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Chapitre XV
Les dépenses de personnel des cliniques
privées
: une charge pour l’assurance
maladie à mieux connaître
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:
UNE CHARGE
POUR L
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449
_____________________
PRESENTATION
_______________________
L’hospitalisation privée à but lucratif représente, avec 115
000 lits
et places, 24 % des capacités hospitalières et réalise 28 % des séjours
d’hospitalisation
561
. Elle réalise un chiffre d’affaires de 13,6
Md€
562
et
concentre 17
% des dépenses d’assurance maladie consacrées aux
établissements de santé, soit 12,8
Md€
563
.
Dans la limite étroite des informations dont elle a pu disposer, la
Cour a cherché à évaluer les dépenses de personnel de ces établissements
et à apprécier les spécificités de leur gestion.
Elle a constaté les difficultés d’une approche consolidée de ces
dépenses du fait de l’éclatement de l’organisation et de la gestion des
cliniques (I) et de l’externalisation notamment pour l’essentiel des
dépenses de rémunération médicale (II). Dans ces conditions, la dépense
salariale directe, qui recouvre un champ beaucoup plus restreint que dans
le secteur public, est concentrée sur le personnel de soins, sans que là où
elles pourraient être pertinentes des comparaisons entre secteurs public et
privé soient suffisamment développées (III). Leur imputation à plusieurs
sous-
objectifs de l’ONDAM selon leur nature et le type d’activité des
établissements fait obstacle à la bonne appréciation des enjeux qui leur
sont liés (IV).
I
-
Une pluralité de modes de gestion empêchant
une approche consolidée
La statistique annuelle des établissements de santé dénombre
environ 200 000 personnes travaillant totalement ou partiellement dans
les cliniques privées, soit près d’un hospitalier sur sept.
Ce décompte ne permet cependant qu’une approche partielle des
effectifs travaillant dans les cliniques privées, compte tenu de
l’organisation de ces dernières.
Un
e personne en contact avec le patient dans l’enceinte d’une
clinique peut relever en effet de plusieurs situations différentes : salarié
561. DREES SAE 2012.
L’h
ôpital public regroupe 62 % des capacités et réalise 58 %
des séjours ;
les établissements de santé privés d’intérêt collectif, à but non lucratif,
respectivement 15 et 14 %.
562. DREES, liasses fiscales, 2012.
563. ATIH, données 2012. Court séjour, soins de suite et réadaptation et psychiatrie,
hors MIGAC.
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de la clinique (ou société d’exploitation), professionnel libéral de santé
sous contrat avec la clinique, salarié de ce professionnel libéral,
professionnel libéral assurant une activité médico-technique ou encore
salarié d’un prestataire de service sous contrat avec la clinique.
Cette diversité de statut s’explique par une organisation très
souvent éclatée entre de multi
ples intervenants dépendant d’organismes
tiers aux formes juridiques variées
564
. Selon les organisations, les
effectifs et les dépenses de rémunération rattachés à la société
d’exploitation varient. La mutualisation plus ou moins large d’activités et
de ressources entre établissements, liée à la constitution de groupes de
santé privés parfois de dimension importante, influe également sur les
effectifs directement rémunérés par la clinique.
Le champ d’intervention de celle
-ci peut être plus ou moins étendu
selon qu’elle assure directement ou non certaines activités médico
-
techniques. Les activités de radiologie ou de biologie peuvent ainsi être
constituées en sociétés distinctes qui rémunèrent directement leur propre
personnel.
Les professionnels de santé peuvent choisir d’exercer à titre salarié
et sont alors régis par un contrat de travail, ou libéral, dans le cadre d’un
contrat d’exercice libéral
565
, situation de loin la plus fréquente pour les
médecins
566
. En ce cas, leurs honoraires sont alors directement réglés par
les patients, eux-
mêmes remboursés par l’assurance maladie, sans peser
sur les charges des établissements dans lesquels ils interviennent. Ces
derniers se voient cependant reverser par les praticiens qui exercent dans
leurs locaux une redevance pour services rendus, fixée contractuellement.
