégulière outre-
mer en 2009
95 % de ces reconduites ont été
effectuées à partir de Mayotte (près des
deux tiers), de la Guyane (environ un
tiers) et de Saint-Martin. Leur nombre
n’a cessé de croître entre 2002 et 2009,
pour devenir même supérieur à celui
enregistré en métropole. Pour la pre-
mière fois en 2009, le nombre de per-
sonnes retenues dans les centres de
rétention administrative d’outre-mer a
approché celui de la métropole alors
qu’il en représentait moins du tiers en
2005. L’essentiel concerne Mayotte et la
Guyane.
La politique menée atteint
ses limites
Ces données traduisent des difficul-
tés persistantes à maîtriser les entrées
irrégulières sur le territoire plus que l’ef-
ficacité de la politique menée, qui est
essentiellement fondée sur le renforce-
ment des moyens des forces de sécurité.
1) Le régime juridique comporte des
particularités que deux lois de 2006 et
2007, relatives à l’immigration et à l’inté-
gration, ont renforcées. Les droits de
recours des personnes retenues y sont
plus limités qu’en métropole et les
échecs à l’éloignement y sont bien moin-
dres. Les dérogations au droit commun,
motivées par les caractéristiques des ter-
ritoires concernés, rendent plus difficile
le contrôle par le juge de la régularité des
procédures de reconduite.
2) L’organisation des moyens pour
maîtriser les flux migratoires irréguliers
est peu satisfaisante. En Guyane, les dis-
positifs de la police aux frontières
connaissent des dysfonctionnements, du
fait notamment de choix immobiliers
Les flux migratoires irréguliers en
Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin
malencontreux. A Mayotte, la réponse
judiciaire, en particulier vis-à-vis des
passeurs, se heurte à la faiblesse des
effectifs de magistrats et à la surpopula-
tion de la maison d’arrêt de Majicavo. A
Saint-Martin, l’action de la police aux
frontières souffre de la dispersion des
locaux et d’un dispositif de contrôle ina-
dapté.
3) S’agissant des centres de rétention
administrative, des carences ont été rele-
vées pour la situation des femmes et des
enfants ainsi que pour l’assistance sani-
taire et juridique. La professionnalisa-
tion de la gestion des centres reste insuf-
fisante. Le centre de Cayenne a été mis
aux normes en 2007 mais son extension
nécessite de le détruire pour en
construire un neuf. Le centre de
Mayotte connaît une surpopulation
récurrente depuis près de dix ans ;
le
projet de nouveau centre
annoncé pour
mi-2007 a été repoussé à juin 2012.
4) Des problèmes généraux sont mal
résolus. Le nombre de « réitérants »,
c’est-à-dire des personnes qui revien-
nent en France après avoir été recon-
duites à la frontière, n’est pas mesuré et
les services concernés n’ont pas d’objec-
tif en la matière. La répartition des effec-
tifs de la police aux frontières n’est pas
rationnelle : la Guyane et Mayotte sont
sous-dotés par rapport aux Antilles,
alors que les problèmes y sont plus
aigus. En matière de transports aériens,
l’avion spécialement affrété depuis 2008
en Guyane sert essentiellement pour des
vols intérieurs, alors qu’il n’est pleine-
ment justifié que pour des reconduites
directes vers l’étranger.
5) La conduite des relations avec les
Etats voisins, assurée par plusieurs
ministères, apparaît mal coordonnée.
Les résultats des quelques initiatives
prises ces dernières années ne sont pas à
la hauteur des enjeux. En Guyane, les
commissions mixtes sont très récentes
avec le Surinam et le Guyana, Etats dont
les pratiques sont un frein important
aux reconduites.
La coopération régionale
reste limitée
A Mayotte, les négociations enga-
gées par la France pour normaliser ses
relations avec l’Union des Comores
n’ont pas abouti. Peu d’initiatives ont été
prises pour établir une réelle coopéra-
tion régionale. La départementalisation
de Mayotte, dont l’Union des Comores
n’a jamais admis d’être séparée, risque
de ne pas faciliter un tel processus. A
Saint-Martin, alors que le traité de
Concordia de 1648 entre la France et les
Pays-Bas (cette île, comme les autres
départements d’outre-mer, n’est pas
incluse dans les accords de Schengen),
établit une libre circulation entre les
deux parties de l’île, un contrôle com-
mun dans les aéroports de l'île n’est tou-
jours pas en place. Le projet d’accord de
coopération policière, finalement éla-
boré, n’était toujours pas signé en octo-
bre 2010. La négociation d’un accord de
réadmission n’a jamais été sérieusement
envisagée.
40
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
41
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
évaluer périodiquement les
avantages et les inconvénients des dis-
positions
juridiques
dérogatoires
applicables outre-mer ;
adapter la carte des lieux de
rétention ; accélérer la construction
d’un nouveau centre de rétention
administrative à Mayotte ; compléter
l’assistance sociale, médicale et juri-
dique ;
professionnaliser davantage la
gestion de la rétention et de la recon-
duite en outre-mer ;
mesurer systématiquement la
réitération et fixer en la matière des
objectifs aux services concernés ;
améliorer la prise en compte
des flux migratoires irréguliers dans la
conduite des relations avec les Etats
voisins, notamment en clarifiant la
répartition des compétences respec-
tives entre les ministères concernés.
Recommandations
Les flux migratoires irréguliers en
Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin
14
La gestion des risques
naturels dans les
départements
d’outre-mer
Les départements d’outre-mer sont
très exposés aux risques naturels :
séismes, tsunamis, cyclones, risque vol-
canique, submersion marine et inonda-
tions.
L’ampleur et la diversité des risques
naturels y ont développé une « culture
du risque », tant dans la population que
chez les élus. Mais sa traduction souffre,
notamment au niveau des collectivités
locales, de moyens humains et financiers
limités. Quant aux actions relevant de
l’Etat, elles restent perfectibles.
Les dispositifs de préven-
tion montrent plusieurs
insuffisances
Les plans de prévention des risques
(PPR) ne sont pas tous approuvés.
Certains d’entre eux sont imparfaits, en
particulier aux Antilles : aléa « houle et
marée cyclonique » mal pris en compte ;
microszonages sismiques restant à inté-
grer, ambiguïtés de certains zonages en
Martinique. Les PPR approuvés ne sont
pas toujours appliqués avec rigueur. Le
contrôle des permis de construire est
inégal. La lutte contre les constructions
illégales est insuffisante.
Le « plan séisme Antilles » existe
mais présente plusieurs défauts. Son
caractère interministériel est insuffisant.
L’association des élus locaux n’a pas été
prévue à l’origine. La diversité de ses
objectifs, sans hiérarchisation, présente
un risque de dispersion.
Les financements budgétaires, d’ori-
gine variée, rarement identifiables, ne
font pas l’objet d’une programmation
financière pluriannuelle. Le bilan des
dépenses de renforcement et d’adapta-
tion du bâti est médiocre. L’effort de
formation n’est pas suffisant pour tou-
cher, dans des délais raisonnables, l’en-
semble des acteurs concernés. Les
méthodes de sensibilisation devraient
être modernisées.
De nombreux bâtiments
de l’Etat, essentiels en cas
de crise, non conformes
aux normes
Pour les établissements d’enseigne-
ment, si les diagnostics viennent d’être
pour l’essentiel achevés, les travaux ne
font que s’engager. Une partie du parc
de logements sociaux est vulnérable tan-
dis que, pour les logements privés, les
particuliers n’ont pas les moyens de faire
établir le diagnostic de la vulnérabilité de
leur habitation ; le diagnostic sismique
n’est pas obligatoire lors d’une transac-
tion.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
42
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La prise en compte des
risques naturels est
encore imparfaite
La politique d’aménagement du ter-
ritoire prend encore mal en compte le
risque volcanique.
Si la sensibilisation de la population
au début de chaque « campagne cyclo-
nique » apparaît satisfaisante, l’informa-
tion sur les dispositions constructives
pour résister à des vents importants est
moins systématique.
Pour les inondations, la réforme de
l’annonce des crues, initiée en 2003 en
métropole, n’est pas encore appliquée
dans les DOM ; l’élaboration de plans
d’action de prévention des inondations
est en retard. La prise en compte du
risque de submersion marine est sou-
vent insuffisante. Les actions restant à
mener pour prévenir le risque de mou-
vements de terrain sont de grande
ampleur.
Les lacunes de la gestion
de crise
Pour les risques volcanologique et
sismologique, le bâtiment de l’observa-
toire en Martinique n’est pas aux
normes parasismiques. Les observa-
toires ne sont pas équipés pour les
séismes de forte magnitude ; le disposi-
tif de financement des observatoires est
incertain, même pour garantir la mainte-
nance des équipements. Les systèmes
d’alerte au tsunami dans l’océan Indien,
et surtout dans les Caraïbes, ne sont pas
pleinement satisfaisants en raison de
l’insuffisance des équipements.
La réduction des moyens des forces
armées sur place nécessite de prévoir
des moyens humains supplémentaires
d’intervention, à titre permanent ou
temporaire. Plusieurs plans de secours
méritent d’être actualisés.
Les retours d'expérience sont
en
général réalisés mais les conséquences
pratiques à en tirer ne sont pas établies
précisément, et l’identification et la
mesure des coûts insuffisantes.
Le dispositif d’indemnisa-
tion
Alors que l’application du régime
« catastrophes naturelles » a une portée
limitée en raison de la faible proportion
de personnes assurées, la mise en jeu du
fonds de secours, financé par le budget
de l’Etat, appelle plusieurs observations.
Les exploitations agricoles en sont les
principales bénéficiaires car elles ne sont
pas éligibles au fonds des calamités agri-
coles.
L’application des règles, comme leur
contrôle, manquent de rigueur. Il
s’écoule parfois plusieurs années entre la
catastrophe et le versement complet des
aides aux collectivités territoriales.
Les importantes dépenses d’indem-
nisation (85 M€ de 2007 à 2009) doivent
d’ailleurs être mises en regard de celles,
somme toute assez réduites, consacrées
à la prévention.
43
La gestion des risques naturels
dans les départements d’outre-mer
Recommandations
compléter et améliorer les plans
de prévention des risques naturels, en
particulier en matière sismique ; ren-
forcer la lutte contre les constructions
illégales ;
pour le plan séisme Antilles,
mieux associer les collectivités territo-
riales et contractualiser avec elles ; éta-
blir une programmation pluriannelle ;
améliorer le caractère interministériel
du dispositif ;
accroître fortement l’effort de
formation professionnelle ; mettre en
place un dispositif de contrôle des
règles de construction ; rendre obliga-
toire un diagnostic de vulnérabilité sis-
mique lors d’une transaction immobi-
lière ;
stabiliser le cadre du finance-
ment des observatoires volcanolo-
giques et sismologiques ; clarifier les
responsabilités respectives du préfet et
de Météo France ;
inclure les DOM, et en priorité
ceux des Antilles, dans la rénovation
du réseau national d’alerte ;
compléter les plans de secours ;
exiger des collectivités locales l’établis-
sement d’un plan communal de sauve-
garde (PCS) ; prévoir des exercices
« volcan » aux Antilles ; améliorer les
retours d'expérience ;
adapter le dispositif d’indemni-
sation pour mieux inciter à la préven-
tion ;
examiner la possibilité de rendre
les exploitations agricoles des DOM
éligibles au régime des calamités agri-
coles ; appliquer avec rigueur des règles
uniformes pour le fonds de secours.
