Communiqué de presse
Rapport public thématique de la Cour des comptes sur les finances publiques locales
Quelques exemples tirés des contrôles effectués en Pays de la Loire
La Cour des comptes a publié le 14 octobre 2013, pour la première fois, un rapport public thématique sur les finances publiques locales. Une telle publication se justifie par le fait que l’appréciation des finances des administrations publiques locales participe du diagnostic de la situation d’ensemble des finances publiques de notre pays
Le rapport national, décliné en six chapitres
I – L’évolution d’ensemble des finances des collectivités locales
L’examen de la situation financière des collectivités locales en 2012 met en évidence la poursuite d’une hausse tendancielle des dépenses que la contrainte budgétaire n’a pas suffisamment freinée. La croissance des charges de fonctionnement, qui ont progressé à un rythme plus élevé que les recettes, s’est accélérée.
Dans un contexte où il convient de limiter la pression fiscale et de réduire le déficit de l’Etat, la participation des collectivités locales à la stratégie de redressement des finances publiques, telle que définie notamment dans le programme de stabilité présenté en avril 2013 à la commission de l’Union européenne, implique, de leur part, un effort particulier de maîtrise des dépenses.
II – L’évolution des finances locales par catégorie de collectivités (notamment communes et intercommunalités)
En 2012, les charges de fonctionnement des communes ont progressé plus rapidement que les recettes correspondantes, entraînant un léger recul de l’épargne brute. L’effort d’équipement, qui a été soutenu, a été financé par un recours accru à l’emprunt. La capacité moyenne de désendettement des communes, bien qu’en légère dégradation par rapport à 2011, demeure cependant globalement satisfaisante. Pour 2013, ces collectivités sont confrontées à une incertitude sur l’évolution de leurs recettes alors que les charges de fonctionnement devraient progresser à nouveau, notamment la masse salariale qui constitue le premier poste de dépenses. Dans ce contexte, certaines collectivités ne sont pas restées sans réaction.
Ainsi, la commune de La Roche-sur-Yon (Vendée) a cherché à rationaliser ses dépenses de fonctionnement pour maintenir les mêmes taux d’imposition que les années précédentes. L’évolution attendue de ses recettes fiscales repose uniquement sur la revalorisation forfaitaire des bases d’imposition fixée par la loi de finances et sur la progression régulière des bases d’imposition de la commune. La ville compte poursuivre sa démarche de rationalisation des coûts. Elle envisage aussi de mener une démarche comparative concernant le processus d’achats afin d’élaborer un plan d’organisation propre à en améliorer la performance.
L’augmentation du périmètre des intercommunalités a un impact sur le volume de leurs recettes et de leurs dépenses. Bien qu’en progression sensible, les premières ont augmenté moins vite que les secondes en 2012, ce qui a entraîné une stabilisation de l’épargne brute. Les intercommunalités ont néanmoins continué d’accroître leurs dépenses d’investissement en recourant plus fortement à l’emprunt. Leur dette s’est fortement accrue.
La communauté de communes de Sablé-sur-Sarthe (Sarthe) illustre la progression de la fiscalité pour l’ensemble des taux. Son budget primitif pour 2012 prévoyait, sous le double effet de la progression des bases d’imposition et de celle des taux (+2,7 %), un accroissement de 5,4 % des ressources fiscales par rapport à 2011.
III – La qualité et la fiabilité de l’information financière locale
La qualité de l’information financière, comme l’amélioration des processus de contrôles internes, sont des enjeux essentiels à un moment où la gestion des collectivités territoriales est rendue plus contrainte par les réformes en cours. Malgré les progrès enregistrés depuis une vingtaine d’années, il reste beaucoup à faire. Ainsi, les états financiers des collectivités doivent franchir une étape significative vers un niveau leur permettant de répondre aux meilleurs standards de qualité en la matière.
En particulier, si les règles de présentation des budgets locaux laissent ouvertes un certain nombre de facultés de présentation, leur mise en œuvre peut, cependant, dans certains cas, altérer la lisibilité des budgets ou être la source d’imputations erronées. Ainsi, les imputations concernant les activités gérées dans le cadre de budgets annexes sont parfois inadéquates.
C’est le cas pour un centre aquatique que la communauté de communes Sud Estuaire (Loire-Atlantique) gère dans le cadre d’un budget annexe alors que les immobilisations correspondantes sont enregistrées intégralement au sein du budget général de la communauté, de même que les dotations aux amortissements afférentes à ces équipements.
IV – Les premiers effets de la réforme de la fiscalité locale sur les finances des collectivités locales
La réforme de la fiscalité locale induite par la suppression de la taxe professionnelle a modifié le schéma de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements. Si la mise en place du dispositif de compensation a pu être, à bien des égards, laborieuse, cette réforme a maintenu la croissance globale des ressources des collectivités locales entre 2009 et 2012. Pour autant, ce réaménagement s’accompagne d’incertitudes importantes. Il entraîne une différenciation renforcée de la situation individuelle des collectivités et des groupements de chaque catégorie de collectivités. Il rend plus compliquée la prévision budgétaire. Il affecte la mesure de la richesse et modifie le classement des collectivités locales pour l’attribution des dotations de péréquation.