La clinique peut salarier directement les personnels travaillant
auprès des professionnels de santé intervenant à titre libéral, tels que
secrétaire médicale, aide opératoire, aide anesthésiste, mais les médecins
libéraux peuvent aussi les rémunérer directement.
Pour remplir les fonctions logistiques, les cliniques privilégient le
plus souvent la sous-traitance à un prestataire de service sous contrat
plutôt que la gestion directe par des salariés.
564. Sociétés anonymes, sociétés civiles immobilières ou professionnelles, sociétés
civiles de moyens, société de fait, sociétés d’exerc
ice libéral, voire associations.
565. Les salariés sont régis par un contrat de travail, soumis à la convention collective
de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002 et aux accords de branche en vigueur. Les
professionnels libéraux signent obligatoirement un contrat écrit avec la clinique.
566.
L’exercice libéra
l concerne également des professionnels non médicaux tels que
les masseurs kinésithérapeutes.
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Deux exemples d’organisation différente en Pays de la Loire
567
Dans un premier établissement, pour plus de 15
M€ de produits
facturés, les charges de personnel figurant dans les comptes sont de 4
M€.
Il
s’agit d’un établissement mono
-disciplinaire fonctionnant avec des
praticiens libéraux sous contrat, qui sont eux même employeurs du
personnel soignant.
Dans le second établissement, pour 11,5
M€ de produits facturés,
les charges de personnel figurent dans les comptes pour 0,5
M€.
L’essentiel des frais liés aux personnels est comptabilisé en charges
extérieures globalisées avec d’autres dépenses. Cet établissement est
installé au sein d’un pôle hospitalier composé de deux sociétés, dont l’une
refacture à
l’autre les charges de personnel.
Les
effectifs
figurant
dans
la
statistique
annuelle
des
établissements de santé ne comprennent que les personnels directement
salariés par les cliniques, soit 160 000 personnes, ainsi que les 40 000
professionnels libéraux sous contrat avec elles. En revanche ne sont pas
appréhendés les salariés des professionnels libéraux
568
, les professionnels
libéraux assurant des fonctions médico-techniques et le personnel
employé par les sous-
traitants. L’estimation de 200
000 personnes
exerçant en clinique reste donc en deçà des ressources humaines
effectivement mobilisées par ces dernières, sans qu’il soit possible de
disposer d’une approche consolidée
Ces limites invitent à une grande prudence dans l’analyse des
effectifs et des dépenses de personnels des cliniques, notamment au
regard d’une démarche comparative avec le secteur public.
567.
Tirés de la base de données de l’ARS des Pays de la Loire.
568 . 40 000 personnes selon le rapport 2011 du FORMAH, organisme paritaire
collecteur agréé pour la
branche professionnelle jusqu’au 31 décembre 2012.
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II
-
Des dépenses de rémunération médicale
essentiellement externalisées
A - Un exercice médical en clinique majoritairement
libéral
Sur 200 000 médecins en activité régulière
569
, 42 000 exercent
totalement ou partiellement en établissement à but lucratif, à titre libéral
pour 37
000 d’entre eux et comme salariés pour moins de 5
000.
Il s’agit essentiellement de spécialistes (93
%), exerçant souvent
dans plusieurs établissements (65 %)
570
. L’exercice libéral est prédo
-
minant, voire quasi exclusif pour certaines spécialités telles que
l’anesthésie
-réanimation, la gynécologie-obstétrique et les spécialités
chirurgicales. Il est moindre en psychiatrie, deux médecins sur trois étant
salariés. Le salariat est récemment devenu majoritaire en soins de suite et
de réadaptation.
Depuis 2007, les effectifs médicaux ont progressé de 2 000
personnes, soit 800 salariés, principalement en services de soins de suite
et de rééducation et 1 200 médecins libéraux, exerçant essentiellement en
médecine, chirurgie, obstétrique.
La connaissance des ressources médicales des cliniques reste
néanmoins imprécise car les professionnels libéraux sont décomptés en
personnes physiques, sans prise en compte de leur temps de travail.