La gestion des risques naturels
dans les départements d’outre-mer
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
44
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
45
Cour des comptes
15
La politique de soutien à
l’agriculture dans les
départements
d’outre-mer
Le poids relatif de l’agriculture est,
dans les quatre départements d’outre-
mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique
et la Réunion), plus important qu’en
métropole. Si la part de la population
travaillant dans l’agriculture y est cepen-
dant du même ordre qu’en métropole
(3,5 %), la forte croissance démogra-
phique fait de la production agricole un
enjeu économique local essentiel.
La politique de soutien
public au secteur agricole
mobilise des aides finan-
cières substantielles
Les aides agricoles européennes
relèvent d’un programme européen spé-
cifique dont le volet concernant les
régions
ultrapériphériques,
intitulé
POSEI (programme d’options spéci-
fiques à l’éloignement et à l’insularité),
s’applique aux quatre départements.
Dans le cadre du POSEI-France, mis en
œuvre en 2006, puis en 2007 pour la
filière banane, un double choix a été affi-
ché : maintenir les cultures exportatrices
« structurantes » (banane et canne-sucre-
rhum) et favoriser la diversification des
productions, pour améliorer l’auto-
approvisionnement. Le montant des
aides versées en a été augmenté, avec
pour objectif de maintenir les emplois
dans le secteur agricole. En dehors de ce
programme et des aides européennes au
développement rural, les aides natio-
nales ont aussi fortement progressé,
notamment
après
les
événements
sociaux de 2009 et la tenue des « Etats-
généraux de l’outre-mer ». Au total, le
montant des aides agricoles versées à
l’outre-mer a crû de 40 % entre 2008 et
2010, passant de 370 M€ à 520 M€
(montant prévisionnel) ; il profite aux
secteurs de la banane et de la canne à
sucre.
A l’occasion du contrôle de l’Office
de développement de l’économie agri-
cole d’outre-mer (ODEADOM), qui
verse une partie de ces aides, la Cour a
constaté que cet organisme, chargé par
le code rural d’effectuer un bilan des
aides agricoles versées à l’outre-mer, ne
remplissait pas le rôle qui lui était
imparti. La Cour s’est donc attachée à
effectuer ce bilan et à apprécier la
contribution des aides à un développe-
ment agricole durable.
La politique de soutien à
l’agriculture dans les départements
d’outre-mer
Les aides publiques
représentaient, en 2008,
28,6 % de la valeur de la
production agricole outre-
mer, soit le double de la
proportion constatée en
métropole
Cette moyenne recouvre des écarts
importants, conséquence de la concen-
tration des aides sur le secteur de la
banane : 64,7 % pour la Martinique,
32,8 % pour la Guadeloupe, 14,5 %
pour la Réunion et 8,4 % pour la
Guyane. L’effort budgétaire de l’Etat
pour les producteurs de bananes des
Antilles prend aussi d’autres formes :
ainsi, l’Etat a procédé à des abandons de
créances sur des remboursements de
prêts, pour 49,2 M€ ; des rembourse-
ments d’aides européennes ont aussi été
demandés à l’Etat par l’Union euro-
péenne (88,4 M€).
Le maintien des aides au secteur de
la banane, alors que la production était
en baisse, aboutit à une aide à la tonne
entre 2007 et 2009 double de celle
constatée entre 2002 et 2006. L’aide
actuelle à l’hectare de bananeraies aux
Antilles dépasse 15 000 €, soit plus de
300 000 € pour une exploitation de 20
hectares. Ce soutien ne s’est même pas
concrétisé par un maintien des emplois,
ces derniers ayant diminué de plus de
40 % dans les exploitations bananières
des Antilles.
La priorité accordée aux cultures
exportatrices, pourtant peu compétitives
sur le marché mondial, ne laisse qu’une
faible part des aides aux autres produc-
tions locales. De ce fait, malgré l’accrois-
sement du montant global des aides,
l’approvisionnement de la population en
produits locaux a généralement régressé
et la balance commerciale des produits
agricoles et alimentaires s’est dégradée.
Ainsi, le taux de couverture de la
balance commerciale de ces produits est
de l’ordre de 20 %. La situation est pire
encore pour l’agriculture biologique.
Les problèmes posés par
les pollutions liées aux
traitements des bananiers
La Cour a analysé les conséquences
de la pollution par le chlordécone
(insecticide utilisé encore en 1993), tant
d’un point de vue budgétaire que sur les
autres
productions.
Elle
souhaite
notamment que le versement des aides
soit lié au respect de la réglementation
environnementale,
auquel
le
plan
« banane durable » doit contribuer.
L’ensemble des constatations faites
conduit à s’interroger sur l’adéquation
du modèle de développement agricole
retenu pour ces départements.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
46
47
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
redéployer les aides en privilé-
giant la diversification des produits et
les circuits de transformation, avec un
objectif de réduction des importa-
tions ;
prendre en compte le « bilan
carbone » dans les raisonnements éco-
nomiques, en vue de favoriser un déve-
loppement plus endogène des produc-
tions ;
lier le versement des aides au
strict respect de la réglementation envi-
ronnementale, et, d’une manière géné-
rale, à des objectifs de développement
durable mieux ciblés ;
opérer un suivi du « plan chlor-
décone », en liaison avec le ministère
chargé de la santé, pour ce qui
concerne en particulier l’impact sur
l’agriculture et l’aquaculture ;
améliorer
l’intégration
des
filières entre producteurs et transfor-
mateurs, en vue de répondre à la
consommation locale, et développer la
publicité en faveur de ces filières ;
utiliser les instruments de maî-
trise foncière, notamment ceux prévus
par la loi du 27 juillet 2010 de moder-
nisation de l’agriculture et de la pêche ;
astreindre l’ODEADOM à éta-
blir le bilan des aides agricoles outre-
mer, prévu par le code rural ;
favoriser l’élargissement des
bénéficiaires du régime spécifique
d'approvisionnement, en particulier
dans le secteur de l’alimentation ani-
male ;
confier à l’ODEADOM le ver-
sement de l’ensemble des aides du
POSEI et des aides nationales liées,
tout en renforçant sa maîtrise de l’ins-
truction et de la liquidation, pour cha-
cun des dispositifs concernés.
Recommandations
La politique de soutien à
l’agriculture dans les départements
d’outre-mer
16
Un premier bilan des
externalisations au
ministère de la défense
L’externalisation vise à confier à des
sociétés spécialisées, des tâches exécu-
tées jusque là en interne, afin de permet-
tre le recentrage des activités sur les mis-
sions dites de « cœur de métier » et obte-
nir un service de qualité identique ou
supérieure à un coût inférieur.
Les externalisations, une
pratique plus fréquente
Le ministère de la défense, qui doit
pouvoir faire face aux situations de
crises externes, avait pour tradition de
produire en interne - « en régie » - la plu-
part des services dont il avait besoin. La
suspension de la conscription a conduit
à un premier train d’externalisations
(pour les tâches ancillaires notamment).
Ce mouvement s’est accéléré avec les
réflexions liées à la stratégie de réforme
ministérielle (2003), puis à la revue géné-
rale des politiques publiques (RGPP) en
2006.
Cette politique revêt une dimension
particulière au ministère de la défense
car elle est conduite simultanément à
l’ensemble des réformes qui y sont par
ailleurs engagées : interarmisation des
forces, refonte de l’implantation territo-
riale des unités, création des bases de
défense, adaptation au nouveau format
opérationnel arrêté à la suite des travaux
du Livre blanc sur la défense et la sécu-
rité nationale publié en 2008.
Plusieurs secteurs du ministère pou-
vant faire l’objet d’externalisations
importantes, susceptibles de concerner
de nombreux emplois, ont été identifiés.
Un premier bilan des
externalisations
La Cour a examiné plus d’une
dizaine de cas, leurs modalités, leurs
coûts et leurs bénéfices.
Les externalisations réalisées n’ont
pas réduit la capacité opérationnelle des
armées mais, la réalité des gains écono-
miques qu’elles procurent apparaît diffi-
cile à apprécier. D’importants progrès
restent à accomplir par le ministère pour
utiliser à bon escient et efficacement les
externalisations, en particulier en ma-
tière d’analyse des coûts et de délimita-
tion des activités « cœur de métier ».
Cinq conclusions peuvent
être tirées :
1. Les externalisations du ministère
de la défense ont une importance bud-
gétaire encore limitée : environ 1,7 Md€
en 2008, soit un peu plus de 4 % des
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
48
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
49
crédits budgétaires du ministère (hors
pensions). Le développement des exter-
nalisations depuis le début de la décen-
nie est réel ; toutefois, le quasi-double-
ment du volume des dépenses recensées
entre 2005 et 2008 correspond pour l’es-
sentiel à des modifications de périmètre.
Le niveau d’externalisation du ministère
est légèrement inférieur à celui qui est
observé au ministère de la défense alle-
mand (5 % du budget), et très en deçà
de ce qui est observé au Royaume Uni
(25 %).
2. Les externalisations engagées ne
mettent pas en cause la capacité opéra-
tionnelle des armées. Elles sont même
parfois indispensables à la réalisation
des missions, notamment en matière de
transport stratégique (92 % du tonnage
transporté l’est dans le cadre de contrats
externalisés). Les armées doivent préci-
ser ce qu’est le « cœur de métier » pour
déterminer clairement le périmètre des
activités « externalisables » sans risquer
d’être un jour confrontées à des difficul-
tés opérationnelles.
3. Les externalisations réalisées
n’ont pas eu d’effet significatif sur les
personnels. Les projets identifiés dans le
cadre de la RGPP pourraient, en
revanche, concerner près de 16 000
postes. Pour faciliter leur mise en œuvre,
le ministère a fait inscrire à l’article 43 de
la loi du 3 août 2009 des dispositions
pour faciliter le transfert de personnels
publics vers des entreprises prestataires.
4. La participation des PME au pro-
cessus, objectif affiché par le ministère,
n’est pas aujourd’hui mesurée. En outre,
cette participation apparaît délicate à
concilier avec les objectifs de rationalisa-
tion économique, plus favorables aux
grands groupes.
5. La réalité des gains économiques
est difficile à apprécier. L’absence de
comptabilité analytique ne permet pas
d’évaluer le coût de la production en
régie et interdit donc la comparaison
avec le coût de l’externalisation. Des
progrès ont été réalisés mais trop
d’études ne distinguent pas encore les
gains liés à la rationalisation du service,
de ceux nés de l’externalisation propre-
ment dite. Cette distinction est pourtant
indispensable, particulièrement lorsque
l’externalisation fait encourir le risque
d’une perte durable de compétence.
Les externalisations peu-
vent permettre des gains
Sous les réserves présentées, les
externalisations peuvent faciliter des
réorganisations qui seraient sinon diffi-
ciles à réaliser autrement (véhicules
civils
du
ministère),
ou
délicates
lorsqu’elles touchent des activités mobi-
lisant un personnel important (gardien-
nage), du fait d’un différentiel significa-
tif de rémunération avec le secteur privé.
En revanche, les exemples analysés
incitent à la prudence lorsqu’il s’agit
principalement d’équipements : ainsi, de
Un premier bilan des
externalisations au ministère
de la défense
faibles gains sont attendus à Dax (parte-
nariat public privé de fourniture d’héli-
coptères pour la base école), tandis que
des surcoûts apparaissent dans la loca-
tion avec option d’achat des A340 de
l’armée de l’air. Or, dans le contexte
budgétaire actuel, la tentation peut être
forte de recourir aux externalisations
pour réaliser des investissements lourds
et immédiats pour lesquels les finance-
ments budgétaires ne sont pas disponi-
bles, au prix du versement de flux dura-
bles de loyers. La multiplication d’opéra-
tions d’externalisation et de contrats de
partenariat pour des opérations lourdes
contribuerait alors à réduire les marges
de manœuvre budgétaires, en rigidifiant
durablement les dépenses de fonction-
nement (titre 3 du budget). Par ailleurs,
certaines des opérations n’offrent un
avantage économique que grâce à des
recettes tierces dont la réalisation est
incertaine.
