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Rapport public annuel de la Cour des comptes : hôpital de Longué-Jumelles (Maine-et-Loire)

CRC PAYS DE LA LOIRE

Le rapport public annuel 2018 de la Cour des comptes accessible en ligne, publié le 7 février 2018, comporte une insertion, proposée par la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire, sur l’hôpital de Longué-Jumelles « un établissement sous survie artificielle » (Tome I, pages 587 à 624).

 

 

Situé dans le Saumurois, le centre hospitalier (CH) de Longué-Jumelles accueille essentiellement des personnes âgées. Lié par une direction commune à l’hôpital de Saumur et à l’Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) de Montreuil-Bellay, il emploie environ 150 agents pour 140 lits. Pour permettre d’assurer sa viabilité à terme, aujourd’hui menacée, la Cour formule deux recommandations.

Un hôpital en grande difficulté depuis plus d’une décennie

Dès 2008, la dégradation financière du CH avait été soulignée par la chambre régionale des comptes (CRC Pays de la Loire). Si, en 2011, la situation financière semblait redevenue favorable, les aides récurrentes de l’agence régionale de santé (ARS), d’un montant de plus de 4,77 M€ entre 2011 et 2016, masquaient l’impossibilité d’atteindre l’équilibre d’exploitation. La marge brute 2015, c’est-à-dire la différence entre les produits de gestion et les charges, s’élevait hors aides à - 6 % du chiffre d’affaires (8 M€), et est restée négative en 2016 pour un déficit comptable consolidé de 1 M€.

Tous les exercices ont été entachés d’erreurs empêchant de fiabiliser les comptes de l’établissement. Pour éviter le défaut de paiement, plus de 21 M€ de charges cumulées ont été mandatées en retard entre 2011 et 2015. Cette multiplicité d’incohérences ne permet pas d’assurer que les financeurs (ARS et département) ont payé ce qu’ils auraient dû. L’hôpital a connu de lourdes carences de gestion, notamment en matière de ressources humaines, pour lesquelles il n’a même jamais disposé de données robustes.

Le projet de reconstruction était nécessaire en 2011 au vu d’un bâti vétuste compromettant la sécurité des résidents. A une configuration intérieure inadaptée aux besoins s’ajoutait une qualité de la prise en charge affectée de dysfonctionnements majeurs en l’absence de stratégie cohérente de la direction commune. L’information médicale était faussée car le CH a allongé la durée des séjours pour maintenir fictivement l’activité du service de soins de suite et de réadaptation (SSR).

Une reconstruction pour maintenir à tout prix un hôpital à Longué-Jumelles

Au vu des procédures internes de l’hôpital, la direction commune n’a jamais joué son rôle. Les mutualisations qu’elle devait favoriser ne sont pas intervenues et les postes au recrutement difficile qu’elle aurait dû permettre de doter ne sont pas pourvus.

L’enveloppe globale initiale de la reconstruction (20 M€) supposait un financement extérieur majoritaire. Or, les démarches pour l’obtention de prêts ont été inadaptées. En 2015, sans contrat d’emprunt plus d’un an après la signature des marchés, l’assèchement de la trésorerie a obligé le CH à suspendre les travaux. Seule l’intervention de l’ARS et les garanties apportées par le département de Maine-et-Loire et de la commune de Longué-Jumelles ont permis de débloquer la situation.

De plus, l’hôpital a été incapable de respecter le calendrier budgétaire, ce qui a contraint l’ARS à une approbation des documents concernés au-delà des délais réglementaires, dans le seul but de permettre au CH de faire face à ses dépenses obligatoires.

Enfin, la direction du CH a mené une stratégie du fait accompli en n’attendant pas l’approbation de l’ARS pour publier les appels d’offres des travaux en juin 2013, alors que les refus de financer par les banques étaient connus. Les autorités de tarification étaient en effet démunies pour bloquer le projet déjà lancé. Le double circuit de financement en soins de longue durée et en EHPAD a fragilisé leur contrôle. De plus, le contrôle de légalité par l’ARS n’existe plus depuis 2009, ce qui la prive d’un outil efficace de contrôle. Même la procédure d’avis budgétaire qui lui permet dans certains cas de saisir la CRC ne pouvait s’appliquer en l’espèce.

Une impasse financière et une autonomie menacée

Malgré les aides de l’ARS, la situation de la trésorerie est critique et le déséquilibre économique est devenu structurellement irréversible. Les ratios d’endettement ont atteint un niveau insoutenable, avec une durée de désendettement de 117 ans en 2016. En dépit des garanties bancaires du département et de la commune de Longué-Jumelles, c’est bien l’ARS qui doit supporter les besoins de financement de l’hôpital. La facture finale de la reconstruction dépassera 26 M€, ce qui impactera nécessairement les prix de journée, lesquels seront plus élevés que les plafonds prévus pour cet établissement.

En outre, les nouveaux locaux ne répondent pas de manière adéquate aux besoins et ne garantissent pas une meilleure prise en charge. En effet, leur coût d’entretien n’a pas été correctement anticipé, pas plus que l’impact de la nouvelle architecture sur les organisations de travail. Enfin, une réelle stratégie relative à la qualité et à la sécurité des soins reste à construire à l’échelle de la direction commune.

Le CH de Longué-Jumelles ne peut donc envisager seul un avenir pérenne d’autant que l’illisibilité de l’offre gérontologique dans le Saumurois aggrave les fragilités sur ce territoire. Pour éviter la fermeture pure et simple du site qu’impliquerait de fait une diminution significative des aides de l’ARS, il est nécessaire de repositionner le CH par rapport à son offre sanitaire et médico-sociale, quitte à n’y conserver qu’un EHPAD. Sans attendre cette redéfinition, une fusion doit être réalisée avec l’hôpital de Saumur, porteur de la direction commune.

C’est pourquoi la Cour formule les recommandations suivantes :

  1. (ministère de la santé) : procéder à la fusion du centre hospitalier (CH) avec celui de Saumur de manière à faciliter un repositionnement cohérent de l’offre de soins en gérontologie à l’échelle du groupement hospitalier de territoire -GHT ;
  2. (ministère de la santé) : clarifier les dispositions encadrant l’investissement hospitalier en secteurs USLD et EHPAD pour garantir une validation concertée par les autorités de tarification.