B - Les honoraires liés aux séjours en cliniques
La Cour a demandé à la CNAMTS d’isoler les honoraires perçus
par les professionnels libéraux pour les séjours réalisés en cliniques ainsi
que les dépenses remboursées par
l’assurance
-maladie à ce titre. Ces
dernières sont imputées sur le sous-objectif « soins de ville » de
l’ONDAM, comme c’est le cas pour l’ensemble des professionnels
libéraux, sans être en routine rapprochés des séjours qui sont à leur
origine.
569.
Conseil national de l’ordre des médecins, Atlas
de la démographie médicale
2013.
570. Dans le secteur public, les proportions caractéristiques sont les suivantes : les
médecins sont spécialistes à hauteur de 85 %, salariés (98 %) et travaillent à temps
plein pour 62
% d’entre eux. source DREES, SAE, hors médecins en formation.
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Selon cette
extraction qui n’a pu porter que sur la seule année
2012
571
, les honoraires à tarif opposable ont représenté une masse totale
de 3,9
Md€ en 2012, soit 8
% des dépenses de soins de ville, hors
produits de santé. La chirurgie et l’anesthésie en représentent 4
5 %.
Tableau n° 83 :
honoraires perçus par les professionnels libéraux liés
aux séjours en cliniques en 2012
En
M€
Spécialités
Honoraires
remboursables
Dépassements
d'honoraires
Total
honoraires
Chirurgiens
774
406
1 180
Anesthésistes
768
172
940
Laboratoires-médecins biologistes
417
0
417
Gastro-entérologues
247
32
278
Cardiologues
266
5
271
Ophtalmologues
188
80
268
Gynécologues-obstétriciens
133
58
191
Radiologues
192
3
195
Sous total des huit spécialités
cumulant 80 % des honoraires
2 984
756
3 741
Autres spécialités
930
61
991
Total
3 914
818
4 732
Source :
tableau Cour des comptes à partir de données CNAMTS
Pour évaluer l’ensemble des honoraires perçus, il faut ajouter aux
honoraires remboursables (3,9
Md€) les dépassements d’honoraires, les
médecins étant de fait souvent installés en secteur 2. Ils sont estimés à
818
M€ en 2012.
Les dépassements d’honoraires dans les cliniques privées
Sur les cinq dernières années, les dépassements d’honoraires liés
aux séjours en cliniques ont progressé de 200
M€
572
. Le dépassement
moyen est évalué à 320 euros environ par séjour
573
, doublant presque les
honoraires demandés au patient. Aucun dépassement d’honoraire n’est
toutefois pratiqué pour près de 60 % des séjours réalisés en cliniques.
571.
La CNAMTS n’a pas été en mesure de fournir la chronique des remboursements
et des dépassements d’honoraires sur les cinq derni
ères années.
572. Données ATIH, sur un champ plus restreint que celui de la CNAMTS. Le
montant ATIH est inférieur de 20
M€ aux données transmises par la CNAMTS
573. Pouvant comprendre plusieurs actes.
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Plus de 74 % des séjours avec dépassement sont effectués en
chirurgie et 20 % en médecine. Les anesthésistes et chirurgiens facturent
près des trois quarts des dépassements pratiqués
574
. Deux familles, les
« actes sur le bulbe oculaire » et ceux « sur les articulations du membre
inférieur», concentrent un quart des dépassements.
Parmi les 10 587 médecins adhérents au « contrat d'accès aux
soins »
575
,
visant à modérer les dépassements d'honoraires, on compte un
chirurgien sur trois intervenant en clinique et un anesthésiste sur dix
576
.
Au total, les honoraires perçus par les professionnels libéraux pour
leur activité réalisée en cliniques se sont ainsi élevés en 2012 à 4,7
Md€.
III
-
Une masse salariale très largement consacrée
à la rémunération du personnel de soins
A - Des salariés majoritairement soignants
Les emplois salariés des cliniques sont concentrés sur les
personnels soignants, qui constituent 77
% de l’ensemble et ont progressé
de 8 % depuis 2007
577
. Le personnel infirmier, cadres compris, en
représente la moitié.