V – Les dépenses de personnel des collectivités locales
La maîtrise des dépenses de personnel et indispensable dans le contexte actuel des finances publiques. L’atteindre reste toutefois un enjeu difficile parce que le recrutement de personnels et leur gestion répondent à une pression forte.
L’enquête conduite par les juridictions financières fait ressortir, au-delà d’une tendance globale à la hausse de ces dépenses, une grande dispersion des situations. Il revient, à titre principal, aux collectivités employeurs d’adopter des comportements économes, fondés, d’une part, sur le respect rigoureux des règles applicables en matière d’emploi public, d’autre part, sur la mise en œuvre d’une gestion attentive des agents publics et d’une mutualisation des modes d’organisation, particulièrement dans le secteur communal, susceptibles d’apporter une efficacité et des économies accrues.
Les deux exemples de collectivités ligériennes retenues par le rapport national témoignent d’une approche vertueuse de ces questions.
Dans la commune du Mans (Sarthe), les services doivent désormais justifier les recrutements selon une procédure qui prend en compte l’évolution de leur masse salariale. La procédure de recrutement, écrite, est devenue plus exigeante vis-à-vis des services demandeurs qui doivent produire des éléments d’appréciation conséquents pour chaque recrutement.
La commune et la communauté d’agglomération de La Roche-sur-Yon (Vendée) offrent un exemple de mutualisation. La commune de La Roche-sur-Yon a vu ses charges de personnel diminuer de 13 % entre 2007 et 2011 à la suite de la création de la communauté d’agglomération et grâce à la mutualisation de services et au transfert de compétences. La ville et son intercommunalité partagent de très nombreux services selon trois modalités d’organisation : services partagés, services mutualisés, prestations des services.
VI – L’accès au crédit des collectivités locales
Contrairement aux craintes exprimées début 2012, les conditions d’accès à l’emprunt des collectivités locales se sont révélées finalement favorables, accompagnant ainsi une progression de l’investissement public local, en dépit du repli constaté de l’autofinancement. Cette tendance devrait se poursuivre, sous la réserve essentielle des arbitrages qui devront être faits quant aux conséquences à tirer de la baisse programmée des dotations de l’Etat, à partir de 2014, d’une part, et, d’autre part, sous réserve qu’une réponse appropriée puisse être apportée au problème des emprunts structurés les plus sensibles.
- En 2011, le contexte du financement des collectivités locales s’était tendu, en raison de la diminution de l’offre, de la dégradation des conditions financières des prêts bancaires et de leur inadéquation en termes de maturité aux besoins. À l’inverse, l’année 2012 a été marquée par une détente progressive sur le marché du crédit à moyen ou long terme. Les emprunts nouveaux (17 Md€) ont été majoritairement contractés directement auprès des banques, de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), sur fonds d’épargne, et de la Banque européenne d’investissement (BEI).
Ainsi, la ville de Nantes (Loire-Atlantique) a obtenu de la Caisse d’Epargne, sur enveloppe BEI-développement durable/ANRU, 10,2 M€ à Euribor 3 mois + 70 pb sur 15 ans. Les emprunts BEI lui ont permis de bénéficier de taux bonifiés par rapport aux conditions de marché présentant encore des marges très élevées en 2012.
Les collectivités ont également eu recours de façon plus importante au marché obligataire comme stratégie de financement.
Pour la région des Pays de la Loire, l’opération auprès des particuliers couplée de manière subsidiaire à une émission auprès d’investisseurs institutionnels présente un coût moyen de 3,7 %, bien inférieur au coût de financement bancaire du moment. La région a privilégié une stratégie visant à rechercher une diversification des sources de financement obligataires (notamment auprès des particuliers) pour ne pas dépendre uniquement des investisseurs classiques sur les marchés financiers.
L’accès aux financements à court terme pour les besoins de trésorerie, est resté difficile. Cependant, au cours du second trimestre, une détente progressive s’est amorcée.
- Depuis le début des années 2000, une part croissante de l’endettement des collectivités locales a été contractée sous la forme d’emprunts dits « structurés »
Il convient à ce stade aussi d’évoquer le rôle des chambres régionales des comptes dans leur mission de contrôle budgétaire sur saisine dans le contexte de contentieux en cours ou à venir. Le refus d’une collectivité locale de régler tout ou partie de l’annuité d’emprunt dont elle est redevable a conduit en effet certains établissements bancaires à saisir les CRC directement ou par le biais du préfet ou du comptable public, en vue d’obtenir confirmation du caractère obligatoire de la dépense et, si nécessaire, l’inscription d’office des crédits au budget.
Parmi les trois avis récents statuant sur ce type de saisine, le rapport national mentionne celui rendu par la CRC des Pays de la Loire, le 13 septembre 2012, relatif à la commune de Saumur (Maine et Loire). Dans cet avis, la chambre a considéré que la commune aurait dû régler l’intégralité de l’échéance, n’ayant pas contesté sérieusement les dispositions du contrat et réclamé sa nullité devant le juge.
La diversité des contrats conclus et le caractère très particulier de cette procédure ne permet toutefois pas de tirer d’enseignement de portée nationale des avis rendus. En aucun cas, les CRC n’ont vocation à trancher au fond un litige portant sur l’application d’un contrat. A l’inverse, il leur appartient simplement de décider s’il y a lieu d’inscrire les crédits afférents au budget de la collectivité dans l’attente d’une décision du juge du fond.