Aussi, quelle que soit leur nature,
pour être pleinement justifiées, les exter-
nalisations doivent-elles être justifiées
par leurs mérites propres.
clarifier la notion de « cœur de
métier », ainsi que celle de « socle »,
lorsqu’il y est fait référence pour justi-
fier le recours à des externalisations de
complément ;
développer une comptabilité
analytique solide, préalable indispensa-
ble à l’engagement d’un processus
d’externalisation, pour pouvoir juger
chaque projet sur ses mérites propres ;
renforcer les capacités d’analyse
et de pilotage du ministère.
Recommandations
Un premier bilan des
externalisations au ministère
de la défense
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
50
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
51
17
La gestion du domaine
skiable en Rhône-Alpes
De grandes stations comme Val-
d’Isère, Tignes, Avoriaz, Val-Thorens,
Les Ménuires, Courchevel, Méribel, Les
Arcs, La Plagne, Chamonix, des stations
de moyenne montagne comme Les
Gets, Les Sept Laux et de petites sta-
tions, La Chapelle d’Abondance, Mon-
tricher-Albanne/Les Karellis, Villard de
Lans constituent l’échantillon de cette
enquête. Ces stations représentent
80 %
du chiffre d’affaires des stations alpines,
et 80 % de l'activité hivernale française.
De multiples acteurs
Plusieurs structures interviennent
dans la gestion du domaine skiable :
communes, exploitants des remontées
mécaniques en régie directe ou déléguée,
offices du tourisme, infrastructures de
loisirs, détente et bien-être, sociétés
d'économie mixte (SEM) d'animation.
S'agissant de la seule gestion des remon-
tées mécaniques, la tendance dominante
a cependant été de la déléguer à des
sociétés privées, qu'il s'agisse de sociétés
d'économie mixte ou le plus souvent
d'entreprises privées. De fait, les
domaines skiables échappent souvent
au contrôle des collectivités qui doivent
assumer
des
missions
de
grande
ampleur et intégrer plusieurs logiques,
industrielle, commerciale, et territoriale.
Une renégociation à fort
enjeu
L’arrivée à échéance des contrats
trentenaires, conclus en application de la
loi montagne du 9 janvier 1985, consti-
tue dès lors pour les collectivités déléga-
taires un enjeu vital. La question de leur
renouvellement ou d’une gestion en
direct se posera.
Les collectivités auraient intérêt à se
regrouper face aux opérateurs privés
unis pour constituer des ensembles plus
importants. Les collectivités, majoritai-
rement isolées, se trouvent souvent
affaiblies dans leurs relations avec les
délégataires. Ainsi, certaines d’entre elles
ne peuvent-elles obtenir les informa-
tions qui leur permettraient d’appréhen-
der les incidences tarifaires des choix
opérés, notamment lors d'innovations
commerciales.
Des risques multiples
Un risque financier pèse sur les col-
lectivités locales, dans un contexte de
difficultés budgétaires : en supplément
des conventions existantes, les collectivi-
tés sont parfois amenées à prendre en
charge des investissements de grande
ampleur, mais également des équipe-
ments liés à l’animation, sans pour
autant que les délégataires, qui bénéfi-
cient de leurs retombées en termes de
La gestion du domaine skiable
en Rhône-Alpes
fréquentation de la station, contribuent
à leur financement.
Parallèlement, les stations doivent
faire face à une évolution des pratiques à
la fois estivales et hivernales et répondre
à une demande orientée davantage vers
la détente et les loisirs, induisant des
dépenses nouvelles venant s’ajouter aux
charges spécifiques de personnel et de
matériel liées à l’activité traditionnelle.
Des risques environnementaux doi-
vent également être pris en considéra-
tion, notamment pour les nouveaux
équipements, dont l'intégration dans le
paysage devient une exigence. Se pose
également la question de l’utilisation de
la neige de culture.
Enfin, les collectivités doivent gérer
un risque social, étroitement lié à leur
capacité à proposer aux habitants des
emplois locaux, pour la plupart dans le
domaine du tourisme. Une gestion délé-
guée de leur domaine skiable limite alors
d’autant leurs possibilités d'influer sur
l’emploi local.
investir pour rester compétitif,
mesurer le risque financier des engage-
ments et procéder à une analyse com-
parative pour choisir au mieux le mode
de gestion (directe ou déléguée) des
équipements en fonction de la capacité
financière ;
se fédérer par des regroupe-
ments avec les collectivités gestion-
naires de domaines skiables voisins,
pour atteindre un équilibre face à leurs
prestataires potentiels, eux-mêmes
déjà fortement regroupés ;
mettre en œuvre une program-
mation pluriannuelle des investisse-
ments ;
prévoir, dans les contrats avec
les délégataires, une clause incitative
garantissant aux délégataires un intérêt
à poursuivre la modernisation des
équipements, même dans les dernières
années du contrat ;
établir des inventaires précis et
contradictoires des biens affectés à
l’exploitation, en distinguant les biens
faisant retour gratuitement à la collec-
tivité en fin de contrat et ceux suscep-
tibles de faire
l’objet d’une reprise par
cette dernière ;
tout en visant la satisfaction des
besoins des usagers et la fidélisation de
la clientèle, soucieuse d’authenticité
autant que de détente, faire preuve de
prudence avant de s’engager dans de
coûteuses diversifications des activités,
tant hivernales qu'estivales ;
intégrer pleinement les préoc-
cupations environnementales, et, de
manière générale, du développement
durable, dans l’élaboration des projets
et la prise de décision.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
52
53
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
18
La continuité territoriale
avec la Corse
Depuis 1976, le dispositif de conti-
nuité territoriale avec la Corse permet de
réduire les contraintes de l’insularité.
Les acteurs du dispositif
A compter de 1991, la collectivité
territoriale de Corse (CTC) s’est substi-
tuée à l’Etat pour définir les obligations
de service public (OSP) sur des lignes de
desserte qu’elle choisit. Elle conclut,
via
son office des transports de la Corse
(OTC), des conventions avec chacune
des compagnies qui assurent le service
public de transport aérien ou maritime.
Une dotation dite de continuité ter-
ritoriale (DCT) d’un montant actuel de
187 M€ est allouée chaque année par
l’Etat à la CTC qui la rétrocède à l’OTC.
Celui-ci la répartit ensuite entre chaque
mode de transport afin de financer les
obligations faites aux transporteurs d’as-
surer un service régulier de qualité tout
en appliquant des tarifs réduits pour cer-
taines catégories de passagers, parmi les-
quels les résidents corses. Deux disposi-
tifs peuvent alors exister : la délégation
de service public ou l’aide sociale.
L’économie globale du dis-
positif de continuité terri-
toriale s’est considérable-
ment transformée entre
2001 et 2009
Le nombre total de passagers entrés
et sortis de Corse sur les lignes aériennes
ou maritimes sous OSP a augmenté de
30 %, passant de 4 à 5,2 millions. Cet
accroissement
s’est
essentiellement
concentré sur les lignes maritimes entre
la Corse et Toulon gérées sous le régime
de « l’aide sociale », lequel conduit
l’OTC à rembourser une somme forfai-
taire par passager bénéficiaire d’un tarif
réduit.
Les dépenses faites au
profit des compagnies
contractantes ont forte-
ment évolué
Elles ont dépassé le montant de la
DCT versée par l’Etat. Les réserves
financières de l’OTC, qui s’élevaient à
plus de 40 M€ en 2001, sont à présent
épuisées.
Plusieurs raisons expliquent ces pro-
blèmes de financement aggravés par le
gel de la DCT, qui n’évolue plus depuis
2009 :
La continuité territoriale avec
la Corse
- l’augmentation importante de la
compensation au passager aérien en
2003, qui a permis de restaurer l’équili-
bre financier de la CCM, société d’éco-
nomie mixte de la CTC ;
-l’accroissement de « l’aide sociale »
versée au passager maritime, directe-
ment lié à celui du nombre de passagers
transportés sous ce régime ;
-l’augmentation de la compensation
attribuée aux compagnies maritimes
délégataires maintenues sur les lignes
desservant Marseille, en dépit d’une
perte relative importante du nombre de
passagers transportés sur les lignes délé-
guées ;
-la réduction des tarifs sociaux dont
l’impact n’a pas été mesuré au regard de
l’économie globale du dispositif.
Les défaillances du pilo-
tage
La CTC, autorité organisatrice,
n’a ni su adapter les modes de conven-
tionnement et le contenu des obliga-
tions de service public aux évolutions du
trafic, ni su en anticiper les consé-
quences financières.
Les comptes rendus des transpor-
teurs, souvent trop succincts, n’ont pas
été correctement exploités et le nombre
de passagers bénéficiant de conditions
tarifaires n’est pas précisément connu.
Les cahiers des charges des contrats
successifs conclus pendant cette période
et les négociations qui ont précédé leurs
signatures n’ont pas suffisamment pris
en compte les évolutions qui étaient
pourtant perceptibles depuis plusieurs
années.
La gestion des contrats de déléga-
tion, notamment lors de leur prépara-
tion et de leur passation, n’a pas non
plus permis le jeu optimal des règles de
la concurrence.
En définitive, faute de volonté et
démunie d’instruments d’évaluation, la
CTC n’a pas préparé les décisions straté-
giques nécessaires pour faire évoluer un
dispositif qui donnait depuis plusieurs
années des signes d’essoufflement.
définir clairement le rôle de
l’Office des transports dans la concep-
tion et la gestion de la continuité terri-
toriale, aussi bien maritime qu’aé-
rienne, et mettre en place une véritable
tutelle sur l’établissement ;
renforcer les contrôles de la
mise en œuvre et de l’exécution des
OSP par les compagnies ;
mettre en place les outils d’éva-
luation nécessaires à un débat global et
objectif sur ce sujet ;
favoriser les conditions de
concurrence en anticipant davantage le
lancement des procédures d’attribu-
tion des délégations de service public.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
54
55
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
19
Les ouvriers d’Etat du
ministère chargé de
l’équipement et de
l’aviation civile
Sur 8000 ouvriers d’Etat
du ministère, 2200 ont
été recrutés sans base
légale
En 2009, sur
46 300 ouvriers d’Etat
en activité dans les administrations
d’Etat, le ministère chargé de l’équipe-
ment et de l’aviation civile en employait
8 000 répartis entre les ouvriers des
parcs et ateliers (7 200) et les ouvriers de
l’aviation civile (800).
Près de 5 000 ouvriers sont effecti-
vement affectés dans les parcs et ateliers
de l’équipement, notamment pour l’ex-
ploitation et l’entretien des routes et
pour les travaux de maintenance des
véhicules et engins. A la suite des lois de
décentralisation de 2004, ces personnels
sont, depuis 2010, transférés aux collec-
tivités territoriales, dans des conditions
qui traduisent une certaine imprépara-
tion.
Les 2 200 autres ouvriers affectés
théoriquement dans les parcs et ateliers
sont en réalité employés dans d’autres
services selon des modalités irrégulières.