Les taux d’encadrement du personnel de soins sont proches dans
les secteurs public et lucratif
578
. En revanche, des différences de structure
d’emplois s’observent dans le recours aux aides
-soignants et aux agents
de service hospitalier : ces derniers sont davantage représentés en
cliniques
579
.
574. Le dépassement moyen est de 370
€ pour les séjours en ch
irurgie.
575. Avenant n° 8 à la convention médicale. Entré en vigueur le 1
er
décembre 2013.
576. CNAMTS, données au 24 janvier 2014.
577. DREES, SAE données 2007 à 2012.
578 22,5 infirmiers et aides-soignants par cadre infirmier dans les deux secteurs
(données SAE 2011) ; 26,5 agents par cadre dans le secteur public en incluant les
agents de service hospitalier et autres personnels, 28 dans le secteur lucratif.
579. Les aides-soignants représentent 33,5
% de l’effectif soignant dans le secteur
public et 29,7 % dans le secteur lucratif. Ces données sont respectivement de 13,2 %
et 17,9 % pour les agents de service hospitalier et autres personnels (données SAE
2011).
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personnels non médicaux en 2012, par catégories
Graphique n° 29 :
Source :
DREES SAE
Représentant
15 %
des
emplois
salariés,
les
personnels
administratifs apparaissent, rapportés au nombre de lits et de places,
moins nombreux que constaté dans le secteur public
580
. Cet indicateur ne
tient cependant pas compte de l’externalisation par certaines cliniques de
diverses activités administratives, non quantifiable.
Les effectifs salariés consacrés à la logistique générale et aux
activités médicotechniques représentent moins d’un salarié sur quinze
contre un sur six à l’hôpital public, en diminution de 16
% sur les cinq
dernières années. Ces activités sont de fait majoritairement sous traitées,
notamment dans les établissements de court séjour.
580. 0,16 personnel administratif par lit et place dans le secteur privé à but lucratif et
0,32 dans le secteur public. SAE 2012.
Administratifs
15%
Techniques
5%
Soignants
77%
Socioéducatifs
1%
Médico
techniques
2%
Autres
personnels de
soins
3%
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Un recours important à la sous-traitance
Près de deux cliniques sur trois déclarent recourir à la sous-
traitance,
principalement
pour
la
restauration,
le
nettoyage
puis
l’entretien/maintenance et marginalement pour les fonctions d’accueil,
standard ou informatique
581
. Récemment, de nouvelles fonctions ont été
externalisées telles que notamment le codage des actes, du fait des
difficultés de recrutement de praticiens qualifiés, ou la stérilisation,
soumise à des normes exigeantes.
L’observatoire économique des cliniques et hôpitaux privés de la
Fédération de l’hospitalisation privée (FHP
-
MCO) évalue l’impact de la
sous-traitance sur les dépenses de personnel des cliniques à 3,7 % de leur
chiffre d’affaires. Ces données ne sont pas connues pour les cliniques
spécialisées en soins de suite et en psychiatrie, qui recourent moins
fréquemment à la sous-traitance. Elles ne peuvent être directement
comparées avec celles disponibles pour l’hospitalisation publique,
exprimées en fonction des charges d’exploitation
582
.
B - Une augmentation plus rapide que dans le secteur
public
En 2012, la masse salariale des cliniques à but lucratif s
’est élevée
à près de 6
Md€
583
. Depuis 2007, elle a progressé annuellement de 3,6 %
en moyenne en euros courants, soit une augmentation de 1,9 % en euros
constants, alors que celle du secteur public hospitalier a progressé en
moyenne de 0,6 % par an.
Ses composantes ont connu des évolutions contrastées. Les charges
sociales représentent moins de 30 % de la masse salariale en 2012.
Depuis 2007, elles ont progressé à un rythme trois fois moins rapide que
celui des traitements et salaires.
581. Rapport de branche, CPNE-FP, «
la situation de l’emploi dans la branche de
l’hospitalisation privée à statut commercial
», janvier 2012, p. 33.
582 . Les hôpitaux publics consacrent pour leur part 1,8 % de leurs charges
d’exploita
tion à la sous-traitance, majoritairement en blanchisserie, restauration et
nettoyage.
583. Les cliniques ont une obligation de dépôt aux greffes des tribunaux de commerce
de leurs liasses fiscales (bilan, compte de résultat et annexes obligatoires). Ces
dernières sont exploitées par la DREES qui publie chaque année une étude consacrée
à la situation économique et financière des établissements privés à but lucratif.
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Tableau n° 84 :
évolution des composantes de la masse salariale des
cliniques privées (2007-2012)
En Md€
Montant
Évolution 2007-2012
Moyenne annuelle
2007
2012
euros
courants
euros
constants
584
euros
courants
euros
constants
Salaires et traitements
3,50
4,23
21,0 %
12,3%
3,9 %
2,2%
Charges sociales
1,50
1,73
14,9 %
6,2%
2,8 %
1,1%
Total masse salariale
5,00
5,96
19,2 %
10,5%
3,6 %
1,9%
Chiffre d'affaires
11,42
13,58
18,9 %
10,2%
3,5 %
1,8%
Source :
DREES, SAE 2007-2011.
Le poids de la masse salariale sur le chiffre d’affaires, de l’ordre
de
44 %, est resté relativement stable sur la période. Rapporté aux charges
d’exploitation, il décroît depuis 2010.
évolution du poids de la masse salariale par rapport
Graphique n° 30 :
au chiffre d’affaires et aux charges d’exploitation (2007
-2012)
Source :
Cour des comptes à partir des données DREES SAE
L’exploitation des liasses fiscales ne permet pas cependant
d’approfondir davantage l’analyse de la masse salariale et de ses
composantes. La Fédération de l’hospitalisation privée a cherché
cependant à préciser certaines de ces dernières. Son observatoire
584. INSEE, indice des prix à la consommation, ensemble hors tabac, base 100 en
2007.
43,8%
43,9%
43,8%
44,0%
43,9%
43,9%
44,7%
44,1%
44,0%
44,3%
44,2%
44,0%
2007
2008
2009
2010
2011
2012
masse salariale sur chiffre d'affaires
masse salariale sur charges d'exploitation
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économique des cliniques et hôpitaux privés évalue ainsi notamment à
1,4
% du chiffre d’affaires, pourcentage stable entre 2011 et 2012, le
recours à l’intérim, concentré sur la filière soignante pour des missions
courtes de 21 heures en moyenne.
Aucune étude récente n’a cependant procédé à une analyse de
l’évolution du coût global du travail et de ses composantes (salaires,
charges et structure d’emplois) dans le secteur lucratif.
C - Des analyses comparatives entre secteurs
insuffisamment développées
Dans un contexte fortement évolutif, des comparaisons entre les
secteurs public et privé mériteraient d’être menées et réactualisées
régulièrement.
Le coût global du travail selon les secteurs public et privé à but
lucratif
585
Une étude réalisée par le cabinet Aumeras à la demande du
ministère de la santé en 2010 conclut à un coût global du travail dans le
secteur à but lucratif inférieur à celui du secteur public. Le poids des
charges serait plus élevé dans le secteur lucratif pour celles pesant sur le
salarié et moins élevé en ce qui concerne les charges patronales. Au total,
le salaire net moyen serait inférieur dans le secteur privé, avec des
différences plus ou moins marquées selon les catégories de personnel.
Cependant, outre le caractère ancien des données prises en compte
(2005-2007), les conclusions de cette étude sont limitées par son champ
restreint au personnel non médical, l’absence de prise en compte des
disparités régionales et sa méthode fondée sur des constats et hypothèses
plus générales appliquées aux différentes catégories professionnelles et
secteurs
586
.
L’évolution des rémunérations selon les secteurs n’est pas
disponible sur les cinq dernières années selon des méthodes homogènes.
La valeur du point de la convention
collective de l’hospitalisation privée a
585. Ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, Mission
tarification à l’activité, «
Évaluation du coût du travail des différents secteurs
hospitaliers à partir des données brutes salariales », rapport final, avril 2010. Étude
réalisée par le cabinet Aumeras portant sur des données 2005 à 2007.