Les quelque 800 ouvriers relevant de
la direction générale de l’aviation civile
sont, quant à eux, répartis entre 42
familles professionnelles au sein des-
quelles ils exercent des fonctions très
variées (logisticien, chauffeur, peintre,
informaticien, magasinier, climaticien,
photographe, etc.) qui, dans le reste de la
fonction publique, sont pour la plupart
exercées par des fonctionnaires titulaires
ou des contractuels.
Ces ouvriers d'État bénéfi-
cient d’un « quasi-statut »
très avantageux
Les avantages de ces non-titulaires
de la fonction publique sont multiples,
en termes de recrutement, de promo-
tion et de rémunération. De plus, ces
ouvriers sont affiliés à un régime spécial
de retraite qui leur assure une pension
supérieure de 30 % en moyenne à celle
versée aux agents titulaires de la fonc-
tion publique exerçant des fonctions
comparables.
La gestion de ces ouvriers
d’Etat présente de nom-
breuses et graves irrégu-
larités
Depuis plusieurs années, les promo-
tions sont accordées de manière abusive,
sans maîtrise des coûts et au mépris des
règles d’équilibre du pyramidage entre
les différents niveaux hiérarchiques. De
Les ouvriers d’Etat du ministère
chargé de l’équipement et de
l’aviation civile
plus, pour les ouvriers des parcs et ate-
liers, des promotions de compagnon à
maître-compagnon sont accordées l’an-
née précédant la retraite, alors qu’une
telle pratique est expressément interdite
par les textes.
La quasi-totalité des élé-
ments de rémunération
des ouvriers de l’aviation
civile doit être revue sans
délai
En effet, des heures supplémen-
taires fictives sont dissimulées dans le
traitement principal des ouvriers de
l’aviation civile, valorisant irrégulière-
ment l’ensemble de leur paie (jusqu’à
400 euros par an). Ce système occulte a
représenté un coût de 3,6 M€ pour
l’Etat depuis sa mise en place en 2002.
Dans les services de l’aviation civile,
encadrer deux ouvriers permet d’être
nommé chef d’équipe et de voir ainsi
son salaire majoré de 20 %, sans base
réglementaire à cette majoration. La
Cour a également recensé plusieurs
compléments de rémunération irrégu-
liers octroyés à ces personnels, de même
qu’un taux de l’heure supplémentaire
indûment survalorisé de 35 %, avant
toute majoration légale.
Les services de l’aviation civile n’ont
pas été capables de communiquer le
coût moyen salarial par niveau de ses
ouvriers.
Ces pratiques sont à l’ori-
gine d’une dérive finan-
cière importante
Entre 2006 et 2009, la masse sala-
riale des ouvriers des parcs et ateliers est
restée stable pour des effectifs en dimi-
nution de 11 %, et celle des ouvriers de
l’aviation civile a progressé de 29 %
pour des effectifs en diminution de 4 %.
La gestion des ressources humaines
de ces personnels est gravement défail-
lante et les avantages sont consentis en
l’absence de toute évaluation des per-
sonnels et sans recherche de producti-
vité.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
56
57
Synthèse
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Les ouvriers d’Etat du ministère
chargé de l’équipement et de
l’aviation civile
Recommandations
mettre un terme à tout recrute-
ment d’ouvrier d’État dans les services
du ministère chargé de l'équipement et
de l'aviation civile ;
identifier, au sein de la DRH de
ce ministère, un seul service chargé de
l’ensemble de la gestion des ouvriers
d’État, quelle que soit leur affectation ;
revoir l’ensemble du dispositif
de primes, d’indemnités et d’heures
supplémentaires applicables à cette
catégorie de personnel, d’une part en
supprimant celles qui apparaissent
exorbitantes du droit commun de la
fonction publique, d’autre part en don-
nant à celles qui subsisteraient un fon-
dement juridique régulier ;
cesser la pratique des « promo-
tions coups de chapeau » et redéfinir le
pyramidage des différentes catégories
d’ouvriers d’État, par l’application de
quotas de promotion négociés avec la
direction du budget ;
régulariser
la
situation
des
quelque 30 % des effectifs d’ouvriers
qui ne sont pas affectés au sein des
parcs et ateliers ;
réformer le système d’informa-
tion, de gestion et de paie de la DGAC,
pour faire cesser toute pratique irrégu-
lière et afin que cette direction soit
capable, dans les meilleurs délais, de
produire des données fiables en
matière de gestion de son personnel
ouvrier ;
réorganiser la gestion des res-
sources humaines de la direction géné-
rale de l’aviation civile afin de la fiabili-
ser et de mettre un terme à la pratique
du paiement caché d’heures supplé-
mentaires fictives.
Cour des comptes
20
Le “quart de place” des
militaires
Les déplacements par chemin de fer
des militaires sont à l’origine de la
contribution de l’Etat à la SNCF la plus
élevée (192,4 M€ en 2009) et dont l’évo-
lution a été la plus dynamique depuis
une dizaine d’années (+34,5 %).
Le « quart de place » :
une survivance historique
des premières concessions
de lignes ferroviaires
Depuis le XIXème siècle, une réduc-
tion tarifaire de 75 %, dite « quart de
place », est accordée aux militaires pour
leurs déplacements en train d’ordre pro-
fessionnel ou privé. Ce tarif est com-
pensé par le budget de l’Etat depuis
1949, selon des modalités actuellement
fixées par un accord-cadre et une
convention signés en 2006 et 2007 entre
l’Etat et la SNCF.
Les militaires perçoivent le bénéfice
de cette réduction tarifaire et du finance-
ment public de leurs voyages à titre
privé comme un accessoire de leur statut
: ils y voient une compensation des
contraintes spécifiques liées à la vie mili-
taire, qui impose une forte mobilité pro-
fessionnelle et, souvent, un éloignement
du foyer familial.
L’évolution incontrôlée
des dépenses
Alors que les dépenses consenties à
ce titre augmentaient rapidement, le
ministère de la défense ne s’est pas doté
des moyens d’en contrôler l’évolution ni
de prévenir efficacement la fraude, pro-
bablement sous-évaluée. Les cartes de
circulation sont encore éditées sur sup-
port papier ; les cartes vierges stockées
dans les unités
sont une source poten-
tielle de diffusion de cartes contrefaites ;
certains militaires ne restituent pas leur
carte lorsqu’ils quittent l’armée.
En outre, l’information sur les diffé-
rentes variables liées aux cartes de circu-
lation et à la compensation de cette
charge par l’Etat –
nombre de cartes,
effectifs physiques, montant de la
dépense – est cloisonnée, et le contrôle
interne encore insuffisant. La mise en
place des instruments de suivi des don-
nées relatives à l’émission des cartes de
circulation est si récente que leur recen-
sement n’est fiable que depuis 2009.
Aucune comparaison systématique de
l’effectif des militaires en activité avec le
nombre des cartes de circulation en
cours de validité n’est possible. Le
ministère de la défense ne connaît pas le
nombre exact des militaires ayant voca-
tion à détenir une carte de circulation ; il
ne peut donc le comparer à celui des
cartes en cours de validité. Par ailleurs,
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
58
59
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
les clauses de la convention qui habili-
tent l’Etat à opérer des contrôles sur la
production des données informatiques
de la SNCF entrant dans le calcul de la
charge compensée sont restées lettre
morte.
De trop nombreux bénéfi-
ciaires
Le champ des bénéficiaires du
« quart de place » est vaste, puisqu’il
comprend tous les militaires en position
d’activité, telle que la définit leur statut.
Cette situation concerne non seulement
les militaires en fonction au ministère de
la défense et dans la gendarmerie natio-
nale, mais aussi ceux affectés auprès
d’autres administrations de l’Etat ou
d’établissements publics, voire dans des
entreprises privées. Elle concerne égale-
ment les généraux dits « de la 2ème sec-
tion » qui, ayant fait
valoir leurs droits à
la retraite, demeurent à la disposition du
ministre de la défense et, à ce titre per-
çoivent une solde d’activité et bénéfi-
cient à vie d’une carte de circulation.
La pertinence d’une telle extension
de ce champ peut être mise en doute : le
ministère de la défense finance les
déplacements professionnels et person-
nels de militaires affectés hors de ses
services, occasionnant avec divers opé-
rateurs publics ou privés
un transfert de
charge qu’il est impossible de chiffrer.
En principe destiné à compenser les
sujétions spécifiques imposées aux mili-
taires, le « quart de place » profite en réa-
lité aussi à des personnes qui ne les
subissent pas.
La nécessaire réforme du
« quart de place »
Le ministère de la défense, désor-
mais conscient de la nécessité de réfor-
mer le dispositif, envisage de moderni-
ser le support de la carte de circulation
(carte à puce). L’invalidation à distance
des cartes des agents ayant rompu tout
lien avec le service serait ainsi rendue
possible.
Il importe de pouvoir discerner le
motif du déplacement, de service ou
personnel. Cet objectif pourrait d’ores
et déjà être atteint si les ministères de la
défense et de l’intérieur émettaient un
ordre de mission préalable pour les
déplacements pour motif professionnel
des militaires. L’utilisation de la carte de
circulation étant ainsi, de fait, réservée
aux déplacements personnels, il serait
alors possible de connaître la valeur de
l’avantage en nature conféré. Dès lors,
rien ne s’opposerait plus au réexamen
du fondement de l’exonération de prélè-
vements sociaux et fiscaux
de cet avan-
tage en nature, dont la Cour a souligné
en 2009 le caractère dérogatoire.
Le « quart de place » s’inscrit par ail-
leurs dans un environnement incertain :
l’ouverture à la concurrence des lignes
ferroviaires internationales est suscepti-
ble d’entraîner, à terme, une remise en
cause de la régularité de sa compensa-
tion par l’Etat.
Le “quart de place” des militaires
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Recommandations
réexaminer systématiquement
le champ des bénéficiaires de la carte
de circulation, afin d’en réserver l’oc-
troi aux militaires subissant des
contraintes spécifiques ;
réexaminer le fondement du
défaut de valorisation de l’avantage en
nature que constitue
« le quart de place
» pour les déplacements d’ordre privé,
conjointement entre les ministères
chargés du budget et de la fonction
publique, en vue de son intégration
dans
l’assiette
des
prélèvements
sociaux et fiscaux ;
poursuivre la démarche de
modernisation des cartes de circulation
d’ores et déjà amorcée et améliorer le
contrôle interne.
Au delà, le ministère de la défense
doit s’interroger sur la pertinence du
maintien du régime du « quart de
place ».
Le “quart de place” des militaires
60
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
61
Cour des comptes
21
Les particularités des
rémunérations des
réservistes militaires
Une exonération d’impôt
sur le revenu difficile à
justifier
Les rémunérations versées aux
réservistes sont exonérées d’impôt sur le
revenu. L’exonération fiscale des réser-
vistes militaires a concerné, en 2008,
plus de 60 000 personnes (gendarmerie
comprise), pour une dépense fiscale de
6,4 M€. Pour justifier cette exonération,
il n’est plus possible d’invoquer la néces-
sité de compenser l’obligation de parti-
ciper à des périodes d’instruction obli-
gatoires puisque cette obligation a pris
fin avec la loi du 22 octobre 1999. Par
ailleurs, la rémunération des réservistes
ne saurait être assimilée à un défraie-
ment susceptible d’être exonéré.
Le maintien du traitement
des agents publics réser-
vistes
Les agents publics qui s’absentent
pour participer à des activités de la
réserve conservent le versement de leur
traitement, jusqu’à trente jours par
année civile.