586.
À partir des salaires bruts transmis par la DREES, l’étude calcule les charges sur
la base d’un recensement des charges applicables et d’hypothèses plus générales
(alignement des salaires bruts des personnels contractuels sur ceux des titulaires, taux
de charges moyen par secteur pour des charges variables selon les établissements
notamment).
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néanmoins progressé de façon limitée, à un rythme inférieur au point de
la fonction publique
587
jusqu’au gel de ce dernier.
Le rapport annuel sur la fonction publique, qui est publié par la
direction générale de l’a
dministration et de la fonction publique
588
comporte cependant depuis 2009 chaque année la progression moyenne
des salaires nets comparés entre les secteurs hospitaliers public et privé
lucratif ainsi qu’avec les autres composantes
- État et collectivités
territoriales -
de la fonction publique. L’évolution des salaires moyens est
légèrement inférieure au niveau de l’inflation dans le secteur lucratif,
mais reste néanmoins plus favorable que dans le secteur public
589
.
Une meilleure connaissance comparative des
conditions d’emplois
et de rémunérations entre les secteurs public et privé contribuerait à
permettre de mieux comprendre les trajectoires des personnels durant leur
carrière et leur mobilité intersectorielle
.
. Cette étude devrait intégrer une
approche globale des professionnels de santé, salariés ou libéraux,
exerçant dans les différentes catégories d’établissements de santé.
Le refus des établissements sollicités par la Cour de répondre à ses
demandes ne lui a pas permis pour sa part d’esquisser une tell
e démarche.
Les dépenses de personnel des cliniques sont de fait considérées
par elles comme un enjeu purement interne aux établissements, d’autant
plus que cette composante importante de la dépense globale d’assurance
maladie est soumise à des modes de régulation cloisonnés.
IV
-
Une dépense éclatée au sein de l’ONDAM
A - Des imputations distinctes selon la nature des
dépenses et des activités
L’assurance
-maladie ne distingue pas les professionnels de santé
libéraux selon leur type d’exercice. Les honoraires et p
restations de ceux
587. De juillet 2007 à juillet 2010, la valeur du point augmente de 1,3 % dans le
secteur lucratif et 2,1 % dans le secteur public. Stable dans la fonction publique
depuis lors, elle augmente de 1,2 % en juillet 2012 dans le secteur lucratif. Source
FHP et DGAFP, rapport annuel page 527.
588.
Sur la base de travaux de la DGAFP, de la DREES et de l’INSEE
.
589. Entre 2009 et 2011 (dernière année disponible), le salaire net moyen augmente
de 3,3 % dans le secteur lucratif en euros courants (-0,4 % en euros constants) et
2,4 % dans le secteur public (-1,2 % en euros constants). Source INSEE, SIASP 2009
à 2011, DADS 2009 à 2011, traitements DREES.
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exerçant en clinique sont ainsi compris au sein de l’enveloppe de
dépenses globale déterminée par le sous-objectif « soins de ville » de
l’objectif national de dépenses d’assurance maladie fixé chaque année par
la loi de financement de la sécurité sociale. La détermination de leur
montant et leur mode de régulation s’inscrivent dans le cadre général des
relations conventionnelles entre l’assurance maladie et les professions
libérales de santé
590
.
Les dépenses de masse salariale et de prestations de services liées à
l’emploi de personnels portés par d’autres structures sont pour leur part
incluses dans le sous-objectif «
établissements tarifés à l’activité
» pour
les activités de court séjour, mais aussi au sein du sous-objectif « autres
dépenses » pour les activités de psychiatrie et de soins de suite et de
réadaptation.
La prise en compte du secteur privé à but lucratif dans la construction
de l’ONDAM
L’évolution des charges de personnel des établissements privés à
but lucratif s’appuie sur l’estimation des mesures applicables au secteur
public, le plus souvent étendues au secteur privé lucratif à l’exception de
certaines mesures catégorielles. De façon asymétrique, les mesures
applicables aux seuls salariés du secteur privé ne sont pas prises en compte
dans la construction de l’ONDAM.