Cet avantage accroît le coût de la
réserve de plusieurs millions d’euros et
explique certainement la surreprésenta-
tion des agents publics dans la réserve
militaire.
revenir sur cette exonération,
qui heurte le principe d’équité fiscale
entre militaires d’active et de réserve ;
reconsidérer l’avantage dont
bénéficient les agents publics et non
les réservistes salariés du privé.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
62
Cour des comptes
22
La SOVAFIM :
un intervenant sans
utilité réelle
La société de valorisation foncière et
immobilière (SOVAFIM) est une société
anonyme dont le capital est entièrement
détenu par l’Etat. Elle a été créée en
2006 afin d’accélérer les cessions de
biens immobiliers de Réseau Ferré de
France et de réaliser sur ces opérations
des plus-values destinées à remonter
vers le budget de l’Etat sous la forme de
dividendes. La SOVAFIM a été conçue
sur la base d’un projet de court terme et
sans perspective claire. Sa mission pre-
mière
était
d’apporter
à
l’Etat
350 M€ de recettes budgétaires en 2006
et autant en 2007.
Aucun autre transfert de biens de
RFF n’étant intervenu depuis, plusieurs
élargissements du champ d’intervention
de la SOVAFIM ont été réalisés par le
législateur, dans le but d’étendre sa mis-
sion à la valorisation d’ensembles immo-
biliers appartenant à l’Etat et ses établis-
sements publics. Toutefois, entre 2007
et 2009, l’activité de la SOVAFIM résul-
tant de ces dispositions s’est limitée à
trois opérations ponctuelles, effectuées à
la demande de l’Etat.
Les ambitions des dirigeants de la
société, qui entendaient en faire un opé-
rateur immobilier susceptible d’investir
1 Md€ en cinq ans, sont restées sans
suite. Un projet de développement auto-
nome a été remis en cause en l’absence
de recapitalisation par l’Etat actionnaire.
Les transferts de biens immobiliers dont
la SOVAFIM a bénéficié, limités en
nombre, ne lui ont pas offert de réelles
perspectives de développement.
L’activité de la SOVAFIM est deve-
nue très limitée (4,5 M€ de chiffre d’af-
faires en 2009) et dès lors peu rentable,
la rentabilité des capitaux propres (1 %
en 2009) ne rémunérant plus le risque de
l’activité. Sa dépendance à l’égard des
décisions de l’Etat, qui déterminent son
niveau d’activité, limite ses marges de
manœuvre, et elle n’est de fait qu’un
démembrement de l’administration.
N’ayant en définitive pour seul client et
interlocuteur que l’Etat lui-même, cette
société, dont la surface financière est
trop étroite pour lui permettre d’acqué-
rir un portefeuille significatif de biens à
gérer et qui sous-traite l’essentiel de son
activité de cession à des courtiers, est
une structure intermédiaire sans client et
sans projet de long terme.
mettre un terme à l’existence de cette société sans utilité réelle.
recommandation
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
63
Cour des comptes
23
Le nouveau siège de
l’Office Paris Habitat
Premier office public de l'habitat de
France (plus de 117 000 logements),
Paris Habitat disposait d'un siège social
situé rue du Cardinal Lemoine dans le
5ème arrondissement de Paris qui ne
pouvait accueillir l'ensemble de ses ser-
vices, dont plusieurs étaient donc instal-
lés dans des immeubles pris en location.
Pour les réunir en un site unique, le
conseil d'administration de l'office a
décidé, en décembre 2003, de vendre le
siège social et d'acquérir, en copropriété,
un immeuble situé rue Claude Bernard,
toujours dans le 5ème arrondissement,
précédemment utilisé par le quotidien le
Monde. Les services informatiques
n'ont toutefois pu être en totalité
accueillis rue Claude Bernard.
Une défaillance du pilo-
tage entraînant une dérive
des coûts et des délais
Le coût du projet est passé de 90 M€
à 139,4 M€ entre l'hypothèse de départ
présentée au conseil d'administration en
mars 2004 et l'estimation fournie en mai
2008, un mois avant l'installation effec-
tive dans le nouveau siège, soit quatre
ans et demi alors qu'un délai de réalisa-
tion de deux ans était initialement prévu.
Cette dérive des coûts et des délais
paraît imputable à un pilotage défaillant
du projet laissant place à de nombreuses
modifications qui auraient pu être antici-
pées : les hésitations qui ont caractérisé
la réalisation du désamiantage du bâti-
ment sont à cet égard illustratives.
Des performances peu
satisfaisantes en terme
de développement durable
Malgré un souci affiché du dévelop-
pement durable, les performances du
nouveau bâtiment suscitent des interro-
gations au terme de sa première année
d'utilisation, les charges d'électricité et
de chauffage ayant presque doublé par
rapport à celles des trois anciens sites.
Une approche par le coût
global de longue période
La direction de l'Office a avancé
que, compte tenu des dépenses évitées
du fait de l'abandon des anciennes
implantations, le coût
« net » du projet
devrait se situer entre 29 et 34 M€.
L'évaluation réalisée pour la chambre
régionale des comptes, à partir du calcul
du coût global sur 40 ans du nouveau
siège, établit le coût
« net » à 55 M€, soit
l'équivalent de 240 logements sociaux.
Le nouveau siège
de l’Office
Paris Habitat
Le calcul d'un loyer fictif de l'opéra-
tion pour permettre une comparaison
avec les loyers pratiqués dans Paris,
comme le ferait un promoteur, situe ce
loyer au-dessus des loyers les plus élevés
du 5ème arrondissement et au niveau de
la zone la plus chère de Paris pour l'im-
mobilier de bureau.
Il est regrettable que, pour une opé-
ration de cette envergure, un grand
organisme, dont le métier est de
construire et de gérer des logements,
n'ait pas retenu d'emblée une approche
fondée sur le coût global de longue
période. Il aurait ainsi pu comparer plu-
sieurs options et intégrer, de façon per-
tinente, les impératifs du développe-
ment durable. Ainsi que l'Office l'admet,
cette approche demeure indispensable,
tout au long de la période d'utilisation
du bien immobilier, afin de suivre et de
maîtriser au mieux les dépenses.
mener, dès l’amont de toute
opération d’envergure, une approche
fondée sur le coût global de longue
période. C’est en se référant à ce coût
global qu’il est possible de comparer
plusieurs options et d’intégrer, de
façon pertinente, les impératifs du
développement durable ;
pratiquer cette même approche
tout au long de la période d’utilisation
du bien immobilier, afin de mieux sui-
vre les dépenses et de mieux les maîtri-
ser dans l’intérêt conjugué des finances
publiques et de l’environnement.
Recommandations
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
64
65
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
24
Les exonérations des
indemnités versées aux
arbitres et juges sportifs:
un instrument inadapté
La loi du 23 octobre 2006 a précisé
le régime juridique des 196 000 arbitres
et juges sportifs et défini les modalités
d’exonération fiscale et sociale des
indemnités qui leur sont versées. Elle
prévoit que leurs indemnités sont exo-
nérées de charges sociales - patronales et
salariales - dans la limite de 14,5 % du
plafond annuel de la sécurité sociale, soit
5 020 € en 2010. Elles sont exonérées
d’impôt sur le revenu si leur montant
annuel est inférieur au même plafond.
Un régime déclaratif peu
fiable
Le régime de déclaration retenu par
la loi présente des limites manifestes.
Sur le plan fiscal, il incombe en effet aux
seuls arbitres - et non aux organismes
qui les rémunèrent (clubs sportifs, fédé-
rations sportives, organisateurs de com-
pétitions) - de déclarer les indemnités
arbitrales qui dépassent le plafond du
dispositif. Sur le plan des cotisations
sociales, les fédérations sportives et les
ligues professionnelles doivent théori-
quement déclarer les indemnités versées
: toutefois, les arbitres ne sont tenus de
les informer qu’à partir du dépassement
du plafond, et ils ne leur transmettent
qu’à leur demande les formulaires sur
lesquels ils doivent recenser l’intégralité
des sommes perçues. En pratique, ce
régime déclaratif dépend donc de la
qualité, de la fréquence et du caractère
exhaustif des informations transmises
par les arbitres : les fédérations sportives
et les ligues professionnelles ne sont pas
en mesure de s’assurer à tout moment
de la correcte application des disposi-
tions d’exonération, contrairement à
leur responsabilité que définit la loi.
En outre, des interprétations diver-
gentes se manifestent dans l’application
de ces dispositions. Ainsi, alors que
l’exonération fiscale ne doit concerner
que les montants de rémunération infé-
rieurs au plafond, certaines fédérations -
telles que la fédération française de foot-
ball -
interprètent de manière irrégulière
les dispositions de la loi du 23 octobre
2006, en accordant également le béné-
fice de cette exonération aux arbitres
dont les indemnités sont supérieures à
5 020 € par an.
Un dispositif mal suivi
Toute tentative de chiffrage du coût
fiscal et social du dispositif est frappée
d’incertitude en raison, non seulement
du caractère déclaratif des rémunéra-
Le exonérations des indemnités
versées aux arbitres et juges
sportifs : un instrument inadapté
tions perçues, mais aussi de la mécon-
naissance du nombre exact d'arbitres et
de leur statut (professionnel ou
béné-
vole à titre complet ou partiel). Dans ces
conditions, les hypothèses arrêtées par
l’administration
pour
chiffrer
ces
dépenses fiscales et sociales ne sont pas
homogènes. Au total, les écarts de chif-
frage du coût global de ce dispositif
- entre 37,5 M€ et 134 M€ selon les
hypothèses retenues par les différents
services et organismes concernés -
révèle la défaillance de son suivi, et cor-
rélativement l'incapacité qui en résulte
pour l'Etat de s’assurer de l'impact de
ces mesures d’exonération. Pourtant, le
coût des exonérations en faveur des
arbitres représente, selon les évaluations,
entre 15 % et 54 % du programme bud-
gétaire « Sports » (dont les crédits s’éle-
vaient à 246,7 M€ en 2010).
Une efficacité non mesu-
rée
Il est difficile d’établir un lien direct
entre l’évolution du nombre d’arbitres et
ces mesures d’exonération. En effet, si
le coût global de ce dispositif est élevé -
quel que soit le chiffrage retenu -, l’avan-
tage pécuniaire qu’il procure à titre indi-
viduel à chaque arbitre est limité, et ne
saurait constituer, à lui seul, une incita-
tion suffisante pour expliquer un
accroissement notable des vocations
arbitrales. De surcroît, une part impor-
tante des arbitres amateurs n’est pas
concernée par ces mesures d’exonéra-
tion : la part du bénévolat, qui, par
construction, n’est pas concernée, est
estimée par
l’AFCAM à 40 % du corps
arbitral, soit environ 78 000 arbitres en
2010.
En définitive, la loi du 23 octobre
2006 a clarifié le statut des arbitres et des
juges sportifs. Toutefois, l’absence d’ob-
jectif clairement défini pour ces mesures
d’exonération se double d’une absence
de pilotage et d’évaluation du dispositif
par la direction des sports. En fait, l’Etat
renvoie aux fédérations sportives la res-
ponsabilité d’encadrer les modalités de
rémunération des arbitres : la mise en
œuvre du dispositif d’exonération de la
loi du 23 octobre 2006 ne s’est ainsi
accompagnée d’aucune réflexion sur le
régime indemnitaire des arbitres.
Dans ces conditions, les dispositifs
d’exonération sociale et fiscale créés par
la loi du 23 octobre 2006 ne s’inscrivent
pas de façon claire et cohérente dans le
cadre de la politique mise en œuvre par
l’État dans le domaine du sport : aucun
des objectifs fixés par le programme
budgétaire « Sport » n’amène à considé-
rer qu’une partie de la rémunération des
arbitres et des juges sportifs aurait voca-
tion à être financée par le budget de
l’État et par le régime général de la sécu-
rité sociale.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
66
67
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
La Cour souligne le rôle essentiel
joué par les arbitres dans l’apprentis-
sage et l’organisation des activités
sportives, de même que les difficultés
considérables qu’ils rencontrent dans
l’exercice de leurs fonctions.
Elle observe toutefois que les
situations auxquelles ils sont confron-
tés sont très dissemblables et devraient
appeler des solutions différentes.
Dans ces conditions, l’inadaptation
fondamentale de ce dispositif d’exoné-
rations généralisées amène la Cour,
compte tenu de l’importance dispro-
portionnée de son coût global par rap-
port aux crédits budgétaires du pro-
gramme « Sport », à recommander sa
suppression.
Recommandations
Le exonérations des indemnités
versées aux arbitres et juges
sportifs : un instrument inadapté
Cour des comptes
68
25
Le musée national
du sport :
un projet mal suivi
Le musée du sport, simple service
du ministère chargé des sports depuis sa
création en 1963, n’a été transformé en
établissement public administratif qu’en
mars 2006.
Malgré près de 600 000 objets et
documents, qui forment l’une des plus
importantes collections au monde por-
tant sur l’histoire des sports, ce musée
reste très peu connu et très faiblement
fréquenté. Au terme de son contrôle, la
Cour a dressé trois constats qui expli-
quent ce paradoxe :
Une institutionnalisation
tardive et confuse
La transformation du musée en éta-
blissement public a été laborieuse. Il a
fallu un an pour que le nouvel établisse-
ment soit doté d’un conseil d’adminis-
tration et d’une comptabilité opération-
nelle. Pendant ce temps, le responsable
du musée a recouru à une société privée,
avec laquelle il a signé une convention
en mars 2005, pour organiser des expo-
sitions itinérantes et recruter des agents,
alors qu’il ne disposait pas de délégation
de signature pour ce faire.
Les services du ministère des
sports ont insuffisamment exercé leur
responsabilité de tutelle. Alors qu’un
rapport d’inspection générale révélait
des anomalies dès octobre 2006, la
convention n’a été résiliée qu’en août
2007 à la demande, non pas des services
ministériels, mais du contrôleur finan-
cier
Une absence d’implanta-
tion pérenne
Le musée national du sport n’a
jamais bénéficié d’une implantation
pérenne. En 1979, ce « musée virtuel » a
été installé, à titre précaire, dans l’en-
ceinte du Parc des Princes, mais il a fallu
attendre
1988,
pour
que
des
« galeries nationales » du musée y soient
inaugurées, ce qui a permis une présen-
tation permanente au public jusqu’en
1997. Toutefois, la préparation de la
Coupe du monde de football de 1998 a
eu pour conséquence de resserrer les
locaux du musée et de fermer ses salles
d’exposition. Plusieurs projets d’implan-
tation du musée ont alors été envisagés.
Une stratégie pour les col-
lections peu claire
Le musée n’a donc pu présenter,
depuis juillet 2008, que 350 objets dans
des locaux, appelés « vitrine », situés au
rez-de-chaussée d’un immeuble loué par
le ministère. Cette présentation n’attire
qu’un public restreint (en moyenne,
moins de 50 visiteurs par jour). De
nombreuses difficultés et des surcoûts
notables ont affecté cette implantation.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
69
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Alors qu’elle aurait dû être achevée
début 2006, la « vitrine » ne l’a été qu’en
juin 2008. L’enveloppe financière initiale
(3,5 M€) a été largement dépassée
(4,4 M€). En définitive, la présentation
de chacun des 350 objets exposés a
coûté plus de 12 000 euros.
L’usage à venir de la « vitrine » reste
incertain. Le ministère a fait part d’un
projet d’implantation du musée à Nice,
au sein d’une « Cité nationale des
sports » : un protocole d’accord a été
signé en mai 2010 avec la ville de Nice,
mais il ne règle pas la question de la
prise en charge du coût de la « vitrine »,
dont le ministère a supporté le finance-
ment pour un usage peut-être tempo-
raire.
Une dernière difficulté concerne les
collections du musée. Celles-ci sont en
effet consacrées à l’histoire de toutes les
disciplines sportives, appréhendée à tra-
vers les compétitions, les pratiques de
loisirs et la place des phénomènes spor-
tifs dans la société. Cette orientation
explique la présence d’objets parfois sin-
guliers, tels qu’un camion publicitaire
d’un Tour de France, ou répétitifs,
comme de nombreux maillots et acces-
soires dédicacés par des champions.
L’étendue de ces collections exige la
définition d’une stratégie d’acquisition.
Les premières avancées
Il a pourtant fallu attendre de nom-
breuses années pour que le musée s’en-
gage dans la définition d’un projet cultu-
rel et scientifique, qui n’a été validé par
le
conseil
d’administration
qu’en
novembre 2010.
L’actuelle direction du musée natio-
nal du sport s’efforce désormais de sur-
monter les défaillances constatées au
cours de la décennie écoulée. En témoi-
gnent le contrat de performance signé
en février 2010 avec le ministère des
sports, le protocole d’accord conclu en
vue de l’implantation à Nice ou la prépa-
ration d’un projet scientifique et cultu-
rel. Toutes ces démarches restent toute-
fois à concrétiser : à défaut, il serait
indispensable de s’interroger sur l’avenir
de ce musée.
Le musée national du sport :
un projet mal suivi
trouver la solution appropriée
pour réduire les coûts très élevés que le
ministère chargé des sports a engagés
dans la « vitrine », qui constitue une
installation précaire devenue sans
objet, du fait de la perspective d’im-
plantation
du
musée
à
Nice
;
si les avancées annoncées ne se
matérialisaient pas, s’interroger sans
délai sur l’avenir de ce musée.
Recommandations
Suites données aux
observations
des juridictions financières
Synthèses du tome 2
71
_______________________________
(1)Office national de l’eau et des milieux aquatiques
Cour des comptes
26
Les services publicsd’eau
et d’assainissement :
des évolutions encoura-
geantes
Dans son rapport thématique de
2003 consacré à la gestion des services
publics d’eau et d’assainissement, la
Cour recommandait une gestion inter-
communale, afin de renforcer les écono-
mies d’échelle, la transparence financière
et le pilotage de ces services. Sept ans
plus tard, malgré des progrès constatés,
d’importants efforts de rationalisation
restent à accomplir.
Les suites données aux
recommandations de la
Cour : les progrès initiés
par le Gouvernement et le
Parlement
Parmi ces progrès, le décret du 14
mars 2005 a normé la présentation et le
contenu du compte annuel de résultat de
l'exploitation (CARE). La loi du 30
décembre 2006 sur l’eau et les milieux
aquatiques a quant à elle facilité la pro-
grammation et le pilotage budgétaires.
Les obligations du délégataire ont égale-
ment été renforcées, notamment lors du
renouvellement des installations. Enfin,
la loi a créé un système d’information
sur les services publics d’eau et d’assai-
nissement (SISPEA).
Les efforts des collectivi-
tés territoriales
Ces efforts engagés pour améliorer
la gestion des services d’eau et d’assai-
nissement se manifestent par le dévelop-
pement des capacités d’expertise. Celles-
ci permettent une plus grande transpa-
rence dans le choix du mode de gestion,
la réduction de la durée des contrats de
délégation, une remise en compétition
plus rapide ainsi que l’insertion de
clauses contractuelles permettant un
contrôle réel des conditions d’exécution.
Les progrès restant à
accomplir : un nombre
excessif de services
Des insuffisances persistent, notam-
ment en termes de coûts, du fait du
nombre trop élevé de services d’eau et
d’assainissement. Selon l’ONEMA
(1)
, la
France en compterait 35.000, un nom-
bre sans équivalent en Europe. Les dis-
positions législatives adoptées depuis
2003 pour favoriser leur regroupement
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
72
73
Les services publics d’eau
et d’assainissement :
des évolutions encourageantes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
n’ont guère modifié ce maillage territo-
rial. Ce surnombre engendre des diffi-
cultés pour l’alimentation du SISPEA,
ses objectifs de fiabilité et d’exhaustivité
étant difficilement compatibles avec
l’actuel morcellement des structures.
Un nécessaire rééquili-
brage des relations entre
collectivités et déléga-
taires
Du fait de l’asymétrie dans la
connaissance des réseaux, les collectivi-
tés ne maîtrisent pas réellement les rené-
gociations de contrats, ce qui explique le
faible taux de changement d’opérateur.
De même, le compte rendu financier du
délégataire, souvent bref et lacunaire, ne
permet pas la comparaison entre résul-
tats réels et prévisionnels. Les syndicats
d’eau et d’assainissement et les collecti-
vités de taille modeste étaient tradition-
nellement assistées par les services de
l’Etat en matière d’ingénierie publique,
mais un arrêt quasi-total de ces presta-
tions est prévu à l’horizon 2011.
En conclusion, seule la réduction
drastique du nombre de structures et la
mutualisation des moyens et compé-
tences permettront d’améliorer la ges-
tion, et de rééquilibrer les rapports entre
les collectivités et les délégataires de ser-
vice public.
rendre obligatoire l’ouverture
d’un compte de trésorerie propre, pour
les DSP ;
autoriser le placement des excé-
dents réalisés par la mise en œuvre
des
dispositions de l’article L. 2224-11-1 du
CGCT ;
mettre en œuvre effectivement
les nouvelles normes comptables de
l’instruction M49 applicable aux ser-
vices d’eau et d’assainissement ;
déterminer par voie réglemen-
taire le contenu et la présentation du
CARE du délégataire, pour le rendre
comparable au compte d’exploitation
prévisionnel annexé au contrat ;
reporter au 30 septembre la pré-
sentation du rapport annuel sur le prix
et la qualité du service, afin de permet-
tre à l’autorité organisatrice de mener
une expertise au fond des informations
transmises par le délégataire ;
afin de disposer d’une base de
données sur l’eau pertinente sur l’en-
semble de la France, améliorer le fonc-
tionnement du système d’information
sur les services publics d’eau et d’assai-
nissement, en instaurant une obligation
de transmission de l’ensemble des indi-
cateurs de performance pour les ser-
vices publics les plus significatifs au
plan national.
Recommandations
Cour des comptes
74
27
Les organismes faisant
appel à la générosité
publique
La mission confiée par le
législateur à la Cour
Le législateur a souhaité, en 1991,
que la Cour puisse « exercer un contrôle
du compte d’emploi des ressources col-
lectées auprès du public dans le cadre de
campagne menées à l’échelon national
[…] afin de vérifier la conformité des
dépenses […] aux objectifs poursuivis
par l’appel à la générosité publique ».
Dès ses premières enquêtes, la Cour
ne s’est pas tenue à la seule vérification
comptable du compte d’emploi et de
ressources. Elle a considéré qu’il relevait
de sa mission d’examiner les actions
conduites et leur pilotage, ainsi que les
procédures mises en place et les modali-
tés de gestion. Vérifier la conformité des
dépenses engagées aux objectifs pour-
suivis par les campagnes suppose, en
effet, de contrôler, en amont, l’informa-
tion donnée aux donateurs potentiels
sur l’utilisation qui sera faite des fonds
collectés, et, en aval, la nature, les moda-
lités de réalisation et les résultats des
actions financées.