Par
exception,
les
prévisions
d’activité
retenues
dans
la
construction de l’ONDAM sont distinguées par secteur. Elles reposent sur
les données d’activité issues du PMSI produites par l’ATIH. Un effort de
product
ivité sur le personnel est intégré dans l’estimation des charges liée
à la hausse d’activité, identique pour les deux secteurs.
590 . Cf. chapitre VIII : les conventions avec les professions libérales de santé :
répondre aux besoins des patients, mieux assurer l’efficience de la dépense.
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L
ES DÉPENSES DE PERSONNEL DES CLINIQUES PRIVÉES
:
UNE CHARGE
POUR L
ASSURANCE MALADIE À MIEUX CONNAÎTRE
461
L’information du Parlement sur les effectifs et les dépenses de
personnel figurant en annexes au projet de loi de financement de la
sécurité
sociale
est
également
présentée
distinctement
selon
les
secteurs
591
mais ne présente pas le même degré de précision dans les deux
cas. Pour les établissements privés à but lucratif, les effectifs présentés
comportent, outre les personnels salariés, les professionnels de santé
libéraux, sans précision des honoraires perçus. Seules les dépenses de
personnel liées aux salariés sont analysées.
B - Une absence préjudiciable de vision globale
Les dépenses de rémunération ne représen
tent qu’un enjeu
minoritaire dans chacune des sous-
enveloppes de l’ONDAM alors que la
seule consolidation des dépenses salariales et des honoraires des
professionnels libéraux intervenant en clinique révèle une charge directe
de l’ordre de 10
Md€ pour l’as
surance maladie, sans préjudice des
activités sous-traitées.
La vision cloisonnée des dépenses de personnel salariés et libéraux
intervenant en cliniques ne permet pas d’avoir une mesure globale de cet
enjeu. Elle n’est pas non plus disponible au niveau r
égional.
Des agences régionales de santé mal outillées
Bien que l’article L.
6161-3 du code de la santé publique
592
impose aux cliniques une obligation de transmission de leurs comptes aux
ARS, ces dernières n’en disposent pas systématiquement. Le décret fix
ant
les modalités de transmission des comptes n’est en effet toujours pas paru
cinq ans après la promulgation de la loi Hôpital, patients, santé et
territoires qui avait prévu cette dernière. Les ARS restent ainsi largement
dans l’incapacité de suivre l’év
olution de la masse salariale des cliniques
de leur ressort.
591.
Indicateur 13 du programme de qualité et d’efficience «
maladie » : évolution des
effectifs et des dépenses de personnel des établissements de santé.
592. « Les comptes certifiés par le commissaire aux comptes des établissements de
santé privés ainsi que ceux de leurs organismes gestionnaires sont transmis (…)
à
l'autorité chargée de la tarification de ces établissements pour les besoins de leur
contrôle. Ils sont transmis à l'agence régionale de santé dans des conditions fixées par
voie réglementaire. Toutes autres pièces comptables nécessaires au contrôle sont
mises à disposition de l'autorité de tarification et, en tant que de besoin,
communiquées par celle-ci aux services chargés de l'analyse économique et
financière ».
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C
OUR DES COMPTES
462
À l’instar du niveau national, le niveau régional est dépourvu de la
vision consolidée des ressources humaines, salariées et libérales,
intervenant dans les cliniques et des dépenses associées.
Plusieurs agences régionales ont toutefois cherché à se doter de
bases de données à partir d’informations collectées auprès des cliniques
privées de manière à pouvoir piloter plus finement cette composante de
l’offre de soins.
Un suivi plus complet et systématique des dépenses de personnel
des cliniques privées apparaît souhaitable au regard notamment d’une
approche comparative plus complète et plus régulière de l’évolution des
composantes de la dépense hospitalière entre les différentes catégories
d’étab
lissements de santé.
La création d’un seul sous
-objectif « ONDAM hospitalier »
retraçant comme recommandé par la Cour
593
les dépenses actuellement
réparties entre les composantes des actuels sous-objectifs « établisse-
ments de santé tarifés à l’activité et «
autres dépenses relatives aux
établissements de santé » apporterait une première clarification. Elle
devrait s’accompagner d’une présentation beaucoup plus complète et
détaillée en annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale
de l’évoluti
on des dépenses de personnel des cliniques privées, au sens
large, en intégrant celle des honoraires perçus par les professionnels
libéraux intervenant en clinique, ce qui faciliterait le pilotage de cette
composante importante du système de soins, favoriserait également les
comparaisons intersectorielles sur des bases objectivées et éclairerait ainsi
la régulation de l’ensemble du dispositif de santé.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
____________
La diversité des modes de gestion des cliniques privées empêche
toute vis
ion consolidée des dépenses de rémunération liées à l’activité des
cliniques privées. Dans le contexte d’organisations juxtaposant des entités
nombreuses et spécialisées chacune dans un aspect de la chaîne de la prise
en charge, qu’il s’agisse des moyens d’exploitation, de l’immobilier, des
fonctions logistiques, ou des activités médico-techniques, la charge
directement supportée par la société d’exploitation varie considérablement
d’un établissement à l’autre.
593. Cour des comptes,
Rapport sur l’application des lois de financement de la
sécurité sociale pour 2013,
chapitre VI,
La fixation de l’enveloppe de dépenses des
établissements de santé dans le cadre de l’ONDAM
,
p. 177-198
,
La Documentation
française, septembre 2013, disponible sur
www.ccomptes.fr
.
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L
ES DÉPENSES DE PERSONNEL DES CLINIQUES PRIVÉES
:
UNE CHARGE
POUR L
ASSURANCE MALADIE À MIEUX CONNAÎTRE
463
Ces difficultés ne font cependant pas obstacle à la possibilité et à la
nécessité de suivre beaucoup plus précisément et régulièrement les
composantes majeures de ces dépenses, qu’il s’agisse de la rémunération
des professionnels libéraux ou de la masse salariale supportée directement
par les cliniques.
Les outils statistiques de l’assurance maladie permettent en effet
d’isoler désormais les honoraires et les dépassements perçus par les
médecins exerçant en cliniques. Cette donnée importante n’est cependant
pas suivie en routine et ne fait pas l’objet d’analyses particulières au
regard de la maîtrise médicalisée de la dépense comme de l’égalité d’accès
aux soins.
L’évolution de la masse salariale est perçue comme un enjeu
purement interne aux établissements. Elle n’est analysée ni dans sa
structure ni dans ses déterminants ni dans son évolution. Les approches
comparatives intersectorielles sur des champs pertinents sont plus que
limitées.
L’éclatement de ces dépenses entre plusieurs sous
-objectifs de
l’ONDAM contribue à faire obstacle à une bonne appréci
ation et à une
vision globale des enjeux qui leur sont liées, sans que le niveau régional ne
dispose d’une appréciation plus complète, pourtant nécessaire au regard
du bon exercice de sa responsabilité d’organisation de l’offre de soins.
La Cour formule les recommandations suivantes :
75.
accompagner la création d’un seul sous
-objectif « ONDAM
hospitalier
» au sein de l’objectif national de dépenses d’assurance
maladie d’une information plus complète et plus détaillée en annexe au
projet de loi de financement de la sécurité sociale sur les différentes
composantes de la dépense de personnel des cliniques privées, y compris
les honoraires (à tarifs opposables et dépassements) perçus par les
professionnels libéraux pour leur activité en cliniques ;
76.
adapter en cons
équence les dispositifs de suivi et d’analyse de ces
dépenses ;
77.
développer sur des champs pertinents et selon une méthodologie
rigoureuse
les
comparaisons
entre
hospitalisation
publique
et
hospitalisation privée à but lucratif ;
78.
publier le décret d’application de l’article L.
6111-3 du code de
la santé publique pour rendre effective l’obligation de transmission par
les cliniques de leurs comptes aux agences régionales de santé.
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