La Cour a aussi tenu à rendre
compte de ses contrôles aux donateurs
en publiant systématiquement le résultat
de ses investigations
Des recommandations lar-
gement suivies d’effet
Depuis 2004, la Cour a mis en
œuvre différents types d’enquêtes pour
s’assurer du suivi de ses recommanda-
tions :
1.
de nouveaux contrôles exhaus-
tifs (trois cas) : deux des trois rapports
parus entre 2004 et 2007 ont relevé des
changements considérables ou des amé-
liorations significatives ;
2.
des enquêtes de suivi ciblé
(cinq cas) : les rapports publiés en juin et
septembre 2009 ont montré que les
associations contrôlées avaient large-
ment pris en compte les recommanda-
tions de la Cour, à l’exception notable de
la Société protectrice des animaux.
L’administrateur judiciaire de la SPA,
nommé à la suite de ce contrôle, rend
compte de ses diligences dans le présent
rapport ;
3.
un contrôle de l’emploi du reli-
quat de la collecte affectée aux victimes
du tsunami du 26 décembre 2004 : sur
les 29 organismes de nouveau examinés
en 2009, 19 ont vu leurs dépenses « tsu-
nami » 2006-2008 déclarées conformes,
sans réserve, à l’objet de l’appel.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
75
La Cour a ainsi pu constater que ses
observations étaient largement suivies
d’effet.
Elle a aussi profité de sa dernière
publication pour rappeler que, dans le
cas d’une collecte affectée :
- tous les dons reçus doivent, jusqu’à
leur épuisement, être traités comptable-
ment comme des fonds dédiés ;
- ils doivent être employés confor-
mément à ce qui a été annoncé au dona-
teur potentiel, donc – sauf mention
expresse dans l’appel - exclusivement
pour la mission sociale ;
- si les fonds sont conservés suffi-
samment longtemps par l’organisme
pour que leur placement dégage des
produits financiers, ceux-ci doivent
bénéficier aux actions, au même titre
que les dons provenant de la collecte.
L’élargissement de la
compétence de la Cour
L’article 20 de la loi de finances rec-
tificative du 30 décembre 2009 a permis
deux novations :
1. Il a étendu la compétence de la
Cour au contrôle de la conformité entre
les objectifs des organismes bénéficiant
de dons ouvrant droit à un avantage fis-
cal et les dépenses financées par ces
dons, lorsque le montant annuel de
ceux-ci excède 153 000 €
;
2.
Il a introduit une possibilité de
sanction : lorsqu’il reçoit de la Cour une
déclaration de non-conformité, le minis-
tre chargé du budget peut désormais
« suspendre de tout avantage fiscal les
dons, legs et versements effectués au
profit de l'organisme visé dans la décla-
ration ».
En matière de générosité publique,
la Cour a toujours eu pour objectif le
contrôle du respect de la volonté du
donateur, et elle a considéré le donateur
– ou le donateur potentiel - comme le
premier destinataire des travaux de la
Juridiction. Elle conservera cette préoc-
cupation dans l’exercice de la mission
élargie que la loi lui a récemment confiée
vis-à-vis des organismes bénéficiant de
dons ouvrant droit à avantage fiscal.
Les organismes faisant appel
à la générosité publique
28
La «décristallisation»
des pensions des
ressortissants des terri-
toires autrefois sous
souveraineté
française
Des pensions restées
figées dans leur montant
La Cour constatait en 2010 que les
pensions servies aux anciens combat-
tants des territoires anciennement sous
la souveraineté française étaient restées
figées, dans leur montant comme dans
leur forme juridique, à la date des indé-
pendances. Cette situation de fait, déro-
gatoire au droit commun des pensions,
était source d’inégalités de traitement
persistantes, entre Français et étrangers
d’une part, et entre les différentes natio-
nalités concernées d’autre part. En
conséquence, la Cour préconisait un ali-
gnement intégral du régime des « cristal-
lisés », qu’il s’agisse des pensions d’inva-
lidité ou des pensions civiles et militaires
de retraite, sur le régime de droit com-
mun français.
L’alignement sur le droit
commun
A la suite de la décision du Conseil
constitutionnel du 28 mai 2010 sur la
première question prioritaire de consti-
tutionnalité qui lui était posée, et de
l’adoption de l’article 211 de la loi de
finances pour 2011, suivie du décret
n° 2010-1691 du 30 décembre 2010,
cette recommandation a été prise en
compte.
A compter du 1er janvier 2011,
toutes les pensions militaires d’invali-
dité, les pensions civiles et militaires de
retraite et les retraites du combattant,
servies aux ressortissants des pays ou
territoires ayant appartenu à l'Union
française ou à la Communauté ou ayant
été placés sous le protectorat ou sous la
tutelle de la France, sont calculées sur la
base du régime de droit commun.
La Cour s’assurera de la bonne mise
en œuvre de ce nouveau dispositif,
notamment en matière d’information
des bénéficiaires potentiels sur les
démarches qu’ils doivent entreprendre
pour faire réviser le niveau de l’indice
servant au calcul de leur pension.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
76
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
77
29
Les autorités de
régulation financière
La Cour a contrôlé, à partir de juillet
2006, les trois principales autorités de
contrôle et de régulation financière qui
sont la Commission bancaire, l’Autorité
de contrôle des assurances et des
mutuelles (ACAM) et l’Autorité des
marchés financiers (AMF).
Elle a procédé, dans son rapport
public annuel de février 2009, à une éva-
luation comparée de ces trois autorités.
La crise bancaire mondiale qui s’est
développée à partir de l’automne 2008 a
mis en lumière le rôle crucial que devait
jouer un système de régulation finan-
cière responsable et adapté, et les
réponses apportées par les autorités
françaises, dans le cadre des principes
d’action dégagés au niveau international,
se sont inscrites dans la ligne des recom-
mandations que la Cour avait émises à
l’occasion de ses enquêtes.
Ainsi, l’ordonnance n°2010-76 du
21 janvier 2010 a procédé à la simplifica-
tion des structures de contrôle et de
régulation que la Cour estimait oppor-
tune, et elle a aménagé de nouvelles obli-
gations de surveillance dans la protec-
tion des épargnants, qui avait été un
thème particulièrement examiné par la
Cour.
La loi de régulation bancaire et
financière du 22 octobre 2010 a, pour sa
part, consacré des avancées substan-
tielles concernant l’organisation de la
surveillance des risques systémiques et
le renforcement des pouvoirs des autori-
tés, dont les modalités concrètes satis-
font, dans leur ensemble, les préconisa-
tions de la Cour.
Cour des comptes
Cour des comptes
30
Les services centraux
chargés de l’outre-mer
En 2006, la Cour observait notam-
ment que les deux services du ministère
de l’outre-mer, la direction des affaires
politiques, administratives et financières
(DAPAF) et la direction des affaires éco-
nomiques,
sociales
et
culturelles
(DAESC), assuraient mal la coordina-
tion interministérielle, tandis qu’ils
géraient des crédits ne représentant
qu’une part minoritaire de ceux consa-
crés à l’outre-mer.
La création de la déléga-
tion générale à l’outre-
mer (DéGéOM)
La DAPAF et la DAESC ont été pla-
cées en mai 2007 sous l’autorité du
ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et
des collectivités territoriales, le secrétaire
d’Etat à l’outre-mer en disposant en tant
que de besoin. Puis, elles ont été rempla-
cées
en
septembre
2008
par
la
DéGéOM.
La mise en place de la DéGéOM a
été laborieuse : calendrier contraint,
désignation tardive du préfigurateur,
accompagnement insuffisant des res-
sources humaines, difficultés à pourvoir
les postes. Fin 2008, l’effectif était très
inférieur à celui prévu, composé pour
moitié d’agents nouveaux, et la passa-
tion des dossiers était parfois probléma-
tique.
Le resserrement de l’orga-
nisation
A la suite des recommandations de
la Cour, c’est une direction d’administra-
tion centrale unique qui a été mise en
place, et structurée autour de trois fonc-
tions : coordination des politiques
publiques, fonctions juridiques et insti-
tutionnelles, évaluation et prospective.
L’essentiel des
« fonctions support »
a été transféré aux services compétents
du ministère de l’intérieur, avec les
emplois correspondants, ce qui permet
des économies d’échelle. L’articulation
entre la DéGéOM et les autres services
du ministère fonctionne désormais cor-
rectement.
Un rôle interministériel à
affirmer
La DéGéOM
conserve la gestion de
la mission budgétaire “Outre-mer”, gère
de nombreuses subventions et abrite le
service de l’état-civil de l’outre-mer et
l’état-major du service militaire adapté.
Mais sa fonction d’impulsion et de coor-
dination interministérielle reste fragile :
absence de réunion de la commission
interministérielle de coordination des
investissements publics ; secrétariat du
comité interministériel de l’outre-mer
assuré par le secrétariat général du gou-
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
78
79
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
vernement ; articulation peu claire avec
la DATAR pour la politique contrac-
tuelle.
En outre, de fortes contraintes de
productivité ont été imposées à la délé-
gation, réduite de 83 emplois, dont seu-
lement 46 correspondent au transfert
des fonctions support, alors même que
la part relative des catégories supérieures
n’y a pas progressé. Ni le nombre, ni le
profil des emplois mis à disposition par
d’autres ministères ne sont précisés, et
l’interministérialité des recrutements ne
s’est pas accrue.
Dans ses deux premières années, la
DéGéOM a été confrontée à la crise aux
Antilles et a dû assurer le suivi complexe
du projet de LODEOM. Trois délégués
généraux se sont succédé, et le ministre
de l’intérieur et le secrétaire d’Etat
chargé de l’outre-mer ont changé. Les
services de la DéGéOM ont été écartés
de la phase consultative de l’organisa-
tion des “états-généraux de l’outre-
mer”. Le cabinet du ministre chargé de
l’outre mer comprend une soixantaine
d’agents, dont une dizaine de cadres, à
comparer à une DéGéOM dont les
effectifs ont diminué.
Les réunions interministérielles se
tiennent rarement en présence du délé-
gué général. Les relations avec plusieurs
ministères sont difficiles, l’information
circule
mal et certains ministères ne res-
pectent pas les règles et délais de saisine
fixés par le Premier ministre ; d’autres
n’ont pas encore désigné de correspon-
dant.
Les services centraux chargés
de l’outre-mer
réunir les conditions pour que
la DéGéOM exerce au mieux sa mis-
sion :
- facilitation du recrutement des
agents issus d’autres ministères;
- appui de son action par le rappel
à l’ordre quant aux règles de saisine et
la désignation systématique de corres-
pondants ;
- stabilité dans le temps de son
équipe de direction.
Recommandations
Cour des comptes
80
31
Le Bureau des
recherches géologiques
et minières (BRGM)
La Cour a examiné à plusieurs
reprises les comptes et la gestion du
Bureau des recherches géologiques et
minières (BRGM), établissement public
industriel et commercial.
Une gestion critiquée
Le contrôle précédent, portant sur
les exercices 1999 à 2002,
au
cours des-
quels le BRGM exerçait des activités
d’exploitant minier, avait conduit la
Cour à adresser aux ministres de tutelle
un
référé portant sur trois points :
- la nécessité de définir les nouvelles
missions du BRGM et d’assurer son
équilibre financier futur ;
- une gestion plus rigoureuse,
notamment en mettant fin aux dysfonc-
tionnements comptables liés à la difficile
mise en place d’un progiciel ;
- les conséquences financières de
l’engagement dans la construction d’une
usine de traitement de nickel en
Nouvelle-Calédonie.
Des améliorations impor-
tantes
Le dernier contrôle, portant sur les
exercices 2003 à 2008, a permis de
constater que les recommandations de la
Cour ont été largement suivies.
Le décret du 20 septembre 2004 a
défini les nouvelles missions du BRGM,
autour de trois axes : la recherche dans
le domaine des géosciences, l’expertise
au profit des autorités publiques dans le
même domaine et les activités interna-
tionales. Des contrats quadriennaux
définissent les objectifs du BRGM dans
le cadre de ses nouvelles missions. Cette
nouvelle stratégie a permis à l’établisse-
ment de redresser ses comptes : son
résultat d’exploitation est devenu positif
dès 2004 pour s’élever à 10,6 M€ en
2008.
En outre, le BRGM a amélioré sa
gestion et ses logiciels comptables fonc-
tionnent correctement.
S’agissant des risques que le BRGM
pouvaient courir du fait de son engage-
ment dans un projet d’usine de nickel en
Nouvelle-Calédonie, l’établissement a
cédé sa participation dans ce projet à la
société de participation minière du sud,
société à l’encontre de laquelle il dispose
désormais d’une créance de 67,4 M€,
couverte par une provision de 10 M€.
Cette provision a été jugée insuffisante
par les commissaires aux comptes. Un
risque résiduel subsiste donc dans ce
domaine.
Toutefois, la création, pendant la
période examinée, d’une école d’applica-
tion des géosciences apparaît d’un inté-
rêt des plus limités.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
81
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
réformer
l’organisation
du
BRGM pour créer une direction finan-
cière de plein exercice et modifier les
fonctions de la direction de la produc-
tion ;
en matière financière, améliorer
les procédures de contrôle interne et
d’audit.
Recommandations
Le Bureau des recherches géolo-
giques et minières (BRGM)
32
Le personnel de la
navigation aérienne
La Cour a examiné à plusieurs
reprises la gestion des ressources
humaines à la direction générale de
l’aviation civile (DGAC) : en 2002 (rap-
port public thématique), en 2006, puis
en 2010. Dans son rapport public
annuel de 2010, la Cour dressait un
constat sévère, notamment
sur l’opacité
de l’organisation du travail qui posait
des problèmes de productivité et de
sécurité.
Un an après la publication de ce rap-
port, la DGAC a mis fin aux pratiques
les plus contestables et a régularisé les
régimes indemnitaires de ses agents.
Depuis juin 2010, un système de
vérification permet de connaitre les
heures de contrôle réellement effectuées
par chaque agent
.
Il a été ainsi mis fin au
système d’absences officieuses (clai-
rances) mis en place par les contrôleurs
aériens, à la faveur d’une organisation du
travail opaque. Des difficultés ont été
rencontrées localement, mais elles sont
restées limitées, malgré l’émotion qu’a
suscitée la mise en place de ces vérifica-
tions.
Ces mesures constituent une avan-
cée importante. Toutefois, la Cour avait
constaté que cette même opacité n’avait
pas permis à la direction de la sécurité
de l’aviation de disposer des procédures
nécessaires pour s’assurer de l’aptitude
des contrôleurs à exercer leur métier. Un
an après, les informations dont dispose
la direction de la sécurité sont toujours
lacunaires.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
82
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
83
33
Le CNRS dans
le nouveau paysage
de la recherche
Dans son rapport public de 2007, la
Cour avait fait le constat que le Centre
National de Recherche scientifique
(CNRS) n’était pas parvenu à redéfinir
son positionnement dans un paysage de
la recherche en forte évolution. En
2010, la Cour a souhaité faire le bilan de
la mise en œuvre de ses recommanda-
tions.
Une gouvernance réfor-
mée
Le décret du 29 octobre 2009
confie au président du CNRS la direc-
tion générale de l’établissement. En
application de ces dispositions, un prési-
dent directeur général a été nommé le
20 janvier 2010.
Le contrat d’objectifs signé avec
l’Etat le 19 octobre 2009 a été rapide-
ment suivi d’effets, avec en particulier la
création de dix instituts disciplinaires,
début 2010, en lieu et place des anciens
départements scientifiques.
Il est cepen-
dant privé de toute déclinaison finan-
cière chiffrée.
Des avancées à poursui-
vre
Pour mettre en œuvre des partena-
riats rénovés et équilibrés par sites uni-
versitaires, les fonctions qui demeure-
ront au sein du CNRS
doivent être pré-
cisées ; ce dernier doit également se
doter de modes gestion et d’instruments
de pilotage modernisés.
Si la modernisation comptable est
en voie d’achèvement, les comptes du
CNRS ayant été certifiés avec réserves
depuis 2008, la modernisation budgé-
taire reste à concrétiser. Ce n’est qu’à
compter de 2010 qu’ont été mises en
place les procédures rénovées qui
auraient dû accompagner la mise en
œuvre de la LOLF. Deux questions res-
tent à régler :
le niveau des reports et
l’affectation des crédits aux unités de
recherche.
Une adaptation partielle
des instruments de pilo-
tage
Les systèmes d’évaluation ont été
mis en cohérence.
Des interfaces entre
les systèmes d’information des parte-
naires du CNRS dans ses unités mixtes
de recherche, soit 90 % des 1000 unités
que compte le Centre, doivent être
créées. Enfin, le CNRS dispose d’un
directeur scientifique référent sur les
grands sites universitaires.
Certains dispositifs permettant d’as-
surer des passerelles entre activités de
recherche et activités d’enseignement
ont vu le jour, mais ils ne concernent à
ce stade que des effectifs limités. Dans le
même temps, l’accueil d’enseignants
Le CNRS dans le nouveau paysage
de la recherche
chercheurs en délégation ne s’est pas
développé et les résultats en matière de
recrutement d’enseignants chercheurs
par le CNRS sont inquiétants.
La gestion des unités de
recherche : une réforme à
conduire d’urgence
Dans les unités mixtes, c’est-à-dire
dans 90 % des laboratoires, le CNRS ne
dispose qu’une fois tous les quatre ans
d’une vision consolidée des moyens
humains et financiers. Malgré une prio-
rité affichée, les réalisations obtenues à
ce jour sont particulièrement limitées.
Ceci suppose que soit réglée la question
des personnels affectés à ces tâches au
CNRS. Il faudra également que le nou-
veau système permette aux établisse-
ments d’assurer le pilotage financier de
leur gestion.
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
84
Participer activement à l’émer-
gence de pôles universitaires d’excel-
lence ;
Développer les passerelles entre
les emplois de chercheurs et d’ensei-
gnants-chercheurs en se donnant des
cibles ambitieuses et mesurables ;
Réformer d’urgence la gestion
financière des unités mixtes de
recherche ;
Régler dans les prochains bud-
gets la question des reports et de l’af-
fectation des crédits aux unités de
recherche.
Recommandations
85
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
Cour des comptes
34
La préparation et le
suivi de l’exécution
du budget de l’Etat
Dans les rapports qu’elle établit
annuellement sur les résultats et la ges-
tion budgétaire de l’Etat ainsi que sur les
ouvertures et annulations de crédits
opérées par voie réglementaire, la Cour
formule des recommandations relatives
à la préparation et au suivi de l’exécution
du budget de l’Etat. Le suivi de dix-sept
d’entre elles met en évidence une évolu-
tion progressive mais encore trop limi-
tée des pratiques.
Plusieurs recommandations desti-
nées à préciser le cadre d’exécution du
budget de l’Etat, à renforcer le suivi des
dépenses des opérateurs et à reclasser
certaines recettes de l’Etat ont été assez
largement mises en œuvre. Elles contri-
buent à clarifier l’information budgé-
taire et à améliorer le pilotage de l’exécu-
tion.
D’autres recommandations ont été
partiellement mises en œuvre. Elles por-
taient notamment sur les insuffisances
d’ouvertures de crédits en loi de
finances initiale par rapport aux besoins
prévisibles, la comptabilisation et le
paiement des dépenses exigibles au
cours de l’exercice, ou l’aménagement
de la norme utilisée pour limiter l’évolu-
tion des dépenses de l’Etat. Il en est de
même pour des recommandations sur le
suivi et l’évaluation des dépenses fiscales
et sur la gestion budgétaire : la période
complémentaire qui permet de prolon-
ger au-delà du premier janvier l’exécu-
tion des dépenses de l’exercice précé-
dent a été réduite, les rapports annuels
de performance sont établis plus rapide-
ment après la fin de l’exercice et la bud-
gétisation des dépenses en autorisations
d’engagement s’est étendue. Les progrès
constatés doivent être parachevés.
Certaines recommandations n’ont
pas encore été suivies d’effet notam-
ment celles se rapportant à la comptabi-
lisation de toutes les obligations juri-
diques nées au cours de l’exercice, à l’in-
formation du Parlement sur l’évolution
de l’endettement à court terme ou
encore au rattachement des comptes
spéciaux concourant à la mise en œuvre
d’une politique publique aux missions
correspondantes du budget général.
Le retard pris pour mettre en œuvre
plusieurs des principales recommanda-
tions de la Cour ne résulte pas, dans la
plupart des cas, d’une difficulté tech-
nique et elles devraient pouvoir être
rapidement suivies d’effet afin d’amélio-
rer la qualité de l’information budgétaire
et de favoriser un meilleur pilotage
financier des politiques publiques.
35
Les effets de la certifi-
cation des comptes de
l’Etat
Chaque année, la Cour a la respon-
sabilité de fournir l’assurance que les
comptes de l’Etat sont réguliers et sin-
cères et donnent une image fidèle de son
patrimoine et de sa situation financière,
au regard du référentiel que constitue le
recueil des normes comptables de l’Etat.
Cette certification est un volet
essentiel de la réforme voulue par le
législateur organique dans le cadre de la
LOLF. Elle doit garantir une informa-
tion fiable du Parlement, des administra-
tions et des citoyens. La crise écono-
mique et financière n’a fait qu’accroître
la nécessité d’une pleine transparence
des comptes.
En assortissant ses certifications
d’un nombre important de réserves, la
Cour a choisi d’accompagner la mise en
œuvre de la réforme, tout en délivrant
au Parlement une information détaillée
sur les limites des comptes de l’Etat.
L’exercice
2009 :
une année de progrès
Dans son acte de certification,
rendu public le 25 mai 2010, la Cour a
décidé de lever trois réserves formulées
sur les comptes du précédent exercice.
Au total ce sont 10 réserves qui ont pu
être levées en l’espace de trois ans
(1).
Malgré ces améliorations, neuf
réserves, dont huit substantielles, ont été
reconduites. La totalité des postes des
états financiers reste affectée d’incerti-
tudes, de désaccords, de limitations.
Deux réserves ont un caractère structu-
rel. Elles résultent de l’inadaptation des
systèmes d’information financière et
comptable de l’Etat et de l’insuffisante
efficacité de ses dispositifs de contrôle
interne. Deux réserves concernant les
immobilisations financières visent le
traitement comptable de la Caisse
d’amortissement de la dette sociale et les
incertitudes sur la valorisation des opé-
rateurs de l’Etat à son actif. Trois autres
réserves portent sur les actifs du minis-
tère de la défense, la valorisation du parc
immobilier de l’Etat et les immobilisa-
tions et stocks des ministères civils.
Cour des comptes
Synthèses
du Rapport public annuel de la
Cour des comptes
____________________________________
(1) De nouvelles réserves ayant par ailleurs été formulées au cours de la même période.
86